Apôtres Inconnus
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurEn barge.***
L'embarcation la plus utilisée pour les transports, dans l'Extrême-Nord, n'a pas été toutefois le canot d'écorce, ni le canot de bois qui consiste en un tronc de peuplier ou de tremble creusé à la hache, ni même la simple barque, mais la grande barge en forme de york-boat d'abord, puis rectangulaire, à fond plat, à peine relevée en avant et, en arrière, et manœuvrée par des rames énormes.
Pendant plus de cinquante ans, s'organisa, au lac la Biche d'abord, à Athabaska-Landing ensuite, une flotte printanière de ces barges, dont le nombre s'éleva de deux à quinze, à mesure que se développeront les missions, sur les treize ou quinze mille kilomètres de rivières et de lacs composant la partie évangélisée de l'Athabaska-Mackenzie.
Les épisodes de ces voyages, dans les rapides, parmi les écueils, à travers les bancs de sable et les hauts-fonds perfides, émailleraient d'intéressants volumes.
Le dernier récit qui nous soit parvenu raconte le tonale d'une petite barge, sur la rivière de l'Ours, qui décharge, dans le Mackenzie, le Grand Lac de l'Ours. Elle ne doit mesurer que 130 kilomètres, cette rivière. Maïs elle dévale avec une telle impétuosité, au fond de ses précipices, qu'elle impose d'incroyables efforts à l'équipage obligé d'y faire monter ses bateaux.
Ces lignes du Père Falaize…
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Frère Meyer à la rivière de l’Ours.
Ces lignes du Père Falaize, qui la gravit en 1920, avec le Frère Meyer, pour se rendre, par delà le Grand Lac de l'Ours, à la mission esquimaude de Notre-Dame du Rosaire, nous laissent entrevoir, dans leur poignante brièveté, ce que la rivière de l'Ours a coûté de labeurs et de déboires à nos missionnaires, depuis 1864.
Pendant cinquante-quatre jours, nous avons halé à la corde, déchargeant et rechargeant, avançant, revenant en arrière, gagnant parfois à force de poulies une centaine de mètres dans un jour. Avec cela, quelle nourriture avions-nous, Dieu le sait ! Et il nous fallait travailler sur un terrain tantôt taillé â pic, tantôt formé de roches roulantes ou pointues, souvent dans une vase sans fond. Pour tout achever, durant les dix derniers jours, une couche de neige de dix-huit pouces est venue couvrir tous les obstacles… De là, nous traversâmes le Grand Lac de l'Ours, en quatre jours, avec armes et bagages...
Le Père Falaize rend hommage au dévouement du Frère Meyer, sans le secours duquel « il ne voit pas comment il aurait jamais pu regagner sa mission ».
Le Frère Meyer, attelé à cette barge, sur cette affreuse rivière, était loin cependant de l'élégante automobile qu'il conduisait, de Lyon à Marseille, comme chauffeur diplômé, et dans laquelle Mgr Breynat, son compatriote vint le cueillir un jour... Après douze années de tous les travaux, au Grand Lac des Esclaves et au Grand Lac de l'Ours, il « s'estime bien récompensé » aujourd'hui parce qu'il lui fut donné d'être le parrain des premiers Esquimaux, de la farouche tribu du Coppermine, baptisés par le Père Falaize, à Noël 1920.
Une autre tribu esquimaude…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Frère Louis Beaudet en Omiak.
Une autre tribu esquimaude, les Natavels, que le vicariat du Mackenzie eut la désolation d'abandonner, faute de missionnaires, après en avoir commencé l'évangélisation, reçut, quatre fois, à ses grands quartiers de pêche, l'Ile Herschel, située dans l'océan Glacial même, la visite du Frère Louis Beaudet. Nul par conséquent, ne poussa plus loin que lui vers le Pôle Nord.
Il s'y rendit par le delta du Mackenzie et 200 kilomètres de pleine mer, au moyen de l'omiak esquimau, sorte de doris solide et légère, inventée par les Natavels pour leurs voyages sur le fleuve et sur la mer. Le Frère Louis n'était pas né marin. Il n'avait jamais vu l'eau, avant de s'embarquer pour l'Amérique, avec le Père Lecorre, qui était venu le « pêcher pour le Mackenzie », à Trélécan dans le Morbihan, en 1884. Mais « quand le Breton se fait marin », quand à la mélancolique ténacité, de son pays d'Arvor il ajoute l'endurance du climat arctique, qui l'arrêtera ?
Marin, comme les autres Bretons de l'Extrême-Nord, le Frère Louis le devint à peu de frais. Il navigua d'abord, pendant dix ans sur le Grand Lac des Esclaves, et avec tant d'adresse, que Mgr Grouard l'envoya, à 340 kilomètres passé le cercle polaire, comme coadjuteur des Pères Giroux et Lefebvre, Il les aida à faire la pêche, à scier de long, à bâtir la mission du Saint-Nom, de Marie. Il les conduisit à l'Ile Herschel, le Père Lefebvre deux fois, le Père Giroux une fois. A son troisième voyage, qu'il fit seul, il traita, au nom des Pères, une très délicate affaire. Lors de son dernier retour, à peine eut-il quitté, avec le Père Giroux, l'Ile des Esquimaux qu'une tempête se leva, si violente qu'elle brisa les ancrages de plusieurs vaisseaux baleiniers au port d'Herschel. Les missionnaires pensaient se voir engloutis, à chaque abîme creusé devant eux par les vagues. Mais le Frère Louis tenait la mer en Breton et le Père Giroux godillait en Canadien du Saint-Laurent. Ils abordèrent au continent.
Depuis 1902, Frère Louis réside à la mission Notre-Dame de la Providence, sur le Mackenzie, où il se dévoue à toutes les occupations compatibles — et incompatibles le plus souvent — avec les rhumatismes chroniques, contractés au Grand Lac des Esclaves et à la mer Glaciale.
Enfin l'heure du grand progrès sonna pour les solitudes hyperboréennes…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Saint-Joseph.
Enfin l'heure du grand progrès sonna pour les solitudes hyperboréennes. Un jour de 1893, un bateau à vapeur, le Saint-Joseph, siffla, au bord du lac Athabaska, et se mit à remorquer les barges de transport, jusqu'aux missions comprises entre le pied des rapides de la rivière Athabaska. (Mac Murray) et la tête des rapides de la rivière des Esclaves (Forth-Smith).
