Rome souterraine.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 597.
SUPPLÉMENT.RÉSUMÉ DES DÉCOUVERTES
FAITES DANS LES CATACOMBES DEPUIS 1874.II. LA BASILIQUE DE PÉTRONILLE, LE TOMBEAU DES SS. NÉRÉE ET ACHILLÉE
ET LES SÉPULTURES DES FLAVIENS AU CIMETIÈRE DE DOMITILLE. (1)
Si intéressante que soit la découverte qui vient d'être racontée, elle pâlit auprès de celles dont la première annonce était apportée par l'Osservatore romano du 18 mars 1874. Par la lumière nouvelle qu'elles jettent sur le cimetière auquel est resté attaché le nom impérial des Flaviens, elles rendent plus évidentes et plus certaines les notions que nous avons données, dans le IIe chapitre de cet ouvrage (2), sur la conversion au christianisme de membres de la plus haute aristocratie romaine dès le Ier siècle, et permettent de répondre avec plus d'assurance aux objections récemment formulées à ce sujet.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
Le lecteur sait que la plupart des catacombes romaines ont été formées de plusieurs areae sépulcrales, d'abord isolées, puis peu à peu réunies par des galeries intermédiaires. Déterminer chacun de ces centres historiques, reconnaître les limites dans lesquelles ils avaient été primitivement renfermés, puis suivre le travail des excavations postérieures qui ont relié l'une à l'autre et comme enveloppé dans un commun réseau les areae d'abord indépendantes, telle a été l'œuvre entreprise par le commandeur de Rossi, et dans laquelle son frère l'a si utilement secondé (3). En décrivant,[à partir du lien suivant] pages 103-108, la catacombe située près de la voie Ardéatine, au lieu appelé Tor-Marancia, et désignée maintenant par le nom de Domitille (4), nous avons eu surtout en vue la région de cette catacombe à laquelle donne accès le vestibule monumental découvert en 1865 (5), et qui formait primitivement un hypogée séparé.
Un autre hypogée, relié…
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(1). Bullettino di archeologia cristiana, 1873, p. 160; 1874, p. 5-35, 68-75, 122-125, et tav. I, III, IV, V ; 1875, p. 5-77, et tav. I, II, III, IV, V. — (2) [ à partir du lien suivant ] : Pages 48-56. — (3). Voir, comme exemple, l'histoire du développement du cimetière de Calliste, [ à partir du lien suivant ] : p. 178-191. — (4). Bosio la désigne sous le nom erroné de Calliste, et le plus grand nombre des peintures publiées depuis le siècle de Bosio jusqu'aux travaux de M. de Rossi comme provenant du cimetière de Calliste, appartiennent à celui de Tor-Marancia. — (5). Figure 8, page 106.
Rome Souterraine, p. 597.
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Louis- Admin
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 597-9.
SUPPLÉMENT.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
(SUITE)
Un autre hypogée, relié au premier par le développement postérieur des galeries, avait été entrevu, lors des premières fouilles tentées à Tor-Marancia par la commission d'archéologie sacrée, peu de temps après sa création, mais n'avait pu, à la suite d'un incident regrettable, être régulièrement exploré. Les fouilles entreprises à cette époque mirent à découvert un antique escalier, débouchant dans une large voie cémétériale, qui conduisait à un cubiculum orné de peintures de la première époque de l'art chrétien, mais entièrement dépourvu d'inscriptions, et dans lequel on crut d'abord reconnaître la chambre sépulcrale des saints Nérée et Achillée (1), que les documents topographiques disent enterrés dans le cimetière de Domitille, près de sainte Pétronille, la fille spirituelle de saint Pierre.
Les fouilles ayant été continuées au deuxième étage de la catacombe, on pénétra, en 1854, dans des galeries en partie obstruées, en partie consolidées par des murs, qui indiquaient la proximité d'un édifice incorporé à la nécropole, aux dépens de ses galeries primitives, comme le fut, par exemple, la basilique de Sainte-Agnès, au cimetière de ce nom sur la voie Nomentane (2). On parvint bientôt dans le périmètre d'une basilique semi-souterraine, dont les plafonds et la toiture s'étaient écroulés : deux sarcophages étaient encore en place : quatre colonnes renversées gisaient sur le sol. Quand on eut commencé à déblayer l'édifice, on se trouva à ciel ouvert, le sol de la basilique étant au niveau du deuxième étage souterrain, et l'étage supérieur ayant été détruit pour lui faire place. Tout indiquait que ce sanctuaire avait été construit sur l'emplacement d'un des noyaux primitifs de la catacombe, en l'honneur d'un ou de plusieurs des saints illustres qui y avaient été déposés. Malheureusement les fouilles durent être brusquement suspendues : le propriétaire du sol était intervenu, avait allégué ses droits : on recouvrit à la hâte les quatre colonnes et les deux sarcophages qu'avait éclairés un instant, après tant de siècles, la lumière du jour : le silence et l'obscurité se firent de nouveau sur le monument historique à peine entrevu, et auquel on n'avait pas eu le temps de donner un nom.
Vingt ans plus tard, les fouilles furent reprises, Mgr de Mérode ayant acquis dans ce but, en 1873, la propriété de Tor-Marancia, et ayant mis d'abondantes ressources à la disposition de la commission d'archéologie sacrée. Le noble prélat suivait, avec une sollicitude passionnée, les travaux qui se poursuivaient dans le domaine acheté par lui en l'honneur de la science et de l'Église, et c'est dans une station au milieu de ses chères ruines, sous l'ardent soleil de mai, parmi les malsaines exhalaisons des terres remuées, qu'il contracta le germe du mal inexorable auquel il a succombé. Il avait eu la joie de voir sortir du sol la basilique retrouvée et perdue en 1854, une basilique à trois nefs mesurant dans sa plus grande longueur (1) 30 mètres et 19 mètres dans sa plus grande largeur. A qui avait-elle été dédiée ?...
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(1). Cette attribution, maintenant démontrée inexacte, est reproduite page 104. — (2) Pages 147, 148. — (1). En y comprenant le narthex.
Rome Souterraine, p. 597-9.
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Louis- Admin
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 599-600
SUPPLÉMENT.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
(SUITE)
A qui avait-elle été dédiée ?...
Les documents topographiques mentionnent trois basiliques situées sur la voie Ardéatine : celle construite sur le tombeau des saints Marc et Marcellien (2), celle élevée par le pape Damase pour abriter les sépultures de sa mère, de sa sœur et la sienne propre (3), et enfin celle où reposèrent ensemble sainte Pétronille et saints Nérée et Achillée (4).
La première doit être écartée : Marc et Marcellien versèrent leur sang pour le Christ vers la fin du IIIe siècle, et furent nécessairement enterrés dans une portion de cimetière appartenant à cette époque : or, les tombeaux au milieu desquels a été construit l'édifice récemment découvert remontent à une date bien antérieure. Il ne saurait davantage être question de la basilique de Damase.
Celle que nous étudions est construite dans une catacombe, de manière à englober dans ses fondations et à détruire par le développement de sa partie supérieure toute une portion primitive de cette catacombe : rien, on le sait, n'était plus contraire aux idées et aux pratiques du pape Damase (5), si respectueux de l'intégrité des antiques sépultures, et qui ne voulut même pas reposer avec ses prédécesseurs dans la crypte papale du cimetière de Calliste, « de peur de troubler le repos de leurs cendres sacrées (6). » Une preuve matérielle est venue s'ajouter à ces raisons, qui auraient suffi à persuader quiconque est familier avec l'histoire de Rome souterraine. L'édifice que nous étudions cachait sous son pavage, aujourd'hui entièrement ruiné, d'antiques sarcophages et des monuments sépulcraux construits au second étage de la catacombe ; ses fondations atteignaient même le troisième, et en obstruaient partiellement les voies. Un loculus d'une des voies obstruées par les fondations de la nef de gauche porte encore, gravée à la pointe sur les tuiles qui le ferment, l'inscription suivante :
Or, le quatrième consulat de Valentinien et celui de Neutérius…
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(5). Page 148.
(6). Page 217 et planche XI.
Rome Souterraine, p. 599-600
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Louis- Admin
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 600-1.SUPPLÉMENT.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
(SUITE)
Or, le quatrième consulat de Valentinien et celui de Neutérius se placent en 390. Damase mourut en 384. Six ans après sa mort, la basilique n'était pas construite, puisque l'on inhumait encore à un endroit qu'atteignirent et rendirent impraticable plus tard les fondations d'une de ses nefs. La basilique de Damase étant ainsi éliminée, de même que celle de Marc et de Marcellien, la basilique de Pétronille peut seule être identifiée avec l'édifice récemment découvert.
La date consulaire inscrite sur le fragment d'épitaphe cité plus haut peut, si on la rapproche d'une autre inscription rencontrée au même lieu, servir à déterminer l'époque exacte de la construction du sanctuaire élevé par la dévotion des siècles de paix et de triomphe sur la tombe de contemporains de la persécution de Domitien. En 390, on vient de le voir, les fondements de l'édifice n'avaient pas encore été jetés. En 395, on y enterrait déjà : la pierre d'un tombeau trouvé par M. de Rossi, sous le dallage de la basilique, dans le voisinage de l'autel, et construit après l'abandon des galeries situées dans le périmètre de l'édifice, car il occupe précisément le vide d'un ambulacre, porte, deux fois répétée, la date du consulat d'Amcius Olybrius et de Probinus, qui correspond à l'an 395. La construction de la basilique se place donc entre 390 et 395, sous le pontificat du pape Sirice, le successeur de Damase et son émule dans la dévotion aux lieux consacres par la sépulture des martyrs.
