LETTRES de Saint Jérôme.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 328-331.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Dites-moi, valeureux champion, auxquels des huit articles objectés avez-vous répondu ? Je ne parle point encore des autres, mais ce premier blasphème : « Le Fils ne peut pas voir le Père, et l'Esprit saint ne peut pas voir le Fils, » avec quelle force ne l'a-t-on point battu en ruine ? « Nous croyons, vous dit Épiphane, que la sainte et adorable Trinité a une même substance, une même éternité, une même gloire, une même divinité , et nous anathématisons ceux qui admettent, dans la Trinité-Dieu, quelque chose de grand ou de petit, quelque chose d'inégal, quelque chose de visible. Mais, de même que nous disons du Père qu'il est incorporel, invisible, éternel, de même aussi nous disons, du Fils et de l'Esprit saint, qu'ils sont incorporels, invisibles, éternels . »
Si vous n'étiez pas dans ces sentiments, vous ne seriez pas de l'Église Note (3) . Je ne m'enquiers point si jadis vous pensâtes autrement; je n'examinerai point si vous aimez ceux qui prêchent cette doctrine, ni de quel parti vous étiez quand ou exilait ceux qui en faisaient profession ; ni quel est celui qui, entendant le prêtre Théo dire que 1'Esprit saint est Dieu, se bouchait les oreilles, et sortit précipitamment de l'Église avec les siens, crainte d'ouïr un tel blasphème. Il ne faut se convertir et se faire chrétien que le plus tard possible, a dit quelqu'un.
Le malheureux Prétextatus Note (4) , qui mourut consul désigné, cet homme sacrilège et adorateur des idoles, avait coutume de dire, en plaisantant , au bienheureux pape Damase : « Faites-moi évêque de la » ville de Rome , et aussitôt je serai chrétien. »
Qu' avez-vous besoin de long discours et de splendides périodes pour démontrer que vous n'êtes pas arien?...
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(1) Gal. I. 8. — (2)Ps. CXXXVIII. 21. 22. — (3) Matth. X. 37..
Note (3) : Jean de Jérusalem avait suivi les erreurs de Macédonius, qui niait la divinité de l'Esprit saint.
Note (4) : Ce que Jérôme dit ici de Prætextatus est un reproche tacite qu'il fait à Jean de Jérusalem de ne s'être converti que par intérêt, parce que, après avoir abjuré l'hérésie de Macédonius, il fit si bien par ses menées, qu'il parvint à la chaire épiscopale de l'Église de Jérusalem.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 331-333.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Qu' avez-vous besoin de long discours et de splendides périodes pour démontrer que vous n'êtes pas arien?
Ou niez qu'Origène ait avancé les erreurs dont on l'accuse; ou, s'il est vrai qu'il les ait avancées, condamnez-le, pour l'avoir fait. Voulez-vous savoir jusqu'où va eu ceci le zèle des vrais croyants, écoutez l'Apôtre : Si nous vous annoncions nous-mêmes, ou si un ange du ciel vous annonçait un Évangile différent de celui que nous vous avons annoncé, dites-nous, dites-lui anathème 1 Afin d'atténuer le crime, et comme si, en cachant le nom des coupables, tout allait bien, ou qu'on n'accusât personne d'avoir proféré des blasphèmes, vous donnez à une foi douteuse les apparences les plus belles. Dites tout d'abord, et que ce soit le commencement de votre lettre, dites anathème à celui qui a osé écrire de pareilles choses. Une foi pure ne saurait hésiter. Dès que le scorpion se montre, il faut l'écraser. David cet homme trouvé selon le cœur de Dieu, a dit : Seigneur, ne haïs-sais-je point ceux qui vous haïssaient, et ne me consumais-je pas de douleur, à l'aspect de vos ennemis? Je les haïssais d'une haine parfaite 2.
Moi, si j'avais entendu mon père, ma mère, mon frère, dire de pareilles choses contre mon Christ, j'aurais déchiré ces bouches blasphématrices, je les aurais brisées comme la gueule d'un chien enragé et ma main aurait porté les premiers coups à mes proches. Ceux qui disent à leur père et à leur mère : Je ne vous connais point ceux-là font la volonté du Seigneur. Celui qui aime son père ou sa mère plus qu'il n'aime le Christ celui-là n'est pas digne de lui 3
On vous objecte que votre maître, que vous trouvez bon catholique et que vous défendez avec chaleur, on vous objecte qu'il a dit : Le Fils ne voit pas le Père, l'Esprit saint ne voit pas le Fils, — et vous me dites, à moi : Le Père est invisible, le Fils est invisible, l'Esprit saint est invisible, comme si les anges, les chérubins et les séraphins n'étaient pas, selon leur nature, également invisibles à nos yeux. Voilà pourquoi, doutant même si l'on pouvait voir les cieux, David disait: Je verrai les cieux, qui sont l'ouvrage de vos mains 1. Il dit : Je verrai, et non pas : Je vois. Je les verrai, quand je contemplerai à découvert la gloire du Seigneur ; mais à présent nous ne voyons, nous ne connaissons qu'en partie 2.
On vous demande si le Fils voit le Père, et vous répondez : Le Père est invisible. On vous demande si l'Esprit saint voit le Fils, et vous répondez : Le Fils est invisible. Il s'agit de savoir si la Trinité se voit réciproquement; des oreilles mortelles ne peuvent entendre un si grand blasphème, et vous dites : La Trinité est invisible. Vous vous étendez fort au long sur les autres attributs de la Trinité ; vous pérorez sur des choses que nul ne vous demande. Vous donnez le change à l'auditeur, afin de ne pas répondre aux objections que l'on vous fait.
Mais je veux que tout ce que j'ai dit là soit superflu…
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(1) Gal. I. 8. — (2) Ps. CXXXVIII. 21. 22. — (3) Matth. X. 37. — (1) Ps. VIII. 4. — (2) I. Cor. XIII. 9.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 333-335.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.
Mais je veux que tout ce que j'ai dit là soit superflu. Je vous accorde que vous n'êtes point arien, et même, que vous ne le fûtes jamais. Je suppose que, dans l'exposition du premier article, vous ne donnez plus aucun soupçon contre vous, et que vous avez parlé en toutes choses sans détour, sans déguisement; je vous parle aussi avec la même candeur et la même franchise. Le pape Épiphane vous a-t-il accusé d'arianisme ? vous a-t-il imputé l'hérésie de l'athée Eunomius Note (5) , ou bien celle d'Ærius Note (6) ? Il ne vous reproche, dans sa lettre, que de suivre les dogmes d'Origène, et d'avoir entraîné quelques personnes dans ses erreurs. Pourquoi, interrogé sur une chose, répondre sur une autre, puis, comme si vous aviez affaire à des fous , dissimuler les griefs articulés dans la lettre d'Épiphane, et rebattre sans cesse tout ce que vous avez dit, en sa présence, à l'Église. On vous demande une profession de foi, et vous nous imposez, quoique nous n'en voulions pas, vos traités et votre faconde ?
Vous souvenant, ô mon lecteur, que vous paraîtrez au tribunal du Seigneur, et comprenant bien que vous serez jugé sur votre jugement, ne prenez parti, je vous en conjure, ni pour moi, ni pour mon adversaire ; considérez non point les personnes qui vous parlent, mais seulement la chose dont il s'agit. Revenons à ce qui nous occupait.
Vous dites, dans votre lettre, que jamais, avant que Paulinianus eut été ordonné prêtre, le pape Épiphane ne vous imputa les erreurs d'Origène. D'abord, cela est douteux, et j'incidente sur les personnes…
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Note (5): EUNOMIUS était évêque de Cyzique. Il soutenait qu'il connaissait Dieu aussi parfaitement que Dieu se connaît lui-même ; que le Fils de Dieu n'est pas véritablement Dieu, et ne s'est uni à l'humanité que par sa vertu et ses opérations; que la foi seule peut sauver, malgré les plus grands crimes, malgré l'impénitence, etc.
Note (6): ÆRIUS, prêtre d'Arménie , donna son nom à une secte, qui avait à peu près sur la Trinité les mêmes sentiments que les ariens , mais qui prétendait, par exemple , que l’épiscopat n'est point un ordre différent du sacerdoce , et qu'il ne donne aux évêques le pouvoir d'exercer aucune fonction qui ne puisse être remplie par les prêtres. Les aériens soutenaient encore que les prières pour les morts sont inutiles, que les jeûnes établis par l'Église sont superstitieux, etc. Les protestants ont renouvelé la plupart de leurs erreurs.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 335-339.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Vous dites, dans votre lettre, que jamais, avant que Paulinianus eût été ordonné prêtre, le pape Épiphane ne vous imputa les erreurs d'Origène. D'abord, cela est douteux, et j'incidente sur les personnes. Épiphane prétend vous avoir averti, vous n'en convenez pas; il produit des témoins, vous ne voulez par les entendre; il rappelle que quelqu'un en fut même averti, unis niez tout ; il vous envoie une lettre par un de ses clercs, et demande une réponse, mais vous vous taisez, vous n'osez pas souffler, et, provoqué par la Palestine, vous répliquez à Alexandrie. De vous ou de lui, qui faut-il croire? Ce n'est point à moi à décider cela. Je pense que vous-même vous n'oseriez pas vous attribuer la vérité, et imputer le mensonge à un si grand homme.
Toutefois, il se peut faire que chacun parle en sa faveur. Je vous prends donc a témoin contre vous-même. S'il ne s'agissait nullement des dogmes de la foi, si vous n'aviez point excité le zèle du vieillard, s'il ne vous avait rien écrit, qu'était-il besoin que vous allassiez, dans un traité de l'Église, parler de tous les dogmes, vous qui n'êtes pas très-éloquent, et discuter sur la Trinité, sur l'incarnation du Christ, sur la croix, sur la nature des anges, sur l'état des âmes, sur la résurrection du Sauveur et sur la nôtre ? Des choses que peut-être vous aviez oublié de placer dans votre apologie, à quoi bon venir, en face de ce saint et illustre personnage, en face de tout son peuple, les débiter intrépidement et tout d'une haleine?
