LETTRES de Saint Jérôme.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 409-411.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Si je voulais prouver la résurrection de la chair et de toutes les parties qui composent le corps humain, puis ajouter à chaque passage des explications, il me faudrait écrire plusieurs volumes. Cela n'est point nécessaire à mon sujet, car je me suis proposé , non pas de répondre à Origène sur toutes choses, mais seulement de dévoiler les mystères de votre astucieuse justification. Cependant, comme je me suis arrêté déjà trop longtemps à vous réfuter, et que je crains, tout en voulant découvrir vos supercheries, de causer du scandale au lecteur, j'accumulerai les passages, que je ne ferai pourtant qu'effleurer, et contre votre argumentation empoisonnée je combattrai avec toute la force des Écritures.
Celui qui n'a pas la robe nuptiale , et qui n'a point écouté ce précepte : Que vos vêlements soient toujours blancs 1, on lui lie les mains et les pieds, on l'exclut du festin, on l'empêche de s'asseoir sur un trône, et de se mettre à la droite de Dieu ; on le précipite dans la géhenne, où il y a des pleurs et des grincements de dents 2 , — Les cheveux de votre tête sont comptés 3. Si l'on compte nos cheveux, il est plus aisé, je crois, de compter nos dents ; or, nos dents et nos cheveux seraient comptés en vain, s'ils devaient périr. — Viendra une heure où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront la voix du Fils de Dieu, et se lèveront 4. Ils entendront de leurs oreilles, ils marcheront avec leurs pieds. C'est ce que déjà Lazare avait fait. Ils sortiront de leurs tombeaux c'est-à-dire que les morts qui étaient ensevelis dans des tombeaux se lèveront et sortiront de leurs sépulcres, car la rosée qui vient de Dieu est une médecine pour leurs ossements 1.
Alors s'accomplira ce que le Seigneur a dit par le prophète : O mon peuple , entre pour un peu de temps dans tes celliers, jusqu'à ce que ma colère soit passée 2. Par ces celliers, d'où l'on tire ce qu'on y avait mis en réserve, on doit entendre les sépulcres, où ils étaient ensevelis. Ils en sortiront comme de jeunes faons, qui sont délivrés de leurs liens. Leur cœur se réjouira, et leurs ossements se lèveront comme le soleil. Toute chair paraîtra devant le Seigneur; il ordonnera aux poissons de la mer, et ils rejetteront les os qu'ils avaient mangés; il réunira les membres aux membres, les ossements aux ossements. Ceux qui dormaient dans la poussière de la terre se lèveront : les uns pour la vie éternelle, les autres pour un opprobre et une confusion sans fin 3.Alors les justes verront les peines et les tourments des impies , car le ver de ceux-ci ne mourra point, leur feu ne s’éteindra point, et ils seront en présence de toute chair 4.
Donc, nous qui vivons avec l'espérance de notre résurrection, nous tous,…
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(1) Matth. XIII. 13; Eccl. IX. 8. — (2) Matth. XXII. 13. — (3) Luc. XII. 7. — (4) Joan. V. 28. — (1) Is. XXVI. 29, [i]selon les Septante.— (2) Ibid. XX. — (3) Dan. XII. 2. — (4) Is. LXVI. 24
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 411-415.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Donc, nous qui vivons avec l'espérance de notre résurrection , nous tous, de même que nous avons fait servir les membres de notre corps à l’impureté et à l'in justice, pour l'iniquité, de même faisons-les servir à la justice pour notre sanctification, afin que, en ressuscitant d'entre les morts, nous cheminions dans une vie nouvelle. 1 — Comme la vie du Seigneur Jésus parait dans notre corps mortel, ainsi relui qui a ressuscité Jésus-Christ d'entre les morts, donnera également la vie à nos corps , parce que son esprit habite en nous 2, car il est juste que, après avoir porté dans notre corps, une image de ]a mort du Christ, nous sentions la vie de Jésus paraître aussi dans notre corps mortel, c'est-à-dire, dans une chair qui est mortelle de sa nature, mais que la grâce rend immortelle.
Étienne vit Jésus debout à la droite du Père 3.
La main de Moïse devint blanche comme de la neige, et recouvra ensuite sa couleur première 4. Dans l'un et l'autre cas, c'était la même main.
Le potier dont parle Jérémie, et dont le vase fut brisé par des pierres, où il l'avait laissé tomber, reprit de la même argile et refit le vase 5.
Le mot résurrection indique assez clairement que ce qui ressuscite n'est pas différent de ce qui était mort, et quand on ajoute des morts on montre qu'il s'agit de reprendre sa propre chair, car, ce qui meurt en l'homme, c'est cela même qui est rendu à la vie. Ce blessé du chemin de Jéricho est porté tout entier à l'hôtellerie, et le baume de l'immortalité guérit les plaies de ses fautes 6.
Les sépulcres s'ouvrirent à la mort du Seigneur, le soleil s'éclipsa, la terre trembla, et beaucoup de corps des saints ressuscitèrent, puis se firent voir dans la cité sainte 1. Quel est celui, dit Isaïe, quel est celui qui vient d'Édom, qui vient de Bosor, avec des vêtements éclatants, et qui est si beau dans sa robe blanche? 2 Édom veut dire qui est de terre ou de couleur de sang, Bosor signifie chair, ou qui est dans la tribulation.
Ce prophète nous explique en peu de mots tout le mystère de la résurrection, c'est-à-dire, la vérité de la chair et l'accroissement de la gloire. Et le sens est alors : quel est celui qui s'élève de la terre, qui s'élève du milieu du sang et dont les vêtements, — selon cette prophétie de Jacob : Il a attaché son ânon à la vigne, et il a foulé seul le vin sur le pressoir 3, — se trouvent rouges de vin nouveau de Bosor, c'est-à-dire de la chair, ou de la tribulation du monde, car il a vaincu le monde, lui; ses vêtements sont rouges et éclatants, parce qu'il surpasse en beauté les enfants des hommes 4, et l'éclat de ses vêtements est un effet de la gloire de son triomphe. L'on peut véritablement appliquer à la chair du Christ ces paroles : Quelle est celle-ci qui s'élève avec des vêtements blancs, et qui s'appuie sur son bien-aimé 5 . — Puis ces autres paroles du même livre : Mon bien-aimé est rouge et blanc 6.
Ceux-là l'imitent qui n'ont point souillé leurs vêtements avec les femmes, et qui ayant gardé leur virginité, se sont rendus eunuques, afin de gagner le royaume des cieux 7. Voilà pourquoi ils seront revêtus de robes blanches.
Alors, on verra l'accomplissement de ces paroles du Seigneur :…
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(1) Rom. VI. 19. — (2) Ibid. VIII. 11; II. Cor. IV. 10. — (3) Act. VII. 55. — (4) Exod. IV. 6. — (5) Jer. XVIII. — (6) Luc. X. — (1) Matth. XXVII. 52. — (2) Is. LXIII. 1. — (3) Ibid.2. —(4) Ps. XLIV. 3. — (5) Cant. VIII. 5. — (6) Ibid. V. 10. — (7) Apoc. XIV. 4.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 415-419.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Alors, on verra l'accomplissement de ces paroles du Seigneur : De tout ce que m'a donné le Père je ne perdrai rien, mais je ressusciterai tout au dernier jour 1. C'est-à-dire, qu'il ressuscitera l'homme tout entier, de même qu'il l'avait uni tout entier à sa nature divine. Alors la brebis qui s'était égarée et qui se perdait ici-bas, le Sauveur la portera toute entière sur ses épaules, et elle trouvera dans la clémence de son juge un remède à ses langueurs et à ses faiblesses.
Alors ils verront le Christ, ceux qui le firent mourir et qui crièrent : Crucifiez-le, crucifiez-le 2. Les tribus se frapperont la poitrine, hommes et femmes, oui, ces femmes, à qui le Seigneur disait, en portant sa croix : Filles de Jérusalem, ne pleurez point sur moi, mais pleurez sur vous et sur vos enfants 3. Alors s'accomplira la prophétie des anges qui dirent aux apôtres, quand ceux-ci le regardaient avec admiration monter au ciel : Ce Jésus, qui, en se séparant de vous, s'est élevé aux deux, viendra de la même manière que vous l'y avez vu monter 4.
Mais que prétendez-vous, en disant que le Seigneur après sa résurrection , mangea pendant quarante jours avec ses apôtres, de peur qu'ils ne le prissent pour un fantôme, puis en ajoutant que par les apparences d'un corps fantastique, il prouvait la vérité de son corps, et faisait voir qu'il avait mangé pendant le cours de sa vie. Ce que voyaient les apôtres était ou un véritable corps ou un fantôme. Si c'était un véritable corps, le Christ a donc mangé véritablement, et a eu de véritables membres. Si c'était un fantôme, comment a-t-il voulu montrer des choses mensongères pour prouver la vérité de la résurrection, car nul ne prouve la vérité par le mensonge.
