Les OBLATS en Amérique.
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Les OBLATS en Amérique.
LIVRE CINQUIÈME. — AU CANADA (1841-1861)
CHAPITRE I. — Le DÉPART (1841). — * 1. Ite et vos in vinam meam. — * 2. Ecce ego, mitte me. — * 3. Sur les eaux et sur la glace.
CHAPITRE II. — SAINT-HILAIRE (1841-1842) — * 1. Le Calvaire de Rouville.— * 2. Premières missions paroissiales. —* 3. Les townships. En voyage sur la neige. — * 4. Combats contre l'hérésie.
CHAPITRE III. — LONGUEIL (1842-1844). — * 1. Le P. Léonard. — * 2. Satisfaction de Mgr Bourget. — Les PP. Allard, Brunet, Laverlochère.
CHAPITRE IV. — BYTOWN (Ottawa) (1844). — * 1. Un germe de capitale.— * 2. Chantiers et terres de chasse. — * 3. Sur les bords de l’Ottawa et de la Gatineau. — * 4. Le P. Guigues chargé d’organiser la province naissante du Canada.
CHAPITRE V. — VERS LE « GRAND NORD » (1844-1849). — * 1. Au sein de la forêt immense. — * 2. Au tour du lac Témiskamingue. — * 3. Le long des lacs Abitibi. — * 4.Dans les territoires de la baie d’Hudson. — * 5. La mission ambulante. — * 6. Protection du Ciel au milieu du danger.
CHAPITRE VI. — LE SAGUENAY (1844-1849). — * 1. A la grande baie des Ah ! Ah ! — * 2. Le P. Flavien Durocher. — * 3. Chez les Montagnais. — * 4. Vers le Labrador. — * 5. La colonisation.
CHAPITRE VII. — ÉRECTION DE L’ÉVÊCHÉ DE BYTON (1846-1856). — * 1. Promotion du P, Guigues à l’épiscopat. — * 2. La création d’un diocèse. —* 3. Le collège d’Ottawa, future Université.
CHAPITRE VIII. — FONDATION DE LA CONGRÉGATION DES SŒURS DES SS. NOMS DE JÉSUS ET DE MARIE (1843-1856). — * 1. Commencements d’une grande œuvre. — * 2. L’affermissement.
CHAPITRE IX. — MONTRÉAL (1848-1858). — * 1.Construction de l’église Saint-Pierre. — * 2. Œuvres de zèle. — * 3. Dans le diocèse.
CHAPITRE X. — MANIWAKI (1848-1859). — * 1. La Réserve de Marie. — * 2. Le P. Déléage. —* 3. Les Tête-de-Boule.
CHAPITRE XI. — AU SAULT–SAINT-LOUIS. CAUGHNAWAGHA. (1851-1861) — * 1. Le P. Antoine. — * 2. Chez les Iroquois.
CHAPITRE XII. — QUÉBEC (1853-1861). — * 1. L’église Saint-Sauveur. — * 2. Œuvres de zèle. — * 3. Dans l’archidiocèse.
CHAPITRE XIII. — LES ESCOUMINS (1853-1861). — * 1. Progrès de la foi vers l’est. Le. P. Arnaud. — * 2. Les Naskapis.
LIVRE SEPTIÈME — DANS L’ORÉGON ET LA COLOMBIE BRITANNIQUE (1847-1861)
CHAPITRE I. — SITUATON POLITIQUE ET RELIGIEUSE DE L’ ORÉGON ET DE LA COLOMBIE BRITANNIQUE À L’ARRIVÉE DES OBLATS. — * 1. Rivalités de trois grandes nations sur les rives du Pacifique. — * 2. Découvertes et colonisation à l’ouest des Montagnes Rocheuses. — * 3. Tentatives d’évangélisation.
CHAPITRE II. — DE LA MÉDITÉRRANNÉE AU PACIFIQUE (22 janvier – 4 octobre 1847). — * 1. Le P. Ricard et ses compagnons.— * 2. De Marseille à Saint-Louis, dans l’État de Missouri. — * 3. La caravane – Par monts et par vaux. — * 4. La Terre promise. — * 5. Orégon City. Propositions de l’Archevêque et de Mgr Demers.
CHAPITRE III. — CHEZ LES WALLA-WALLAS ET LES YAKIMAS (1847–1853). — * 1. Sainte-Rose. — * 2. L’Immaculée-Conception. — * 3. Le docteur Whitman. Assassinats et troubles. — * 4. Saint Joseph de Simcoé. — Éloquence de Kamaïarkan. — * 5. Sainte-Croix d’Attanem. — Règlement de vie des sauvages.
CHAPITRE IV. — OLYMPIA (1848–1857). — * 1. Les commencements d’une capitale. — * 2. Les Indiens du Puget Sound. — * 3. Admiration des protestants. — * 4. Merveilleuse transformation, chez les sauvages convertis. Confessions publiques et pénitences corporelles.
CHAPITRE V. — CHEZ LES CAYOUSES (1852–1857). — * 1. Parmi les meurtriers de Whitman.— * 2. Nouveaux ouvriers. — Les Pères D’Herbomez, Durieu, etc.
CHAPITRE VI. — LA GUERRE POUR L’INDÉPENDANCE (1855–1858). — * 1. Mécontentement des sauvages contre les Américains des États-Unis. — * 2.Soulèvement général. — * 3. Destruction des Missions chez les Yakimas et les Cayouses. — * 4. Apôtre des sauvages et aumônier militaire.
CHAPITRE VII. — LES SNOHOMISH (1858–1861). — * 1. Projet de migration vers le nord. — * 2. Attachement réciproque des Missionnaires et des sauvages convertis. — * 3. Près de la frontière anglaise. — Tulalip.
CHAPITRE VIII. — DANS L’ÎLE VANCOUVER (1858–1861). — * 1. Esquimalt et Victoria. — * 2. Les Saanich. — * 3. A la découverte.
CHAPITRE IX. — EN COLOMBIE-BRITANNIQUE (1859–1861). — * 1. Projet d’évangélisation. — * 2. Sur les bords du lac Okanagan.— * 3. Mission du fort Hope, du fort Yale et de Sainte-Marie — * 4. New-Westminster.
LIVRE HUITIÈME — AUX-ÉTATS-UNIS (1842-1861)
CHAPITRE I. — PREMIERS TRAVAUX (1842–1851) — * 1. Immigration canadienne. — * 2. Extension de l’apostolat.
CHAPITRE II. — BUFFALO (1851–1861) — * 1. La Queen City of the lakes. — * 2. Le Collège. — * 3. La Holy Angels’ Church. — * 4. Grand succès des missions dans les milieux anglais.
CHAPITRE III. — PLATTSBURGH (1853 –1861) — * 1. Le P. Bernard Jean-Pierre. — * 2. Prédications dans un temple protestant. — * 3. Création de la paroisse. — * 4. Redford et Dannemora. — * 5. Burlington.
CHAPITRE IV. — AU TEXAS (1849–1861) — * 1. Brownsville et Galveston. — * 2. Dans les ranchos. — * 3. Fièvre jaune et naufrage. — * 4.Troubles politiques.
LIVRE NEUVIÈME — AU MEXIQUE (1858-1861)
CHAPITRE I. — SUR LA FRONTIÈRE (1858 –1861) — * 1. La révolution à l’état endémique.— * 2. Matamoros.— * 3. Notre-Dame du Refuge.
CHAPITRE II. — MISSIONS DANS L’INTÉRIEUR (1858 –1861) — * 1. Cruillas et Burgos. — * 2. Victoria et la police ombrageuse. — * 3. Persécution. — * 4. Guerre civile et étrangère.
Dernière édition par Louis le Jeu 17 Oct 2024, 12:29 pm, édité 103 fois
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§1Ite, et vos, in vineam meam !
Dans la première moitié du XIXe siècle, ce qui fut pendant près de deux cents ans la Nouvelle-France, comprenait deux provinces vastes chacune comme un royaume : le Bas-Canada, ou province de Québec, s'étendant sur les deux côtés du fleuve Saint-Laurent, depuis le confluent de la rivière Ottawa jusqu'à l'Atlantique ; le Haut-Canada, ou province d'Ontario, bornée au sud par les grands lacs, et montant au nord jusqu'aux rives occidentales de la baie d'Hudson.
Depuis la cession de ces contrées à l'Angleterre par le traité de Paris, en 1763, les Franco-Canadiens eurent presque continuellement à lutter pour la conservation de leur langue et de leur foi.
