Vie de Mlle Mance et Hôtel-Dieu de Villemarie (Table) COMPLET
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IX. Zèle courageux de Jouaneaux.
— Il repasse en France. — Sa mort.
Quelques jours après, sans être effrayé par le péril qu'il courait à Saint-Joseph, ni découragé par la perte de ses travailleurs, Jouaneaux pria les hospitalières de lui en donner d'autres pour qu'il pût se remettre à l'ouvrage. Elles hésitèrent d'abord, tant à cause de la dépense, ayant déjà payé pour un temps considérable à trois de ceux qui étaient morts ou faits prisonniers, des gages qui se trouvaient ainsi perdus pour elles, qu'à cause du danger que ces hommes auraient à courir dans un lieu si exposé et éloigné de tout secours.
Cependant, après avoir pris conseil de personnes sages, elles se déterminèrent à donner sans délai à Jouaneaux quatre nouveaux travailleurs, en leur recommandant de se mieux tenir sur leurs gardes que n'avaient fait les autres. Les aumônes que leur envoyaient M. Macé, M. de Fancamp et leurs autres amis de France, servirent à l'entretien de ces hommes, et à mettre en valeur cette terre, qui devint la ressource de ces filles par le zèle courageux, infatigable et intelligent de Jouaneaux.
Ce bon serviteur ne cessa d'y travailler que lorsque l'âge eut épuisé toutes ses forces. Alors, se voyant incapable de rendre aucun service à l'Hôtel-Dieu, et la grande délicatesse de ses sentiments lui faisant croire qu'il ne devait pas être plus longtemps à la charge de cette maison, il résolut de repasser en France pour recueillir quelques biens de patrimoine qui lui restaient, et se suffire ainsi à lui-même.
Ces filles firent tout ce qu'elles purent pour le retenir ; mais, malgré leurs représentations et leurs vives instances, il s'embarqua pour la France, et après avoir réglé ses petites affaires temporelles, il se retira chez les filles de Saint-Joseph à la Flèche, où il finit ses jours très-chrétiennement (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : X. Arrivée des troupes…
Dernière édition par Louis le Mer 14 Nov 2012, 8:07 pm, édité 1 fois (Raison : orthographe)
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X. Arrivée des troupes. — Maladie épidémique dans les forts
Enfin, pour réprimer l'insolence des Iroquois, Louis XIV envoya des troupes réglées, qui arrivèrent cette même année en Canada, dans le dessein d'aller porter la guerre dans le pays même de ces barbares. En vue de procurer le repos à la colonie, ces troupes construisirent d'abord plusieurs forts sur la rivière de Richelieu, par où les Iroquois avaient coutume de descendre pour nous attaquer. Un prêtre du séminaire, M. Dollier de Casson, fut envoyé quelque temps après au fort Sainte-Anne, éloigné de Villemarie de vingt-cinq lieues. La garnison de ce fort, composée de soixante soldats, en proie à une furieuse épidémie, qui bientôt en atteignit quarante, était d'ailleurs exposée à y périr de misère et de faim. Cette extrémité détermina M. Dollier de Casson à se dévouer pour aller les assister spirituellement, malgré le grand péril qu'il eut à courir pour sa vie dans ce voyage, et les fatigues excessives qu'il lui fallut endurer au milieu des neiges.
M. Souart et Mlle Mance, qui craignaient qu'il ne mourût lui-même de faim, lui envoyèrent plusieurs traîneaux chargés de vivres, comme pourpier, salé, ognons, poules, chapons, ainsi qu'une grande quantité de pruneaux de Tours. Il réserva toutes ces provisions pour les malades, et par ce moyen sauva la vie à quantité de soldats. Ces rafraîchissements les faisant vivre plus longtemps, lui donnaient la facilité de les faire envoyer à l'Hôtel-Dieu de Villemarie, ce qui était l'unique moyen de les sauver, car l'infection qu'ils répandaient avait tellement corrompu l'air au fort Sainte-Anne, que de tous ceux qui ne purent faire ce voyage il n'en échappa pas un seul ; il en administra onze, qui moururent très-chrétiennement.
Chaque voyage à Villemarie lui apportant de nouvelles provisions, il fit transporter successivement tous les autres malades à
l'Hôtel-Dieu. Cette maladie, qu'on appelait le mal de terre, durait deux et trois mois entiers et tenait les malades jusqu'à huit jours à l'agonie. Ceux qui en étaient atteints répandaient une si infecte puanteur, que, quoiqu'ils fussent bien renfermés dans leurs cabanes, cette odeur fétide s'étendait jusqu'au milieu du fort: en sorte que personne, sinon M. Dollier de Casson et le chirurgien, n'osait les approcher (1).
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(1) Histoire du Montréal, par M. Dollier de Casson, de 1666 à 1667.
A suivre : XI. Dévouement des hospitalières pour le service des soldats malades et blessés.
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XI. Dévouement des hospitalières pour le service des soldats malades et blessés.
Les filles de Saint-Joseph firent paraître avec éclat l'héroïsme de leur charité et la constance de leur zèle à l'égard de ces pauvres malades, des soldats de plusieurs autres garnisons, et de quantité de blessés, dont leurs salles se trouvèrent bientôt remplies.
M. Dollier de Casson, témoin de leur dévouement, leur rend ce beau témoignage :
« Je dois dire que l'Hôtel-Dieu de Montréal s'est signalé par les soins qu'il a donnés à tous ces malades du fort Sainte-Anne ; il leur a rendu trop de services dans cette extrémité, et il en mérite trop de louanges pour n'en pas parler ici. Il a reçu aussi et traité avec le même dévouement une grande quantité de malades et de blessés des forts Saint-Louis et Saint-Jean, ainsi que d'autres de la petite armée de M. de Courcelles, qui, à leur retour de la guerre, trouvèrent heureusement ce lieu pour y être guéris (1).
Les services que les filles de Saint-Joseph rendirent dans cette occasion aux troupes du roi les mirent on grande considération auprès de M. de Courcelles, gouverneur général et de M. Talon, intendant, envoyés l'un et l'autre avec pouvoir absolu de réformer alors les abus qui pouvaient s'être glissés dans le régime de la colonie. Ce fut alors que M. de Queylus revint à Villemarie, et qu'il reprit la conduite du séminaire, comme il a été dit dans la Vie de la sœur Bourgeoys (2). M. Souart l'avait remplacé dans sa longue absence, et demeura toujours confesseur et supérieur des filles de Saint-Joseph.
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(1) Histoire du Montréal, ibid.
(2) Vie de la sœur Bourgeoys, t. I, p. 174 et suiv.
A suivre : XII. M. Talon autorise une assemblée générale, afin d’obtenir du roi des lettres patentes en faveur des hospitalières.
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XII. M. Talon autorise une assemblée générale, afin d’obtenir
du roi des lettres patentes en faveur des hospitalières.
M. Talon, qui s'informa en détail de tous les besoins de la colonie de Villemarie et de ceux des familles en particulier, les visitant chacune et allant de maison en maison, jugea qu'il serait très-utile d'affermir par l'autorité du monarque l'établissement jusque alors chancelant des hospitalières.
En conséquence, le 15 septembre 1667, il donna pouvoir par écrit aux citoyens de Villemarie de s'assembler pour solliciter du roi des lettres patentes en faveur de ces filles. Ils se réunirent en effet, au mois d'octobre suivant, dans la salle du séminaire, et il n'y eut qu'une voix sur un projet si avantageux et si nécessaire au pays (1).
Ce fut le témoignage que rendirent en particulier M. Louis Artus de Sailly, juge de Villemarie (2), et M. Pérot, prêtre du séminaire et curé du lieu, par leurs déclarations datées du 10 de ce mois (3).
Enfin, M. de Laval joignit à ces déclarations la sienne propre. Les filles de Saint-Joseph ayant d'ailleurs été érigées récemment en ordre religieux, comme nous le raconterons au chapitre suivant, ce prélat ne pouvait plus alléguer contre leur établissement à Villemarie l'absence des vœux solennels, qui jusque-là semblait l'avoir tenu eu suspens. M. Souart, qui fit cette même année un voyage en France, M. Macé, et les autres amis des filles de Saint-Joseph, présentèrent toutes ces pièces à M. Colbert ; et ce ministre, qui portait à la colonie de Villemarie l'intérêt le plus sincère, obtint du roi des lettres patentes, qui furent expédiées à Paris au mois d'août de l'année 1669.