Où sont les anciens docteurs de l'Église, qui pouvaient à peine développer une seule question dans plusieurs volumes?
Où est le vase d’élection, la trompette de l'Évangile, le rugissement de notre lion, le tonnerre des peuples, le fleuve de l'éloquence chrétienne, lui qui admire plutôt qu'il n'explique un mystère ignoré aux générations qui nous ont devancés, et n'ose pas sonder la profondeur des trésors de la sagesse et de la science de Dieu 1?
Où est Isaïe, qui nous annonce la Vierge, et qui, succombant sous le poids d'une seule question , s'écrie : Qui donc racontera sa génération 2 ? II s'est rencontré, de nos jours, un assez petit homme, qui a expliqué, en un seul mouvement de langue, tous les dogmes de l'Église, et cela de la manière la plus claire.
Si personne ne vous demandait raison de votre foi, si tout était tranquille, vous vous êtes follement engagé dans de si difficiles et de si longues disputes. Si alors déjà il s'agissait de votre foi, ce n'est donc point l'ordination de Paulinianus qui vous a brouillé avec Épiphane, puisqu'il est certain que Paulinianus a été ordonné long-temps après. Vous avez trompé les absents et vos lettres flattent des oreilles éloignées de vous.
Nous étions ici, nous savons tout…
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(1) Rom. XI. 33. — (2) Is. LIII. 8.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 339-341.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Nous étions ici, nous savons tout.
Lorsque dans votre Église, le pape Épiphane parlait contre Origène, et que vous étiez attaqué sous le nom de cet homme, alors, vous et vos partisans, la bouche écumante, les narines contractées, vous grattant la tête, vous osiez, par des signes, traiter le pontife de vieillard radoteur.
Un jour qu'il parlait sur le même sujet, devant le sépulcre du Seigneur, ne lui envoyâtes-vous point un diacre chargé de lui imposer silence? Quel évêque jamais ordonna, en présence du peuple, chose pareille à un de ses prêtres?
Une fois que vous alliez du lieu de la Résurrection au Calvaire, qu'une foule de personnes de tout âge, de tout sexe, se pressaient autour de lui pour lui présenter des enfants, lui baiser les pieds, toucher ses vêtements, et qu'il ne pouvait ni avancer, ni demeurer à la même place, tant l'accablaient les flots de la multitude, vous alors, dévoré par la jalousie, ne vous emportiez-vous pas contre ce digne vieillard? Vous n'eûtes pas honte de lui dire en face qu'il prenait plaisir à s'arrêter et s'arrêtait exprès.
Rappelez vous, je vous prie, le jour où le peuple attendit Épiphane jusqu'à la septième heure, dans l'espérance d'ouïr sa parole, et souvenez-vous des discours que vous prononçâtes. Avec quelle fureur et quelle indignation vous déclamiez contre les anthropomorphites, qui, dans leur simplicité grossière, s'imaginent que Dieu est composé des membres que les Livres divins lui attribuent ! Vous tourniez les yeux, les mains et tout le corps du côté du vieillard, afin de le rendre suspect de cette folle hérésie. Lorsque fatigué, la bouche sèche, la tête renversée en arrière, les lèvres tremblantes, vous cessâtes de parler, et qu'enfin les vœux de tout le peuple furent comblés, que fit votre fou, votre radoteur de vieillard ? Il se leva pour montrer qu'il avait quelque chose à dire, puis, après avoir, de la voix et du geste, salué rassemblée :« Tout ce, dit-il, que mon frère par le rang, mon fils par l'âge, vient de faire entendre contre l'hérésie des anthropomorphites Note (7), est vrai et catholique, et je suis de son sentiment sur cela, mais il est juste que, comme nous condamnons cette hérésie, nous condamnions aussi les dogmes pervers d'Origène. »
Les rires universels, les huées qui s'ensuivirent alors , vous vous les rappelez, je pense. Voilà pourquoi vous dites, dans votre lettre, qu'il disait au peuple ce qu'il voulait, et qu'il le disait de quelle manière il voulait. Il délirait, sans doute, lui qui, dans un lieu soumis à votre juridiction, venait parler contre votre sentiment.— Il disait, selon vous, tout ce qu'il voulait, et de quelle manière il voulait. — Ou approuvez, ou réprouvez. Pourquoi biaiser même ici? Si les choses qu'il disait étaient bonnes, que ne le louez-vous hautement ?Si elles étaient mauvaises, que ne le gourmandez-vous constamment ?
Or, la colonne de la vérité et de la foi, celui qui ose écrire d'un si grand homme que, parlant au peuple , il disait tout ce qu'il voulait et tout ce qu'il s'imaginait, voyons un peu avec quelle retenue, avec quelle modestie et quelle humilité il s'exprime à son propre sujet. « Un jour, dites-vous…
Note (7):
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 341-345.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Or, la colonne de la vérité et de la foi, celui qui ose écrire d'un si grand homme que, parlant au peuple , il disait tout ce qu'il voulait et tout ce qu'il s'imaginait, voyons un peu avec quelle retenue, avec quelle modestie et quelle humilité il s'exprime à son propre sujet.
« Un jour, dites-vous, nous parlâmes devant Épiphane, et un endroit de l'Écriture, qu'on venait de lire, nous ayant engagé à prendre la parole, alors, en sa présence et en face de foule l'assemblée, nous dîmes touchant la foi et les dogmes ecclésiastiques ce que, avec la grâce de Dieu, nous enseignons toujours dans l'Église et dans les catéchèses. »
D'où vient, je vous prie, tant de présomption, tant d'orgueil? Tous les philosophes et tous les orateurs déchirent cruellement Gorgias de Léontium Note ( 8 ), parce qu'il se vantait de répondre en public et sur-le-champ à toutes les questions qu'on voudrait lui faire.
Si je n'étais retenu par l'honneur du au sacerdoce et au titre que vous portez ; si je ne me rappelais ces paroles de l'Apôtre : Je ne savais pas, mes frères, que ce fût le grand-prêtre, car il est écrit : Tu ne maudiras pas le chef du peuple 1, quels sanglants reproches ne vous ferais-je point sur ce que vous avez avancé, dans votre récit ?
Du reste, la dignité dont vous êtes revêtu, vous l'avilissez vous-même, quand vous traitez si indignement et par vos actions et par vos discours un pontife qui est le père de presque tous les évêques, et en qui brille encore l'antique sainteté. — Vous dites que, certain jour, un endroit de l'Écriture, qu'on venait de lire, vous ayant engagé à prendre la parole, alors, en présence d'Épiphane et de toute rassemblée, vous parlâtes de la foi et de tous les dogmes ecclésiastiques? — II ne faut plus admirer Démosthènes, qui, dit-on, employa beaucoup de temps à composer sa belle harangue contre Eschine. Il ne faut plus admirer Cicéron? qui, au rapport de Cornélius Népos, récita en sa présence , et dans les mêmes termes à peu près qu'elle a été publiée, son oraison pour la défense de Cornélius Note (9), tribun séditieux. Voici noire Lysias, voici Gracchus, et, pour dire quelque chose des modernes, voici Quintus Atérius, celui-là même qui était toujours prêt à parler, qui ne tarissait pas si on ne l'avertissait de finir, et dont César Auguste disait excellemment : « Notre Quintus Atérius Note (10) a besoin d'être enrayé ? »
Un homme sage et sensé se glorifia-t-il jamais d'avoir parlé,…
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(1) Act. XXIII; Exod. XXII. 28.
Note ( 8 ) : LÉONTIUM,ville de Sicile. Il y a, sur Gorgias, un bon article dans l' Histoire critique de l'éloquence chez les Grecs, par Belin de Ballu , tom. I , pag. 100-108.
Note (9) : Nous n'avons plus que de petits fragments du discours pour C. Cornélius : Œuvres complètes de Cicéron, tom. XXIX. Voyez ce que M. Le Clerc en a dit, pag. xij et xiij de l'Introduction.
Note (10) : « Le débit précipité de Q. Hatérius est un défaut que doit éviter tout homme sensé. Jamais on ne le vit s'arrêter ni hésiter ; il commençait et finissait d'une seule traite.».Sénèque, Lettre XL.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 345-347.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Un homme sage et sensé se glorifia-t-il jamais d avoir parlé, dans un seul discours, et de la foi, et de tous les dogmes ecclésiastiques ? Montrez-moi, je vous prie, ce passage assaisonné de toute la saveur des Écritures, et qui vous donna l'occasion subite de montrer ce que vous savez faire. Si le torrent de votre faconde ne vous eût entraîné, l'on pouvait ne pas s'imaginer que vous étiez coupable de parler sur-le-champ de tous les dogmes de la foi.
Mais qu'est-ce que cela?
Vous promettez une chose, et vous en donnez une autre. Il est, chez nous, d'usage que ceux qui doivent être baptisés, soient, pendant quarante jours, publiquement instruits sur la sainte et adorable Trinité. Si le passage de l'Écriture qu'on a lu en votre présence vous a engagé à parler, durant une heure, sur tous les dogmes de la religion qu'était-il besoin d'expliquer en abrégé ce qu'on enseigne pendant quarante jours ? Ou si vous parliez des matières que vous expliquez pendant toute la Quadragésime comment donc, à propos d'un seul passage de l’Écriture, avez-vous été engagé à parler de tous les dogmes de la foi? Mais il biaise encore ici, car il peut se faire qu'une seul passage de l'Écriture lui ait donné occasion d'expliquer ce qu'il avait coutume d'enseigner dans l'Église aux catéchumènes, pendant quarante jours ; car il faut être également éloquent ou pour dire peu de chose en beaucoup de mots, ou en beaucoup de mots, très-peu de chose.
On pourrait dire encore que, sa verve s'étant échauffée à l'occasion d'un seul passage, il a parlé, durant quarante jours, sans discontinuer, et que le paresseux vieillard, suspendu, pour ainsi dire, à ses lèvres, par le désir d'apprendre des choses inouïes, s'était presque laissé tomber, accablé qu'il était de lassitude et de sommeil. Tout cela est, en quelque manière, supportable ; peut-être parle-t-il, en cette occasion, avec sa droiture et sa franchise habituelle.