Commencée à la fin du IVe siècle, elle fut restaurée, au commencement du VIe, par le pape Jean Ier (1) : elle entendit, dans les dernières années du même siècle, la voix éloquente de saint Grégoire le Grand déplorer le sort de l'Italie ravagée par les Lombards. C'est dans son enceinte que le plus grand pape des siècles barbares prononça, le jour anniversaire du martyre de Nérée et Achillée, sa XXVIIIe homélie sur l'Evangile : il ne la fit pas lire, suivant sa coutume, par un notarius, mais il l'improvisa lui-même en présence du peuple : et il semble que des ruines du sanctuaire retrouvé s'échappe encore un écho de cette plante mélancolique de Rome humiliée : « Partout, autour de nous, la mort, partout le deuil, partout la désolation : de toutes parts on nous frappe, de toutes parts on nous abreuve d'amertume : le monde autrefois nous séduisait par ses charmes, le monde aujourd'hui est affligé de tant de plaies, que lui-même nous force à nous tourner vers Dieu (1). » M. de Rossi croit reconnaître, sur le stuc même qui recouvrait une niche creusée au fond de l'abside, et disposée évidemment pour recevoir la chaire pontificale (2), un souvenir du jour où Grégoire y prononça l'homélie dont nous avons traduit quelques lignes : un dessin tracé grossièrement sur l'enduit de la niche représente un prêtre vêtu de la casula et assis dans l'attitude de la prédication : peut-être un auditeur enthousiaste du grand pape a-t-il voulu, au lieu même où celui-ci avait siégé, tracer de lui une image naïve.
Vers le même temps…
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(1). Lib. pont., in Joann. I, 57. — (1). (1). S. Greg. Magn., Hom. XXVIII, In Evang., éd. Bened., t. I, p. 1569. — (2).Comme dans la basilique du cimetière de Generosa (p. 137 et suiv.), et dans une petite basilique domestique découverte sur l'Esquilin (Bull, di arch. crist., 1876, p. 50).
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Louis- Admin
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 601-3.
SUPPLÉMENT.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
(SUITE)
Vers le même temps, un prêtre, envoyé par la reine lombarde Théodelinde, visita la basilique, et recueillit dans une ampulla les huiles qui avaient brûlé devant les tombeaux de Nérée, d'Achillée et de Pétronille, en même temps que celles des sanctuaires voisins de Damase et de Marc et Marcellien (3) : M. de Rossi a retrouvé, près de l'emplacement de l'autel, les fragments d'un grand vase de marbre qui avait servi de récipient à cette huile sainte. On sait qu'à l'époque de saint Grégoire le Grand les seules reliques des saints qu'il fût permis de donner aux fidèles étaient les huiles qui avaient brûlé devant leurs tombeaux, les linges qui y avaient touché, quelquefois un peu de poussière du sépulcre ou de terre imbibée du sang des martyrs (4).
Pendant le VIIe siècle, la basilique de Pétronille continua d'être fréquentée par les pèlerins : les itinéraires et les recueils d'inscriptions métriques conservés par les manuscrits de la Gaule, de la Germanie, de la Bretagne, montrent que de nombreux visiteurs venaient alors des contrées les plus lointaines prier dans ce lieu vénéré. Au VIIIe siècle, au moment où la plupart des cimetières suburbains commençaient à être abandonnés, il n'avait point encore perdu son ancien éclat : le pape Grégoire III institua une station annuelle dans la basilique de Pétronille, et lui fit don d'une couronne d'or, d'un calice et d'une patène d'argent, et de divers meubles liturgiques (1).
Le moment approchait, cependant, où les pèlerins allaient en oublier le chemin. En 755, après les profanations et les dévastations qui avaient accompagné le siège de Rome par Astolphe, le pape Paul Ier commença à enlever les corps saints des cimetières et des basiliques qui entouraient la ville éternelle (2). Celui de sainte Pétronille fut transporté, avec le sarcophage qui le contenait, au Vatican. Il est probable que ceux de Nérée et Achillée furent retirés, vers la même époque, de leur sépulture primitive. En 1213, on les déposa dans l'église de Saint-Adrien, sur le forum (3). Où avaient-ils reposé dans l'intervalle? on l'ignore. Au XVIe siècle, les corps de ces deux saints furent l'objet d'une nouvelle et solennelle translation. Le grand annaliste Baronius possédait le titre cardinalice de l'église qui porte leur nom dans l'intérieur de Rome : il obtint que les restes de Nérée et Achillée y fussent transportés : on y joignit les reliques de sainte Domitille. La présence de cette fille des Césars donna à la cérémonie un caractère particulier : le cardinal voulut que le cortège passât sous l'arc de Titus. La Flavia chrétienne de la branche cadette traversant, suivie de ses deux serviteurs martyrs, le monument élevé en l'honneur des victoires des Flaviens païens de la branche aînée sur cette Jérusalem dont le Christ avait prophétisé la destruction : Baronius n'a jamais écrit un chapitre d'histoire plus éloquent que celui-là.
A quelle époque la basilique de Pétronille fut-elle tout à fait abandonnée?...
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(1). Lib. pont. in Greg. III, § 13. — (2). Page 161. — (3). Baronius, ad martyrol., 12 maii ; cf. Acta SS., maii, t. II, p. 15.
Rome Souterraine, p. 601-3.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 603.
SUPPLÉMENT.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
(SUITE)
A quelle époque la basilique de Pétronille fut-elle tout à fait abandonnée? Elle le fut de propos délibéré, car on y reconnaît les traces d'un dépouillement méthodique. Il ne reste plus un débris de l'autel, des bancs presbytéraux, de la chaire, des ambons : tout cela fut sans doute transporté ailleurs. Il en avait été de même pour l'église souterraine de Saint-Clément : à l'époque où elle fut abandonnée, tous les sièges, grilles et balustrades de marbre qui pouvaient être enlevés furent portés dans la basilique supérieure que l'on venait d'élever au-dessus d'elle, et à laquelle ils contribuèrent à donner cet aspect antique qui, jusqu'aux découvertes des vingt dernières années, la firent prendre pour l'édifice primitif (1). En fut-il de même à Sainte-Pétronille, et, à une époque quelconque, construisit-on, dans le voisinage de l'église souterraine de Tor-Marancia, une basilique supérieure dont, jusqu'à ce jour, aucun vestige n'a été retrouvé ?
Un passage du Liber pontificalis, relatif à Léon III, qui régna de 795 à 816, permet de poser cette question. « Ce glorieux pontife, dit son biographe, voyant que l'église des bienheureux martyrs Nérée et Achillée tombait de vétusté et était envahie par les eaux, construisit, près d'elle, et dans un lieu plus élevé, une autre église de vastes proportions et magnifiquement décorée (2). » Ce passage peut s'entendre, soit d'une église construite auprès de la basilique souterraine de la voie Ardéatine, soit de l'église actuelle des saints Nérée et Achillée, sur la via nova, près du forum. Il paraît difficile qu'il s'agisse ici de cette dernière : rien n'indique qu'elle ait été construite au-dessus (in superiore loco) d'une église primitive abandonnée, car elle-même est encore, à l'heure actuelle, au niveau de la voie Appienne de l'époque impériale ; il n'est point probable qu'elle aie jamais été envahie par les eaux. Au contraire, il est fort vraisemblable…
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(1). Voir pages 559 et suiv. — (2). Lib. pont, in Leon. III, § III.
Rome Souterraine, p. 603.
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Louis- Admin
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 604-5.
A suivre: § 2. Le tombeau de Nérée et Achillée.
SUPPLÉMENT.§ 1er. Découverte et histoire de la Basilique.
(SUITE)
Au contraire, il est fort vraisemblable que la basilique cémétériale de la voie Ardéatine ait été inondée à l'époque dont parle le Liber pontificalis : quiconque a visité le second étage de la catacombe de Tor-Marancia sait avec quelle abondances s'y déversent les eaux pluviales des terres environnantes (1). Parlant de notre basilique, l'auteur du texte cité lui donne le nom d'ecclesia beatorum martyrum Nerei et Achillei : il distingue toujours avec le plus grand soin, dans le reste de la vie de Léon III, la nature des églises, appelant titulos celles desservies par des prêtres, diaconias celles desservies par des diacres, ecclesias ou basilicas les églises cémétériales : or, deux fois, il nomme l'église consacrée sur le forum à la mémoire de Nérée et Achillée, et l'appelle diaconia : il est donc probable que, dans le texte relatif à l'abandon d'une ancienne église et à la construction d'une église neuve dans un lieu plus élevé, il a entendu, employant le mot ecclesia, parler de la basilique souterraine élevée sur la tombe de Pétronille et des deux martyrs près de la voie Ardéatine (2).
