Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.XLVIII.Les substances intelligentes ont le libre arbitre.
Il résulte clairement de ce que nous venons de dire que les substances en question jouissent du libre arbitre dans leurs opérations. En effet:
1° Ce qui nous démontre avec évidence qu'elles ont le libre arbitre, c'est qu'elles portent sur les opérations auxquelles elles doivent se livrer un jugement qui s'appuie sur une connaissance acquise par l'intelligence. Or, elles ont nécessairement la liberté si elles restent maîtresses de leurs actes, comme nous l'avons prouvé [ch. 47]. Donc elles agissent avec le libre arbitre.
2° Cela est libre qui est cause de soi-même.
Donc ce qui n'est pas pour soi-même la cause qui le fait agir n'est pas libre dans son action.
Or, tout être qui n'entre en mouvement et n'agit qu'autant qu'il est mû par un autre n'est pas à lui-même la cause de son action. Donc ces êtres seuls agissent avec liberté qui se meuvent eux-mêmes; et seuls ils agissent en vertu d'un jugement. En effet, l'être qui se meut lui-même se divise en moteur et en sujet du mouvement. Le sujet du mouvement est l'appétit qui est mû par l'intelligence, l'imagination ou les sens, auxquels il appartient de juger. Donc il n'y a parmi ces êtres que ceux qui se meuvent eux-mêmes en portant un jugement qui jugent librement.
Or, il n'est aucune puissance qui, en jugeant, se porte elle-même à ce jugement sans réfléchir sur son acte; car si elle en vient d'elle-même à ce point, elle doit connaître le jugement qu'elle forme, et l'intelligence seule en est capable. Donc les animaux sans raison sont libres, en quelque manière, dans leurs mouvements ou actions, mais non dans leurs jugements. Les êtres inanimés, qui se laissent uniquement mouvoir par d'autres, n'ont ni actions ni mouvements libres; mais les intelligences ont la liberté, non-seulement dans leurs actions, mais encore dans leurs jugements ; et c'est en cela que consiste le libre arbitre.
3° La forme appréhendée [ou saisie] devient principe moteur en tant qu'elle est saisie comme quelque chose de bien ou de convenable; car l'action extérieure des êtres qui se meuvent eux-mêmes procède du jugement, qui prononce au moyen de cette forme que telle chose est bonne ou convenable.
Si donc l'être qui juge se porte lui-même à cette opération, il doit nécessairement se mouvoir ainsi au moyen d'une forme plus relevée appréhendée par lui. Et cette forme ne peut être que la raison [ou notion générale] du bien ou de la convenance, en vertu de laquelle il porte son jugement sur tonte chose déterminée bonne ou convenable. Donc aucun être ne se porte de lui-même à juger, à moins de saisir la raison commune du bien ou de la convenance.
Or, cette faculté n'appartient qu'à ceux qui sont doués d'intelligence. Donc il n'y a que les êtres intelligents qui sont à eux-mêmes la cause motrice qui les pousse, non-seulement à agir, mais encore à juger. Donc ils jugent seuls, librement; ce qui n'est autre chose que jouir du libre arbitre.
4° La conception universelle …
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Chap. XLIX La substance intelligente n’est pas un corps.Des substances intellectuelles.XLVIII.Les substances intelligentes ont le libre arbitre.SUITE
4º La conception universelle ne peut avoir pour conséquence un mouvement et une action sans une appréhension particulière, qui intervienne comme moyen, parce que le mouvement et l'action ont pour terme le particulier. Or, l'intelligence est naturellement disposée à saisir l'universel. Donc la condition essentielle pour que l'appréhension de l'intelligence soit suivie d'un mouvement ou d'une action quelconque, c'est que sa conception universelle s'applique à des objets particuliers.
Or, l'universel contient en puissance une multitude d'êtres particuliers. Donc la conception intellectuelle peut s'appliquer à plusieurs et à diverses choses. Donc le jugement que porte l'intelligence sur ce qui peut être soumis à une action n'est pas limité à un objet unique. Donc tous les êtres intelligents ont le libre arbitre.
5° Certains êtres ne sont pas libres dans leurs jugements, ou parce qu'ils sont totalement privés de la faculté de juger: tels sont ceux qui n'ont aucune sorte de connaissance, comme les pierres et les plantes ; ou parce que leur jugement est limité par leur nature à un objet unique, ainsi que cela a lieu pour les animaux sans raison ; car c'est par une estimation naturelle que la brebis voit dans le loup un ennemi dangereux et, par suite de ce jugement, cherche à l'éviter. Il en est de même des autres.
Donc tout être qui porte sur les choses qu'il doit faire un jugement qui n'est pas déterminé à un seul objet est nécessairement en possession du libre arbitre.
Or, tous les êtres intelligents sont dans cette condition ; car l'intelligence saisit non-seulement tel ou tel bien particulier, mais aussi le bien pris dans son sens général. C'est pourquoi, puisque l'intelligence meut la volonté au moyen de la forme qu'elle a saisie, et que d'ailleurs il doit y avoir une proportion entre le moteur et le sujet du mouvement, la volonté de la substance intelligente ne sera déterminée par la nature qu'au bien pris en général. Donc la volonté pourra être inclinée, sans en être empêchée par aucune détermination naturelle en sens contraire, vers tout ce qui s'offrira à elle comme un bien. Donc tous les êtres intelligents ont une volonté libre, qui tire son origine du jugement intellectuel.