Voyons le reste de la lettre, dans lequel, après plusieurs détours d'une discussion pompeuse, il s'explique ouvertement, sans biaiser, et conclut ainsi ses admirables traités :« Quand nous eûmes parlé de la sorte, en présence d'Épiphane, nous le priâmes, par déférence, de parler après nous, car toujours nous avons cherché à lui rendre tout l'honneur possible. Il loua notre discours, déclara qu'il en était émerveillé et que nous n'avons rien dit que de très-orthodoxe. »
L'honneur infini que vous lui avez rendu, on peut le connaître suffisamment par…
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 347-349.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.
L'honneur infini que vous lui avez rendu, on peut le connaître suffisamment par les outrages que vous lui avez faits, en envoyant votre archidiacre lui ordonner de se taire, et en lui reprochant hautement de ne s'arrêter au milieu du peuple que par amour de la louange. Le présent nous instruit du passé.
Lui, voilà trois ans qu'il dévore ses injures et que oubliant des disputes personnelles, il se borne à vous demander compte de votre foi. Vous qui regorgez de richesses, qui faites votre profit de la piété de l'univers entier, vous envoyez çà et là vos graves ambassadeurs et vous arrachez le vieillard Épiphane à son assoupissement afin de le forcer à vous répondre.
Et véritablement, puisque vous lui aviez rendu tant d’honneur, il était juste qu'il louât vos discours, surtout des discours improvisés. Mais comme les hommes parfois ont coutume de louer ce qu'ils n'approuvent point, et de repaître de vaines flatteries une sotte vanité, Épiphane ne loua pas seulement votre discours, il dit encore qu'il en était émerveillé, et, crainte que ce ne fût point assez de ce prodige, il déclara devant tout le peuple que vous n'aviez rien dit que de très-orthodoxe.
Nous savons que véritablement il parla ainsi, nous qu'il vint voir, tout troublé encore de vos cris, et à demi mort, et disant qu'il avait été facile à communiquer avec vous. Le monastère entier l'ayant conjuré de vous aller trouver, il ne put résister aux sollicitations de tant de personnes, et alla chez vous le soir ; mais il s'échappa, au milieu de la nuit, pour revenir à Bethléem, comme le prouve une lettre par lui écrite au pape Siricius. Lisez-la, cette lettre, et vous verrez comment il a admiré votre discours, comment il l'a déclaré orthodoxe. Mais nous nous arrêtons à des fadaises, et nous réfutons en de longues pages des rêveries ridicules et vaines.
Passons à la seconde question…
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 349-353.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Passons à la seconde question. Là, comme s'il n'avait aucun dessein, il se met, dans sa nonchalance et son incurie, à faire semblant de dormir, afin d'endormir aussi le lecteur.
« Quant aux autres points qui regardent la foi, nous disions, écrit-il, qu'un seul et même Dieu, c est-à-dire, la Trinité sainte, a fait toutes les choses visibles et invisibles, les vertus célestes et les créatures terrestres, suivant le langage du bienheureux David : C'est par la parole du Seigneur que les cieux ont été affermis, et c'est le souffle de sa bouche qu’ a fait toute leur vertu 1. Cela paraît d'une manière très-simple dans la création de l'homme ; car c'est Dieu qui l'a formé du limon de la terre, et qui, par son souffle, lui a donné une âme raisonnable, douée du libre arbitre, puis une nature à lui propre, mais non pas, comme l'enseignent quelques impies, une portion de sa substance, dont ils prétendent qu'il a fait également part aux saints anges , selon ce que la divine Écritures dit de Dieu : Il prend des esprits pour ses envoyés, et des feux ardents pour ses ministres 2. L'Écriture ne nous permet pas de croire que les anges ne soient point sujets au changement, puisqu'elle dit: Les anges qui n'ont pas conservé leur principauté, mais qui ont abandonné leur propre demeure, il les retient liés de chaînes éternelles dans les ténèbres, et les réserve pour le jugement du grand Dieu 3 parce qu'ils sont changés, et que déchus de leur dignité, de leur gloire, ils se trouvent, nous le savons bien, relégués avec les démons. Quant aux âmes humaines, qu'elles soient formées de la ruine des anges, ou de leur conversion c'est ce que jamais nous n'avons cru ni enseigné. A Dieu ne plaise, car nous regardons cette doctrine comme contraire à celle de l'Église. »
Il s'agit de savoir si, avant que l'homme fut placé dans le paradis, avant qu'Adam fut formé de la terre, les âmes ont été parmi les créatures raisonnables, si elles ont eu un état à elles propre ; si elles ont vécu, subsisté, demeuré en cet état;
s'il est vrai de dire, avec Origène,
que toutes les créatures raisonnables sont incorporelles et invisibles;
que, par leur négligence, elles descendent peu à peu dans un état inférieur;
que, suivant la nature des lieux où elles descendent, elles prennent des corps, lesquels, par exemple, sont d'abord éthéréens, puis ensuite aériens;
que ces corps, à mesure qu'ils s'approchent de la terre, s'enveloppent de corps plus grossiers;
enfin que les âmes sont entourées de chairs humaines, et que les démons, qui volontairement ont quitté le service de Dieu, avec leur chef qui est le diable, se revêtent de corps humains, sitôt qu'ils commencent à se repentir; que, par la pénitence qu'ils font en cet état, ils méritent, après la résurrection, de retourner auprès de Dieu par le même cercle qu'ils ont parcouru en venant dans la chair, puis aussi d'être dégagés de leurs corps aériens et éthéreens, et que tout genou fléchit alors devant Dieu, dans le ciel, sur la terre, dans les enfers, et que Dieu est tout en toutes choses 1.
Puisqu'il s'agit de cela entre nous, pourquoi donc, abandonnant le sujets des débats, sortant de l'arène et du champ de bataille, vous arrêtez-vous à des discussions étrangères et oiseuses ?
Vous croyez que Dieu seul a créé toutes les choses visibles et invisibles; Arius disait cela aussi…
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(1) Ps. XXXII. — (2) Ibid. CIII. 4. — (3) Jud. 6. — (1) Philipp. II. 10. ; I. Cor. XIV. 11.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 353-357.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Vous croyez que Dieu seul a créé toutes les choses visibles et invisibles; Arius disait cela aussi, lui qui confesse que le Fils a créé toutes choses. Si l'on vous imputait l'hérésie de Marcio, qui admettait un Dieu bon, créateur des choses invisibles, et un Dieu juste, créateur des choses visibles, je me contenterais de cette réponse. Vous croyez que l'univers est l'ouvrage de la Trinité ; c'est ce que nient les ariens et les semi-ariens, qui, par un blasphème horrible, prétendent que l'Esprit saint n'est pas créateur, mais qu'il est seulement créature. Quant à vous, qui donc aujourd'hui vous accuse d'être arien?
Vous dites que l'âme humaine n'est point une portion de la substance de Dieu, comme si Épiphane vous traitait maintenant de manichéen. Vous détestez ceux qui disent que les anges deviennent des âmes, et que de leur ruine se forme notre substance.
Ne déguisez pas vos sentiments ; ne nous en imposez point sous des dehors de franchise et de simplicité. Origène n'a jamais dit que les anges deviennent des âmes, puisqu'il enseigne que le nom d'ange sert à désigner les emplois des célestes esprits, et non pas leur nature.
Dans son livre des Principes, il dit que les Anges, les Trônes, les Dominations, les Puissances, les princes du monde et des ténèbres, et tous les titres qui peuvent exister non-seulement dans le siècle présent, mais encore dans le siècle futur 1, sont les âmes des corps qu'ils prennent soit par leur propre penchant, soit à cause du besoin qu'ils en ont pour leur ministère. Il dit même que le soleil, la lune et le chœur de tous les astres sont les âmes des créatures jadis raisonnables et incorporelles, et que, étant assujetties maintenant à la vanité, c'est-à-dire à des corps ignés, que nous, ignorants et grossiers, nous appelons les luminaires du monde, elles seront un jour affranchies de cette servitude et de cette corruption, pour participer à la liberté et à la gloire des enfants de Dieu. De là vient que toute créature gémit et se trouve dans le travail de l'enfantement 2. Voilà pourquoi l'Apôtre s'écrie avec douleur : Malheureux homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ? 1
Ce n'est point ici le lieu de réfuter ce dogme des gentils, qui est en partie platonicien.
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(1) Ephes. I. 21. — (2) Rom. VIII. 22. — (1) Rom. VII. 24.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 357-359.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.
Ce n'est point ici le lieu de réfuter ce dogme des gentils, qui est en partie platonicien. Il y a près de dix ans que, dans, mes Commentaires sur l'Ecclésiaste et dans l'explication de l'épître aux Éphésiens, j'ai, ce me semble, exposé aux esprits sages la pensée de mon âme.
Je vous prie maintenant, vous dont la parole est si féconde; vous qui, dans un seul discours, expliquez à fond tous les dogmes de la foi, je vous prie de répondre, mais en deux mots et sans détour, à la question que je vais vous faire.Lorsque Dieu forma l'homme du limon de la terre, et que, par la grâce de son propre souffle, il lui donna une âme, cette âme existait-elle avant sa création? Où était-elle, avant que Dieu daignât, par son souffle, la communiquer à l'homme? Dieu, par sa puissance, lui donna-t-il l'être et la vie au sixième jour, jour où il forma le corps humain du limon de la terre ?
À cela vous ne répondez rien; et, comme si vous ne saviez pas ce qu'on vous demande, vous vous arrêtez à des questions oiseuses. Laissant tranquille Origène, vous vous déclarez contre Marcio, contre Apollinaris, contre Eunomius, contre Manichée et, contre les inepties des autres hérétiques.
On vous demande la main, vous présentez le pied. Une doctrine que vous n'avez point abjurée, vous la propagez en secret. Nous, gens grossiers, vous savez nous calmer, sans trop déplaire aux vôtres.
