Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la création en général.XXXVIII.Raisons au moyen desquelles certains auteurs
essaient de prouver que le monde n’est pas éternel.
Réponses à ces raisons.SUITE
La troisième raison n'est pas plus pressante. Quoiqu'il n'y ait pas d'infini actuel et simultané, il peut cependant exister d'une manière successive, puisque tout infini pris dans ce sens est fini. Chacune des révolutions du soleil qui ont précédé a donc pu passer parce qu'elle était finie, tandis que si le monde avait existé de telle sorte que toutes ces révolutions fussent arrivées en même temps, il serait impossible de distinguer la première, et, par conséquent, il n'y aurait pas de passé, car il ne se conçoit pas sans deux extrêmes.
La quatrième…
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De la création en général.XXXVIII.Raisons au moyen desquelles certains auteurs
essaient de prouver que le monde n’est pas éternel.
Réponses à ces raisons.SUITE
La quatrième est très faible; car rien ne s'oppose à ce que l'infini s'accroisse dans la partie par où il est fini. Or, si l'on admet que le temps est éternel, il s'ensuit qu'il est infini dans la partie qui a précédé et fini par celle qui vient ensuite, puisque le présent est le terme du passé.
La cinquième …
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De la création en général.XXXVIII.Raisons au moyen desquelles certains auteurs
essaient de prouver que le monde n’est pas éternel.
Réponses à ces raisons.SUITE
La cinquième objection n'a rien d'embarrassant. En effet, les causes actives ne peuvent s'enchaîner jusqu'à l'infini, ainsi que l'enseignent les philosophes, au sujet des causes qui ont une action simultanée (2); car alors l'effet doit dépendre d'actions infinies qui existent en même temps. Ces causes sont infinies par elles-mêmes, parce que leur infinité est indispensable pour que l'effet puisse se produire.
Quant aux causes qui n'agissent pas ensemble, il n'y a rien d'impossible, suivant le sentiment qui tient pour la génération perpétuelle. Cependant, cette infinité est un accident pour les causes de cette espèce. Par exemple, c'est par accident que le père de Socrate est ou n'est pas le fils d'un autre. Mais ce n'est pas par accident que le bâton, en tant qu'il meut une pierre, est lui-même, mû par la main; car il n'imprime le mouvement qu'autant qu'il est mû lui-même.
L'objection relative aux âmes…
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(2) Cette note est libellée en latin; sur demande, nous la publierons. Bien à vous.
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De la création en général.XXXVIII.Raisons au moyen desquelles certains auteurs
essaient de prouver que le monde n’est pas éternel.
Réponses à ces raisons.SUITE
L’objection relative aux âmes offre plus de difficulté; cependant il n'y a pas beaucoup d'avantage à la faire, parce qu'elle suppose plusieurs choses.
Quelques-uns, parmi ceux qui croient à l'éternité du monde, prétendent que les âmes des hommes ne survivent pas aux corps. D'autres disent qu'il ne reste de ces âmes qu'une intelligence séparée ou active ou même possible, suivant les différentes opinions. D'autres encore ont enseigné que les âmes, accomplissant une sorte de révolution, rentrent après quelques siècles dans des corps. Enfin, il en est qui ne voient aucun inconvénient à ce qu'il y ait quelques infinis actuels parmi les êtres qui ne sont pas soumis à un ordre déterminé.
Il serait pourtant plus utile, pour prouver que le monde n'est pas éternel, de s'appuyer sur la fin que se propose la volonté divine, comme nous l'avons fait précédemment [ch. 35].
En effet, la fin qui pousse la volonté de Dieu à produire des êtres, c'est sa bonté, selon qu'elle se manifeste par ces effets. Or, ce qui rend plus sensible sa bonté et sa puissance, c'est qu'il y a en dehors de lui des choses qui n'ont pas toujours existé. D'où il résulte évidemment que les êtres qui sont distincts de lui ont reçu de lui l'existence, puisqu'ils n'ont pas toujours été.
Il est visible encore que Dieu n'agit pas par nécessité de nature et que sa puissance infinie ne peut être épuisée par son action; car il était très convenable à la bonté divine que les choses créées reçussent d'elle le principe de leur durée.
Nous pouvons, à l'aide des vérités que nous venons d'établir, éviter les différentes erreurs dans lesquelles sont tombés les philosophes païens (3). Les uns disent que le monde est éternel, les autres veulent que la matière du monde existe dès l'éternité. Selon eux, le monde commença à une certaine époque à se former, par hasard, ou sous l'action de quelque intelligence et même par un effet de l'amitié ou de la discorde (4).Tous admettent quelque chose en dehors de Dieu éternel, et se mettent ainsi en opposition avec la foi catholique.
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(3) Ces erreurs sont exposées dans la Physique d'Aristote (liv. VIII, c. 1). Il serait trop long de citer ici tout ce passage, dont saint Thomas nous donne la substance. — (4) L’amitié ou la concorde et la discorde remplissent, dans la physique des anciens, le même rôle que les deux forces désignées aujourd'hui sous les noms d'attraction et de répulsion.
De la distinction des êtres…
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De la distinction des êtres.XXXIX.La distinction des êtres n’est pas due au hasard.
