Saint Jean Bosco

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Message  Arthur Jeu 10 Sep 2009, 9:05 am

Il est malaisé d'analyser la psychologie d'un thaumaturge de cette taille, d'un voyant de cette envergure. Ce qui est certain, c'est que la responsabilité de si sublimes charismes est infiniment lourde à porter. Un jour, félicitant Don Trione de ses succès missionnaires, Don Bosco se prit à lui dire :


--- Je pense à une chose... Si je t'obtenais le dons des miracles...

--- Rien de mieux. Je convertirais plus facilement les pécheurs.

Mais le saint de répondre, pensif et grave :

--- Si tu l'avais, ce don, tu ne tarderais pas à supplier Dieu avec larmes de te l'ôter.

Arthur

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Message  Arthur Ven 11 Sep 2009, 8:24 am



IV L'HOMME DE LA PROVIDENCE



L'empire du monde appartient à l'argent. Cela est vrai surtout, comme l'expose Balzac en maint passage de la Comédie humaine, depuis le XIXe siècle, depuis la transformation de la propriété foncière en richesse immobilière, depuis l'avènement du capital.


Or, c'est précisément dans ce siècle de la matière et du métal sonnant, du trust et de l'agio, qu'a surgi un homme qui, sans nom, sans commerce, sans industrie, sans ressource humaine d'aucune sorte, a mis sur pied des oeuvres dont la fondation et l'entretien ont exigé des millions et des millions.


Comment cet homme les a-t-il trouvés ? Par quel secret d'alchimiste ? Par quelle géniale découverte ?


Cet homme ne possédait d'autre trésor, d'autre recette que sa foi en la Providence; mais c'était la foi des saints, la foi qui transporte les montagnes.


Certain d'opérer les oeuvres de Dieu, il ne doutait pas que Dieu lui fournirait de quoi les faire, et d'autant plus royalement que son serviteur manifesterait envers lui plus de confiance. Il ne se croyait pas plus qu'un instrument informe et indocile. Or, ce n'est pas à l'instrument de prévoir les moyens et de les procurer, c'est à l'architecte, au maître de l'oeuvre, qui n'est autre que le Tout-Puissant et l'Opulence essentielle.


Il estimait nécessaire de donner à la Providence une preuve quotidienne d'abandon entre ses mains en dépensant au jour le jour, sans amasser de réserve pour le lendemain.

Arthur

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Message  Arthur Mer 16 Sep 2009, 8:32 am



Ce n'était pas toujours l'avis de l'économe général. Cette fonction avait été dévolue à Don Rua.


Au soir du 29 avril 1879, celui-ci est amené à expliquer pourquoi, provisoirement, il n'éteint pas les dettes courantes. La caisse ne renferme que
28 000 lires; cette somme est intangible, elle doit couvrir une échéance qui tombe dans quinze jours. Don Bosco réplique :


--- Commençons par nous défaire de tout notre avoir. Mettre de côté, c'est compter sur soi, c'est barrer la route à la Providence. Voulez-vous qu'elle prenne en mains nos affaires ? Allez à l'économat et, dès demain, employez toutes vos disponibilités. Soldez les dettes que vous pouvez solder. Pour les autres, elle y pourvoira. Si vous vous lancez dans les calculs excessifs, c'est alors plutôt que je redouterais la banqueroute. Où pénètre l'homme, Dieu se retire.


Lorsque s'abat la grêle des factures, c'est le moment d'intensifier l'acte de foi, de redoubler les prières et de tenter les démarches que Dieu inspire à l'âme confiante.

Arthur

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Message  Arthur Mer 16 Sep 2009, 8:23 pm


Un jour, Don Bosco ne paraît pas au dîner. Il a demandé à quelques séminaristes, choisis parmi les plus pieux, d'aller trois heures durant au pied du tabernacle. Lui-même il est sorti. Il ne rentre qu'à la brune, tranquille et serein comme au départ.


Le matin, il lui manquait 10 000 lires; le soir, il les rapporte dans son portefeuille. Il est aller invoquer la Madone de la Consolata et, au sortir de là, un domestique, messager d'un donateur anonyme, lui a remis une liasse de bons de la Dette publique, exactement la somme attendue : 10 000 lires.


Une autre fois, à Rome, en 1882, il est à bout de ressources. Il faut verser dans quelques heures 5 000 lires à l'entrepreneur de l'église du Sacré-Coeur. Le jour même, il reçoit de France une lettre chargée. Valeur déclarée : 4 000 francs. Il déchire l'enveloppe, il compte... cinq billet de mille.


Des faits analogues, on en pourrait aligner par centaines.

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Message  Arthur Sam 19 Sep 2009, 9:40 am


Collaborer avec la Providence, c'est d'abord la prier. C'est ensuite n'avoir pas honte de quêter. On a beau tendre la main pour les autres, ce geste comporte toujours une humiliation, un sacrifice héroïque. Don Bosco ne s'y résolvait qu'après avoir regardé son Crucifix. Mille et mille fois il affronta cette confusion si coûteuse à sa fierté native.


En cette matière, nul ne porta la délicatesse plus loin que lui. Il dit à une pauvre vieille qui a économisé 100 lires sou par sou :


--- Je n'y toucherai qu'après votre mort. D'ici là, je les garde à votre disposition.


Et, dès que la vieille est tombée malade, il se rend chez elle pour s'informer si elle a besoin d'argent.


Deux époux sans enfants lui ont offert 6 000 lires qui ont été dépensées dans la construction de Sainte-Marie-Auxiliatrice. Don Bosco, ayant su que dans la suite ces généreux donateurs languissaient dans l'indigence,accourut chez eux, proposa de leur restituer la somme. Le mari refusa en pleurant, c'est à la Madone qu'ils ont donné, on ne reprend pas une offrande, Don Bosco insista :


--- Eh bien, c'est de la Madone que vous accepterez quelques subsides.


Et, à partir de ce jour, il leur régla une mensualité de 100 lires.

