Le Martyre de la Vendée.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ IV
Martyre de PIERRE-ALEXIS TORTEREAU, curé de Challans, 13 juillet 1793.
PIERRE-ALEXIS TORTEREAU, d'abord curé de la Roche-sur-Yon, démissionna en 1758, et devint curé de Challans en 1763.
Après avoir refusé le serment, il alla se réfugier à la Chaume, où il fut arrêté par les républicains, mené à Fontenay et incarcéré dans cette ville.
Les Vendéens le délivrèrent au mois de mars 1793.
Mais il fut bientôt repris et traduit devant la Commission militaire de Saumur, le 13 juillet de la môme année.
Condamné à mort « pour avoir été membre et instigateur du rassemblement des Brigands », il fut exécuté le soir même du 13 juillet, à 4 heures, sur la place de la Billange (2).
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(2) Note communiquée par Monsieur EDGARD BOURLOTON, d'après les dossiers de l'abbé PONTDEVIE.
A suivre : § V. Vie et martyre de JOSEPH HERBERT, curé de Maillé, 5 septembre 1793.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ V
Vie et martyre de JOSEPH HERBERT, curé de Maillé, 5 septembre 1793.J'ai fait pour ma paroisse l'office de bon pasteur ; je donne ma vie pour mes brebis.
(Lettre de Monsieur Herbert à sa nièce.)
Dans les premiers jours du mois de septembre 1793, un voyageur venant de la Rochelle et passant par Andilly, rencontrait, près de son chemin, une jeune bergère, qu'il reconnaît à son costume pour une habitante du Bas-Poitou et des environs de Maillezais.
— D'où es-tu, ma petite Poitevine? dit-il à l'enfant.
— Je suis de Maillé, répond-elle
— Ah ! tu es de Maillé ! eh bien ! je viens de voir guillotiner ton prêtre, Monsieur Herbert
— C'est lui qui m'a fait faire ma première communion, dit la jeune fille, avec émotion.
— Tu avais un saint prêtre, reprend le voyageur, en continuant sa route (1)
La présente Notice contient tout ce que nous avons pu recueillir d'intéressant sur ce saint prêtre, Monsieur JOSEPH HERBERT curé de la paroisse de Notre-Dame de Maillé, dans l'île de Maillezais.
Monsieur Herbert nous fournit lui-même quelques précieux détails autobiographiques, qu'il a consignés dans le Registre de catholicité de sa paroisse.
« Moi, Joseph Herbert, prêtre, natif de la paroisse de Sainte-Mélaine-des-Aubiers, à deux lieux de Châtillon-sur-Sayvre, en Bas-Poitou, ai pris possession de la cure de Notre-Dame de Maillé le 25 septembre de cette année 1768, un jour de dimanche avant vêpres, après 19 ans et 3 mois de vicariat; ayant été ordonné prêtre le 31 mars 1749.
« J'avais par conséquent 43 ans, quand je suis entré dans ma cure, car je suis né le 30 mars 1725.
« Je suis le premier curé de la nomination de Monseigneur François-Joseph-Emmanuel de Crussol d'Uzès, évêque de la Rochelle (1)
« J'ai succédé à Monsieur Jacques-François Mallécot, décédé le 13 septembre dernier. »
Monsieur Herbert ajoute : « J'écrirai tous les ans, à la fin du registre, les principaux événements qui seront arrivés dans ce pays-ci »
Ces notes, rédigées dans une écriture fine, nette et ferme, nous aideront à mettre en relief cette physionomie douce et grave d'un humble curé de campagne au XVIIIe siècle
Pendant près de 23 ans, du 13 octobre 1768 au 5 juin 1791, presque tous les actes de baptême, de mariage et de sépulture sont écrits de sa main et ne signalent que deux ou trois absences.
Nous devons relever cette preuve de l'assiduité du pasteur à garder la résidence au milieu de son troupeau.
Quand il est forcé de quitter sa paroisse, il ne manque pas de la confier à un prêtre digne de sa confiance.
A la date du 17 avril 1774 il écrit : « Obligé de partir pour mon pays, où mes affaires m'appellent, je prie Monsieur Juin, prêtre, curé de Dampvix, mon voisin et mon ami, de prendre soin, en mon absence, de ma paroisse, et l'autorise avec confiance à faire pour mon troupeau ce qu'il fait pour le sien. »
L'esprit de foi, de piété et de religion profonde de…
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(1) Nous tenons le détail de ce simple et touchant dialogue de Marie Dubois, très pieuse personne de Maille, née en 1811, elle le tenait elle-même de la jeune fille de 1793. — (1) Monseigneur François Joseph de Crussol d'Uzès gouverna le diocèse de la Rochelle pendant 20 ans, de 1768 à 1789. Son amour pour la discipline était exemplaire. A cette époque, le diocèse de Luçon comprenait le département actuel de la Vendée, moins les deux doyennes de Fontenay le Comte et de Saint-Laurent-sur Sèvre, qui appartenaient au diocèse de la Rochelle.
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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L'esprit de foi, de piété et de religion profonde de Monsieur Herbert éclate, à son insu, dans les moindres détails que nous livre sa plume simple et naïve.
Il trouve une de ses plus grandes joies dans l'ornementation de son église, dans les parures de son autel, et dans tout ce qui contribue à la beauté de la maison de Dieu.
Il veut que la postérité connaisse les magnifiques chandeliers, dont il a pu doter ce cher sanctuaire de Notre-Dame de Maillé.
« C'est en cette année 1778, nous dit-il, que nous avons fait venir de Paris un beau soleil ou ostensoir, du poids de cinq marcs et cinq onces, qui nous a coûté en tout 423 livres.
« La fabrique n'y a contribué que de 19 pistoles. Le surplus a été le fruit d'une quête et de nos petites épargnes.