Après avoir examiné les questions qui se rattachent à la production des êtres, nous avons à nous occuper de celles qui sont relatives à leur distinction. Nous allons démontrer en premier lieu que cette distinction n'est pas l'œuvre du hasard. En effet:
1° Le hasard ne se rencontre que parmi les choses qui peuvent exister d'une autre manière; car jamais on ne lui attribue ce qui est nécessairement et toujours.
Or, nous avons démontré [ch. 30] qu'il y a des créatures dont la nature est telle qu'elles sont dans l'impossibilité de ne pas exister, par exemple, les êtres immatériels qui ne sont pas soumis à la contrariété. Leurs substances ne peuvent donc être l'œuvre du hasard. Or, ces créatures se distinguent entre elles par leurs substances. Donc cette distinction ne vient pas non plus du hasard.
2° Si le hasard ne se rencontre que parmi les choses qui peuvent exister d'une autre manière, le principe de cette possibilité est la matière et non la forme, qui détermine plutôt la possibilité qui est dans la matière à une seule chose (1). Or, les êtres qui se distinguent par leurs formes ne doivent pas cette distinction au hasard, mais ceux-là seulement peut-être qui sont distincts entre eux à raison de leur matière. De plus, c'est la forme qui distingue les espèces, tandis que la distinction des individus qui composent l'espèce vient de la matière. Donc le hasard n'établit pas de distinction entre les êtres quant à l'espèce; mais on peut accorder qu'il le fait pour certains individus.
3° La matière étant le principe et la cause des choses…
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(1) Il faut entendre cette proposition en ce sens, que la matière étant par elle-même indifférente à plusieurs états, la forme la tire de cette indifférence en faisant d'elle une seule chose ou bien en la déterminant à un état fixe.
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De la distinction des êtres.XXXIX.La distinction des êtres n’est pas due au hasard.SUITE
3° La matière étant le principe et la cause des choses qui relèvent du hasard [nous venons de le prouver], la production de celles qui tirent leur origine de la matière peut être fortuite. Or, ainsi que nous l'avons démontré [ch. 16], la première fois que des êtres ont reçu l'existence, ils n'ont pas été tirés de la matière. Donc on ne peut, dans ce cas, faire intervenir le hasard. Or, il y a eu nécessairement distinction dans cette première production; car, parmi les créatures, il s'en trouve un grand nombre qui ne s'engendrent pas les unes les autres et ne proviennent pas non plus d'une source commune, puisqu'il n'y a pas entre elles identité de matière. Il est donc impossible que la distinction des êtres soit un effet du hasard.
4° La cause qui est par elle-même passe avant celle qui n'est cause que par accident. Si donc les effets postérieurs résultent d'une cause qui est par elle-même et déterminée, il serait absurde d'affirmer que les premiers effets ont eu une cause indéterminée dont l'action fût accidentelle. Or la distinction des choses précède naturellement tout mouvement et toute opération, car les mouvements et les opérations déterminés appartiennent aux êtres déterminés et distincts. Or, les mouvements et les opérations des êtres proviennent de causes qui sont telles par elles-mêmes et déterminées, puisqu'ils procèdent de leurs causes d'une manière identique, toujours, ou du moins dans la plupart des cas. Donc la distinction des choses vient d'une cause qui est par elle-même et déterminée, et non du hasard, qui est une cause accidentelle et indéterminée.
5º Toutes les fois qu'une chose procède d'un…
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De la distinction des êtres.XXXIX.La distinction des êtres n’est pas due au hasard.SUITE
5º Toutes les fois qu'une chose procède d'un être agissant par l'intelligence et la volonté, sa forme est dans l'intention de cet agent. Or, l'universalité des créatures a pour auteur Dieu, qui agit par son intelligence et sa volonté [ch. 23]. Ensuite, il n'y a dans sa puissance aucun défaut qui l'empêche d'atteindre le but qu'il a en vue, puisqu'elle est infinie [liv. I, ch.43]. Donc le hasard est étranger à la forme de l'univers que Dieu a fixée et voulue. En effet, nous disons qu'une chose est fortuite quand elle arrive en dehors de l'intention de l'agent. Or, la forme de l'univers consiste dans la distinction et l'ordonnance de ses parties. Donc la distinction des êtres ne s'est pas établie par hasard.
6° La fin pour laquelle un effet est produit, c'est ce qu'il y a en lui de bon et d'excellent. Or, s'il y a dans l'univers quelque chose de bon et d'excellent, c'est l'ordre qui rattache les unes aux autres ses différentes parties, et qui est impossible sans distinction; car c'est lui qui fait de l'univers un tout, et c'est en cela que consiste sa perfection. Donc la fin pour laquelle l'univers est produit n'est autre que l'ordre de ses parties et leur distinction. Donc la distinction des êtres n'a pas pour cause le hasard.
Nous trouvons cette vérité enseignée dans la Sainte-Écriture; car après…
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De la distinction des êtres.XXXIX.La distinction des êtres n’est pas due au hasard.SUITE
Nous trouvons cette vérité enseignée dans la Sainte-Écriture; car après avoir dit au commencement de la Genèse: Au commencement Dieu créa le ciel et la terre [Gen. I, 1], elle ajoute : Dieu sépara la lumière et les ténèbres [Gen. I, 4], et ainsi du reste. En sorte qu'il résulte clairement de là qu'il faut attribuer à Dieu et non pas au hasard, non-seulement la création des êtres, mais encore leur distinction comme étant le bien et la perfection de l'univers. C'est pourquoi nous lisons plus loin : Dieu vit toutes les choses qu'il avait faites, et elles étaient très bonnes [Gen. I, 31].