Elle n'est souterraine qu'en partie, construite à la fois au-dessus et au-dessous du terrain environnant. Ses murs descendent jusqu'à sept mètres en contre-bas du sol naturel : leur hauteur totale dut être beaucoup plus grande, car c'est nécessairement dans la partie de l'édifice qui émergeait du sol que furent percées les fenêtres par lesquelles le vaisseau était éclairé. L'église se composait de trois parties, le vestibule ou narthex, les nefs, l'abside ou presbyterium. Le vestibule, auquel on accédait, à gauche, par un escalier communiquant avec le dehors, et paraissant avoir été ruiné intentionnellement au VIII e siècle, était, comme tout l'édifice, de forme très-irrégulière : un mur le divisait en deux parties inégales : celle de droite semble avoir été une salle à usage de sacristie. Trois portes conduisaient du narthex aux trois nefs de la basilique. Cette partie principale de l'édifice est d'une irrégularité extraordinaire : la basilique a, en largeur, 16 mètres 85 centimètres à l'entrée, et 19 mètres environ à l'origine du presbyterium : la construction va en s'élargissant, les deux murs latéraux n'étant point parallèles, et celui de droite subissant, vers la moitié environ de sa longueur, une déviation très-prononcée. Les deux nefs latérales ont, du reste, à peu près la même largeur à chacune de leurs extrémités : l'évasement graduel de la construction a donc lieu surtout au profit de la nef du milieu, qui mesure 8 mètres 12 centimètres de largeur à l'entrée et 10 mètres 25 centimètres environ au devant du massif de maçonnerie dans lequel le presbyterium inscrit son ovale. La séparation de la grande nef et des nefs latérales consiste, de chaque côté, en un pilier de maçonnerie qui fait saillie sur le mur du narthex, puis en une file de quatre colonnes, et enfin en un pilier saillant à l'entrée du presbyterium. Les colonnes sont unies, en marbre cipollin (à l'exception d'une colonne cannelée en marbre blanc), de dimensions et de hauteurs différentes : les chapiteaux, presque tous corinthiens, sont également de mesures disparates : ces colonnes, évidemment, ne supportaient pas un entablement, lequel eût manqué d'aplomb, mais une suite d'arceaux de briques, sur lesquels s'appuyaient les voûtes ou la charpente de la toiture. L'abside ou presbyterium participe de l'irrégularité de tout l'édifice : il incline légèrement sa courbure vers la droite : son ovale a 6 mètres 25 centimètres de largeur environ sur 4 mètres 90 centimètres de profondeur : la niche sous laquelle étais placée la cathedra épiscopale n'est pas tout à fait au fond, mais un peu infléchie vers la droite (1).
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(1). J'ai été obligé, visitant cette catacombe en 1868, de franchir, sur des pierres que le guide posait de place en place, des galeries inondées. — (2). M. Michel de Rossi pense qu'après avoir été abandonnée, la basilique de Pétroni le fut ruinée par un tremblement de terre, probablement par celui qui, en 897, causa tant de dommages à Rome et en particulier à la basilique de S. Jean de Latran, laquelle, au point de vue géologico-volcanique, est située sur une ligne identique avec celle de la basilique de Pétronille. Voir un article du savant géologue dans le Bullettino del Vulcanismo italiano, avril et mai 1874, p. 63-65, cité dans le Bullett. di arch. crist., 1874, p. 74. — (1). Voir, pour cette description et ces mesures, les remarquables travaux de M. Louis Lefort sur la basilique de Pétronille, dans la Revue archéologique , juin 1874, p. 372, août 1874, p. 128 ; juillet 1875, p. 39 ; et dans le Correspondant, 25 avril 1875, p. 360.
Rome Souterraine, p. 604-5.
A suivre: § 2. Le tombeau de Nérée et Achillée.
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SUPPLÉMENT.§ 2. Le tombeau de Nérée et Achillée.
Si la basilique contenait quelque memoria des saints en l'honneur desquels elle fut construite, on en devait retrouver la trace dans l'abside, là où s'élevait l'autel et se célébrait le saint sacrifice. Le tombeau de Nérée et Achillée y était certainement placé : Isti sancti ad quorum tumbam consistimus, disait saint Grégoire le Grand, alors qu'assis dans sa chaire, sous la niche pratiquée au fond de l'abside, il prononçait son homélie. Le tombeau de Pétronille ne pouvait non plus être éloigné de ce lieu. M. de Rossi eut le bonheur de retrouver une inscription et deux colonnes ayant appartenu à la sépulture de Nérée et Achillée, et de reconnaître, sinon l'emplacement même, au moins un indice certain de l'emplacement de celle de Pétronille.
Une énorme pierre, que le hasard avait précipitée dans le trou d'un tombeau, sous le dallage de l'abside, fut d'abord découverte : elle contenait la partie droite de l'éloge métrique de Nérée et Achillée : plus tard, le commencement des quatre dernières lignes de la partie gauche fut également retrouvé. M. de Rossi reconnut immédiatement le petit poëme en huit vers composé par Damase en l'honneur des deux martyrs, et conservé par quatre recueils épigraphiques, dont un, le Codex palatinus d'Heidelberg, le reproduit avec cette note : In sepulcro Nerei et Achillei via Appia, et sous ce titre : Nereus et Achilleus martyres. Voici ces vers : les lettres capitales indiquent les mots ou fragments de mots qui se lisent sur les deux marbres découverts par M. de Rossi :
Les lettres conservées par les deux fragments, grandes, monumentales, profondément et régulièrement entaillées, ne peuvent appartenir à une de ces copies qui, au VIe siècle, remplacèrent les originaux de plusieurs inscriptions détruites par les Goths (1) : elles rappellent les variantes que le pape Sirice fit subir à l'écriture damasienne, et dont nous avons déjà signalé un exemple dans la crypte de Saint-Corneille au cimetière de Calliste (1). Ce pape, successeur de Damase, construisit, on l'a vu, la basilique de Pétronille : il est probable que l'inscription composée par son prédécesseur pour être placée sur la tombe des deux martyrs n'avait point encore été gravée quand celui-ci mourut, et le fut par les ordres de Sirice.
Le tombeau de Nérée et Achillée ne pouvait être que…
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(1). Pages 158, 250. — (1). Page 266.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 607-8.
SUPPLÉMENT.§ 2. Le tombeau de Nérée et Achillée.
(SUITE)
Le tombeau de Nérée et Achillée ne pouvait être que sous l'autel, au centre de l'abside. En effet, cette place d'honneur n'eût pu être occupée par le sépulcre de Pétronille, qui n'avait pas versé son sang pour la foi. Au IVe siècle, des martyrs seuls avaient le droit de reposer sous l'autel (2). Cet autel devait être, comme on le voit dans toutes les anciennes basiliques, surmonté d'un dais sculpté, ou ciborium, que supportaient des colonnes. Deux de ces colonnes ont été retrouvées au commencement de 1875, et leurs fûts arrondis offrent la représentation sculptée d'une scène de martyre. J'ai dit ailleurs combien les représentations de cette nature sont rares dans les catacombes : elles n'apparaissent guère avant le IVe siècle (3). Elles sont surtout précieuses quand le nom du martyr est écrit au-dessus. Il en est ainsi de nos colonnes : l'une est ornée d'un bas-relief représentant un homme vêtu de la tunique et du pallium, les mains attachées derrière le dos : il est vu de profil, appuyé contre une potence en forme de croix, au-dessus de laquelle pend une couronne. Derrière lui se tient un soldat vêtu d'une tunique et d'une chlamyde : il brandit et semble diriger vers la tête de sa victime une courte épée. Au-dessus de cette scène est écrit le nom du martyr, ACILLEVS (4). Il ne reste de l'autre colonne qu'un très-mince tronçon où l'on reconnaît la partie inférieure du bas-relief qui faisait pendant à celui-ci : les pieds des personnages ont la même direction et le même mouvement que dans la première scène, et il est évident qu'un sujet tout semblable y était figuré : c'était probablement la représentation du martyre de Nérée, et si M. de Rossi, comme il l'espère, parvient à retrouver le reste du fut, il pourra lire sans doute, au-dessus des personnages complétés, le mot NEREVS.
On peut maintenant se faire une idée de l'autel-sépulcre ou confessio des martyrs Nérée et Achillée, occupant le centre du presbytarium, devant la chaire pontificale. Leur sépulture primitive était-elle là, ou leurs corps furent-ils, de quelque autre partie de la catacombe, transportés à cette place lors de la fondation de la basilique? II est difficile de le dire, bien qu'il paraisse vraisemblable qu'une construction irrégulière, de l'époque constantinienne, qui fut incorporée plus tard à la basilique, et dont on a retrouvé les murailles à l'extrémité de la nef droite (1), se prolongeait originairement jusqu'à l'endroit occupé ensuite par le presbyterium, et abritait, là, le tombeau primitif des deux martyrs: dans cette hypothèse, celui-ci n'aurait pas été déplacé lors de l'érection par le pape Sirice d'un édifice plus orné et plus vaste.
On possède sur ces héros du christianisme…
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(2). S. Martin de Tours est, dit-on, le premier saint non martyr dont la tombe ait été transformée en autel. Voir note E, p. 555. — (3). Page 372. — (4). Acilleus pour Achilleus n'est pas rare. On le voit écrit ainsi sur l'étiquette de l'ampulla et dans l'index des huiles de Monza (p. 601, note 3), dans une inscription du Ve siècle, publiée par Boldetti, et sur un vetro païen, où l'Achille homérique est désigné par le mot ACILLIS. Bullett. di arch. crist., 1875, p. 9. — (1). Cette construction est marquée en noir et désignée par les lettres A dans le plan publié par M. de Rossi, Bullett. 1874, tav. IV, V. Elle est la cause de l'évasement que subit en cet endroit la basilique, sa muraille de droite ayant été reliée a celle de l’édifice constantinien, dont elle suit la direction oblique.