Dès lors, l'activité des Frères coadjuteurs se porta sur la construction et l'appareillage des steamers ou des yachts, qui, tour à tour, n'ont pas encore cessé d'occuper les étés polaires.
L'insuccès attrista la premiers saison du Saint-Joseph. Ses chaînes trop faibles se brisaient à la remonte du courant, et ses machines n'avaient pas la force de se dégager des bancs de sable où il échouait presque chaque jour : « Le Frère Lavoie, notre mécanicien, dit Mgr Grouard, ne se décourageait pas, et je dois reconnaître que son sang-froid et son savoir-faire ont été dignes de tout éloge. Je n'oublierai pas non plus saint Joseph, dont la protection visible nous a tirés de maints dangers... »
Un nouvel appel à la charité de la France permit à Mgr Grouard de donner au Saint-Joseph des machines assez puissantes pour le faire marcher sans encombre.
Cependant la course du petit vapeur ne pouvait dépasser le 60e degré de latitude, où mugissent, dans leurs vallées à jamais sauvages, les rapides du Fort-Smith.
A deux kilomètres du commencement de ces rapides…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurPortage.
A deux kilomètres du commencement de ces rapides (Fitzgerald), toute cargaison doit être débarquée, afin d'être transportée par un portage de 25 kilomètres, jusqu'à Fort-Smith, où recommence la tranquillité de la rivière des Esclaves.
Un portage — expression consacrée par les coureurs des bois — , c'est le chemin qui tourne l'impasse, marquée par des rapides infranchissables, par des hauts-fonds pierreux, par des détours trop longs du cours d'eau, ou bien par l'extrémité fermée d'un lac. Les chemins de portage, taillés, à la hâte, à travers les forêts, et les fondrières, voient peiner, suer, saigner, le pauvre voyageur portant ou traînant son bagage, et même sa propre embarcation, à moins qu'une autre l'attende à l'eau navigable, vers laquelle il se dirige. Le portage du Grand Rapide, sur la rivière Athabaska. est célèbre par les semaines qu'il demandait quelquefois pour se laisser franchir. Le portage du Fort-Smith retient longuement encore, à ses travaux forcés, toutes les caravanes du Nord.
Mais, à Fort-Smith, au pied de la chaîne de 35 kilomètres de rapides, que double le portage, s'ouvre enfin large, libre et profonde, l'avenue de l'océan Glacial: 2.500 kilomètres, dont 400 sur la rivière des Esclaves encore, 100 sur le Grand Lac des Esclaves, et 2.000 sur le fleuve Mackenzie.
Le Mackenzie, que les sauvages appellent le Cours d'Eau Géant, le Naotcha, issu du Grand Lac des Esclaves, draine, à lui seul, un bassin de plus d'un million de kilomètres carrés. Par ses bouches de 50 kilomètres, il jette à l'océan 500,000 pieds cubes d'eau à la seconde.
Ce fut le Saint-Alphonse qui eut…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Saint-Alphonse.
Ce fut le Saint-Alphonse qui eut, en 1895, les premiers honneurs du fleuve Géant.
Le Saint-Alphonse. baptisé par la reconnaissance de Mgr Grouard envers les Rédemptoristes qui donnèrent la moitié de la somme qu'il devait coûter, sortit, comme le Saint-Joseph, des mains de nos coadjuteurs.
Mais le Frère Lavoie, « à qui il ne manquait que les leçons d'un maître, tant il était doué lui-même d'observation et de sens pratique », constata, une fois de plus, que les lois de l'élégance ne sont pas toujours celles de l'équilibre. Aussi la coque du Saint-Alphonse dut-elle être refaite, avant même d'avoir servi.
La coque solide et proportionnée fut exécutée par les Frères O'Connell et Anccl, sous la direction d'un technicien, M. Boyed, que Mgr Grouard avait fait venir. En deux mois de l'automne I894, le nouveau vapeur se trouva fièrement campé sur ses vingt mètres de long et ses quatre de large.
Au printemps 1895, il démarra du fort Smith pour son « voyage de noces » — maiden trip — au Cercle polaire; et défila ses 2500 kilomètres, sans avarie ni retard, avec son drapeau français, aux applaudissements des missionnaires pleurant de joie, et à l'ébahissement des Indigènes qui n'en croyaient leurs yeux.
Onze ans, il refit ce voyage. Et même trouvait-il le temps de retourner à mi-chemin, à Simpson, et de revenir avant les glaces, à sa cale-sèche de Fort-Smith. Dévorant les pans de forêt qu'on lui abattait à même les grèves, crachant ses flammes par sa cheminée trop large et trop courte, trouant de brûlures force soutanes de missionnaires et force guimpes de Sœurs Grises — personnages acculés sur l'unique pont à ciel ouvert aux recoin; que leur laissaient l'ampleur des machines et les réserves de bois, — sifflant a déchirer l'oreille, il allait, venait, touait, doublait les rochers, défonçait les bancs de sable, « bourlinguait ferme » sur le Grand Lac, renflouait à l'occasion des vapeurs échoués, soutenait, en un mot, devant tous et partout, l'honneur des missions qu'il avait à servir. Sa renommée franchit même les mers, et jeta l'alarme au Grand Synode d'Angleterre.
Voyez, y disait-on, voyez là-bas, au Mackenzie ! Tandis que le Bishop (l’Evêque) catholique se promène en steamboat, nos Bishopanglicans n'ont que leurs bateaux plats, ou bien ils sont réduits à ne voyager que sur les vapeurs de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Honte à l'Angleterre et à sa religion !
Malgré son argent, en dépit du zèle de ses ministres, L'anglicanisme ne parvint jamais à lancer sur le Mackenzie son bateau à vapeur, parce qu'il n'eut pas de Frères coadjuteurs,
Le Saint-Alphonse, construit et entretenu par nos coadjuteurs, trouva aussitôt en eux son capitaine, ses mécaniciens, son équipage.
Le premier capitaine fut le Frère…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurFrères O’Connell, O’Brien et William.***
Le premier capitaine fut le Frère O'Connell.
Sculpté en Moïse de Michel-Ange, la barbe marine élargie en rayons d'argent, le large front abrité d'une casquette à visière, l'œil bleu-shamrock sondant l'horizon et les flots, il se tenait droit à la barre. Bon fils d'Irlande, il avait apporté de son pays la verdeur de l'esprit et la ténacité du vouloir.
Ingénieux à travailler le bois, à confectionner des autels, des armoires, des chaises girouettantes, il passe maintenant ses hivers à meubler les missions.