Malgré la promesse solennelle du libre exercice de leur religion, le roi Georges III prétendait exiger d'eux et de leurs prêtres le serment schismatique du Test, ou d'apostasie. A la hiérarchie catholique devait être substituée la hiérarchie anglicane. On ne permettrait aucun acte de juridiction des évêques ou curés en communion avec Rome. En tous lieux, on multiplierait les écoles protestantes, afin que la jeunesse se pénétrât des principes de la religion gouvernementale, instituée par l'impudique Henri VIII et sa digne fille, la papesse Élisabeth. Les Ordres religieux, réduits à la misère par la confiscation de leurs biens, seraient condamnés à périr par extinction, à la suite de la défense, à eux intimée, de recevoir des novices. Quant aux simples laïques, une sorte d'ostracisme leur interdirait l'accès des fonctions publiques et l'entrée du Corps législatif.
A la suite de tracasseries continuelles qu'il serait trop long de raconter ici. quelques exaltés, en 1837, levèrent l'étendard de la révolte. Elle fut réprimée avec une extrême sévérité, et fournit le prétexte à des mesures despotiques, pour absorber les Canadiens catholiques dans l'élément anglo-protestant.
On décréta l'union des deux Canadas (23 juillet 1840). en leur donnant une Chambre haute dont les membres seraient nommés à vie par le roi, et une Chambre élective dont les membres seraient choisis, à chiffre égal, par chacune des deux provinces. Outre que la population du Bas-Canada, formée presque exclusivement de catholiques, verrait ses représentants systématiquement écartés de la Chambre haute, elle ne posséderait dans la Chambre élective pas plus de députés que la population de l'Ontario, deux fois moindre, mais composée de protestants anglais.
Cette flagrante injustice s'accentuerait de plus en plus, avec le développement toujours croissant des Franco-Canadiens, chez lesquels la proportion des naissances était de beaucoup supérieure.
Si on ne pouvait caresser le rêve d'assister, un jour, à l'anéantissement d'une race aussi vigoureuse, il était urgent de l'anglicaniser le plus possible, et au plus tôt. On proscrivit donc la langue française de tous les documents officiels, et l'on remania profondément les circonscriptions électorales, de façon à assurer aux Anglais plus des deux tiers des sièges. Des comtés populeux, habités par les Canadiens-Français, furent fondus en un seul, tandis que les comtés anglais, sensiblement moins peuplés, gardèrent leurs limites précédentes. On arriva ainsi à cette énormité que, dans certains cas, quinze mille protestants avaient autant de repré¬sentants à la Chambre que cent cinquante mille catholiques.
Le but semblait atteint,…
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 1Ite, et vos, in vineam meam !SUITE
Le but semblait atteint.
Dieu se plaît, néanmoins, à déjouer, parfois, les complots les mieux ourdis. L'Acte d'Union qui, dans la pensée de ses auteurs, devait forger des entraves à l'Église, contribua, au contraire, à sa liberté, en favorisant celle des sectes dissidentes, car l'anglicanisme cessait d'être la religion d'État.
Resserrant leurs rangs, les Franco-Canadiens se groupèrent autour de leurs pasteurs. Plus que jamais, la paroisse fut pour eux, non seulement le foyer de la vie chrétienne, mais aussi la citadelle imprenable de leur nationalité. Elle opposa une digue infranchissable au flot envahisseur de l'assimilation. Là se conservèrent leurs traditions séculaires, leurs aspirations, leurs énergies, leur idiome, auquel ils ne voulurent jamais renoncer.
Parmi les leurs, ils trouvèrent des chefs intelligents et pleins d'initiative, capables de tirer très habilement parti de toutes les ressources, si minimes fussent-elles, de la nouvelle Constitution, conçue, cependant, pour les annihiler.
Dix ans ne s'écouleraient pas avant le rétablissement de la langue française dans les débats parlementaires et les documents officiels. En même temps, les Franco-canadiens obtiendraient dans la direction des affaires publiques une influence avec laquelle, dorénavant, on aurait à compter. Puis, ils entreraient, eux aussi, dans la Chambre haute, à laquelle le principe électif serait appliqué : modification importante, aux conséquences incalculables.
Ce peuple que les conquérants avaient espéré tenir en perpétuelle tutelle, arriverait ainsi à la complète émancipation.
A ce travail de restauration nationale le clergé prendrait une large part, et serait efficacement secondé par les religieux qu'il appellerait à son aide.
L'apostolat des Oblats de Marie, au Canada, est intimement lié à cette œuvre féconde.
Longtemps il n'y eut qu'un diocèse pour l'ensemble du Canada : celui de Québec. Centre d'un vicariat apostolique depuis 1818, Montréal ne fut érigé en évêché qu'en 1836. A la mort du premier titulaire. Mgr Lartigue, son secrétaire et confident, Mgr Bourget, lui succéda, le 3 mai 1840.
Une des plus instantes préoccupations du nouveau prélat fut de trouver des hommes de Dieu qui. s'adonnant de préférence à la prédication, se consacreraient spécialement à l'amélioration spirituelle des villes et des campagnes. Il manifesta cette pensée à ses prêtres, durant la retraite du mois d'août suivant, et à ses ouailles par un Mandement du 9 septembre de la même année :
— Notre prédécesseur, leur disait-il dans cette Lettre, avait ardemment souhaité que son diocèse participât au bienfait des missions qui régénèrent actuellement la France. Sur son lit de mort, il a, de ses lèvres défaillantes, demandé au Ciel que son vœu fût exaucé... Le prince des ténèbres, plus que jamais, nous fait la guerre, et cherche à étendre son empire au milieu du troupeau de Jésus-Christ... L'hérésie et l'impiété nous attaquent de toutes parts...
Afin de chercher ces collaborateurs qui lui manquaient,...
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 1Ite, et vos, in vineam meam !SUITE
Afin de chercher ces collaborateurs qui lui manquaient, Mgr Bourget s'embarqua pour l'Europe, après avoir annoncé, par une autre Circulaire du 12 avril 1841, le but de son voyage, et réclamé des prières pour le succès de ses démarches :
— Une chose nous alarme, nos très chers Frères : nous n'avons pas assez de bras pour nous aider à cultiver la vigne dont le Père de famille nous a chargé. Vos bons pasteurs se plaignent à nous d'être dans l'impossibilité de vous porter tous les secours nécessaires. Hélas ! nous ne pouvons que leur répéter ces paroles de Notre-Seigneur : « Suppliez le Maître de la moisson d'envoyer des ouvriers dans son champ !... »
Deux mois plus tard, à Paris, le dimanche de la Sainte Trinité, il officiait à l'église de Notre-Dame des Victoires, et recommandait son entreprise aux prières des nombreux assistants.
Rendant compte de son allocution, quelques journaux de la capitale, le lendemain, révélèrent au grand public le désir de son cœur, en exprimant des vœux pour sa réalisation :
— Monseigneur de Montréal est en quête d'ouvriers évangéliques. Puisse notre France catholique, si riche en dévouements, lui en fournir qui soient dignes d'elle et de lui.
Mais, en vain, sonda-t-il diverses communautés religieuses. Aucune réponse favorable. Après des semaines de tâtonnements, il ignorait encore quels étaient ceux que la Providence lui réservait.
Très inquiet, il se dirigea vers Rome.
Marseille était sur sa route. Il s'y arrêta, et attendit même plusieurs jours le départ du navire pour l'Italie. Au séminaire, où il se présenta pour célébrer la Messe, le P. Tempier le reçut avec les égards dus à son rang.
Pendant le déjeuner, l'évêque causa du Canada, du but de son voyage et de ses efforts jusque-là infructueux.
Puisqu'il en est ainsi, répondit son interlocuteur, nos Oblats probablement pourraient vous être utiles.
— Vos Oblats !...
— Il me semble.
— Comment ? Que voulez-vous dire ? Expliquez-vous, je vous prie…
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 1Ite, et vos, in vineam meam !SUITE
— Comment ? Que voulez-vous dire ? Expliquez-vous, je vous prie.
Mgr Bourget ne connaissait pas notre Congrégation. A cette époque, en effet, elle n'était répandue que dans la Provence, la Suisse, la Corse et le Dauphiné. Étonné d'apprendre les merveilleux succès dont Dieu avait couronné le zèle de cette jeune famille d'apôtres, il demanda d’être introduit auprès du vénéré Fondateur.
Comme tant d'autres, il fut frappé de ses nobles manières, de sa distinction et de sa piété si vive.
Retenu au palais épiscopal, il y goûta les charmes de cette hospitalité si cordiale et si délicate qui ravissait tous ceux qui avaient l'heureuse fortune d'en jouir. Les deux prélats eurent de fréquents entretiens. Invariablement, ils se terminaient par cette invitation, de plus en plus pressante, de Mgr Bourget :
— Ite, et vos, in vineam meam ! Par vos enfants, venez chez moi ! Envoyez quelques-uns de vos Oblats dans mon vaste diocèse. L'Amérique du Nord a besoin d'eux.
Toujours prudent et sage, le Supérieur général, avant de se prononcer définitivement, crut devoir méditer longuement sous le regard de Dieu.
Quand son visiteur quitta Marseille, il n'avait pas encore d'acceptation officielle ; mais il était sûr d'être exaucé.