Cette démonstration fait évanouir le sentiment des anciens philosophes naturalistes (2), qui avaient imaginé une seule et unique cause matérielle qui donnait l'existence à toute chose au moyen de la raréfaction et de la condensation. Ceux-là, en effet, se voient forcés de dire que la distinction des êtres, si visible dans tout l'univers, est le résultat, non de l'intention de quelqu'un qui les coordonne, mais du mouvement fortuit de la matière.
Il en est de même de l'opinion de Démocrite et de Leucippe (3), qui admettaient une infinité de principes matériels, savoir: des corps indivisibles de même nature, mais différents par leur figure, leur position et leur ordre respectif. C'est de leur rencontre, qui doit toujours être l'effet du hasard, puisque ces philosophes niaient l'existence d'une cause active, que naît, selon eux, la diversité dans les êtres, à raison des trois différences de figure, d'ordre et de position, que nous venons d'indiquer parmi ces atomes. D'où il suit que la distinction des choses est fortuite : conséquence dont la fausseté est maintenant démontrée.
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(2) Cette philosophie naturelle, dont saint Thomas parle en plusieurs endroits, s'identifie, s'il en faut juger par les doctrines qu'il lui prête, avec le matérialisme qui n'admet rien en dehors du monde sensible. — (3) Cette opinion de Démocrite fut admise par Épicure et tous ses disciples, qui professent le matérialisme le plus complet. On peut en voir l'exposé dans le poème de l'épicurien Lucrèce, De rerum natura.
Chap. XL. La matière n’est pas la cause de la distinction des êtres.
Dernière édition par Louis le Dim 18 Déc 2022, 6:06 am, édité 1 fois (Raison : Orthographe.)
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De la distinction des êtres.XLLa matière n’est pas la cause de la distinction des êtres.
Nous devons conclure de ce qui précède que la distinction des êtres ne provient pas de la diversité que nous apercevons dans la matière, comme de sa cause première. En effet :
1° Rien de déterminé ne peut provenir de la matière, à moins que ce ne soit par un cas fortuit (1), parce que la matière est indifféremment disposée à devenir beaucoup de choses, et si l'une de ces choses seulement se réalise, elle est nécessairement contingente, ainsi que cela a lieu pour le plus petit nombre des êtres. C'est ainsi qu'il faut considérer ce qui arrive par hasard, surtout lorsque l'agent est dépourvu d'intention. Or, nous avons prouvé que la distinction des êtres ne vient pas du hasard [ch. 39]. Donc elle ne résulte pas non plus de la diversité qui est dans la matière comme de sa cause première.
2° Tout ce qui résulte de l'intention de l'agent n'existe pas à…
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(1) Il est bon d'observer que saint Thomas, en disant que rien ne peut provenir de la matière que fortuitement, veut parler de ce qui résulte de la matière considérée comme cause première et seule agissante, et non de ce qu'elle peut produire en vertu de l'intention et d'une certaine disposition ou combinaison d'un agent supérieur et intelligent.
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De la distinction des êtres.XLLa matière n’est pas la cause de la distinction des êtres.SUITE
2° Tout ce qui résulte de l'intention de l'agent n'existe pas à raison de la matière considérée comme sa cause première ; car la cause active, en tant qu'elle produit un effet, a la priorité sur la matière, qui ne devient cause actuelle qu'autant qu'elle reçoit le mouvement de l'agent. D'où il suit que si un effet arrive à être dans une disposition propre à la matière et devient conforme à l'intention de l'agent, il ne provient pas de la matière comme de sa première cause. C'est pour cette raison que tout ce qui se rapporte à la matière comme à sa cause première est en dehors de l'intention de l'agent. Tels sont les monstres et les autres aberrations de la nature.
Pour la forme, elle est déterminée par l'intention de l'agent. En voici la preuve : l'agent produit un être semblable à lui, quant à la forme, et si quelquefois il n'atteint pas son but, cela arrive fortuitement et provient de la matière. Les formes ne sont donc pas une conséquence de la disposition de la matière prise comme cause première; mais, au contraire, la matière est disposée de telle manière, afin de réaliser telle forme. Or, les formes sont le principe de la distinction des êtres suivant leurs espèces. Donc cette distinction n'existe pas à raison de la diversité de la matière, comme si elle en était la cause première.
3° La matière ne peut être la source de la distinction des êtres que pour ceux qui…
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De la distinction des êtres.XLLa matière n’est pas la cause de la distinction des êtres.SUITE
3° La matière ne peut être la source de la distinction des êtres que pour ceux qui sont faits d'une matière préexistante. Or, il y a dans l'univers beaucoup de choses distinctes entre elles qui ne peuvent être faites d'une matière préexistante. Nous en avons un exemple dans les corps célestes, qui ne sont sujets à aucune contrariété, ainsi que le prouve leur mouvement. Il est donc impossible que la diversité de la matière soit la cause première de la distinction des êtres.
4° Tous les êtres dont l'existence dépend d'une cause et qui sont distincts les uns des autres reconnaissent également une cause de cette distinction; car ce qui fait que chaque chose est un être, c'est qu'elle devient une seule chose indivisible en elle-même et distincte de toute autre. Si la matière est, par sa diversité, la cause de la distinction des choses, il faut admettre aussi qu'il y a des matières distinctes en elles-mêmes.