Vous dites que les anges sont changés plutôt en démons qu'en âmes, comme si Origène ne disait pas que les démons sont des âmes qui animent des corps aériens, et que, s'ils changent de vie, de démons qu'ils sont, ils deviendront des âmes humaines.
Vous écrivez que les anges sont sujets au changement, puis, à la faveur de ce qui est vrai, faisant passer ce qui est sacrilège et mensonge, vous prétendez que, par plusieurs changements, ils deviendront âmes, non point en quittant l'état d'anges, mais celui où ils se sont trouvés après leur chute. Je vais éclaircir ce que je dis.
Supposez un tribun, dégradé pour quelque faute, et redescendu jusqu'au rang de simple soldat, en passant par tous les offices de la cavalerie, est-ce qu'il devient tout-à-coup simple soldat, de tribun qu'il était auparavant? — Non, mais on le fait d'abord primicier Note (10), ensuite sénateur, puis ducénarius Note (11), biarchus Note (12) , circitor Note (13) , puis simple cavalier, et enfin simple soldat Note (14); et, quoiqu'il ail été autrefois simple soldat, avant d'être tribun, cependant il devient, non pas d'abord de tribun simple soldat mais bien primicier.
Origène dit que les créatures raisonnables descendent peu à peu, comme par l'échelle de Jacob, jusqu'au dernier échelon, c'est-à-dire jusqu'à la chair et au sang ; mais qu'il est impossible que du nombre cent, on vienne tout d'un coup au nombre un sans passer par tous les autres nombres comme par les degrés d'une échelle et que les anges changent de corps autant de fois qu'ils changent de demeure en descendant du ciel en terre.
Voilà de quelles ruses, de quels artifices vous vous servez pour nous faire regarder comme des misérables, des bêtes et des animaux incapables de concevoir les choses spirituelles…
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Note (10 ) : PRIMICIER, nom formé de primus, premier, et in cera , sur la cire ; en d'autres termes , celui qui est inscrit le premier.
Note (11 ) : DUCENARIUS, officier qui commandait deux cents hommes.
Note (12 ) :
Note (13 ) : CIRCITOR , était un officier qui faisait la ronde autour du camp , pour voir si tout était en ordre.
Note (14 ) : Pour le nom de simple soldat ou tiro, consultez le Voyage à Rome sous Auguste et Tibère, par Dezobry.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 359-363.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Voilà de quelles ruses, de quels artifices vous vous servez pour nous faire regarder comme des misérables, des bêtes et des animaux incapables de concevoir les choses spirituelles. Vous Jérosolymites, vous riez des anges eux-mêmes. Vos mystères cependant sont dévoilés; vos dogmes, tissus de fables païennes, on les fait connaître aux chrétiens. Ce que vous admirez aujourd’hui, vous, jadis nous le méprisâmes dans Platon; nous le méprisâmes, parce que nous avons reçu la folie du Christ; nous avons reçu la folie du Christ, parce que la folie de Dieu est plus sage que la sagesse des hommes 1. Des chrétiens et des prêtres de Dieu n'ont pas honte de s'attacher à des termes douteux, ni d'émettre des pensées ambiguës, qui trompent celui qui parle plutôt qu'elles ne trompent celui qui écoute.
Je pressais un jour l'un de vos adeptes de me dire ce qu'il pensait de l'âme, s'il croyait qu'elle eût existé ou non avant le corps. Il me répondit que le corps et l'âme avaient existé en même temps. Je savais que cet hérétique cherchait des détours dans la conversation ; il vint enfin à me dire que l'âme ne doit être appelée âme qu'après son union avec le corps qu'elle anime, et que, ayant cette union, elle s'appelle ou démon, ou ange de Satan, ou esprit de fornication, ou, dans un sens contraire, domination, puissance, esprit administrateur, messager.
Si l'âme existait avant la formation d'Adam, alors, en quelque état, en quelque situation qu'elle fût, elle vivait, elle faisait, car enfin on ne peut pas s'imaginer que, étant incorporelle et éternelle, elle restât immobile et endormie comme les loirs. Il a donc fallu une raison préexistante pour que cette âme, qui n'avait pas de corps, en reçût un plus tard. Que s'il est de la nature de l'âme d'être sans corps, il est donc contre sa nature d'être unie au corps; s'il est contre sa nature d'être unie au corps, la résurrection du corps sera donc contre la nature. Mais la résurrection ne se fera pas contre la nature; donc, selon votre propre sentiment, le corps, après la résurrection, n'aura point d’âme, puisqu'il ne peul ressusciter contre l'ordre de la nature.
Vous dites que l'âme n'est point une portion de la substance de Dieu. C'est bien ; car vous condamnez ainsi l'impie Manichée, que l'on ne peut nommer sans se souiller. Vous dites que les anges ne deviennent point âmes. Je vous accorde cela, quoique je sache bien dans quel sens vous le dites. Mais, puisque nous savons ce que vous niez, nous voulons savoir à présent ce que vous croyez.
« Dieu, dites-vous, ayant pris du limon de la terre, en forma l'homme, et, par la grâce de son propre souffle, lui donna une âme raisonnable, une âme douée du libre arbitre, et qui n'était pas, comme l'enseignent quelques impies, une portion de la substance de Dieu, mais qui avait une nature à elle. »
Voyez quel détour il prend pour dire ce qu'on ne lui demande point. Nous savons que Dieu a formé l'homme du limon de la terre; nous savons qu'il souffla sur le visage de l'homme, et que celui-ci fut aussitôt vivant et animé ; nous n'ignorons pas que l'âme est raisonnable, qu'elle est douée du libre arbitre et nous savons que sa création est l'ouvrage de Dieu.
Tout le monde convient de l'erreur de Manichée qui prétend que l'âme est une portion de la substance de Dieu. Mais je vous demande à présent : …
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(1) I. Cor. I. 25.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 363-367.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Tout le monde convient de l'erreur de Manichée qui prétend que l'âme est une portion de la substance de Dieu.
Mais je vous demande à présent : Cette âme qui est l'ouvrage de Dieu, qui est douée du libre arbitre, qui est raisonnable et qui n'est point une portion de la substance du créateur, quand donc a-t-elle été faite?
Est-ce quand Dieu forma l'nomme du limon de la terre et répandit sur son visage un souffle de vie? Ou bien existait-elle parmi les créatures raisonnables et incorporelles, avant que Dieu, par son souffle l'eût communiquée à l'homme?
Ici vous vous taisez, ici vous feignez d'être simple et ignorant, puis, sous les paroles de l'Écriture, vous cachez ce que l'Écriture n'enseigne point. À l'endroit où vous dites, — ce que personne du reste ne vous demande, — que l'âme n'est point, comme le prétendent quelques impies, une portion de la substance de Dieu, vous deviez dire, pour répondre à ce que nous vous demandons tous que l'âme donnée à l'homme n'était point une âme qui eût existé, que Dieu eût auparavant créée, qui eût vécu depuis long-temps, parmi les créatures raisonnables incorporelles et invisibles. Vous ne dites rien de cela; vous nous montrez Manichée et vous cachez Origène, et de même que lorsque les petits enfants demandent de la nourriture, les nourrices leur présentent des jouets pour distraire leur pensée de même aussi vous nous présentez d'autres choses à nous gens grossiers, afin que, étant occupés d'un nouveau personnage nous perdions de vue celui que nous cherchons.
J'admets que vous ne pensiez pas de la sorte, et que la dissimulation ne soit pour rien dans votre silence, mais d'où vient que, après avoir commencé à parler de la nature de l'âme, après avoir pris à l'époque même de la création de l'homme un sujet aussi grand, d'où vient que, la question étant toute flagrante, vous passez brusquement aux anges et à l'incarnation du Verbe, et que, franchissant ces longues et épineuses questions, vous nous laissez là empêtrés dans la boue de la route? Si le souffle de Dieu, ce que vous n'admettiez point, ce que vous n'expliquez pas maintenant, — est le principe de l'âme humaine, quelle est donc l'origine de l'âme d'Ève, sur le visage de qui Dieu n'a pas répandu son souffle? Ne parlons pas d'Ève ; comme elle a été formée d'une côte de l'homme et qu'elle est en cela même une figure de l'Église, il ne faut pas, après tant de siècles, l'exposer aux calomnies de ses descendants.
Caïn et Abel, les premiers enfants des premiers humains, où prirent-ils leur âme? quelle est encore l'origine présumée des âmes de tous les autres hommes?...
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 367-371.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.
Caïn et Abel, les premiers enfants des premiers humains, où prirent-ils leur âme? quelle est encore l'origine présumée des âmes de tous les autres hommes?
Viennent-elles de la génération, comme les brutes, en sorte qu'une âme engendre une autre âme, de même qu'un corps engendre un autre corps?
Ou bien, étant descendues insensiblement sur la terre, entraînées par le désir qu'elles ont de s'unir aux corps, les créatures raisonnables ont-elles fini par entrer dans des corps humains?
Ou bien, ce qui est conforme à la doctrine de l'Église, est-ce que, suivant ces paroles du Sauveur: Le Père n'a cessé d'opérer jusqu'à présent, et j'opère aussi; 1 et suivant ces paroles d'Isaïe : Note (15) Dieu forme dans l'homme l'esprit de l'homme; 2 en suivant ces paroles du Psalmiste: Il a formé le cœur de chacun d'eux 3 , est-ce que Dieu crée tous les jours des âmes; lui chez qui vouloir c'est avoir fait et qui ne cesse pas d'être créateur?
Je sais ce que vous avez coutume de répondre à cela; vous nous prétextez des adultères et des incestes. Le combat serait trop long, et le temps ne me permet pas d'aller si loin. Nous pouvons retourner contre vous les mêmes armes. Ce qui paraît indigne de Dieu, dans les ouvrages du temps présent, n'est point indigne de lui, dès qu'il en est l'auteur. Naître d'un adultère ce n'est point la faute de celui qui naît, c'est la faute de celui qui engendre. La terre ne pèche pas, en recevant la semence dans son sein ; ni le grain, en tombant sur les sillons ; ni l'humidité et la chaleur, en nourrissant et en faisant germer le froment ; mais celui qui pèche c'est, par exemple, le voleur, le larron qui, par fraude ou par violence, enlève les grains. Il en est de même dans la génération des hommes. La terre, c'est-à-dire la vulve, reçoit ce qui lui est propre, l'échauffe et lui donne la figure d'un corps, puis ensuite donne à ce corps divers membres. La main de Dieu opère sans cesse dans les secrets réduits du sein, et c'est Dieu qui est le créateur du corps et de l'âme.