« Cet ostensoir mérite d'être bien ménagé ! »
Le curé de Maillé s'occupait avec un soin diligent et pieux des vieilles dévotions locales, et des monuments qui les rappellent, convaincu que la foi des générations présentes trouve un grand profit à se souvenir de la foi des générations passées, et à se retremper aux sources des antiques traditions.
« Il y avait autrefois, écrit-il, dans cette paroisse de Maillé, une chapelle dédiée à saint Pien , en latin Pientius. évêque de Poitiers. Elle était située au bord du marais, du côté du midi, entre les deux Pichonnières , à une distance à peu près égale.
« On prétend que cette chapelle avait été bâtie par les Colliberts, issus des Theïfaliens, nation scite et barbare qui, étant venue, au commencement de l'onzième siècle, pour conquérir les Gaules, avait été vaincue, et obligée de se sauver dans les halliers impénétrables de l'île de Maillezais, et dans les marais circonvoisins.
« Quelques anciens assurent que leurs pères y ont entendu la messe, et qu'elle subsistait encore il y a 110 ans.
« Les domaines de cette chapelle, qui sont où elle a été située et aux environs, ont été réunis à cette cure, mais je n'en ai point trouvé les titres.
« Un monceau de terre et de pierres en désignaient encore l'emplacement quand je suis venu ici, mais cette année (1772), j'ai tout déblayé jusqu'aux fondements. J'y ai occupé un homme pendant trois mois, qui en a tiré une centaine de charretées de pierres.
« On a trouvé quatre tombeaux, avec des ossements; trois étaient en dedans, et le quatrième, en dehors de la chapelle. Ces tombeaux, que j'ai laissés dans le lieu, sont de deux morceaux chacun, creusés de manière à y mettre commodément un corps. Il y a une place en rond pour la tête et des accoudoirs pour les bras, et ils sont couverts de deux grandes pierres longues et plates (1)
« Saint Pien était autrefois chommé ici le 13 mars. Cette fête a été retranchée par Monseigneur de Crussol, notre évêque, dans le cours de cette année.
« La dévotion à saint Pien est contre la surdité et les maux de tête. II n'y a pas de semaine que je ne reçoive quelque messe votive à cette intention »
La foi vive du saint prêtre découvrait…
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(1) Il serait intéressant pour la piété comme pour l'histoire qu'un monument, une croix par exemple, marquât l'emplacement de l'antique et vénérable chapelle.
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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La foi vive du saint prêtre découvrait, sous le voile des événements contingents de la vie, la main de l'éternelle Providence qui gouverne tout.
En nous parlant des calamités de l'année 1770, il nous les signale comme une manifestation terrible de la justice de Dieu.
C'est la disette, c'est la famine, c'est l'inondation formidable, qui déborde et qui monte comme un déluge, qui entraîne tout dans ses flots « ponts, maisons, moulins, chaussées. »
L'eau s'élevait jusqu'à la porte du cimetière et de l'église.
« Enfin, dit-il, notre principale digue ne pouvant plus porter un volume si prodigieux, et horriblement battue d'une tempête affreuse, qui dura 24 heures, depuis la nuit du dimanche au lundi, elle creva le mercredi suivant, 28 novembre, sur les 7 heures du soir, un peu au-dessous du Fort du Doignon. L'éboulement a été d'environ 30 toises de longueur (1). »
Le pieux chroniqueur termine son récit, en nous montrant dans ce désastre « un effet visible de la colère du Ciel. »
« Et cependant, ajoutait-il, Dieu a tempéré ses coups, du moins à notre égard, en protégeant la vie des personnes contre cette fureur de tous les éléments déchaînés (2).
La rédaction des actes de sépulture nous indique les soins attentifs du pasteur envers les moribonds qu'il assiste.
Tandis que ses prédécesseurs se bornaient à constater strictement et sèchement le décès, Monsieur Herbert emploie presque toujours la formule « muni des sacrements de l'Eglise. »
Et dans le dernier acte rédigé de sa main, à la date du 5 juin 1791, il accentue sa religieuse formule, et en fait une profession de foi catholique.
« J'ai enterré dans le cimetière de ce lieu le corps de Marie-Thérèse Chartier, décédée hier, en ce bourg, dans la communion de l'Eglise catholique, apostolique et romaine. »
On croit entendre sortir du cœur du prêtre fidèle une énergique protestation contre le serment schismatique, dont le refus conduisait, quelques jours après, Monsieur Herbert dans les prisons de Fontenay, et le 5 septembre 1793, à l'échafaud dressé pour lui sur la place publique de la Rochelle.
Les enfants en danger de mort étaient, pour le zélé pasteur, l'objet d'une tendre et particulière sollicitude. Pour peu que nous sachions lire entre les lignes, nous l'apprenons encore du précieux Registre, qui devait faire à l'historien du futur martyr tant d'élogieuses confidences, dont l'humble curé n'avait pas le moindre soupçon.
Il nous dit, à la date du 30 octobre 1781 : « Marie Géant, âgée d'environ 11 ans et demi, est décédée de hier, à la cabane de Saint-Roman, au Bois-Dieu, munie des sacrements de pénitence et d'extrême-onction, n'ayant pu recevoir la sainte communion, à cause d'un cancer, qui lui a dévoré le visage. »
Le 31 juillet 1783, il constate la pieuse fin d'une jeune fille qui n'avait pas encore 10 ans. « Anne Jourdain est décédée de hier en ce bourg, munie des sacrements de pénitence et d'extrême-onction. »
En entrant au ciel par la porte du martyre, le saint curé a dû trouver, pour l'accueillir et lui faire cortège, la troupe triomphante de ces bienheureux paroissiens, dont il avait sanctifié l'agonie et la mort.
On l'a dit avec raison, le catholicisme est l'école du respect et de la subordination.
Tous les actes de Monsieur Herbert lui rendent témoignage qu'il fut un disciple éminent de cette grande école.