Il s'ensuit donc, me direz-vous, que nous aussi nous mangerons, après la résurrection ? …
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(1) Joan, VI. 39. — (2) Ibid. XIX. 6. — (3) Luc. XXIII. 28. — (4) Act. I. 11.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 419-421.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Il s'ensuit donc, me direz-vous, que nous aussi nous mangerons, après la résurrection ? —Je n'en sais rien ; l'Écriture ne parle pas de cela, mais si l’on me demande mon opinion, je ne pense pas que nous devions avoir besoin de manger 1, car j'ai lu que le royaume de Dieu ne consiste ni dans le manger, ni dans le boire, mais on nous promet des choses que l'œil n'a pas vues, que l'oreille n a pas entendues, et que le cœur de l'homme n'a pas comprises 2.
Moïse et Élie jeûnèrent quarante jours et quarante nuits. La nature humaine ne saurait supporter une si longue abstinence; mais ce qui est impossible à l'homme, n'est point impossible à Dieu. Comme il importe peu que celui qui prédit les choses à venir les prédise dix ans ou cent ans avant qu'elles arrivent, puisque l'une et l'autre prédiction suppose une égale connaissance de l'avenir; de même celui qui peut jeûner, ou plutôt vivre de la vertu de Dieu, durant quarante jours, car on ne saurait passer par une telle abstinence, pourra bien vivre aussi durant l'éternité, sans manger ni boire.
Pourquoi le Seigneur mangea-t-il un rayon de miel? Afin de prouver la résurrection, et non point pour permettre le miel à votre bouche délicate. Il demanda un poisson frit sur la braise, afin de raffermir la foi chancelante des apôtres, qui n'osaient s'approcher de lui, parce qu'ils croyaient voir un esprit, et non point un corps. Il ressuscite la fille du chef de la synagogue, et lui fait donner de la nourriture. Mort depuis quatre jours, Lazare ressuscite et se trouve à un festin. Ce n'est pas qu'il eût faim dans le tombeau, mais c'est qu'il fallait confirmer par une preuve sensible un prodige si merveilleux.
De même que le Christ montra à ses disciples de véritables mains et un véritable côté, de même il mangea véritablement avec eux, il marcha véritablement avec Cléophas, il parla véritablement avec des hommes, il se mit véritablement à table le jour de la cène ; il se servit de véritables mains pour prendre le pain, pour le bénir, le rompre et le distribuer à ses apôtres. Que s'il disparut soudain à leurs yeux, ce fut un effet de la puissance de Dieu, et non point une preuve que son corps fût une ombre et un fantôme. Avant même la résurrection, lorsqu'on l'eut entraîné hors de Nazareth, pour le précipiter du haut d'une montagne, il passa au milieu d'eux 1, c'est-à-dire, il s'échappa de leurs mains.
Pouvons-nous dire, comme Marcion, qu'il s'est revêtu d'un corps fantastique, parce qu'il s'est échappé, d'une façon miraculeuse, des mains de ceux qui le tenaient? Ce que font les magiciens, le Seigneur ne le peut-il pas faire? On rapporte qu'Apollonius de Tyanes, étant au sénat, en présence de Domitien, disparut tout-à-coup. N'allez pas comparer la puissance du Seigneur aux enchantements des magiciens ; ne dites pas qu'il s'est montré sous une forme empruntée, qu'il a mangé sans avoir de dents, qu'il a marché sans pieds, qu'il a rompu le pain sans mains ; qu'il a parlé sans avoir de langue; qu'il a montré son côté, sans avoir des côtes.
Mais, allez-vous dire, comment donc les disciples qui se trouvèrent en chemin avec lui ne le connurent-ils pas, s'il avait le même corps qu'auparavant?...
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(1) Rom. XIV. 17. — (2) I. Cor. II. 9. — (1) Luc. IV. 30.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 421-423.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Mais, allez-vous dire, comment donc les disciples qui se trouvèrent en chemin avec lui ne le connurent-ils pas, s'il avait le même corps qu'auparavant? Écoutez ces paroles de l'Écriture : Leurs yeux étaient retenus par une force divine, qui les empêchait de le reconnaître 2. Et encore : Leurs yeux s'ouvrirent, et ils le reconnurent 3. N'était-il pas le même, quand on ne le reconnaissait pas, que lorsqu'on le reconnaissait? Assurément, il était bien le même. Donc, le connaître et ne pas le connaître, cela tenait à leurs yeux, et non point à celui qu'ils voyaient. Cela néanmoins tenait aussi au Christ, car il empêchait leurs yeux de le reconnaître.
Enfin, pour que vous sachiez que leur erreur venait alors, non point du corps du Seigneur, mais de leurs yeux, qui étaient liés, l'Écriture ajoute : Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent. De là vient que Marie-Magdeleine, ne reconnaissant pas Jésus, et le cherchant dans le tombeau, lui qui était vivant, le prit pour un jardinier. Elle le reconnaît et l'appelle Maître 1.
Après sa résurrection, Jésus se tenait sur le rivage de la mer, et ses disciples étaient dans une barque; mais comme ils ne le reconnaissaient pas, ce disciple que Jésus aimait dit à Pierre ; C'est le Seigneur 2. L'Apôtre vierge reconnaît, le premier, un corps virginal. Ce Christ apparaissait sous une même forme, et tous ne le voyaient pas de la même manière. L'Évangéliste ajoute aussitôt : Et nul d'entre eux n'osait lui demander : Qui êtes-vous ? car ils savaient que c'était le Seigneur 3. Nul n'osait lui faire cette question, parce qu'ils savaient qu'il était Dieu. Ils étaient à table avec lui, parce qu'ils voyaient un homme revêtu d'un corps de chair ; ce n'est pas que le Dieu fût séparé de l'homme, mais c'est que, dans une même personne, ils reconnaissaient le Fils de Dieu comme homme, et l'adoraient comme Dieu.
Est-il nécessaire maintenant que je vienne philosopher sur l'incertitude de nos sens, et surtout de la vue? …
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(2) Luc. XXIV. 16. —(3) Ibid. 31. — (1) Joan. XX. — (2) Ibid. XXI. 7. — (3) Ibid. 12.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 423-427.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Est-il nécessaire maintenant que je vienne philosopher sur l'incertitude de nos sens, et surtout de la vue?
Faut-il rappeler de la tombe quelque Carnéades, qui nous montre la vérité, et nous dise que, dans l'eau, un aviron semble rompu; que les portiques paraissent plus étroits à l'extrémité dont on est éloigné; que de loin des tours carrées semblent rondes, et que le plumage des colombes paraît changer de couleur, à chaque mouvement que font leurs ailes ?
Quand Rhodé annonce la présence de Pierre, et dit aux apôtres qu'il s'est échappé, à cause de la grandeur du péril, ils n'en veulent rien croire, et le prennent pour un fantôme.
Quand le Seigneur entre, les portes étant fermées, quand il disparaît aux yeux des apôtres, c'est par l'effet de la même puissance. Lyncée, comme nous l'apprenons de la fable, voyait au travers des murailles, et le Seigneur, à moins qu'il n'ait un corps fantastique, ne pourra entrer dans un lieu dont les portes sont fermées?
Les aigles et les vautours sentent l'odeur des cadavres qui sont au delà des mers, et le Sauveur, si on ne lui ouvre la porte, ne pourra pas voir ses apôtres?
Dites-moi, subtil raisonneur, lequel est à Dieu le plus difficile ou de suspendre sur rien le vaste globe de la terre, et de le balancer sur les flottants abîmes des eaux, ou bien de passer à travers une porte fermée, et de forcer la créature à céder au Créateur ? Vous lui accordez le pouvoir de faire ce qui est le plus difficile, et vous lui refusez celui de faire ce qui est le plus aisé. Pierre, revêtu d'un corps pesant et solide, marchait sur les eaux. L'onde molle ne fléchit point; la foi chancelle un peu, et le corps aussitôt s'aperçoit de sa pesanteur naturelle ; cela nous montre que ce n'était pas le corps, mais que c'était la foi qui marchait sur les eaux.
Dites-moi, je vous prie, vous qui trouvez tant d'arguments contre la résurrection, est-ce une simple conversation que vous voulez avoir avec moi ? Croyez-vous que le Seigneur est véritablement ressuscité, dans le même corps qu'il avait quand il est mort, quand il a été enseveli, ou ne le croyez-vous pas? Si vous le croyez, pourquoi apportez-vous les raisons dont on se sert pour nier la résurrection? Si vous ne le croyez pas, pourquoi leurrez-vous de la sorte les âmes des simples, et leur jetez-vous le vain mot de résurrection?
Ecoutez: naguère, un disciple de Marcion me disait :…
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 427-429.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Ecoutez: naguère, un disciple de Marcion me disait : « Malheur à celui qui ressuscitera dans cette chair et dans ces os ! » Je lui répondis aussitôt avec joie : Nous avons été ensevelis, et nous sommes ressuscités avec le Christ par le baptême 1
— Entendez-vous parler de la résurrection de l'âme ou de celle de la chair, me répliqua-t-il ?
— Je parle, répondis-je, non-seulement de l'âme, mais aussi de la chair, qui renaît avec l'âme dans le baptême ; car, comment périrait-elle, cette chair, qui est née de nouveau dans le Christ?