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(1) Archives des hospitalières de Villemarie, assemblée des habitants, 1667.
(2) Ibid., déclaration du 10 octobre 1667.
(3) Ibid., déclaration de M. Pérot.
A suivre : XIII. 1669. Lettres patentes du roi en faveur de la communauté des hospitalières.
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XIII. 1669. Lettres patentes du roi
en faveur de la communauté des hospitalières.
« Nos chères et bien-aimées, dit le roi, les religieuses hospitalières de Saint-Joseph de l'île de Montréal en la Nouvelle-France, nous ont fait exposer que dès l'année 1659 elles ont été admises et installées dans l'hôpital, qui avait été établi en ladite île quelques années auparavant. Elles y ont depuis exercé tous les devoirs d'hospitalité, dans un esprit si désintéressé, et avec tant d'économie, de piété et de charité, que l'évêque, les gouverneur, magistrats et habitants de l'île nous ont suffisamment fait connaître la satisfaction qu'ils en ont et les grands avantages que le pays en retire.
« Et comme il est juste de rendre ferme, stable et solide pour toujours un établissement si utile, afin d'encourager ces religieuses à continuer leurs bons offices avec la même ardeur, nous avons estimé que nous ne pouvions le faire plus efficacement qu'en confirmant leur établissement, pour qu'à l'avenir elles y puissent vivre en corps de communauté. A quoi nous sommes d'autant plus excité, que les seigneurs de l'Ile ont augmenté l'emplacement de ces religieuses d'une dotation du cens et rentes, auprès des lieux dont elles ont déjà fait défricher une partie très-considérable ; au moyen de quoi et de leurs autres biens et revenus elles pourront facilement subsister et s'entretenir à l'avenir (1). »
En conséquence, le roi confirme leur établissement et leur contrat de dotation et fondation pour elles et celles qui leur succéderont à perpétuité. Il leur permet d'acquérir et de bâtir pour elles-mêmes et pour les pauvres, et amortit tous leurs biens, à charge pourtant de payer les indemnités et autres droits dont ils pourraient être grevés envers les seigneurs de l'île.
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(1) Édits, ordonnances royaux, etc. Québec, 1803. p.55.— Archives des hospitalières de Villemarie . — Archives de la marine, avril 1669.— Registre des ordres du roi, 1669, fol. 117.
A suivre: TROISIÈME PARTIE.
DEPUIS L'ERECTION DE LA CONGRÉGATION DE SAINT-JOSEPH EN RELIGION JUSQU'AU PREMIER INCENDIE ET A LA RECONSTRUCTION DE L'HÔTEL-DIEU DE VILLEMARIE.
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TROISIÈME PARTIE
DEPUIS L’ERECTION
DE LA CONGREGATION DE SAINT-JOSEPH EN RELIGION
JUSQU'AU PREMIER INCENDIE
ET LA RECONSTRUCTION DE L’HOTEL-DIEU
DE VILLEMARIE.
CHAPITRE PREMIER
L’INSTITUT DE SAINT-JOSEPH EN RELIGION
— LES SŒURS DU RONCERAY, LE JUMEAU ET BANBONNEAU, ENVOYEES A VILLEMARIE
POUR INTRODUIRE LES VŒUX SOLENNELS DANS LA COMMUNAUTE DE L’HOTEL-DIEU.
I. L'institut de Saint-Joseph est enfin érigé en ordre religieux.
En établissant l'institut des sœurs de Saint-Joseph, M. de La Dauversière s'était proposé de former une congrégation où l'on se consacrât par les vœux solennels de la religion an service de DIEU et au soulagement des malades. Aussi n'envoya-t-il à Villemarie que des hospitalières qu'il savait être résolues à embrasser ces vœux dès que le moment en serait venu (1).
A leur arrivée en Canada, elles sentirent plus vivement que jamais le besoin de cette sorte d’engagements, que M. de Laval mettait comme une condition nécessaire à l'approbation canonique qu'elles demandaient. C'est pourquoi elles s'empressèrent d'écrire à leurs sœurs de France, et les conjurèrent de prendre les moyens les plus prompts et les plus efficaces pour introduire les vœux solennels dans leur institut. Mais l'opposition qu'un grand nombre d'entre elles montraient à prendre ce parti, par suite de la direction qu'elles avaient reçue de quelques-uns de leurs confesseurs, rendait ce changement extrêmement difficile ; et les choses persévérèrent encore dans le même état jusqu'à ce qu'enfin l'expérience fit sentir l'indispensable nécessité d'engagements solennels.
La maison de la Flèche, le berceau de l’institut, après s'être épuisée en se privant de ses meilleurs sujets pour fonder successivement diverses maisons dans le royaume, se vit menacée à la fin d'une ruine entière. Plusieurs des sœurs qui la composaient, n'ayant plus sous les yeux les grands exemples de vertu que leur avaient donnés les premières hospitalières se dégoûtaient aisément de leur vocation; et n'étant retenues que par des vœux simples, s'en faisaient dispenser pour rentrer dans le monde. Le nombre des sujets diminuait d'année en année, le service des pauvres ne se faisait plus avec la même exactitude; et tout le reste des observances se ressentait de ce relâchement.
Celles des filles de Saint-Joseph qui dans chaque maison étaient le plus attachées à leur état craignirent donc que l'institut ne tombât aussi promptement qu'on l'avait vu s'élever; et, convaincues que le principe du mal venait du défaut des vœux solennels que leur saint fondateur avait voulu introduire, elles en conférèrent entre elles, et s'adressèrent enfin à M. Henri Arnauld, évêque d'Angers. De son côté, ce prélat ne trouva pas de moyen plus efficace pour maintenir l'institut que des vœux qui liassent irrévocablement les sœurs au service de DIEU et au soulagement des pauvres (1).
En conséquence, on eut recours au souverain Pontife Alexandre VII, alors assis sur la chaire de saint Pierre, qui, par son bref du 8 janvier 1666, érigea enfin l'institut des filles de Saint-Joseph en religion (2).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
(1) Histoire de l’institution des hospitalières de Saint-Joseph in-4º, ch. 12, p. 54 ; archives de l’Hôtel-Dieu de la Flèche.
(2) Bref d’Alexandre VII ; archives des hospitalières de la Flèche.
A suivre : II. Les hospitalières de Villemarie, en vue d'embrasser les vœux solennels, demandent à leurs sœurs de France de leur envoyer des professes.
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II. Les hospitalières de Villemarie,
en vue d'embrasser les vœux solennels,
demandent à leurs sœurs de France de leur envoyer des professes.
Dès que la mère de Brésoles et ses compagnes eurent appris ce changement, qu'elles avaient si longtemps et si ardemment désiré, elles écrivirent à leurs sœurs de France pour les supplier de leur envoyer des religieuses professes qui les formassent aux exercices du noviciat, et leur procurassent le bonheur d'embrasser les vœux de religion. Elles renouvelèrent leurs instances vers le milieu de l'année 1668.
Toutefois, le succès ne répondit pas à leur attente : il ne se trouva aucune sœur qui eût attrait pour le Canada, sinon la sœur Thérèse Havard, que des raisons particulières ne permirent pas de leur envoyer. Il est vrai que cette sœur, très-capable et très-vertueuse, avait un désir extrême d'aller s'y consacrer au service des malades, et que la sœur Macé, qui la connaissait depuis longtemps et lui était particulièrement affectionnée, désirait aussi beaucoup de l'attirer à Villemarie. Mais les difficultés qu'on avait eues jusque alors de la part de M. de Laval demandaient qu'on n'y envoyât que des filles d'un esprit doux, calme, patient, qui pussent porter en silence les croix qu'il plairait à DIEU de leur imposer ; et la sœur Havard était d'un caractère trop vif et trop ardent pour qu'on pût prudemment l'exposer à ces sortes d'épreuves.
Du moins ce fut le jugement que porta d'elle M. Macé, chargé en France des intérêts des hospitalières de Villemarie. Quelques instances qu'elle ne cessât de lui faire pendant cinq à six ans, il demeura toujours inflexible, et refusa constamment de consentir à son départ. Les sœurs de la maison de Laval, en particulier, alléguèrent le besoin qu'elles avaient de leurs sujets ajoutant que leurs professes n'étaient pas encore assez formées aux vertus et aux pratiques religieuses pour pouvoir en former d'autres.