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Message  Arthur Lun 21 Sep 2009, 8:22 am


On confie plus volontiers ses aumônes entre les mains de ceux dont on contraste l'esprit de détachement. Don Bosco, visiblement, ne tient pas à un fil. Pour s'en convaincre, il suffit d'examiner sa mise, ses gros souliers, son unique soutane, la même en toute saison, qu'il porte râpée et verdie, de telle sorte que, pour certaines visites, il est obligé d'emprunter celle d'un confrère.


Il suffit d'examiner son linge de toile rêche, son castor passé. Il suffit de jeter un coup d'oeil dans sa cellule dont, pendant quarante ans, il ne renouvelle pas le mobilier frustre et désuet. Durant son absence, l'économe a cru bien faire d'embellir sa chambre de quelques dessins décoratifs, de quelques pochoirs. À son retour, il ordonne qu'on la badigeonne au lait de chaux.


En hiver il n'use même pas de chancelière. Une descente de lit, c'est du luxe, il s'en passera toujours. Un jour, ô scandale ! dans une maison salésienne on le loge dans un appartement orné de tapis ! Il en blâme publiquement le supérieur.


Quand le ministre de la Guerre lui envoie des effets militaires usagés, il se traite lui-même comme ses orphelins, se taille une douillette dans une capote noire, jette sur son lit en guise d'édredon une housse de cheval.


En voyage, si le trajet n'est pas trop long, il marche à pied, ne se permet dans les trains que les troisièmes classes. Devant l'un des siens qui s'était payé des premières, il eut ce mot sévère :


--- Voilà un gaspillage ! voilà un affront à la divine Providence !

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Message  Arthur Mar 22 Sep 2009, 8:18 am


Il ignore le népotisme. Il essaya bien d'orienter quelques neveux vers le sacerdoce; mais, dès qu'il eut reconnu l'absence de vocation, il les renvoya chez eux.


L'homme de la Providence au service des pauvres, particulièrement de l'enfance abandonnée, c'est ainsi qu'il se définit, et pour bien montrer qu'il est tel et non pas le courtisan des riches, il affecte de frayer avec les petites gens, avec les gamins, avec les ouvriers, fussent-ils loqueteux et malpropres, sans s'inquiéter des critiques que soulève parfois le spectacle d'une telle compagnie. Il répond à Pie IX qui offre de le nommer camérier secret :


--- Sainteté, quelle belle figure ferais-je au milieu de mes garçons avec le titre de Monseigneur ! Ils ne me reconnaîtraient plus. Je n'aurais plus toute leur confiance. Ils n'oseraient plus m'aborder.


À un ministre qui lui propose la décoration de l'Ordre des Saints-Maurice et Lazare, il oppose le même motif et, ne songeant qu'aux jeunes, il demande et obtient qu'en échange de l'honneur on lui alloue une subvention annuelle pour l'Oratoire.


S'il jubile d'entendre monter vers Marie Auxiliatrice des cantiques d'action de grâces, en revanche il s'effraye, il s'alarme quand on l'acclame comme un thaumaturge, quand on se presse autour de lui pour lui baiser la main, pour lui faire toucher des chapelets ou bénir des enfants. Les yeux baissés, les mains jointes, il répète comme une supplication :


--- Priez pour moi, priez pour moi !


Il prétend que, si la Madone intervient, opère des prodiges, C'est parce qu'elle cède aux prières des jeunes, c'est parce qu'elle est favorable aux malheureux. Ses prières à lui n'entrent pour rien dans ces merveilles, ou pour si peu, qu'il défend à ses fils de penser le contraire ou de le laisser croire au peuple.


--- Mais enfin, lui dit un jour le P. Félix Giordano, des Oblats de Marie, vous ne nierez pas que vous avez créé des oeuvres colossales. Vous avez réussi des entreprises dont nul autre que vous n'aurait conçu et réalisé l'incomparable grandeur.


Don Bosco répond :


--- Sachez que je n'y suis pour rien. C'est le Seigneur qui a tout fait. Quand le bon Dieu a formé quelque dessein de miséricorde, il cherche pour l'exécuter l'instrument le moins apte. Voilà justement mon cas. Il me connaît depuis longtemps et je puis vous certifier que si, dans l'archidiocèse de Turin, il avait trouvé un prêtre plus misérable et plus chétif que moi, c'est à celui-ci qu'il se serait adressé, et il aurait laissé le pauvre Don Bosco à sa vocation naturelle de curé de campagne.

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Message  Arthur Mer 23 Sep 2009, 7:56 pm


L'homme de la Providence est un guetteur infatigable, un chasseur d'âmes. En lui s'incarne, par lui travaille la volonté salvifique de Dieu. Pour gagner les hommes au royaume des cieux, il déploie toutes les ruses d'un amour aussi respectueux qu'entreprenant et tenace.


Reçoit-il un nouvel élève ? Il accueille par des propos mi-plaisants, mi-sérieux. Bientôt sa voix se fait basse et profonde, comme si elle montait du coeur :


--- Parlons maintenant de choses plus importantes. Il faudra que nous soyons amis, n'est-ce-pas ? Veux-tu être mon ami. Tu étais brave chez toi. Ici tu le seras davantage, n'est-il pas vrai ? Tu comprends bien ce que je veux ? Je veux que nous allions ensemble au paradis.


L'apôtre a charge d'âmes. Jusque dans ses sommeils il entend la menace de Jéhovah : " Si par ta faute le méchant meurt dans son iniquité, je te demanderai compte de son sang. " ( Ezéchiel, III, 18. )


C'est pourquoi il appréhende anxieusement que ceux qui lui sont confiés ne correspondent pas à ses avances. Don Bosco est tellement imprégné de cette crainte habituelle qu'il a coutume, quand il rencontre l'un ou l'autre de ses jeunes, de lui dire, après avoir amorcé le discours par un mot piquant :


--- Je veux que tu sois mon ami. Tu sais ce que cela signifie ? Être l'ami de Don Bosco, cela signifie que tu dois m'aider.


Et, scandant les paroles sur un ton passionné, il ajoute :


--- Tu dois m'aider à sauver ton âme. Le reste m'importe peu.