— Parce qu'il est écrit, répliqua-t-il, que la chair el le sang ne posséderont point le royaume de Dieu 2.
— Prenez garde, je vous prie, à ce que dit l'Apôtre : La chair et le sang ne posséderont point le royaume de Dieu; dit-il qu'ils ne ressusciteront point ; non, mais qu'ils ne possèderont point le royaume de Dieu. Et pourquoi ne le possèderont-ils point? parce que la corruption, ajoute l'Apôtre, ne possédera pas l'incorruptibilité. Ils ne possèderont donc point le royaume de Dieu, tant qu’ ils ne seront que chair et sang; mais, quand la corruption aura revêtu l'incorruptibilité, quand ce corps mortel aura revêtu l'immortalité, quand la boue de la chair aura été cuite en un vase solide, cette chair, que la pesanteur de son poids attachait à la terre auparavant, on la verra, dans une gloire nouvelle, s'élever aux cieux, sur les ailes de l'esprit et de l'immortalité, mais non point du néant, et alors s'accompliront ces paroles de l'Écriture : La mort a été absorbée par la victoire? Où sont tes combats, ô mort? ô mort, où est ton aiguillon ? 1
Nous avons premièrement répondu aux objections sur l'état des âmes et sur la résurrection de la chair...
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(1) Rom. VI. 3. — (2) I. Cor. XV. 50. — (1) Ibid. 54-55.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 429-431.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Nous avons premièrement répondu aux objections sur l'état des âmes et sur la résurrection de la chair, puis, laissant de côté le commencement de la Lettre, nous nous sommes borné à réfuter les excellents traités de notre apologiste, car nous avons préféré les intérêts de Dieu à ceux de notre propre réputation. Si l'homme pèche contre l'homme, on priera pour lui le Seigneur,— mais s'il pèche contre Dieu, alors qui donc priera pour lui ? 2 Maintenant c'est le contraire ; nous persécutons en tout nos ennemis, et nous avons contre eux une haine implacable ! À ceux qui blasphèment Dieu, nous tendons une main clémente.
Jean écrit à l'évêque Théophile une lettre, dont voici le commencement.
« L'esprit de Dieu et la grâce apostolique dont vous êtes orné vous portent à étendre vos soins sur toutes les Églises, particulièrement sur celle de Jérusalem, quoique déjà vous soyez assez occupé des affaires de l'Église qui vous est confiée. »
II loue la figure, il s'adresse à la personne des chefs. Vous qui cherchez les lois ecclésiastiques, vous qui vous réglez sur les canons du Concile de Nicée, vous qui tâchez de soumettre à votre juridiction des clercs qui demeurent avec leurs évêques et qui ne sont pas de votre obéissance, répondez-moi : L'évêque d'Alexandrie a-t-il quelque droit sur la Palestine?
Si je ne me trompe, il a été arrêté, dans ce Concile, que Césarée serait la métropole de la Palestine, et Antioche celle de tout l'Orient. Vous deviez donc envoyer vos lettres à l'évêque de Césarée, avec lequel, vous le saviez bien, nous avons communion, ne voulant point l'avoir avec vous. Ou si vous désiriez le jugement d'un siège plus éloigné, vous deviez du moins recourir à l'évêque d'Antioche. Mais je vois bien pourquoi vous n'avez point voulu écrire à Césarée, pourquoi vous n'avez pas voulu écrire à Antioche. Vous saviez ce que vous deviez fuir, ce que vous deviez éviter. Vous avez mieux aimé importuner un pontife déjà surchargé d'affaires que de rendre au métropolitain l'honneur qui lui est dû.
Si je dis cela, ce n'est point que, dans votre ambassade, je blâme quelque chose, excepté votre liaison avec l'ambassadeur, liaison qui m'est suspecte;…
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(2) I. Reg. II. 25.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 431-435.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Si je dis cela, ce n'est point que, dans votre ambassade, je blâme quelque chose, excepté votre liaison avec l'ambassadeur, liaison qui m'est suspecte; mais c'est que vous auriez dû vous justifier devant ceux qui vous interrogeaient et qui étaient sur les lieux.
Vous avez envoyé le prêtre Isidore, qui est un homme de Dieu, un homme d'une grande piété, un personnage imposant par la dignité de sa démarche et de son air, comme par son intelligence divine; vous l'avez envoyé pour guérir des esprits bien malades, si tant est néanmoins qu'ils aient le sentiment de leurs maux. C'est un homme de Dieu qui envoie un homme de Dieu, car il n'y a point de différence entre l'évêque et le prêtre. L'envoyé est égal en dignité à celui qui envoie, cela est assez inhabile; c'est, comme on dit, faire naufrage au port.
Cet Isidore, dont vous élevez le mérite jusque au ciel, se trouve, à Antioche, sous le poids des mêmes reproches que vous à Jérusalem, ce qui montre qu'il n'est point tant votre ambassadeur que le partisan de vos doctrines. Au surplus, une lettre qu'il a écrite de sa propre main, et qu'il nous adressa, trois mois avant sa légation, fut remise au prêtre Vincentius, qui la conserve toujours; cette lettre fait bien connaître ses erreurs, car il exhorte le chef de votre parti à se tenir ferme sur la pierre de la foi, et à ne point s'épouvanter de nos rêveries. Il promet de venir à Jérusalem, avant qu'on soit, le moins du monde, instruit de sa légation, et dit que son arrivée écrasera aussitôt les bataillons ennemis. Voici même quelques-unes des expressions qu'il emploie : « Comme la fumée se dissipe dans les airs, comme la cire se fond près du feu, ainsi disparaîtront ceux qui, supposant toujours à la foi de l'Église, s'efforcent, par le moyen d'hommes simples, de troubler cette même foi. »
Dites-moi, cher Lecteur, que vous semble d'un homme qui, avant d'être arrivé, écrit de semblables choses? Est-ce un ambassadeur, ou un ennemi? Voilà celui que nous pouvons appeler très-pieux, très-religieux, et, pour rendre les mots par les mots, que nous pouvons nommer déicole. Voilà cet homme d'une intelligence divine, cet homme si imposant, cet homme si distingué par la dignité de sa démarche et de son air qu'il devait, Hippocrates spirituel, guérir, par sa présence, les maux de nos âmes languissantes, pourvu néanmoins que nous employassions docilement ses remèdes. Qu'il se guérisse lui-même, avec de tels médicaments, celui qui a coutume de guérir les autres. Cette divine intelligence nous semble, pour le Christ, une folie. Volontiers nous languissons dans notre ignorante simplicité, plutôt que d'user d'un collyre, qui, en nous ouvrant les yeux, nous rendrait impies.
« Nous prions, dites-vous, pour votre Sainteté,…
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 435-437.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
« Nous prions, dites-vous, pour votre Sainteté, comme si déjà votre zèle avait eu tout le succès qu'il mérite, nous conjurons le Seigneur, jour et nuit, dans les lieux saints, de vous donner une juste récompense, et la couronne de vie. »
Vous avez raison de lui rendre grâces, car, si Isidore ne fût pas venu, jamais vous n'eussiez trouvé, dans toute la Palestine, un aussi fidèle compagnon. S'il ne vous eût point apporté le secours promis, vous seriez là au milieu de ces gens grossiers sans qu'ils comprissent la sublimité de votre doctrine. Cette apologie même, dont nous parlons maintenant, a été composée en la présence d'Isidore et avec sa collaboration attentive, de manière qu'il a été et l'auteur et le porteur de la lettre.
Étant donc arrivé ici, il vint chez nous jusqu'à trois fois, et nous présenta ce remède salutaire, cette lettre où vous aviez mis, vous, toute votre divine sagesse; lui, toute sa science ; mais il ne put être utile à personne, et personne ne lui fut utile, à lui. — Cet homme qu'on dit être venu chez nous jusqu'à trois fois, nombre mystérieux par lequel il désigne les démarches faites pour nous trouver ; cet homme qui nous venait parler, de la part de Théophile, n'a cependant pas voulu nous remettre la lettre que ce pontife nous adressait.
Quand nous lui avons dit : Si l'on vous a député vers nous, montrez donc vos lettres de créance ; et, si vous n'en avez pas, comment prouverez-vous qu'on vous a député? Il nous a répondu qu'il avait bien une lettre pour nous, mais que l'évêque de Jérusalem l'avait conjuré de ne pas nous la remettre. Voilà quelle a été la fermeté de cet ambassadeur; voilà comment, pour faire la paix et pour empêcher qu'on ne le soupçonnât de favoriser l'un des deux partis, il a su demeurer neutre. Comme il était venu sans emplâtre, et qu'il n'avait pas les instruments des médecins, ses remèdes ont été inutiles.
Jérôme et les siens lui ont souvent protesté, sous la foi du serment, en public et en particulier, que ma foi ne leur avait jamais été suspecte, et ils ont dit…
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 437-439.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Jérôme et les siens lui ont souvent protesté, sous la foi du serment, en public et en particulier, que ma foi ne leur avait jamais été suspecte, et ils ont dit : Nous sommes, sous ce rapport, dans les mêmes sentiments où nous étions, quand nous communiquions avec lui.