— Laissez-moi votre adresse à Rome, lui dit Mgr de Mazenod. Vous y recevrez le résultat de nos délibérations.
§ 2.Ecce ego, mitte me !…
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 2Ecce ego, mitte me !
L'évêque de Montréal avait parlé aussi de peuplades sauvages à évangéliser. C'était donc les missions étrangères qu'il offrait également. Or, les Règles ne prévoyaient pas cette destination. Ceux qui s'étaient enrôlés dans l'Institut, ne s'étaient pas engagés à s'éloigner à ce point de leur patrie, de leurs amis et de leurs parents, pour embrasser un genre de vie si différent de celui qu'ils avaient mené jusque-là, et qui exigerait tant de détachement, d'abnégation et même d'héroïsme.
Pour ce sacrifice, il fallait leur libre assentiment, puisque leur vœu d'obéissance ne les y obligeait pas.
D'abord, le vénéré Fondateur s'ouvrit de ce projet aux Pères de résidence dans la ville épiscopale. Sans exception, ils l'approuvèrent chaleureusement, et sollicitèrent l'honneur d'être choisis pour cette sainte croisade.
Dans la Congrégation, affirmaient-ils, tous n'auront qu'une voix, pour accueillir avec bonheur et enthousiasme une telle proposition.
Une Circulaire fut donc expédiée. Elle se résumait en ces deux questions, auxquelles chacun répondrait personnellement : 1° Etes-vous d'avis qu'on accepte ce pénible et glorieux ministère ? — 2° Seriez-vous prêt à vous y consacrer ?
Quelques jours après, les réponses arrivèrent unanimes. Sous la variété de formes, elles étaient toutes le commentaire du texte biblique :
— Ecce ego, mitte me ! Me voici, envoyez-moi !
— Il faudrait les enregistrer toutes, tant elles sont édifiantes, écrivait, le soir du 24 juillet, Mgr de Mazenod dans son Journal... On y verrait les sentiments qui animent notre Congrégation et le dévouement de ceux qui la composent ! L'esprit de Dieu remplit leur cœur. Le zèle pour le salut du prochain et l'attachement à l'Église, sont en eux l'apanage commun.
Manifestant sa joie au P. Courtès, il ajoutait :
— Outre leur acquiescement, la plupart m'ont exprimé l'attrait puissant qu'ils éprouvent pour cette mission. Je n'aurai donc que l'embarras du choix.
— L'évangélisation des âmes les plus abandonnées, disaient ces lettres, c'est là notre raison d'être et la plus ardente de nos ambitions. A des milliers de lieues, il y a des peuplades sauvages qui n'ont pas encore entendu la bonne Nouvelle. Et l'on nous demande qui doit aller à ces déshérités ? Mais c'est nous ! c'est nous ! Evangelizare pauperibus misit me! Telle est notre devise! Telle est notre vocation !...
Que ces sentiments sont beaux, et combien touchante leur spontanéité !
Ce n'étaient pas, là, de vaines paroles, ni un enthousiasme passager, ou des résolutions éphémères.
Nous, venus après ces intrépides de la première heure, nous constatons, de nos yeux, les gigantesques résultats de leurs héroïques travaux.
Qu'était l'immense Nord-Ouest américain, il y a soixante-quinze ans ? Qu'est-il aujourd'hui ?...
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 2Ecce ego, mitte me !SUITE
Qu'était l'immense Nord-Ouest américain, il y a soixante-quinze ans ? Qu'est-il aujourd'hui ?
Alors, c'était un pays presque inexploré. Les cartes géographiques les plus parfaites se contentaient d'en indiquer les rivages et l'embouchure de quelques fleuves des plus importants. Pour le reste, l'inconnu. Les lacs innombrables, les larges rivières rayonnant dans toutes les directions, les chaînes de montagnes, quand on les y mentionnait, ne l'étaient qu'au hasard, sans que rien justifiât le pointillé hésitant auquel on se bornait.
Nos Missionnaires, nous pouvons le relater avec une fierté légitime, ont parcouru jusqu'à leur extrémité, et visité en détail ces contrées mystérieuses. Sur les cartes que de noms oblats on lit maintenant, comme un signe incontestable des découvertes que les membres de la Congrégation ont faites, ou des centres d'habitation qu'ils ont créés, dans ces régions qui s'étendent jusqu'au cercle polaire et au delà ! Qui a ainsi appelé les lacs Mazenod, Tempier, Fabre, Grandin, Taché, Séguin, Clut. Pascal, Rey. etc ? les montagnes Vanden Berghe ? les localités, ou cantons Mazenod, Guigues, Laverlochère, Lacombc, Légal, Leduc, Végreville, Tabaret, Grouard, Lebret, Gcndreau, Antoine, Poitras, Simonin, etc. ?
Dans ces espaces, des tribus sauvages erraient à l'aventure, ignorantes des vertus chrétiennes et des avantages de la Société. Depuis, des peuplades entières ont été converties, et, jusqu'à l'océan Glacial arctique, le Credo est chanté.
Avec des fatigues inouïes et un travail surhumain, les Oblats ont, sous ce rude climat, défriché de vastes terres incultes, et puissamment contribué à l'éveil de tout un continent à la lumière évangélique et à la civilisation.
— Les merveilles opérées par la Congrégation des Oblats dans le Nord-Ouest, a dit un auteur récent, impartial et bien renseigné, forment un des chapitres les plus saisissants de l'Histoire générale des missions catholiques. C'est une émouvante épopée. Là se sont poursuivis, au prix de sacrifices à peine croyables, les Gesta Dei per Francos, car tous les Missionnaires furent Français de France ou du Canada. On voit, là, maintenant, de florissantes provinces ecclésiastiques, partagées en plusieurs diocèses et vicariats apostoliques, ayant tous à leur tête des évêques Oblats (1).
Dix ans après les premiers départs, en constatant que cette flamme du zèle, déjà si intense à ses débuts, n'avait cessé de croître au sein de sa Congrégation, Mgr de Mazenod écrivait :
— Quels sujets la Providence nous envoie !... Plus admirables les uns que les autres ! On ne peut pas imposer un plus dur sacrifice à ceux qui restent en France, que de les y retenir ! Tous, de grand cœur, traverseraient les mers et iraient jusqu'au bout du monde, afin de procurer plus abondamment le salut des âmes et la gloire de Dieu !
§ 3.Sur les eaux et sur la glace.…
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(1) Fournet, prêtre de Saint-Sulpice, professeur à Montréal, Le Catholicisme au Canada, dans le Dictionnaire de Théologie catholique, Paris, 1903-1914. t. II. col. 1477, 1491 sq.
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 3Sur les eaux et sur la glace.
Pour le premier départ, le vénéré Fondateur désigna les Pères Honorat, Telmon, Lagier Lucien et Baudrand, auxquels il joignit les Frères convers Basile Fastray et Louis Roux.
Les Pères Honorat et Telmon sont déjà connus de nos lecteurs.
Cadet du P. Jean Lagier, supérieur du grand séminaire de Fréjus, le P. Lagier Lucien allait être, pendant trente-deux ans, un des plus vaillants Missionnaires qui aient paru au Canada et aux Etats-Unis. Doué d'une voix retentissante qui ne faiblissait jamais, et d'une poitrine que ne lassaient ni le chant ni les prédications réitérées, il y donna plus de mille missions, ou retraites paroissiales. Chacun de ces travaux durant, en moyenne, une quinzaine de jours, un calcul très simple prouve que, pendant cette longue carrière, cet infatigable apôtre demeura presque constamment sur la brèche. Poussant son zèle jusqu'à l'héroïsme, il monta en chaire, le matin même de sa mort, malgré les protestations du médecin, et n'en descendit que pour exhaler le dernier soupir, quelques heures après. Ce trait suffit à révéler la trempe vigoureuse de son caractère.
Agé d'une trentaine d'années, le P. Baudrand appartenait à la famille du célèbre auteur homonyme dont les ouvrages ascétiques, plusieurs fois réimprimés, sanctifièrent tant de personnes. Envoyé au Canada, il se montra digne d'une si honorable parenté.
La veille du départ, 28 septembre, dans l'église du Calvaire, devant une affluence énorme de fidèles, eut lien, le soir, la cérémonie émotionnante du baisement des pieds, d'autant plus saisissante qu'elle s'accomplissait, à Marseille, pour la première fois.
On récita publiquement les prières de l'Itinéraire. Puis, après la bénédiction du Très Saint Sacrement, les Missionnaires, le bâton du voyageur à la main et le bréviaire sous le bras, gravirent les marches de l'autel.
Tandis que le chœur chantait les paroles du Prophète: Quam speciosi pedes evangelizantium pacem, evangclizantium bona. Qu'ils sont beaux les pieds des messagers de la paix éternelle. Mgr de Mazenod vint, le premier, baiser avec respect et amour les pieds de ces apôtres, ses enfants, partant pour les régions lointaines. Les membres du clergé et une foule de laïques, même des plus hauts rangs de la société, le firent à sa suite. Cette cérémonie touchante laissa une impression ineffaçable de foi et de piété dans l'esprit et le cœur des nombreux assistants. Des larmes d'attendrissement coulaient de tous les yeux.