C'est précisément ce qui constitue le libre arbitre, que l'on définit : un jugement libre de la raison.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.XLIX.La substance intelligente n’est pas un corps.
Nulle substance spirituelle n'est un corps. Cette vérité se trouve déjà démontrée par ce qui précède. En effet:
1° Aucun corps ne contient quelque chose qu'en vertu d'une mesure proportionnelle de quantité. D'où il suit que s'il renferme un tout dans sa totalité, il contient aussi la partie dans une de ses parties, la plus étendue dans la plus grande, la plus petite dans la moins considérable. Or, l'intelligence comprend la chose qu'elle connaît sans mesure proportionnelle de quantité, puisqu'elle connaît et comprend dans sa totalité le tout et la partie, les êtres les plus grands et les plus petits à raison de leur quantité. Donc aucune substance intelligente n'est un corps.
2° Il n'est pas de corps qui puisse revêtir la forme substantielle d'un autre corps, sans être dépouillé de sa propre forme par quelque altération [ou corruption]. Or, l'intelligence n'est pas sujette à la corruption ; mais elle se perfectionne plutôt en recevant les formes de tous les corps. En effet, ce qui la perfectionne, c'est la connaissance qu'elle acquiert. Or, elle connaît, parce qu'elle a en elle les formes des objets connus. Donc aucune substance intelligente n'est un corps.
3° Le principe de la diversité des individus.,..
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles .XLIX.La substance intelligente n’est pas un corps.SUITE
3° Le principe de la diversité des individus d'une même espèce est la division de la matière à raison de la quantité; car la forme de ce feu ne diffère de la forme de tel autre que parce que le feu se trouve dans les diverses parties entre lesquelles la matière se divise ; ce qui ne peut arriver que par une division de la quantité, sans laquelle la substance reste indivisible.
Or, ce qu'un corps reçoit, il le reçoit uniquement à raison de la division de la quantité. Donc le corps ne reçoit la forme qu'autant qu'elle est individualisée.
Si donc l'intelligence était un corps, les formes des choses intelligibles ne s'y trouveraient pas sans être individualisées. Or, l'intelligence connaît les êtres au moyen de leurs formes, qui sont en elle. Donc, en ce cas, l'intelligence ne saisit pas l'universel, mais seulement le particulier; ce qui est évidemment faux. Donc aucune intelligence n'est un corps.
4° Tout être agit d'une manière conforme à son espèce, parce que la forme de chacun est le principe de son action.
Si donc l'intelligence est un corps, son action ne s'exercera pas sur d'autres substances que des corps. Donc elle ne connaîtra que des corps. Or, cette conséquence est d'une fausseté manifeste; car nous connaissons beaucoup d'êtres qui n'ont rien de corporel. Donc l'intelligence n'est pas un corps.
5° Si la substance intelligente est un corps, ce corps est fini ou infini…
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Des substances intellectuelles .XLIX.La substance intelligente n’est pas un corps.SUITE
5° Si la substance intelligente est un corps, ce corps est fini ou infini. Or, ainsi que le prouve le Philosophe, il ne peut exister de corps qui soit actuellement infini (1). Donc, si l'on veut que cette substance soit corporelle, elle est un corps fini. Or, il y a là une impossibilité ; car aucun corps fini n'est susceptible d'une puissance infinie, comme nous l'avons démontré [liv. I, ch.13], et l'intelligence a pour connaître une puissance qui est en quelque manière infinie; car en ajoutant toujours aux nombres, elle en saisit une infinité d'espèces, et il en est de même des espèces des figures et des proportions. Elle connaît également l'universel, qui est virtuellement infini, à raison de son étendue, puisqu'il contient les individus qui sont infinis en puissance. Donc l'intelligence n'est pas un corps.
6° Deux corps ne peuvent se contenir l'un l'autre, puisque le contenant est plus grand que le contenu. Or, deux intelligences se contiennent et se comprennent réciproquement, lorsqu'elles se connaissent l'une l'autre. Donc l'intelligence n'est pas un corps.
7º L'action d'un corps ne se réfléchit jamais sur l'agent …
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(1) Cette note est libellée en latin; sur demande, nous la publierons. Bien à vous.
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Des substances intellectuelles .XLIX.La substance intelligente n’est pas un corps.SUITE
7º L'action d'un corps ne se réfléchit jamais sur l'agent; car Aristote prouve que nul corps ne se meut lui-même, si ce n'est par l'une de ses parties, en sorte que l'une devienne un moteur, et que l'autre reçoive le mouvement (2). Or, l'intelligence se réfléchit sur elle-même lorsqu'elle agit; car elle se connaît elle-même, non-seulement dans l'une de ses parties, mais dans son tout. Donc elle n'est pas corporelle.
8° L'acte d'un corps ne se termine pas à son action, de même qu'un mouvement n'a pas le mouvement pour terme, ainsi que le Philosophe l'enseigne (3). Or, l'action d'une substance intelligente se termine à son action. En effet, l'intelligence, de même qu'elle connaît une chose, connaît aussi qu'elle connaît, et ainsi de suite, jusqu'à l'infini. Donc la substance intellectuelle n'est pas un corps.