— Voyez ce que c'est que la conformité de doctrines. Isidore, qui s'était joint à lui, pour nous faire ces remontrances, est un homme de Dieu, un prêtre d'une éminente piété, un homme imposant, un homme d'un air saint et vénérable, d'une intelligence divine; c'est l'Hippocrate des chrétiens. Et moi, pauvre malheureux, tandis que je suis caché dans la solitude , je me vois tout-à-coup frappé d'anathème par ce grand pontife, et déchu du rang de prêtre. Cependant, ce Jérôme, avec sa troupe de moines crasseux et couverts de haillons, qu'a-t-il osé répondre à ce foudroyant Isidore?
— Crainte, dites-vous, qu'Isidore ne les crût pas, et qu'ils ne fussent écrasés par sa présence, par la majesté de son corps, ils lui protestèrent, non pas une fois, non pas trois fois, mais bien souvent, qu'ils reconnaissaient pour orthodoxe, celui dont il s'agissait, et que jamais ils ne l'avaient soupçonné d'hérésie.
— Oh! l'insigne et impudent mensonge ! Fût-ce Caton qui parlât de la sorte en sa faveur, on ne l'en croirait pas ; car, tout doit se juger sur la déposition de deux ou trois témoins 1. Vous a-t-on jamais dit, vous a-t-on jamais écrit que, sans vous demander raison de votre foi, nous étions, prêts à communiquer avec vous ?
Lorsque le Comte Archélaüs, personnage si éloquent et si chrétien, et qui était le médiateur de la paix, nous eut désigné un lieu pour en traiter, ne demandâmes-nous pas, avant tout, qu'on l'établît, cette paix, sur les fondements de la foi? Le comte promit de se trouver au lieu convenu ; le jour de Pâques approchait; grand nombre de moines étaient venus au rendez-vous; on vous y attendait, et vous ne saviez, que faire.
Enfin vous mandâtes que je ne sais quelle femme était malade, et que, ce jour-là, vous ne pouviez venir. Est-ce un bateleur ou un évêque qui parle ainsi? Mais, supposé que cela fût vrai, deviez-vous, pour le bon plaisir d'une femmelette, et de peur que, en votre absence, elle eût mal à la tête, elle pût s'ennuyer, ou avoir froid à l'estomac, deviez-vous négliger les intérêts de l'Église, et mépriser tant de chrétiens, tant de moines qui vous attendaient? Nous ne voulûmes pas donner prise au reproche, quand même nous voyions bien votre détour; nous attendîmes avec patience et dissimulâmes l'affront que vous nous faisiez.
Archélaüs nous récrivît, pour nous prier d'attendre deux ou trois jours encore, dans le cas où vous voudriez venir. Mais vous, tout occupé que vous étiez, car votre malade ne cessait de vomir, vous nous oubliâtes tout-à-fait, en attendant qu'elle n'eût plus la nausée.
Après avoir été attendu deux mois, Isidore enfin arriva...
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(1) Deut. XIX. 15.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 439-443.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Après a voir été attendu deux mois, Isidore enfin arriva, mais, loin de lui rendre, ainsi que vous le prétendez faussement, un flatteur témoignage de votre foi ; nous lui exposâmes les motifs que nous avions de vous en demander compte. En effet, comme il nous disait: Pourquoi avez-vous communiqué avec lui, s'il était hérétique? Nous lui répondîmes tous : Nous l'avons fait, sans nous douter qu'il le fût en rien ; mais, une fois que, pressé par le bienheureux pape Épiphane, il a refusé de s'expliquer soit de vive voix, soit par écrit, alors nous avons reçu du même Épiphane une lettre, par laquelle il nous défend de communiquer avec cet homme, tant qu'il ne rendra pas raison de sa foi. Nous avons la lettre par devers nous, et là-dessus il n'y a aucun doute. — Voilà ce que répondit l’assemblée des frères, mais elle ne répondit pas, comme vous l'avancez, que vous n'êtes point hérétique, parce que autrefois on ne vous avait point accusé de l'être, car, d'après ce raisonnement, un homme ne devra pas être malade, quand il aura été bien portant avant sa maladie.« Lorsqu'on vint à agiter la question de l'ordination de Paulinianus et de ceux qui sont avec lui, ils s'aperçurent bien que leur conduite en cela avait été irrégulière; néanmoins, par un esprit de charité et de concorde, on leur passait tout, et l'on exigeait seulement d'eux que, bien qu'ils eussent été ordonnés contre toutes les règles de la discipline, ils voulussent pourtant se soumettre à l'Église de Dieu, ne point la déchirer, ni se faire un pouvoir à eux-mêmes. Tout cela ne les accommodant point, ils se mirent à parler des matières de foi, et déclarèrent devant tout le monde que, si l'on ne blâmait pas ceux qui étaient avec le prêtre Jérôme , ils ne nous blâmeraient pas non plus ; mais que, si l'on prétendait les convaincre d'erreur et de crime, alors, comme ils ne pouvaient pas discuter ces sortes de choses, ni justifier l'irrégularité de leur conduite, ils se rejetteraient sur les dogmes de la foi, non point dans l'espérance de pouvoir me convaincre d'hérésie , mais dans le dessein de nuire à ma réputation. »
Si ce passage est confus et embarrassé, qu'on ne s'en prenne point à la traduction; il est tel dans le grec. Au reste je suis bien aise, moi qui me croyais dépouillé de la dignité de prêtre, de m'en voir ici revêtu tout-à-coup.
Il dit que nous ne pouvons le convaincre d'hérésie, et il a peur d'entrer en lice. Si la cause de la lutte ne vient point de la différence de foi, mais dérive, comme vous le dites, de l'ordination de Paulinianus, quelle folie n'est-ce pas de refuser une réponse à qui vous donne l'occasion de vous expliquer ? Faites une confession de foi, mais cependant répondez aux questions que l'on vous adresse, afin que chacun voie clairement, alors qu'il s'agit, non pas de foi, mais d'ordination ; car, tant que vous vous tairez sur la foi, votre adversaire pourra vous dire : Il est question, non point de l'ordination, mais bien de la foi. S'il s'agit de l'ordination, c'est une folie, quand on vous interroge sur la foi, de ne pas répondre. S'il s'agit de la foi, c'est encore une folie de prétendre qu'il s'agit de l'ordination.
Quant à ce que vous dites que vous les priâtes de se soumettre à l'Église de Dieu, de ne pas la scinder, et de ne pas se faire un pouvoir à eux- mêmes, je ne vois pas trop de qui vous voulez parler. Si c'est de moi et du prêtre Vincentius, vous avez dormi assez longtemps, puisque c'est au bout de treize années que vous vous réveillez pour dire cela…
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 443-447.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Quant à ce que vous dites que vous les priâtes de se soumettre à l'Église de Dieu, de ne pas la scinder, et de ne pas se faire un pouvoir à eux- mêmes, je ne vois pas trop de qui vous voulez parler. Si c'est de moi et du prêtre Vincentius, vous avez dormi assez longtemps, puisque c'est au bout de treize années que vous vous réveillez pour dire cela; car nous avons quitté, lui Antioche, et moi Constantinople, villes très-célèbres, non point pour venir applaudir vos discours au peuple, mais pour pleurer dans les champs et la solitude les péchés de notre jeunesse, puis nous rendre propice la miséricorde du Christ.
Que si vous voulez parler de Paulinianus, vous savez bien qu'il est soumis à son évêque, qu'il demeure dans l'île de Chypre, qu'il vient nous voir de temps en temps, non pas comme étant votre diocésain, mais comme prêtre étranger, c'est-à-dire, dépendant de celui qui l'a ordonné. S'il veut demeurer avec nous, et vivre paisible dans notre exil, au sein de la solitude, que vous doit-il si ce n'est le respect que nous devons à tous les évêques? Supposez qu'il ait été ordonné par vous; il vous dirait ce que moi, homme tout misérable, je disais à l'évêque Paulinus, de sainte mémoire : « Vous ai-je prié de m'ordonner ? Si vous me conférez la dignité de prêtre, sans m'ôter la qualité de moine, c'est à vous à répondre de votre choix ; mais si vous venez, sous prétexte que je suis prêtre, m'enlever à l'état pour lequel j'ai quitté le siècle, je veux rester ce que j'ai toujours été, mon ordination ne vous porte aucun préjudice. »
Vous les priâtes, dites-vous, de ne pas scinder l'Église, et de ne point se faire un pouvoir à eux-mêmes.
— Eh ! qui donc scinde l'Église ? Est-ce nous, qui tous, en notre maison de Bethléhem, ou bien vous qui refusez de confesser votre foi, si elle est orthodoxe, et qui divisez véritablement l'Église, si vous êtes dans l'erreur ?
— Nous divisons l'Église, nous qui, il y a quelques mois, aux environs de la Pentecôte, lorsque, le soleil s'étant obscurci, tout le monde appréhendait l'arrivée du Juge futur, présentâmes à vos prêtres quarante personnes d'âge et de sexe différents, pour qu'elles fussent baptisées? Il y avait alors, dans notre monastère, cinq prêtres qui étaient en droit de les baptiser, mais ils ne voulurent rien faire qui pût vous être désagréable, et vous donner occasion de vous taire sur votre foi.