Il eut aussi, en ses plus jeunes années, sa part des grandes pêches de l'automne et des longues courses sur la neige. Mgr Grouard aimait à voyager sous ses auspices.
L'un des mérites du Frère O'Connell fut d'avoir encouragé la vocation d'un compatriote, ferronnier de son état, et qui devait rendre de grands services aux œuvres de l'Extrême-Nord: le Frère O'Brien
Du Frère O'Brien, nous avons relevé le trait dans les notes de Mgr Clut, qui était son supérieur au lac Athabaska.
« Notre cher Frère O'Brien s'était blessé le pied, et cela paraissait très grave, N'étant que dévouement et oubli de soi, le bon religieux travaillait quand même. A la fin, le mal empira tellement qu'il dut s'arrêter et que je le mis au repos complet. Mais le repos même n'y fit rien et le mal s'accentuait de plus en plus. Désolé à la pensée, qu'il allait être à charge — ainsi le croyait-il — il se leva, un jour qu'on l'avait laissé seul, se traîna jusqu'à ma cellule, prit respectueusement la relique de la Vraie Croix, et se l'appliqua sur la jambe, La guérison s'opéra immédiatement. Le frère a repris, comme si rien n'était, ses marches sur la glace. »
La vocation du Frère O'Connell — né en 1857, à Ballangary, comté de Tipperary, « pays de la verdure, des fleurs et des oiseaux » — se décida au cours d'une mission, prêchée à Mullahone par les Oblats de Marie Immaculée du couvent de Dublin,
O'Connell allait atteindre ses vingt ans. Désespérant de traverser la foule qui déferlait chaque soir aux pieds du Père Bready, il se tapit dans le confessionnal, comme le sacristain faisait sa ronde avant de fermer l'église, et il y resta jusqu'au petit jour, « to be sure to cacth Father Bready » afin d'attraper, à coup sûr, le Père Bready. Le missionnaire, probablement édifié de cette veillée des armes, encouragea son matinal pénitent et lui promit de le faire admettre bientôt au noviciat de Belmont. De Belmont, le Frère O'Connell fit voile, le 17 mars 1880, en compagnie de Mgr Clut et du Frère O'Brien, pour l'Athabaska-Mackenzie, d'où il ne revint jamais.
Capitaine inamovible du Saint-Alphonse, il eut, à son aide, plusieurs mécaniciens. Son préféré fut, personne n'en peut douter, le Frère William.
Le Frère William, grand intendant des scieries du Mackenzie, avait fait son apprentissage dans la toute admirable Congrégation des ouvriers catholiques fondée par le célèbre Père Kolping. De la même association, sortit, après lui, le Frère Kraut. qui, depuis 1907, l'assista souvent dans ses installations et réparations des machines, à nos établissements du Nord.
Avec le Frère O'Connell pour capitaine et le Frère William pour mécanicien en chef, le Saint-Alphonse vécut jusqu'à 1905.
Sa coque vermoulue servit alors de bois de chauffage, et sa chaudière devint le moteur de la scierie de Résolution.
Aussitôt, les frères entreprirent le Sainte-Marie, à…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLa Sainte-Marie.
Aussitôt, les frères entreprirent le Sainte-Marie, à Fort-Smith, sous la direction de Mgr Breynat et du Père Mansoz. Capitaine; et mécanicien en chef avaient trop bien mené le Saint-Alphonse pour n'être pas maintenus aux mêmes grades, sur le Sainte-Marie.
Splendide dans sa parure toute blanche et bleue, avec sa Vierge aux mains, jointes veillant à la proue, fendant les ondes sous la forte et douce poussée de son hélice le Sainte-Marie a laissé le souvenir du plus gracieux, du plus solide, du mieux assorti dans ses cales, ses cabines et ses ponts, sinon du plus spacieux, des steamers qui aient encore sillonné les flots arctiques.
En 1912…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurPourquoi fut-il vendu ?
En 1912, il fut vendu.
Pourquoi ?
Parce que les Frères lui manquèrent. Déjà le Saint-Alphonse occupait durant quatre mois, toute la vie de ceux auxquels il incombait de le remettre à l'eau, de le conduire, de le haler pour l'hiver, de le radouber. Pour le Sainte-Marie, deux fois plus grand, il fallut doubler l'équipage. Et les Frères vieillissaient sans qu'arrivât le renfort. Toutes les missions, que les transports plus abondants avaient développées, réclamaient à elles seules l'assistance de tous les bras. A la fin, malgré les dévouements surhumains des jours et des nuits de l'été, les Frères marins ne purent suffire à la tâche, et le vicaire apostolique eut la douleur de chercher un acheteur.
Il le trouva dans une Compagnie commerçante qui, en guise de paiement, s'engagea a transporter, pendant cinq ans, les effets des missions.
Ces cinq ans sont passés.
Cela signifie que, jusqu'au jour où la Providence lui enverra assez de coadjuteurs pour reprendre la grande navigation, sans négliger les travaux à demeure, il restera à l'évêque du pôle Nord le souci de trouver les lourdes sommes qu'il faut désormais verser, pour payer leurs services, aux fréteurs, venus sur les brisées du Saint-Alphonse et du Sainte-Marie, et instruits par eux de la carte nautique de nos lacs et de nos fleuves.
Et voici que, depuis 1920…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLes « fiévreux de l’or ».***
Et voici que, depuis 1920, cette « lutte pour la vie » s'impose, plus menaçante chaque jour. Des nappes de pétrole, découvertes en aval du fort Norman, non loin du Cercle polaire, attirent les « fiévreux de l'or ». De toutes parts, ils se précipitent sur les rivages du Grand Lac des Esclaves et du Mackenzie, comme à l'intérieur du continent, cherchant les essences, les métaux, les richesses de toutes sortes, dont surabondent, à la vérité, les entrailles de « ces terres d'épouvante ».
Parviendront-ils à vaincre les distances et les hivers ? Exploiteront-ils ces mines lointaines et difficiles ?
Le missionnaire, sans rien attendre de la pauvreté — et de l'âpre égoïsme le plus souvent — de ces immigrants, devra s'occuper de leurs âmes. II devra, sans nouvelles ressources, lui qui n'a ni la vocation ni le temps de se livrer au commerce, à l'industrie, soutenir des œuvres de bienfaisance aux incalculables proportions.
Il lui faudrait, du moins, des coadjuteurs.
Viendront-ils ?
Les prières des prêtres, des vieux Frères, des religieuses, des orphelins, des malades les demandent à Dieu.