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Message  Arthur Jeu 24 Sep 2009, 7:36 pm



Un veneur à l'affût ! Pas de comparaison plus exacte. Aucun des siens n'échappe à son regard qui semble omniprésent, et de chacun il connaît par le menu les qualités, les défauts, les combats. Il cueille au vol l'instant psychologique de l'observation, ou de l'encouragement.


Cet avis, d'ordinaire, il les décoche au passage comme un trait lancé à l'improviste, il les glisse en un raccourci pénétrant, dans une allusion évocatrice. On a relevé une longue liste de ces mots à l'oreille. Citons en quelques-uns :


La mort plutôt que le péché ! De grâce, aide-moi à sauver ton âme ! Tâche de faire une bonne lessive ( confession ). Tu en éprouveras un grand bonheur. Hardi ! Tiens bon ! On se retrouvera là-haut près du Seigneur. La Madone réclame de toi une fleurette. Apprends un peu mieux tes leçons.


Ah! ces fameux camarades ! Courage ! invoque Marie : elle ne demande qu'à t'aider. Continue, la Madone te sourit. Jésus t'attend à l'église pour une courte visite. Si tu pouvais voir l'état de ton âme ! Si tu mourais cette nuit...! Pourquoi ne vas-tu pas communier plus souvent ?


Celui-ci évite son approche et son regard trop perçant. Don Bosco lui passe derrière à pas feutrés et délicatement lui couvre les yeux des deux mains :


--- Devine qui c'est ?


L'enfant épelle une kyrielle de noms, et, quand Don Bosco se dévoile, il dérobe ausitôt ses yeux en les fixant à terre, tant il redoute ce regard scrutateur. Mais Don Bosco doucement :


--- Pourquoi me fuis-tu ?

--- Je ne vous fuis pas.

--- Alors, soyons ami. Écoute.

Et de lui murmurer à l'oreille le mot qui lui convient.

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Message  Arthur Lun 28 Sep 2009, 8:31 am



Exorable à qui se repent, la Providence exècre le criminel obstinément ancré dans le mal et le poursuit par des peines tantôt émendatives, tantôt vindicatives. De même l'apôtre n'a pas d'autre adversaire ni d'autre haine que le péché. Ce monstre intolérable, ce fléau de la création, Don Bosco le débusque, le traque et l'extermine. En sa présence il éprouve une telle horreur qu'il en défaille.


Un soir, après les prières, devant les professeurs, les étudiants, les artisans et les familiers assemblés dans la cour sous les arcades, il monte sur un escabeau. Il évoque le prix du sang rédempteur, il évoque ses propres tracas, ses sueurs, se tourments, ses veilles, ses privations.


Pour qui ce sacrifice du Christ ? Pour qui ces renoncements de Don Bosco et de ses collaborateurs ? Pour le salut éternel des jeunes. Et, pourtant il y a parmi eux des larrons, il y a parmi eux des assassins, il y a parmi eux des démons ravisseurs.


--- Que leur ai-je donc fait à ceux-là ? Quel tort ? quelle offense ? Ne les ai-je pas aimés suffisamment ? Ne leur ai-je pas donné tout ce que j'ai pu ? Ne les ai-je pas admis à toutes les confidences de l'amitié ? Auraient-ils dans le monde bénéficié de l'instruction, de l'éducation, du régime, des espérances d'avenir dont ils jouissent à l'Oratoire ?...


Ceux-là, je les connais tous, et si je ne les nomme pas tous, qu'ils ne s'imaginent pas que je ne suis pas renseigné. Je n'en désignerai que quelques-uns par leurs nom et prénom.


Les coupables morfondus halettent d'épouvante, tremblent sur leurs jambes. Don Bosco, inflexible, continue :


--- Assassin,toi, N..., qui rôdes comme un loup parmi tes camarades, qui les éloignes des supérieurs, tournant leurs conseils en dérision ! Larron, toi, N..., qui ternis par tes discours déshonnêtes la candeur de l'innocence ! Assassin ! toi, N..., qui, au moyen de certains billets, de certains livres, de certaines cachotteries, arraches à Marie les enfants blottis sous son manteau ! Démon, toi, N..., qui pervertis tes compagnons et, par des moqueries, les écartes des sacrements.


Scène terrible, comme le sera sur un champ plus vaste le jugement dernier ! Il en nomme six. Chaque nom démasque une figure penaude et consternée, provoque un cri de saisissement ou un sanglot. Les brebis galeuses flageolent, cherchent appui contre un pilier, contre un mur. Sur un signe du maître, les assistants se retirent muets, sans respiration. Les prêtres et les clercs se rangent à distance.


Alors, les six mauvais sujets s'avancent confus, suppliants, vers leur père irrité, lui baisant les mains, s'accrochant à sa soutane. Celui-ci les regarde, tandis qu'une larme lui coule sur la joue. De part et d'autre, pas une parole. Mais Don Bosco est trop fin psychologue, trop expert en la médecine pastorale, pour les envoyer au lit sur une impression de désespoir.


Ce n'est qu'après avoir glissé à l'oreille de chacun un mot de réconfort qu'il les quitte et qu'il va dans sa chambre passer la nuit en prières.

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Message  Arthur Mar 29 Sep 2009, 8:24 am

--- Donne-moi ton âme !


Cette requête ardente, il ne l'adresse pas seulement aux élèves actuels, il l'écrit à ses anciens, à ceux qui s'établissent au loin. où qu'ils soient, il les suit par sa sollicitude, pas ses lettres; il intercède pour eux. Il faut avec lui renverser la formule : Loin des yeux, près du coeur.


Il exerce l'apostolat en plein salon. Après un dîner d'apparat chez le comte de Camburzano, un général connu pour son indifférence religieuse vient prendre congé de Don Bosco :


--- Dites-moi un mot à retenir, afin que cette rencontre se grave dans ma mémoire.

--- Mon général, priez pour moi.

--- Moi, prier pour vous ! suggérez-moi plutôt un bon conseil.