Gardez-vous de mépriser la bonté de l'ouvrier qui vous a formé et vous a fait tel qu'il a voulu ; il est la vertu de Dieu, la force de Dieu, et il s'est bâti lui-même une demeure dans le sein d'une vierge. Jephté, que l'Apôtre compte parmi les justes, était né d'une courtisane. Mais écoutez : Esaü, fils d'Isaac et de Rébecca, vient au monde, l'esprit aussi hérissé de poils que le corps, et il fait comme un pur froment qui dégénère en herbe et en ivraie, parce que c'est, non point le sang du père, mais la volonté de l'enfant qui est la source des vices ou des vertus. Si c'est un crime de naitre avec un corps humain , comment la naissance d'Isaac, de Samson, de Jean-Baptiste est-elle prédite?
Comprenez-vous ce que c'est que de professer librement et hautement sa foi? Supposez que je me trompe, du moins, je dis ouvertement ce que je pense. Vous donc, ou déclarez-vous librement pour mes sentiments, ou défendez constamment les vôtres. Ne vous placez point dans mon camp, et ne venez point, vous déguisant sous un air de sincérité, me blesser par derrière, quand il vous plaira. Ce n'est point ici le lieu d'écrire contre les dogmes d'Origène; nous le ferons dans un autre ouvrage, pourvu que Dieu nous prête vie. Il s'agit à présent de savoir si celui qui est interrogé répondu aux questions, et si ses réponses sont franches et simples.
Passons maintenant à la fameuse question de la résurrection des corps et de la chair; mais…
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(1) Joan. V. 17. — (2) Zach. XII. 1. — (2) Ps. XXXII. 15.
Note (15 ) : Au lieu d’Isaïe , il faut lire Zacharie, car ces paroles sont tirées de ce dernier prophète, XII, 1.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
Avertissement a écrit:
Par les publications du 20, 21, 22 et les 2 subséquentes, soit celles du 23 et 24 décembre de cette Lettre XXXVIII, S. Jérôme explique l’hérésie de Jean, évêque de Jérusalem, à propos de « son dogme » de la résurrection du corps, qui est contraire au dogme catholique du Crédo : Je crois à la résurrection de la chair.
Bien à vous.
LETTRE XXXVIII.Pages 371-375.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Passons maintenant à la fameuse question de la résurrection des corps et de la chair; mais je veux encore, lecteur, vous dire que j'écris ceci avec la crainte de Dieu et l'appréhension de son jugement, et que vous devez m'écouter dans les mêmes dispositions ; car, si la foi de celui que je combats est une foi pure, s'il s'explique d'une manière qui ne laisse aucun sujet de révoquer en doute sa sincérité, je ne suis point assez fou pour chercher l'occasion de l'accuser, ni pour me rendre moi-même coupable de calomnie, en voulant le faire regarder comme hérétique.
Lisez donc ce qui suit sur la résurrection de la chair, et quand vous aurez lu et improuvé, — car je sais bien que l'on ne peut garder une telle doctrine, — suspendez votre jugement, attendez un peu ; ne vous prononcez qu'après avoir écouté ma réponse jusqu'à la fin, et, si vous n'êtes pas satisfait, alors traitez-moi de calomniateur.
« Nous confessons, dit-il, que la Passion de Jésus-Christ, et sa mort, et sa sépulture, — car il s'est assujetti à tout cela, — et sa résurrection sont réelles et véritables; qu'il est le premier-né des morts 1, et que, ayant tiré du tombeau les prémices de notre corps, il les a élavées avec lui dans les cieux, nous engageant ainsi à fonder sur sa résurrection l'espérance de la nôtre; ce qui fait que nous espérons tous ressusciter d'entre les morts, comme il est ressuscité lui-même.
« Ce n'est point avec des corps étrangers cl fantastiques, mais c'est, avec les mêmes corps dont nous sommes, revêtus, avec les corps dans lesquels nous sommes ensevelis maintenant, que nous espérons ressusciter un jour, ainsi que le Christ est ressuscité avec le même corps qu'il avait, et qui fut mis près de nous dans le saint sépulcre. Car, suivant l'Apôtre, ce qui est semé dans la corruption se lèvera dans l'incorruptibilité, et ce qui est semé dans l'ignominie se lèvera dans la gloire. On sème un corps animal, il se lèvera un corps spirituel 1. C'est aussi. Ce qui fait dire au Sauveur: Quant à ceux qui seront jugés dignes du siècle futur et de la résurrection d'entre tes morts, ils ne se marieront plus et n'épouseront plus de femmes, car alors ils ne pourront plus mourir, mais ils seront comme les anges de Dieu parce qu'ils sont enfants de la résurrection 2.»
Dans un autre endroit de la lettre, je veux dire, à la fin de ses traités, voici les détours et les équivoques dont il se sert pour décrire le terrible et pompeux appareil de la résurrection, afin d'en imposer aux ignorants.
«Nous n'avons point oublié, dit-il, de parler du second et glorieux avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, qui doit venir, dans toute sa majesté, juger les vivants et les morts; car il ressuscitera tous les morts, les fera paraître devant son tribunal, et rendra â chacun d'eux suivant les œuvres bonnes ou mauvaises dont leurs corps auront été les instruments; il couronnera ceux qui s'en seront servis pour vivre dans la chasteté et dans la justice, et condamnera ceux qui les auront plongés dans l'iniquité et les débauches. »
Ce que nous lisons dans l'Évangile : Qu'à la fin du monde, les élus mêmes, s'il était possible 1, seraient séduits, nous en avons la preuve dans ce chapitre. Une populace ignorante entend parler de morts et d'ensevelis, elle entend dire que la résurrection des morts sera véritable et non point imaginaire; que les prémices de nos corps sont arrivées aux cieux avec le corps du Seigneur; que nous devons ressusciter, non point dans des corps étrangers et fantastiques, mais que, de même que le Seigneur est ressuscité avec le corps qui fut mis près de nous dans le saint sépulcre, de même nous devons, au jour du jugement, ressusciter avec les corps dont nous sommes revêtus maintenant et nous sommes ensevelis. Crainte qu'il ne reste quelque doute sur sa foi, il ajoute au dernier chapitre :
« Jésus-Christ rendra à chacun d'eux suivant les œuvres bonnes ou mauvaises dont leurs corps auront été les instruments; il couronnera ceux qui s'en seront servis pour vivre dans la chasteté et dans la justice, et condamnera ceux qui les auront plongés dans l'iniquité et les débauches. »
Une populace ignorante, qui entend cela, ne peut s'imaginer que sous ce grand bruit…
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(1) Coloss. I 18. — (1) I. Cor. XV. 42. — (2) Luc. XV. 35. 36. — (1) Matth. XXIV. 24.
Dernière édition par Louis le Mar 22 Déc 2020, 3:03 pm, édité 1 fois (Raison : Insertion de l'Avertissement.)
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
Avertissement a écrit:
Par les publications du 20, 21, 22 et les 2 subséquentes, soit celles du 23 et 24 décembre de cette Lettre XXXVIII, S. Jérôme explique l’hérésie de Jean, évêque de Jérusalem, à propos de « son dogme » de la résurrection du corps, qui est contraire au dogme catholique du Crédo : Je crois à la résurrection de la chair.
Bien à vous.
LETTRE XXXVIII.Pages 375-379.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Une populace ignorante, qui entend cela, ne peut s'imaginer que sous ce grand bruit, au sujet des morts et de la résurrection, viennent se cacher des fourberies et des embûches.
Elle croit ce qu'on lui dit, car ses oreilles sont plus saintes que n'est saint le cœur du prêtre.
Je vous prie, lecteur, et vous conjure derechef de prendre patience, et d'apprendre par là ce que j'ai moi-même appris ainsi. Néanmoins, avant que je démasque la tête du dragon, et que j'expose brièvement la doctrine d'Origène sur la résurrection, remarquez bien, car vous ne pourrez connaître la vertu de l'antidote, si le poison ne vous est connu, remarquez bien et comptez exactement, puis vous verrez que Jean a employé neuf fois le mot de résurrection du corps sans se servir une seule fois de celui de chair. Tenez-vous en garde contre ce silence affecté.
Origène donc, en plusieurs endroits, et spécialement dans le quatrième livre de la Résurrection, dans l'explication du premier Psaume et dans les Stromates, dit qu'il y a dans l'Église deux erreurs sur la résurrection, celle des nôtres et celle des hérétiques. Nous, gens grossiers et charnels, nous affirmons, suivant lui, que les mêmes os, et le sang et la chair, c'est-à-dire, le visage et les membres, et toute la structure du corps ressusciteront au dernier jour ; que nous aurons ainsi des pieds pour marcher, des mains pour travailler, des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, un ventre insatiable, et un estomac pour digérer la nourriture; d'où il faut conclure que, nous qui disons cela, nous aurons besoin de manger et de boire, de nous décharger des excréments et des superfluités de la nature, d'avoir des femmes, de procréer des enfants.
A quoi bon, en effet, les parties génitales, si l'on ne se marie point? A quoi bon les dents, si l'on ne mange point ? A quoi bon le ventre et les mets, si ces deux choses, suivant l'Apôtre, doivent être détruites 1 ; si, d'après le même apôtre, la chair et le sang ne peuvent posséder le royaume de Dieu, si la corruption ne saurait avoir en partage l'incorruptibilité ? 2 Voilà ce qu'il prétend que nous croyons, nous gens simples et grossiers !