Or, nous avons établi que toute matière a reçu l'existence d'un être autre qu'elle-même, en prouvant [ch. 15] que tout ce qui existe, de quelque manière que ce soit, vient de Dieu. Donc ces matières ne sont pas elles-mêmes la cause de leur distinction. Donc, la première cause de la distinction des êtres ne peut se trouver dans la diversité de la matière.
5° Dès lors que toute intelligence agit pour le bien…
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De la distinction des êtres.XLLa matière n’est pas la cause de la distinction des êtres.SUITE
5° Dès lors que toute intelligence agit pour le bien, elle ne fait pas ce qui est meilleur pour ce qui est plus vil ; mais c'est le contraire qui a lieu. Il en est de même de la nature.
Or, tout procède de Dieu, qui agit par son intelligence [ch. 23]. Donc si Dieu fait des êtres plus vils, c'est à cause des plus nobles, et non réciproquement. Or, la forme est plus excellente que la matière, puisqu'elle la perfectionne et l'actualise. Donc il ne donne pas aux choses telles formes à cause de telles matières ; mais il a produit telles matières afin de réaliser telles formes. Donc la distinction des espèces, quant à leurs formes, n'existe pas à raison de la matière; mais des matières diverses ont été créées pour être adaptées à diverses formes.
Ainsi se trouve anéantie l'opinion d'Anaxagore, qui admettait l'existence d'une infinité de principes matériels, mélangés d'abord et confus, puis ensuite séparés par une intelligence qui les mit en ordre. La même réfutation atteint tous ceux qui recouraient à divers principes matériels pour expliquer la distinction des êtres.
Chap. XLI, La distinction des êtres ne vient d’aucune contrariété entre les premiers agents.
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De la distinction des êtres.XLILa distinction des êtres ne vient
d’aucune contrariété entre les premiers agents.
Nous pouvons, en nous appuyant sur les démonstrations précédentes, prouver que la cause de la distinction des êtres n'est ni la diversité ni la contrariété des agents. En effet :
1° Si les divers agents qui produisent, par leur action, la diversité des choses sont coordonnés entre eux, il existe nécessairement une cause unique de cet ordre; car plusieurs choses ne peuvent être unies ensemble que par une seule, et, par conséquent, cet ordre est dû à une cause unique, et il y a une distinction unique des choses.
Si, au contraire, il n'existe aucun ordre qui rattache les uns aux autres ces agents divers, leur concours, d'où résultera la diversité des choses, sera accidentel. Donc cette distinction sera toute fortuite, contrairement à ce que nous avons établi [ch. 39].
2° Diverses causes non coordonnées ne peuvent avoir pour résultat des effets coordonnés, à moins que ce ne soit par accident; et des êtres divers, considérés comme tels, ne peuvent produire l'unité. Or, s'il existe un ordre entre les choses qui sont distinctes, on ne peut l'attribuer au hasard, puisque le plus souvent l'une est mise en mouvement par l'autre. Il est donc impossible que la distinction des êtres ainsi coordonnés existe à raison de la diversité d'agents non coordonnés.
3° Tout être dont la distinction est due à une cause…
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De la distinction des êtres.XLILa distinction des êtres ne vient
d’aucune contrariété entre les premiers agents.SUITE
3° Tout être dont la distinction est due à une cause ne peut être la cause première de la distinction des choses. Or, si l'on considère également plusieurs êtres, il y a certainement une cause qui les distingue. En effet, ils tiennent leur existence d'une cause, puisque tout procède du premier être [ch. 15]. Or, le même être est la cause de l'existence d'une chose et de sa distinction relativement aux autres choses [ch. 40]. Donc la diversité des agents ne peut être considérée comme la cause de la distinction des êtres.
4º Si la diversité des choses provient de la diversité ou de la contrariété des agents divers, cela doit s'entendre surtout, comme plusieurs le prétendent, de la contrariété du bien et du mal, en sorte que tous les biens procèdent d'un bon principe, et tous les maux d'un mauvais. Or, on rencontre le bien et le mal dans tous les genres. Tous les maux ne peuvent tirer leur origine d'un seul premier principe; car ce qui existe par le moyen d'un autre être se rattachant à ce qui existe par soi-même, le principe actif des choses mauvaises devra être mauvais par lui-même. Nous disons qu'une chose est telle par elle-même quand elle est telle en vertu de son essence. Donc son essence sera mauvaise. Or, il y a là une impossibilité; car tout ce qui existe est nécessairement bon, considéré comme être, puisque toute chose aime son être et désire sa conservation. Ce qui le prouve, c'est que tout fait effort pour se soustraire à la destruction. Le bien, c'est ce que tous les êtres recherchent. Donc la distinction dans les choses ne peut provenir de deux principes contraires, l'un bon et l'autre mauvais.
5° Tout agent agit parce qu'il est un être actuel…
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5° Tout agent agit parce qu'il est un être actuel, et en tant qu'il est actuel, tout être est parfait. Or, en considérant comme tel tout ce qui est parfait, nous disons que cela est un bien. Donc tout agent, en sa qualité d'agent, est bon. Si donc un être est mauvais par lui-même, il sera incapable de devenir agent. Or, s'il existe un premier principe des maux, il est nécessairement mauvais par lui-même, ainsi que nous venons de le prouver. Donc la distinction des êtres ne peut avoir pour cause deux principes, l'un bon et l'autre mauvais.