A la fin de 1921, l'Action catholique, journal de Québec, publiait deux lettres sous ce titre ; Champ d'Apostolat.
L'une, la réponse, était de S. E. le cardinal Bégin, archevêque de Québec; elle bénissait, et recommandait hautement la noble entreprise.
L'autre était de…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurL’appel de Mgr Breynat, en 1921.
L'autre était de S. G. Mgr Breynat, vicaire apostolique du Mackenzie et demandait au vénéré Prince de l'Eglise la permission de parcourir son vaste et splendide diocèse, « où la foi est encore si vivace et les cœurs si généreux », afin d1y tenter « une levée d'ouvriers qui sachent vivre de privations et de renoncement ».
Chez nous, continuait le prélat, la besogne surabonde, et la surproduction n'est pas à craindre Nos prêtres ne suffisent même pas aux besoins du ministère. Dans bien des cas, ils sont obligés de consacrer la meilleure partie de leur temps à pourvoir à leur nourriture et à leur logement,,, Pourquoi de bons jeunes gens au bras solides et au cœur vaillant, qui gémissent dans les liens du monde et n'attendent que l'appel du Maître les invitant à ses vignes les plus éloignées, ne viendraient-ils pas s'en charger ?... De tous côtés, les appels à la charité sont si nombreux, si pressants, que, malgré la pauvreté de mes missions, je ne me sens pas le courage de tendre la main. Assez riche je m'estimerai, si je trouve, comme nous en avons déjà, des coadjuteurs qui sauront se passer d'argent et dont l'abnégation sera une prédication constante... Enrôlés sous la bannière de Marie Immaculée, revêtus, après l'épreuve du noviciat, de l'habit et de la. croix de missionnaire, ils seront eux-mêmes de vrais missionnaires; et leurs travaux devrais travaux apostoliques...
Les Frères du Mackenzie, déchargés du service des grands bateaux…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurPetits vapeurs et yachts.
Les Frères du Mackenzie, déchargés du service des grands bateaux, s'occupent cependant encore de la construction et de l'entretien de petits vapeurs comme le Saint-Charles, le Saint-Emile, le Providence.
Depuis 1915, le pétrole lui-même a. été employé. Le Saint-Ernest, que devaient suivre le Docteur Rymer, le Saint-Gabriel, inaugura la nouvelle force motrice, sous la conduite du Frère François Pelletier, venu de l'Est du Canada afin d'en apprendre la manœuvre à ceux de l'Extrême-Nord.
Le Frère Pelletier — retourné aujourd'hui au sanctuaire…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurEpisode nocturne du Grand Lac des Esclaves.
Le Frère Pelletier — retourné aujourd'hui au sanctuaire de Notre-Dame-du-Cap-de-la-Madeleine, sur le Saint-Laurent, pèlerinage national du Canada, que dirigent les Oblats de Marie Immaculée — se souvient particulièrement de la première traversée du Grand Lac des Esclaves, qu'il entreprit, le 23 juin 1915, à dix heures du soir,
La nuit, — ou plutôt ce qui s'appelle chez nous la nuit, car dans les régions subarctiques il n'y a plus de nuit, à cette époque, — la nuit est d'ordinaire plus favorable que le jour aux voyages des petites embarcations sur les grands lacs, parce que le vent a coutume de s'y apaiser et les flots de s'y calmer.
Dans l'unique cabine exiguë du Saint-Ernest prirent place S. G, Mgr Breynat, le T. R. P. Isidore Belle, assistant général de la Congrégation et Visiteur des missions du Mackenzie, et un autre missionnaire passager. Le Frère Pelletier s'occupait de la machine et le Frère Jean-Marie Beaudet du gouvernail,
A peine avait-on gagné le large qu'une brise de terre se leva et que de lentes et longues vagues se mirent à faire reculer le petit yacht. Seul, il se serait tiré d’affaire ; mais il remorquait un canot chargé de tontes les provisions, de la literie, de la cuisine, etc. Un petit engin à gazoline tout neuf avait été posé sur son arrière, et son poids l'alourdissait sans doute un peu trop, pour le cas de mauvais temps. Les vagues, à force de déferler, et en dépit des habiles manœuvres des Frères, finirent par remplir le canot qui sombra. Toutes les pièces de sa cargaison flottèrent un moment, de ci de là, sous les yeux consternés des missionnaires, et, l'une après l'autre, calèrent bientôt. S G. Mgr Breynat, versé dans l'art des naufrages, ne comptait presque rien sauver, lorsqu'il aperçut sa chapelle épiscopale portative, balancée entre deux vagues :
— Au moins elle, s'écria-l-il. A tout prix, reprenons-la !
L'épave gagnait le large, et le Saint-Ernest, retenu par le canot, plongé à pic, chancelait sur place, incontrôlable. Heureusement qu'une contre-vague fit rouler dans le sens favorable la pauvre caisse, au moment, où le Frère Jean-Marie lui jeta la longue perche de sondage, car, si ce coup avait porté dans le vide, il l'aurait peut-être jeté lui-même à l'eau. La chapelle roula un peu, Monseigneur se pencha, et la saisit à l'instant où elle achevait de s'imbiber, et de disparaître.
Le danger fatal était que la corde d'amarre du canot se mêlât à l'hélice du ]Saint-Ernest . La couper c'était, d'autre part, sacrifier le canot. Tous tirèrent sur celui-ci pour le haler sur le yacht. Mais, dans ce mouvement, réussi d'ailleurs, tout faillit chavirer. C'eût été la mort, inévitable pour chacun.
On parvint à gagner une île déserte, d'où s'envolèrent d'innombrables mouettes, et où se trouvaient des troncs d'arbres échoués. On acheva la nuit à étendra sur ces bois les pièces de la chapelle: chasubles, mîtres, linges divers, vases précieux. Un ornement rouge déteint avait carminé le tout.
Enfin le Saint-Ernest remit le cap sur Résolution, point de départ, et les voyageurs débarquèrent devant la communauté surprise, à l'heure de la prière du matin.
Presque tout était donc perdu, fors les deux esquifs, les vies et le courage les vies et le courage.
L'un des moyens de transport qui, de tous temps…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLes radeaux.***
L'un des moyens de transport qui, de tous temps, mirent à profit le savoir-faire et l'endurance de nos bons Frères, fut celui des radeaux.
L'histoire de l'un de ces radeaux mérite d'être rapportée ici.