C'est pour cette raison que la Sainte-Écriture appelle les substances intellectuelles des esprits, expression dont elle se sert pour signifier que Dieu est incorporel, ainsi que nous le prouve cette parole : Dieu est esprit [Joan. IV, 24]. Il est dit aussi : La sagesse divine a en elle l'esprit d'intelligence [Sap. VII, 22], qui comprend tous les esprits intelligibles.
Cette démonstration renverse l'erreur des anciens philosophes naturalistes [ou rationalistes] dont parle Aristote (4), qui n'admettaient pas d'autres substances que les corps. Ils regardaient, par conséquent, l'âme comme un corps composé de feu, d'air, d'eau, ou de quelque chose de semblable. Il s'en est trouvé qui essayèrent de faire passer cette opinion dans la doctrine chrétienne. Ceux-là disaient que l'âme est un corps fait à la ressemblance de la figure du corps extérieur (5).
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(2) Cette note est libellée en latin; sur demande, nous la publierons. Bien à vous. Voyez aussi la note I du chap. 65. : Cette note 1 est libellée en latin; sur demande, nous la publierons.
(3) Cette note est libellée en latin; sur demande, nous la publierons. Bien à vous.
(4) Aristote, dans le 2e chapitre du 1er livre de l'Ame, qu'il serait trop long de reproduire, expose les sentiments divers des anciens philosophes sur cette substance. Selon Démocrite et Leucippe, ce n'est autre chose que le feu et le calorique, et elle est de forme ronde, parce que cette forme est celle qui rend plus facile la pénétration des corps. Les Pythagoriciens la croyaient composée de tous les corpuscules qui s'agitent et voyagent dans l'air, parce qu'ils lui attribuaient la propriété de se mouvoir seule. L'opinion d'Anaxagore se rapproche de la précédente: cependant il paraît établir une distinction entre l'âme et l'intelligence. Quant à Empédocle : « [Texte latin, sur demande, nous le publierons. Bien à vous]» — Selon Thalès, l'âme est un moteur qui participe à la nature de l'aimant. Diogène la confond avec l'air et la regarde comme le principe universel. Critias prétend la trouver dans le sang, qui est le principe de la sensibilité. Toutes les autres opinions reviennent à celles-là ou ne les modifient que très légèrement.
(5) Saint Augustin attribue cette opinion à Tertullien. — La suite de cette note est libellée en latin; sur demande, nous la publierons. Bien à vous.
Chap. L Les substances intellectuelles sont immatérielles.
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Des substances intellectuelles .L.Les substances intellectuelles sont immatérielles.
Nous voyons par là que les substances intellectuelles sont immatérielles. En effet :
1° Tout ce qui est composé d'une matière et d'une forme est un corps; car la matière ne peut revêtir des formes diverses qu'à raison de ses diverses parties. Cette diversité de parties ne peut exister dans la matière, si ce n'est parce qu'il résulte des dimensions qui lui sont inhérentes qu'une matière commune se divise en plusieurs; car si l'on fait disparaître la quantité, la substance devient indivisible. Or, nous avons prouvé [ch. 49] que nulle substance intelligente n'est corporelle. Donc elle n'est pas non plus composée d'une matière et d'une forme.
2° De même que l'homme n'existe pas à moins d'être individualisé, de même aussi il n'y a pas de matière sans telle matière déterminée. Donc toute chose qui subsiste, en tant qu'elle est composée d'une matière et d'une forme, est composée d'une matière et d'une forme qui sont individualisées.
Or, l'intelligence ne peut être composée d'une matière et d'une forme individualisée; car les espèces des choses que l'intelligence saisit deviennent actuellement intelligibles, parce qu'elles sont abstraites de la matière individuelle. Par là même qu'elles deviennent actuellement intelligibles, elles font une même chose avec l'intelligence; d'où il suit que l'intelligence doit être indépendante de la matière individuelle. Donc la substance intellectuelle n'est pas composée d'une matière et d'une forme.
3° L'action de tout être composé…
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Des substances intellectuelles .LLes substances intellectuelles sont immatérielles.SUITE
3° L'action de tout être composé d'une matière et d'une forme n'a pas son principe uniquement dans la forme ou seulement dans la matière, mais elle appartient au composé ; car l'action s'attribue à l'être [en tant que tel].
Or, l'être de ce qui est composé se trouve constitué par la forme (1); d'où il résulte que le composé agit au moyen de la matière et de la forme.
Si donc la substance intelligente est composée d'une matière et d'une forme, connaître sera l'action de l'être composé lui-même. Or, un acte a pour terme quelque chose qui ressemble à l'agent; c'est pourquoi le composé qui est principe générateur ne produit pas la forme, mais un être composé.
Si donc l'action de connaître appartient à l'être composé, il ne pourra connaître ni la matière ni la forme, mais seulement le composé : conséquence qui est d'une fausseté évidente. Donc la substance intellectuelle n'est pas composée d'une matière et d'une forme.
4º Les formes des objets sensibles existent dans l'intelligence d'une manière plus parfaite que dans…
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(1) En disant que l'être ou l'existence de ce qui est composé lui est conféré par la forme, saint Thomas énonce une vérité qu'il développera plus loin [ch. 54]. En effet, la matière ne peut subsister seule et par elle-même; il lui faut nécessairement une forme sans laquelle elle ne saurait être individualisée, et par conséquent, arriver à l'existence. Pour tout être composé d'une matière et d'une forme, la forme est, selon l'expression du saint Docteur, le principe de l'existence, parce qu'elle est le complément de la substance, dont l'actualité est l'existence elle-même.
