Saint Jean Bosco
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Re: Saint Jean Bosco
Don Bosco et Mgr Gastaldi étaient liés par une amitié de vieille date. L'influence du premier avait élevé le second d'abord sur le siège épiscopal de Saluces, puis sur le siège archiépiscopal de Turin. Leurs mères s'étaient connues et dévouées ensemble dans les services de l'Oratoire. Ensemble ils avaient élaboré le mémoire justificatif destiné à la Congrégation de l'Index ( 1867 ). Ensemble ils avaient combattu pour le dogme de l'Infaillibilité pendant le Concile du Vatican.
Mgr Gastaldi, promu à la métropole du Piémont ( 1871 ), change de sentiment. Pourquoi ? N'aurait-il pas été offusqué par la trop grande place prise dans son diocèse par les oeuvres salésiennes et par le prestige personnel de leur fondateur ? Ou plutôt ne fut-il pas l'aveugle dupe de trois de ses conseillers, en particulier le chanoine Emmanuel Colomiati ?
Quoi qu'il en soit, cette mésentente entre L'archevêque et Don Bosco fut pour celui-ci sa tribulation la plus sensible et la plus sentie ou, comme on lit dans les actes du procès de canonisation, elle fut " le creuset qui épura l'or de sa vertu de toute scorie terrestre ".
Don Ceria indique les positions : " Deux camps dans l'archidiocèse : d'un côté, Don Bosco, qui n'omet rien pour aplanir les dissentiments et, de l'autre côté, des gens qui s'ingénient de toutes manières à multiplier les incidents et à exaspérer le conflit. "
Que de démarches, que d'efforts échouèrent à cause de cette situation paralysante ! A-t-il besoin ( 1873 ) de lettres de recommandation pour obtenir de Rome l'approbation de ses règles ? Plus de quarante archevêques et évêques envoient des réponses remplies d'éloges chaleureux. Mgr Gastaldi est seul à prétendre que la Société salésienne manque de statuts convenables et qu'elle est sans avenir.
En 1874, Don Bosco est sur le point de commencer une oeuvre interdiocésaine de vocations tardives. Sept évêques l'approuvent, le Pape la bénit. Seul, Mgr Gastaldi désavoue et déclare que cette oeuvre serait " la ruine des Petits Séminaires diocésains, un attentat énorme contre les intérêts vitaux des diocèses respectifs " .
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
En mars 1875, Don Rua alla retirer à la Curie diocésaine les feuilles délivrant la faculté de confesser. Quelle ne fut pas sa stupeur en s'apercevant que les pouvoirs étaient concédés à l'ensemble des prêtres salésiens pour un an et à Don Bosco, leur Supérieur général, seulement pour six mois ! Il se tut prudemment. La victime n'en sut rien jusqu'à la Noël de la même année.
Le Saint avait reçu oralement du Pape de si amples licences qu'il n'y avait pas à l'inquiéter sur la licéité de ses absolutions. Ce fut le soir du 25 décembre que Don Rua le mit au courant.
Le coeur brisé, la face inondée de larmes, il se soumit. Il passa la nuit en prières, savourant l'opprobre et l'injustice. Le lendemain, il écrivit à Mgr Gastaldi une lettre respectueuse où il le suppliait de vouloir bien lui dévoiler les motifs de la suspense. Et, pour éviter le scandale de sa clientèle de pénitents, il se transporta dans une autre localité.
Les pouvoirs ne tardèrent pas à lui être rendus. Mais, tant que persista l'épreuve, il ne se départit pas un instant de sa révérence envers son archevêque, pas même de son amitié. Il n'eut pas une parole d'amertume. Ce fut, pour ses familiers, pour les rares témoins de ce calvaire qui ne fut pas public, un de ces exemples impressionnants qui affermissent à jamais l'autorité d'un chef.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
La plus absurde accusation dont on l'accabla plus tard avec une impudence renversante, ce fut l'invraisemblable grief d'avoir écrit ou inspiré quatre libelles diffamatoires contre l'archevêque. Celui-ci exigea une rétractation. Don Bosco innocent ne pouvait pas y consentir, c'eût été se reconnaître coupable; le 16 décembre 1881, il expédia à la Congrégation du Concile un mémoire détaillé. Dix jours après, une réponse privée du cardinal Nina le justifiait pleinement.