C'était en 1895. La scierie mécanique du lac Athabaska, la seule alors dans ces régions, avait débité les pièces destinées à construire l'église de la mission Saint-Joseph, au Grand Lac des Esclaves.
Sous la direction des Pères Laity et Dupire qui retournaient, le premier au Fort-Smith, le second à Résolution, le Frère Hermas Charbonneau fut chargé par Mgr Grouard de conduire le convoi.
Canadien-Français, unissant aux qualités pratiques de sa belle patrie et à la vigueur de ses vingt-huit ans le dévouement le mieux éprouvé, le Frère Charbonneau ne pouvait tromper le choix de son évêque. Il s'était rompu à tous les travaux du Nord, à la rude mission de la Nativité où il était venu directement, dès l'âge de vingt ans, après son noviciat, fait à Lachine (Ville La Salle) près Montréal. Jamais, depuis, il ne quitta le lac Athabaska, où il préside encore à toutes les constructions, à la marche des scieries, des bateaux à vapeur, à la pêche.
Le radeau avait pour base un carré de troncs d'arbres enclavant un plancher de madriers fortement cloués. Sur cette base, 1.700 planches avaient été disposées, par rangs croisés, et, couvertes ensuite de 12,000 bardeaux en paquets. Par-dessus cette masse, 15 sacs de farine (provision annuelle de deux missions), et 20 caisses ou barils de clous, d'outils, de peinture furent entassés. Un beau meuble dans lequel on avait renfermé les divers ornements, les vases sacrés, l'ostensoir de la future église, reçut la place la plus convenable. Au milieu du radeau, â l'abri des caisses et barils, se dressait une petite tente, où les missionnaires passeraient leurs nuits.
Le voyage devait donc compter 490 kilomètres…
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Frère Charbonneau et le drame de 1895 dans les rapides du fort Smith.
Le voyage devait donc compter 490 kilomètres, sur la rivière des Esclaves; 170, du lac Athabaska aux rapides du fort Smith; le reste, du fort Smith au Grand Lac des Enclaves.
Les deux premiers jours, beau temps, facile flottaison, causeries joyeuses.
Le troisième jour, deux échouages, l'un sur le sable, l'autre sur des écueils. Quatre journées de labeur violent, les pieds dans l'eau, sous une pluie froide, parvinrent remettre à flot le colosse qui ne tirait pas moins d'un mètre d'eau.
Mais la pluie, qui n'avait cessé pendant les quatre jours et qui continuait, avait accéléré le courant de la rivière grossie; et les voyageurs ne s'aperçurent pas, le soir du jour suivant, qu'ils s'amarraient à quelques pas du gouffre de la mort,
Ce gouffre, c'était les rapides du Fort-Smith . Rapides cruels au souvenir des Oblats du Mackenzie, depuis le 14 juin 1908, où, sous les yeux consternés des Indiens, ils attirèrent pour les engloutir, avec leur canot d'écorce, deux jeunes missionnaires, pleins de force et de talent: le Père Brémond, directeur de la mission du Fort-Smith, et le Père Brohan, encore en route vers son premier poste.
Une brume pluvieuse enveloppait, ce soir-là, les alentours du radeau, dérobant tout point de repère et assourdissant les grondements des rapides.
— Il me semble que nous n'en sommes pas loin, fit observer le Frère Charbonneau, dont c'était la première visite à ces parages.
— Erreur ! répondit le Père Laity. C'est plus d'un jour à l'avance que l'on entend les rapides... Ce bruit provient sans doute de tous les torrents gonflés, qui roulent dans les bois... Vite, la prière du soir, et dormons en paix... Le premier éveillé détachera le radeau.
Ce fut le Frère Charbonneau qui, de bon matin, poussa doucement au large, attentif à ne pas troubler le sommeil des deux Pères.
La brume froide s'écrasait sur la rivière, et le grondement paraissait redoubler. Mais, confiant en la parole du Père Laity, vieux missionnaire de l'endroit, le Frère ne s'alarma pas. Il récitait sa prière du matin. . .
Tout à coup, une voix, un cri sauvage plutôt, long, éperdu, déchira le brouillard :…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Frère Charbonneau et le drame de 1895 dans les rapides du fort Smith.SUITE
Tout à coup, une voix, un cri sauvage plutôt, long, éperdu, déchira le brouillard :
— Runa ra illé ! Il n'y a plus de vie pour vous !
Les Montagnais, campés au débarcadère de Fitzgerald, que l'on doit aborder en longeant la rive gauche, pour faire le portage, avaient, de leurs yeux d'aigle, aperçu la toile blanche de la tente, en plein courant, par delà le remous de ce port où le radeau ne pouvait plus désormais revenir.
A leur cri, les missionnaires s'éveillèrent. Ils comprirent qu'ils étaient perdus. Jamais, en effet, un être vivant saisi par ces rapides, n'avait été revu.
Un espoir de sauver le radeau voulut encore briller cependant. On avait hissé à bord un esquif, vieux, presque démantelé, qui n'avait plus qu'un tolet et un clou pour fixer les erseaux.
— A l'eau, l'esquif, dit le Père Laity au Frère Charbonneau. Visez cette pointe.
Son bras montrait le dernier petit cap avancé dans la rivière.
Tandis que les deux Pères s'arc-boutaient sur les deux grandes rames assujetties au radeau, afin de le retenir un peu contre le courant et de le faire obliquer à gauche, le Frère enroulait à sa jambe le câble de l'amarre et ramait vers la terre, II y arriva, y prit pied; mais le courant emportait trop irrésistiblement la masse de bois, et le câble s'arracha de ses mains.
A grande allure le radeau descendait.
Le Frère, alors, fermant l'oreille à toute prudence humaine, relança son esquif et rejoignit le radeau, espérant, contre toute espérance, aider encore les missionnaires, décidé du moins à mourir avec eux.
Dieu entendit l'acte de contrition suprême et l'acceptation du sacrifice, qui jaillit à la fois, de ces trois cœurs, allant à l'holocauste.
Le radeau craquait déjà sur les vagues. Bientôt un rugissement de tonnerre et des avalanches bouleversées l'assaillirent de partout. Les grands rochers noirs passaient à ses côtés, comme des éclairs. Une fois, deux fois, il plongea, relancé aussitôt en l'air, comme par la poussée d'une gigantesque baliste. Puis, une lame de fond le balaya. D'un seul coup, tout fut emporté : tente, caisses, barils, meuble de chapelle, bardeaux et planches. Comment les missionnaires retombèrent-ils sur le cadre solide ? Comment, parmi la débandade des projectiles, qui s'entre-choquaient dans cette chaudière bouillonnante, ne furent-ils pas broyés ? Ils ne surent jamais le dire. Après cela, le radeau se dressa, presque vertical, en trépignant, comme pour se débarrasser de ses hôtes, qui, d'instinct, s'accrochèrent jusqu'en haut, se blessant et les mains et les genoux. Tout retomba dans le vide. Le premier rapide était passé.