Rien n'est touchant comme la respectueuse et naïve déférence qu'il professe pour les autorités constituées par Dieu, selon le précepte de l'Apôtre : « Que chacun soit soumis aux pouvoirs que la puissance divine et souveraine a placés au-dessus de lui (1). »
Son évêque, Monseigneur Crussol, lui avait fait demander…
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(1) « On mit un mois à réparer la brèche, et dans l'exécution de ce travail, M. Herbert est heureux de rendre hommage à l'habileté de M. de Buor de Bois-Lambert, directeur du Marais, ainsi qu'au sieur Gravier, fermier de Vix et commis des Levées. »
Le dévoué pasteur voulut contribuer pour sa part à ces travaux. « Pendant tout ce mois, dit-il, ces Messieurs ont pris chez moi leurs repas, et l'un d'eux y a couché. »
(2) « Il n'est péri ici personne, ni même aux environs, excepté le nommé Jean Orgerit, de mon bourg, encore est-ce par imprudence. » Registre, fin de l'année 1770.
(1) Ad. Rom. XIII, 1.
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Louis- Admin
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Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Le Martyre de la Vendée.
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Son évêque, Monseigneur Crussol, lui avait fait demander par le syndic du clergé une déclaration des revenus de sa cure.
Voici la réponse qu'il fait à cette demande, dans le cours de l'année 1769.
« Monsieur le Syndic du clergé, j'ai différé jusqu'ici à donner à Monseigneur une déclaration des revenus du bénéfice-cure dont il m'a gratifié. Ce n'a été ni par oubli ni par négligence, moins encore par indocilité pour ses ordres. Ils sont trop respectables et trop visiblement dictés par les mouvements de sa tendresse pastorale et paternelle pour son clergé, pour que j'hésite un moment à m'y soumettre. Refuser d'obéir à Sa Grandeur, dans la circonstance actuelle, serait un manque de confiance plus injurieux à son cœur que la désobéissance même.
« Que le succès du projet qu'a formé notre très illustre prélat de faire diminuer nos impôts réponde ou ne réponde pas à ses désirs, je n'en serai pas, en mon particulier, moins reconnaissant de ses bonnes volontés pour nous.
« Je suis, Monsieur, nouvellement placé à Maillé. Je n'avais pu donner une déclaration exacte des revenus de ma cure, dans le temps que votre lettre circulaire m'est parvenue. J'ai attendu que la récolte fût finie, pour la faire avec plus de connaissance de cause. Voilà le sujet de mon retardement. »
Il donne ensuite, dans les plus minutieux détails, l'énumération des très médiocres revenus de son humble bénéfice. Il dit qu'en dehors des terres affermées, il s'est réservé, pour son usage, un petit pré appelé le Petit Pré Saint-Pien. Il se fait un scrupule de conscience de compter dans l'énumération 8 poulets et 3 livres de laine, que son fermier doit lui donner tous les ans, et qu'il estime 100 sous.
Le modeste bénéficier termine ainsi sa lettre :
« Voilà, Monsieur, dans la sincérité et dans la conscience, toutes les terres, prés et rentes que je connais appartenir à la cure de Maillé, et qui me font un revenu annuel de 500 livres. Monseigneur a le terrage. Il est vrai que ces années-ci (en 1768 et 1769), nos revenus doublent, parce que le blé est à un prix excessif; mais on ne peut ni compter ni désirer que la chèreté des grains dure davantage ; que deviendrait le pauvre peuple, déjà épuisé par la famine de plusieurs années?
« Il vous est facile, Monsieur, de voir que je ne déguise rien, dans l'état que je présente des revenus de ma cure, puisque j'y fais entrer jusqu'aux menus suffrages, qui ne se comptent jamais. Dans le pouillé, elle est portée à 600 livres, et je la monte à sept, sans que je voie en quoi elle a pu s'améliorer de 100 francs.
« Sur ces 700 livres, qui constituent tout mon revenu, je paie 62 livres en décimes, et 20 francs de prestations à Monsieur l'archidiacre d'Ardin.
« Je dois 11 messes de fondation et un boisseau de méture, estimé 20 sols. C'est un total de 89 livres de charges que porte mon bénéfice, sans y comprendre les réparations, auxquelles vous dites, Monsieur, que la Chambre n'aurait point d'égard. Quelle taxe, en comparaison des 10 francs qu'a payés Monsieur Rozet, un de mes prédécesseurs !
« Je ne parle point des pauvres que j'ai sur les bras, et de ce que me coûte un maître d'école, que j'ai établi, sous le bon plaisir de Monseigneur : c'est un fardeau volontaire que je me suis imposé.
« Je le répète, Monsieur, voilà, dans la plus grande sincérité, tout ce qui constitue mon bénéfice ; du moins je n'en connais pas davantage.
« Permettez que je fasse une autre déclaration, c'est d'être avec un très profond respect, Monsieur le Syndic du clergé, votre très humble et très obéissant serviteur. Herbert, prêtre, curé de Maillé. »
À la fin de 1770, il ajoutait cette simple note :
« La déclaration que je rendis, l'année dernière, des revenus de ma cure, a été sans aucun succès ; on ne saurait en imputer la faute à Sa Grandeur. »
Cette lettre est un portrait; dans sa loyale et respectueuse franchise, elle nous manifeste toute la candeur de cette âme vraiment sacerdotale.
En 1773, il y eut, dans le diocèse de la Rochelle…
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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En 1773, il y eut, dans le diocèse de la Rochelle, un changement de livres liturgiques, et ces innovations ne vont guère sans une pointe de critique contre l'autorité qui les introduit. Monsieur Herbert se borne à noter simplement le fait : « Nous avons commencé, cette année, à nous servir d'un nouveau bréviaire, qui est presque le même que celui de Paris, en 4 volumes in-12, et de nouveaux livres de chant, ainsi que du missel qu'on a adapté au bréviaire. »
C'est dans cette même année qu'il reçut la visite de son évêque, et avec quelle démonstration de respect et de vénération pour la dignité épiscopale !