Deux fois de suite, Rome prononça un verdict favorable à la cause. Elle préparait une sentence définitive lorsque Léon XIII intervint. Il manda le cardinal Nina, protecteur des Salésiens.
--- Qu'on ne rende pas le jugement, déclara-t-il, afin de ne pas porter ombrage au prestige de l'archevêque. Nous avons trouvé la combinaison pour concilier la justice et l'autorité.
Et le Pape dicta un projet en sept articles dont voici le premier :
Don Bosco exprimera par lettre à Mgr Gastaldi son regret des fâcheux incidents qui ont pu, ces dernières années, altérer leurs rapports. Si Son Excellence a pu croire que lui ou quelques membres de l'Institut salésien ait été cause de tout cela, Don Bosco en demandera pardon et priera l'archevêque d'oublier le passer.
Le cardinal Nina hasarda une réflexion :
--- Très Saint Père, cette clause ne me paraît pas très juste.
--- Je le sais, répondit le Pape, mais j'ai tout calculé. Don Bosco se prêtera à tout : c'est un Saint. Je table sur sa vertu.
Lorsque, plus tard, l'un des deux plus puissants adversaires de Don Bosco rendit compte à Léon XIII de la soumission parfaite du fondateur des Salésiens, le Pontife repartit :
--- Nous le savions que Don Bosco obéirait. Et c'est pourquoi c'est à lui que Nous avons demandé de se soumettre et non pas à vous. Mais lui, c'est un saint.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
" Don Bosco a inventé le onzième commandement : il a fait de la joie un précepte. Que les surveillants ne s'imaginent pas que leur devoir est d'empêcher le tapage en récréation ; qu'ils prennent part aux jeux, sans compromettre leur dignité. Les bruyants ébats renouvellent le sang, détendent les nerfs, dissipent le mauvais esprit, prédisposent l'élève à plus d'attention pendant l'étude.(…)
(…)Qu'il y ait dans la cour une barre fixe, un trapèze, des appareils de sport. Qu'on s'y exerce à la gymnastique. Qu'on ménage même des excursions de longue haleine à travers les bois et les champs.(…)
Ces deux extraits me font voir un prof d’éduc. de mes connaissances…
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
J'en connais un moi aussi du même calibre serais-ce le même !
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Saint Jean Bosco
Monique a écrit: J'en connais un moi aussi du même calibre serais-ce le même !
Comme vous le savez chère Monique, nos connaissances, quelque soit le point de vue que l'on envisage, sont très limitées...
DEO GRATIAS...
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
VII LES FOULES DE PARIS
Par bonds de géants, l'Oeuvre salésienne envahit l'univers. Le Saint visita la plupart de ces fondations. Ce fut un grand voyageur. Dans son existence, tout s'opère sur un module gigantesque. Innombrables ses prédications, ses écrits, ses lettres; innombrables ses collèges, ses hospices, ses orphelinats; innombrables ses miracles; innombrables aussi ses randonnées en Italie et en Europe. De ces voyages nous ne raconterons que celui de 1883 à travers la France.
Parti de Turin le 31 janvier, il s'arrête à Nice, à Cannes, à Menton, à Toulon, à Marseille, en Avignon et à Moulins. Ce sont partout de telles démonstrations qu'un témoin, l'abbé Monnin, écrit : " Ce sont les mêmes scènes qu'à Ars et je m'y crois encore. "
En Avignon ( 2-4 avril ), c'est pour le voir, pour l'approcher, une presse inouïe, plus dangereuse que la crue du Rhône. Le jour du départ, la multitude qui l'accompagne à la gare se bouscule, se piétine.
On ne s'écarte pas sans emporter quelque chose, une bénédiction ou une relique. Tant et si bien qu'à force d'être tailladée par derrière à coups de ciseaux indiscrets, sa soutane laisse les dessous à découvert...
À Lyon ( 6-16 avril ) l'affluence est telle qu'il est obligé à Fourvière, après avoir béni les fidèles dans la basilique, de paraître aux fenêtres du rectorat pour bénir le peuple massé sur la place. Le cocher, impatienté des lenteurs du carrosse encombré, trahit son humeur par cette boutade :
--- Plutôt voiturer le diable qu'un saint à miracles !