Rome Souterraine, p. 607-8.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 608-10.
A suivre : § 3. La sépulture de Pétronille.
SUPPLÉMENT.§ 2. Le tombeau de Nérée et Achillée.
(SUITE)
On possède sur ces héros du christianisme deux documents qui s'éclairent et se complètent l'un par l'autre. Le premier est l'éloge métrique que nous avons cité, et qui a la gravité et l'autorité de l'histoire; le second, connu sous le nom d'Actes de Nérée et Achillée, paraît tout à fait légendaire dans la forme, mais offre cependant un fond historique, car toutes les indications topographiques qui s'y rencontrent ont été vérifiées et confirmées par les découvertes modernes.
Si l'on interroge le poëme damasien, que voit-on? qu'ils firent partie d'une militia, servirent, par crainte, la tyrannie de Néron, puis, éclairés par la grâce, abandonnèrent la situation qu'ils occupaient, renoncèrent aux armes et aux récompenses militaires dont ils avaient été honorés, et confessèrent le Christ. A quelle militia appartinrent-ils? Les soldats romains n'étaient ni geôliers, ni tortureurs, ni bourreaux : il semble que le saevum officium que remplissaient Nérée et Achillée n'était pas le service militaire proprement dit. Peut-être étaient-ils des apparitores, c'est-à-dire des membres de ce corps d'exécuteurs des décisions des magistrats criminels, auxquels font si souvent allusion les Actes des Martyrs (2). Cependant des apparitores ne pouvaient prétendre à ces dona militaria dont on voit que Nérée et Achillée avaient été honorés, et qui étaient la récompense du courage guerrier.
M. de Rossi conjecture que les deux saints avaient appartenu, comme officiers ou soldats, à la milice prétorienne. Sous le règne de Néron, auquel se rapporte la première partie de leur vie (leurs Actes les disent convertis par saint Pierre) [1], les prétoriens furent souvent employés à l'exécution des cruautés du prince : Juvénal montre toute la cohorte prétorienne, tota cohors, occupée, jussu Neronis, à investir les palais des riches proscrits [2]. Dès les règnes précédents il en avait été ainsi : Josèphe met dans la bouche de Chéréas haranguant les prétoriens des plaintes indignées contre Caligula, qui de soldats les avait changés en bourreaux [3]. Peut-être Nérée et Achillée furent-ils mêlés, en cette qualité, aux cruautés du tyran : les quartiers des cohortes prétoriennes portaient à Rome le nom de castra, que semble rappeler Damase quand il dit, en parlant de la fuite des deux soldats convertis : ducis impia castra relinquunt.
Telle est la lueur historique, assez confuse encore, jetée sur l'histoire de ces martyrs par l'inscription damasienne. Mais ici surgit une difficulté. Les Actes de Nérée et Achillée indiquent les rapports ayant existé entre eux et Flavia Domitilla, nièce du consul Clemens : ils sont désignés comme ses eunuchi cubicularii. Cela est inconciliable avec le texte de Damase, qui en fait des soldats. Ce texte est certainement historique : comment les Actes ont-ils pu altérer à ce point la vérité? Il est probable que, après leur conversion, Nérée et Achillée obtinrent un office quelconque dans la maison de Flavia Domitilla. Or, les Actes que nous possédons ont été traduits du grec en latin par un écrivain du Ve ou VIe siècle. L'original grec (qui doit lui-même avoir amplifié et singulièrement altéré des documents primitifs auxquels on est redevable de la part très-importante de vérité qu'il contient) est sans doute l'œuvre, aujourd'hui perdue, d'un auteur qui transporta dans la maison d'une princesse du Ier siècle les usages et les mœurs qu'il voyait dans la cour byzantine de son époque : et comme les eunuques y étaient investis d'une grande puissance, il crut ne pouvoir mieux exprimer que par ce titre le poste important et l'influence considérable que possédaient les deux chrétiens dans la maison et sur l'esprit de Domitille.
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(2). Edm. Le Blant, Recherches sur les bourreaux du Christ, Arras, 1873. — [1]. C'est par oubli de cette circonstance que j'ai, page 105, note, nommé Domitien au lieu de Néron : c'est également par erreur que, dans les deux vers de l'inscription cité» dans cette note, la version almum officium, qui est donnée par un seul manuscrit, a été préférée à saryum officium, que donnent deux manuscrits. — [2]. Juvenal, Sat. X, 15-18. — [3]. Josèphe, Ant. jud., XIX, 1, 6.
Rome Souterraine, p. 608-10.
A suivre : § 3. La sépulture de Pétronille.
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Rome Souterraine, p. 610-11.SUPPLÉMENT.§3. La sépulture de Pétronille.
En nous étendant avec quelques détails sur la découverte du tombeau de Nérée et Achillée, nous avons légèrement interverti l'ordre chronologique: elle eut lieu au commencement de 1875, tandis que celle relative à la sépulture de Pétronille avait été annoncée dès le mois de décembre 1874 (1) .
Le lecteur se rappelle (2) qu'Aurélia Petronilla, descendant peut-être par sa mère de T. Flavius Petro, qui fut la souche de la gens Flavia, avait été convertie au christianisme par l'apôtre saint Pierre, et enterrée dans le domaine de Tor-Marancia : c'est près de son tombeau, disent les Actes de Nérée et Achillée, que furent déposés les cubicularii de Flavia Domitilla, et les documents topographiques nomment toujours à la suite l'un de l'autre ces deux groupes de sépultures.
Donc, même en l'absence de tout indice matériel, il était permis d'affirmer que la fille spirituelle de saint Pierre avait reposé aux environs de l'abside qui contenait le tombeau des deux martyrs. Une curieuse peinture, trouvée derrière la basilique, est venue rendre plus claire encore cette conclusion.
A droite du presbyterium, près de la niche où était placée la chaire épiscopale, s'ouvre un passage étroit, assez irrégulièrement taillé, long de 2 mètres, large de 80 centimètres à son ouverture dans l'abside, et s'évasant jusqu'à atteindre une largeur de 2 mètres au point où il débouche dans la catacombe. Sa voûte est revêtue de stuc blanc et décorée de rosaces rouges, qui peuvent appartenir au ve ou VIesiècle. Il mettait le chevet de la basilique en communication directe et avec la campagne romaine, au moyen d'un escalier qui venait aboutir dans une galerie voisine, et avec les autres parties de la catacombe, notamment avec l'hypogée décrit pages 105 et suivantes , au moyen de voies souterraines appartenant à la dernière période des excavations. Ce passage est prolongé par une galerie qui s'ouvre, à gauche, sur deux cubicula: l'un, situé immédiatement derrière l'abside de la basilique, dont il est séparé seulement par l'épaisseur de la muraille, n'offre aucune particularité remarquable; le second est occupé, au fond, par un arcosolium, dont l'ouverture fut, à une certaine époque, fermée par une muraille, devant laquelle un nouveau tombeau fut construit, alors que, évidemment, il n'y avait plus de place disponible dans la chambre. Quel motif de dévotion porta les fidèles à y multiplier ainsi les lieux de sépulture? Une fresque peinte sur la muraille qui ferme l'arcosolium le fait comprendre. Elle représente une matrone debout dans un jardin, derrière laquelle se tient une jeune femme qui semble l'introduire et lui faire accueil. Près de la tête de la matrone, qui a les bras étendus en orante, se lisent ces paroles : …
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(1). Osservatore romano , 29 décembre 1874. — (2).Page 54.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 611-12
A suivre : § 4. Les inscriptions des Flaviens.…
SUPPLÉMENT.§3. La sépulture de Pétronille.(SUITE)
…Elle représente une matrone debout dans un jardin, derrière laquelle se tient une jeune femme qui semble l'introduire et lui faire accueil. Près de la tête de la matrone, qui a les bras étendus en orante, se lisent ces paroles :
Le sujet est évidemment la matrone Veneranda reçue dans le jardin du paradis par sainte Pétronille, près du tombeau de laquelle elle avait été enterrée (1). Cette fresque appartient au IVe siècle, et M. de Rossi croit pouvoir l'attribuer à sa première moitié. L'omission du préfixe Sancta devant Petronella est un indice d'antiquité. Le titre de martyr a été ajouté ici, contrairement à la vérité historique, soit par ignorance, soit pour faire un plus grand honneur à la sainte: il existe d'assez nombreux exemples d'une erreur semblable (2).
Le cubiculum dans lequel fut enterrée Veneranda était certainement très-rapproché de la sépulture de sainte Pétronille. M. de Rossi conjecture que le sarcophage où reposait celle-ci, et qui fut transporté au Vatican en 755, était placé dans le passage voûté ouvert à droite de l'abside, ce qui permettait de le vénérer et de l'intérieur de la basilique et des galeries situées derrière elle (1). Par la date de leur construction, comme par les nombreux graffites qui se lisent sur leurs murailles, ces galeries paraissent avoir servi de chemin, après le IVe siècle, à la foule pressée des pèlerins : on y accédait par l'escalier dont j'ai parlé, construit lui-même sur remplacement d'un antique ambulacre, et dont les marches ont été usées par de nombreux visiteurs.