Quant aux hérétiques parmi lesquels se trouvent Marcion, Apelles, Valentinus, Manès Note (16), qui porte dans son nom des extravagances, ils nient absolument, dit-il, la résurrection de la chair et du corps; assurent que l'âme seule doit être sauvée, que nous espérons vainement ressusciter à l'exemple du Seigneur, puisqu'il n'est ressuscité qu'en apparence, el que non-seulement sa résurrection, mais encore sa naissance n'a été que fantastique.
Origène dit qu'il n'embrasse ni l'un ni l'autre de ces sentiments…
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(1) I. Cor, VI. 13. — (2) I. Cor. XV.50.
Note (16 ) :
Dernière édition par Louis le Mar 22 Déc 2020, 3:04 pm, édité 1 fois (Raison : Insertion de l'Avertissement.)
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
Avertissement a écrit:
Par les publications du 20, 21, 22 et les 2 subséquentes, soit celles du 23 et 24 décembre de cette Lettre XXXVIII, S. Jérôme explique l’hérésie de Jean, évêque de Jérusalem, à propos de « son dogme » de la résurrection du corps, qui est contraire au dogme catholique du Crédo : Je crois à la résurrection de la chair.
Bien à vous.
LETTRE XXXVIII.Pages 379-381.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Origène dit qu'il n'embrasse ni l'un ni l'autre de ces sentiments; qu'il a horreur de la résurrection charnelle qu'admettent les nôtres, comme de la fantastique résurrection qu'enseignent les hérétiques, parce que ces opinions donnent dans des extrémités contraires, les uns soutenant qu'ils seront tels qu'ils furent toujours, les autres niant absolument la résurrection des corps.
Il y a quatre éléments, dit-il, dont les philosophes et les médecins conviennent que toutes les choses sensibles et tous les corps humains sont composés, savoir : la terre, l'eau, l'air, et le feu. La terre est représentée par la chair, l'air par la respiration, l'eau par l'humide radical, cl le l'eu par la chaleur naturelle. Quand donc, sur l'ordre de Dieu , l'âme aura quitté ce corps caduc et froid, chaque chose retournera peu à peu à son principe ; la chair deviendra terre, le souffle qui nous anime se dissipera dans les airs, l'humide radical rentrera dans les abîmes d'eau, et la chaleur naturelle s'élèvera vers l'éther. Si vous jetez dans la mer un sétier de lait ou de vin, et que vous vouliez séparer ensuite ce qui est mêlé, le vin et le lait que vous avez jetés n'ont pas certainement péri, mais pourtant on ne peut pas les séparer, après les avoir mêlés; — de même notre chair et notre sang ne périssent point en se réunissant à la matière première, cependant ils ne sauraient être rétablis dans leur ancien état, ni redevenir ce qu'ils étaient. Selon ce principe, l'on ne peut pas dire que nous ressusciterons avec un corps composé de chair de sang de nerfs, de veines et d'os.
Nous avons, dit Origène, une autre idée des corps qui sont ensevelis dans le tombeau, et réduits en poussière, car nous croyons que Paul sera Paul, que Pierre sera Pierre, et que chacun ressuscitera avec son propre corps, parce qu'il n'est pas juste qu'une âme qui a péché dans un corps soit tourmentée dans un autre, ni que, à la place d'un corps qui aura versé son sang pour le Christ, un autre corps soit couronné.
Qui donc, à l'entendre parler ainsi, ne s'imaginerait pas qu'il nie la résurrection de la chair?
La sagesse de Dieu, dit-il, …
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
Avertissement a écrit:
Par les publications du 20, 21, 22 et les 2 subséquentes, soit celles du 23 et 24 décembre de cette Lettre XXXVIII, S. Jérôme explique l’hérésie de Jean, évêque de Jérusalem, à propos de « son dogme » de la résurrection du corps, qui est contraire au dogme catholique du Crédo : Je crois à la résurrection de la chair.
Bien à vous.
LETTRE XXXVIII.Pages 381-383.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Qui donc, à l'entendre parler ainsi, ne s'imaginerait pas qu'il nie la résurrection de la chair?
La sagesse de Dieu, dit-il, a mis dans chaque semence un germe qui contient en petit tout ce qu'elle doit produire un jour. Quoique l'on ne puisse pas découvrir dans la semence toute la grandeur de l’arbre qui en naîtra, c'est-à-dire le tronc, les branches, les fruits et les feuilles, tout cela néanmoins ne laisse pas d'être renfermé dans la semence, que les Grecs appellent [grec] Note (17) . II y a, par exemple, dans le grain de froment une petite moelle, ou une petite veine qui, après s'être développée dans la terre, s'incorpore avec les matières voisines, puis ensuite se change en herbe, en chalumeau et en épi. Une chose meurt une autre chose ressuscite, car les racines, l'herbe, le chalumeau, l'épi, la paille, tout cela n'est point arrangé dans le grain de froment. Ainsi en est-il de l'économie du corps humain. Il y a, dans chaque corps, un ancien germe qui, étant échauffé par la terre devient pour les morts comme [grec], c'est-à-dire, la source et le principe d'une vie nouvelle. Mais lorsque sera venu le jour du jugement; lorsque, à la voix de l'ange et au bruit de la trompette dernière, la terre tremblera, les semences se remueront aussitôt puis en un instant, feront germer les morts sans toutefois les reproduire avec la même chair ni sous les mêmes formes qu'auparavant. Voulez-vous être convaincu de la vérité de ce que je dis ? Écoutez l'Apôtre : Mais quelqu'un me dira: Comment les morts ressusciteront ils? Quel sera le corps dans lequel ils viendront? — Insensé quand tu sèmes, tu ne sèmes pas le corps de la plante qui doit naître, mais seulement la graine, par exemple, du blé , de la vigne et de l'arbre 1.
Puisque nous avons parlé déjà du grain de froment et de la semence des arbres, parlons maintenant, du grain de raisin. II est si petit, ce grain, qu'à peine peut-on le tenir avec les deux doigts. Où est la racine? où est le cep? où sont les branches de provins entrelacées les unes aux autres ? Où est l'ombrage des feuilles? Où sont ces belles grappes, qui doivent un jour donner tant de raisin? Ce que vous tenez en vos mains est tout sec et presque imperceptible; cependant, par la puissance divine et par une vertu secrète qu'il renferme en lui-même, ce grain, tout sec qu'il est, produira un vin excellent. Vous accordez ces avantages à un bois qui périra; c'est ainsi que s'embellit une chose qui ne doit ni subsister, ni reprendre la forme vile qu'elle avait d'abord, et vous voulez que le corps humain ressuscite avec des os, du sang, des membres, en sorte qu'il ait besoin de se faire tailler les cheveux, de se moucher, de se couper les ongles, de se décharger des humeurs de la nature, d'assouvir des passions brutales?
Si vous vous arrêtez à ces inepties des esprits grossiers, si vous vous attachez à la chair, qui ne peut nous rendre agréables à Dieu, vous oubliez une ennemie, vous oubliez…
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(1) I. Cor, XV. 35. 37.
Note (17 ) :
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
Avertissement a écrit:
Par les publications du 20, 21, 22 et les 2 subséquentes, soit celles du 23 et 24 décembre de cette Lettre XXXVIII, S. Jérôme explique l’hérésie de Jean, évêque de Jérusalem, à propos de « son dogme » de la résurrection du corps, qui est contraire au dogme catholique du Crédo : Je crois à la résurrection de la chair.
Bien à vous.
LETTRE XXXVIII.Pages 385-387.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Si vous vous arrêtez à ces inepties des esprits grossiers, si vous vous attachez à la chair, qui ne peut nous rendre agréables à Dieu, vous oubliez une ennemie, vous oubliez la résurrection des morts. Ce qui est semé dans la corruption se lèvera dans l'incorruptibilité, et ce qui est semé dans l'ignominie se lèvera dans la gloire. Ce qui est semé dans la faiblesse se lèvera dans la force. On sème un corps animal, il se lèvera un corps spirituel. 1
À présent nous voyons des yeux, nous écoutons des oreilles, nous agissons des mains, nous marchons des pieds; mais, dans ce corps spirituel, il n’y aura aucune partie qui ne voie, aucune qui n'entende, aucune qui n'agisse, aucune qui ne marche, car le Seigneur transformera notre corps, tout vil qu'il est, et le rendra semblable à son corps glorieux 2.
Quand l'Apôtre dit que le Seigneur transformera notre corps, en lui donnant une nouvelle figure, il ne nie pas que les divers membres qui maintenant composent le corps ne doivent alors s'y retrouver, mais il nous promet un corps spirituel qui changera suivant la différence des lieux où il se trouvera. Si, en effet, nous ressuscitons avec la même chair et le même corps que nous avons maintenant, il y aura encore une différence de sexe, encore des noces ; les hommes auront encore les sourcils épais, la barbe longue; et les femmes les joues douces, la poitrine étroite ; on usera encore du mariage, comme on en usait. Les enfants ressusciteront avec un corps tout jeune, les vieillards avec un corps chargé d'années ; il faudra donner à manger à ceux-là, et ceux-ci auront besoin d'un bâton pour s'appuyer.
Ne soyez pas si simples que de vous méprendre sur la résurrection du Seigneur, parce que vous lirez qu'il montra son côté et ses mains, qu'il parut debout sur le rivage de la mer, qu'il voyagea avec Cléophas, et assura que son corps était composé d'os et de chair. Ce corps a d'autres privilèges, car il n'est point né de la semence de l'homme et de la volupté de la chair. Si, après sa résurrection, le Christ mange et boit; s'il apparaît couvert de vêtements, s'il se laisse toucher, c'est afin de convaincre de la vérité de sa résurrection ses apôtres incertains. Cependant il révèle assez la nature toute aérienne, toute spirituelle de son corps, lorsqu'il entre au Cénacle, les portes étant fermées, et que, à la fraction du pain, il disparait aux yeux de ses disciples. Nous devrons donc, après la résurrection, boire encore et manger, puis nous décharger de ce que l'estomac aura digéré. Comment alors s'accomplira cette promesse : II faut que ce corps mortel soit revêtu de l'immortalité ? 1
Voilà la seule raison pour laquelle, dans l'exposition de votre croyance, vous employez neuf fois le terme…
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(1) I. Cor, XV. 42-44. — (2) Philipp. III. 21. — (1) I. Cor. XV. 53.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 387-391.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Voilà la seule raison pour laquelle, dans l'exposition de votre croyance, vous employez neuf fois le terme de corps, sans vous servir une fois de celui de chair, et cela afin de tromper les ignorants qui s'imaginent que vous reconnaissez les chairs dans les corps, et que chair et corps c'est la même chose. Si c'est la même chose, ils n'ont donc pas de signification différente. Je sais que vous allez me dire : J'ai cru que le corps et la chair étaient une même chose ; j'ai parlé avec simplicité. — D'où vient que vous ne vous servez pas plutôt du mot chair, pour signifier le corps? D'où vient que vous n'employez pas indifféremment tantôt l'un, tantôt l'autre, pour montrer que, par le mot de corps vous entendez la chair, et que, par le mot de chair, vous entendez le corps?