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Le 19 avril, il est à Paris où il bénéficie d'une double résidence. Il couche chez des amis à l'hôtel de Combaud ( 34, avenue de Messine ), tandis qu'il reçoit l'après-midi dans la maison des Oblates du Sacré-Coeur ( 12, rue Ville-l'Évêque ). Levé à 5 heures, il se plonge dans l'oraison. Dès 6 heures, il dépouille son courrier de la veille. Des lettres pleuvent sur son bureau par centaines. D'urgence il appelle Don Rua et le charge des réponses.
Il célèbre chaque jour la messe dans un sanctuaire différent : il s'y rend vers 7h30, s'attarde à donner audience à la sacristie ou à la cure. Après le repas, il se transporte au couvent des Oblates, où la supérieure, Mlle de Sénilshac, a minutieusement organisé le service des réceptions; chaque nouvel arrivant prend un numéro. Cette précaution n'empêche pas l'engorgement de l'escalier, du vestibule et de la cour. Parfois, pour tromper l'attente, on récite le chapelet.
Inutile de s'enquérir où loge le Saint : il suffit, pour le rejoindre, de suivre la file interminable des voitures. Il ne rentre pas avant 22 heures à l'hôtel de Combaud où il signe la correspondance, s'abîme en prière et ne se met au lit qu'à minuit passé.
Sa première visite est pour l'archevêque, le cardinal Guibert, qui lui propose une collecte pour ses oeuvres à la Madeleine. Don Bosco se récuse, il souhaiterait qu'un autre parle à sa place. Le cardinal répond :
--- Paris vous croira plus qu'un autre.
Paris, en effet, " le grand Paris farouche ", indifférent, ironique, mais surtout le Paris le plus secret de la ferveur mystique, s'ébranle tout entier pour le voir, pour l'entendre, pour l'acclamer. Qu'a-t-il donc ce vieillard cassé, mi-aveugle, pour fasciner la Ville Lumière comme il a fasciné la Ville Éternelle et les cent une cités de la belle Italie ?
Nulla e tutto, il a tout et il n'a rien, répond Don Francesia. Il n'a pas les raffinements de la distinction mondaine ni les artifices de la diction. Mais de toute sa personne, de toute sa vie, rayonne la sainteté, une sainteté qu'attestent des oeuvres grandioses et des miracles semés à profusion.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Le 22 avril, il dîne rue François-1er chez les Assomptionnistes. Ceux-ci s'apprêtent à transformer la Croix-Revue en journal quotidien. Pour risquer pareille aventure, il faut de l'audace, il faut surtout de l'esprit de foi. Le P. Bailly revient justement d'un pèlerinage à Jérusalem où il a prié et fait prier à cette intention.
Durant les agapes, le P. Picard, un vieil ami de Don Bosco, lui soumet son dessein. Les échanges de vues sont repris un mois plus tard, à Grenelle, chez les Petites-Soeurs. Don Bosco applaudit à ce projet de vaillance, bouscule les dernières hésitations, bénit l'héroïque entreprise. Quatre jours après, le 24 mai, se tient le Conseil de la Congrégation où se décide la création de la Croix quotidienne.
Le 25 avril, chez les Petites-Soeurs de l'Assomption, il prédit la mort prochaine de la fondatrice, la Mère Marie de jésus. Comme il a coutume, c'est sur le ton familier qu'il prophétise, et d'une manière détournée. Il souhaite à la Mère de vivre autant que Mathusalem, c'est-à-dire 969 ans. Elle sourit de cet excès de bienveillance. Mais l'homme de Dieu n'a pas achevé sa pensée :
--- Vous trouvez que c'est trop ? Ôtons le premier chiffre, puis, diminuons d'une dizaine, reste...
La Mère s'étonne et même s'effraye un peu, elle est âgée de cinquante-neuf ans :
--- Mais, mon Père...
--- Acceptez, acceptez.
--- J'accepte, dit-elle.
Durant les agapes, le P. Picard, un vieil ami de Don Bosco, lui soumet son dessein. Les échanges de vues sont repris un mois plus tard, à Grenelle, chez les Petites-Soeurs. Don Bosco applaudit à ce projet de vaillance, bouscule les dernières hésitations, bénit l'héroïque entreprise. Quatre jours après, le 24 mai, se tient le Conseil de la Congrégation où se décide la création de la Croix quotidienne.