Un instant, Don Bosco semble hésiter, puis, bravement :

--- Mon général, songez que vous avez encore à combattre une grande bataille. Si vous remportez la victoire, vous serez bienheureux.

--- Quelle bataille ?

--- Celle du salut de votre âme.

À cette déclaration, les convives se regardent, interdits. Le général, ému, remercie l'apôtre en ces termes :

--- Cette franchise, Don Bosco seul en était capable.

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Message  Arthur Mer 30 Sep 2009, 8:29 am


Il exerce l'apostolat en pleine rue. Il sait que nul n'est exclu des soucis de la Providence, ni le voyou, ni l'escarpe. Via Pô, un apache, l'aborde, lui réclame de l'argent. Don Bosco engage la conversation, lui tire l'aveu de ses désordres, s'assied sur le parapet qui borde le fossé du palais Madama. L'apache s'agenouille, se confesse et se relève absous.


Tel autre est un bandit immatriculé comme tel. Don Bosco le rencontre et... l'invite à dîner.


--- Vous me prenez pour un autre.

--- Vous êtes bien un tel ?

--- Oui, c'est moi.

--- Eh bien ! venez.

--- Vous n'allez pas vous embarrasser de ma personne !

--- Allons ! pas de cérémonies !

--- Vous n'avez pas regardé mes habits ni mes mains ?

--- Qu'est-ce que cela fait ?


Et le bandit d'emboîter le pas, de manger à la table de Don Bosco et de devenir honnête.


Vingt ans, il visita les prisons, ouvrant des brèches pour la grâce jusqu'en des âmes de granit. Ministère épuisant que celui-là ! Il en revenait souvent harassé, fiévreux, ébranlé par les secousses nerveuses. Mais que de revanches précieuses ! Quels accents de la terre traduiront jamais l'ivresse de l'apôtre, lorsque, après avoir, des années durant, frappé un coeur de pierre, il voit soudain jaillir la source des larmes purificatrices !


Condamné pour dix ans, un forcené passe son temps à blasphémer avec une fureur démoniaque. Sans prendre garde aux rebuts, aux insultes, aux malédictions, Don Bosco s'attelle à sa conversion. Il le raisonne, il le gâte, il revient à la charge jusqu'au jour où le roc s'attendrit et ruisselle de pleurs.


Sourire à la mort et à la mort ignominieuse, Don Bosco obtient ce miracle de plus d'un condamné à la sentence capitale. Son extrême sensibilité lui interdisait d'assister au supplice.


Un expérience tentée en 1846, sur les instances de Don Cafaso, pour soutenir un de ses pénitents dans cette affreuse passe, avait suffi pour lui déconseiller cet office au-dessus de ses nerfs. Il s'était évanoui à la vue de la potence.

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Message  Arthur Ven 02 Oct 2009, 8:20 am



Il lui advint quelquefois de courir au chevet des moribonds sans que personne ne l'eût averti. Un jour d'été, en montagne, il passe près d'un presbytère. Poussé par on ne sait quel instinct, il s'enquiert de la santé du chapelain et, apprenant qu'il est malade, il monte dans sa chambre. Une heure après il descend : il vient d'ouvrir le ciel à un confrère trépassé entre ses mains.


Pour décider une conscience, c'est assez d'un mot de lui, d'un geste, d'un regard. À Turin, devant l'église Saint-Dominique, un maçon glisse, risque de se casser la tête, Don Bosco se précipite, le soutient dans ses bras.


--- Merci ! dit l'autre. Sans vous je serais par terre.

--- Ah ! si je pouvais vous soutenir aussi d'une autre manière et vous éviter la chute en enfer !


Touché de ce simple voeu, le maçon rentre en lui-même et bientôt va se confesser à lui.


Combien se sont ainsi résolus à se sauver eux-mêmes pour répondre à un souhait cordial de Don Bosco, pour lui faire plaisir, pour l'aider dans sa mission de peupler le paradis.


L'apôtre va au-devant des âmes. D'autres fois, c'est la Providence qui les lui amène par un concours de circonstances apparemment fortuites. À Nice, après une conférence, Don Bosco, assailli par la multitude, s'arrête dans l'église. Il avise un homme au visage sinistre :


--- Que voulez-vous ?

--- Rien !

--- J'avais l'impression que vous aviez quelque chose à me dire.

--- Absolument rien !

--- Vous voulez peut-être vous confesser ?

--- Tout le contraire.

--- Alors, qu'est-ce que vous faites ici ?

--- Je suis ici parce que je ne puis pas m'en aller : je suis cloué sur place.

--- Je comprends, je comprends. Messieurs, demande-t-il à l'entourage, laissez-moi une minute.


Tout le monde s'écarte, Don Bosco parle à voix basse. Cet homme s'agenouille et se confesse au milieu de l'église.

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Message  Arthur Lun 05 Oct 2009, 8:21 pm


Un haut dignitaire de la Franc-Maçonnerie refuse le prêtre à l'article de la mort. Cédant à l'appel d'une dame, Don Bosco s'empresse de le visiter. Le mourant l'accueille par cette déclaration lancée à pleins poumons :


--- Si vous venez en ami, je vous accepte. Si vous venez comme prêtre, je vous brûle la cervelle.


Et d'indiquer deux revolvers à sa portée de chaque côté de son lit :


--- Si vous prononcez le mot de confession, le premier coup sera pour vous, le second pour moi.

--- Tranquillisez-vous. Je n'aborderai aucun sujet sans votre permission.


Il l'interroge sur sa santé, sur le pronostic du docteur. Il aiguille l'entretien sur le terrain historique, raconte la mort de Voltaire et conclut :


--- Des historiens ont énoncé l'opinion que Voltaire est damné. Moi, je n'avancerai jamais pareille assertion. Du moins je ne suis pas enclin à l'émettre, parce que la miséricorde de Dieu est infinie.

--- Comment ! interrompt le malade, même pour Voltaire il y aurait de l'espoir ?

--- La miséricorde de Dieu est infinie.

--- Alors, confessez-moi.