Le radeau allégé repartit comme une paille...
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Frère Charbonneau et le drame de 1895 dans les rapides du fort Smith.SUITE
Le radeau allégé repartit comme une paille.
L'instant d'après, les missionnaires aperçurent, devant eux, un îlot de rochers. A droite de l'îlot, et plus près, la crête d'une seule vague, brisée à pic, révélait le bord d'une cataracte. A gauche, plus loin que l'îlot, descendait un chaos de cascades.
Le radeau, privé maintenant de ses rames, ne pouvait échapper à la cataracte que pour aller aux cascades.
Sur le dernier remous, formé par la division des courants, il tournoya trois fois sur lui-même, en se disloquant de toutes parts.
Ce fut le moment où chacun des missionnaires jeta vers le Ciel sa prière — la même exactement, ils se l'avouèrent dans la suite :
— O Marie ! Nous sommes vos Oblats ! Sauvez-nous !
Une seconde, le radeau oscilla au-dessus de l''abîme. Puis, il embarda du côté des cascades.
Mais, comme au passage il affleura l'îlot, tous trois sautèrent sur le même rocher.
Ils virent l'épave galoper encore un peu, dans les écueils, et s'effondrer tout à fait.
Prodige de présence d'esprit et de force — nous nous permettons de parler ainsi — le Frère n'avait point lâché la corde de l'esquif, Et c'est pourquoi le rocher de refuge, au milieu des cinq kilomètres que mesurait en largeur la rivière furieuse loin de tout secours d'ici-bas, pouvait encore ne pas devenir le tombeau des missionnaires.
Complètement trempés, frissonnants ils décidèrent de tenter sur le champ la traversée jusqu'à la rive gauche. C'était se rejeter dans l'inconnu.
L'esquif fut vidé. Quelques touffes de lichen calfatèrent les trous de sa quille. Les rames s'articulèrent, l'une à son tolet, l'autre à son clou. Sur un grand signe de Croix, ils partirent, le Père Dupire se tenant à l'avant pour découvrir les obstacles, le Frère Charbonneau sur les rames, le Père Laity à l'arrière, d'où il commandait du geste la manœuvre. A des ordres criés, on ne pouvait recourir, dans le vacarme général.
Il y avait moins de dix minutes que le Frère s'efforçait do couper de biais le large courant, quand de nouveaux mugissements aigus se rapprochèrent. Le brouillard à demi éclairci laissa distinguer bientôt les derniers tourbillonnements d'un autre rapide, le suivant, sans doute, de celui qui avait balayé le radeau. Les flocons de son écume rebondissaient déjà sur l'esquif, attiré par le remous. Ce remous, au prix de la vie, il fallait l'éviter. Le Frère, ployé en deux, les pieds accotés contre ceux du Père Laity, donna son coup de bras. Mais la secousse fit sauter le clou du plat-bord, et la rame se détacha. C'eût été la mort, si le Père Laity, prompt comme la pensée, n'eût saisi le clou au vol, comme il tombait à l'eau, et ne l'eût remis et tenu en place avec la main.
Les quelques secondes que prirent ces derniers mouvements…
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Apôtres InconnusCHAPITRE IIINavigateurLe Frère Charbonneau et le drame de 1895 dans les rapides du fort Smith.SUITE
Les quelques secondes que prirent ces derniers mouvements suffirent à laisser drosser l'esquif jusqu'à la tête des cascades. Pris dans cet affreux duo du rapide et des cascades, enveloppé déjà des premiers plis de la vague perfide, le Frère l'arracha quand même, en multipliant ses coups de rame.
L'embarcation mit un quart d'heure peut-être, à sortir de l'orchestre infernal. Le courant relâcha son emprise. Bientôt ce fut l'eau calme. Enfin, un doux frottement de sable sous la carène. Le rivage ! La joie ! Le Magnificat à Marie !
Débarqués, les missionnaires halent la pauvre nacelle libératrice et, se regardant alors, pour la première fois ils se rendent compte de leur état.
Le Frère Charbonneau, qui avait eu le temps de se vêtir, n'était que déchiré et détrempé. Le Frère Laity se trouvait nu-pieds, en pantalon et chemise. Le Père Dupire pareillement, et, de plus, la pipe aux dents, pleine d'eau. O habitude ! N'avait-il pas dû l'empoigner, à son chevet — puisque c'est toujours entre elle et son chapelet qu'il s'endormait — à l'instant du Runa ra illè ! Il n'y a plus de vie pour vous !
Tout le reste était perdu : les vivres, les pièces de l'église, les soutanes, les croix, la grande croix brillante que le missionnaire Oblat de Marie Immaculée reçoit, au jour de sa profession perpétuelle, et sur laquelle sa suave espérance est de déposer son dernier baiser, d'exhaler son dernier soupir.
En s'acheminent vers le poste de Fitzgerald, à travers la forêt et les rochers, nos marcheurs se coupaient les pieds aux cailloux et se piquaient le visage aux aiguilles des sapins serrÉs. Mais que leur importait si peu !
Au village indien, tout en prières pour les âmes de ceux que l'on croyait morts, leur apparition fut annoncée par une fillette, qui cria, en s'enfuyant :
— Maman ! Les Pères qui sont habillés en hommes !
Les wigwams se vidèrent, pour entourer les « revenants ».
Sans trouver un mot à se dire, de part et d'autre, tant ils étaient émus, missionnaires et Indiens se touchèrent affectueusement la main.
Un grand feu réchauffa bientôt les naufragés.
Quelqu'un donna au Père Laity une casaque velue. Un autre affubla le Père Dupire d'une toile cirée et d'un béret de coton.
Quelques heures plus tard, les missionnaires descendirent, ayant fait le portage de 25 kilomètres, et rejoignirent leur maison-chapelle du Fort-Smith.
La première messe du lendemain fut chantée en actions de grâces.
A suivre : Chapitre IV : Chef d’équipages.