Le 25 avril, chez les Petites-Soeurs de l'Assomption, il prédit la mort prochaine de la fondatrice, la Mère Marie de jésus. Comme il a coutume, c'est sur le ton familier qu'il prophétise, et d'une manière détournée. Il souhaite à la Mère de vivre autant que Mathusalem, c'est-à-dire 969 ans. Elle sourit de cet excès de bienveillance. Mais l'homme de Dieu n'a pas achevé sa pensée :
--- Vous trouvez que c'est trop ? Ôtons le premier chiffre, puis, diminuons d'une dizaine, reste...
La Mère s'étonne et même s'effraye un peu, elle est âgée de cinquante-neuf ans :
--- Mais, mon Père...
--- Acceptez, acceptez.
--- J'accepte, dit-elle.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Le 28 avril, il célèbre le Saint Sacrifice et il prêche à Notre-Dame des Victoires. Bloqué par la foule sur les parvis, il faut, pour lui frayer un passage, que le clergé l'aille chercher processionnellement.
Le 29 avril, vers 15 heures, il monte en chaire à la Madeleine. On a dû fermer les portails dès 14 heures, tellement l'église est bondée. Et Don Bosco parle :
--- C'est de la jeunesse que nous avons à nous entretenir. La société de demain sera ce qu'est la jeunesse d'aujourd'hui. C'est votre Dupanloup qui a énoncé cette vérité... Vous vous demandez comment Don Bosco, pauvre et sans ressources, a pu fonder et soutenir tant d'oeuvres?
C'est le secret de la miséricordieuse bonté de Dieu qui se complaît à favoriser nos efforts, parce que le bien de l'Église et de la société provient de la bonne éducation de la jeunesse. La Sainte Vierge s'est faite pour nous quêteuse. C'est elle qui nous procure les moyens de construire nos maisons et nos chapelles. Nous avons cheminé sous sa protection. Elle bénit ceux qui s'occupent de la jeunesse.
L'auditoire écoute émerveillé, commotionné par cette simplicité évangélique, par cet accent de sincérité nue. Et les portefeuilles s'ouvrent comme les coeurs. En quelques minutes, la collecte recueille 10 000 francs, sans compter les bijoux et pierreries.
Le même thème, il le reprend à Saint-Sulpice le 1er mai :
--- Le plus important, c'est d'éduquer la jeunesse. Commencez dans vos familles : élevez bien vos enfants. Si vous connaissez un orphelin, prenez-en un soin affectueux... !
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Le 3 mai, à Sainte-Clotilde, il donne audience, après sa messe, à un torrent de visiteurs. Il se tient debout sur le marchepied devant le meuble de la sacristie. Et le flot se déroule sans discontinuité. Soudain, harassé, il dit au comte de Franqueville :
--- Impossible de contenter tout ce monde. Je ne tiens plus sur les jambes. Convenons que chacun ne dira qu'un mot.
La convention est agréée. Au rythme de quarante à la minute, les visiteurs défilent un par un et jettent au passage leurs intentions :
--- Pour ma mère malade.
--- Pour mon fils égaré.
--- La conversion de quelqu'un qui m'est cher.
--- Pour que mes affaires marchent mieux...
Au bout de deux heures, Don Bosco demande :
--- Sont-ils encore nombreux ?
--- Environ cinq cents.
On apporte un café, Don Bosco le prend et continue les réceptions. Une autre heure s'écoule, il s'informe :
--- Combien sont-ils encore ?
--- Ils sont... ils sont... ils sont des millier.
--- Il faut couper court. Mes jambes refusent le service.
Don Bosco se dérobe par une porte qui donne de la sacristie dans la cure et, de là, se dirige vers l'hôtel de M. Baudon, président de la Société de Saint-Vincent de Paul. Quelqu'un crie l'adresse de M. Baudon. On s'y précipite, on s'y rue. On y parvient avant Don Bosco qui ne réussit à s'y introduire qu'au prix de mille peines.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Durant ces jours, le trajet qui sépare la Madeleine du couvent des oblates est impraticable. Une fois, Don Bosco espère l'abréger en le faisant à pied. Il descend de voiture, se faufile parmi les curieux. Mais un remous de la masse l'immobilise contre un portail; il doit pour se dégager, se réfugier dans une courette. Il en sort avec difficulté et tente de fendre la foule.