N'est-ce pas vous plutôt qui déchirez l'Église, en défendant à vos prêtres de Bethléhem de baptiser, à Pâques, nos catéchumènes, si bien que nous avons été obligés de les envoyer à Diospolis, pour qu'ils fussent baptisés par Dionysius, confesseur et évêque?
On dit que nous scindons l'Église, nous qui, hors nos cellules, n'avons dans l'Église aucune place? N'est-ce pas vous plutôt qui la scindez, en ordonnant à vos clercs d'interdire l'entrée de l'église à quiconque dira que Paulinianus, ayant été consacré par l'évêque Épiphane, est véritablement prêtre ? Depuis ce temps-là jusqu'à ce jour, nous ne voyons que de loin la crèche du Seigneur, et, tandis que les hérétiques y entrent, nous avons la douleur d'en être bannis.
Est-ce nous qui divisons l'Église, ou bien celui qui refuse aux vivants une habitation, aux morts un sépulcre, et qui sollicite l'exil de ses frères?...
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 447-451.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Est-ce nous qui divisons l'Église, ou bien celui qui refuse aux vivants une habitation, aux morts un sépulcre, et qui sollicite l'exil de ses frères? Cette bête puissante, qui menace toute la terre, qui donc l'a déchaînée contre nous ? Les cendres innocentes et les ossements des Saints, qui donc jusqu'à présent les a abandonnés aux injures du temps ? C'est par de telles marques de tendresse que ce bon pasteur nous engage à la paix; il nous accuse de nous faire un pouvoir à nous-mêmes, nous qui sommes unis par les liens de la communion et de la charité avec tous les évêques orthodoxes.
Êtes-vous seul toute l'Église; et, pour vous avoir offensé, est-on séparé du Christ? Si nous cherchons notre indépendance, montrez-nous que nous avons un évêque dans votre diocèse. Nous ne communiquons point avec vous, mais c'est qu'il s'agit de foi ; justifiez-vous, et il s'agira de l'ordination.« Ils se prévalent encore d'une lettre qu'Épiphane leur a écrite, disent-ils. Quoiqu'il en soit, il rendra compte de tout ce qui s'est fait, et en répondra devant le tribunal du Christ, alors que le grand et le petit seront jugés, sans acception de personnes. Néanmoins , comment peuvent-ils faire quelque fondement sur cette lettre, qui n'a été écrite qu'au sujet de l'ordination irrégulière de Paulinianus et des siens, ordination que je lui ai reprochée, ainsi qu'il le fait connaître lui-même, au commencement de sa lettre. »
Est-il, je vous le demande, un plus grand aveuglement; est-il, comme on dit, des ténèbres plus cimmériennes ? Il dit que nous nous prévalons d'une lettre d'Épiphane contre lui, et que néanmoins nous n'en avons aucune que ce pontife eût écrite dans ce sens ; puis il ajoute aussitôt :« Comment peuvent-ils faire quelque fondement sur cette lettre, qui n'a été écrite qu'au sujet de l'ordination irrégulière de Paulinianus et des siens, ordination que je lui ai reprochée, ainsi qu'il le fait connaître lui-même, au commencement de sa lettre ? »
Nous n'avons point cette lettre. Eh ! quelle est donc la lettre qui, dès le commencement, parle de l'ordination de Paulinianus? Après le début, il y a quelque chose dont vous craignez de faire mention. Vous l'avez blâmé de ce que Paulinianus avait été ordonné, avant qu'il fût en âge de l'être; et vous-même, vous ordonnez un prêtre que vous députez comme partisan de vos doctrines; puis ensuite, un prêtre qui n'est qu'un enfant, vous avez l'audace de l'envoyer dans le lieu où vous supposez qu'on a promu un enfant au sacerdoce. Vous élevez encore à la prêtrise Théosébas, prêtre de l'Église de Thiria; vous l'armez contre nous, contre nous vous employez son éloquence. A vous seul il est permis de fouler aux pieds les droits de l'Église; tout ce que vous faites doit être une règle de conduite, et vous n'avez pas honte de citer Épiphanius à comparaître avec vous devant le tribunal du Christ.
Voici maintenant ce qui vient après ce chapitre. Il dit qu'Épiphane a logé et mangé chez lui, et que pourtant ce pontife ne lui a jamais parlé des dogmes d'Origène; c'est ce qu'il affirme avec serment.« Épiphane[s], dit-il, et Dieu nous en est témoin, n'a pas même pas paru avoir le moindre soupçon contre notre foi. »
Je ne veux pas répliquer ni presser avec rigueur, crainte de sembler convaincre de parjure un évêque. J'ai à ma disposition plusieurs lettres d'Épiphane, qui sont adressées, l'une à notre apologiste, les autres aux évêques de Palestine, et une, toute récente, au pontife de Rome. Dans ces lettres, il dit que, en présence de plusieurs personnes, ayant reproché à Jean ses erreurs, celui-ci n'avait pas daigné lui répondre, et tout notre monastère en est témoin.
Fin de cette Lettre.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 453-457.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.
Votre lettre, en nous apprenant que vous êtes en possession de l'héritage du Seigneur, qui, près de monter vers le Père, disait aux Apôtres : Je vous donne ma paix, je vous laisse ma paix 1, nous a fait connaître que vous êtes aussi en possession de cette félicité dans laquelle les pacifiques sont appelés bienheureux 2.
Vous caressez en père, vous instruisez en maître, vous ordonnez en pontife. Vous êtes venu à nous, non pas avec une verge terrible, mais dans un esprit de charité, de douceur et de paix, afin de montrer, dès le premier de vos discours, l'humilité du Christ, qui, voulant sauver le genre humain, n'est pas venu armé de foudres et de tonnerres, mais a vagi dans une étable et souffert en silence sur la croix.
Vous aviez lu ce qui est écrit touchant le Christ, dans la personne de celui qui en était la figure : Seigneur, souvenez-vous de David, et de sa mansuétude extrême 3. Vous saviez ce qu'il disait ensuite de lui-même : Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur 1.
C'est pour cela que, puisant dans les volumes sacrés plusieurs choses sur l'excellence de la paix, et parcourant. comme une abeille, le vaste champ des Écritures, vous avez su ramasser en un discours plein d'éloquence tout ce qu'il y avait de plus doux, et de plus capable d'inspirer l'amour de la concorde. Cette paix étant déjà le but où nous tendions, vos paroles nous ont excité davantage; les voiles étant déjà déployées, le souffle de vos fréquentes exhortations est venu les enfler, en sorte que, loin d'avoir eu de la répugnance et du dégoût pour les flots suaves de la paix, nous les avons bus avec empressement et avidité.
Mais que faisons-nous, si nous pouvons seulement désirer la paix, sans être en état de nous la procurer? car, quoique la simple volonté ne laisse pas d'avoir auprès de Dieu sa récompense, néanmoins c'est toujours pour nous un sujet de tristesse de laisser imparfait un ouvrage. Sachant bien que l'accord des deux partis est nécessaire à l'accomplissement d'une paix solide, l'Apôtre disait : Autant qu'il est en vous, ayez la paix avec tous les hommes 2 . Et le prophète nous dit : La paix, la paix, mais où est la paix? 3 Car, ce n'est rien que de bouche on la désire, si par les œuvres on la détruit. Autre chose est de chercher la concorde, autre chose est de l'établir; autre chose de déclarer qu'on la veut, autre chose d'exiger une servitude absolue. Nous aussi nous voulons la paix; et non-seulement nous la voulons, mais encore nous la demandons avec instance. Toutefois nous désirons la paix du Christ, une paix véritable, une paix sans inimitiés, une paix sous laquelle ne soit pas cachée la guerre ; une paix qui n'écrase pas des ennemis, qui unisse des amis au contraire.
Pourquoi appeler concorde ce qui n'est que domination? Pourquoi ne pas donner à chaque chose le nom qui lui convient?...
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(1) Joan. XIV. 27. — (2) Matth. V.9. — (3) Ps. CXXXI. 1. — (1) Matth. XI. 29. — (2) Rom. XII. 18. — (3) Jer. IV. 10.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 457-459.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Pourquoi appeler concorde ce qui n'est que domination? Pourquoi ne pas donner à chaque chose le nom qui lui convient? Là où il y aura haine, qu'on dise qu'il y a inimitié; que là seulement où il y aura charité, l'on dise qu'il y a paix. Nous autres, nous ne divisons pas l'Église; nous ne nous séparons point de la communion de vos pères, mais dès le berceau, pour ainsi parler, nous avons été nourris d'un lait catholique. Nul n'est plus uni à l'Église que celui qui ne fut jamais hérétique. Mais nous ne savons ce que c'est qu'une paix sans charité, qu'une communion sans paix.