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChef d’Équipages
A la Samoyède. – Par 40 degrés centigrades. – La langue du Frère Bowes. – L’hiver arctique et ses splendeurs. – Aurores boréales. – Les raquettes. – Le mocassin. – La course dans les régions polaires. – Ses douleurs. – Les équipages. – Le cheval. – Mort des Frères Welsch et Nicolas. – Le traîneau à chien. – « Ma fille » et « mon chien » – Meutes et dressage. – L’attelage. – Quelques grands coureurs : Frères Jean-Marie Beaudet luttant contre les bordillons, Leborgne battant la neige devant les chiens, Kérautret sombrant dans le lac, Crenne le dompteur. – La tâche la plus dure. – En route. – La crevasse et la poudrerie. – Campement à la belle étoile. – Un ressuscité de la Sainte Vierge : le Frère Guillet. – De l’hôpital de Laval au lac Caribou.A la Samoyède.
Quel est ce Samoyède ?
La maisonnette a vivement refermé sa porte au rude loquet. Sur le seuil. devant le jour blafard qui commence et dont on ne saurait dire s'il descend du ciel où se meurt l'aurore boréale ou bien s'il monte de la grande nappe de neige étendue, l'homme apparaît., velu, hirsute comme l'ours noir dans sa large fourrure. Une peau de renne l'enveloppe jusqu'aux genoux, et le capuchon qui la surmonta, confondu avec la barbe inculte, ne laisse même pas deviner le bon œil clair qui scrute l'horizon du grand lac gelé. Au fond des mouffles en peau de castor, suspendues aux épaules par des cordons de cuir, disparaissent les mains. Enveloppées de plates molletières, les jambes s'affirment déjà, sveltes et déliées.
Ce Samoyède, vous l'eussiez vu, il y a une heure, à genoux, avec son austère soutane et sa belle croix de missionnaire, au pied d'un humble autel. Aux côtés du prêtre, son compagnon et le père de son âme, il achevait sa prière et sa méditation quotidienne. Puis la sainte Messe commença, sous la lueur de deux chandelles de suif de renne. Au moment appelé par ses désirs, il se leva, se prosterna, et, les mains jointes, reçut le Pain des Forts, le Pain des Voyageurs. Suivit l'action de grâces. Le déjeuner se prit au coin de l'âtre.
C'est alors que le costume changea, et qu'une dernière bénédiction du Père, gardien du foyer pour ce jour-là, tomba sur celui qui partait.
Vous avez encore nommé le Frère coadjuteur.
Si, lors de son réveil, il a entendu la maison de bois craquer de toutes parts; si. à peine ressorti il ressent jusqu'aux racines des dents comme l'impression d'une eau glacée; si son haleine s'échappe en sifflant et se change aussitôt en une buée givreuse qui enfarine sa fourrure; si ses yeux n'ont pu retenir les deux larmes arrachées par le froid, il sait que le thermomètre centigrade ne marquerait pas moins de quarante degrés au-dessous de zéro. Le moindre vent alors deviendrait une menace de mort. Mais dans l'air tranquille qui est presque toujours la condition des froids extrêmes, il suffira au voyageur de se vêtir amplement, chaudement, légèrement toutefois, afin d'éviter les sueurs qui se glaceraient sur lui, et de ne s'arrêter que pour faire son grand feu et pour se coucher dans un trou de neige, au bord d'une forêt.
De 40, le…
Dernière édition par Louis le Sam 18 Mar 2023, 7:43 am, édité 1 fois
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChef d’ÉquipagesPar 40 degrés centigrades.
De 40, le thermomètre pourra descendre à 45, 50, 60 degrés, l'heure du soleil levant restant la plus mordante.
Les froids extrêmes ne persistent que peu de jours, et la température moyenne des sept à neuf mois que dure l'hiver arctique se renfermerait entre 25 et 35 degrés centigrades.
Quelques semaines de ce gel suffisent a solidifier tous les fleuves, à l'exception de certains rapides, tous les lacs et même les parties de l'océan comprises entre les îles polaires et le continent. Les glaces y dépasseront deux mètres d'épaisseur.
Par ces froids, aucun « habitué » du Nord…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChefs d’équipages.La langue du Frère Bowes.
Par ces froids, aucun « habitué » du Nord ne s'avisera de toucher un métal, surtout des lèvres ou d'une main humide. On en avait averti le Frère Bowes, l'intrépide futur architecte des plus chaudes maisons du Nord-Ouest. Il arrivait d'Europe au lac Labiche-
— On ne me fera pas croire pareille fable, se dit-il. Voyons plutôt.
Et il sortit.
Bientôt des cris gutturaux, désespérés, éclatent sous les fenêtres des missionnaires, des coups de pieds heurtent la porte. C'est le Frère Bowes dont la langue est collée au tranchant d'une cognée. Ses mains soulèvent le manche pour soulager un peu le membre happé par l'acier. Graduellement, à l'aide de linges chauffés, Mgr Faraud et le Père Grandin parviennent à dégeler la cognée et la langue. Il n'y périt qu'un mince feuillet de peau.
Ce froid du Grand Nord, que le Père Petitot déclare...
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChefs d’équipages.L’hiver arctique et ses splendeurs.
Ce froid du Grand Nord, que le Père Petitot déclare « plus terrible que le loup blanc des steppes et que l'ours gris des montagnes », surprend d'une autre manière, plus intéressantes que redoutables, le nouveau venu.
Sous ses étreintes, continue le même missionnaire, la soie, le duvet, les plumes s'attachent à vos doigts, somme s'ils étaient enduits de glu; les copeaux de la planche que vous rabotez adhèrent à votre instrument; la feuille de papier que vous avez nettoyée avec votre gomme-grattoir se précipite sur la main que vous lui présenter, comme lu paille sur l'ambre échauffé. Si vous faites votre toilette devant une fenêtre, une glace, votre chevelure, au lieu de se courber sous le peigne, s'ébouriffe, se hérisse et s'agite avec des crépitations, comme si votre tête eût été transformée, durant votre sommeil, en tête de Méduse. Machine électrique vivante, vous ne pouvez vous revêtir de vos pelleteries, vous étendre dans vos robes de fourrures, ou même dans une simple couverture de laine, sans faire jaillir de ces peaux, de cette laine, sous vos mains, sous votre corps, un véritable feu d'artifice, accompagné de pétillements.
Ce feu d'artifice…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChefs d’équipages.Aurores boréales.