Il arrive enfin au 12 de la rue Ville-l'Évêque, s'engage dans l'escalier, pousse en avant. Effort perdu ! nouvel arrêt forcé ! Les gens qui stationnent sur les gradins sont serrés coude à coude, comprimés entre la paroi et la rampe :
--- De grâce, laissez-moi passer, implore Don Bosco.
--- Par exemple ! protestent les premiers occupants. Nous sommes ici avant vous, Monsieur l'abbé. J'ai le numéro 15.
--- Je suis le vingtième.
--- Et moi le douzième.
Désespérant d'avancer, il hasarde.
--- Au moins, permettez que je me repose un peu.
--- Non ! non ! s'exclament plusieurs voix. Vous avez pris rang avant nous. C'est une intrusion. À votre place !
--- D'accord ! Mais vous avouerai-je, Messieurs, que si on ne me laisse pas passer, il ne vous sera pas facile de causer avec Don Bosco ?
--- Pourquoi ? Pourquoi ?
--- Parce que Don Bosco, c'est moi.
--- Farceur ! réplique-t-on en riant de bon coeur.
C'est un malade qui profite du quiproquo. Renonçant à pénétrer dans son domicile, Don Bosco va réconforter un infirme.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Par un sentiment d'exquise délicatesse envers les dames qui, le 2 mai, avaient fait la quête pour lui à Saint-Sulpice, il leur a promis une visite qui a lieu à la librairie Josse, rue de Sèvres, 31. Il est entendu que la réunion sera strictement privée. Mais quelle langue indiscrète a divulgué le secret ?
Toujours est-il que, pour s'y rendre, Don Bosco doit traverser une impénétrable marée humaine, et qu'après la séance les flots de la multitude se sont encore épaissis et s'étendent à perte de vue. La voiture qui l'emporte ne peut démarrer. Tout à coup des voix s'élèvent; dix voix, cent voix, mille voix poussent un cri unanime répercuté par toute la rue de Sèvres et par le square du Bon Marché :
--- Don Bosco, votre bénédiction !
Cri de foi ardente, de supplication intense ! Cri de reconnaissance des employés sortant des magasins, des usines, des opprimés de l'existence, mieux préparés que d'autres à comprendre le coeur du père des orphelins et à s'éprendre pour lui d'admiration et d'amour ! L'homme de Dieu se dresse dans le fiacre, et d'un geste large bénit ce peuple qui se découvre et s'incline. Au silence succède une ovation formidable :
--- Vive Don Bosco !
On désire sa visite comme celle d'un ange; des communautés l'implorent du ciel par des neuvaines. Le cardinal Guibert donne des ordres pour qu'au Grand Séminaire on lui rende " tous les honneurs possibles ". Les saint-cyriens ne se montrent pas moins prodigues d'hommages que les futurs prêtres. En son honneur, ô miracle, les Sulpiciens eux-mêmes dérogent à la règle.
Toujours est-il que, pour s'y rendre, Don Bosco doit traverser une impénétrable marée humaine, et qu'après la séance les flots de la multitude se sont encore épaissis et s'étendent à perte de vue. La voiture qui l'emporte ne peut démarrer. Tout à coup des voix s'élèvent; dix voix, cent voix, mille voix poussent un cri unanime répercuté par toute la rue de Sèvres et par le square du Bon Marché :
--- Don Bosco, votre bénédiction !
Cri de foi ardente, de supplication intense ! Cri de reconnaissance des employés sortant des magasins, des usines, des opprimés de l'existence, mieux préparés que d'autres à comprendre le coeur du père des orphelins et à s'éprendre pour lui d'admiration et d'amour ! L'homme de Dieu se dresse dans le fiacre, et d'un geste large bénit ce peuple qui se découvre et s'incline. Au silence succède une ovation formidable :
--- Vive Don Bosco !