Enfin, parmi toutes les filles de cette maison, il n'y eut qu'une sœur domestique, appelée Jeanne Chevalier, qui s'offrit pour le Canada. Les sœurs de Villemarie, à qui elle fit connaître ses désirs la demandèrent à sa communauté, et, par une résolution bien sainte, qui montre leur ardent désir d'embrasser les vœux solennels, déclarèrent qu'elles la prendraient pour leur supérieure, afin de participer par elle au bonheur de contracter ces nouveaux engagements. Elles en écrivirent aussi à M. Macé. Celui-ci, quoique touché d'une humilité si rare, s'opposa absolument à l'exécution de leur dessein ; et, de concert avec M. de Fancamp, se mit à rechercher dans les maisons de l'institut quelques religieuses professes qu'il pût leur envoyer (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : III. M Macé procure, par l'entremise de la reine, l'envoi de la sœur du Ronceray à Villemarie.
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III. M. Macé procure, par l'entremise de la reine,
l'envoi de la sœur du Ronceray à Villemarie.
Ils découvrirent bientôt que dans la maison même de Laval il y en avait une douée de toutes les qualités nécessaires, qui désirait ardemment d'aller sacrifier sa santé et sa vie au service des pauvres malades de cette colonie. C'était la sœur André du Ronceray. Après s'être assurés de ses dispositions, ils la demandèrent à sa communauté ; mais on la leur refusa absolument, pour ne pas priver la maison des services qu'elle pouvait recevoir d'un sujet de ce mérite. De plus, le père de cette religieuse, M. Antoine Duvernay, seigneur du Ronceray, médecin fort considéré à Laval, et l'un des échevins de la ville, n'eut pas plutôt appris le dessein de sa fille, que, se laissant aller à tous les emportements de l'amour paternel, il se mit à dire partout qu'il aimerait beaucoup mieux voir porter sa fille en terre que de consentir à son départ pour le Canada. Il ajoutait qu'il aurait assez de crédit et d'amis pour mettre cinq cents hommes sous les armes, s'il le fallait, afin de l'empêcher de sortir de la ville. Enfin il ne cessait de déplorer son prétendu malheur et de se lamenter comme s'il eût été le plus infortuné des pères.
Pendant que M. du Ronceray cherchait les moyens de mettre obstacle au dessein de sa fille, M. Macé et M. de Fancamp parvinrent, quoique avec beaucoup de peine, à faire consentir la communauté de Laval à son départ. Mais l'évêque du Mans, à qui ils s'adressèrent ensuite pour obtenir son obédience, la leur refusa de la manière la plus formelle, protestant même qu'il ne consentirait jamais à laisser partir pour le Canada aucune religieuse de son diocèse, et qu'il fallait avoir perdu le bon sens pour lui faire une pareille proposition.
Sans être rebutés par la sévérité de cette réponse, ils revinrent une multitude de fois à la charge, employant plusieurs personnes de considération pour adoucir l'esprit du prélat, et n'épargnant de leur côté ni les prières, ni les instances les plus pressantes : tout fut inutile. Comme ces négociations traînaient en longueur, et qu'il n'y avait pas d'apparence de gagner l'évêque du Mans par les moyens ordinaires, M. Macé en employa un d'une autre sorte, qui lui réussit : ce fut de faire intervenir l'autorité de la reine, Marie-Thérèse d'Autriche, femme de Louis XIV. Il obtint, par le moyen de Mme de Brisacier, dont le mari était le premier secrétaire de cette princesse, une lettre de petit cachet qui enjoignit au prélat de donner à la sœur du Ronceray l'obédience demandée pour Villemarie.
Cette lettre leva en effet tous les obstacles. L'évêque du Mans fit expédier sur-le-champ l'obédience ; et M. du Ronceray, qui jusque-là s'était regardé comme le plus malheureux des hommes, changea tout à coup de sentiment et ne mit plus de bornes à sa joie, quand il apprit que la reine avait daigné témoigner cette considération pour sa fille (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : IV. M. Macé associe les sœurs Le Jumeau et Babonneau à la sœur du Ronceray pour Villemarie.
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IV. M. Macé associe les sœurs Le Jumeau
et Babonneau à la sœur du Ronceray pour Villemarie
Avant que toutes ces difficultés fussent aplanies, M. Macé chercha deux autres filles de Saint-Joseph qu'il pût associer à la sœur du Ronceray, et il jeta les yeux sur les sœurs Renée Le Jumeau de Lanaudière, et Renée Babonneau, très-capables l'une et l'autre de la seconder dans son importante mission. La sœur Le Jumeau, que M. Macé connaissait très-particulièrement, et dont nous aurons occasion de parler plus en détail dans la suite, avait été première supérieure de la maison de Baugé, et joignait à une vertu éprouvée un jugement très-solide. Elle n'avait point encore fait profession des vœux solennels, ayant interrompu son noviciat au bout d'un an, pour attendre la conclusion de quelques différends relatifs à sa dot.
Lorsqu'elle reçut la lettre de M. Macé, qui l'invitait à se tenir prête pour passer en Canada, elle fut extrêmement surprise de cette proposition, que son humilité lui fit envisager comme beaucoup au-dessus de sa capacité et de son mérite. Elle lui représenta qu'elle n'avait ni les vertus ni les talents que demandait une pareille mission, et que d'ailleurs, étant âgée de cinquante ans, elle ne pourrait soulager dans leurs travaux ses sœurs de Villemarie. Pour toute réponse, M. Macé lui marqua de nouveau de faire son paquet et de se tenir prête pour le départ, sans lui en déterminer encore le temps, et sans lui parler des compagnes qu'elle devait avoir dans le voyage : car alors l'évêque du Mans n'avait pas encore consenti au départ de la sœur du Ronceray.
Cette seconde lettre remplit la sœur Le Jumeau de la plus vive reconnaissance envers DIEU, qui daignait la choisir pour aller consacrer le reste de ses jours à l'œuvre de Villemarie. Aussi ne pouvait-elle se lasser de réciter la doxologie Gloria Patri, et le psaume Laudate Dominum omnes gentes, en action de grâces pour une si grande faveur.
Enfin, sur ces entrefaites, M. Macé ayant obtenu, par l'entremise de la reine, l'obédience de l'évêque du Mans écrivit à la sœur Le Jumeau de partir pour Angers et de se rendre à jour fixe dans une certaine hôtellerie qu'il lui désigna, ajoutant que la sœur du Ronceray irait l'y joindre et la conduirait elle-même à Villemarie. Il lui exposait en détail les obstacles formés contre le départ de cette sœur, et la manière dont la Providence venait de les lever, au grand contentement de toutes les personnes les plus intéressées dans cette affaire, surtout de l'évêque du Mans et de M. du Ronceray.
En lisant cette lettre, la sœur Le Jumeau ne put s'empêcher de bénir DIEU des soins qu'il prenait de l'œuvre de Villemarie, et sentit s'accroître de plus en plus dans son cœur le désir d'aller s'y consacrer pour sa gloire. Sans perdre de temps, elle fit aussitôt ses petits préparatifs de voyage, qui consistèrent à se pourvoir d'un peu de linge et de hardes pour son usage; et, conformément aux instructions que lui donnait M. Macé, elle prit sur sa route la sœur Renée Babonneau, sœur domestique de la maison de la Flèche. De son côté, la sœur du Ronceray, accompagnée seulement de son frère, fit à cheval le voyage de Laval à Angers; et, rendue dans cette ville à huit heures du soir, elle alla descendre à l'hôtellerie indiquée, où elle trouva la sœur Le Jumeau et sa compagne, arrivées trois heures avant elle.
Le lendemain, après la sainte messe, elles visitèrent l'évêque d'Angers pour lui demander sa bénédiction. Il les reçut avec une bonté toute paternelle, les félicita d'avoir été choisies pour un si noble dessein, les encouragea à porter avec constance les croix qu'elles y trouveraient infailliblement, et leur souhaita enfin toutes les bénédictions du Ciel en leur donnant la sienne propre, ce qu'il ne put faire sans laisser paraître par ses larmes la vive émotion de son cœur (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : V. Les sœurs du Ronceray et ses compagnes refusent de s'embarquer sur le vaisseau de M. Talon…..