6° Si tout être, envisagé comme être, est bon, il s'ensuit que le mal, par cela même qu'il est mal, est un non-être. Or, il n'y a pas lieu de supposer une cause active du non-être pris comme tel, puisque tout agent agit parce qu'il est un être en acte, et que chaque être en produit un autre semblable à lui. Donc on ne peut dire qu'il existe pour le mal, en tant qu'il est un mal, une cause agissante par elle-même; donc il n'y a aucune raison d'attribuer ce qui est mauvais à une première cause unique, qui soit par elle-même la cause de tous les maux.
7º Lorsqu'il survient quelque chose en dehors de l'intention de l'agent…
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7º Lorsqu'il survient quelque chose en dehors de l'intention de l'agent, la cause n'est pas telle par elle-même, mais par accident; c'est ce qui arrive quand une personne découvre un trésor en creusant la terre pour planter un arbre. Or, le mal ne peut s'introduire dans un effet qu'en dehors de l'intention de l'agent, puisque tout agent recherche quelque bien; et le bien, c'est ce que tous les êtres désirent. Donc le mal n'a pas de cause qui soit telle par elle-même, mais c'est par accident qu'il se rencontre dans les effets qui résultent des causes. Donc il n'y a pas de premier principe unique de tous les maux.
8º La contrariété qui se rencontre entre les agents existe également dans leurs actions. Donc il n'y a pas de principes contraires pour les choses qui sont la conséquence d'une seule action. Or, la même action produit le bien et le mal. Par exemple, c'est la même qui en décomposant l'eau donne naissance à l'air. Donc on ne peut conclure de la différence du bien et du mal, que l'on remarque dans les êtres, qu'il y a des principes contraires.
9° Ce qui n'existe absolument pas n'est ni bon ni mauvais, et…
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9° Ce qui n'existe absolument pas n'est ni bon ni mauvais, et ce qui existe est, par là même, un bien, ainsi qu'il vient d'être dit.
Donc le mal est quelque chose, en tant qu'il est un non-être, c'est-à-dire un être par privation. Donc ce qui est mauvais est, comme tel, un être par privation; et le mal lui-même n'est autre que la privation. Or, la privation n'a pas de cause agissante par elle-même, parce que tout agent agit, en tant qu'il revêt une forme. Il est, par conséquent, essentiel que l'effet qui émane de l'agent soit revêtu d'une forme, puisque l'agent produit un être semblable à lui, à moins qu'il n'en soit accidentellement empêché. Donc le mal ne vient pas d'une cause agissante par elle-même; mais il s'introduit par accident dans les effets qui sont dus aux causes douées de cette propriété. Donc il n'existe pas de premier principe unique et essentiel des maux; mais le premier principe, d'où procède toute chose, est un et bon, et s'il se rencontre quelque mal dans ses effets, ce mal est accidentel.
Ainsi s'explique ce passage d'Isaïe: Je suis le Seigneur, et il n'y a point d'autre Dieu; c'est moi qui forme la lumière et qui produis les ténèbres; je fais la paix et je crée le mal. Je suis le Seigneur qui fais toutes ces choses [Isaïe, ]XLV 6-7].
Nous lisons aussi dans l'Ecclésiastique : C'est de Dieu que viennent les biens et les maux, la vie et la mort, la pauvreté et la noblesse [Eccli. XI, 14]. Et encore : Le bien est opposé au mal, et la mort à la vie; de même, le pécheur est contraire à l'homme juste. Considérez toutes les œuvres du Très-Haut, vous les verrez deux à deux et une contre une [Eccli. XXXIII, 15].
Lorsqu'on dit que Dieu fait ou crée le mal, on l'entend en ce sens qu'il…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la distinction des êtres.XLILa distinction des êtres ne vient
d’aucune contrariété entre les premiers agents.SUITE
Lorsqu'on dit que Dieu fait ou crée le mal, on l'entend on ce sens qu'il crée des êtres bons en eux-mêmes, qui sont cependant nuisibles aux autres. Le loup, par exemple, est un bien dans la nature, et pourtant il est un mal par rapport à la brebis. Il en est de même du feu, relativement à l'eau, en tant qu'il l'altère. Pour la môme raison, il y a une cause de mal dans tout ce qui porte le nom de peine. C'est ce qui fait dire au prophète Amos : Verra-t-on dans la ville un seul mal que le Seigneur n'ait pas fait lui-même [III, 6] ? C'est aussi la doctrine de saint Grégoire : Le Seigneur, dit-il, a créé même les maux qui n’ont aucune subsistance, quant à leur nature. Mais par les maux dont on lui attribue la création, on entend les créatures bonnes en elles-mêmes, et qu'il change en fléaux quand nous faisons le mal [Moral. 1. III, ch. 9, in cap. II, B. Job].
Cette démonstration renverse l'erreur des premiers principes contraires. Cette erreur doit sa naissance à Empédocle, qui suppose l'existence de deux premiers principes actifs, savoir l'amitié et la discorde (1). Selon lui, l'amitié est la cause de la génération, er la discorde, de la destruction. D'où l'on peut conclure, comme Aristote l’a fait remarquer, qu'il admit deux premiers principes contraires qui sont le bien et le mal (2).