Et ce dignitaire du temple maçonnique, non seulement se confesse, mais il signe, lucide et de plein gré, toutes les rétractations d'usage en pareil cas. Le lendemain, il communie. Un mieux se déclare, il vit encore deux ou trois mois, durant lesquels il prie et ne cesse d'implorer pardon de ses scandales.

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Message  ROBERT. Mar 06 Oct 2009, 3:04 pm

Arthur a écrit:
Un haut dignitaire de la Franc-Maçonnerie refuse le prêtre à l'article de la mort. (...) --- Des historiens ont énoncé l'opinion que Voltaire est damné. Moi, je n'avancerai jamais pareille assertion. Du moins je ne suis pas enclin à l'émettre, parce que la miséricorde de Dieu est infinie.

--- Comment ! interrompt le malade, même pour Voltaire il y aurait de l'espoir ?

--- La miséricorde de Dieu est infinie.

--- Alors, confessez-moi.

Oh! oui, chers amis, la miséricorde de Dieu est infinie pour qui veut y mettre une bonne disposition et une belle intention..
ROBERT.
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Message  Arthur Mar 06 Oct 2009, 8:14 pm

Après les récits contenus dans ce chapitre, les lecteurs sans doute se demanderont avec nous si dans les annales de l'apostolat un saint poussa jamais plus loin que Don Bosco la confiance en la volonté salvifique, maternellement industrieuse, de la Providence divine.

*********************



V L'ÉDUCATEUR


--- Exposer mon système ? On me le demande souvent. Mais sais-je bien moi-même en quoi il consiste ? Je suis toujours allé de l'avant, suivant l'inspiration d'en haut et me pliant aux circonstances.


Ces paroles de Don Bosco, en 1886, laissent à penser que le sens éducateur ressemblait chez lui à un don inné ou infus. Toutefois, s'il n'a pas composé de traité, il a formulé oralement ou sur le papier quelques indications lapidaires. Il préconise la méthode préventive, animée, soutenue par l'amour de bienveillance. Sa brève esquisse intitulée : Système préventif dans l'éducation de la jeunesse, mériterait d'être le bréviaire des maisons d'éducation chrétienne.


Don Bosco aime les enfants, parce qu'il a pitié d'eux, de leur faiblesse et de leur abandon. Il n'a pas oublié sa propre enfance rude et maltraitée.


S'il se voue à l'éducation, ce n'est pas pour pour suivre une carrière; ce n'est pas seulement parce qu'il se sent le goût et l'attrait des enfants, ni parce qu'il possède à un degré inouï le don de les attirer, d'exercer sur eux une fascination qui tient du prodige. C'est principalement parce qu'il estime que, de tous les apostolats, celui des jeunes est le plus urgent, celui qui, au XIXe siècle, nécessite le plus de réformes radicales.


Tandis que les pédagogues exaltent la méthode autoritaire, recommandent d'inculquer en premier lieu aux enfants le respect des maîtres, Don Bosco invite d'abord les maîtres à respecter les enfants.


Lorsque Mgr Fransoni monta pour la première fois sur un trône improvisé dans l'Oratoire primitif de Saint-François de Sales, sa mitre heurta la voûte basse et faillit rouler sur le sol. Le digne archevêque vit dans cet accident un symbole et il eut cet à-propos charmant :


--- J'ai compris : il faut se présenter aux enfants la tête découverte.

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Message  Arthur Jeu 08 Oct 2009, 8:38 am

Maxima debetur puero reverentia, écrivait Juvénal. Et cependant le satirique païen ne décelait dans l'enfant que l'homme futur. L'instituteur chrétien vénère en son disciple le sceau du baptême et l'appel à la gloire éternelle.


" L'obéissance d'abord. L'affection ne vient qu'après. " Ainsi légifère la vieille pédagogie. Don Bosco renverse les facteurs : il se fixe à lui-même cette résolution : " Cherche à te faire aimer et très facilement tu te feras obéir. Cerca di farti amare, di poi ti farai ubbidire con tutta facilità. "


L'élève convaincu d'être aimé par ses maîtres, persuadé que leurs soucis, leurs efforts n'ont qu'un but, son propre avantage spirituel et temporel répondra à l'amour par l'amour et, normalement, concevra de lui-même la crainte filiale, l'ouverture, la confiance, la docilité empressée.


Inspirée par l'amour, la vigilance des maîtres devient amicale. Le surveillant salésien n'a rien du pion rébarbatif. Il s'identifie avec les enfants, il joue avec eux, devise avec eux, s'ingénie à les comprendre, non pas avec son esprit seulement, mais avec cette faculté complexe que Dante appelle l'inteletto d'amore.


Avec cette intelligence stimulée par la sympathie qui pénètre bien plus avant que la raison froide et sans laquelle ne s'établit pas de communication chaleureuse entre les âmes. Voici entre mille un trait délicieux où se révèle le tendre coeur du Serviteur de Dieu.


Nous sommes à Rome en 1858. Avec le cardinal Tosti et d'autres graves personnages, Don Bosco visite l'hospice Saint-Michel. Tout à coup, des sifflotements suivis d'un fredon traversent le silence du corridor. Et voici que nos hôtes tombent face à face avec l'écervelé siffloteur.


Le directeur de l'établissement en profite pour le tancer d'importance et le renvoie à son poste attendre une punition. Dès que le délinquant s'est éloigné, Don Bosco s'efforce de l'excuser. S'il y a eu faute, n'est-ce point par oubli ? Quel est ici le degré du volontaire ? Est-il nécessaire de sévir contre certaines transgressions qui proviennent de l'inadvertance ?


Saint Philippe Néri ne disait-il pas à ses jeunes : " Restez tranquilles, si vous pouvez. Sinon, criez, sautez à votre aise, pourvu que vous évitiez le péché. " Quant à moi, poursuit Don Bosco, je laisse à mes fils toute liberté de crier et de chanter. Je leur recommande seulement de respecter les murailles.


Mieux vaut un peu de potin qu'un silence rageur et sournois... Ce qui me peine, c'est que ce pauvre enfant va se désoler grandement de cette réprimande. Ne serait-il pas mieux que nous allions le consoler dans son laboratoire ?