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V. Les sœurs du Ronceray et ses compagnes refusent
de s'embarquer sur le vaisseau de M. Talon. — Protection de DIEU sur elles.
Elles partirent d'Angers, à cheval, pour se rendre incessamment à la Rochelle, lieu de l'embarquement, et firent tant de diligence, qu'elles y arrivèrent deux jours après, le 27 juin 1669, qui était un jeudi. Le vaisseau marchand sur lequel elles allaient s'embarquer devait partir le samedi suivant, fête de saint Pierre et saint Paul. Mais comme tous les passagers s'y étaient réunis d'assez bonne heure, elles ne trouvèrent plus de chambre, et il n'y eut personne qui consentit à leur céder la sienne : de sorte que le capitaine, M. Poulet, ne put leur en offrir d'autre que celle où était placée la pompe du vaisseau. L'incommodité de ce lieu et l'odeur infecte qu'on y respire, occasionnée par les eaux croupies qui y séjournent ordinairement, parurent aux amis des filles de Saint-Joseph un motif suffisant pour leur conseiller de renvoyer leur départ à l'année suivante. Mais ces véritables amantes de la croix, ravies de trouver une occasion de souffrir qui semblait leur avoir été ménagée par la divine Providence, rejetèrent le conseil et acceptèrent avec joie le misérable réduit qu'on leur offrait, quelque incommode et infect qu'il pût être.
M. Talon se trouvait aussi à la Rochelle, prêt à s'embarquer sur un vaisseau du roi, pour aller reprendre en Canada ses fonctions d'intendant. Il n'eut pas plutôt appris la résolution de ces filles, qu'il s'empressa de les visiter dans leur hôtellerie, et les invita de la manière la plus obligeante à accepter sur son navire, avec une chambre plus convenable, toutes les commodités et les douceurs qu'il pouvait leur procurer dans la traversée. Des personnes moins désireuses des souffrances que ne l'étaient ces filles auraient pu voir dans une si gracieuse invitation une attention particulière de la divine Providence sur leur voyage. Ces bonnes filles de Saint-Joseph firent bien paraître dans cette circonstance combien elles étaient dignes de porter à leurs sœurs de Villemarie l'esprit religieux qui les dirigeait elles-mêmes dans toutes leurs démarches. Elles remercièrent M. Talon de la faveur si honorable qu'il voulait bien leur faire, et le prièrent de trouver bon qu'elles occupassent dans leur navire le lieu qu'elles avaient accepté. La nécessité de se trouver avec un grand nombre de personnes de qualité et d'hommes de guerre qui devaient accompagner l'intendant, fut le motif qui leur fit préférer à des offres si bienveillantes le séjour de leur triste réduit, dont l'infection devait éloigner les passagers, et leur procurer à elles-mêmes une entière solitude.
Au reste, cette résolution, quelque étrange et bizarre qu'elle pût paraître à plusieurs…
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V. Les sœurs du Ronceray et ses compagnes refusent
de s'embarquer sur le vaisseau de M. Talon. — Protection de DIEU sur elles.
(suite)
Au reste, cette résolution, quelque étrange et bizarre qu'elle pût paraître à plusieurs, fut très-agréable à DIEU , qui sans doute l'avait inspirée lui-même à ces saintes filles pour donner une preuve éclatante des soins paternels de sa providence sur elles : car le vaisseau de l'intendant fut assailli de si furieuses tempêtes, qu'au lieu d'aborder en Canada, il fut jeté sur les côtes du Portugal, et fit enfin naufrage avec perte d'une partie des hommes qu'il portait. M. Talon lui-même, sa nièce, Mme Pérot ainsi que son mari coururent les plus grands dangers de périr, et n'échappèrent à la mort qu'au moyen d'un mât rompu qu'ils purent saisir, et avec l'aide de quelques matelots à qui ils promirent de grosses sommes d'argent s'ils leur sauvaient la vie (1).
II est manifeste que les filles de Saint-Joseph auraient péri avec tant d'autres sur ce navire. Aussi, lorsqu'elles apprirent ce triste événement leur reconnaissance pour une protection de DIEU si visible n'eut point de bornes, et toutes les fois que depuis elles parlaient de leur traversée, ce n'était qu'avec des transports d'actions de grâces envers DIEU , qui les avait ainsi préservées de la mort (1).
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(1) Histoire du Montréal, par M. Dollier de Casson, de 1669 à 1670.
(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : VI. Traversée de la sœur du Ronceray et de ses compagnes.
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Re: Vie de Mlle Mance et Hôtel-Dieu de Villemarie (Table) COMPLET
VI. Traversée de la sœur du Ronceray et de ses compagnes.
Elles s'embarquèrent donc sur le navire du capitaine Poulet, le 29 juin, et entrèrent avec courage dans le réduit dégoûtant et infect qui leur servit constamment de salle à manger et de dortoir. La puanteur insupportable de ce lieu, jointe aux incommodités ordinaires de la mer, les rendit toutes trois malades pendant presque toute la traversée. La sœur Le Jumeau, naturellement fort délicate, eut surtout occasion d'y contenter son grand amour pour la mortification. Elle disait depuis, que cette demeure et l'odeur qu'elle y respirait avaient été pour elle une sorte de purgatoire tout le temps qu'elle passa sur la mer, qui fut d'environ trois mois. Pour leur donner encore une nouvelle matière de mérite, DIEU permit qu'au milieu des chaleurs de l'été les plus accablantes l'eau douce vînt à manquer sur le navire, et qu'on ne la distribuât plus aux voyageurs qu'en très-petite quantité.
Enfin l'inexpérience où ces filles étaient de la mer et de la longueur de cette traversée, qu'elles avaient jugé ne devoir être que d'un mois et demi, furent cause que les rafraîchissements dont elles s'étaient pourvues avant l'embarquement ne se trouvèrent ni en assez grande quantité pour suffire à un si long voyage, ni de la qualité qu'il convenait pour une navigation. Elles se virent donc contraintes de se réduire elles-mêmes sur la nourriture, et de faire ainsi une dure et sévère pénitence jusqu'à leur débarquement, qui n'eut lieu qu'à la fin du mois de septembre.
Arrivées à Québec, elles furent reçues avec beaucoup d'empressement et de charité par les Ursulines, qui avaient obtenu de M. de Laval la faveur de les loger dans leur monastère. Elles eurent tout le temps de s'y délasser des fatigues de la mer ; car elles séjournèrent un mois à Québec, ne trouvant point de commodité pour monter à Villemarie, jusqu'à ce qu'enfin M. Souart, informé de leur arrivée, vint lui-même pour les y conduire (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : VII. A Québec, la sœur Babonneau refuse de quitter l'institut de Saint-Joseph.
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VII. A Québec, la sœur Babonneau refuse de quitter l'institut de Saint-Joseph.
Durant cet intervalle, elles prirent leur direction spirituelle du P. Lallemant, recteur du collège de Québec, qui allait les confesser chez les Ursulines. Ce Père n'eut pas plutôt connu la sœur Babonneau, destinée à être sœur converse, qu'il ne put s'empêcher d'admirer les trésors de grâces renfermés dans cette âme vraiment simple et selon le cœur de DIEU. Dès son enfance, et lorsqu’elle gardait les brebis de son père, elle avait été favorisée des plus rares communications avec la sainte Vierge, et depuis elle n'avait cessé de croître toujours dans la pratique des solides vertus, et d'être partout un modèle de ferveur. Son extérieur modeste et recueilli, expression naïve de la paix inaltérable de son âme, touchait tous ceux qui la voyaient, et leur inspirait un profond respect pour sa vertu. Le P. Lallemant, qui désirait de procurer aux communautés de Québec des sujets propres à y entretenir la ferveur, conçut le dessein de détacher de l'institut de Saint-Joseph la sœur Babonneau, qui n'était point encore professe.