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(1). Sur la dévotion qui portait les fidèles des premiers siècles à se faire enterrer près des tombeaux des saints, et sur la confiance qu'ils mettaient dans l'intercession de ceux-ci, il faut ajouter à ce que nous avons dit pages 119, 154, 551, une admirable dissertation de M. de Rossi, trop longue pour être résumée ici, dans le Bullett. di arch. crist., 1875, p. 18-32. — (2). Sainte Pétronille est qualifiée de martyre dans la vie de Léon III au Liber pont., § 110; dans les anciens itinéraires, le même titre est donné à sainte Pudentienne, à S. Cyriaque, qui ne furent point martyrisés, et même à des papes postérieurs au triomphe de l'Église, comme Marc, Jules, Damase, Innocent, Boniface. — (1). M. Lefort s'est demandé si le sarcophage de Pétronille n'avait pas plutôt été vénéré dans la partie conservée de l'édifice constantinien, qui fermait la nef droite, et formait à son extrémité comme une salle séparée, a laquelle on accédait de la catacombe par une galerie, et de la grande nef par l'espace laisse libre entre sa dernière colonne et l'ante du presbyterium. Dans cette hypothèse, l'édifice du commencement du IVe siècle, qui fut plus tard englobé dans la basilique de Sirice, se serait composé de deux salles contigües, l'une ayant renfermé le tombeau de Nérée et Achillée, et plus tard ayant été détruite pour faire place à l'extrémité de la grande nef et au presbyterium, l'autre ayant renferme le tombeau de Pétronille, et ayant été conservée à l'extrémité de la nef latérale droite. Revue archéologique, juillet 1875, p. 45.
Rome Souterraine, p. 611-12
A suivre : § 4. Les inscriptions des Flaviens.…
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SUPPLÉMENT.§4. Les inscriptions des Flaviens.
Les découvertes que nous venons de raconter ne sont pas les seules qu'avait espérées M. de Rossi en reprenant, après vingt ans d'interruption, les fouilles entreprises dans cette partie de la catacombe de Domitille. On se souvient que lorsque, en 1865, l'illustre archéologue eut mis au jour, à Tor-Marancia, le vestibule monumental qui donne accès dans une autre partie de la catacombe, il crut y reconnaître l'entrée du tombeau d'un Flavien chrétien: et l'on n'a pas oublié les considérations si intéressantes et si neuves qu'il a émises, à ce propos, sur la légalité des sépultures chrétiennes primitives (2). Une précieuse trouvaille, faite parmi les innombrables débris de marbres qui encombraient l'aire de la basilique et les galeries environnantes, permet sinon encore d'affirmer, au moins de conjecturer que l'hypogée dans lequel furent enterrés Pétronille, Nérée et Achillée, avait, lui aussi, une entrée distincte et publique : M. de Rossi a découvert un fragment de marbre, qu'il suppose avoir fait partie du titulus qui en surmontait la porte; on y lit ces lettres :......RVM
.....ORVM
au-dessous desquelles est gravée l'ancre cruciforme, un des plus vieux symboles chrétiens (1). Par leur paléographie, elles appartiennent certainement à une époque plus ancienne que les inscriptions que l'on trouve communément dans les catacombes. N'étaient les apices un peu exagérés de ces lettres, le consciencieux archéologue serait tenté de les croire contemporaines de la fin du Ier siècle. Qui sait si un second fragment du même marbre ne permettra pas de compléter l'inscription, et si l'on ne lira pas alors ce précieux titulus:SEPVLCRVM FLAVIORVM ?
La place occupée, dans la partie inférieure du marbre, par l'ancre, qui marque certainement le milieu de sa longueur, autorise cette conjecture, car le nombre des lettres qu'il faudrait, dans l'état actuel, ajouter à l'inscription incomplète pour rétablir la symétrie, s'accorderait sans difficulté avec la leçon proposée. Derrière l'abside de la basilique a été en outre trouvé un cippe sépulcral, qui du sol extérieur avait été précipité au second étage de la catacombe : il porte sur ses deux faces cette inscription: LOCVS SACER SACRILEGE CAVE MALV (m). Peut-être était-il placé à l'entrée extérieure de l'hypogée, pour avertir les sacrilèges du caractère religieux que la loi donnait à ce lieu, et des peines qui en châtieraient la violation : rien ne s'opposait à ce qu'une semblable menace fût inscrite sur une sépulture chrétienne.
L'ordonnance primitive de l'hypogée où reposèrent Pétronille et les deux martyrs fut bouleversée, à la fin du IVe siècle, par la construction de la basilique. Il est difficile d'en rétablir le plan; mais celles des anciennes galeries qui ne furent pas alors détruites paraissent remonter à une date très-reculée : elles sont d'une grande élévation, leur sol ayant été abaissé alors qu'elles étaient déjà remplies de tombeaux, afin de mettre la partie inférieure de leurs murailles en état de recevoir de nouvelles sépultures (1). M. de Rossi établit, par l'examen minutieux d'inscriptions découvertes dans ces galeries et dans divers cubicula auxquels elles donnaient accès, que leurs plus anciens loculi, ceux antérieurs à l'abaissement systématique du sol, appartiennent au commencement du IIe siècle, c'est-à-dire à une époque voisine de celle où moururent Nérée, Achillée et Pétronille, tandis que les plus récents, ceux creusés dans la partie inférieure des murailles, ne dépassent pas les premières années du IIIe siècle.
A cette dernière date appartient une tablette…
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(2). Voir page 110, et surtout notre livre I, ch. III [ et les messages qui le suivent (N.D.L.R.) ], p. 63-84. — (1). Sur la date du symbole de l'ancre, voir pages 295, 296. — (1).Voir page 488…
Rome Souterraine, p. 612-14.
Dernière édition par Louis le Sam 26 Sep - 14:29, édité 1 fois (Raison : Correction d'un lien.)
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Rome Souterraine, p. 614-15
SUPPLÉMENT.§4. Les inscriptions des Flaviens.
(SUITE)
A cette dernière date appartient une tablette de marbre qui fermait un loculus du niveau inférieur d'une de ces galeries, et sur laquelle est gravé un monogramme dans lequel on reconnaît facilement le très-rare cognomen FLAVILLA, indiquant une personne ayant eu une relation quelconque, soit de parenté, soit de clientèle, avec les Flavii. Un peu plus loin fut trouvée une énorme table de marbre ayant servi probablement à clore un très-grand loculus du niveau supérieur : on y lit cette inscription grecque, en lettres qui peuvent être du IIe siècle (2) :Flavius Sabinus et Titiana, frère et sœur.
Plusieurs Flavii Titiani vécurent au IIe siècle, et M. Hübner, en publiant des inscriptions relatives à ces personnages considérables, avait conjecturé qu'ils appartenaient de quelque manière à la famille impériale des Flaviens (3). L'épitaphe grecque découverte dans le cimetière des Flaviens chrétiens vient fortifier cette conjecture. Le frère et la sœur enterrés dans cet hypogée de famille descendent évidemment de Titus Flavius Sabinus, frère de Vespasien, père du consul Titus Flavius Clemens, qui confessa le Christ, en même temps que sa femme Flavia Domitilla, l'an 95. On se rappelle que les deux fils de Clemens et de Domitilla avaient été adoptés par Domitien, qui les destinait au trône et changea leurs noms en ceux de Vespasien et Domitien. Après le meurtre de cet empereur et la chute de la dynastie des Flaviens, les deux jeunes princes, rendus à la vie privée, reprirent sans doute leurs anciens noms : qui sait, dit M. de Rossi, si le Flavius Sabinus enterré avec sa sœur dans ce vaste et antique loculus n'est pas soit l'un d'eux, soit un de leurs descendants ?
Le nombre des fragments épigraphiques trouvés dans les ruines de la basilique depuis le commencement des fouilles se montait, en 1875, à plus de sept cents. Je ne veux plus citer que deux des inscriptions publiées par M. de Rossi…
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(2). M. de Rossi les croit de la même main que l'inscription d'Uranie, fille d'Hérode, au cimetière de Prétextat; voir p. 116. — (3). Corpus inscr. lat., t. II, p. 553.
Rome Souterraine, p. 614-15
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A suivre : § 5. Le christianisme de Flavius Clemens et l'existence de Flavia Domitilla la jeune.
SUPPLÉMENT.§4. Les inscriptions des Flaviens.(SUITE)
Le nombre des fragments épigraphiques trouvés dans les ruines de la basilique depuis le commencement des fouilles se montait, en 1875, à plus de sept cents. Je ne veux plus citer que deux des inscriptions publiées par M. de Rossi dans son Bullettino. L'une, qui peut se placer entre le IVe et le VIe siècle, a été découverte en 1854 : elle constate qu'Aurelïus Victorinus a vendu un emplacement sépulcral à Aurelius Laurentius et que cette vente a été transcrite par Aurelius Constantius. A cette époque, les fossores des catacombes étaient en possession du droit de vendre les concessions funéraires (1) ; il semble que, par exception, le contrat dont il s'agit ici soit intervenu entre les membres d'une même famille: peut-être les membres de la gens Aurélia conservèrent-ils, pendant de longs siècles, le privilège d'être enterrés dans le lieu consacré par la sépulture de leur illustre parente Aurélia Petronilla.