A une époque, où les chemins de fer, encore bien rares, n'existaient que par tronçons, il fallait plusieurs semaines pour traverser la France. Les voyageurs ne purent s'embarquer au Havre que le 22 octobre.
En cette saison avancée, les tempêtes sont fréquentes. La navigation, fort pénible, dura trente-quatre jours…
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 3Sur les eaux et sur la glace.SUITE
En cette saison avancée, les tempêtes sont fréquentes. La navigation, fort pénible, dura trente-quatre jours.
Deux fois, ils furent sur le point de faire naufrage : puis, pour couronner dignement de si encourageants débuts, une distraction du pilote faillit finalement leur coûter la vie. Peu s'en fallut qu'ils n'échouassent au port. Ayant frôlé de trop près les récifs de Sandy Hook, à l'entrée de la vaste baie de New-York, le paquebot risqua de s'y briser. C'était pendant la nuit. Aux cris d'épouvante de l'équipage, tous les passagers se précipitèrent hors de leurs cabines, et s'élancèrent sur le pont. Heureusement, on en fut quitte pour la peur. Mais le danger avait été grand.
La route la plus naturelle de New-York à Montréal, était, alors, par l'Hudson, fleuve majestueux, trois ou quatre fois plus large que le Rhin, et accessible aux gros navires, pendant près de deux cent cin¬quante kilomètres, jusqu'à Troy, cité manufacturière et florissante, où le flux et le reflux sont encore sensibles. De là, un canal de cent douze kilomètres va jusqu'à Whitchall, port sur l'extension méridionale du lac Champlain. Cette nappe d'eau de cent quatre-vingts kilomètres de long, sur une vingtaine de large, se déverse par le Richelieu dans le Saint-Laurent. Au total, c'était une course de six cents kilomètres, vers le nord, presque en ligne droite, toujours par la voie fluviale, jusqu'à la petite ville de Saint-Jean, peu distante de Montréal.
Mais on se trouvait dans la dernière semaine de novembre. Déjà le froid était très intense. Les glaçons qui se formaient sans cesse et grandissaient continuellement, gênaient de plus en plus la navigation. Se soudant les uns aux autres, ils constituaient, çà et là. des barrières infranchissables, ou des écueils qu'il fallait absolument éviter. Rivières et canaux étaient presque entièrement couverts d'une couche solide. Elle était si épaisse, au lac Champlain, qu'on s'arrêtait, à chaque instant, pour la rompre de vive force. Le bateau n'avança ainsi qu'avec une extrême difficulté.
Dans ces conditions, le trajet entre New-York et Montréal, qui maintenant ne demande qu'une douzaine d'heures, se prolongea d'une façon anormale.
Nullement accoutumés à cet hiver semi-polaire de mi-novembre à mi-avril, les voyageurs, vêtus à peu près comme en France, souffrirent beaucoup de ce froid pénétrant. Qu'il était loin, le beau ciel de Provence !... Le Dauphiné lui-même, malgré le voisinage des Alpes, leur semblait un Éden, en comparaison de cette Sibérie.
A Saint-Jean, ils ne trouvèrent qu'une mauvaise charrette ; mais bientôt elle se brisa sur un accident de terrain, au milieu des neiges amoncelées. Ils furent donc obligés d'achever l'étape à pied, par des chemins affreux.
Depuis leur départ de Marseille, deux mois s'étaient écoulés, quand, dans l'après-midi du 2 décembre 1841, ils entrèrent, enfin, à Montréal.
Ils étaient les premiers religieux à venir au…
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE I§ 3Sur les eaux et sur la glace.SUITE
Ils étaient les premiers religieux à venir au secours du Canada passé sous la domination anglaise. Le dernier Jésuite mourut en 1800, et le dernier Récollet, en 1813. Seuls les Sulpiciens se maintinrent, se recrutant sur place.
Aussi l'apparition des Oblats de Marie Immaculée fut-elle, pour les habitants de cette région autrefois française, un véritable événement.
Mgr Bourget leur ouvrit affectueusement ses bras, et les serra paternellement sur sa poitrine, comme des enfants bien-aimés, longtemps attendus.
Dès le lendemain, la presse canadienne, en termes très sympathiques, lançait la nouvelle à tous les échos :
— Les Révérends Pères Oblats si ardemment désirés, disait-elle, sont, depuis hier, parmi nous. Ils donneront des missions dans les différentes paroisses et townships. Voués à cette œuvre, ils sont arrivés juste à temps pour célébrer avec l'église de Montréal la belle fête de saint François-Xavier, le modèle des Missionnaires. C'est une heureuse coïncidence : gage de plus que leur ministère au milieu de nous sera accompagné de fruits abondants (1).
Huit jours après, la même voix, empruntant un article de l'Ami de la Religion, édité en France, divulguait des détails bien propres à concilier aux Oblats l'estime et la vénération du public. Elle racontait comment tous les membres de l'Institut avaient brigué l'honneur d'être envoyés dans des contrées si lointaines de leur patrie.
— Le dévouement, ajoutait-elle, ne manquait pas à ceux qui sont restés. C'est avec une sainte envie, qu'ils se sont séparés de leurs confrères désignés pour affronter les mers. L'ambition des peines à endurer et des sacrifices à accomplir pour la cause de Jésus-Christ enflamme leurs âmes dévorées de zèle. Ils sont tous pénétrés du même esprit. L'Ami de la Religion se plaît d'autant plus à rendre ce témoignage aux Oblats de Marie, que sa position le met dans le cas de les connaître et de les admirer. Dans les nombreux diocèses où ils sont si apprécies par les populations, les vœux universels les suivent, au delà de l'Océan.
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(1) Mélanges religieux, 3 décembre 1841.
CHAPITRE II — SAINT-HILAIRE (1841-1842)...
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 1Le Calvaire de Rouville.
Se rappelant que les Oblats avaient à Marseille, la garde du Calvaire, Mgr Bourget voulut leur confier une œuvre analogue.
Exilé de Nancy depuis 1830. Mgr de Forbin-Janson donna, pendant plusieurs mois, dans les diocèses de Montréal et de Québec, une série de prédications. Au moment de rentrer en Europe, il les clôtura, le 6 octobre 1841, par la plantation solennelle d'une croix gigantesque qui, dominant le cours du Saint-Laurent et du Richelieu, serait, dans sa pensée, une sorte de monument national et un centre de pèlerinage attirant les multitudes.
Pour base, il choisit l'un des pics les plus élancés de la région. Situé à une trentaine de kilomètres à l'est de Montréal, il se dresse, comme une masse isolée, à plus de quatre cents mètres au-dessus de la plaine. De loin, cette montagne aux flancs abrupts paraît un énorme bloc de granit bleuâtre. On découvre, de sa cime, un immense panorama.
Semblable à une tour, la croix, bâtie sur le modèle de la colonne Vendôme de Paris, mesurait trente mètres de hauteur et deux mètres et demi de large. Le piédestal, à lui seul, formait une chapelle avec sacristie. Un escalier intérieur conduisait au sommet. Les bras au-dedans desquels on pouvait se promener comme dans une galerie, s'étendaient à cinq mètres de chaque côté. Complètement recouvert, au dehors, de plaques de métal blanchâtre, poli et luisant, l'emblème de notre Rédemption brillait à quatre-vingts kilomètres à la ronde.
— Ce sera, disait Mgr de Forbin-Janson, la plus grande et la plus belle croix du monde... le premier objet qui se présentera au regard de tous ceux qui viendront au Canada, par la frontière des États-Unis.
Les travaux entraînèrent des frais considérables, quoique l'emplacement fût concédé gratuitement par le seigneur du lieu, M. Hertel de Rouville, oncle d'un jeune ecclésiastique, l'abbé Taché, bientôt novice chez les Oblats, et, plus tard, évêque célèbre.
A cette altitude, cependant, sur une montagne escarpée, d'un accès difficile ordinairement, impossible même, pendant les hivers si longs et si rigoureux du Canada, comment cette croix serait-elle devenue un lieu de pèlerinage fréquenté par les foules ? Aussi, quelques années après, quand, malgré les puissantes chaînes qui l'assujettissaient, elle fut renversée par la tempête, on ne se soucia pas de la relever.
Au bas de la montagne de Rouville…
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 1Le Calvaire de Rouville.SUITE
Au bas de la montagne de Rouville. et sur la rive droite du Richelieu, est la petite paroisse de Saint-Hilaire. Mgr Bourget y établit les Oblats. Tout en gardant le Calvaire, ils rayonneraient, de là. jusqu'aux extrémités du diocèse.