Nous lisons ensuite dans l'Évangile : si tu offres ton présent à l'autel, et que là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton présent devant l'autel, va te réconcilier avec ton frère, puis tu reviendras offrir ton présent 1. Si nous ne pouvons, sans avoir la paix, offrir nos dons à l'autel, nous sera-t-il donc permis d'y recevoir le corps du Christ ? En quelle conscience m'approcherai-je de l'Eucharistie du Christ, et répondrai-je Amen, si je doute de la charité de celui qui me la présente?
De grâce, écoutez-moi patiemment, et ne prenez pas la vérité pour une flatterie. A-t-on jamais eu la moindre répugnance à communiquer avec vous? A-t-on jamais étendu la main, en détournant le visage, et, au milieu du banquet sacré, vous a-t-on donné le baiser de Judas? Nos moines, je pense, n'appréhendent pas votre arrivée; ils s'en réjouissent, au contraire, puisqu'ils accourent à l'envi au-devant de vous, et que, sortant du fond de leurs déserts, ils désirent rivaliser d'humilité avec vous. Qu’est-ce qui les force à quitter leur retraite? N'est-ce pas l'affection qu'ils ont pour vous? Qu'est-ce qui réunit cette foule de moines dispersés dans le désert? n'est-ce point encore cette affection? Un père doit aimer ses enfants ; un père et un évêque doivent être aimés, et non pas craints.
Suivant un ancien proverbe, on hait celui que l'on craint, et celui que l'on craint, on désire qu'il meure. Aussi voyons-nous dans nos Livres saints que l'amour parfait bannit la crainte 1, la crainte qui est la vertu de ceux qui commencent. Vous ne cherchez point à vous assujettir les moines, mais c'est cela même qui vous les rend plus soumis. Vous leur offrez le baiser; ils courbent la tête sous le joug. Vous ne voulez être que simple soldat, et ils vous prennent pour chef. Vous êtes au milieu de tous ces moines comme un d'entre eux, et voilà pourquoi ils vous distinguent de la foule. La liberté se révolte, dès qu'on l'opprime. Nul n'obtient davantage d'un homme libre, que celui qui ne le traite point en esclave.
Nous connaissons les canons de l'Église. Nous n'ignorons pas quel rang chacun doit tenir…
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(1) Matth. V. 23. 24. — (1) I. Joan. IV. 18.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 459-463.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Nous connaissons les canons de l'Église. Nous n'ignorons pas quel rang chacun doit tenir, et nous sommes d'un âge à avoir appris bien des choses par les lectures et les exemples de chaque jour, bien des choses par l'expérience. Le roi qui frappe ses sujets avec des verges de fer Note (1) , et qui croit avoir les doigts plus gros que n'était le dos de son père, a bientôt démembré le royaume d'un prince aussi doux que David 2.
Le peuple romain ne put pas souffrir même l'orgueil dans un de ses rois Note (2). Ce chef de l'armée d'Israël, qui avait frappé l'Égypte de dix plaies, aux ordres de qui obéissaient et le ciel, et la terre et les mers, passait pour le plus doux de tous les hommes qu'il y eût alors au monde, et si, pendant quarante ans, il garda le pouvoir suprême, c'est qu'il tempérait par la douceur et la bonté ce que la puissance a de hauteur. Le peuple le lapidait, et il priait pour le peuple 1, car il aimait mieux être effacé du livre de Dieu que de voir périr un troupeau confié à ses soins, car il désirait imiter ce Pasteur qu'il savait bien devoir porter sur ses épaules les brebis même égarées, et qui a dit : Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis 2 . Aussi le disciple du bon Pasteur souhaite-t-il d'être anathème pour les Israélites, ses frères et ses parents selon la chair. Que si cet apôtre veut périr, pour sauver ceux qui déjà sont perdus, que ne doit pas faire un bon père pour ne point aigrir l'esprit de ses enfants, et pour ne point rendre intraitables, par une excessive rigidité, ceux mêmes qui sont les plus doux?
Les bornes d'une lettre me forcent à parler en peu de mots; la douleur, à parler longuement. L'évêque de Jérusalem avance, dans ses lettres, suivant lui, très-pacifiques, et selon moi, fort aigres, que je ne l'ai jamais offensé ni traité d'hérétique. Pourquoi donc me blesse-t-il lui-même, en me faisant passer pour un homme attaqué d'une maladie très-dangereuse, et en me disant rebelle à l'Église ? Il épargne ses adversaires, ceux qui lui font du mal, et s'en prend à moi, qui ne lui en fais point.
Avant l'ordination de mon frère, il n'a jamais dit qu'il y eût eu, entre lui-même et le saint pape Épiphane, le moindre différend sur les dogmes. Alors, quel motif l'a engagé, comme il le dit enfin, à disputer aux yeux de tout le peuple, sur une matière que personne ne mettait en avant? Vous êtes assez éclairé pour savoir que ces questions sont très-délicates, et que le parti le plus sûr est de se taire, à moins qu'on ne soit obligé de parler de sujets relevés. Quel merveilleux génie ! quels flots d'éloquence ne lui a-t-il pas fallu pour embrasser, dans un seul discours, toutes les questions sur chacune desquelles nous savons que des hommes fort doctes ont écrit des milliers de livres? Mais que m'importe ? C'est l'affaire de ceux qui ont entendu, l'affaire de celui qui s'est vanté ; qu'il cesse de m'accuser. Je n'étais pas présent, je n'ai rien entendu. J'en parle comme les autres, ou plutôt je n'en parle pas même comme eux ; car je les ai laissés crier et j'ai gardé le silence.
Comparons la personne de l'accusateur avec celle de l'accusé…
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(2) III. Reg. XII. 14. — (1) Exod. XVII. — (2) Joan. X. 11.
Note (1 ) : Saint Jérôme fait allusion à la réponse de Roboam à ses sujets, qui se plaignaient de la dureté avec laquelle il les traitait.
Note (2 ) : Tarquin, surnommé le Superbe.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 463-465.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Comparons la personne de l'accusateur avec celle de l’accusé, et celui dont le mérite, les mœurs et le savoir l’emporteront, croyons-le davantage. Vous le voyez bien, j'effleure chaque chose, les yeux fermés, comme on dit, et je ne vous exprime point tant ma pensée par mes paroles que je ne l'explique par mon silence. J'ai compris et admiré votre merveilleuse sagesse; car, voulant travailler à la paix de l'Église, vous passez devant les chants des sirènes Note (3) , en quelque sorte les oreilles bouchées. En effet, versé, comme vous l'êtes, dès le bas âge, dans l'étude des saintes Lettres, vous savez quel sens doit avoir chaque chose, et vos paroles sont tellement mesurées dans des matières douteuses, qu'on ne saurait voir si vous rejetez nos sentiments ou si vous condamnez ceux des autres. Une foi pure cependant, une profession ouverte de cette foi ne cherche point de détours, n'invoque point de sophismes.
Ce que l'on croit simplement, on le confesse. Je pouvais sans doute me récrier hardiment, et dire, au milieu même des glaives et des flammes de Babylone : Pourquoi répondre autre chose que ce que l'on vous demande? pourquoi ne pas faire une confession simple et franche? Il craint tout, il calcule tout, il balance à propos de tout, et marche comme sur des épis. Mais c'est l'amour qu'il a de la paix, l'ardeur avec laquelle il la désire, qui l'empêche de répondre d'une manière catégorique. Les autres l'offensent librement, et il n'ose pas rendre injure pour injure. Moi, cependant, je me tais, et je consens à ce que ma retenue soit traitée d'impéritie ou de faiblesse. Que ne m'aurait-il pas fait, si j'avais été son accusateur, puisque, de son propre aveu, il me diffame, quand je le loue ?
Sa Lettre tout entière n'est pas tant une exposition de sa croyance qu'un tissu d'injures contre moi. Souvent mon nom y revient, sans aucune de ces politesses dont les hommes ont accoutumé d'user les uns envers les autres : il me déchire, il me baffoue, comme si j'étais effacé du livre des vivants ; comme si encore j'avais cherché à me faire connaître par ses réponses, comme si j'avais couru après de telles niaiseries, moi qui, dès mon adolescence, renfermé dans l'obscurité d'un monastère, me suis efforcé plutôt d'être que de paraître quelque chose. II y a aussi quelques-uns de nous qu'il cite honorablement pour les déchirer ensuite, comme si nous ne pouvions pas également rappeler des choses que nul n'ignore. Il fait un crime à l'un des nôtres d'avoir été esclave avant d'arriver à la cléricature, tandis que lui-même a quelques clercs de ce genre, tandis qu'il sait bien qu'Onésime renaquit dans les chaînes de Paul et d'esclave qu'il était fut ordonné diacre.