L'autre inscription est l'épitaphe de Pascentius lector de Fasciola, à laquelle on peut joindre celle mutilée d'un certain Basilius, ayant appartenu, en qualité de prêtre ou de ministre inférieur, au même titulus de Fasciola. L'église des SS. Nérée et Achillée sur la via nova, près des thermes de Caracalla, était connue sous ce nom, dont l'origine est assez obscure : si l'on se rappelle que, à partir du IIIe siècle, chaque titulus ou paroisse de Rome possédait un cimetière suburbain soumis à sa juridiction (1) , on verra avec intérêt que le cimetière de Domitille, où étaient enterrés Nérée et Achillée, ait été assigné à l'église urbaine qui portait le vocable de ces deux saints : on y a trouvé, outre l'épitaphe de deux clercs de cette église, l'inscription funéraire d'une marchande de la via nova et d'un capsarius des thermes Antonins, c'est-à-dire de personnes appartenant à la circonscription paroissiale de l'église urbaine de Nérée et Achillée.
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(1). Page 153,et les fils suivants (N.D.L.R.) . — (1) Pages 140-142, et les fils suivants (N.D.L.R.) .
Rome Souterraine, p. 615-16.
A suivre : § 5. Le christianisme de Flavius Clemens et l'existence de Flavia Domitilla la jeune.
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Re: Rome souterraine.
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SUPPLÉMENT.§ 5. Le christianisme de Flavius Clemens et
l'existence de Flavia Domitilla la jeune.
Quand on vient de parcourir le cimetière de Domitille, tout rempli de la mémoire des Flaviens chrétiens, on comprend difficilement que des critiques distingués, mais enclins à pousser la prudence historique jusqu'au scepticisme, aient pu à la fois contester le christianisme de Clemens et de sa femme Domitilla, et révoquer en doute l'existence de la seconde Domitilla, nièce de Clemens, à laquelle la tradition romaine attribue la fondation de la catacombe qui porte son nom. Telle est la thèse soutenue par M. Aubé dans un chapitre de sa récente Histoire des persécutions de l'Église jusqu'à la fin des Antonins. Nous ne pouvons terminer cette étude sans en dire quelques mots.
1° Le consul Clemens et sa femme Domitilla professèrent-ils la religion chrétienne et furent-ils condamnés comme chrétiens? Le passage de Dion, ou de son abréviateur Xiphilin, d'où l'on a induit ce fait, est ainsi conçu: « Dans la même année (95), Domitien mit à mort, avec beaucoup d'autres, Flavius Clemens, alors consul, son propre cousin, et le mari de Flavia Domitilla, sa parente. Tous deux furent condamnés pour crime d'athéisme. De ce chef on condamna un grand nombre d'autres qui avaient adopté les mœurs des Juifs : les uns furent mis à mort, les autres punis de la confiscation. Quant à Domitilla, elle fut seulement reléguée dans l'île de Pandataria (2). » Malgré la contexture un peu compliquée de cette phrase, sa signification est claire : Clemens, Domitilla et beaucoup d'autres personnes, qui avaient adopté les mœurs des Juifs, furent déclarés coupables d'athéisme, et punis de diverses peines. Cela veut-il dire qu'ils aient été chrétiens ? Oui, s'il est vrai qu'au Ier siècle les chrétiens aient été accusés, et seuls accusés, d'athéisme. Or, ceci n'est pas douteux. Saint Justin, qui écrivait sa première Apologie cinquante ans environ après la mort de Clemens, s'exprime ainsi : « On nous appelle athées : et nous avouons que nous le sommes, s'il s'agit des dieux inventés, mais non s'il s'agit du vrai Dieu (1). »
Quand on voulait flatter la foule ennemie des chrétiens, c'est encore ce mot qu'on employait : « Parlant de ce qu'il ignore, Crescent, dit encore Justin, appelle les chrétiens athées et impies, pour plaire à une populace égarée (2). « Athénagore, qui écrit sous Marc-Aurèle, énumère les crimes que l'opinion reprochait aux chrétiens, et met au premier rang l'athéisme (3). Le païen Lucien, le chrétien Minutius Félix, s'expriment de même (4). C'était contre eux, à la fois, le cri populaire (5) et l'accusation officielle : elle n'avait aucun rapport avec le vague reproche d'impiété que les délateurs jetaient à la face de ceux qu'ils voulaient noircir auprès du prince, et que rappelle à ce propos M. Aube (6): ce n'est pas, en effet, d'impiété au sens politique du mot, mais d'athéisme,que parle Dion : et l'on cherche vainement contre qui, sinon contre les chrétiens, fut jamais, dans le monde romain, portée une semblable accusation. A qui, sinon à eux, pouvait-on dire : « Vous n'avez ni statues des dieux ni autels sur lesquels vous répandiez le sang des victimes (7)? » Toutes les religions païennes adoraient des simulacres, le sacrifice sanglant faisait partie de la loi des Juifs : seuls les chrétiens pouvaient paraître, aux yeux de leurs ennemis, n'avoir ni dieu ni culte. Quand donc on voit accusées d'athéisme des personnes qui avaient abandonné les mœurs païennes pour embrasser un genre de vie qui se rapprochait de celui des Juifs, il paraît impossible, dirons-nous avec Gibbon, d'admettre qu'il s'agisse d'autres que de chrétiens ( 8 ).
Suétone, il est vrai, ne nomme pas le christianisme parmi les causes de la mort de Clemens ; mais il n'en nomme aucune. Il dit seulement que Domitien fît périr celui-ci sur un très-mince soupçon, ex tenuissima suspicione (1). Suétone put, en effet, considérer comme très-futile une accusation de cette nature, comme très-futiles surtout les craintes que le changement de religion de Clemens excita peut-être dans l'esprit de Domitien. Suétone, d'ailleurs, si curieux de songes, de présages, de superstitions de toute espèce, est absolument indifférent aux vraies questions religieuses ; il ne semble pas s'apercevoir qu'au moment où il écrit la conscience humaine est agitée jusque dans ses fondements ; il ignore l'histoire du Christ, dont il fait un vulgaire agitateur juif ayant vécu à Rome sous Claude : quoi d'étonnant s'il n'a pas pris soin de noter, autrement que par un mot vague et peut-être dédaigneux, la véritable cause de la mort de Clemens ?
2° La question soulevée à propos de l'existence d'une seconde Domitilla chrétienne est plus délicate…
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(1) Pages 140-142, et les fils suivants (N.D.L.R.) . — (2) Dion Cassius, Hist. LXVII, 13. — (1). S. Justin, Apolog., I,6, — (2). Ibid., II, 3. — (3). Athénagore, Légat. pro Christ., 3. — (4). Lucien, Philomantis, 25 ; Minutius Felix, Octavius, 8, 10.— (5).Eusebe, Hist. eccl., IV, 15. — (6) M. Aubé confond, p. 164 et surtout p. 424, le crime d'impiété et le crime d'athéisme, qui sont tout à fait différents. (7). Arnobe, Contra Gentes, IV,36. — ( 8 ). The guilt imputed to their charge was that of atheism and Jewish manners, singular association of ideas, which cannot with any propriety be applied except to the christians. Gibbon, Decline and Fall, ch. xvi. Cf. Baur, Paulus, p. 472. — (1). Suétone, Domit., 15.
Rome Souterraine, p. 616-7Traduction de la note 8, ci-haut, a écrit:La culpabilité imputée à leur charge était celle d'athéisme et des mœurs juives, association singulière d'idées, qui ne peuvent convenablement être appliquée, sauf aux chrétiens.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 618-19.SUPPLÉMENT.§ 5. Le christianisme de Flavius Clemens et
l'existence de Flavia Domitilla la jeune.(suite)
2° La question soulevée à propos de l'existence d'une seconde Domitilla chrétienne est plus délicate. L'Église vénère une Flavia Domitilla, vierge et martyre, dans laquelle nous voyons une nièce de Clemens, fille de sa sœur Plautilla. Son existence nous paraît établie par les documents suivants:
1° Les Actes de Nérée et Achillée, qui racontent son exil dans l'île de Pontia, son martyre, et indiquent le nom de sa mère ;
2° deux passages d'Eusèbe, l'un emprunté à son Histoire ecclésiastique (III, 18) : « Notre foi avait déjà jeté un si grand éclat, que même les historiens païens ont fait mention dans leurs récits de la persécution dirigée contre nos frères et des supplices auxquels ils furent condamnés. Quelques-uns même en ont marqué avec soin la date, citant, par exemple, dans la quinzième année du règne de Domitien (2) , Flavia Domitilla, fille de la sœur de Flavius Clemens, un des consuls, qui, pour avoir confessé le Christ, fut reléguée dans l'île de Pontia » ; l'autre tiré de sa Chronique, où il cite le nom d'un de ces écrivains païens : « Brutius écrit que beaucoup de chrétiens souffrirent le martyre sous Domitien, parmi lesquels Flavia Domicilia, nièce (ex sorore neptem) de Flavius Clemens, consul, qui fut reléguée dans l'île de Pontia, parce qu'elle s'était dite chrétienne » ;
3º un passage d'une lettre de saint Jérôme, qui montre la sainte veuve Paula visitant, dans l'île de Pontia, la maison qu'avait habitée l'exilée (1). M. Aubé, après Scaliger, pense qu'il y a dans tout ceci une confusion, et qu'il s'agit, dans ces divers documents, de la même Domitilla dont parlent Dion, Suétone et Philostrate (2), c'est-à-dire la femme du consul Clemens : il raye de la généalogie des Flaviens, du martyrologe et de l'histoire Domitilla la jeune, qu'Eusèbe dit nièce de Clemens.