En y arrivant, le 7 décembre, veille de l'Immaculée Conception, leur fête patronale, ils y trouvèrent un presbytère délabré et presque sans meubles, une église inachevée et dépourvue d'ornements pour le culte.
— Jusqu'à présent, écrivait le P. Lagier, le 11 février 1842. nous ne savions pas ce qu'est la pauvreté. A Saint-Hilaire, nous nous sommes aperçus que nous étions vraiment pauvres. Nous en avons béni la Providence. A notre avis, nous ne pouvions pas mieux commencer. Jamais nous ne fûmes plus contents.
Et, dans une autre lettre au P. Guigues, supérieur de Notre-Dame de l'Osier :
Jugez, mon Père, si nous avons besoin de patience. Mais nous progresserons rapidement dans la vie religieuse, si nous prenons tout en esprit de pénitence et avec résignation. Ne croyez donc pas que nous soyons malheureux. Dieu nous éprouve, mais je ne doute pas que ce que nous endurons pour son amour, ne se change en source de grâces. Qu'il soit remercié des maux qu'il nous envoie !
Une précieuse acquisition, dès la première heure, les dédommagea de cette pauvreté matérielle.
Quand, dans la soirée du 2 décembre, ils frappèrent à la porte de l'évêché de Montréal, un jeune abbé, prêtre depuis peu, et alors attaché comme secrétaire à la maison épiscopale, leur ouvrit. Très aimablement il les introduisit au salon, et, sans retard, alla avertir Mgr Bourget.
— Suivez-moi. lui dit l'évêque.
Après avoir embrassé les Missionnaires et leur avoir répété avec quelle joie il les accueillait, il ajouta ces paroles :
— Mes Révérends Pères, il vous faut des novices pour augmenter votre nombre, et accomplir sur la terre canadienne tout le bien que j'attends de vous. Je veux, moi-même, vous en présenter un, et vous le donner immédiatement : c'est M. l'abbé Dandurand que voici. Peut-être n'y a-t-il jamais songé : mais Dieu y a pensé pour lui.
Vocation singulière et pourtant divine.
Dans la voix de son évêque, le jeune ecclésiastique reconnut celle du Souverain Maître. Dès le soir, il récitait le bréviaire avec les nouveaux venus, et les accompagna à Saint-Hilaire, où, le 7 décembre, il revêtait le saint habit. Il persévéra si bien, qu'il est devenu le doyen d'âge des Oblats du monde entier, et s'est dépensé avec une extraordinaire énergie, pendant une vie qui, émule de celle des patriarches, s'est prolongée plus de cent ans déjà.
A suivre : § 2. Premières missions paroissiales.
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 2Premières missions paroissiales.
A peine remis des fatigues du voyage, les Pères inaugurèrent, à Saint-Hilaire même, ce ministère des missions qui, continué sans interruption au Canada, y a produit les fruits les plus abondants.
La mission était un gros événement, équivalant à une série ininterrompue de fêtes chômées, car, pendant deux à trois semaines, les travaux des champs cessaient, tant la population s'empressait à venir entendre la parole de Dieu, désireuse de ne perdre aucune instruction, ni aucun détail des cérémonies.
Cette assiduité n'était pas sans mérite, vu les rigueurs de la saison, et les distances, parfois très longues à parcourir. Mais, ni les pluies torrentielles qui rendaient les chemins impraticables en les recouvrant d'une épaisse couche de boue, ni la violence du vent fouettant le visage, ni les tourmentes de neige des rudes hivers canadiens, ne diminuaient le nombre des assistants.
On s'entassait dans les églises. Quand elles ne pouvaient plus contenir la foule toujours croissante, les derniers arrivés, sans se décourager, se groupaient devant la porte; ou bien, perchés sur des amas de neige, hauts de plusieurs mètres, tâchaient de saisir par les fenêtres quelques lambeaux des discours.
L'un des vices que, sur le désir de Mgr Bourget, les Oblats combattirent avec le plus de vigueur et de persévérance, fut l'abus des liqueurs fortes, auquel sont plus enclins les habitants des pays froids, et qui engendre dans les familles des misères de tout genre.
Pour remédier à ce mal affreux, ils eurent à cœur de créer partout des Sociétés de tempérance absolue, dont les membres s'engageraient à s'abstenir complètement de boisson enivrante. C'était opposer une digne puissante à cette tyrannique passion qui cause de si épouvantables ravages. Apôtres infatigables de la tempérance, ils ne prêchaient aucune mission, ou retraite paroissiale, sans aborder cet important sujet.
Le succès fut considérable. Des milliers d'hommes, subjugués par leur éloquence et touchés par la grâce, rentrèrent en eux-mêmes, et prirent les plus fermes résolutions. En signe de leur enrôlement, ils recevaient une croix, qui, placée ensuite à l'endroit le plus apparent de la maison, leur rappelait la promesse faite devant les autels.
Un autre danger lamentable était celui que couraient les jeunes filles, dont la vertu était très exposée dans les fréquentations qu'elles se permettaient sans beaucoup de scrupule, d'autant plus que les usages du pays semblaient, jusqu'à un certain point, autoriser, ou excuser ces imprudences.
Afin de les préserver, les Oblats fondèrent partout des Congrégations de la Sainte Vierge. On critiqua, d'abord, cette innovation, proclamant qu'elle ne durerait pas. Elle dura, pourtant. Non seulement elle prémunit les jeunes personnes contre les pièges tendus à leur ignorance ou à leur faiblesse, mais elle les fortifia aussi dans la piété (1).
La première mission eut lieu à Saint-Hilaire: c'était justice. Elle s'ouvrit, le 12 décembre 1841. et fut immédiatement suivie par celle de Beloeil, charmante localité située en face, sur l'autre bord du Richelieu. Puis, ce fut le tour de Boucherville, paroisse importante, à douze-kilomètres en aval de Montréal, sur la rive droite du Saint-Laurent. Ensuite vinrent celles de Saint-Denis, Saint-Vincent, Sainte-Elisabeth. Saint-Rémi, Sainte-Anne de Varennes, Saint-Valentin, etc., etc.
Dans cette nomenclature, mentionnons spécialement Longueuil, cité en face de Montréal sur la rive droite du Saint-Laurent, où devait se former bientôt le second établissement des Oblats en Canada. Si près de la ville épiscopale, les gens familiarisés avec les meilleurs prédicateurs du diocèse, se montraient exigeants. La Mission aurait-elle parmi eux la même efficacité, d'autant plus qu'il ne manquait pas, là, de pécheurs invétérés, et, ce semble, inconvertissables ?
Saintement inspiré, le P. Honorât avait dit :
— Ils viendront tous, même ceux qui se promettent de résister jus¬qu'au bout.
Cette parole prophétique se réalisa littéralement.
A la clôture, tous les habitants en âge de le faire, s'agenouillèrent à la Table eucharistique, sauf de très rares exceptions ; et, au moment où les Pères se disposaient à partir, ces récalcitrants, vaincus à la dernière heure, les appelèrent au confessionnal.
Des sages qui croyaient bien connaître l'endroit…
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(1) Cf. Règlement de la Congrégation des Filles de Marie Immaculée, établie par les RR. PP. Oblats. avec l'approbation de Mgr l’Évêque de Montréal. in-l6, Montréal, 1841.
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 2Premières missions paroissiales.SUITE
Des sages qui croyaient bien connaître l'endroit, avaient certifié qu'il serait impossible d'amener les hommes de Longueuil à s'enrôler dans la Société de tempérance, surtout de la tempérance totale. Néanmoins, les Pères préparèrent à l'avance un nombre de feuilles d'enrôlement excédant de beaucoup celui qu'on osait espérer. Le jour fixé, elles se trouvèrent insuffisantes, et il fallut s'en procurer, à la hâte, deux fois plus.
Dans les autres paroisses, le succès fut identique. Partout la presque totalité de la population s'approchait de la Table sainte, et l'on comptait de deux à trois mille communions, parfois davantage. On eut même la joie d'enregistrer des abjurations de protestants.
Quand il le pouvait, Mgr Bourget se plaisait à présider la clôture de ces missions si profitables à ses ouailles. Afin que tout son clergé contribuât efficacement à ce travail de régénération, il lui adressa, par une Circulaire, cette communication officielle que nous sommes heureux de signaler ici, en nous rappelant les persécutions subies autrefois par les Missionnaires de Provence, de la part des tenants du vieux gallicanisme janséniste :
— Comme la doctrine de saint Alphonse de Liguori est de règle parmi les Oblats, et qu'il est très important qu'il y ait entre nous uniformité de conduite, je déclare que ce saint et savant théologien est le docteur de ce diocèse.