Croyez-m'en, votre silence n'est pas si simple, car enfin la chair et le corps n'ont point une même définition. Tout ce qui est chair est corps, mais tout ce qui est corps n'est pas chair. Ce qu'on appelle proprement chair est une substance composée de sang, de veines d'os et de nerfs. Mais le nom de corps bien qu'il convienne aussi à la chair, on le donne quelquefois à une substance éthérée ou aérienne, qu'on ne peut ni voir ni toucher, et qui le plus souvent est visible et palpable. Une muraille est un corps, mais elle n'est pas chair. Voilà pourquoi l'Apôtre distingue des corps célestes et des corps terrestres. Le soleil, la lune, les étoiles ont des corps célestes ; le feu, l'air, la terre, et tous les êtres inanimés, qui sont composés de ces quatre éléments, ont des corps terrestres.
Le voyez-vous? nous comprenons vos subtilités, et des arcanes que vous ne révélez que dans vos réunions et entre parfaits; des mystères que le peuple, qui est dehors, ne mérite pas de connaître, nous les dévoilons au grand jour. Voilà pourquoi, ramenant la main à l'oreille, et faisant bruit de vos doigts, vous dites en riant : Toute la gloire de la fille du roi lui vient du dedans 1. Et encore : Le roi m'a fait entrer dans son appartement secret 2.
On comprend à quel dessein vous parlez de la résurrection du corps, sans parler aucunement de la résurrection de la chair. Car c'est afin que nous, gens simples et grossiers, nous entendions de la chair ce que vous dites du corps, et que les parfaits comprennent, à la manière dont vous employez le mot de corps, que vous ne croyez point la résurrection de la chair.
Mais l'Apôtre, voulant faire voir que le Christ avait un corps de chair, et non point un corps spirituel, aérien, subtil, dit expressément, dans son Épître aux Colossiens : Vous aussi, lorsque vous étiez autrefois éloignés du Christ, et que des œuvres criminelles vous rendaient ennemis de son esprit , il vous réconcilia dans le corps de sa chair, par sa mort 3 Et derechef, dans la même Épître : C'est en lui que-vous avez été circoncis d'une circoncision qui n'est pas faite de main d'homme, mais qui consiste dans le dépouillement du corps de la chair 4.
Si le mot corps ne signifie que chair, si l'expression n'est point ambiguë et ne peut se prêter à plusieurs sens, il est assez inutile de parler de corps et de chair, comme si, par le mot corps, on pouvait entendre autre chose que de la chair. Dans le symbole de notre foi et de notre espérance, que nous avons reçu des apôtres, et qui est écrit, non point avec de l'encre, ni sur du papier, mais sur des tables de chair, qui sont nos cœurs, nous finissons, après avoir confessé la Trinité et l'unité de l'Église, nous finissons le mystère de tout le dogme chrétien, en déclarant que nous croyons la résurrection de la chair.
Et vous, c'est toujours du corps que vous parlez; vous y revenez une fois, deux fois, trois fois, neuf fois même, sans parler seulement de la chair, dont les Apôtres parlent toujours , ne disant rien du corps…
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(1) Ps. XLIV. 14. — (2) Cant. I. 3, — (3) Coloss. I. 21. 22. — (4) Ibid. II. 11.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 393-395.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Et vous, c'est toujours du corps que vous parlez; vous y revenez une fois, deux fois, trois fois, neuf fois même, sans parler seulement de la chair, dont les Apôtres parlent toujours, ne disant rien du corps. Les motifs qui vous portent à user de tant de subtilité, de tant de prudence et de dissimulation dans votre langage, sachez que nous les connaissons, car vous prouvez la vérité de la résurrection par les passages mêmes dont Origène se sert pour la nier, puis, ce qui est incertain, le confirmant par ce qui est douteux, vous renversez en une tempête subite l'édifice assuré de la foi. On sème, dit Origène, un corps animal, il se lèvera un corps spirituel ; car les hommes n'auront pas de femmes, les femmes n'auront point de maris, mais tous seront comme des anges dans les cieux 1. De quels autres passages vous serviriez vous, si vous vouliez nier la résurrection? Mais voulez-vous confesser que nous ressusciterons avec de véritables corps, et non point, comme vous le dites, avec des corps fantastiques?
Aux passages, par lesquels vous flattez les oreilles des ignorants, et afin de prouver que nous ressusciterons avec les mêmes corps dans lesquels nous mourons et dans lesquels nous sommes ensevelis, ajoutez plutôt ces paroles, et dites: Non, un esprit n'a ni chair, ni os, comme vous voyez que j'en ai 2; ajoutez spécialement ce que le Christ dit à Thomas : Mets ton doigt dans mes mains, porte ta main dans mon côté, et sois désormais non point incrédule, mais fidèle 3.Nous ainsi, après la résurrection, nous aurons les mêmes membres dont nous nous servons maintenant, la même chair, le même sang, les mêmes os, toutes choses dont l'Écriture sainte condamne les œuvres et non point la nature.
Enfin, il est écrit dans la Genèse: Mon esprit ne demeurera point avec ces hommes, parce qu'ils ne sont que chair 1 . Et l'apôtre Paul dit, au sujet de la mauvaise doctrine et des œuvres des Juifs : Je n'ai consulté ni la chair, ni le sang 2. Ecrivant à des saints, qui certainement vivaient encore dans la chair. Pour vous, dit-il , vous n’êtes non point dans la chair, mais dans l’esprit, si toutefois l’esprit de Dieu habile en vous. Quand il dit qu'ils ne sont point dans la chair, tandis qu'il était constant qu'ils y étaient, il fait bien voir que ce sont les péchés et non pas la substance de la chair qu'il condamne.
Voilà en quoi consiste la foi véritable en la résurrection, à croire que la chair sera revêtue de gloire, sans cesser d'être une véritable chair. Lorsque l'Apôtre ajoute :…
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(1) I. Cor. XV. 44; Matth. XXII. 30; Luc. XX. 35. — (2) Luc. XXIV. 39, — (3) Joan. XX. 27, — (1) Gen VI. 3. — (2) Gal . I. 16.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 395-397.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Voilà en quoi consiste la foi véritable en la résurrection, à croire que la chair sera revêtue de gloire, sans cesser d'être une véritable chair. Lorsque l'Apôtre ajoute : Ce corps mortel et corruptible, il montre qu'il parle de ce corps même, c'est-à-dire de la chair qu'il voyait alors. Mais quand il ajoute : Doit revêtir l’incorruptibilité et l'immortalité. il veut dire, non pas que ce vêtement doit détruire le corps, qu’il aura dans la gloire, mais qu'il rendra éclatant ce qui auparavant fut inglorieux, si bien que, nous étant dépouillés de cet abject vêtement, nous serons revêtus de l'or de l'immortalité, et, en quelque sorte, d'une béatitude de force et de constance ; car nous ne désirons point d'être dépouillés de la chair, mais nous désirons d’être revêtus comme d'un manteau, et revêtus de cette gloire, qui est notre maison céleste de façon que ce qu’il y a de mortel en nous soit absorbé par la vie 3. Or un manteau ne se met que sur d'autres vêtements.
Notre Seigneur ne se transfigura point sur la montagne, et ne se montra pas brillant de gloire pour perdre ses pieds, ses mains et les autres parties de son corps, ni pour être emporté dans un mouvement semblable à celui du soleil ou de quelque globe céleste, mais ses membres, sans changer de nature, devinrent éclatants comme le soleil, en sorte que les yeux des apôtres en furent éblouis. Et, de peur que vous ne disiez que ses vêtements étaient spirituels, il est écrit non pas qu'ils furent changés en air, mais bien qu'ils devinrent blancs. Son visage, dit l'Évangéliste[/i], brillait comme le soleil 1. Puisque l'on voyait son visage, on voyait également, je pense, les autres parties de son corps.
Enoch fut ravi en la chair, Élie aussi était vêtu d'une chair mortelle, quand il fut enlevé aux cieux. Affranchis jusqu’à présent des lois de la mort, et déjà citoyens du paradis, ils ont le même corps qu'ils avaient lorsqu'ils furent enlevés de la terre. Ce que nous cherchons par le jeûne, ils le possèdent, en la compagnie de Dieu. Ils se nourrissent d'un pain céleste, et. se rassasient de la parole du Seigneur; ils n'ont d'autre nourriture que le Seigneur lui-même.
Écoutez le Sauveur, qui dit : Et ma chair se reposera dans l'espérance 2; puis, en un autre endroit : Sa chair n’a point vu la corruption 3; puis encore : Toute chair verra le salut de Dieu 4. Et toujours vous parlez du corps? Citez plutôt Ézéchiel, qui, joignant les ossements aux ossements, et, les tirant de leurs sépulcres, les fait tenir debout sur leurs pieds, les lie par des chairs et des nerfs, et les recouvre d'une peau 5.
Que Job élève sa voix tonnante, lui qui, vainqueur de souffrances atroces,…
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(3) II. Cor. V. 4, — (1) Matth. XVII. 29. — (2) Ps. XV. 9. — (3) Act. II. 31. — (4) Luc III. 6. — (5) Ezech. XXXVII. 8.