Le savant critique fait bon marché de l'autorité des Actes et même de celle d'Eusèbe : les premiers sont, dit-il, un document légendaire, qui ne peut faire preuve ; Eusèbe, lui, ne nomme qu'un des écrivains sur lesquels il s'appuie, et c'est un Brutius, parfaitement inconnu, sur la personne de qui les hypothèses les plus contradictoires ont été émises, dont tous les écrits sont perdus, et dont le témoignage, qui ne peut être contrôlé, reste sans valeur historique. N'est-il pas possible qu'Eusèbe ait nommé l'île de Pontia pour celle de Pandataria, où Dion place la femme de Clemens? Saint Jérôme, il est vrai, rapporte que de son temps on visitait encore, dans l'île de Pontia, la maison de Domitille; mais il se pourrait que Dion, et non Eusèbe, se fût trompé, et que l'épouse du consul ait été reléguée à Pontia et non à Pandataria: les deux îles sont voisines, toutes deux sont célèbres par d'illustres exils (3), et la confusion de l'une à l'autre était facile.
Cette argumentation n'est pas sans réplique…
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(2). L'an 96 (et non 97, comme une faute d'impression, que le lecteur aura corrigée de lui-même, nous fait dire p. 53). — (1). S. Jérôme, Ep. 86. — (2). Philostrate, Vita Apollonii, VIII, 25. — (3). La veuve de Germanicus avait été reléguée à Pandataria, et Néron, l'un de ses fils, à Pontia. Suétone, Tiberius, 53, 54.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 619-620.SUPPLÉMENT.§ 5. Le christianisme de Flavius Clemens et
l'existence de Flavia Domitilla la jeune.(suite)
Cette argumentation n'est pas sans réplique. D'une part, l'autorité des Actes de Nérée et Achillée, très-faible dans la partie qu'on pourrait, avec M. Aubé, appeler romanesque, est, au contraire, très-forte sur d'autres points ; ainsi, les indications données par eux sur les sépultures de Nérée, d'Achillée, de Pétronille, sur le lieu où elles se trouvaient, sur la distance où ce lieu était de Rome, ont été de tout point confirmées par les découvertes modernes : il est probable que leur rédacteur eut sous les yeux des renseignements exacts, qu'il a malheureusement gâtés. Aurait-il inventé le nom de la mère de Domitille, qu'il appelle Plautilla? Rien n'autorise à le penser : il se peut, comme le conjecture M. de Rossi, que cette sœur inconnue de Flavius Clemens descende, par sa mère, de Plautius, le mari de la célèbre Pomponia Græcina. Il est vrai qu'aucun historien profane ne nomme cette Plautilla : mais aucun d'eux ne nomme davantage la femme de T. Flavius Sabinus, père du consul Clemens : en conclura-t-on que celle-ci n'a pas existé ?
Le témoignage, allégué par Eusèbe, d'écrivains païens, et en particulier de Brutius, est en réalité considérable. Que ce dernier soit, ou non, Brutius Præsens, l'ami de Pline le Jeune et le possesseur de domaines funéraires voisins de la catacombe de Domicilie, ses écrits n'étaient certainement pas perdus au VIe siècle, car ils sont cités, à plusieurs reprises, par Malala (1), qui l'appelle « un savant chronographe » : et comme il n'est jamais invoqué pour des faits postérieurs au règne de Domitien, il paraît vraisemblable qu'il fut contemporain ou à peu près de cet empereur. Brutius dit expressément que Domicilia, nièce de Clemens, fut exilée comme chrétienne, quia se christianam esse testata sit : M. de Rossi fait à cette occasion une remarque fort importante.
Si Brutius avait parlé en termes aussi clairs des motifs de la condamnation de Clemens et de sa femme, Eusèbe n'eût pas manqué de le citer, comme il le cite à propos de leur nièce. Il est probable que l'annaliste païen avait raconté la mort de Clemens en un autre endroit, la rattachant au récit de l'assassinat de Domitien, dont elle fut peut-être l'occasion, comme Suétone semble l'insinuer et comme l'indique cette circonstance, que le chef de la conjuration ourdie contre le cruel empereur fut un procurator de Domitilla, sans doute désireux de venger ses maîtres. Les conséquences politiques de la condamnation de Clemens et de sa femme détournèrent probablement de ses causes intimes l'attention de Brutius comme de Suétone, et sans Dion elles seraient demeurées inconnues. Il en fut autrement de leur nièce, jeune fille sans situation politique, et que son baptême et l'exil qui le punit avaient seuls mise en évidence. Ainsi s'explique qu'Eusèbe, qui prend ici Brutius pour guide, nomme une seule Flavia Domitilla, exilée à Pontia, et passe sous silence l'exilée de même nom et de même race à Pandataria.
Je dois indiquer en finissant une autre objection…
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(1). Malala, éd. Bonn, p. 34, 193, 262.
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Re: Rome souterraine.
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Rome Souterraine, p. 620-1.
A suivre : III. FOUILLES DANS LE CIMETIÈRE DE CALLISTE.
SUPPLÉMENT.§ 5. Le christianisme de Flavius Clemens et
l'existence de Flavia Domitilla la jeune.(suite)
Je dois indiquer en finissant une autre objection que je trouve dans une note de l'ouvrage de Lighfoot sur l'Épître de saint Paul aux Corinthiens (p. 22). D'après le savant professeur de Cambridge, dans la phrase de la Chronique d'Eusèbe : Plurimos christianorum sub Domitiano fecisse martyrium, inter quos et Flaviam Domitillam Flavii
Il semble donc, conclurons-nous avec Tillemont (1), qu'il n'y ait point de raison suffisante pour refuser de prendre comme s'appliquant à deux Domitilles distinctes le texte de Dion, d'une part, ceux d'Eusèbe, de saint Jérôme et des Actes de Nérée et Achillée, de l'autre. Ces Actes, et le martyrologe romain, font de la Domitille dont ils parlent une vierge et une martyre, et toute son histoire, telle que les premiers la racontent, roule précisément sur son refus d'épouser un jeune patricien de Rome nommé Aurélien. Si, comme on le prétend, la Domitille des Actes et celle de Dion étaient une seule personne, comment expliquerait-on que même l'imagination des légendaires ait osé travestir l'histoire jusqu'à faire de la veuve du consul Clemens, de la mère des deux fils adoptifs de l'empereur Domitien, une jeune martyre de la virginité?
La plupart des arguments que j'ai employés ici pour défendre l'existence de deux Domitilles chrétiennes ont déjà été opposés par M. de Rossi à l'illustre Mommsen, qui, au tome VI du Corpus inscriptionum latinarum (p. 172, 173), avait proposé une nouvelle généalogie des Flaviens, d'où était exclue la nièce de Clemens (2).
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(1). Tillemont, Mémoires d'histoire ecclésiastique, t. II, p. 126. (2). Bullett. di arch. crist., 1875, p. 69-77.
Rome Souterraine, p. 620-1.
A suivre : III. FOUILLES DANS LE CIMETIÈRE DE CALLISTE.
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Rome Souterraine, p. 621-23.
A suivre : IV. VERRES CHRÉTIENS ORNÉS DE FIGURES.
SUPPLÉMENT.III. FOUILLES DANS LE CIMETIÈRE DE CALLISTE.
Le Bullettino de 1874, 1875, 1876 contient le récit de fouilles entreprises, soit par la commission d'archéologie sacrée, soit par des particuliers ou des communautés religieuses, dans les catacombes d'Ostrianus, sainte Agnès, sainte Generosa, saint Cyriaque, saint Calliste. Cette dernière a été l'objet de travaux considérables, dont les résultats seront consignés dans le IIIe volume de la Roma sotterranea, annoncé par M. de Rossi, et doivent seulement être indiqués ici.
Des fouilles faites à Saint-Calliste, les unes ont eu pour objet de continuer l'exploration des areae souterraines, les autres de mettre au jour le cimetière créé au-dessus d'elles après la paix de l'Eglise. A la fin de 1873, les travaux exécutés à la surface du sol, autour de la basilique désignée sous le nom de cella aux trois absides (p. 192; sur le plan, V, c e I ), firent découvrir par hasard trois fragments originaux de l'éloge du pape Eusèbe, ce qui porte à douze le nombre des fragments retrouvés de cette célèbre inscription damasienne, et permet de corriger une erreur de la copie du VIe siècle : il ne faut pas lire, avant le nom de Philocalus, Damasis papæ cultor, etc., comme le dit inexactement cette copie, ni Damasi sui, comme avait cru pouvoir corriger M. de Rossi, mais DAMASI PAPAE (1).
En 1875 eut lieu une découverte du plus haut intérêt : en fouillant le cimetière extérieur, on mît au jour le côté méridional du mur d'enceinte qui le séparait des propriétés voisines : or, ce mur suit exactement la ligne par laquelle est limitée, sous terre, la première area (III) de la catacombe : preuve frappante du soin avec lequel les fossores observaient, dans les excavations souterraines, les dimensions des areae sépulcrales qui avaient été légalement concédées à la surface du sol (2).