Le directeur accède à ce désir. Ensemble ils vont trouver le siffloteur espiègle. Don Bosco l'appelle :


--- Cher ami, j'ai quelque chose à te dire. Approche ! ton excellent supérieur le permet. Tu sais, l'affaire du sifflotement est arrangée, à condition que dorénavant tu sois toujours bon et que nous soyons amis. Prends cette médaille et récite un Ave Maria à mes intentions.


Vivement ému, le jeune homme baise la main qui lui tend la médaille et remercie avec effusion :


--- Je l'attacherai à mon cou et je la garderai toujours en souvenir de vous.


Telle est, prise sur le fait, l'amorevolezza salésienne. Elle ne va pas sans crânerie. Elle suppose que le maître est avant tout un père et que, comme tel, il reconnaît tous ses enfants et qu'il prend la défense même des mauvais sujets chez lesquels il discerne, de ses yeux rendus clairvoyants par la charité, des germes de réhabilitation à dégager de l'ivraie.

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Message  Arthur Ven 09 Oct 2009, 7:39 pm


Gagner la confiance, tout est là, mais comment la conquérir ? Telle est la question que pose le cardinal Tosti ce même jour de février 1858, Don Bosco répond :


--- En obtenant que les jeunes viennent à nous.

--- Et comment obtenir qu'ils viennent à nous ?

--- C'est à nous de commencer. À nous d'aller vers eux, de nous adapter à leurs goûts, de leur ressembler en beauté. Votre Éminence accepterait-elle d'assister à une expérience ?


Et l'on convient que l'expérience aurait lieu sans retard sur la place du Peuple, toujours grouillante de garçonnets.


On arrive place du Peuple. Le cardinal reste aux aguets dans son carrosse. Don Bosco descend, s'avance vers un groupe de joueurs. Ceux-ci, effarouchés, prennent la fuite. Don Bosco les rappelle gentiment, distribue quelques menus cadeaux. Ils accourent en foule. Don Bosco demande à quelques-uns leur nom, s'informe de leur famille, du jeu auquel ils se livrent. Et de se mêler fraternellement à la partie.


D'autres gamins affluent. À chacun l'homme de Dieu offre quelque chose, une image ou une médaille. Au bienfait matériel il ajoute le mot du coeur, un bon conseil. En un quart d'heure il s'attache cette nuée de petits Romains. Et lorsqu'il regagne la voiture, c'est entre deux haies d'enfants qui l'acclament.


Leçon de chose plus éloquente, plus profitable que toutes les théories !

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Message  Arthur Lun 12 Oct 2009, 9:43 am



Ce système réussit même avec les enfants vicieux et indisciplinés. L'amour de bienveillance, toujours et partout, triomphe du mal par le bien. Toute la vie et toutes les oeuvres de notre héros proclament cette conclusion.


Encore une anecdote, celle-ci surprenante, incroyable.


Don Bosco vient de prêcher la retraite pascale ( 1855 ) à la maison de correction de Turin dite " la Générale ". Ils sont là trois cents incorrigibles encore mineurs, dont chacun, malgré son âge, à déjà eu maille à partir avec la police. Le prédicateur a retourné ces consciences; ils ont fait leurs Pâques, sauf un. Comment les récompenser ? Leur donner la clé des champs ? Il n'en reviendrait pas un.


Tel est cependant le paradoxal projet de Don Bosco. Et, à force de démarches, emportant les objections du ministre lui-même, il obtient pour ses chers détenus une promenade de vingt kilomètres aller retour jusqu'au château de Stupinigi. Lorsque la veille il annonce aux prisonniers cette faveur inattendue, ses paroles sont couvertes par des clameurs frénétiques; mais l'orateur exige une promesse :


--- Je me suis engagé pour vous. J'ai garanti que demain vous serez-là du premier jusqu'au dernier. La ville entière aura les yeux sur vous. Si quelqu'un trahit son devoir, le déshonneur rejaillira sur moi, sur vous aussi, surtout après les promesses jurées au Seigneur à la fin de la retraite. À vous de prouvez la sincérité de vos résolutions. Vous me le promettez ?


Et tous de répondre par un " oui " unanime.


Le lendemain soir, pas un ne manque à l'appel. Le ministre anxieux attend le résultat de cette randonnée pleine d'aléas. Don Bosco va lui-même le rassurer. L'homme d'État s'écrie :


--- Dites-moi, Monsieur l'Abbé, pourquoi la loi n'exerce pas sur ses sujets un ascendant pareil au vôtre ?

--- Excellence, repartit l'homme de Dieu, notre pouvoir à nous est d'un autre ordre. La loi ne sait que commander et châtier. Nous autres nous parlons au coeur des jeunes, et notre parole est la parole de Dieu.


Ce mot résume toute la pédagogie salésienne :: elle parle au coeur et elle parle au nom de Dieu.

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Message  ROBERT. Mar 13 Oct 2009, 2:07 pm

Arthur a écrit:
Ce système réussit même avec les enfants vicieux et indisciplinés. L'amour de bienveillance, toujours et partout, triomphe du mal par le bien. Toute la vie et toutes les œuvres de notre héros proclament cette conclusion. (...)

--- Dites-moi, Monsieur l'Abbé, pourquoi la loi n'exerce pas sur ses sujets un ascendant pareil au vôtre ?
--- Excellence, repartit l'homme de Dieu, notre pouvoir à nous est d'un autre ordre. La loi ne sait que commander et châtier. Nous autres nous parlons au cœur des jeunes, et notre parole est la parole de Dieu.
Ce mot résume toute la pédagogie salésienne : elle parle au cœur et elle parle au nom de Dieu.

(soulignés et italiques de moi.)

L’amour de Dieu, qui entraîne l’amour du prochain… Ah! si au moins 1% des profs l'avaient !...
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Message  Arthur Mar 13 Oct 2009, 8:07 pm



Elle dispose de moyens d'action dont l'absence explique l'irrémédiable infériorité des pédagogies agnostiques et même de la pédagogie protestante, celle-ci fut-elle rénovée et dirigée par un Pestalozzi, de moyens d'action que Paul Bourget affirme " indispensables à l'hygiène collective et individuelle ".