Pythagore parle aussi du bien et du mal comme existant les premiers; cependant il ne les présente par comme principes actifs, mais seulement comme principes formels; car il en fait deux genres qui comprennent, dans leur étendue, tous les êtres. C'est ainsi que l'entend le Philosophe (3).
Des hommes d'un sens perverti formèrent la téméraire entreprise d'allier à la doctrine chrétienne ces illusions des anciens philosophes, que réfutèrent assez bien ceux qui vinrent après eux. Le premier d'entre eux fut Marcion, dont le nom passa aux Marcionites. A la faveur de sa qualité de chrétien, il forma une hérésie qui reposait sur la croyance à deux principes divers. Il fut imité par les Cerdoniens, et plus tard par les Manichéens, qui propagèrent au loin cette erreur (4).
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(1)Voyez la note 4 du chap. 38, p. 442. => L’amitié ou la concorde et la discorde remplissent, dans la physique des anciens, le même rôle que les deux forces désignées aujourd'hui sous les noms d'attraction et de répulsion.
(2), (3) Ces notes sont libellées en latin; sur demande, nous les publierons. Bien à vous.
(4) Toutes les sectes gnostiques ont admis plus ou moins explicitement l'existence de deux principes éternels et distincts du bien et du mal. Les Manichéens sont ceux qui ont le plus précisé cette doctrine, que nous trouvons déjà dans la religion de Zoroastre. Il proclame un principe invisible et infini, cause éternelle de deux principes éternels, mais opposés, qui engendrent à leur tour divers ordres de puissances formées à leur image, et, enfin, tous les êtres de l'univers. Ormuzd est le premier de ces principes, et Ahrimane est le second. Ormuzd, le génie de lumière, c'est l'intelligence, la vie, la force; Ahrimane, la puissance des ténèbres, est la matière ou le donner degré de l'existence. — Les Égyptiens ont adopté à peu près les mêmes idées; chez les Chaldéens et les Perses, le principe universel est Amour ; les deux principes éternels émanés de lui s'appellent, celui du bien ou l'esprit, Kneph ; celui du mal ou la matière, Athor. — Cette croyance forme le fond des divers systèmes de la philosophie indienne.
Chap. XLII. La cause de la distinction des êtres…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la distinction des êtres.XLIILa cause de la distinction des êtres n’est pas
l’ordre qui existe entre les agents secondaires.
Ce qui précède nous aide encore à démontrer que la distinction des êtres n'a pas sa cause dans l'ordre des agents secondaires, ainsi que l'ont avancé quelques-uns. Dieu, disaient-ils, étant un et simple, il produit un effet unique, qui est la première substance créée. Cette substance est dans l'impossibilité d'égaler la simplicité de sa cause propre, puisqu'elle n'est pas un acte pur, mais un mélange de puissance ; il en résulte une certaine multiplicité, qui est le principe de la pluralité. Les effets s'éloignant ainsi toujours de la simplicité de leurs causes, à mesure qu'ils se multiplient, il y a diversité dans les causes qui concourent à la formation de l'univers (1).
1° Cet argument ne suppose pas qu'il existe une cause unique de la diversité des êtres, mais on l'attribue à chaque cause déterminée de chaque effet; d'où il suit que cette diversité de tous les êtres est un effet dû au concours de toutes les choses. Or, nous prétendons, de notre côté, que tout ce qui provient du concours de diverses causes, et non d'une cause unique et déterminée, existe fortuitement. Donc il faut attribuer au hasard la distinction des choses et l'ordre de l'univers.
2° Ce qui existe de meilleur parmi les créatures doit se rapporter, comme à sa cause première, à ce qu'il y a de meilleur dans le nombre des causes. Donc les effets doivent être proportionnés à leurs causes. Or, ce qui existe de meilleur parmi tous les êtres créés, c'est l'ordre de l'univers qui est son bien, de même que dans les choses humaines le bien d'une nation l'emporte sur celui d'un individu. Donc il faut rapporter le bien de l'univers à Dieu, comme à sa cause propre, puisque nous avons démontré qu'il est le souverain bien [liv. I, ch.41]. Donc la distinction des choses, qui constitue l'ordre de l'univers, n'est pas l'effet des causes secondes, mais plutôt une conséquence de l'intention de la première cause.