On désire sa visite comme celle d'un ange; des communautés l'implorent du ciel par des neuvaines. Le cardinal Guibert donne des ordres pour qu'au Grand Séminaire on lui rende " tous les honneurs possibles ". Les saint-cyriens ne se montrent pas moins prodigues d'hommages que les futurs prêtres. En son honneur, ô miracle, les Sulpiciens eux-mêmes dérogent à la règle.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Ravie par sa parole, la générosité française, durant ce seul voyage, jette dans son escarcelle au moins 400 000 francs-or. Des ministres, des sénateurs, des princes du sang, des célébrités de la science et de la littérature, vont le consulter et l'écoutent comme des enfants. Don Lemoyne mentionne Paul Bert et Victor Hugo.
En ce qui concerne Paul Bert, Don Lemoyne a dû confondre ce personnage avec un autre. Cet anticlérical ne fut sûrement pas tenté de se convertir en mai 1883 : le 29 de ce mois, il prononçait au Grand-Théâtre de Lyon un discourt agressif sur l'Église et la liberté.
Victor Hugo eut, avec Don Bosco, deux entrevues. De la première, le Saint lui-même, de retour à Turin, dicta le compte rendu à son secrétaire. Dans cet entretien, Hugo avait simulé l'incroyance. L'homme de Dieu avait troublé sa fallacieuse quiétude. Le poète, fortement ému, avait promis de réfléchir sur ce qui adviendrait de lui après la mort et de revenir lui en parler.
De la seconde entrevue, le Saint ne dicta la relation qu'après la mort de son interlocuteur. Il y a lieu de croire que ce rapport laconique est volontairement incomplet, la conversation ayant sans doute effleuré des secrets de conscience. Nous y lisons :
Victor Hugo saisit la main de Don Bosco et sans desserrer l'étreinte il lui dit :
--- Je ne suis pas ce personnage que vous avez peut-être cru. Ce fut de ma part une feinte, j'ai joué l'incrédule. Je suis Victor Hugo et je vous pris de vouloir bien être mon ami. Je crois au surnaturel, je crois en Dieu et j'espère mourir entre les mains d'un prêtre catholique qui recommande mon esprit au Créateur.
Contrairement au voeu du poète, ces visites ne furent suivies d'aucune autre, le Saint ayant quitté Paris peu après la seconde.
La première eut lieu à Auteuil, le 5 mai, autour de l'heure de midi, dans le pavillon de l'abbé Roussel, fondateur de l'Oeuvre des Orphelins-Apprentis. M.Boullay, avocat, certifie avoir reconnu Victor Hugo sortant du susdit pavillon. Craignant une confusion, il questionna le même jour sur ce point Don Bosco et l'abbé Roussel. Tous deux convinrent qu'il ne s'était pas trompé sur l'identité du visiteur, mais recommandèrent le silence.
La seconde visite eut lieu au numéro 12, rue Ville-l'Évêque, vers 11 heures du soir, quelques jours après la sépulture de Juliette Drouet ( 12 mai ). Depuis ce deuil, le poète souffrait d'isolement, une moitié de lui avait émigré dans l'autre monde : " Elle à demi vivante et lui à demi mort. "
C'est dans ce moment de dépression terrible qu'il recourut à l'homme de Dieu et que, l'orgueil s'étant tu pour un instant, il avoua ses craintes, s'humilia jusqu'à implorer son secours amical.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Mme Lesclide ( secrétaire de Victor Hugo ) a démenti ces entrevues. Le P. Auffray a publié et réfuté sa lettre de dénégation dans le Bulletin salésien ( mai 1935 ). Aux solides arguments qu'expose l'éminent écrivain, nous sommes en mesure d'ajouter une confirmation piquante. Nous opposerons à Mme Lesclide épiscolière Mme Lesclide auteur.
Nous avons vu que la perte de Juliette Drouet avait mis Victor Hugo dans un état, pour ainsi dire, de réceptivité par rapport aux pensées graves des fins dernières. Mme Lesclide le nie :
" Quand à la mort de Juliette Drouet, enlevée par un cancer de l'estomac qui la martyrisait, son vieil ami considéra ce douloureux événement comme une délivrance bien plus que comme une catastrophe.
Mme Lesclide écrit cela dans sa lettre ( 18 octobre 1929 ). Elle ne se souvient plus qu'en 1902 elle avait écrit le contraire. On lit, en effet, dans Victor Hugo intime ( p. 263 ) :
Cette mort ... impressionna fortement le poète.