Ces moyens, Don Bosco les signalait à lord Palmerston au cours d'une visite du ministre anglais à l'Oratoire en 1877 : La confession fréquente, la communion fréquente et la messe quotidienne pieusement suivie.


Lord Palmerston s'enquérait encore :


--- N'est-il pas possible d'y suppléer par d'autres moyens ?

--- Si vous excluez la religion, il vous faudra employer les menaces et le bâton.

--- Effectivement, vous avez raison. Ô religion ! Ô bâton ! Ou l'un, ou l'autre. Entre les deux, pas de moyen terme. J'en causerai à Londres.


Sans cesse Don Bosco revient sur ce thème. Il écrit : " Confession et communion fréquentes, assistance quotidienne à la messe, telles sont les colonnes qui doivent supporter un édifice éducatif dont on veut écarter la menace et la férule. "


Il forme ses jeunes à une parfaite délicatesse de conscience, les habitue à se confesser non seulement à l'église, mais en plein air, agenouillés par terre sous les regards des camarades et des passants, à considérer dans le prêtre non seulement le juge et le médecin, mais surtout le père et l'ami.


Tel élève lui est signalé comme la plus forte tête de la bande :


--- Celui-là, insinue le comte Connestabile, je gage que vous allez lui administrer une punition exemplaire ?

--- Que parlez-vous de punition ? Je m'en vais descendre en récréation. Je lui demanderai si ça va. Il me répondra qu'il se porte à merveille. Je me réjouirai avec lui de sa santé, puis, je lui poserai une toute petite question en le fixant dans les yeux : " Et le moral cela va-t-il aussi bien ? " Je le vois d'ici rougir, baisser les yeux.


Ce sera le moment de lui poser, sur le ton affectueux, cette autre question plus directe : " Voyons, mon petit, il y a quelque chose qui ne va pas. Y a-t-il longtemps que tu ne t'es pas confessé ? " Eh bien, cet enfant ainsi remué je ne donne pas dix minutes avant qu'il n'aille s'ouvrir à un confesseur. Et j'ai la quasi-certitude que je n'aurai plus à me plaindre de lui.

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Message  Arthur Mer 14 Oct 2009, 8:20 pm



Là où règne la crainte des fins dernières entretenue par l'exercice mensuel de la Bonne Mort, où les âmes se maintiennent pures par la fréquentation des sacrements, il est impossible que là même ne germe et ne s'affermisse, militante et hardie, l'espérance du ciel et que s'épanouissent la paix intérieure et la gaieté commune.


Car la piété véritable ne se présente pas sous l'aspect renfrogné du hibou. Elle a l'élan, la grâce légère, la jubilation mélodieuse de l'alouette qui chante dans un rayon de soleil. Au fronton des instituts salésiens, on pourrait tracer en capitales cette interdiction de saint Philippe Néri : " Loin d'ici les scrupules et les mélancolies !


" Don Bosco a inventé le onzième commandement : il a fait de la joie un précepte. Que les surveillants ne s'imaginent pas que leur devoir est d'empêcher le tapage en récréation; qu'ils prennent part aux jeux, sans compromettre leur dignité. Les bruyants ébats renouvellent le sang, détendent les nerfs, dissipent le mauvais esprit, prédisposent l'élève à plus d'attention pendant l'étude.


Qu'il y ait dans la cour une barre fixe, un trapèze, des appareils de sport. Qu'on s'y exerce à la gymnastique. Qu'on ménage même des excursions de longue haleine à travers les bois et les champs.


Qui donc a osé soutenir que ce serait le pasteur Bion de Zurich qui, en 1872, aurait eu le premier l'idée des colonies de vacances ? Don Bosco les inaugurait dès 1859 et Don Francesia, dans un livre pétillant : Les promenades d'automne, a immortalisé le souvenir de ces randonnées de trois semaines à travers les collines du Montferrat.


Et qu'on ajoute au mouvement physique, à cette liberté du déplacement et de la course aux paysages dont les jeunes son friands, qu'on ajoute le théâtre d'amateur, la déclamation, la musique vocale et instrumentale qui libère l'âme de l'appesantissement des choses et qui donne des ailes au corps.


Dans une telle atmosphère de cordialité, de dilatation sans autre contrainte que celle qu'on accepte volontiers, punir, ce n'est pas infliger un pensum vindicatif, c'est plutôt priver d'une récompense. Don Bosco écrit :


Usons de châtiments négatifs, et toujours de telle sorte que les sujets ainsi morigénés nous en aiment davantage et que jamais ils ne nous quittent honteux et abattus.


Et ailleurs :


Un regard non affectueux est pour certains autrement efficace qu'un soufflet.


Une nuit, au dortoir, un enfant sanglote dans son lit :

--- Qu'as-tu donc ? interroge le voisin.

--- Don Bosco, ce soir, m'a jeté un de ces regards !...


Ce seul regard a transpercé ce coeur des flèches du remords.

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Message  Arthur Jeu 15 Oct 2009, 7:46 pm



Un soir de rentrée, on vient de réciter les prières. C'est le moment du sermoncino, courte exhortation que le directeur adresse avant le coucher. Pourquoi aujourd'hui cette lenteur à se ranger en silence ? On traîne à bavarder, comme si le réglementaire n'avait pas sonné. Don Bosco ne se fâche pas, mais il prépare une leçon sévère. Enfin, il parle, les visages se rembrunissent. Il n'a pourtant pas haussé la voix, il a énoncé avec calme :


--- Savez-vous, mes amis, que je ne suis pas content de vous ? Puisqu'il en est ainsi, je ne vous dirai rien. Allez dormir !


Depuis cette scène, on n'aura même plus besoin de sonner avant le sermoncino.


L'amorevolezza salésienne, c'est la charité, telle que saint Paul la définit dans la première Épître aux Corinthiens ( XIII, 4-8 ), la charité qui munit l'apôtre d'une réserve inépuisable de patience.