« Il mit tout en œuvre, dit la sœur Morin, pour la faire rester à Québec, lui offrant de la faire recevoir sœur de chœur. » La sœur Babonneau n'avait jamais douté que DIEU ne l'eût appelée à être fille de Saint-Joseph : outre l'attrait constant qui la portait à cet institut, elle avait été choisie autrefois par M. de La Dauversière, de qui elle était parfaitement connue, pour aller avec la mère de Brésoles jeter les fondements de la communauté de Villemarie, ce qu'elle ne put faire à cause des besoins de la maison de la Flèche, où elle fut alors retenue. Aussi « résista-t-elle courageusement aux propositions » du P. Lallemant, ajoute la sœur Morin, disant « que DIEU la voulait fille de Saint-Joseph, et que son unique désir était de vivre et de mourir sœur converse, état le plus assuré dans la religion. Enfin M. Souart, de son côté, s'opposa aussi à ce dessein, et la fit partir incessamment pour Villemarie (1). »
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : VIII. Arrivée de la sœur du Ronceray et de ses compagnes à Villemarie…
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VIII. Arrivée de la sœur du Ronceray et de ses compagnes
à Villemarie. — Les hospitalières font les vœux solennels.
Elles y arrivèrent le 1er novembre, fête de la Toussaint, et furent reçues par la mère de Brésoles et ses compagnes avec une satisfaction qu'il serait difficile d'exprimer. De leur côté, en voyant la maison si pauvre et si dénuée, elles témoignèrent une sainte joie, s'estimant heureuses d'avoir quitté la France pour partager avec leurs sœurs les croix sans nombre dont la bonté divine voulait bien les favoriser. La sœur Le Jumeau en pleurait de joie, et ne pouvait assez remercier DIEU d'une vocation si privilégiée, qu'elle aimait à regarder comme un signe de prédestination.
Les amis de l'Hôtel-Dieu s'empressèrent de visiter les nouvelles arrivées, et plusieurs leur apportèrent des fruits du pays, des melons, des citrouilles, du blé d'Inde. Pour répondre à ces témoignages d'estime et d'affection, M. Souart les conduisit chez les principaux parmi les colons; et avant de les mettre en clôture il désira qu'elles visitassent aussi leur petite ménagerie de Saint-Joseph, où il les accompagna le lendemain de leur arrivée.
Cette ferme, qui ne faisait que de naître, était alors à une demi-lieue de la ville, et fournissait à la communauté des filles de Saint-Joseph du pain, du lait et quelques légumes : c'est pourquoi elles l'appelaient leur Bethléhem, qui veut dire, maison de pain. Au retour de cette promenade, et le soir du même jour, elles se renfermèrent dans leur pauvre clôture, qui n'était faite encore que de pieux enfoncés dans la terre et dont une grande partie était à demi tombée (1).1670.
Le lendemain, troisième jour de leur arrivée, la mère de Brésoles, qui avait succédé le 10 mai de cette année 1669 à la sœur Macé en qualité de supérieure, se démit de sa charge en présence de la communauté, et la sœur du Ronceray prit sa place, afin de faire faire à toutes le noviciat qui devait les préparer à la profession des vœux solennels. Les sœurs de Brésoles et Macé, après avoir gouverné jusque alors la maison, n'édifièrent pas moins leurs sœurs par leur soumission parfaite à cette nouvelle supérieure qu'elles ne l'avaient fait par la douceur et la sagesse de leur commandement. De leur côté, les sœurs Maillet, Morin et Denis, non moins que les sœurs Le Jumeau et Babonneau, rivalisèrent de zèle et de fidélité avec les deux autres pour se rendre capables de la profession religieuse, qu'elles désiraient toutes avec tant d'ardeur.1671.
Enfin, les deux années de noviciat approchant de leur terme, elles adressèrent une requête à M. de Laval pour être admises à la profession des vœux solennels, ce qu'il leur accorda volontiers par ses lettres du 7 octobre 1671, adressées à M. Souart, à qui il communiqua tous les pouvoirs nécessaires. En conséquence, le 27 du même mois, les sœurs Morin et Denis, et le lendemain, fête de saint Simon et saint Jude, les sœurs de Brésoles, Macé, Maillet, Le Jumeau et Babonneau, se consacrèrent irrévocablement au service de DIEU.
« Par là, dit la sœur Morin, M. de Laval acheva cet établissement pour ce qui était du spirituel, de manière à ne pouvoir plus s'en dédire. Il n'est pas en mon pouvoir, ajoute-t-elle, de faire connaître le grand contentement que chacune de nous en ressentait en son âme, ni celui de tous nos amis, singulièrement de MM. les prêtres de Saint-Sulpice, qui ont toujours été nos directeurs spirituels, et nos protecteurs en tout, particulièrement M. Souart, notre confesseur pendant vingt-cinq ans consécutifs, et qui nous a aidées à subsister par ses libéralités et ses aumônes (1). »
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
(1) Ibid.
A suivre : 1672 et suiv. IX. La sœur du Ronceray est rappelée en France.
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1672 et suiv. IX. La sœur du Ronceray est rappelée en France.
Mais la joie des filles de Saint-Joseph fut troublée l'année suivante par l'ordre que reçut la mère du Ronceray de retourner à la maison de Laval lorsqu'elle aurait achevé la troisième année de sa supériorité à Villemarie. Les religieuses de Saint-Joseph, aussi affligées que surprises de voir qu'on voulait leur enlever une supérieure si accomplie, qui possédait leur estime, leur confiance et leur affection, s'efforcèrent d'abord de la retenir parmi elles; et comme elles pensaient que la maison de Laval, où elle avait fait profession, ne la rappelait que pour n'être pas obligée de leur payer chaque année la pension de sa dot, elles résolurent de la garder sans pension. Mais leurs supérieurs de Villemarie n'approuvèrent pas cet avis.
Ils jugèrent que la communauté de Laval rappelant la sœur du Ronceray contre toute apparence, et l'évêque du Mans de son côté agréant son rappel, la volonté de DIEU se manifestait assez clairement, et qu'on ne devait pas la retenir malgré ces ordres. Cette décision affligea la sœur du Ronceray au delà de tout ce qu'on peut dire, et la mit tout en larmes jusqu'au jour de son départ; ou plutôt, cette bonne sœur resta plus d'une année sans pouvoir se consoler de son éloignement de Villemarie, craignant toujours d'avoir pu elle-même y contribuer.
Pendant qu'on faisait les préparatifs de son voyage, on chercha de tous côtés parmi ceux qui se disposaient à passer prochainement en France une personne sûre qui pût prendre soin d'elle dans la traversée. On n'en trouva aucune, quelque diligence qu'on pût faire ; ce qui fut cause que, pour ne pas la laisser partir seule, la sœur Le Jumeau, par estime et par affection, s'offrit pour l'accompagner. Mais on ne voulut pas écouter cette proposition, à laquelle d'ailleurs la sœur du Ronceray n'aurait jamais consenti, afin de ne pas priver le monastère d'un sujet de si rare mérite, et qui pouvait lui rendre les services les plus importants.
Enfin, sur ces entrefaites, la Providence fit naître l'occasion qu'on désirait. M. Migeon de Bransac, qui avait épousé Gabrielle Gaucher de Belleville, dont on a parlé, et qui exerçait l'office de juge à Villemarie, fit un voyage en France, et se chargea très-volontiers de la sœur du Ronceray. Il en prit tout le soin possible dans la traversée, et la conduisit lui-même jusqu'à son monastère à Laval. « Nous demeurâmes dans un grand deuil de son éloignement, dit la sœur Morin ; ma sœur Le Jumeau surtout en éprouva une affliction excessive : rien ne pouvait la consoler; et, malgré sa grande vertu, elle était elle comme abîmée dans l'excès de sa douleur (1 ). »
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
(1) Ibid.
A suivre : x. La sœur Le Jumeau élue supérieure…
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x. La sœur Le Jumeau élue supérieure.
— Détails sur sa vocation à l’institut de Saint-Joseph.
Pour remplacer la sœur du Ronceray, on réélut, le 24 août 1672, la sœur Macé, à laquelle succéda au bout de trois ans la sœur Le Jumeau ; et ces deux dignes supérieures occupèrent alternativement la même charge, pendant plus de vingt années consécutives, au grand avantage de la communauté. C'est ici le lieu de faire connaître la sœur Le Jumeau, qui fut, par ses vertus et par son mérite, l'un des plus dignes présents que DIEU ait faits à l'Hôtel-Dieu et à la colonie de Villemarie. Elle était née au Mans, d'une famille fort considérée pour sa noblesse et ses alliances. Son père, M. Le Jumeau de Lanaudière, chargé d'une nombreuse famille, avait consenti à confier l'éducation de sa fille à Mme de Milon, sa sœur, qui, n'ayant que deux garçons, désirait de l'avoir auprès d'elle, et la traita toujours comme si elle eût été sa propre enfant. Elle jugea que sa nièce était destinée à vivre dans le monde, et ne négligea rien pour lui procurer tous les genres de connaissances et d'agréments qui pouvaient l'y faire paraître avec avantage.