A Boucherville, résidait, alors, Mme Veuve Taché, née de la Broquerie, et dont la sœur aînée avait épousé M. Hertel de Rouville. C'était une femme exemplaire et de la plus haute piété. Son fils. Alexandre, élève au grand séminaire, témoin ému du bien accompli dans les âmes par le ministère des Oblats, résolut de se joindre à eux. Entré au noviciat, il devint un religieux éminent, puis l'apôtre héroïque des tribus sauvages du Nord-Ouest, et le premier archevêque de Saint-Boniface.
Des germes de vocation furent déposés aussi dans le collège de Saint-Hyacinthe, où le P. Telmon prêcha la retraite annuelle. Sa parole éloquente enflamma les cœurs. En partant, il laissa chez tous, maîtres et disciples, l'impression d'un homme doué de qualités vraiment supérieures.
De loin, Mgr de Mazenod suivait du regard ses enfants, et se réjouissait du résultat si consolant de leur apostolat. Mais il se demandait, avec anxiété, si ces ouvriers zélés supporteraient longtemps des labeurs aussi pénibles et aussi continus.
— Vous en êtes déjà à votre dixième mission, écrivait-il au P. Honorat...
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 2Premières missions paroissiales.SUITE
— Vous en êtes déjà à votre dixième mission, écrivait-il au P. Honorat... C'est trop !... Ménagez davantage vos forces, si vous voulez durer.
Après cet épanchement de sa tendresse paternelle, il leur prodiguait les conseils que sa vive foi lui suggérait :
— Dieu vous a bénis dans toutes vos œuvres. Soyez vigilants, je vous en conjure, pour ne mettre, de votre côté, aucun obstacle à la puissance miraculeuse dont il vous investit. Vous savez que nous n'avons jamais compté sur nos propres ressources, ni sur nos talents, moins encore sur nos vertus. Nous sommes les instruments de la miséricorde divine. Que rien ne trouble jamais en vous l'opération merveilleuse de l'Esprit-Saint.
Pendant la première année, plus de douze paroisses furent évangélisées, et, les années suivantes, le travail ne fut pas moins actif, de sorte que nous aurions à citer une centaine de noms, si nous voulions les énumérer toutes.
— Seriez-vous trente, affirmait Mgr Bourget, que. dans le seul diocèse de Montréal, vous auriez de quoi vous occuper constamment.
Les curés s'étaient promptement très attachés aux Pères :
— Du premier coup, leur disaient-ils, vous vous êtes faits Canadiens !...
Aussi les réclamaient-ils, de tous côtés. Pour répondre à chacun, il aurait fallu donner vingt missions à la fois. Et encore, cela n'eût point suffi.
— Du renfort ! du renfort ! Envoyez-nous du renfort, ne cessaient d'écrire les « Oblats Canadiens » au vénéré Fondateur.
A suivre: § 3 Les Townships. En voyage sur la neige.
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 3Les Townships. En voyage sur la neige.
Loin des paroisses régulièrement constituées, on trouvait de vastes étendues de terrain, où, par défaut de prêtres, on ne rencontrait pas même une étroite chapelle. Ces districts s'appelaient, alors, du nom générique de townships. quoique le sens spécial de ce mot désigne simplement une circonscription communale.
Par delà même la frontière, de pauvres Canadiens, forcés par la misère à quitter leur patrie, allaient chercher leurs moyens d'existence. Hélas ! rarement leurs espérances se réalisaient. A l'exception de quelques petits propriétaires que le temps, la patience et une stricte économie rendaient indépendants, les autres n'étaient que des travailleurs vivant au jour le jour, à la merci de maîtres qui les accablaient de besogne et les rétribuaient fort mal.
Au point de vue religieux, leur situation était plus déplorable encore. Isolés et privés, pendant des années entières, de tout secours spirituel, comment se seraient-ils maintenus ? La plupart de ces domaines, en effet, appartenaient à des protestants des États-Unis, ou à des Écossais presbytériens. Les catholiques, assimilés à des serfs, y couraient un pressant danger pour leur foi.
— Si vous faisiez dans les townships des missions comme ici, disait aux Pères un docteur en médecine que ses fonctions avaient parfois attiré en ces parages, vous remettriez dans le droit chemin les catholiques dévoyés, et vous convertiriez un bon nombre d'hérétiques.
Dès le mois de janvier 1842, les Oblats commencèrent cette œuvre de dévouement ; mais au prix de quelles fatigues et de quels périls !
— Nous avons besoin de prendre tous les moyens, écrivait, le 18 février, le P. Lagier, si nous ne voulons pas perdre et notre nez et nos oreilles. Il faudrait nous voir avec notre costume !...
Une lettre du P. Baudrand nous dépeint cet accoutrement étrange pour des yeux européens :
— Deux ou trois paires de bas de laine dans les souliers, ou dans les bottes ; une soutane bleu foncé, complétée par un surtout qui pèse au moins vingt livres; plus un second pardessus en peau de bête. Par cette méthode, sans être bien gros naturellement, on ressemble vite à un tonneau. Ce n'est pas fini. Autour du cou, un grand châle qui couvre toute la figure : menton, bouche, jusqu'au nez inclusivement. Sur la tête, un énorme casque en fourrure, garni d'oreillettes, de manière que, d'un honnête homme, il ne paraît plus que les yeux à peine. Aux mains, de grosses moufles en peau, énormes gants en cuir, qui ne séparent pas les doigts, excepté le pouce... J'allais oublier une chose essentielle : le capuchon, annexe au pardessus. On peut le ramener sur le casque, en cas de pluie ou de bise. Bref ! si vous voulez avoir chaud, venez ici. On se promène par des températures de vingt-cinq degrés Réaumur au-dessous de zéro.
Après la description de la toilette, celle de la contrée. Le même Père continue :…
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 3Les Townships. En voyage sur la neige.SUITE
Après la description de la toilette, celle de la contrée. Le même Père continue :
— Possédez-vous quelque image représentant des paysages d'une monotone blancheur, au milieu desquels de gentils Lapons glissent sur la neige, traînés par des rennes aussi rapides que le vent ? Regardez-les bien : c'est nous !... sauf les rennes, remplacés par de petits chevaux canadiens qui rivaliseraient presque de vitesse avec ces quadrupèdes des steppes polaires. Nos meilleurs jours pour voyager sont ceux des plus grands froids, quand on a ce qu'on appelle de beaux chemins d'hiver. Alors, un cheval canadien vous fait parcourir de quatre à cinq lieues à l'heure, et cela pendant une demi-journée, sans rien manger. Nos voitures sont toutes découvertes, et vous concevez que, dans ces conditions, ce n'est pas trop des habillements dont je vous ai parlé.
Néanmoins, ces chemins sont à peu près impraticables, durant une poudrerie, ou tempête qui soulève une neige extrêmement fine, et la lance de tous côtés, comme le simoun pousse en tourbillons aveuglants les sables du désert. Impossible de sortir : ou, si l'on se risque dehors, danger constant de s'égarer, car on ne distingue plus la route.
— Dans ce cas, nous dit le P. Baudrand, quoique de la figure ne paraissent plus que les yeux, il sera sage d'abattre la visière du casque, et de se masquer complètement.
Écoutons-le-nous raconter les péripéties du voyage :
— Bon ! nous voilà partis ! Nous volons à travers l'espace. Hum ! Modérez-vous !... Une rencontre !... Quand la route n'est pas plus large que la voiture, et qu'il y a sur l'un des bords, quatre ou cinq pieds de neige molle, c'est le pire des chemins d'hiver. Alors, vous pataugez là-dedans, chevaux et gens, heureux quand vous ne tournez pas sens dessus dessous !... Mais personne ne court à notre rencontre !... Tout va donc bien, cette fois ?... Attendez !... Voilà, au loin, devant nous, de lourds véhicules s'avançant d'une lieue en deux heures, quand nous en faisons, nous, six fois plus. En un clin d'œil, nous les atteignons. Maintenant, obligation de ralentir la marche, et de se tenir à leur queue, jusqu'à ce qu'il plaise au chemin de s'élargir. On aura le temps de méditer, pendant les trois heures qu'il faudra se traîner à la suite de ces pesants et si lents chariots... Les voilà distancés ! Bon ! nous pourrons courir maintenant ! Prenez garde ! Il y a une rivière, ou un lac, à traverser, et la glace est douteuse. Impossible de les passer en bateau ; très imprudent de s'y hasarder en voiture. Et, pourtant, il n'y a pas trente-six moyens ! Allons ! courage ! un signe de croix, et, fouette, cocher ! Cric, crac ! la glace gémit, et menace de se rompre. Hâtons-nous ! Il n'est pas bon de prendre un bain par ce temps-ci !... On a déjà bien assez frais, sans cela !... Je connais très intimement quelqu'un, qui, au mois de janvier, a vu ce sol trompeur se dérober sous ses pieds. Du coup, sa voiture s'est transformée en nacelle, mais enlisée et immobilisée !... Une vraie baignoire !... Il est resté, là, une demi-heure... il y serait encore, sans la charité d'un passant qui l'en a tiré. Voilà quelques-uns des multiples agréments du voyage, ("est charmant, n'est-ce pas ? Accourez promptement partager mon bonheur !