« L'année que nous finissons, nous dit-il, ne présente rien de fort intéressant, si ce n'est la visite de Monseigneur François Joseph-Emmanuel de Crussol d'Uzès, notre seigneur évêque. J'allai le recevoir le vendredi à Vix, 14 du mois de may. Il se rendit, de là, souper et coucher à la cure, où j'eus l'honneur de le recevoir avec sa suite.
« Le lendemain, samedi, il donna dans notre église la confirmation à un grand nombre de personnes, tant d'ici que des paroisses voisines.
« Je le complimentai en français, et je lui donnai à dîner, ainsi qu'à une vingtaine de prêtres, qui vinrent le saluer.
« Il se rendit ensuite coucher à Maillezais, et le lendemain, dimanche, 10 du mois, il y donna la confirmation.
« Il y avait longtemps que les évêques de la Rochelle n'avaient visité leur diocèse. »
Le pouvoir civil avait sa part dans ce culte de l'autorité, fut-elle représentée par un Louis XV.
En 1771, Monsieur Herbert applaudissait à la chute de cet audacieux parlement de Paris, qui ne visait à rien moins qu’à l'anéantissement de l'autorité royale.
« Cette étonnante révolution, écrit-il, qui prouve combien sont puissants chez eux les rois de France, a été dirigée par le zèle intrépide et les vastes lumières de Monsieur le chancelier Maupeou. II était temps de réprimer l'audace de ce corps redoutable. II semble qu’il ne méditait rien moins que d'étendre ses deux mains, l'une au sceptre et l'autre à l'encensoir (1). »
Il écrivait à la fin de 1774: « C'est dans 1'année que nous finissons que nous avons perdu le meilleur des rois, Louis XV, le Bien-Aimé de son peuple »
Maillé est si loin de Versailles ! La naïveté de cette note prouve que ce pieux curé du Bas-Poitou ne connaissait point la chronique scandaleuse de la cour ; mais ne prouve-t-elle pas aussi qu'il restait fidèle à la grande école catholique du respect ?
Par un décret du 10 mai 1776, Louis XVI portait la défense d'enterrer désormais le commun des fidèles dans les églises ; il ne faisait exception que pour les archevêques, évêques et curés, en y mettant certaines conditions.
« Je ne me propose point, dit Monsieur Herbert, d'avoir ma sépulture dans mon église à ces conditions, qui sont presque impraticables, et mes successeurs, à ce que je pense, en feront autant.
« Au reste, ajoutait-il, ce règlement est très sage et plein de religion. Il prévient la profanation de nos temples, et les malheurs trop souvent arrivés à l'ouverture des tombeaux placés dans les églises.
« Le cimetière doit être le dortoir général de tous fidèles, en attendant la résurrection des corps, qui arrivera à la fin du inonde, comme la foi nous l'enseigne. »
« Je ne me propose point d'avoir ma sépulture dans mon église ! » Hélas ! si le futur martyr eut été prophète ! A côté de cette note de 1776, nous plaçons ici, sous les yeux du lecteur, ces simples mots d'un procès-verbal extrait du registre mortuaire de la Rochelle, à la date du 6 septembre 1793 : « J'ai donné lecture du dit jugement au dit Herbert, et ensuite Héraud, l'exécuteur des sentences criminelles, lui a fait monter l'échafaud et l'a mis à mort. La tête séparée de son corps, il a mis le tout dans un cercueil, qui a été enlevé par les infirmiers de l'hôpital. »
Nous avons vu l'usage que le curé de Maillé…
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(1) M. Herbert ajoute : « On dit que Nostradamus avait prédit la chute du parlement, dans deux vers, qu'on a rendus ainsi :Quand entre deux piliers on verra deux potences,
L'on cessera d'avoir un parlement en France (1771)
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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Nous avons vu l'usage que le curé de Maillé faisait de ses modiques revenus pour soulager les pauvres et soutenir une école, dont il payait le titulaire de ses propres deniers.
Sa conscience lui imposait l'obligation de défendre tous les droits de son bénéfice.
La vigueur qu'il mit à remplir ce devoir nous prouve qu'il savait (allier ?) à la souplesse de sa respectueuse obéissante, une remarquable énergie de caractère.
« C'est le vendredi, 8 mars de cette présente année 1778, nous dit il, que j'ai perdu mon procès à Fontenay-le Comte, confie Monsieur Taillefer, curé de Lié, à qui je demandais la dime de ses terres qu'il a en cette paroisse.
« Malgré que la sentence me condamne à lui payer les frais et à lui restituer la dime que j'avais perçue, je n'ai fait ni l'un ni l'autre, et s'il me la faut signifier, je suis dans la ferme résolution d'en faire appel au parlement.
« Il s'agit d'onze à douze boisselées de terre, qui sont franches de terrage, et qui me doivent certainement la dime, parce que je la perçois partout où le seigneur évêque ne terrage pas. Le curé de Lié, pour se garantir de me la payer, doit avoir un titre, mais il n'en a point.
« Il y a eu du mal-jugé dans mon affaire, qui a été aussi mal défendue par mon avocat. En effet, voici l'argument sur lequel je fonde mes prétentions. Un curé, de droit commun, est décimateur, dans sa paroisse, sur toutes les terres ou nul autre décimateur ne la lui conteste. Or est-il que nul décimateur ne me conteste la dime sur les terres de la cure de Lie eu question, donc elle m'est légitimement due, a moins qu'on (n')ait un titre eu bonne forme qui en garantisse.
« Ce raisonnement me paraît sans réplique, et je l'aurais certainement fait valoir au parlement, en y interjetant appel, si je n'avais déjà un procès à défendre à ce redoutable tribunal, contre Monsieur de Gennes, grand archidiacre de la Rochelle et archiprêtre d'Ardin au sujet des prestations qu'il prétend sur nos cures, et que l'on pourrait plu tôt appeler prédations (1).