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Louis- Admin
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 397-401.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Que Job élève sa voix tonnante, lui qui, vainqueur de souffrances atroces, et ôtant, avec un têt de pot, la pourriture de ses plaies, consolait son malheur par l'espoir et la certitude de la résurrection : Qui me donnera, dit-il, que mes paroles soient écrites ? Qui me donnera qu'elles soient retracées dans un livre, gravées sur une lame de plomb, avec un style de fer, ou sur la pierre avec le ciseau ? — Car je sais que mon Rédempteur est vivant, et que, au dernier jour, je dois ressusciter de la terre, et que je serai encore revêtu de cette peau, et que, dans ma chair, je verrai Dieu; que je le verrai moi-même, que je le contemplerai de mes propres yeux, et que ce ne sera point un autre qui le verra. — C'est là l'espoir qui repose en mon cœur 1. Qu'y a-t-il de plus formel que cette prophétie ?
Personne, depuis l'avènement du Christ, n'a parlé de la résurrection d'une manière aussi claire que l'a fait ce prophète, avant la venue du Christ. II veut que ses paroles durent éternellement; et, afin qu'elles puissent échapper à la vicissitude des temps, il veut encore qu'elles soient gravées sur le plomb ou sur la pierre. Il attend la résurrection; bien plus, il sait, il voit que le Christ, son Rédempteur est vivant, et il est certain de ressusciter de la terre, au dernier jour. Le Seigneur n'était point encore mort, et déjà ce généreux athlète de l'Église voyait son Rédempteur sortir du tombeau. Lorsqu'il dit : Je serai encore revêtu de cette peau, et, dans ma chair, je verrai Dieu, il ne parle point, je pense, comme s'il aimait cette chair qu'il voyait couverte d'ulcères et de pourriture, mais c'est que la certitude de sa résurrection et l'espoir des biens futurs lui font mépriser les choses présentes. Je serai encore revêtu de cette peau, dit-il; où est ici le corps éthéréen? où est le corps aérien, le corps semblable à un esprit, à un souffle ? Assurément, là où il y a de la peau et de la chair, là où il y a des os, des nerfs, du sang et des veines, là il y a structure de chair, là il y a propriété de sexe. Et dans ma chair dit-il encore, je verrai Dieu. Lorsque toute chair verra le salut de Dieu et le Seigneur Jésus, alors, moi aussi je verrai mon Rédempteur, mon Sauveur et mon Dieu. Mais je le verrai dans cette chair qui me tourmente maintenant, qui maintenant se dissout de douleur. Et je verrai Dieu dans ma chair, parce qu'il a guéri, par sa résurrection, toutes mes misères.
Ne vous semble-t-il pas que Job écrivait dés lors contre Origène, et soutenait un nouveau combat contre les hérétiques, pour défendre la vérité de cette chair dans laquelle il souffrait? Il s'attriste, s'il faut avoir tant souffert en vain, et s'il doit ressusciter un corps spirituel, différent de celui qui a passé par de cruelles douleurs. Pour ruiner donc tous les retranchements d'une confession équivoque et artificieuse, il s'exprime d'une manière bien claire, et insiste fortement sur ces paroles : Je le verrai moi-même, et je le contemplerai de mes yeux, et ce ne sera point un autre qui le verra 1. S'il ne doit point ressusciter avec le sexe qui lui est propre, ni avec le même corps qui a été étendu sur le fumier, s'il ne doit pas, pour voir le Seigneur, ouvrir les mêmes yeux, avec lesquels il voyait les vers fourmiller dans ses plaies, où donc sera Job? Vous détruisez ce qui le constitua, et vous me faites ressusciter à sa place un être fantastique, comme si vous vouliez prétendre qu'un navire a été radoubé après le naufrage, et que vous niassiez l'existence des parties dont ce navire est composé.
Quant à moi, je parlerai en toute liberté, et quoique vous vous frappiez le visage, quoique vous vous arrachiez les cheveux, quoique…
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(1) Job. XIX.— (1) Job. XIX. 27.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 403-405.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Quant à moi, je parlerai en toute liberté, et quoique vous vous frappiez le visage, quoique vous vous arrachiez les cheveux , quoique vous frappiez des pieds, quoique vous preniez, comme les Juifs, des pierres pour me lapider, je confesserai hautement la foi de l'Église. Dire que nous ressusciterons sans chair, ni os, ni sang, ni membres, c'est une chimère incompréhensible, qui détruit la vérité de la résurrection. Là où il y a de la chair, et des os, et du sang, et des membres, là aussi il faut qu'il y ait diversité de sexes. Là où il y a diversité de sexes, Jean est Jean, Marie est Marie. Ne craignez pas que ceux qui, avant leur mort, n'ont pas accompli dans leur sexe l'œuvre de ce sexe même, songent au mariage, après la résurrection. Quand il est dit : En ce jour-là , les hommes n'auront point de femmes, et les femmes point de mari 1, il est question de ceux qui peuvent se marier, et qui néanmoins ne se marient pas, car personne ne dit des anges: Ils n'auront pas de femme, ils n'auront pas de mari.
Je n'ai jamais ouï dire que l'on célèbre, dans les cieux, les noces des Vertus spirituelles, mais là où il y a sexe, là il y a homme et femme. C’est pour cela que, cédant, malgré vous, à la force de la vérité, vous avez dit que : « nous serons ou couronnés dans le corps qui aura vécu chastement et selon la justice ou bien condamnés dans le corps qui aura été l'esclave des voluptés et de l'injustice. » Au lieu du mot de corps employez celui de chair et vous n'aurez pas nié la différence de l'homme d'avec la femme ; peut-on mériter la couronne de la chasteté si l'on n'a point un sexe capable de s'abandonner à l'impudicité? Couronna-t-on jamais la virginité d'une pierre? On nous promet de nous rendre semblables aux anges, c'est-à-dire de nous faire jouir, dans notre chair et dans notre sexe, de ce bonheur que les anges, qui n'ont ni chair ni sexe,, possèdent dans les cieux.
Telle est ma foi, à moi, simple et grossier : Je crois que les hommes ressusciteront avec le sexe qui leur est propre, mais sans en faire usage; et que c'est en cela qu'ils seront semblables aux anges. Néanmoins, parce que ces membres ne seront pas employés à l'œuvre qui leur est propre, il ne faut pas se hâter de conclure de là qu'ils seront inutiles, puisque, dans cette vie même, nous nous efforçons de ne pas accomplir cette œuvre. Or, quand on dit que nous serons semblables aux anges, on entend dire, non que les hommes devront être changés en anges, mais que nous entrerons en possession de l'immortalité et de la gloire dont jouissent les esprits bienheureux.
Quant aux arguments que vous nous faites sur la condition des enfants et des vieillards, sur…
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(1) Matth. XXII. 30. — (1) Job. XIX. 27.
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Re: LETTRES de Saint Jérôme.
LETTRE XXXVIII.Pages 405-409.A PAMMACHIUS.Contre les hérésies de Jean, évêque de Jérusalem.SUITE
Quant aux arguments que vous nous faites sur la condition des enfants et des vieillards, sur le besoin que nous aurons de manger, puis de nous décharger des superfluités nature, ils ne viennent pas de vous, ils sont d'origine païenne, car les Gentils nous font les mêmes objections. Vous qui vous dites chrétien, n'employez pas les armes des païens. Qu'ils apprennent de vous à confesser la résurrection de la chair, mais n'apprenez pas d'eux à la nier. Ou, si vous êtes aussi du nombre de nos ennemis, déclarez-vous franchement pour tel, afin que vous receviez les coups portés aux païens.
Quant à vos nourrices, je vous les laisse, de peur que les enfants ne vagissent; je vous laisse vos vieillards décrépits, crainte qu'ils ne gèlent de froid en hiver. Il était encore très-inutile que vos barbiers se missent en apprentissage, car on sait bien que, pendant quarante ans, ni les ongles, ni les cheveux du peuple d'Israël ne crûrent, et, qui plus est, que ni leurs vêtements ni leurs chaussures ne s'usèrent. Énoch et Élie, dont nous venons de parler, ne sont pas plus âgés qu'ils ne l'étaient quand ils furent enlevés de la terre. Ils ont des dents, un ventre et des parties génitales, et pourtant ils n'ont besoin ni de nourriture, ni de femmes.
Pourquoi accusez-vous la puissance du Seigneur? Puisqu'il peut, de votre substance et de votre moelle, former non seulement des chairs avec d'autres chairs, mais tirer même un corps d'un autre corps, et que de l'eau, qui est le plus vil des éléments dont se composent les chairs, il peut former le vin précieux d'un corps aérien, ne peut-il pas aussi, par cette même puissance qui a tiré toutes choses du néant, rendre la vie à celles qui existèrent, car il est plus facile de rétablir une chose en son premier état que de la tirer du néant.
Pourquoi vous étonner que les enfants et les vieillards doivent, à la résurrection, avoir l'âge d'un homme parfait, puisque Dieu, quand il forma l'homme du limon de la terre, le créa en cet état, sans le faire passer par les accroissements successifs de l'âge? La femme fut formée d'une des côtes de l'homme. Les vils et honteux éléments de notre génération, — c'est la troisième manière dont notre nature a été faite, ces éléments se changent en chair puis en nerfs, pour lier les membres; en veines, pour distribuer le sang; en os, pour soutenir le corps. Voulez-vous que je vous parle d'une quatrième espèce de génération? Le saint Esprit surviendra en toi, et la vertu du Très-Haut te couvrira de son ombre. Voilà pourquoi le saint qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu 1. Autre est l'origine d’Adam, autre celle d Ève, autre celle d’Abel, autre celle de Jésus-Christ, et néanmoins, dans toutes ces diverses origines, la nature d'homme ne diffère pas.
Si je voulais prouver la résurrection de la chair et de toutes les parties qui composent le corps humain, puis ajouter à chaque passage des explications, il me faudrait écrire plusieurs volumes….
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(1) Luc. I. 35.
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