Mlle Le Jumeau, quoique élevée dans une famille très-chrétienne, ne laissait pas de goûter la société, comme pouvait le faire une jeune personne de sa condition. Mais DIEU, qui voulait la posséder seul, permit qu'à l'âge de vingt-quatre ans elle fût atteinte d'une maladie des plus affligeantes, que tous les remèdes ne purent guérir, et qui lui fit faire les réflexions les plus sérieuses sur la vanité des plaisirs du monde.
Son esprit étant bientôt désabusé des illusions qui l'avaient captivée auparavant, et son cœur vivement touché de la grâce, elle prit la généreuse résolution de se retirer dans quelque communauté fervente, pour y faire pénitence le reste de ses jours, et ne s'occuper plus que de la grande affaire de son salut.
Un Jésuite à qui elle fit part de son dessein lui parla des hospitalières de Saint-Joseph, récemment établies à la Flèche ; et dès ce moment elle se sentit portée à s'attacher à leur institut. Elle s'en ouvrit à Mme de Milon, qui parut d'abord goûter son projet, mais qui ensuite, de concert avec les siens, s'efforça d'y mettre obstacle. Vaincue à la fin par les instances de sa nièce, elle y consentit, et la conduisit elle-même à la Flèche en grand équipage.
La mère de La Fère accueillit la jeune postulante…
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x. La sœur Le Jumeau élue supérieure.
— Détails sur sa vocation à l’institut de Saint-Joseph.
(suite)
La mère de La Fère accueillit la jeune postulante avec toute l'affection qu'on pouvait espérer de sa tendre charité, et, sachant la maladie dont elle était atteinte, elle lui conseilla de recourir à saint Joseph, et de faire vœu de s'attacher irrévocablement à son institut s'il lui obtenait de DIEU sa guérison. Elle fit ce vœu, et fut entièrement guérie. Lorsque Mme de Milon apprit le rétablissement de sa nièce, craignant que son entrée en communauté n'eût eu pour principe qu'une ferveur passagère, elle essaya de la dissuader de prononcer les vœux simples qu'on faisait alors, et l'engagea à revenir auprès d'elle. Mais la voyant inébranlable dans sa résolution, elle ne songea plus qu'à lui fournir les moyens d'achever son parfait sacrifice.
Les vertus solides et les rares qualités qu'on admira bientôt dans la sœur Le Jumeau la firent choisir pour aller fonder la maison de Baugé, dont elle fut la première supérieure ; et pour le même motif on la rappela dans la suite à la maison de la Flèche, lorsqu'on chercha à y introduire les vœux solennels. Mais voyant que les esprits n'étaient pas encore assez disposés à cette réforme, et sachant d'ailleurs qu'on allait l'embrasser sans délai à Laval, elle se rendit dans cette dernière maison, où elle fit une année de noviciat, et fut ensuite envoyée à Villemarie par M. Macé (1), comme nous l'avons raconté plus haut.
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : XI. Amour de la sœur Le Jumeau pour les mépris.
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XI. Amour de la sœur Le Jumeau pour les mépris.
Parmi les vertus qu'elle a pratiquées constamment , on doit mettre au premier rang sa profonde humilité : « Après avoir eu l'honneur de vivre quarante ans avec elle, dit la sœur Morin, je puis assurer que je n'ai pas remarqué une seule fois qu'elle ait rien dit à son avantage sans y mêler quelque chose qui l'humiliât. Elle avait pour cela une attention toute particulière. Quand on la pressait de parler de ses sentiments intérieurs dans l'oraison, ou qu'elle se trouvait engagée à le faire, c'était toujours en des termes humbles, où l'amour de soi-même n'avait point de part, séparant délicatement l'ouvrage de la grâce d'avec celui de la nature. Sa conviction était que nos plus saintes actions sont gâtées par des recherches secrètes de nous-mêmes ; ce qui lui faisait dire qu'elle était vide de tout bien, et que sa confiance en DIEU n'avait pour appui que sa grande miséricorde et les mérites de JESUS-CHRIST. »
Nous ne dissimulerons pas cependant qu'elle portait l'amour des mépris et des humiliations au delà des bornes que la simplicité chrétienne y met dans la plupart des saints.
Étant partie de France contre le gré de tous ses proches, qui par ressentiment s'abstinrent de lui écrire pendant plusieurs années, elle prit occasion de l'oubli où ils la laissaient pour faire croire, au dedans et au dehors du monastère, qu'elle n'était qu'une pauvre villageoise élevée par charité chez une de ses tantes, où elle avait gardé les dindons, et qu'elle s'estimait très-heureuse d'avoir été reçue en religion, se trouvant beaucoup mieux qu'elle ne l'aurait été dans la maison de son père.
Elle tenait ce langage aux dames de la première condition, qui aimaient à la visiter, à Mme de Denonville, à Mme de Vaudreuil, femmes des gouverneurs généraux de ces noms ; à Mme de Champigny, dont le mari était intendant, affectant même dans sa conversation avec elles des manières de parler communes et populaires. Mais elle ne put jamais les persuader de la bassesse prétendue de son extraction, quelque industrie qu'elle employât. Il arriva même qu'un jour M. Le Ber, à qui elle avait tenu le même langage, lui dit qu'il ne croyait rien de ce qu'elle avançait. Elle demeura tout humiliée de cette réponse, et depuis elle s'abstint de lui parler de ses parents (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : XII. Fidélité de la sœur Le Jumeau aux devoirs de son état.
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XII. Fidélité de la sœur Le Jumeau aux devoirs de son état.
Nous n'entreprendrons pas de justifier ces illusions de l'humilité, quoiqu'elles eussent dans l'esprit de la sœur Le Jumeau quelque apparence de fondement légitime. Dans une âme si résolue d'être à DIEU, et d'ailleurs si parfaite en toute sa conduite, ces excès, lorsqu'ils vinrent à être connus, ne diminuèrent en rien l'estime que chacun faisait de ses rares et sublimes vertus.
« Elle a été un modèle parfait dans tous les offices qu'elle a exercés, dit la sœur Morin; je ne crois pas qu'aucune novice l'ait surpassée en soumission, en obéissance à la supérieure, en fidélité aux observances journalières de la règle, et en ferveur à réparer les moindres fautes qu'elle y commettait. »
La résidence de JESUS-CHRIST sur nos autels faisait ses délices. C'est là qu'elle allait se délasser de ses travaux et de ses fatigues, ménageant avec soin, pour ce saint exercice, tous les moments dont elle pouvait disposer. Il était aisé de juger de ses sentiments par son extérieur, qui inspirait de la dévotion à tous ceux qui la voyaient. Elle s'y tenait dans une posture pleine de respect et d'anéantissement, souvent prosternée la face contre terre pendant un temps considérable. Quoiqu'elle fût très-douce et très-charitable envers tous, elle n'avait rien de mou dans son autorité lorsqu'elle était supérieure, mais non plus rien d'austère ni de dur. Son commandement était toujours assaisonné de douceur et accompagné de manières honnêtes et engageantes qui la faisaient aimer.
Dans les avis qu'elle donnait à ses filles, elle insistait principalement sur l'exactitude à la règle, l'éloignement du siècle, l'estime des offices les plus vils aux yeux du monde, la pauvreté dans les vêtements et les meubles, le support du prochain, l'amour de la prière, la fidélité à s'accuser publiquement des fautes contre la règle, Elle ajoutait que c'était par ces saintes pratiques que les filles de Saint-Joseph se conserveraient dans la ferveur de leur institut, et s'élèveraient à une haute perfection (1).
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : XIII. Exactitude de la sœur Le Jumeau à la pratique de l’obéissance.
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XIII. Exactitude de la sœur Le Jumeau à la pratique de l’obéissance.