Il traite notre frère d'imposteur, et, crainte d'être forcé de prouver ce qu'il avance, il…
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Note (3 ) : Les sirènes étaient des nymphes, que la fable disait filles du dieu-fleuve Achéloüs. Elles sont liées aux mers d'Italie. On les place dans les ilots de Licosa, San Petro et Galetta, dont nous ignorons les noms anciens, mais qui se trouvaient dans la mer thyrénienne, et vis-à-vis du cap de Minerve. Ces îles étaient hérissées de brisants. Quoique au sein des eaux, les nymphes ont des ailes. Nues, mais invisibles, elles ne décèlent leur présence que par un murmure harmonieux; leurs voix ravissantes vont au cœur des matelots, qui, pour les mieux entendre, se penchent, s'approchent insensiblement de la surface des eaux, s'y plongent et ne reviennent plus. On connaît l'histoire d'Ulysse et de ses compagnons.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 467-469.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Il traite notre frère d'imposteur, et, crainte d'être forcé de prouver ce qu'il avance, il dit l'avoir appris par ouï-dire. Oh ! si je voulais répéter ce que disent beaucoup de gens, et ajouter foi à toutes les médisances, alors il verrait que je sais des choses connues de tout le monde, et que je ne puis ignorer ce qui est public. Il dit encore que notre frère a obtenu la cléricature, en récompense de ses impostures. Qui ne redouterait point un esprit si subtil et si pénétrant? Qui donc pourrait résister à ce foudre d'éloquence?
Qu'est-ce qu'il y a de plus fort, ou d'avancer une calomnie, ou de la soutenir, ou d'accuser quelqu'un que l'on feint ensuite d'aimer, ou de lui pardonner une injure? Note (4) Qu'est-ce qu'il y a de plus supportable, ou de voir un imposteur devenu édile, ou de le voir devenu consul?
Il sait bien ce que je passe sous silence, ce que je dis, ce que j'ai entendu, ce que, par crainte du Christ, je ne crois pas tout à-fait.
Il me reproche d'avoir traduit Origène en latin. Je ne suis pas le seul qui ait fait cela ; le confesseur Hilaire l'a fait aussi, et, l'un et l'autre, supprimant ce que ses écrits présentaient de dangereux, nous n'avons traduit que les choses utiles. Qu'il lise lui-même ma version, s'il connaît le latin, — et je pense que, par ses entretiens continuels, par ses rapports journaliers avec des Latins, il a appris leur langue ; — ou, s'il ne l'entend pas bien, qu'il se la fasse expliquer par ses interprètes, et il verra qu'il devait me louer des choses précisément dont il me blâme.
De même que j'ai toujours reconnu dans Origène une grande habileté pour l'interprétation des Écritures, de même j'ai toujours condamné la fausseté de sa doctrine. Est-ce que je mets Origène aux mains du peuple? Est-ce que j'approuve tous les autres docteurs? Je sais qu'il y a une différence entre les apôtres et les divers écrivains ecclésiastiques ; je sais que ceux-là disent toujours vrai, que ceux-ci, en qualité d'hommes, se trompent quelquefois.
Ce serait un genre de défense tout nouveau que de publier ce qu'il y a de défectueux dans Origène, pour en faire un crime à tous les autres docteurs ; c'est-à-dire, en n'osant pas le défendre ouvertement, de l'excuser néanmoins par une confraternité d’erreurs. Il est impossible que personne ait lu les six mille tomes d'Origène, puisque cet écrivain n'en a pas tant composé, et celui qui a entendu quelqu'un se vanter d'en avoir lu en pareil nombre me semble plutôt un menteur que celui qui aurait controuvé la chose.
Il dit que mon frère est l'auteur de notre division…
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Note (4 ) : Saint Jérôme compare ici, quoique d'une manière un peu enveloppée, un simple prêtre avec un édile, et un évêque avec un consul. Par là, il fait à Jean de Jérusalem un reproche très-délicat, mais aussi très-piquant. C'est comme s'il lui disait : Pouvez-vous trouver mauvais qu'on ait admis à la cléricature celui que vous traitez d'imposteur, puisque vous-même on vous a bien élevé à l'épiscopat, tout imposteur que vous êtes ?
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 469-471.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Il dit que mon frère est l'auteur de notre division, lui qui demeure tranquillement dans sa cellule, et qui regarde la cléricature non pas comme un honneur, mais comme un fardeau. Après nous avoir, jusqu'à ce jour, bercé d'un faux espoir de paix, il va soulever les prêtres occidentaux, en leur disant que mon frère, jeune homme encore et presque enfant, n'en a pas moins été ordonné prêtre dans Bethléhem, qui est de sa paroisse. Si cela est vrai, tous les évêques de la Palestine ne l'ignorent point, car le monastère du saint pape Épiphanius, monastère qu'on nomme l'Ancien, et où mon frère a été ordonné prêtre, est situé sur le territoire d'Éleuthéropolis, et non pas sur celui d'ÆIia (?).
Or, votre Béatitude sait quel est l'âge de mon frère, et, puisqu'il est déjà parvenu à sa trentième année, je ne pense pas qu'on puisse trouver à redire sur ce point, car le mystère de l'incarnation nous montre que cet âge est un âge parfait dans le Christ.
Que l'évêque de Jérusalem lise l'ancienne loi et il y verra que ceux de la tribu de Lévi étaient élevés au sacerdoce, dès leur vingt-cinquième année. S'il veut, ici seulement ne suivre que le texte hébreu, il verra que le prêtre était ordonné à l'âge de trente ans. Et pour qu'il ne dise pas que les choses anciennes sont passées, que tout a été renouvelé, qu'il écoute ces paroles de Paul à Timothée: Que personne ne méprise ta jeunesse 1.
Lui-même, quand il fut ordonné évêque, n'était certes pas beaucoup plus âgé que mon frère ne l'est maintenant. Si cela est permis pour un évêque, mais non pas pour un prêtre, car son âge ne répondrait pas à son nom Note (5) , d'où vient que lui-même a ordonné un prêtre qui n'était pas plus âgé, ou qui était plus jeune que mon frère, et qui, chose plus irrégulière encore, était d'une autre Église que la sienne?
S'il ne veut pas vivre en paix avec mon frère, à moins qu'il ne se soumette à lui et ne se dérobe à la juridiction de l'évêque qui l'a ordonné, il fera voir qu'il ne cherche la paix que comme un moyen de se venger, et qu'il n'aura ni repos ni contentement, tant qu'il ne nous aura pas fait le mal dont il nous menace.
Eût-il été ordonné par l'évêque de Jérusalem, mon frère aime si fort la retraite qu'il ne voudrait pas exercer les fonctions de son Ordre; et si, pour cela, ce pontife divisait l'Église, il ne lui devrait que l'honneur qui est dû à tous les prêtres.
Voilà jusqu'où vient son apologie, ou plutôt son accusation et sa satire contre moi…
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(1) I. Tim,. IV. 12.
Note (5) :
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 471-475.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Voilà jusqu'où vient son apologie, ou plutôt son accusation et sa satire contre moi. Je lui ai répondu, dans ma lettre, en peu de mots et en passant, pour lui faire sentir, par ce que j'ai dit, que j'en aurais pu dire davantage; que je suis un homme, un animal raisonnable, que je sais comprendre ses ruses, et que je n'ai pas l'esprit si obtus, que, à l'instar des brutes, j'entende seulement les sons des paroles, et n'en pénètre point le sens.
Maintenant, je vous prie de pardonner à ma douleur.
S'il y a de l'orgueil à avoir répondu à ses accusations, il y en a plus encore à m'avoir accusé. Du reste, j'ai répondu avec assez de retenue, de manière à ce qu'il sente que j'en ai laissé beaucoup plus à dire que je n'en ai dit.
Pourquoi chercher la paix si loin, et vouloir que les autres nous forcent à l'accepter ? Qu'ils soient pacifiques, et aussitôt régnera la paix. À quoi bon, pour chercher à nous effrayer, usent-ils contre nous du nom de votre Béatitude, puisque votre lettre respire la paix et la douleur. D'où vient que leurs paroles sont pleines de rudes menaces ?
Enfin , une preuve sensible que les lettres que vous nous aviez envoyées par le prêtre Isidore, tendaient à l'union et à la concorde, c'est que ceux qui parlent faussement de paix n'ont pas voulu nous les remettre.
Qu'ils choisissent donc ce qu'ils voudront. Ou nous sommes bons, ou nous sommes méchants. Si nous sommes bons, qu'ils nous laissent en repos; si nous sommes méchants, pourquoi recherchent-ils la société des hommes méchants?
Ce que vaut l'humilité, il l'a appris par expérience. En séparant deux choses que lui-même, dans sa sagesse, avait autrefois unies, il prouve que maintenant il disjoint, par la volonté d'un autre, ce qu'il unissait jadis.
Dernièrement, il sollicita et obtint mon exil. Plût à Dieu qu'il eût usé du pouvoir qu'il avait; car, de même que sa volonté lui est ici réputée pour le fait, de même j'aurais, non-seulement de désir, mais encore d'effet, la couronne de l'exil. C'est en répandant son sang, et en souffrant, plutôt qu'en faisant des outrages, que l'Église du Christ a été fondée. Elle s'est accrue par les persécutions, elle a été couronnée par les martyres.
Si nos ennemis, comme le prouvent assez leurs lettres, aiment tant la rigidité; s'il leur va mieux de persécuter les autres que d'être persécutés, il y a ici des Juifs, il y a plusieurs sortes d'hérétiques, et spécialement d'infâmes manichéens; pourquoi n'osent-ils, par la moindre parole, s’attaquer à quelqu'un d'eux? N'y a-t-il que nous qu'ils veuillent exterminer? N'y a-t-il que nous qu'ils accusent de scinder l'Église, nous qui lui sommes étroitement unis par une même communion?