« On trouve ici, à la cure, tous les papiers qui concernent cette affaire (de Lié), et je conseille à mon successeur d'en faire usage (1), et de revendiquer ses droits, si tant est que je lui laisse cette besogne. Il verra que j'ai fait de mon mieux pour réussir. »
Le procès que le curé de Maillé soutenait contre Monsieur de Gennes, de concert avec presque tous les titulaires des cures dépendantes de l'archiprêtré d'Ardin, dura neuf ans, de 1771 à 1779.
Monsieur Herbert écrivait à cette dernière date :
« La grande affaire de nos prestations (2) avec Monsieur de Gennes a été terminée sur la fin de cette année, pour tous les frais et dépens, et quoique nous l'ayons gagnée à Fontenay et à Paris, il m'en a coûté néanmoins 20 écus de faux frais pour ma part, lesquels se montaient à plus de 2.000 livres.
« Mais je n'en ai point de regret, et je bénis le Seigneur de nous avoir délivrés de l'indigne piraterie qu'on prétendait exercer sur nous.
« L'impôt qui nous reste sur l'ancien pied mérite d'être anéanti, et j'exhorte Messieurs nos successeurs de faire tous leurs efforts, pour se tirer d'une servitude aussi injuste : car, où il n'y a point d'office, il ne doit point y avoir de bénéfice. »
Énergique à maintenir les droits de son bénéfice, Monsieur Herbert mettait les soins d'un bon père de famille à l'améliorer.
En 1776, il faisait à sa cure, en grande partie à ses frais, d'importantes réparations (1), et en 1787, il entourait de fossés sa baillette (2) de Bourneau. Il faisait planter les terriers de 4.000 plants d'aubier, de saule et de péton (3).
« Je ne jouirai peut-être pas du fruit de mes travaux, ajoutait-il; mes successeurs en feront part aux pauvres, et j'espère qu'ils prieront Dieu pour moi. »
Nous terminons ici ces extraits d'autobiographie, entièrement inédits, qui, en nous faisant pénétrer dans l'âme du martyr de 1793, nous donnent jour sur un coin de la situation du bas clergé français, pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle.
La dernière note nous livre les motifs de foi qui dirigeaient le pieux curé, dans les soins donnés aux affaires matérielles de sa cure : c'est la garde vigilante d'un bien d'Église, le souci de la justice à l'égard de ses successeurs, et le tendre intérêt qu'il portait aux-pauvres de sa paroisse.
Nous l'avons dit…
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(1) Le mot est souligné par M. Herbert.— (1) Son successeur fut un M. Sagot, prêtre intrus.— (2) Monsieur de Gennes prétendait se faire payer en nature un impôt déjà injuste sur l'ancien pied. « Nous avons presque tous refusé de payer de la sorte, et nous nous défendons » écrit M. Herbert en 1771. — (1) La cure était alors située près du Grand Port, dans l'emplacement actuellement occupé par M. Brunet, menuisier. — (2) La baillette était un morceau de marais d'environ 2 hectares.— (3) Sorte d'osier.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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Nous l'avons dit, le dernier acte rédigé par Monsieur Herbert sur le registre de catholicité de sa paroisse est l'acte de sépulture de Thérèse Charlier, « décédée dans la communion de l'Église catholique, apostolique et romaine. » Il est daté du 5 juin 1791.
On sait qu'à partir du 30 janvier de cette même année, une loi frappait de suspension tous les prêtres qui avaient refusé le serment schismatique à la Constitution civile du clergé. C'était l'époque où les instrus s'installaient à la place des pasteurs légitimes.
Le 3 mai, l'évêque constitutionnel Rodrigue faisait son entrée solennelle à Fontenay, et le 9 juillet, le prêtre intrus Sagot rédigeait et signait à Maillé le premier acte qui nous signale son intrusion sacrilège. C'était l'acte de baptême d'un Louis-François Simonneau.
L'installation de Sagot était publiquement reconnue par la majorité de la population : car c'est lui qui rédige de sa main, dans une orthographe aussi incorrecte que sa situation, tous les actes de baptême, de sépulture et de mariage, jusqu'au 12 janvier 1793 (1).
Ce jour-là., « l'an IVe de la liberté, nous dit-il, il baptisait un Pierre Garreau, de la Grande Levée du Bois-Dieu. »
Monsieur Herbert fut saisi dans sa cure, vers le milieu du mois de juin 1791 (2), traîné devant les tribunaux révolutionnaires, et jeté dans les prisons de Fontenay-le-Peuple, avec le jeune vicaire de Luçon, Monsieur Louis-Marie Baudouin.
Nous lisons dans la vie du pieux fondateur de la Congrégation des Enfants de Marie immaculée, et de la Société des Ursulines de Jésus : « Pendant sa captivité, Louis-Marie Baudouin fut consolé et fortifié par la présence des autres prêtres, et surtout par les discours et les exemples d'un vénérable vieillard, dont il s'était concilié l'affection : c'était Monsieur Herbert, curé de Maillé, qui depuis scella de son sang son attachement à la foi (3). »
Cette particulière affection du curé de Maillé pour le Père Baudouin, le mérite de lui avoir donné des exemples et suggéré des pensées qui l'ont consolé et soutenu dans le bon combat, c'est tout un panégyrique, et ce seul éloge peut suffire à nous révéler l'âme et la haute vertu de Monsieur Herbert.
Il est probable que cette première…
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(1) Sagot est quelquefois remplacé par un Robert, curé intrus de Montreuil et de Fontaines. Chose singulière, Sagot met en tête de son premier acte les initiales J. M. J. (Jésus, Marie, Joseph). — (2) C'est aussi la tradition locale, que Monsieur Herbert fut pris vers la fin de juin, à l’époque où l'on cueillait le lin dans les champs. — (3) Vie de R.P. Baudouin, T. I, p. 28.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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Il est probable que cette première détention de notre glorieux captif de Jésus-Christ ne fut pas longue, et qu'il fut mis en liberté, comme Monsieur Baudouin, vers le mois de septembre 1791.