Dernière édition par Louis le Jeu 02 Mar 2023, 5:42 pm, édité 1 fois (Raison : Insertion du lien du chapitre 54.)
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.L.Les substances intellectuelles sont immatérielles.SUITE
4º Les formes des objets sensibles existent dans l'intelligence d'une manière plus parfaite que dans les choses sensibles elles-mêmes; car elles y sont plus simples et s'appliquent ainsi à un plus grand nombre d'êtres. L'intelligence, en effet, connaît tous les hommes au moyen d'une seule forme intelligible de l'homme.
Or, la forme qui se réalise parfaitement dans la matière détermine tel être actuel [ou tel mode d'existence], par exemple, le feu ou bien une couleur particulière. Si, au contraire, elle ne détermine pas un objet à être tel [et non pas autre], elle n'est qu'imparfaitement en lui. C'est ainsi que se trouve dans l'air qui la transmet la forme d'une couleur, ou encore, la vertu ou puissance active du premier agent dans l'instrument qu'il emploie.
En supposant donc que l'intelligence soit composée d'une matière et d'une forme, les formes des choses saisies par elle feront qu'elle sera actuellement revêtue de la nature même des objets qu'elle connaît; ce qui aboutit directement à renouveler l'erreur d'Empédocle, qui prétendait que l'âme connaît le feu par le feu, la terre au moyen de la terre, et ainsi du reste: système dont l'absurdité est visible (2). Donc la substance intellectuelle n’est pas composée d'une matière et d'une forme.
5° Tout ce qui est dans un être y est suivant la manière d'être du-sujet. Si donc l'intelligence est composée d'une matière et d'une forme, les formes des êtres seront matériellement en elle, de même qu'elles existent en dehors de l'âme. Puis donc qu'en dehors de l'âme elles ne sont pas actuellement intelligibles, elles ne le seront pas non plus lorsqu'elles existeront dans l'intelligence.
6° Les formes des êtres entre lesquels il y a contrariété ne sont elles-mêmes contraires qu'en vertu…
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Chap. LI. Les substances intellectuelles ne sont pas…Des substances intellectuelles.L.Les substances intellectuelles sont immatérielles.SUITE
6° Les formes des êtres entre lesquels il y a contrariété ne sont elles-mêmes contraires qu'en vertu de l'existence qu'elles ont dans la matière; c'est pourquoi elles s'excluent mutuellement. Tant qu'elles n'existent que dans l'intelligence, cette contrariété n'existe pas ; mais l'un des contraires est bien plutôt la raison intelligible de l'autre, parce qu'on les connaît l'un par l'autre. Donc elles n'ont pas un être matériel dans l'intelligence. Donc l'intelligence n'est pas composée d'une matière et d'une forme.
7° La matière ne reçoit une forme nouvelle qu'en vertu d'un mouvement ou d'un changement. Or, de ce que l'intelligence reçoit certaines formes, il n'en résulte pas pour elle un mouvement; mais c'est plutôt en conservant le repos qu'elle se perfectionne et parvient à connaître, tandis que le mouvement met obstacle à sa connaissance. Les formes des êtres ne sont donc pas reçues dans l'intelligence comme dans une matière ou un objet matériel, et, conséquemment, les substances intellectuelles sont immatérielles aussi bien qu'incorporelles.
C'est ce qui fait dire à saint Denys : « Toutes les substances intellectuelles sont émanées des rayons de la divine bonté, et la connaissance que nous en avons nous les représente comme incorporelles et immatérielles » (3).
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(2) Cette note est libellée en latin; sur demande, nous la publierons. Bien à vous.
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Des substances intellectuelles.LI.Les substances intellectuelles ne sont pas
des formes matérielles, mais subsistantes.
On peut établir, par les mêmes raisons, que les natures intellectuelles sont des formes subsistantes, et non des formes qui existent dans la matière, comme si leur être [ou existence] dépendait de cette dernière. En effet :
1° Les formes qui, considérées en elles-mêmes, dépendent de la matière, n'ont pas d'existence propre, mais les êtres composés existent par elles. Si donc les natures intellectuelles étaient des formes de cette espèce, il s'ensuivrait qu'elles auraient un être matériel, de même que si elles étaient composées d'une nature et d'une forme.
2° Les formes qui ne subsistent pas par elles-mêmes ne peuvent pas non plus agir par elles-mêmes; mais les composés agissent par leur moyen. Si donc les natures intellectuelles étaient des formes qui eussent ce caractère, il faudrait dire qu'elles sont incapables de connaître, et que cette action appartient aux êtres qui sont composés de ces natures et de la matière. Par conséquent, l'intelligence serait composée d'une matière et d'une forme ; ce qui a été démontré impossible [ch. 50].
3° Si l'intelligence…
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Chap. LII. Il y a une différence, dans les substances intellectuelles, entre l’être et la substance.Des substances intellectuelles.LI.Les substances intellectuelles ne sont pas
des formes matérielles, mais subsistantes.