Sous terre, les fouilles ont eu d'importants résultats. La région de Sainte-Soteris (3) (VIII, IX, X) a été explorée. Dans l'area XII, qui fut adjointe au cimetière de Calliste après le IVe siècle, et où a été trouvée toute une riche série d'inscriptions datées se succédant en ordre chronologique, de 342 à 376, M. de Rossi a découvert, dans une vaste crypte décorée de marbres et de mosaïques, un fragment de l'éloge funèbre du diacre Redemptus, dont le texte avait été conservé par les manuscrits. L'area contiguë (XIII), où se trouve un arénaire qu'un vaste escalier, découvert en 1868, met en communication avec la surface du sol, a été, pendant l'année 1875, fouillée à plusieurs reprises. M. de Rossi espère y retrouver un souvenir des martyrs grecs, saint Hippolyte et ses compagnons, qui avaient l'habitude de se réunir, pendant la persécution de Valérien, dans un arénaire, et y furent inhumés après avoir versé leur sang pour le Christ (4). Des éboulements ont sans cesse interrompu les travaux et mis en danger les travailleurs : on a seulement découvert, au pied de l'escalier, l'épitaphe d'un fidèle nommé Basileus, enterré AD DOMINVM.....près du seigneur (c'était le titre qu'on donnait aux martyrs)... Le nom manque : faut-il suppléer Hippolytum? Quoi qu'il en soit, cette expression montre bien que le lieu où ces fouilles ont été tentées est voisin d'un des centres historiques de la catacombe (1).
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(1). Voir pages 251-253 [NDLR : et les fils qui le suivent] , et planches XII, XIII. Cf. Bull, di arch. crist., 1873, p. 158 et tav. XIII. — (2). Pages 67,180, 483 et suiv. — Bull, di arch. crist., 1875, p. 137. — (3). Page 189. — (4). Page 472. — (1) Bull, di arch. crist., 1875, p. 77, 133; 1876, p. 31.
Rome Souterraine, p. 621-23.
A suivre : IV. VERRES CHRÉTIENS ORNÉS DE FIGURES.
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Rome Souterraine, p. 623-24.
SUPPLÉMENT.IV. VERRES CHRÉTIENS ORNÉS DE FIGURES..
L'opinion à laquelle nous faisons allusion page 406, et d'après laquelle les vetri chrétiens des IIIe et IVe siècles auraient eu Rome pour centre unique de fabrication, paraît aujourd'hui trop absolue. Outre les deux patènes trouvées en 1864 et 1866 à Cologne (2), on a découvert à Trêves, en 1873, dans un antique cimetière chrétien, une tasse de verre représentant le sacrifice d'Abraham, dans un style fort différent de celui des vetri romains, et un vase à boire (diatræta) entouré de poissons et de coquillages de verre, soudés en relief tout autour. M. de Rossi pense qu'il a existé, au IVe siècle, un grand centre de fabrication de verres sur les bords du Rhin, et que les vases ornés de poissons en relief, qui ont été trouvés à Ostie, à Rome, à Milan, à Arles, en Hongrie, et ne paraissent point romains par le style, en proviennent. Les fabriques rhénanes, comme celles de Rome, auraient beaucoup travaillé pour les chrétiens (3).
Une remarquable tasse de verre a été découverte en 1873, à Podgoritza, en Albanie (4). La plupart des peintures du cycle biblique des catacombes y sont gravées au trait. Au centre est le sacrifice d'Abraham; tout autour se déroulent les sujets suivants : Jonas, Adam et Eve, Lazare, Moïse frappant le rocher, Daniel dans la fosse aux lions, les trois enfants hébreux, la chaste Suzanne, représentée par une orante près de laquelle est écrit SVSANNA DE FALSO CRIMINE (liberata) . Le plus singulier de ces sujets est le Moïse : il frappe de sa verge, non un rocher, mais une sorte d'arbre (c'est peut-être une erreur de l'artiste) d'où l'eau s'échappe avec abondance : mais ce n'est pas le nom de Moïse qui est écrit au-dessus : on y lit PETRVS VIRGA PERC (utit), puis une ligne indéchiffrable, suivie de ces mots FONTES CIPERVNT (cæperunt) QVA (e) RERE. La compénétration des deux types de Moïse et de saint Pierre, déjà manifestée par les peintures des catacombes, les bas-reliefs des sarcophages et plusieurs verres chrétiens (1) , est ici évidente : la verge mystique a passé des mains de Moïse dans celles de Pierre, chef du peuple nouveau, et à partir de ce moment les nations ont couru se désaltérer aux sources sacrées (2).
Un fragment d'une tasse de verre ornée de figures gravées en creux, et certainement de fabrication romaine, a été trouvé, en 1876, à Rome…
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(2). Page 405 et page 422, figure 40. — (3) Bull, di arch. crist., 1873, p. 140-147. — (4). Albert Dumont, Bulletin de la Société des Antiquaires de France, 1873, p. 71 ; de Rossi Bull, di arch. crist., 1874, p. 152 et tav. XI. — (1). Voir pages 368, 388, 416, 420,437, 440. — (2) S. Augustin complète ce symbolisme en voyant dans la verge de Moïse une image de la croix: Significata est ergo de Christo profluens gratia spiritualis, qua interior sitis irrigaretur. Sed quod virga petra percutitur, crux Christi figuratur. Ligno enim accedente ad petram, gratia manavit : et quod bis percutitur, evidentius significat crucem : duo quippe ligna sunt crux. Quæst. in Heptat., IV, 15.
Rome Souterraine, p. 623-24.
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Re: Rome souterraine.
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SUPPLÉMENT.IV. VERRES CHRÉTIENS ORNÉS DE FIGURES.(SUITE)Un fragment d'une tasse de verre ornée de figures gravées en creux, et certainement de fabrication romaine, a été trouvé, en 1876, à Rome, dans le voisinage des thermes de Dioclétien, près d'un oratoire domestique appartenant au IVe ou Ve siècle. Il vient illustrer une remarque fort importante que nous avons faite en décrivant une peinture de la première area du cimetière de Calliste : dans un des cubicula connus sous le nom de Chambres des sacrements (3) est représenté un enfant debout dans un fleuve, et qu'un homme baptise en lui jetant de l'eau sur la tête (4) : c'est le baptême à la fois par immersion et par aspersion, point fort important, dit M. de Rossi, dans la controverse avec les Grecs modernes, qui contestent la validité de cette dernière manière de baptiser.
Le verre dont nous parlons représente également une scène baptismale : l'eau s'échappe d'un vase suspendu au-dessus de la tête d'une jeune fille, tombe abondamment sur elle, et se répand en grosses gouttes autour de sa personne : le rite sacramentel paraît accompli, car le prêtre placé près d'elle détourne la tête (5), comme pour faire signe aux parents de venir reprendre leur enfant, et celle-ci, revêtue de la robe blanche des nouveaux chrétiens, semble se préparer à sortir de la cuve baptismale : ainsi du moins le fait supposer le mouvement de son corps, car la partie inférieure du verre est brisée, et l'on ne peut voir si l'enfant était représentée les pieds plongés dans un bassin, et s'il s'agit ici du baptême par immersion et aspersion réunies, ou seulement par aspersion : de toute façon, l'antiquité de ce dernier rite est encore établie par ce monument. Il semble qu'on ait là l'image d'un baptistère du IVe ou Ve siècle, où, quelquefois, l'eau s'échappait du haut de la voûte, et venait tomber, comme une rosée céleste, sur le néophyte, pendant que le prêtre en recueillait et lui en versait sur la tête quelques gouttes, en prononçant les paroles sacramentelles. C'est ainsi qu'Ennodius décrit le baptistère construit dans les premières années du VIe siècle, par Eustorge, évêque de Milan (1). M. de Rossi rapproche de ce précieux verre un marbre d'Aquilée, déjà plusieurs fois publié, mais dont il reproduit un calque exact : un enfant y est représenté debout dans la cuve baptismale, recevant d'en haut un large torrent d'eau qui s'échappe d'un cercle au milieu duquel est la colombe symbolique, tombe sur sa tête, et enveloppe tout son corps ; deux personnages se tiennent près de lui : l'un, qui a la tête nimbée, est sans doute le ministre du sacrement, et l'autre le père ou le parrain, qui présente l'enfant au baptême. Je me borne à signaler ici ces monuments, et je renvoie à la savante dissertation que leur consacre M. de Rossi (2).
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(3). Marqué A3 sur le plan détaillé de la première area du cimetière de Calliste. — (4). Pages 386, 389 et planche VI, nº 3. — (5). Il est représenté la tête nimbée, comme celui du marbre d'Aquilée dont nous parlons plus loin : sur les monuments des Ve et VIesiècles, le nimbe est quelquefois donné à des personnages vivants, en signe de pouvoir et de prééminence (voir pages 282, 283). — (1). Ennodius, Épigr., II, 149, éd. Sirmond. — (2). Bull, di arch. crist., 1876, p. 7-15, 37-58, et tav. I, VII, VIII. Cf. Revue archéologique, septembre 1876, p. 205.
Rome Souterraine, p. 624-25.
FIN.
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