Nous regardons comme certain qu'il dur retourner au milieu de son troupeau, où sa présence était d'autant plus nécessaire que l'intrus Sagot y exerçait alors, depuis le 12 juillet, son sacrilège ministère.
Mais, comme tous les prêtres fidèles de la Vendée, il ne pouvait plus séjourner dans sa paroisse qu'à titre de proscrit. Son zèle était réduit à s'exercer désormais dans l'ombre, en dérobant au grand jour tous les actes et toutes les cérémonies du culte catholique.
Malgré tout, sa seule présence était une force et comme une menace qui troublait le triomphe insolent du culte usurpateur. À Maillé comme dans un grand nombre d'autres paroisses, les prêtres catholiques étaient « dénoncés comme des perturbateurs de l'ordre public, des ennemis dangereux de la Constitution civile du clergé (1). »
Le 9 du mois de mars 1792, le Directoire du département de la Vendée portait un arrêté qui contraignait 33 prêtres non assermentés à se rendre au chef-lieu du département, avec l'obligation de s'inscrire tous les jours, à onze heures, sur un registre à cet effet (2). »
En tête de la liste des prêtres dénoncés figurait le nom de Monsieur « Herbert, ex-curé de Maillé », avec les noms de « Vilain, ex-vicaire de Maillerais, Baudouin, ex-curé (de Luçon), Louis-Marie Baudouin, ex-vicaire, Brumauld, ex-théologal, Defresne, ex-doyen. »
On le voit, les persécuteurs s'y connaissaient en hommes ; ils dirigeaient leurs coups contre les prêtres les plus éminents de la Vendée, et ils faisaient à l'humble curé de Maillé l'honneur de le placer au premier rang.
Nous ne saurions préciser la durée de cette seconde captivité. On peut croire que la loi du 26 du mois d'août 1792, condamnant fous les prêtres réfractaires à la déportation, délivra les captifs de Fontenay : et pendant que le Père Baudouin s'embarquait aux Sables, le 9 septembre, pour s'exiler en Espagne, Monsieur Herbert retournait prodiguer à ceux de ses paroissiens qui étaient restés fidèles, les secours légalement prohibés de son ministère.
Par cette sainte obstination de son dévoûment sacerdotal, l'héroïque pasteur jouait chaque jour sa vie, et chaque jour il la donnait ainsi pour les âmes qui lui étaient confiées.
Il y eut, dans la paroisse, des Judas, odieuses ligures d'apostats et de traîtres, qui vendirent leur pasteur. « Il fut victime de son zèle, nous dit Guillon. Les agents de la persécution le saisirent vers l'automne de 1793, et le livrèrent aussitôt au tribunal criminel de la Charente-Inférieure (1). »
Cette affirmation de l'auteur des Martyrs de la foi concorde avec la tradition du pays. On battait le blé dans les aires, quand quelques patriotes de Courçon se présentèrent dans le bourg, pour s'emparer de ce prêtre si opiniâtrement rebelle aux nouvelles doctrines de la Révolution française.
Le bruit de leur arrivée se répandit bien vite. Une femme pieuse, dont la tradition donne le nom (2), avait avec elle une de ses nièces, encore enfant. Elle envoie, en toute hâte, la jeune fille près de Monsieur Herbert, pour l'avertir que les républicains venaient se saisir de sa personne, et pour lui indiquer un moyen de se dérober à leurs poursuites.
Le saint prêtre refuse de s'évader, déclarant qu’il ne doit pas, qu'il ne veut pas abandonner sa paroisse, et qu'il est prêt à mourir pour ses paroissiens.
Les patriotes s'emparent de lui sans peine, et l'attachent, disent quelques anciens, à la queue de leurs chevaux.
Ou dit aussi qu'arrivé devant la porte de l'église, Monsieur Herbert se jette à genoux, et supplie les agents de la Révolution de ne pas le conduire plus loin, mais de le fusiller sur place, en face de son église, afin que son sang soit versé sur le sol même de cette paroisse, dont il est seul le légitime pasteur.
Cette prière touchante ne fut point écoutée : le captif fut traîné jusqu'à la Rochelle et incarcéré dans une maison d'arrêt de la ville, en attendant la sentence de mort.
Sa détention ne fut pas longue. Dès le 5 septembre suivant, il comparaissait devant le tribunal criminel révolutionnaire, qui le condamne, comme Brigand de la Vendée, au supplice de la guillotine, et la sentence fut exécutée le même jour, à 5 heures du soir, sur la place publique de la Rochelle.
Quels furent, dans sa prison…
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(1) Arrêté du Directoire du département de la Vendée, du 9 mars 1792. — (2) Ibid. — (1) Les Martyrs de la foi, T. III, p. 290. — (2) Cette femme était la sœur d'un Jean Denys, que l'auteur de cet ouvrage a connu.
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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Quels furent, dans sa prison et devant l'échafaud, les derniers sentiments et les dernières pensées de Monsieur Herbert ? Il va nous les révéler lui-même, dans une simple et admirable lettre adressée à sa nièce, Mademoiselle Jeanne-Modeste Ribert, qui résidait alors à Maillé. C'est comme le testament de cette belle âme de prêtre et de martyr (1).La Rochelle, le 4 (1) septembre 1793.
« Je vous dis adieu pour la dernière fois, ma chère nièce et ma chère Renotte (2), lorsque les volontaires de Courçon vinrent me prendre chez moi. Nous ne nous reverrons plus sur la terre, mais dans le ciel, s'il plaît à Dieu. Je subirai la mort demain, après-midi.