Deux systèmes s'affrontent : le système répressif, qui se contente de promulguer le règlement et d'en appliquer que les sanctions, et le système préventif, bien plus exigeant, plus difficile, plus délicat, car, non seulement il édicte des ordonnances, mais il vise à prévenir toute violation, à mettre l'élève dans la bienheureuse impossibilité de faillir.


Ce système requiert du maître un dévouement sans répit, une vigilance continuellement en alerte, comme celle de l'ange gardien ou de la mère, une vigilance qui, pour éloigner la faute, n'abandonne jamais l'enfant à lui-même, à l'oisiveté, l'occupe d'une manière ou de l'autre par une sage alternance d'amusements et de travaux.


L'anime de cette féconde persuasion que le bonheur, en ce monde, c'est de marcher irréprochable sous le regard paternel du bon Dieu et d'accomplir sa volonté, découvre et réalise les conditions d'euphorie qui permettront à chaque personnalité d'éclore et de se développer dans sa ligne avec ses dons et ses qualités respectives.


Et ce splendide idéal, la vigilance d'amour ambitionne d'y atteindre en excluant toute punition violente, elle cherche même à se passer de châtiments légers. Ce sont les propres termes de Don Bosco.

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Message  Arthur Sam 17 Oct 2009, 9:44 am



VI LES TRIBULATIONS




" Le patient vaut mieux que le brave ", dit Bossuet. Que Don Bosco ait été hardi dans ses entreprises, c'est un thème battu. On connaît moins sa longanimité, son héroïsme surhumain dans le support des traverses.


" Que votre volonté soit faite et non la mienne ! " De toutes les prières de Jésus, celle-là fut la plus haute et la plus excellente, il n'y en eut pas de plus haute et la plus excellente, il n'y en eut pas de plus glorieuse pour le Père, de plus utile aux hommes, de plus terrible aux démons. Après le Maître, Don Bosco proféra souvent et pratiqua ce Fiat de la force qui se résigne à pâtir beaucoup, à pâtir longtemps. Lui aussi, il fut plus étonnant par ses constances que par ses conquêtes.


S'agit-il de malaises corporels ? Ils furent cruels, ils furent tenaces. Une simple énumération impressionne. Il eut à subir de 1843 jusqu'à sa mort un mal des yeux fort cuisant et, vers la fin, la perte de l'oeil droit; de 1846 jusqu'à sa mort, l'enflure des jambes et des pieds, enflure qui s'aggravait avec le temps,
" ma croix quotidienne ", disait-il; des migraines continuelles, d'atroces névralgies faciales, des insomnies rebelles.


Des palpitations de coeur à faire craindre la rupture d'une côte; les quinze dernières années, des fièvres intermittentes avec éruptions cutanées, puis, sur l'os sacré, une excroissance de chair, grosse comme une noix, intolérable au contact du lit ou de la chaise. Il n'en soufflait mot à personne, non plus que des larges exanthèmes, plus rudes que la plus mortifiante des haires, qui pullulèrent sur sa peau depuis qu'en 1845 il eut contracté le typhus pétéchial au chevet des contagieux de la Piccola Casa.


Autant d'infirmités qui l'accompagnèrent jusqu'au tombeau. En dépit de quoi, il allait et venait le sourire aux lèvres, voyageait, prêchait, confessait, rédigeait des monceaux de lettres, supportait les positions les plus incommodes. Quelqu'un l'invitait-il à demander la délivrance de ses misères ? Il répondait:


--- Quand je serais sûr qu'une seule invocation me guérirait, je ne la prononcerais pas.

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Message  Arthur Dim 18 Oct 2009, 8:59 pm


S'agit-il d'épreuves morales ? Nous ne mentionnerons que deux d'entre elles, les plus douloureuses, il est vrai, de sa vie sacerdotale. La première concerne sa brochure sur le XVIIIe Centenaire de saint Pierre ( 1867 ): elle dura quatre mois; la seconde, ses rapports avec son archevêque, Mgr Gastaldi : elle se prolongea dix ans.


Déféré à l'Index, son livre sur le Centenaire de saint Pierre avait été examiné par l'un des consulteurs, Mgr Pio Delicati, dont le verdict avait été sévère à outrance, cinglant pour l'auteur. Ce réquisitoire fut communiqué à Don Bosco.


Qu'on juge de la surprise du Saint à cette lecture ! Lui qui aurait versé son sang pour le Pape, il se voyait accusé de saper son magistère par une doctrine pestilentielle. Il avait écrit que le séjour de saint Pierre à Rome était une question d'histoire et nullement un article de foi. Le consulteur requérait la condamnation.


Blessé au coeur, Don Bosco pria à profusion, prit conseil, composa une réponse respectueuse. Le calligraphe occupé à transcrire cette humble apologie entendit pendant la nuit les soupirs et les paroles entrecoupées de l'homme de Dieu, ses implorations mêlées de larmes. Vers minuit, la porte s'ouvrit. Ayant revisé la copie, Don Bosco dit :


--- Tu as vu ce qu'on me reproche, comment on m'habille ?


Puis se tournant vers le Crucifix, il eut ce cri du coeur :


--- Vous le savez pourtant, ô mon Jésus, si j'ai écrit cela, ce ne fut pas pour une fin mauvaise. Ah ! mon âme est triste jusqu'à la mort. Que votre volonté soit faite ! Je ne sais pas comment je passerai cette nuit. Ô Jésus, soyez mon secours.


Comment il termina cette nuit, Dieu seul le sait, mais nous savons qu'à 5 heures le secrétaire le vit descendre tranquille et serein comme d'ordinaire pour confesser et dire la messe, remis d'aplomb, illuminé par une confiance puisée aux sources d'en haut.


L'affaire s'arrangea bientôt, Pie IX arrêta la procédure de mise à l'Index. L'auteur retoucha les passages incriminés et la seconde édition parut irréprochable.


Cette affliction fut... anodine en comparaison de celle qui le cribla d'épines de 1872 à 1882 : nous voulons parler de ses démêlés avec Mgr Gastaldi.

Arthur

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