3° Si l'intelligence était une forme résidant dans la matière et non subsistante par elle-même, il en résulterait que la matière serait susceptible de ce que l'intelligence reçoit; car les formes dont l'être est inhérent à la matière ne reçoivent rien de ce que la matière ne peut recevoir. Donc, puisque l'intelligence ne reçoit pas les formes de la même manière que les reçoit la matière, l'intelligence ne peut être une forme matérielle.
4° Cette proposition: L'intelligence est une forme non subsistante, mais mélangée avec la matière, équivaut en réalité à celle-ci : L'intelligence est composée d'une matière et d'une forme. La seule différence est dans l'expression; car la première proposition signifie que l'intelligence est la forme même du composé, tandis que la seconde la prend pour le composé lui-même. Si donc il est faux que l'intelligence soit composée d'une matière et d'une forme, il est faux également qu'elle soit une forme non subsistante, mais matérielle.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LII.Il y a une différence, dans les substances
intellectuelles, entre l’être et la substance.
Bien que les substances intellectuelles ne soient ni corporelles, ni composées d'une matière et d'une forme, et qu'elles n'existent pas dans une matière, de même que les formes matérielles, on n'en peut pas conclure qu'elles égalent la simplicité divine.
En effet : 1° Il y a entre elles une certaine différence, qui consiste en ce que leur être n'est pas la même chose que leur substance.
Si l'être est subsistant, rien ne peut lui être ajouté en dehors de lui; car, même dans les choses qui n'ont pas un être subsistant, ce qui se trouve dans le sujet qui existe, en dehors de son être, est, à la vérité, uni avec lui, mais sans faire avec son être une même chose, si ce n'est par accident, c'est-à-dire en tant qu'un sujet unique reçoit à la fois son être et ce qui est en dehors de cet être.
Ainsi, outre son être substantiel, Socrate possède encore la blancheur, qui est distincte de cet être substantiel; car si c'est une même chose que Socrate existe et qu'il soit blanc, ce n'est que par accident.
Si donc l'être ne réside pas dans quelque substance, il n'y aura aucun moyen de lui adjoindre une qualité qui est en dehors de lui.
Quant à l'être considéré comme tel, il n'est susceptible d'aucune distinction. Il peut cependant se diversifier par quelque chose qui est en dehors de lui; par exemple, l'être d'une pierre diffère de l'être d'un homme.
Donc ce qui est subsistant doit nécessairement se réduire à l'unité.
Or, nous avons prouvé [ Liv. I, 22 et 42] que Dieu est lui-même son être subsistant. Donc rien en dehors de lui ne peut être son être. Donc, en toute substance qui existe en dehors de lui, la substance elle-même est distincte de son être.
2° Si l'on considère abstractivement une nature commune, …
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LII.Il y a une différence, dans les substances
intellectuelles, entre l’être et la substance.
2° Si l'on considère abstractivement une nature commune, elle est nécessairement unique, quoiqu'il se rencontre un certain nombre d'êtres qui la possèdent. En effet, en supposant que la nature de l'animal, telle qu'on la conçoit par abstraction, subsiste par elle-même, elle ne renfermera pas les attributs propres à l'homme ou au bœuf; car, s'il en était ainsi, il n'y aurait pas seulement un animal, mais un homme ou un bœuf.
Or, en supprimant les différences constitutives des espèces, la nature du genre demeure indivise, parce que les différences qui constituent les espèces établissent en même temps une division du genre. Ainsi donc, s'il est vrai que cela même qui est l'être est quelque chose de commun comme le genre, l'être séparé [ou absolu] qui subsiste par lui-même est nécessairement un.
Si d'ailleurs il n'est pas divisé, de même que le genre, par quelques différences, mais seulement parce qu'il devient l'être de telle chose ou de telle autre, il est bien plus vrai encore qu'il ne peut y avoir qu'un seul être existant par lui-même. Donc, puisque Dieu est l'être subsistant, rien de ce qui existe en dehors de lui n'est à soi-même son être.
3° Il est impossible qu'il y ait deux êtres infinis, sous tous les rapports; car l'être absolument infini comprend l'existence dans sa plus grande perfection, et par conséquent, s'il s'en trouvait deux en possession de cette infinité, il n'y aurait plus aucune différence pour les distinguer l'un de l'autre. Or l'être subsistant doit être infini, puisqu'il n'a pas pour terme un sujet qui le reçoive. Donc il ne peut exister d'autre être subsistant que le premier.
4° S'il existe un être[esse] subsistant par lui-même, rien ne lui convient que ce qui…
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Des substances intellectuelles.LII.Il y a une différence, dans les substances
intellectuelles, entre l’être et la substance.SUITE
4° S'il existe un être [esse] subsistant par lui-même, rien ne lui convient que ce qui appartient à l'être [ens] considéré comme tel; car l'attribut que l'on affirme d'un sujet, sans que ce soit parce qu'il est tel, ne lui convient que par accident et en sa qualité de sujet. D'où il suit que si l'on suppose cet attribut séparé du sujet, il ne lui appartient en aucune manière.
Or être [esse] qui a sa cause dans un autre ne convient pas à un être [ens] en sa qualité d'être; autrement tout être [ens] émanerait d'une cause, et il faudrait remonter d'une cause à l'autre jusqu'à l'infini, ce qui est impossible [liv. I, ch.13]. Donc cet être [esse] qui est un être [ens] subsistant ne peut avoir une cause. Donc nul être [ens] existant en vertu d'une cause n'est à lui-même son être [esse].