Mais par-dessus tout elle les portait à l'amour de la vertu d'obéissance, disant quelquefois :
« Si l'on savait le mérite et la valeur d'un acte d'obéissance fait en esprit de foi et d'amour, on l'achèterait un million d'or; car sa récompense sera éternelle. Une jeune fille qui se donne à DIEU , quand elle n'aurait rien que ce qui couvre son corps, lui fait le plus riche présent, pourvu qu'elle lui donne sa volonté tout entière, sans la reprendre jamais. S'il arrivait qu'elle la reprît par surprise dans un moment d'oubli, il faudrait qu'elle fît comme celui qui aurait dérobé le bien d'autrui, c'est-à-dire qu'elle la redonnât tout de nouveau à DIEU en renouvelant son vœu, avec un désir tout nouveau de le mieux garder à l'avenir. »
Ce que la sœur Le Jumeau recommandait ainsi par ses paroles lorsqu'elle était supérieure, elle le persuadait puissamment par ses exemples quand elle se trouvait placée au second rang. Ainsi, elle ne serait pas allée prier au chœur, quelque attrait qu'elle y eût; elle n'aurait pas fait la moindre chose pour elle ou pour d'autres en dehors de son office sans l'agrément de sa supérieure ; et cette exactitude ponctuelle à demander permission dans toutes ces rencontres était d'une grande édification pour la communauté. Elle ne se relâcha jamais de cette fidélité à la règle. A la fin de sa vie, étant privée de la vue et ne pouvant presque plus se traîner, c'était une grande mortification pour elle de ne pouvoir se rendre aux exercices communs. L'hiver, on l'obligeait de demeurer auprès du feu pendant que la communauté était au chœur ; et bien des fois on la voyait se mettre à genoux devant sa supérieure pour qu'elle lui permette d'aller rejoindre ses sœurs et de chanter avec elles les louanges de DIEU. Lorsqu'elle avait obtenu cette permission, elle tenait son bréviaire dans ses mains, tout aveugle qu'elle était, disant que c'était pour se conformer à la règle et à l'obéissance. Chaque jour elle ne manquait pas d'aller, appuyée sur un bâton, pour instruire les malades et leur parler de DIEU. A la récréation et à la lecture commune, elle avait toujours avec elle sa quenouille, et malgré sa cécité elle filait une sorte de grosse étoupe qu'on lui donnait pour la contenter, et, quoique son fil ne fût bon à rien, elle ne laissait pas de s'occuper ainsi pour suivre la règle, disait-elle, qui l'ordonne de la sorte (1).
Ces exemples de vertu, que les filles de Saint-Joseph offraient à la colonie, étaient pour Mlle Mance le sujet d'une douce et vive satisfaction. Après toutes les peines qu'elle avait prises depuis plus de trente ans pour attirer ces filles à l'Hôtel-Dieu, on comprend combien elle s'estimait heureuse de voir tous ses désirs accomplis, c'est-à-dire l'établissement des hospitalières autorisé par des lettres patentes du roi, confirmé par M. de Laval, et enfin leur institut érigé en ordre religieux par le Saint-Siège. Mais cette joie si légitime qu'elle goûta avant sa mort fut tempérée par une épreuve très-amère, qui exerça beaucoup sa patience, et lui donna l'occasion de mettre le comble à l'œuvre de sa sanctification, comme nous le raconterons dans le chapitre suivant.
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(1) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
A suivre : Chapitre II. TROUBLES SUSCITES A MADEMOISELLE MANCE AU SUJET DU FIEF NAZARETH...
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CHAPITRE II.
TROUBLES SUSCITES A MADEMOISELLE MANCE
AU SUJET DU FIEF NAZARETH,
QU'ELLE AVAIT ACQUIS A L'HÔTEL-DIEU POUR 22,000 LIVRES. —
SA MORT. — LES FILLES DE SAINT-JOSEPH LUI SUCCÈDENT
DANS L'ADMINISTRATION TEMPORELLE.
I. Mlle Mance contribue à faire accepter
au séminaire de Saint-Sulpice
la propriété de l’île de Montréal.
Pour faire connaître le sujet de l'épreuve dont nous avons à parler ici, il est nécessaire de reprendre les choses de plus haut. Après la mort de M. de La Dauversière, Mlle Mance, voyant que la fondation donnée par Mme de Bullion pour les hospitalières de Villemarie avait été saisie, et que ces filles étaient réduites au plus entier dénûment, entreprit pour la troisième fois le voyage de France ; ce fut vers la fin de l'année 1662. Son dessein était de mettre tout en œuvre pour recouvrer cette fondation; mais, quelques mouvements qu'elle se donnât, les fonds furent perdus sans ressource (1).
Durant son séjour en France, elle fut vivement affligée de voir la Compagnie de Montréal toute découragée par la résolution où était alors M. de Laval de ne pas souffrir que M. de Queylus reparût à Villemarie, dont il était cependant l'un des principaux soutiens. Cette compagnie, chargée d'ailleurs de grosses dettes, et désespérant de trouver des associés qui voulussent lui succéder sans autre vue d'intérêt que de procurer la gloire de DIEU, était sur le point de se dissoudre, et de substituer à sa place le séminaire de Saint-Sulpice de Paris (2).
Le voyage de Mlle Mance en France, qui n'eut donc aucun résultat pour l'affaire de la fondation, sembla avoir été ménagé par la divine Providence pour consommer enfin cette négociation importante. Car tous les voyages de cette fille admirable avaient pour fin principale le salut de la colonie; et DIEU voulut qu'elle contribuât à la substitution qui devait en assurer la conservation durable et solide, aussi bien que celle de l'Hôtel-Dieu. L'acte en fut passé le 9 mars 1663, en présence et de l'agrément de Mlle Mance, et du consentement de M. de Maisonneuve, qui était alors en Canada (1).
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(1) Histoire du Montréal, par M. Dollier de Casson, de 1662 à 1663.
(2) Vie de la sœur Bourgeoys, t. I, p. 163 et suiv.
(1) Edits, ordonnances royaux,. Déclarations, etc. , Québec 1803, in-4º, t. I, p. 841 et suiv.
A suivre : II. Mlle Mance inquiétée au sujet des 22,000 livres…
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Re: Vie de Mlle Mance et Hôtel-Dieu de Villemarie (Table) COMPLET
II. Mlle Mance inquiétée au sujet des 22,000 livres ;
on veut obliger le séminaire à les rendre à l'Hôtel-Dieu.
Mais cette substitution, qui assurait l'existence de la colonie de Villemarie, attira, dès qu'on en eut connaissance, les plus rudes épreuves à ceux qui y avaient eu le plus de part. Le séminaire de Saint-Sulpice fut dépouillé, quoique d'une manière illégitime, de la justice de l'île, et du droit d'en nommer le gouverneur. M. de Maisonneuve, qui d'ailleurs avait attiré les prêtres de Saint-Sulpice en Canada, fut dépossédé de son gouvernement et renvoyé en France (2); et Mlle Mance, en sa qualité d'administratrice de l'Hôtel-Dieu, fut inquiétée, après la mort de Mme de Bullion, comme si elle eût mal géré les affaires temporelles de cet établissement.
Les troubles qu'on lui suscita, et qui retombaient sur le séminaire, avaient pour objet les 22,000 livres de la fondation de l'Hôtel-Dieu, employées, en 1653, à lever la recrue qui sauva la colonie, ainsi qu'il a été rapporté. On prétendit que la fondatrice n'avait point approuvé le remplacement de cette somme pour cent arpents de terre défrichée du domaine des seigneurs ; et comme le séminaire venait de succéder à ces derniers, on voulut l'obliger à reprendre la terre et à restituer les 22,000 livres.
M. de Laval, qui par l'acte de fondation avait droit de connaître des affaires temporelles de l'Hôtel-Dieu (1), prit la chose vivement à cœur. Il pressa le séminaire de Saint-Sulpice de rendre les 22,000 livres (2) ; on fît même des démarches sous le nom de Mlle Mance auprès du conseil souverain de Québec, comme si elle eût sollicité la restitution de cette somme; ce qui l'affligea beaucoup, et l'obligea d'adresser une requête au conseil. Elle y désavoua les poursuites qu'on osait faire en son nom, et demanda au contraire l'aliénation des 22,000 livres, en justifiant par plusieurs raisons la conduite des seigneurs dans toute cette affaire (3).