3º C'est, ce semble, une absurdité de rapporter ce qui existe de meilleur parmi les êtres à ce…
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(1) L'opinion dont parle ici saint Thomas et celle qu'il doit réfuter dans le chapitre suivant paraissent dériver de la doctrine des émanations, qui est commune aux sectes gnostiques, bien qu'elle varie suivant les idées de chaque sectaire. — D'après cette doctrine, tons les êtres découlent du sein de Dieu, et leur perfection décroît à mesure qu'ils s'éloignent de leur source. Ou bien encore, le premier être est sorti de Dieu, il est lui-même principe, et les êtres auxquels il a donné naissance en ont produit d'autres toujours de moins en moins parfaits.— L'hérétique Valentin, et d'autres avec lui, admettent une série d'êtres procédant les uns des autres, qu'ils appellent Eons, et; dont le nombre va jusqu'à trois cent soixante-quatre. — On a distingué les gnostiques en cinq groupes : le groupe palestinien ou primitif, le groupe syriaque, le groupe égyptien, le groupe sporadique, le groupe asiatique. On place dans le premier: Simon-le-Magicien, Ménandre, Cérinthe, etc.: dans le second: Saturnin, Bardesane d'Edesse, etc; dans le troisième : Basilide, Valentin, les Ophites ; dans le quatrième : Carpocrate, Prodicus. les Séthiens, les Borboriens, les Adamites, les Gnostiques proprement dits, etc. ; dans le cinquième : Cordon, Marcion, etc, — On peut consulter à ce sujet le Dictionnaire théologique de Bergier, et le Dictionnaire des hérésies de Pluquet.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la distinction des êtres.XLIILa cause de la distinction des êtres n’est pas
l’ordre qui existe entre les agents secondaires.SUITE
3º C'est, ce semble, une absurdité de rapporter ce qui existe de meilleur parmi les êtres à ce qu'il y a de défectueux en eux, comme à sa cause. Or, ce qui existe de meilleur dans les créatures, c'est leur distinction et l'ordre dans lequel elles sont disposées [ch. 39]. Donc on ne peut, sans déraisonner, dire qu'une telle distinction provient de ce que les causes secondes s'éloignent de la simplicité de la première cause.
4° Il n'est aucune cause agissante coordonnée qui agisse pour une fin sans que les fins des causes secondes se rapportent à la fin de la cause première. Par exemple, la fin de l'art militaire, de la science équestre et de l’industrie qui s'occupe à fabriquer les freins des chevaux, est déterminée par la fin de la société civile.
Or, la production des créatures, qui émanent du premier être, est le résultat d'une action coordonnée avec une fin, puisque cela se fait par le moyen de l'intelligence [ch. 23], et l'intelligence de l'homme agit également en vue d'une fin. Si donc certaines causes secondes coopèrent à la production des êtres, leurs fins et leurs actions doivent avoir leur raison dans la fin de la cause première, qui est la fin dernière de tout effet. Cette fin, c'est l'ordre des parties de l'univers et leur distinction, qui est comme sa forme dernière. Donc la distinction et l'ordre n'existent pas dans les choses, à raison des actions des causes secondes ; mais les actions des causes secondes se font plutôt dans le but d'établir l'ordre et la distinction qui doivent exister dans les choses.
5º Si la distinction des parties de l'univers et l'ordre suivant lequel elles sont rangées sont un effet qui…
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De la distinction des êtres.XLIILa cause de la distinction des êtres n’est pas
l’ordre qui existe entre les agents secondaires.SUITE
5º Si la distinction des parties de l'univers et l'ordre suivant lequel elles sont rangées sont un effet qui appartient en propre à la première cause comme étant la forme dernière et la perfection de l'univers, cette distinction et cet ordre doivent nécessairement exister dans l'intelligence de la première cause. En effet, lorsqu'il s'agit des choses qui se font par l'intelligence, la forme dont elles sont revêtues, quand elles se réalisent, vient d'une forme semblable qui est dans l'intelligence. Ainsi, cette maison, qui se compose de matière, est faite sur le plan de la maison qui est dans l'esprit.
Or, la forme de la distinction et de l'ordre ne peut exister dans l'intelligence, quand elle agit, sans que les formes des êtres distincts et coordonnés s'y trouvent également.
Donc l'intelligence divine comprend les formes des choses qui sont distinctes, diverses et coordonnées, et il n'y a en cela rien qui répugne à sa simplicité, comme nous l'avons prouvé [Liv. I, 51 , 52, 53, 54.]. Si donc, pour les choses qui se font au moyen de l'intelligence, celles qui se réalisent en dehors de l'esprit proviennent de celles qui sont dans l'intelligence, la première cause pourra produire immédiatement plusieurs êtres divers sans que la simplicité divine s'y oppose, ainsi que l'ont pensé certains auteurs qui, pour cette raison, ont admis l'opinion que nous avons exposée.
6° Lorsqu'un être agit par son intelligence, son action a pour terme la forme qu'il connaît…
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De la distinction des êtres.XLIILa cause de la distinction des êtres n’est pas
l’ordre qui existe entre les agents secondaires.SUITE
6° Lorsqu'un être agit par son intelligence, son action a pour terme la forme qu'il connaît, et non une autre, à moins que le contraire n'arrive par accident et fortuitement. Or, Dieu agit par son intelligence [ch. 23]. Donc on ne peut attribuer son action au hasard, puisqu'il est impossible qu'il reste en deçà du but qu'il veut atteindre en la faisant. Donc il produit son effet, parce qu'il le connaît et dirige vers lui son intention. Or, s'il connaît un effet unique, il peut, pour la même raison, en connaître une multitude d'autres qui sont distincts de lui. Donc Dieu peut devenir cause d'un grand nombre de choses instantanément et immédiatement.
7° Nous avons prouvé [ch. 22] que la puissance divine n'est pas limitée à un seul effet, ce qui provient de sa simplicité ; car plus une puissance est une, plus elle est infinie, et elle peut s'étendre, par conséquent, à beaucoup plus de choses. Or, un agent ne se trouve dans la nécessité de faire une seule chose, qu'autant qu'il est déterminé à un effet unique. Donc il n'est pas permis d'affirmer que Dieu étant un et parfaitement simple, il ne peut être le principe de la multitude qu'au moyen de certains êtres qui ne partagent pas sa simplicité.