5° La substance de tout ce qui existe est à l'état d'être [ens] essentiellement et non par un autre ; c'est pourquoi si l'air est actuellement lumineux, cette qualité n'entre pas dans sa substance, parce qu'elle ne vient pas de lui. Or toute chose créée tient son être [esse] d'un principe qui n'est pas elle; autrement il n'y aurait pas création. Donc il n'existe pas de substance créée pour laquelle son être [esse] soit sa substance.
6º Puisque tout agent agit en tant qu'il est actuellement, c'est au…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LII.Il y a une différence, dans les substances
intellectuelles, entre l’être et la substance.SUITE
6º Puisque tout agent agit en tant qu'il est actuellement, c'est au premier agent, qui est absolument parfait, qu'il appartient d'exister actuellement de la manière la plus parfaite.
Or un être est d'autant plus parfaitement actuel que cette actualité est plus éloignée dans l'ordre de production; car l'acte est, quant au temps, postérieur à la puissance dans un seul et même être qui passe de la puissance à l'acte. Il est vrai aussi que celui-là est plus parfait sous le rapport de l'acte, qui est l'acte lui-même, que celui qui le possède seulement; car ce dernier n'est un acte qu'à raison du premier.
Ceci posé, il est certain que Dieu seul est le premier agent [Liv. I, 13 et 15 , et liv.II, 21].
Donc c'est à lui seul qu'appartient l'être [esse] actuel de la manière la plus parfaite, c'est-à-dire qu'il est lui-même l'acte absolument parfait. Or c'est là précisément l'être [esse] qui est le terme de toute génération et de tout mouvement; car toute forme et tout acte sont en puissance avant d'arriver à l'être [esse]. Donc Dieu seul est l'être lui-même, comme il est seul le premier agent.
7° L'être [esse]…
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Chap. LIII. Il y a dans les substances intellectuelles créées l’acte et la puissance.Des substances intellectuelles.LII.Il y a une différence, dans les substances
intellectuelles, entre l’être et la substance.
7° L'être [esse] lui-même appartient au premier agent à raison de sa nature propre; car l'être [esse] de Dieu est sa substance [liv. I, ch.22].
Or ce qui appartient à quelqu'un à raison de sa propre nature ne peut convenir à d'autres que par participation : c'est ainsi que le calorique passe du feu dans les autres corps. Donc l'être lui-même [esse] n'appartient à tous les autres que parce qu'ils le reçoivent du premier agent par une certaine participation.
Or ce qu'un être possède par participation n'est pas sa substance. Donc il n'est pas possible que la substance d'un être [ens] distinct du premier agent soit l'être [esse] lui-même (1).
C'est pour cela que le nom propre de Dieu est CELUI QUI EST [Exode, III 14], parce que seul il a cette propriété, que son essence n'est pas autre chose que son être [esse].
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(1) Cette distinction entre l'être et la substance des natures intellectuelles (distinction qui doit s'appliquer aussi à toutes les autres créatures) étant une fois admise, la doctrine du panthéisme tombe d'elle-même, car sa base même lui fait défaut. Le panthéisme, en effet, n'est autre chose que l'unité de substance. C'est là sa plus simple expression. Or, si l'être de tous les objets qui sont dans la nature est parfaitement distinct de leur substance, bien qu'ils ne puissent exister l'un sans l'autre (car l'être actuel ne se conçoit pas sans une substance, ni la substance sans l'être), il s'ensuit que ni l'un ni l'autre n'est nécessaire, Par suite, comme un être contingent n'a pu se donner à lui-même l'existence, il l'a reçue d'une cause. Dans l'ordre des causes on ne peut remonter jusqu'à l'infini : on arrivera donc à un premier agent qui sera éternel, en qui l'être et la substance sont une même chose. Cette différence est essentielle, et ne permet plus de voir dans l'universalité des êtres une substance unique qui se modifie d'une infinité de manières.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LIII.Il y a dans les substances intellectuelles créées l’acte et la puissance.
Il résulte évidemment de ce qui précède qu'il y a, dans les substances intellectuelles créées, composition de l'acte et de la puissance. En effet :
1º Partout où se rencontrent deux choses dont l'une est le complément de l'autre, il y a entre elles la même proportion qui existe entre la puissance et l'acte; car rien ne se complète que par son acte propre. Or nous trouvons dans la substance intellectuelle créée deux choses, qui sont la substance elle-même et son être [esse] [ch. 52], et cet être est lui-même le complément de la substance qui existe, puisque rien n'existe actuellement que parce qu'il a l'être. Donc il y a, dans chacune des substances en question, composition de l'acte et de la puissance.
2° Ce qui se trouve dans un être et provient d'un agent est nécessairement son acte; car il est dans la nature de l'agent de faire quelque chose d'actuel. Or nous avons démontré [ch. 15] que toutes les substances distinctes du premier agent ont reçu l'être de lui, et ces substances ont été créées parce qu'elles ont un être qui leur vient d'un autre. Donc l'être même est dans les substances créées comme leur acte. Or, ce qui a en soi un acte est une puissance; car l'acte, considéré comme tel, est relatif à la puissance. Donc toute substance créée renferme en elle la puissance et l'acte.