« Je meurs innocent pour la foi, pour et par mes paroissiens, à qui je pardonne de tout mon cœur. Je meurs pour notre sainte religion catholique, apostolique et romaine, à laquelle j'ai toujours été attaché et hors de laquelle il n'y a point de salut à attendre.
« Je meurs plein d'espérance en Dieu et en ses divines miséricordes. Je regarde le jour de demain, qui sera un vendredi (3), comme le plus beau jour de ma vie; car j'espère qu'il m'ouvrira les portes du ciel.
« Ma chère nièce et ma chère Renotte, priez cependant le bon Dieu pour moi. Servez-le fidèlement et aimez-le de tout votre cœur.
« Ma chère nièce Modeste, j'aurais bien souhaité faire votre bien-être ; mais le peu de bien que j'ai est confisqué au profit de la nation. Je confirme tout ce que j'ai fait pour vous : je vous donne tout ce que je possède sur la terre de bon cœur, et vous souhaite le bonheur éternel.
« Souvenez-vous de moi dans vos prières, et si j'ai, comme je l'espère, le bonheur de posséder Dieu, je le prierai assurément pour vous.
« Rifaud (4) a été malade et a été à l'hôpital. Il se porte un peu mieux à présent. S'il retourne chez lui, il vous fera le récit de ce que nous avons souffert. Il vous remettra aussi au moins quatre assignats de chacun cent sols, qui font vingt francs. Peut-être même le concierge, qui s'appelle M. Ceuse, vous fera-t-il parvenir une chemise, mon gilet, mes bas de fil, mes deux bréviaires. J'ai disposé de mes autres petits effets en faveur de mes confrères malheureux.
« Je me mets et vous mets sous la protection de la très sainte Vierge notre patronne.
« Adieu ; je vous embrasse; vous n'avez personne qui vous soit plus sincèrement attaché que moi. Que Dieu vous préserve de tout péché, de tout malheur, de tout fâcheux accident.
« Adieu encore une fois ; je ne dis pas tout ce qu'il faudrait dire ; devinez.
« Tout à vous, ma chère nièce et ma chère Renotte.
« Herbert, curé de Maillé, prisonnier de Jésus-Christ. »
« Je salue tous mes paroissiens ; j'ai fait pour eux l'office de bon pasteur : je donne ma vie pour mes brebis ; heureux si elle peut leur être fructueuse.
« Je salue principalement ceux et celles qui ont été fidèles à l'Église, notre sainte Mère, et tremble pour ceux qui sont sortis de son sein ; qu'ils y retournent au plus tôt.
« C'est jeudi que je dois mourir, c'est-à-dire tout à l'heure (1). »
Cette lettre, d'une simplicité si touchante, nous fait respirer le parfum qui s'exhale de tous les Actes des martyrs, et nous pouvons la ranger parmi les monuments les plus précieux de notre martyrologe vendéen.
La main du prisonnier de Jésus-Christ en avait à peine tracé les derniers mots, que le citoyen Héraud, exécuteur des sentences criminelles, se transportait, sur les 5 heures du soir, à la maison d'arrêt, s'emparait du condamné, et sous la garde et surveillance d'un détachement de cavalerie, le conduisait sur la place publique, où la guillotine était dressée.
Là, l'huissier du tribunal, Pierre Picturit, donne lecture à Joseph Herbert du jugement qui le condamne à mort.
Le bourreau fait monter sur l'échafaud la victime et l'exécute aussitôt.
Quand la tête est séparée du corps, il met le tout dans un cercueil, qui est enlevé par les infirmiers de l'hôpital (1).
A Maillé, c'est une tradition constante parmi les anciens, qu'une dame de la Rochelle recueillit quelques gouttes du sang de Monsieur Herbert. On dit aussi (mais il faudrait des preuves décisives pour affirmer ce miracle), que le sang s'est conservé liquide dans la fiole de cristal qui le contenait (2).
Ce qui est absolument certain, c'est que la paroisse de Notre-Dame de Maillé a toujours vénéré Monsieur JOSEPH HERBERT comme un vrai martyr de la foi, et qu'elle a constamment attribué à une particulière protection de son glorieux pasteur l'esprit chrétien qui la distingue, depuis 1793, parmi les populations de cette partie du Bas-Poitou.
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(1) Voici la suscription de cette lettre : A la citoyenne Ribert, au bourg de Maillé, en l'île de Maillezais, Bas-Poitou. — Mademoiselle Ribert s'est mariée à Maillé, le 11 février 1802, à Élie Brunet, à l'âge de 29 ans. Elle était native de la Chapelle-Gaudin, en Anjou. Son père, Louis Ribert, était menuisier. Sa mère, Marie Herbert, était sœur du curé de Maillé. La lettre n'est pas parvenue à son adresse : l'autographe est resté dans les archives de la municipalité de Fontenay. — (1) La lettre devrait être datée du 5 septembre, un jeudi, jour de l'exécution. Le confesseur de la foi s'est trompé de date, ou bien, ayant commencé la lettre le 4, il ne l'a terminée que le 5, jour de sa mort. — (2) La tradition ne nous dit rien de cette Renotte. — (3) Il fut exécuté le jeudi, un jour plus tôt qu'il ne pensait. — (4) Il s'agit évidemment de l'un de ses paroissiens qui, sans doute, avait partagé sa captivité. — (1) Dans le texte qu'on vient de lire, nous avons supprimé quelques détails moins intéressants, et que nous donnons aux Pièces justificatives, Note III.
(1) Ce récit de la mort de M. Herbert est extrait textuellement du procès-verbal qui constate l'exécution du condamné. — Voir, à la Note IV, le texte intégral de ce document, conservé dans les Archives de la municipalité de la Rochelle.— (2) C'est une tradition de la famille de Madame Elie Brunet (Mademoiselle Ribert), la destinataire de la lettre, que le chapeau de M. Herbert a été conservé à la Rochelle comme une relique.