Ce deuil fit, sur l'illustre vieillard, un effet qu'il chercha à se cacher lui-même. " Les morts, disait-il, ne sont pas absents : ils sont invisibles. " Mais son amie disparue semblait l'appeler de l'au-delà de la tombe.
Autre contradiction : elle écrit en 1929 :
Chez Victor Hugo on se mettait à table à 8 heures; on en sortait vers 9 h. 30, et ses hôtes ne le quittaient guère avant 11 heures ou 11 h. 30. Cet ordre établi était invariable.
Si vraiment ce régime était invariable, il est impossible d'admettre, selon le texte dicté par Don Bosco, que le poète ait été introduit auprès de lui à 11 heures du soir après trois heures d'antichambre.
Mais Mme Lesclide avait écrit dans son livre ( p. 300 ) :
On ne sortait de table à 8 heures. Vers 9 h. 30, le maître fermait les yeux dans son grand fauteuil et ses hôtes prenaient congé.
Cet horaire concorde avec la version salésienne. Il permet de penser que, ce soir-là, Victor Hugo s'absenta plus tôt du repas et, à l'insu de ses commensaux, profita, comme Nicodème, des ténèbres propices pour se rendre incognito au numéro 12, rue Ville-l'Évêque où il fut reçu après environ trois heures d'attente.
Mme lesclide, en 1929, a sans doute oublié de consulter son propre livre. Nous préférons sa rédaction de 1902, parce qu'à cette époque ses souvenirs étaient plus récents et qu'elle les contrôlait sur les notes laissées par son mari.
Dès lors, son témoignage d'auteur corrobore l'affirmation que prétend récuser son témoignage d'épistolière.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
VIII " ENVOYÉ POUR LES JEUNES "
Cette traversée de la France, c'est en vue des jeunes que Don Bosco l'avait affrontée, en vue de leur gagner du pain et des amis. Ce fut un jeune, l'angélique Louis Colle, envolé au ciel depuis deux ans, qui, durant ce voyage, lui apparut à plusieurs reprises et lui tint compagnie. Son passage suscita, raffermit par douzaines, des vocations d'adolescents.
Jamais orientation d'une vie ne fut plus précoce, plus nette et plus une. Dès la cinquième année, son goût des enfants se révèle naïvement. Il lui semble déjà que l'unique chose à faire ici-bas, c'est de rassembler ses camarades, d'écarter la dispute et de leur apprendre à servir le bon Dieu dans la joie. Il fut écrivain, bâtisseur, chargé de mission, il fut surtout éducateur. Il a dit :
--- Le Seigneur m'a envoyé pour les jeunes. Aussi faut-il que je me restreigne sur les autres champs d'activité et que je réserve pour eux tout ce que j'ai de santé.
La pensée des jeunes ne le quitte pas un instant, selon le mot de Don Francesia : Sempre col pensiero ai suoi Giovanetti. Lorsqu'en 1870 Pie IX, désireux de l'attacher à son service, lui propose de quitter Turin et de s'installer à Rome. Don Bosco gêné par l'insistance du Pape, finit par avouer sans détours qu'il aime trop ses jeunes pour se séparer d'eux.
Lorsque du seuil de la tombe il se retourne vers son passé, il l'aperçoit, d'un bout à l'autre, illuminé par un songe divin. Tandis qu'il célèbre la messe dans l'église du Sacré-Coeur à Rome ( 16 mai 1887 ), ses larmes coulent d'abondance. Pourquoi cette émotion ?
Le saint vieillard vient de se revoir tout petit, quand il avait 9 ans. Le songe qu'il eut alors, ce songe qui projetait devant lui le panorama de sa vie, le film prestigieux de sa vocation, il vient de se dérouler de nouveau.
La campagne des Becchi s'est étalée sous ses yeux, il a eu le spectacle des voyous hurlants et rétifs, il a entendu l'Homme blanc : " Non pas à coups de poing, mais par la douceur ! " Il a revu la scène de l'investiture où la Maestra lui commit le soin des jeunes, la mission de transformer les loups en agnelets par le système de l'amorevolezza. La Dame lui avait dit :
--- Plus tard tu comprendras.