De grâce, n'est-il pas juste de demander ou qu'ils les chassent avec nous, ou qu'ils nous souffrent avec eux, à moins peut-être qu'ils ne songent à nous honorer davantage, en nous séparant des hérétiques par l'exil ?
Un moine, ô douleur ! menace d'autres moines, obtient qu'ils soient exilés, et ce moine encore c'est un homme qui se vante d'occuper un siège apostolique ! Mais ils ne sont pas gens à se laisser épouvanter, et ils présentent plutôt leur tête au tranchant de l'épée qu'ils ne cherchent, avec leurs mains, à en détourner les coups.
Et quel moine, puisqu'il est exilé de la patrie, ne se croirait pas aussi exilé en ce monde? Qu'est-il besoin d'autorité publique, de frais, de rescrits, et de courses dans tout le globe? Que le prince nous touche seulement du petit doigt, et nous partirons aussitôt. La terre appartient au Seigneur, aussi bien que tout ce qu'elle renferme 1. Le Christ n'est renfermé dans aucun lieu.
Quant à ce que dit Jean, que nous allons avec vous à Rome, et que nous communiquons avec cette Église, de laquelle nous semblons séparés…
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(1) Ps. XXIII. 1.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Page 477.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
Quant à ce que dit Jean, que nous allons avec vous à Rome, et que nous communiquons avec cette Église, de laquelle nous semblons séparés, nous n'avons que faire d'y aller, car ici, en Palestine, nous lui sommes unis de la même manière, et, sans courir si loin, nous communiquons, autant qu'il est en nous, avec les prêtres de cette Église qui sont dans le petit bourg de Bethléhem. Tout cela fait bien voir que c'est la passion seule qui l'anime, et non point l'intérêt de l'Église; que sa colère contre nous, comme celle qu'il inspire aux autres, ne doit point être imputée à l'Église en général.
Ainsi donc, ce que j'ai dit au commencement de la Lettre, je le répète encore, nous voulons la paix du Christ, nous désirons la concorde ; et je vous prie de lui dire qu'il doit aussi, non pas nous l'extorquer, mais la désirer sincèrement.
Qu'il se contente de nous avoir tant affligés jusqu'ici par ses outrages ; nos vieilles plaies, qu'il les guérisse du moins par la charité ; qu'il soit tel qu'il était, lorsque son propre penchant le portait à nous aimer.
Qu'il n'agisse point d'après les conseils d'une passion étrangère; qu'il fasse ce qu'il veut lui même, et non pas ce qu'on le force à vouloir.
Comme pontife, qu'il commande également à tous; ou, comme imitateur de l'Apôtre, qu'il travaille avec une égale ardeur, au salut de tous ses frères. S'il en use de la sorte, nous présentons volontiers les mains, nous tendons les bras; il aura en nous des amis et des proches, et nous trouvera soumis à lui, dans le Christ, comme nous le sommes à tous les autres Saints.
La charité est…
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXIX.Pages 477-479.A THÉOPHILE.Contre Jean de Jérusalem.SUITE
La charité est patiente, la charité est douce ; la charité n'est point envieuse, elle ne s'enfle point, elle endure tout, elle croit tout 1. La charité est la mère de toutes les vertus; elle a la force d'une triple corde 2, suivant ces paroles de l'Apôtre: La foi, l'espérance et la charité. Nous croyons, nous espérons ; la foi et l'espérance nous unissent par les liens de la charité.
Car, si nous avons quitté notre patrie, c'est afin de vivre en paix dans les champs et la solitude, sans aucune inimitié; c'est afin de vénérer les pontifes du Christ, ceux néanmoins qui enseignent la véritable foi, de les vénérer non point par la crainte que l'on a pour un maître , mais par les égards que l'on porte à un père ; c'est afin d'honorer les évêques comme on honore des évêques, mais non point pour nous plier sous la domination de ceux qui, abusant du nom d'évêque, veulent nous asservir malgré nous.
Nous n'avons pas une âme assez orgueilleuse pour ignorer ce que l'on doit aux prêtres du Christ, car quiconque les reçoit, les reçoit bien moins, eux, qu'il ne reçoit celui dont ils sont les évêques. Mais qu'ils se contentent de l'honneur qui leur est dû ; qu'ils sachent qu'ils sont pères, et non pas maîtres, spécialement de ceux qui, ayant rejeté les ambitions du siècle, ne trouvent rien de préférable au calme et au repos de la solitude.
Daigne le Christ Dieu tout-puissant exaucer vos supplications, et faire que nous soyons unis, non point par une fausse paix, mais par un amour véritable et fidèle, de peur que, nous mordant les uns les autres, nous ne nous dévorions mutuellement 3 .
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(1) I Cor. XII. 14. — (2) Eccl. IV. 12. — (3) Gal, V. 15.
Fin de cette Lettre.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE LVIII.Pages 371-373.À THÉOPHILE.au bienheureux pape Théophile, Jérôme.note de Louis : Le mot pape signifie simplement évêque. Les auteurs ecclésiastiques du IVe siècle et des âges suivants le prennent bien des fois dans ce sens. Nous avons cru devoir conserver en français cette petite particularité. (Tome III : Note de la lettre LXVI, page 409, ligne 10, écrite en la page 519)
Votre Béatitude se souvient que, dans le temps même où elle gardait le silence à mon égard, je ne cessais de lui donner des preuves de mon respect, considérant, non point ce que la sagesse demandait de vous , mais ce qu'il était convenable que je fisse. Maintenant, par la lettre dont vous m'avez honoré, je vois que j'ai retiré quelque fruit de la lecture de l'Évangile 1, et que si les incessantes prières de la femme dont il est parlé, fléchirent la dureté de son juge, les sollicitations assidues d'un fils doivent, à plus forte raison , émouvoir les entrailles d'un père.
Quant à l'avertissement que vous me donnez, au sujet des canons évangéliques, je vous en rends grâce, car le Seigneur châtie celui qu'il aime, et frappe de verges tous ceux qu'il reçoit au nombre de ses enfants.1
Croyez cependant qu'il n'est rien à quoi je m'attache plus qu'à défendre les droits du Christ, que je ne déplace point les bornes posées par nos pères, que je n'oublie jamais la foi de l'Église romaine, louée par la bouche de l'Apôtre 2, et avec laquelle l'Église d'Alexandrie se fait gloire d'être unie.
Pour ce qui est de l'hérésie coupable, que vous ménagez en toute patience, dans l'espoir que votre douceur ramènera au sein de l'Église ceux qui l'oppriment sans cesse, votre conduite déplaît à beaucoup de personnes, lesquelles appréhendent que, en attendant le retour d'un petit nombre, vous ne veniez à encourager l'audace des méchants, et à fortifier la faction. Salut dans le Christ.
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(1) Luc. XVIII. 5. — (1) Heb. XII. 6. — (2) Rom. I. 7-8.
Fin de cette Lettre.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
Fin de cette Lettre.LETTRE LIX.Pages 373-375.AU MÊME.au bienheureux pape Théophile, Jérôme.note de Louis : Le mot pape signifie simplement évêque. Les auteurs ecclésiastiques du IVe siècle et des âges suivants le prennent bien des fois dans ce sens. Nous avons cru devoir conserver en français cette petite particularité. (Tome III : Note de la lettre LXVI, page 409, ligne 10, écrite en la page 519)
J'ai reçu dernièrement la lettre par laquelle votre Béatitude, après m'avoir gourmandé de mon long silence, m'engage à lui écrire comme de coutume. Ainsi, quoique vous ne m'ayez point écrit par les saints frères Priscus et Eubulus, cependant, comme j'ai vu que , rempli de zèle pour la foi, ils ont rapidement parcouru les régions de la Palestine, et poursuivi jusque dans leurs trous ces basilics répandus de tous côtés, je vous annonce en peu de mots que le monde entier vous applaudit, qu'il se réjouit de vos triomphes, que les peuples voient avec allégresse l'étendard de la croix planté dans Alexandrie, et les trophées élevés sur les ruines de l'hérésie.
Plein de courage, plein de zèle pour la foi, vous avez montré que le silence gardé jusqu'à présent est l'effet de la sagesse, mais non de la condescendance. Je parlerai en toute liberté à votre Révérence. Nous étions affligés de vous voir trop patient, et, comme nous ignorions les raisons du maître , nous souhaitions la fin des méchants. Mais , comme je le vois, vous avez tenu long-temps la main levée, et vous avez suspendu vos coups, afin de frapper plus fort.
Quant à ce qui regarde la personne que l'on a reçue à la communion, vous ne devez point en savoir mauvais gré â l'évêque de cette ville, car vous n'aviez rien ordonné par vos lettres, et c'eût été une témérité à lui de porter un jugement sur une affaire qu'il ne connaissait pas. Au reste , je ne pense pas qu'il ose , ni qu'il veuille vous blesser en rien.
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