3° Tout être qui participe à une chose est avec elle…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LIII.Il y a dans les substances intellectuelles créées l’acte et la puissance.
3° Tout être qui participe à une chose est avec elle dans le même rapport que la puissance avec l'acte; car c'est au moyen de cette chose à laquelle il participe qu'il devient actuellement participant.
Or Dieu seul est essentiellement un être [ens] [liv. I, ch.22], et, [liv.II, ch. 52] et tout ce qui n'est pas lui participe seulement à l'être même [esse].
Donc il y a entre toute substance créée et son être la même relation qu'entre la puissance et l'acte.
4° C'est par l'acte qu'un être devient semblable à sa cause active, puisque l'agent produit quelque chose de semblable à lui, selon qu'il est en acte.
Or le principe qui assimile à Dieu toute substance créée, c'est l'être lui-même [ch.15 et 52].
Donc l'être même est, pour toutes les substances créées, comme leur acte.
D'où il suit qu'en toute substance créée il y a composition de l'acte et de la puissance.
Chap. LIV. La composition de la matière et de la forme n'est pas la même que celle de la substance et de l'être…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LIV.La composition de la matière et de la forme
n'est pas la même que celle de la substance et de l'être.
La composition qui résulte de la matière et de la forme n'est pas de même nature que celle qui a pour éléments la substance et l'être, bien qu'elles comprennent l'une et l'autre la puissance et l'acte (1).
D'abord parce que la matière n'est pas la substance même de la chose; car, s'il en était ainsi, toutes les formes ne seraient que des accidents, comme l'ont pensé les anciens philosophes naturalistes [ou physiciens]; mais la matière est une partie de la substance.
En second lieu, parce que l'être même [esse] n'est pas l'acte propre de la matière, mais de toute la substance; car son acte c'est l'être, dont on peut dire qu'il existe. Or l'être ne s'affirme pas de la matière, mais du tout; c'est ce qui empêche de dire d'elle qu'elle existe, mais la substance elle-même est ce qui existe.
Troisièmement, parce que la forme n'est pas non plus l'être lui-même, mais ils sont coordonnés ensemble; car la forme est à l'être comme la lumière est à l'objet lumineux ou la blancheur à celui qui est blanc. Une autre raison, c'est que l'être est comme l'acte, relativement à la forme. En effet, on considère la forme comme le principe de l'existence pour tout ce qui est composé d'une matière et d'une forme, parce qu'elle complète la substance dont l'acte est l'être lui-même; par exemple, l'air est diaphane, et cette qualité est le principe qui le rend lumineux, parce qu'elle en fait le propre sujet de la lumière.
C'est pourquoi, dans tout ce qui est composé d'une matière et d'une forme…
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(1) Il faut se rappeler que l'acte n'est pas ici synonyme d'action. Saint Thomas l'emploie constamment pour désigner l'actualité ou l'existence actuelle d'une chose, qui de potentielle devient réelle.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LIV.La composition de la matière et de la forme
n'est pas la même que celle de la substance et de l'être.SUITE
C'est pourquoi, dans tout ce qui est composé d'une matière et d'une forme, on ne peut considérer ni la matière ni la forme comme cela même qui existe ou comme l'être lui-même; il est permis de dire cependant que la forme est ce par quoi cela existe, en tant qu'elle est le principe de l'existence; quant à la substance tout entière, elle est cela même qui existe, et c'est en vertu de l'être lui-même que la substance s'appelle un être.
Les substances intellectuelles n'étant pas composées d'une matière et d'une forme [ch.50 et 51], mais leur forme même étant une substance subsistante, cette forme est ce qui existe, et l'être lui-même est l'acte et la raison qui la font exister; c'est pour cela qu'il n'y a dans ces substances que la composition unique de l'acte et de la puissance, c'est-à-dire de la substance et de l'être. Quelques-uns l'appellent composition de ce qui existe et de l'être, ou de ce qui existe et du principe de l'existence.
Dans les substances…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Chap. LV. les substances intellectuelles sont incorruptibles.Des substances intellectuelles.LIV.La composition de la matière et de la forme
n'est pas la même que celle de la substance et de l'être.SUITE
Dans les substances composées d'une matière et d'une forme, il y a une double composition de l'acte et de la puissance. La première est celle de la substance même, qui se compose de la matière et de la forme; la seconde est celle de la substance déjà composée et de l'être. On peut également l'appeler composition de ce qui existe et de l'être, ou bien de ce qui existe et du principe de l'existence.
On voit par là que la composition de l'acte et de la puissance s'étend plus loin que celle de la forme et de la matière; d'où il suit que la matière et la forme divisent la substance matérielle, tandis que la puissance et l'acte divisent l'être universel. Les choses étant ainsi, tout ce qui touche à la puissance et à l'acte, considérés comme tels, est commun aux substances créées, matérielles et immatérielles: par exemple, recevoir et être reçu, donner ou acquérir une perfection. Ce qui, au contraire, est propre à la matière et à la forme envisagées comme telles, par exemple, être produit, se corrompre, et autres choses de même nature, tout cela appartient exclusivement aux substances matérielles et ne convient, sous aucun rapport, aux substances immatérielles créées.
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Des substances intellectuelles.LV.Les substances intellectuelles sont incorruptibles.