Ce feu d'artifice, effet sans doute de la résistance opposée par l'air, densifié par le froid, aux radiations électriques, qui se dégagent de la terre dans le voisinage du pôle magnétique — les soubresauts de la boussole qui y correspondent toujours et les odeurs d'ozone qui le suivent, comme elles suivent les orages, le confirmeraient — se déploie avec une splendeurs féérique dans les aurores boréales.
Une tribu mortagnaise, comparant cette illumination à l'océan de feux follets, qui couvre les troupeaux de rennes, galopant, pelage contre pelage, dans les steppes arctiques, l'ont, appelée les rennes célestes. Pour les Cris algonquins, l'aurore boréale représente la danse des esprits.
Mais ni le galop le plus rapide, le plus étincelant, ni la danse la plus tourmentée, la plus aérienne n'en sauraient donner l'idée à qui ne l'a point vue.
Pour s'essayer à décrire l'aurore boréale, il faudrait n'y «voir assisté qu'une fois. Mais, quand, presque chaque-soir du long hiver, le spectacle s'est répété, sans ressembler jamais a celui de la veille, on pose là sa plume découragée.
L'aurore boréale n'obéit qu'à une règle: ravir toujours l'œil humain par l'harmonie de ses mouvements, si désordonnés qu'ils paraissent, et par l'agrément des couleurs dont elle se pare, si hardies qu'elles soient.
Les aurores vivement teintées, malgré leurs fusions chatoyantes, leurs couronnes elliptiques et leurs rosaces échevelées, ne sont point toutefois les plus aimées. L'aurore blafarde, safranée, ordinaire, a pour elle, la beauté essentielle de l'aurore: l'extrême mobilité, et demeure tellement diaphane, dans ses évolutions, qu'elle laisse constamment filtrer jusqu'à la terre l'immobile rayonnement des étoiles et de la lune, avivées par le froid.
Attaché au zénith par une agrafe mystérieuse, le voile de cette aurore se développe souvent en courtines immenses. Elle s'abandonne mollement d'abord à quelque souffle secret qui la parcourt de l'occident à l'orient. Certains de ses plis se gonflent si largement parfois qu'ils viennent affleurer la terre, avec un bruissement d'étoffe agitée, un sifflement même nettement perçu par l'oreille. Une main rassemble tout à coup la draperie, pour la relancer encore, la saisir de nouveau et la disperser enfin en débris argentés dans la nuit bleue.
Les aurores, blanches ou orangées, les plus entièrement belles — les missionnaires en restent d'accord — sont les dansantes, Elles surgissent soudain des zones magnétiques, en fusées intenses, en faisceaux de lances ou en colonnades diamantées, et gagnent, d'un bond, les hauteurs du firmament. D'un même mouvement, elles redescendent. Puis, elles n'élargissent autour du ciel, comme pour adopter leurs positions, et s''établissent un peu au-dessus des forêts lointaines que l'on voit baignées d'un or stagnant. Et les millions, les myriades de pieds de feu se mettent en valse, s'élevant, s'abaissant, s'éloignant, se rapprochant, tournoyant, alternant le pas, s'entre-croisant, se confondant, se dissociant, tantôt ralentissant, tantôt se précipitant et piétinant l'horizon avec une frénésie de colère, jusqu'à ce qu'un coup de vent magique, faisant éclater le plancher du bal, projette dans les airs l'aurore entière, et jonche le ciel de ses brumes neigeuses, bientôt évanouies.
Mais déjà un nouvel escadron de feu jaillit du sol polaire, et la danse nocturne recommence.
L'aurore boréal se retire parfois tout à fait, pour livrer l'espace à un vol de cristaux grésillant, qui enveloppent la lune de halos merveilleux et la multiplient en parasélènes qui n'auront de rivales que les parhélies du soleil d'hiver.
Le missionnaire, cheminant sous ces magnificences, se surprend quelquefois à fredonner ce que chantait le petit enfant à sa mère ;Puisque des cieux si doucement rayonne,
Comme il doit être beau, l'autre côté du Ciel !..
Mais il se ressouvient que pour gagner ce Ciel de beauté et de repos, il lui faut aller encore, sur les neiges réelles, froides, immenses, à la conquête des âmes.
Ces neiges s'accumulent particulièrement entre les berges des…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChefs d’équipages.Les raquettes.***
Ces neiges s'accumulent particulièrement entre les berges des rivières et dans les clairières des bois.
Plus hautes et plus molles elles seront, plus vastes devront être les raquettes.
Dans les profondeurs des bois, pour maintenir le piéton par-dessus les buissons où s'accrochent les bordées, l'escarpin devra mesurer prés de deux mètres de long sur un demi de large. Ces dimensions de la raquette de chasse conviennent particulièrement aux vallées de la haute rivière la Paix et de la rivière Nelson, son affluent, à l'abri des montagnes Rocheuses. Mais dans les grands steppes, battus par les vents secs de l'Athabaska-Mackenzie, la raquette de course ne mesure guère plus d'un mètre sur 35 centimètres,
La raquette est une natte en cordelettes de peau (babiche), natte ajourée et fermement tendue dans un cadre léger, de forme oblongue, lequel se relève, par devant, en volute élégante pour franchir les aspérités du chemin, et se prolonge, à l'arrière, en simple bâton. Deux barres transversales tiennent ouvert, au milieu du réseau, l'espace nécessaire au jeu de l'avant-pied. Celui-ci, retenu par deux lanières, qui l'assujettissent à l'une des barres et vont contourner le talon, traîne, sans la soulever complètement, la raquette. Il bascule à chaque pas sur la barre, les orteils plongeant dans la neige et la plante du pied rebondissant un peu contre le treillis sur lequel elle s'appuie.
Dans les champs de neige asséchée, la course sera facile. Mais sons les neiges fondantes, cordelettes et lanières se relâcheront, et le cadre et le réseau imbibés s'alourdiront en boulet de forçat.
La chaussure du pied…
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Re: Apôtres Inconnus
Apôtres InconnusCHAPITRE IVChefs d’équipages.Le mocassin.
La chaussure du pied consiste en une pièce de laine enroulée (nippe) et en une gaine de peau tannée de renne ou d'orignal. Ce chausson léger et souple, retenu par des lanières de peau autour du mollet, s'appelle mocassin. Soulier idéal de l'Extrême-Nord, qui n'a pour ennemis que les cailloux du chemin et l'humidité du printemps, on le trouvera longtemps encore, l'été comme l'hiver, à l'église comme sous la tente, au pied de l'évêque, du missionnaire, de la religieuse, comme à celui du Peau-Rouge sauvage.
L'habitant des pays tempérés ne se figurerait pas…
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