§ 4. Combats contre l'hérésie.…
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 4Combats contre l'hérésie.
Le premier à s'aventurer dans les townships fut le P. Lagier. Rendu à destination, il ne trouva pour logement qu'une misérable masure en bois, très étroite. Là, il célébra la Messe, prêcha et catéchisa, du matin au soir, mais en gelant sur place, malgré un poêle allumé, car une bise glaciale entrait, de tous côtés, par les nombreuses fentes de ces cloisons branlantes. Il en revint malade, le visage enflé et défiguré par une énorme fluxion.
Nullement découragé par un tel début, il y retourna, peu après, avec un compagnon. On jugera de ses dispositions par cet extrait d'une de ses lettres à un ecclésiastique de Montréal :
— Enfin ! nous sommes un peu Missionnaires ! Jusqu'ici, nous avions élevé la voix dans des paroisses érigées depuis longtemps, et où rien ne manque. Nous ne nous en plaignons point : nous n'en avons pas le droit, après les consolations éprouvées de la part des pasteurs et des fidèles. Mais on ne nous en voudra pas de ressentir quelque prédilection pour cet apostolat des pauvres, dénués également des biens de la fortune et des secours de la religion. Ce sont les prémices d'un ministère que nous chérissons. Notre désir est de consacrer notre vie à visiter, soutenir et fortifier dans la vertu ces âmes abandonnées.
Dieu récompensa les généreux Missionnaires.
Même les protestants venaient les entendre avec respect et profit. Notre sainte religion, mieux connue, leur révélait les lacunes et les imperfections de la leur. A la suite de ces conférences, plusieurs avouèrent que, dans le fond, ils pensaient comme eux.
Des familles entières rentrèrent dans le sein de l'Église. Un jour, une femme se présenta pour recevoir le baptême avec ses quatre enfants ; et ce ne fut pas un cas exceptionnel. Le chiffre des conversions augmenta, à mesure que s'améliorèrent les catholiques, dont la conduite, si peu conforme à leurs croyances, constituait une pierre d'achoppement, pour ceux qui, touchés par la grâce, auraient eu l'intention de retourner au vrai bercail de Jésus-Christ.
Parmi ces missions dans les townships, il en est une qui mérite une mention spéciale…
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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Re: Les OBLATS en Amérique.
Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 4Combats contre l'hérésie.SUITE
Parmi ces missions dans les townships, il en est une qui mérite une mention spéciale.
Sur les bords du lac Champlain, dans une localité, dont par discrétion nous tairons le nom, il y avait à évangéliser plus de mille personnes disséminées sur une vaste région appartenant à trois diocèses différents : ceux de Montréal, de New-York et de Boston. Outre les causes de perdition indiquées plus haut, l'esprit de lucre et l'avarice sordide d'un prêtre qui se disait leur curé, en avait fait passer un grand nombre à l'hérésie.
Ce triste sire, installé là, depuis quatorze ans, on ne sait en raison de quel droit ou de quelle délégation, non seulement ne prêchait pas, mais n'administrait qu'à prix d'argent les sacrements, même l'Eucharistie et l'absolution.
— Je ne me suis pas confessé depuis une dizaine d'années, disait un de ses malheureux paroissiens, parce que je n'avais pas de quoi payer.
Quand les Pères Telmon et Dandurand y arrivèrent, l'église (et quelle église !) était fermée depuis trois mois. Exaspérés par l'indigne conduite de leur coupable pasteur, les fidèles lui en avaient interdit l'entrée. Celui-ci, pour se venger, emporta chez lui le Saint Sacrement, l'enferma dans une boîte en carton, et le laissa dans sa chambre à coucher sur sa table de toilette, à côté de son pinceau à barbe !... Détails invraisemblables, s'ils n'étaient affirmés par les témoins les plus irrécusables.
L'église n'était qu'un affreux hangar de dix mètres de long sur huit de large, aux murs formés de poutres grossièrement équarries, juxtaposées, et revêtues d'une simple couche de chaux. Ameublement en rapport avec la somptuosité de l'édifice : l'unique chasuble, en lambeaux ; une seule aube, déchirée. Point de ciboire ; point d'ostensoir ; un minuscule calice en étain, noirci par le temps, et d'une malpropreté inimaginable.
Si la demeure du Maître du monde était à ce point misérable, celle du curé, au contraire, était fort commode, spacieuse, bâtie en belles briques, avec tout le confort désirable.
— C'est indispensable, disait le personnage, pour me concilier, de la part de la population, le respect dû à mon caractère.
Comme on le voit, il y avait parfaitement réussi.
Évidemment ce ne fut pas à sa demande…
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Évidemment ce ne fut pas à sa demande que les Missionnaires entreprirent de travailler dans ce qu'il prétendait être son domaine ; mais à la prière des trois évêques de New-York, de Montréal et de Boston, qui, sachant combien il y aurait de mariages à régulariser et d'abjurations à recevoir, leur avaient accordé, dans ce but, des facultés sans limites.
Ne pouvant donc les éconduire, le curé les subit de fort mauvaise grâce. Il les fit coucher dans des chambres crépies l'avant-veille. Elles étaient si humides, que le P. Telmon y contracta un enrouement opiniâtre et un rhumatisme articulaire des plus douloureux, qui le contraignit à chercher, ailleurs, un abri moins malsain.
— Nous avons eu, là, écrivait-il. la souffrance et la pauvreté, comme nulle part, ailleurs; mais aussi les consolations furent incomparables. Dieu nous dédommagea amplement par l'abondance de ses grâces.
De vingt à vingt-cinq lieues à la ronde, les gens accoururent. Leur empressement se maintint avec une assiduité poussée jusqu'à l'héroïsme. Plusieurs avaient les pieds ensanglantés et les jambes couvertes de pustules, à la suite de ces marches forcées. D'autres traversaient le lac au milieu de la tempête, dans de frêles embarcations.
Les protestants qui les occupaient, se moquèrent d'eux, d'abord. Ensuite, ils les menacèrent de leur ôter leur emploi.
— Peu importe, répondirent ces pauvres ouvriers. Avant tout, notre âme !
On demandait au propriétaire d'une grande scierie son avis sur la mission.
— Je ne voudrais pas qu'il y en eût souvent, répliqua-t-il ; impossible de retenir mes hommes.
Apprenait-on, à dix lieues, que la mission se faisait, vite tout le monde s'ébranlait, et, le lendemain, on voyait de nouveaux auditeurs groupés sous la chaire.
Une jeune femme s'échappa, un matin, de la maison de son maître, et fit, à pied, plus de vingt kilomètres, portant son enfant dans ses bras. Elle resta, trois ou quatre jours, près du confessionnal, pour attendre son tour.
Dans le voisinage de l'église toutes les maisons, huttes et cabanes, se remplissaient, le soir, de ces pauvres gens, en quête d'un gîte. Ils s'étendaient, côte à côte, sur le plancher, ajoutant ainsi à une journée consacrée entièrement aux exercices de piété, une nuit de pénitence sur une couche si dure.
Au premier coup de l'Angélus, tous se dirigeaient vers l'église pour s'emparer des abords des confessionnaux, constamment encombrés. Plusieurs tombant presque d'inanition, à cause de leur abstinence prolongée, se refusaient, néanmoins, absolument à s'éloigner, dans la crainte de perdre leur place. On en vit s'évanouir, de faiblesse. D'autres, se cachant le visage avec la main, se contentaient de manger, à la hâte, un morceau de pain, apporté de chez eux.
Mais quelle avidité pour entendre les messagers du Seigneur !...
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Mais quelle avidité pour entendre les messagers du Seigneur !...
— Vos sermons, disaient-ils aux Pères, nous servent de nourriture. Nous préférons tout souffrir, plutôt que d'être privés d'une de vos phrases.
Sublimes dans leur ignorance, ils savaient instinctivement que, selon l'expression du Verbe incarné, l'homme ne vit pas seulement de pain, et qu'il lui faut aussi et surtout ces paroles vivifiantes procédant de la bouche même de Dieu, ou de ceux dont il se sert pour parler aux âmes qui ont faim et soif de Lui.
— Ah ! disaient-ils encore, en gémissant et en essuyant leurs larmes, si on nous avait mieux instruits des vérités de la religion, nous n'aurions pas été si méchants.
Des adultes de douze à vingt ans qui n'avaient pas même été ondoyés, reçurent le sacrement du Baptême. Plus de soixante apostats rentrèrent dans le sein de la véritable Église. Beaucoup d'autres ne s'étaient pas confessés depuis dix, vingt, trente et même cinquante ans.
Il y eut de quatorze à quinze cents communions, et cinq cents hommes s'enrôlèrent dans la Société de tempérance.
A tous on distribua, par centaines, des chapelets, médailles, croix, gravures, catéchismes, manuels de prières, etc.