Ce que nous avons dit démontre clairement que toute substance intellectuelle est incorruptible (1). En effet :
1° Toute corruption résulte de la séparation de la forme et de la matière : si elle est absolue, elle vient de la séparation de la forme substantielle; si elle n'a lieu que sous un certain rapport, il faut l'attribuer à la séparation d'une forme accidentelle. En effet, tant que la forme demeure, l'objet continue d'exister; car c'est en vertu de la forme que la substance devient le sujet propre de ce qui est l' être [esse]. Or, là où il n'y a aucune composition de la matière et de la forme, ces deux choses ne peuvent être séparées. Donc la corruption est également impossible. Nous avons prouvé [ch. 50] que nulle substance intellectuelle n'est composée d'une matière et d'une forme. Donc aucune de ces substances n'est sujette à la corruption.
2° Ce qui appartient essentiellement à une chose est nécessairement…
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(1) Il faut entendre le mot incorruptible, employé par saint Thomas, dans le sens d'indestructible, qui, dans le cas présent, est synonyme en latin et rend l'idée d'une manière plus exacte en français. La corruption, en effet, telle qu'on la conçoit ordinairement, implique une composition, et ce n'est autre chose qu'un changement survenu dans les éléments d'un être par la soustraction de l'un d'eux ou l'addition d'un ou de plusieurs éléments étrangers. La destruction, au contraire, prise dans son sens rigoureux, fait complètement disparaître la substance elle-même, qu'elle soit simple ou composée. Ce dernier terme paraît donc mieux s'appliquer aux substances spirituelles ou intellectuelles. Il sera nécessaire de faire cette distinction en lisant ce chapitre, car le saint Docteur y met plusieurs fois en parallèle les substances simples et celles qui sont composées de parties.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LV.Les substances intellectuelles sont incorruptibles.SUITE
2° Ce qui appartient essentiellement à une chose est nécessairement, toujours et inséparablement uni à cette chose. Ainsi la rotondité est un attribut essentiel du cercle, tandis qu'elle est accidentelle pour le bronze ; c'est pourquoi le bronze peut très bien perdre sa rotondité, mais il est impossible que le cercle ne soit plus rond.
Or, l'être essentiel est inséparable de la forme, et nous regardons comme essentiel ce qui existe en vertu de la nature même de la chose. Rien n'arrive à l'être qu'autant qu'il revêt une forme.
Donc les substances qui ne sont pas des formes peuvent être privées de l'être si elles perdent leur forme. C'est ainsi que le bronze perd sa rotondité s'il cesse d'être un cercle. Au contraire, les substances qui sont elles-mêmes des formes ne peuvent être dépouillées de l'être.
Si, par exemple, une substance était un cercle, il ne pourrait jamais se faire qu'elle ne fût plus ronde. Or, comme nous l'avons établi [ch. 50], les substances intellectuelles sont elles-mêmes des formes subsistantes. Donc elles ne peuvent cesser d'exister. Donc elles sont incorruptibles.
3º Dans toute corruption, lorsque l'acte disparaît, la puissance demeure; car rien n'arrive par la corruption à l'état de non-être absolu, de même que rien n'est produit du non-être absolu. Or l'acte est, pour les substances intellectuelles, l'être lui-même [ch. 53], et la substance tient lieu de puissance. Donc, si la substance intellectuelle vient à se corrompre, elle survivra à sa corruption; ce qui est radicalement impossible. Donc toute substance intellectuelle est incorruptible.
4e Tout être soumis à la corruption a nécessairement en lui la puissance de n'être pas…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Des substances intellectuelles.LV.Les substances intellectuelles sont incorruptibles.SUITE
4º Tout être soumis à la corruption a nécessairement en lui la puissance de n'être pas. Si donc il existe quelque chose qui n'a pas en soi la puissance de n'être pas, cette chose ne peut être sujette à la corruption.
Or la substance intellectuelle n'a aucune puissance pour le non-être; car il est évident, par ce que nous avons dit [ch.54], que la substance complète est le propre sujet de l'être lui-même. Le propre sujet d'un acte est en puissance relativement à cet acte, de telle manière qu'il est totalement dépourvu de puissance pour son contraire. Prenons pour exemple le feu, qui est pour le calorique ce que la puissance est par rapport à l'acte, et cela de telle sorte qu'il n'a absolument aucune puissance pour recevoir le froid. C'est pourquoi, pour ce qui regarde les substances même corporelles, s'il y a dans la substance complète quelque puissance pour le non-être, ce n'est qu'à raison de la matière. Or les substances intellectuelles sont étrangères à la matière, et elles sont des substances complètes et simples. Donc elles n'ont pas la puissance de n'être pas. Donc elles sont incorruptibles.
5° Partout où il y a composition de la puissance et de l'acte, ce qui tient lieu de la puissance première ou du premier sujet est incorruptible. D'où il résulte que la matière première est incorruptible, même dans les substances qui sont soumises à la corruption. Or ce qui tient lieu de la puissance première et du sujet dans les substances intellectuelles, c'est leur substance complète elle-même. Donc elle est incorruptible. Or rien n'est corruptible que parce que sa substance est soumise à la corruption. Donc toutes les natures intellectuelles sont incorruptibles.
6° Si quelque chose est soumis à la corruption, c'est à raison de…
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