Ah ! comme il comprend aujourd'hui ! comme il sent sa faiblesse, son impuissance à rendre grâces ! Voilà pourquoi son Magnificat s'étrangle dans les sanglots.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Vers la fin de 1887, sentant la mort prochaine, il déclare :
--- Tant qu'il me restera un fil de vie, ce sera pour mes chers jeunes, pour leur avantage spirituel et temporel !
Invité à écrire des maximes au verso de quelques images, il en profite pour chanter la béatitude des coeurs purs. Citons quelques sentences :
Les jeunes sont les délices de Jésus et de Marie.
Heureux ceux que se consacrent à Dieu dès la jeunesse.
Celui qui protège les orphelins sera béni de Dieu pendant sa vie et protégé par Marie à l'heure de la mort.
Depuis le 3 décembre, il a dû renoncer à dire la messe, mais il confesse encore. Quand ce sont des jeunes qui se présentent, il ne résiste pas. Il leur donnerait jusqu'à son dernier soupir. Un soir ( 17 décembre ), ils sont là une trentaine qui frappent à la porte. L'infirmier refuse d'ouvrir. Mais Don Bosco, profondément remué, cède comme toujours :
--- Faites entrer, dit-il. Cette fois, ce sera la dernière des dernières.
--- Tant qu'il me restera un fil de vie, ce sera pour mes chers jeunes, pour leur avantage spirituel et temporel !
Invité à écrire des maximes au verso de quelques images, il en profite pour chanter la béatitude des coeurs purs. Citons quelques sentences :
Les jeunes sont les délices de Jésus et de Marie.
Heureux ceux que se consacrent à Dieu dès la jeunesse.
Celui qui protège les orphelins sera béni de Dieu pendant sa vie et protégé par Marie à l'heure de la mort.
Depuis le 3 décembre, il a dû renoncer à dire la messe, mais il confesse encore. Quand ce sont des jeunes qui se présentent, il ne résiste pas. Il leur donnerait jusqu'à son dernier soupir. Un soir ( 17 décembre ), ils sont là une trentaine qui frappent à la porte. L'infirmier refuse d'ouvrir. Mais Don Bosco, profondément remué, cède comme toujours :
--- Faites entrer, dit-il. Cette fois, ce sera la dernière des dernières.
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Il expire à l'aube du 31 janvier 1888.
Le lendemain, devant sa dépouille exposée à l'église, défilent plus de quarante mille personnes. Le soir, à portes closes, c'est l'adieu palpitant des jeunes. Dans une courte allocution, Don Francesia interprète le sourire du défunt, ce sourire qui semble prolonger plastiquement l'une de ses dernières paroles :
--- Dites à mes chers jeunes que je les attends tous en paradis.
Ce mort n'effarouche pas les enfants; il les attire par je ne sais quel air de bonté qui respire sur sa face. Vainement donne-t-on le signal de partir pour le dortoir. Ils s'attardent là, figés à genoux dans un recueillement coupé de soupirs et de larmes.
Plus de cent mille personnes suivirent le convoi funèbre. On l'ensevelit à Valsalice. Les Turinois pleurèrent quarante ans l'absence de ce précieux corps, palladium de leur cité. Quand il fut béatifié ( 2 juin 1929 ), ils s'empressèrent de réclamer ses reliques.
L'honneur échut à des jeunes de les transporter sur leurs épaules dans une châsse de cristal et d'or et de les accompagner triomphalement jusque sous les voûtes de Notre-Dame Auxiliatrice, aux accents enthousiastes de cette strophe vibrante, scandée par les cuivres et reprise à l'unisson par plus de cent mille poitrines :
Reviens, Bosco, parmi les jeunes, daigne entendre
Leur appel frémissant de joie et d'amour tendre.
FIN DEO GRATIAS
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Arthur a écrit:Reviens, Bosco, parmi les jeunes, daigne entendre
Leur appel frémissant de joie et d'amour tendre.
Merci Arthur pour cette belle histoire de Saint Jean Bosco, très connu mondialement; c'est la première fois que je lis une histoire de Don Bosco
racontée de cette façon. Que Dieu vous garde cher ami, ainsi que tous vos jeunes...
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Saint Jean Bosco
Merci Robert. Tout pour la gloire de Dieu !
Arthur- Nombre de messages : 1614
Date d'inscription : 15/02/2009
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