8° Dieu seul peut créer…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Chap. XLIII. La distinction des êtres n’a pas pour…De la distinction des êtres.XLIILa cause de la distinction des êtres n’est pas
l’ordre qui existe entre les agents secondaires.SUITE
8° Dieu seul peut créer[ ch. 21].
Or, il y a une multitude d'êtres qui ne peuvent recevoir l'existence que par une création ; et il en est ainsi de tous ceux qui ne sont pas composés d'une matière et d'une forme soumises à la contrariété; et qui, par cela même, ne sont pas susceptibles d'exister par voie de génération, puisque toute génération demande deux principes contraires et une matière. Or, on doit considérer comme tels toutes les substances intellectuelles, tous les corps célestes, et même la matière première. Donc il en faut conclure que tous ces êtres ont trouvé en Dieu, immédiatement, le principe de leur existence.
C'est pourquoi nous lisons dans la Genèse : Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre [Gen. I, 1]; et dans le livre de Job : Avez-vous, par hasard, concouru avec lui à fabriquer les cieux, dont la solidité est telle qu'on les dirait coulés en airain fondu [Job, XXXVII, 18] ?
En établissant cette vérité, nous avons réfuté l'opinion d'Avicenne, qui se résume ainsi : Dieu, en se connaissant lui-même, a produit une intelligence première en qui se trouvent déjà réunis la puissance et l'acte. Cette intelligence, par là même qu'elle connaît Dieu, en produit une seconde. En tant qu'elle se connaît elle-même comme existant actuellement, elle donne naissance à l'âme du monde; tandis qu'en se connaissant selon qu'elle est en puissance, elle produit la substance du premier univers. En partant de là, ce philosophe trouve la raison de la diversité dans les causes secondes.
Nous détruisons également l'opinion de quelques hérétiques anciens qui enseignaient que la création n'avait pas Dieu, mais les anges pour auteurs. Cette erreur est, à ce qu'il parait, une invention de Simon-le-Magicien.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la distinction des êtres.XLIII.La distinction des êtres n’a pas pour auteur
un ange qui revêt la matière de formes diverses.
D'autres hérétiques, plus récents, disent que Dieu a créé la matière de tous les êtres visibles, mais qu'un ange a introduit la distinction dans cette matière au moyen de diverses formes. Cette opinion est évidemment fausse. En effet :
1° Les corps célestes, qui ne sont soumis à aucune contrariété, ne peuvent avoir été formés d'une certaine matière; car il y a nécessairement un principe contraire dans tout ce qui se fait d'une matière préexistante. Il est donc impossible qu'un ange ait formé les corps célestes d'une matière créée antérieurement par Dieu.
2° Ou les corps célestes n'ont pas une matière commune avec les corps inférieurs, ou bien, s'ils en ont une, ce ne peut être que la matière première; car le ciel n'est pas un composé d'éléments, et sa nature n'est pas non plus d'être un élément (1). C'est ce que démontre son mouvement comparé aux mouvements divers de tous les éléments. Or, la matière première ne peut pas avoir existé par elle-même avant tous les corps revêtus d'une forme, puisqu'elle n'est qu'une pure puissance, et toute existence actuelle vient d'une certaine forme. Donc un ange n'a pu former tous les corps visibles d'une matière créée auparavant par Dieu.
3° Tout ce qui se fait ne se fait que pour exister…
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(1) Saint Thomas parle ici d'après l'opinion généralement reçue par les anciens philosophes qui, voyant les corps célestes exempts de toute altération apparente pour nous, en avaient conclu qu'ils n'étaient pas composés d'éléments divers, mais d'une matière unique par sa nature comme celle des corps simples.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la distinction des êtres.XLIII.La distinction des êtres n’a pas pour auteur
un ange qui revêt la matière de formes diverses.SUITE
3° Tout ce qui se fait ne se fait que pour exister, car l'acte d'être fait est la voie qui conduit à l'être. Donc cet acte d'être fait, convient à chacun des êtres créés dans la même mesure que l'existence. Or l'être ne convient pas uniquement à la forme, ni seulement à la matière, mais au composé; car la matière n'est qu'en puissance, et c'est par la forme qu'une chose est ce qu'elle est, puisque la forme est un acte. Donc le composé est proprement fait. Donc cela lui appartient en propre, et non à la matière indépendamment de la forme. Donc il n'est pas vrai qu'un agent crée seulement la matière, et qu'un autre lui donne sa forme.
4° La première application de la forme à la matière ne peut avoir pour auteur un être qui agit uniquement au moyen du mouvement; car tout mouvement qui doit se terminer à une forme est la transition d'une forme déterminée à une autre forme déterminée. Et par conséquent, comme la matière ne peut être absolument dépourvue de forme, on suppose qu'il y a déjà en elle une certaine forme. Or, tout agent qui ne vise qu'à la seule forme matérielle doit nécessairement agir au moyen du mouvement. En effet, puisque les formes matérielles ne subsistent pas par elles-mêmes, mais que leur être réside dans l'être de la matière, elles ne peuvent arriver à l'existence que par la création du composé tout entier, ou par le changement de la matière qui prend telle ou telle forme nouvelle. Il est donc impossible que la première application des formes à la matière ait été faite par un être qui a créé seulement la forme, mais il faut l'attribuer au créateur de tout le composé.
5º Le mouvement qui se fait vers une forme est naturellement postérieur…
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