Les fidèles renoncèrent aux bibles protestantes, dont les colporteurs d'hérésie les avaient fournis avec prodigalité. On les entassa, et on les brûla publiquement.
Quand le chef de la propagande sectaire eut connaissance de cet auto-da-fé…
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Quand le chef de la propagande sectaire eut connaissance de cet auto-da-fé, il entra dans une furieuse colère, et accabla d'injures le P. Telmon, qu'il accusait d'être la cause de cette destruction.
— Sachez, lui dit-il, que nous ne sommes ni en Espagne, ni en Italie ; mais dans un pays de liberté !
— Justement, répondit le Père; voilà pourquoi les catholiques font ce qu'ils veulent : ils rejettent les livres où l'erreur se mêle à la vérité. Convaincus que ces bibles frelatées sont un danger pour eux et pour leurs proches, ils s'en débarrassent, même par le feu.
— Mais ces bibles sont à moi.
— Non, puisque vous les leur avez données. — Je ne les donne pas, pour qu'on les brûle.
— Ne les donnez pas. et on ne les brûlera point.
— Je vous ferai arrêter, si vous ne m'en payez pas le prix.
— C'est cela ! faites-moi mettre en prison, au nom de la liberté ; car que vous dois-je, moi, personnellement ! En quoi suis-je votre débiteur ?
— Vous refusez ?... Je me vengerai. J'obtiendrai que la douane vous impose une forte taxe pour toutes ces croix, médailles et autres signes de superstition, dont vous inondez le pays.
— Essayez ! Comme je n'ai plus aucun de ces objets dans mes caisses, il vous sera difficile de réussir. D'ailleurs, je sais à quoi m'en tenir sur ce point. Vos menaces sont vaines.
— Du moins, nous ferons du tapage, quand l'évêque viendra ici...
— Toujours au nom de la liberté, n'est-ce pas ? Je vois que vous l'entendez parfaitement.
La semaine suivante, Mgr Bourget vint clôturer cette mission mouvementée, et conféra le sacrement de Confirmation à cinq cent trente personnes de tout âge. Le saint prélat, très ému, bénissait Dieu des prodiges accomplis par sa grâce et par le ministère de ses Missionnaires si zélés.
Trois cents catholiques, à cheval, étaient allés l'attendre à la tête du lac. Ils le saluèrent avec des hourras enthousiastes et les marques répétées de la plus religieuse vénération. Cette petite armée l'escorta pendant plus de dix kilomètres, jusqu'à l'église, devant laquelle la population entière était agenouillée, implorant sa bénédiction.
Témoins de cette scène touchante…
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Témoins de cette scène touchante, les protestants étonnés restaient silencieux et immobiles.
— Dans leur stupéfaction, disait un Canadien, ils ouvraient des yeux... comme l'embouchure du Saint-Laurent.
Même les colporteurs de bibles se tenaient cois, se gardant bien de faire le vacarme annoncé. La haine, cependant, grondait dans leur cœur, car ils sentaient le dommage causé par la mission à leur trafic honteux. Ces prétendus réformateurs du christianisme, richement rétribués par ceux qui les envoyaient, gagnaient, en outre, deux cents francs par apostat qu'ils arrachaient au catholicisme. Suivant toute apparence, de longtemps ils n'auraient plus pareille aubaine. Aussi ne pouvaient-ils s'en consoler.
Deux mois après, un de ces pieux agents rencontra un converti.
— Eh bien ! lui dit-il, en ricanant, vos moines en font de belles ! Ils jettent les bibles au feu ! Quel sacrilège !
— Oh ! répondit le Canadien, s'ils ne faisaient que cela !... Mais ils font bien pire.
— Quoi donc ?
— Voici ! Jugez vous-même, si c'est tolérable. Quand un homme a deux femmes, ils le forcent à en quitter une... C'est d'une intransigeance !...
Le colporteur se mordit les lèvres, tandis que la rougeur lui montait au visage. II était précisément dans ce cas.
Sans ajouter un mot, il se hâta de déguerpir.
La mission eut un autre épilogue…
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE IISAINT-HILAIRE (1841-1842)§ 4Combats contre l'hérésie.SUITE
La mission eut un autre épilogue.
En sa qualité de vicaire général de l'évêque de New-York, Mgr Bourget signifia à l'indigne curé qu'il eût à céder immédiatement la place à un prêtre qui travaillerait sérieusement au salut de ses ouailles.
Les Pères ne laissèrent cette localité régénérée, que pour continuer leur labeur si pénible, mais si fructueux, dans les îles du lac Champlain, et sur la rive opposée, dans l'Etat de Vermont, diocèse de Boston. Là, également, absence totale de secours spirituels. Les mêmes merveilles de la grâce accompagnèrent leurs pas.
Ces expéditions, renouvelées de temps en temps, changèrent l'aspect de ces contrées désolées.
Si, dans ces townships, alors si tristes, fleurissent aujourd'hui de prospères paroisses, c'est au dévouement des Oblats qu'on le doit, pour une large part.
A suivre : CHAPITRE III. — LONGUEIL (1842-1844).
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Au Canada (1841-1861)CHAPITRE III.
LONGUEIL (1842-1844).§ 1Le Père Léonard.
Soldat devenu apôtre : tel était le P. Léonard.
Du soldat, il avait les audaces, l'aimable entrain et la résistance à la fatigue ; de l'apôtre, le zèle inlassable et l'industrieuse charité.
Taillé pour l'action, il étouffait dans d'étroites limites : les grands espaces l'attiraient invinciblement. Sa voix puissante remuait les foules, et retentissait éclatante dans les plus vastes enceintes.
Depuis treize ans. il habitait le Canada, quand les Oblats y arrivèrent; mais il était Français, originaire du diocèse de Langres.
Incorporé, dès l'âge de dix-neuf ans, dans un régiment de lanciers, au moment où Napoléon Ier retournait de l'île d'Elbe, il ne reçut pas, cependant, le baptême du feu, les bataillons, auxquels il appartenait, n'ayant pas été appelés à franchir la frontière, durant les Cent-Jours. La chute de l'empereur le libéra ; mais, très attaché à son chef d'escadron, il le suivit à Monistrol. en Velay, dans le département de la Haute-Loire. C'est là que Dieu l'attendait, après l'avoir arraché à la vie des camps si dangereuse pour la vertu. Une mission à laquelle il assista, détermina sa conversion complète et sa résolution inébranlable de renoncer au monde.
Aussitôt, il se mit à l'étude du latin, et, par de persévérants efforts, progressa suffisamment pour être jugé apte à l'enseignement dans un séminaire. Sentant, néanmoins, le besoin d'une vie plus active, il s'adjoignit, en 1826 et 1827, à plusieurs prêtres qui évangélisaient les paroisses du centre de la France. Cette petite société, ainsi que d'autres semblables, fut dissoute, à cause des persécutions suscitées aux Missionnaires, pendant les dernières années de la Restauration.
Ne connaissant pas encore la Congrégation des Oblats. à laquelle la Providence le destinait à son insu, il s'embarqua, en 1828, pour le Canada, afin de s'agréger à la Compagnie de Saint-Sulpice, qui desservait quelques postes sauvages. Il brûlait d'y être envoyé.
A quarante kilomètres environ à l'ouest de Montréal, se dresse-le village appelé Mission du Lac des deux Montagnes, sur la rive septentrionale de ce lac pittoresque, formé par un évasement de la rivière Ottawa, au pied de deux pics assez élevés.
L'ancienne peuplade, autrefois si farouche, des Iroquois, avait, là, quelques-uns de ses représentants, convertis au christianisme. On y trouvait aussi des Algonquins. Ceux-ci, malgré leur misère, leur malpropreté, leur paresse et autres bonnes qualités de ce genre, étaient si orgueilleux, qu'ils ne se nommaient qu'Anichinabek, c'est-à-dire « les hommes par excellence ».
Dans la même chapelle, ces débris de tribus si différentes se réunissaient, priant et chantant alternativement en leur langue respective. Deux Sulpiciens veillaient sur leurs âmes, et même sur leurs intérêts temporels, car les sauvages, jusqu'à la. vieillesse, demeurent la plupart de grands enfants incapables de prévoyance et dépourvus de sens pratique.
Ce n'était pas précisément ce qu'avait rêvé le P. Léonard. Peu nombreuses, ses ouailles lui occasionnaient peu de travail. Son ardeur réclamait de plus vastes espaces. Il accepta, cependant, sans se plaindre, cette position qu'il garda six années, se familiarisant de plus en plus avec le dialecte des Iroquois, tandis que son confrère, M. Flavien Durocher, qui entra, lui aussi, chez les Oblats, s'occupait des Algonquins.
Entre temps, et pour satisfaire sa soif d'apostolat, il prêchait dans les localités voisines.
S'apercevant qu'une vie des plus actives lui était nécessaire, ses supérieurs, en 1834, le…
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