Personne n'avait mieux connu qu'elle les intentions de Mme de Bullion sur ce remplacement. On a raconté que, quand cette dame apprit de M. de Maisonneuve l'emploi qu'il allait faire des 22,000 livres, elle ne se contenta pas de ne rien dire pour le désapprouver, mais que, bien au contraire, elle donna 20,000 livres pour qu'elles fussent également employées à lever la même recrue, devenue nécessaire à la conservation de la colonie et à celle de l'Hôtel-Dieu.
Depuis ce temps, Mme de Bullion, en 1659, s'était entretenue de vive voix avec Mlle Mance sur toute cette affaire, et au lieu de témoigner que sa gestion lui eût déplu, elle lui donna encore une autre somme de 20,000 livres pour fonder à Villemarie les filles de Saint-Joseph. Aussi les associés de Montréal, dont plusieurs avaient connu les intentions secrètes de Mme de Bullion, et Mlle Mance elle-même, en cédant en 1663 la seigneurie de l'île au séminaire de Saint-Sulpice, obligèrent-ils cette communauté à l'exécution entière du contrat, qui attribuait à l'Hôtel-Dieu, en remplacement des 22,000 livres, les cent arpents de terre comme faisant partie de la fondation de cet établissement. (1)
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(2) Vie de la sœur Bourgeoys, t. I, p. 167-169.
(1) Acte de Chaussière, notaire à Paris, du 31 mars 1656.
(2) lettre de M. l’évêque de Pétrée à M. Talon, du 17 septembre 1666.
(3) Archives du séminaire de Paris ; requête au conseil de Québec par Mlle Mance.
(1) Edits, ordonnances royaux, etc. t. I, ibid.
A suivre : III. Décision qui dispense le séminaire de rendre à l'Hôtel-Dieu les 22,000 livres.
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III. Décision qui dispense le séminaire
de rendre à l'Hôtel-Dieu les 22,000 livres.
Mais, quelque dignes de foi que fussent toutes ces personnes, dont le désintéressement était d'ailleurs si connu, M. de Laval exigea toujours qu'on lui montrât un écrit signé de Mme de Bullion qui témoignât de son consentement.
« Monseigneur l'évêque dit que l'on a agi contre les intentions de la fondatrice, écrivait M. Tronson, et il voudrait qu'on lui fît voir son consentement. C'est demander une chose qui n'est nullement nécessaire, et qui d'ailleurs est tout à fait impossible; car la fondatrice n'a jamais voulu paraître, et on ne peut pas raisonnablement demander autre chose, sinon que celui qui était le porteur de ses intentions et de ses volontés (M. de La Dauversière), y ait consenti de la manière qu'il l'a fait (1). Car celui qui a paru pour elle dans la fondation de l'hôpital, qui a expliqué ses desseins et ses intentions qui était chargé d'établir cette œuvre, est le même qui a agi, qui a travaillé et qui a signé dans l'affaire des 22,000 livres (2). »
Comme le prélat paraissait déterminé à pousser les choses à bout, on conseilla à M. de Bretonvilliers, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice, de ne pas laisser mettre cette affaire entre les mains de la justice, mais de la porter au conseil privé du roi (3), où l'on avait toujours plus d'égard à l'équité naturelle qu'aux formalités. Il prit en effet ce parti, et, l'année suivante, 1667, M. de Laval fut invité à se présenter devant le conseil privé (4). Les conseillers, tous d'une probité, d'un désintéressement et d'une piété reconnus, et parmi lesquels étaient des jurisconsultes des plus habiles de l'État, décidèrent que, quoique Mlle Mance n'eût pas un pouvoir suffisant pour engager l'Hôtel-Dieu, et que dans cette affaire on n'eût pas observé toutes les formalités qui auraient été à désirer et qu'on exigeait clans une cour de justice, cependant, toutes choses mûrement considérées, le séminaire n'était tenu à aucune restitution envers l'Hôtel-Dieu.
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(1) Lettre de M. Tronson à MM. de Montréal ; lettre à M. Remy du 16 avril 1682.
(2) Lettre à M. Remy de l’année 1680.
(3) Archives du séminaire de Villemarie ; inventaire de Paris, consultations de M. de Guichery, avocat, du 21 avril 1667.
(4) Ibid., arrêt du conseil privé, du 18 mars 1667.
A suivre : IV. Motifs de cette décision.
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IV. Motifs de cette décision.
Cette décision était fondée sur le consentement assez manifeste de la fondatrice ; sur la proportion qu'il y avait eue entre la valeur de cent arpents de terre défrichée et la somme des 22,000 livres : attendu que, si les mêmes terres ne rapportaient plus que 400 livres de revenu, comme l'objectait M. de Laval, c'est que l'Hôtel-Dieu n'ayant pas le moyen de les cultiver, les avait laissées tomber en friche.
Enfin elle était fondée sur l'équité naturelle. Il n'était pas juste en effet de faire porter aux seuls seigneurs de Montréal les frais d'une recrue qui avait profité à tous les colons sans exception, à l'Hôtel-Dieu, et même à tout le Canada (1), dont la perte était infaillible sans ce secours.
Au reste, cette recrue ayant coûté environ 75,000 livres (2), les seigneurs s'étaient montrés très-généreux en en procurant 53,000 et de plus en faisant seuls le remplacement des 22,000 fournis par l'Hôtel-Dieu, quoique toute la colonie et l'Hôtel-Dieu lui-même eussent dû y contribuer de leur part.
Mais cette décision ne satisfit pas M. de Laval. Il revint encore à la charge…
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(1) Lettre de M. Tronson à M. Remy, année 1680.
(2) Annales des hospitalières de Villemarie, par la sœur Morin.
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IV. Motifs de cette décision.
(suite)
Mais cette décision ne satisfit pas M. de Laval. Il revint encore à la charge: il voulut faire juger l'affaire de nouveau; et pendant plus de vingt ans il ne cessa d'agir pour obliger le séminaire à rendre à l'Hôtel-Dieu les 22,000 livres.
M. de Maisonneuve, alors retiré à Paris, était très-affligé des instances du prélat, qu'il regardait comme injustes. Ayant eu lui-même la principale part dans ce remplacement, et craignant d'être la cause de la perte que le séminaire en souffrirait s'il était contraint de rembourser les 22,000 livres, il se porta avant sa mort à un acte bien digne de la délicatesse de sa conscience et de sa religion: de son propre mouvement et sans en avoir été sollicité par personne, il envoya au supérieur du séminaire de Saint-Sulpice de Paris un écrit de sa main par lequel il déclarait, pour l'acquit de sa propre conscience, que le séminaire n'était tenu à aucune restitution ; et que, quant aux cent arpents, qu'on prétendait être inférieurs à la somme, il aurait mieux aimé ces terres dans l'état où elles étaient quand il les avait données à l'Hôtel-Dieu, que 1,000 livres de revenu que rapportaient, alors en France les 22,000 livres en question (*)
Cette déclaration, qu'on communiqua à M. de Laval, ne le fit pas changer d'avis (1) ; et enfin, pour le satisfaire, les ecclésiastiques de Villemarie consentirent, sous le bon plaisir de leur supérieur général, à reprendre les cent arpents de terre, en offrant à l'Hôtel-Dieu une redevance annuelle de deux cent cinquante minots de grain, au lieu de trois cents qu'on en demandait.___________________(*) Cette déclaration, faite par M. de Maisonneuve, sur son lit de mort, doit servir de correctif à ce qu’avance M. Dollier de Casson dans son Histoire du Montréal , lorsqu’il fait dire au contraire au même M. de Maisonneuve que ces terres, en 1653, étaient inférieures à la somme que l'Hôtel-Dieu en donna (1). C'est qu'écrivant vingt ans après l'événement, et lorsqu'elles étaient tombées en friche, il jugeait, par leur valeur actuelle, de celle qu'elles devaient avoir au moment du remplacement; en quoi il s'est trompé. Aussi, comme il était notoire que ces terres avaient en 1653 une tout autre valeur, M. Tronson écrivait, en 1684 : « Si elles ne rapportent pas maintenant comme elles le faisaient autrefois, les seigneurs n'en sont pas responsables, et n'en doivent point de dédommagement. »
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(1) Histoire du Montréal, par M. Dollier de Casson, de 1652 à 1653.
(1) Lettre de M. Tronson à M. Remy, de 1680.
A suivre : v. Le séminaire de Saint-Sulpice est dans l'impuissance de rendre les 22,000 livres et de reprendre les cent arpents de terre.
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