A suivre : Martyre de FRANÇOIS-JOSEPH BONNIN, chanoine de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu.
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ VI
Martyre de FRANÇOIS-JOSEPH BONNIN,
chanoine de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu,
21 septembre 1793.
FRANÇOIS-JOSEPH BONNIN, neveu d'un chanoine sous-chantre, qui démissionna en sa faveur, devint chanoine de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu, en 1758.
Il habitait avec sa sœur. Tous deux furent massacrés, coupés en morceaux et jetés dans le puits du couvent de Saint-Sauveur (1).
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(1) Notes communiquées par Monsieur E. BOURLOTON, d'après les papiers de l'abbé PONTDEVIE, pour les §§ VI, VII, VIII, IX et X.
A suivre : Martyre de MATHURIN FEUVRE, doyen de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ VII
Martyre de MATHURIN FEUVRE,
doyen de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu,
21 septembre 1793.
MATHURIN FEUVRE fut d'abord curé de la Guyonnière, puis nommé, en 1770, doyen de Montaigu et de la collégiale de Saint-Maurice.
On avait fait courir sur son compte le bruit absurde qu'il avait accaparé d'énormes quantités de pain, et qu'on avait trouvé, cachée dans son jardin, la somme de 1.800 louis d'or de 24 livres (43.000 francs).
Comme Monsieur Bonnin, il fut massacré le 21 septembre 1793, et l'on jeta son cadavre dans le puits du couvent de Saint-Sauveur.
A suivre : Martyre de CHARLES-FRANÇOIS GOUPILLEAU, chanoine-chantre de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ VIII
Martyre de CHARLES-FRANÇOIS GOUPILLEAU,
chanoine-chantre de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu,
21 septembre 1793.
CHARLES-FRANÇOIS GOUPILLEAU , chanoine-chantre de la collégiale de Saint-Maurice de Montaigu, avait sauvé, le 13 mars 1793, la vie d'un patriote, Dugast-Matifeux, en le cachant dans le galetas de sa maison.
Le 21 septembre suivant, quand les républicains, maîtres de Montaigu, y mirent tout à feu et à sang, le chanoine Goupilleau se réfugia dans un jardin situé au faubourg Saint-Nicolas.
Il y fut découvert, maltraité, tué peut-être sur place et son corps fut jeté dans le même puits que les deux victimes précédentes.
A suivre : Martyre de CHARLES-DOMINIQUE POULAIN,curé de Treize-Septiers et de Saint-Nicolas de Montaigu.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ IX
Martyre de CHARLES-DOMINIQUE POULAIN,
curé de Treize-Septiers et de Saint-Nicolas de Montaigu,
octobre 1793.
CHARLES-DOMINIQUE POULAIN fut d'abord curé de Treize-Septiers, de 1775 à 1782 ; puis, de Saint-Nicolas-de-Montaigu, du 28 février 1782 jusqu'à sa mort, en octobre 1793.
Il eut le malheur de se laisser d'abord séduire par les idées révolutionnaires, et banquetait avec les fauteurs de la Constitution civile du clergé, à laquelle il prêta serment. Mais il répara bientôt sa faute par un sincère et éclatant repentir. Il rétracta hautement le serment qu'il avait prêté et se sépara des frères et amis. « Vous m'avez conduit, leur dit-il, jusqu'aux portes de l'enfer; mais je donnerai ma vie pour ne pas y entrer. »
Cette énergique déclaration, qui était une profession de foi, vouait au martyre le courageux pénitent.
Il ne voulut pas s'expatrier et se cacha dans les environs de Montaigu.
Mais en octobre 1793, il fut découvert à la Bruffîère, par une patrouille de l'armée du Nord, ramené à Montaigu et fusillé sur le pont de Saint-Nicolas.
On jeta son corps à l'eau. Le cadavre, emporté par le torrent jusqu'au moulin Gros, et recueilli par le meunier Luneau, fut inhumé sur le bord de la rivière.
Au mois de mai 1825, Monsieur Sodoli, curé de Montaigu, voulut rendre les honneurs funèbres aux restes du martyr ; mais le courant avait miné le terrain, et le corps avait disparu. Le même meunier, Luneau, déclara qu'il avait vu les ossements surnager, entraînés par les eaux.
A suivre : Martyre de l'abbé GAUDON, curé de Saint-Germain-l'Aiguiller.
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Louis- Admin
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ X
Martyre de l'abbé GAUDON,
curé de Saint-Germain-l'Aiguiller,
dans l'automne de 1793.
Nous n'avons presque aucun détail sur la vie de l'abbé GAUDON, curé de Saint-Germain-l'Aiguillier.
Nous trouvons sa signature sur les registres de Mouilleron-en-Pareds, où il remplaçait le curé Guinefolleau, du 17 mars au 4 avril 1790.
Il avait refusé le serment schismatique et resta parmi ses paroissiens. Malgré les menaces de la persécution, il se livrait si pleinement à l'ardeur de son zèle, dans l'exercice de son ministère pastoral, qu'on pourrait parfois l'accuser d'imprudence.
Quand les Vendéens occupèrent les Herbiers, l'apostat Dugravier, ex-chanoine, y conduisit un détachement pour les forcer à vider la place. Il passait par le Boupère, et arrivant près du bourg de Saint-Paul, il vit un homme qui venait à lui, à travers champ.
— Tiens, dit-il, c'est Gaudon, le curé de Saint-Germain.
— C'est moi, répond celui-ci, mais tu n'auras pas la barbarie de me tuer ! Nous avons fait nos études ensemble.
Dugravier n'ordonna point de le mettre à mort, mais il ne dit pas un mot pour le sauver. Un protestant du village de l'Hermondière lui tira, à bout portant, un coup de fusil dans la tempe.
Le prêtre martyr fut enterré sur le lieu même du meurtre, et plus tard, inhumé dans le cimetière de Saint-Paul.
A suivre : Vie et martyre de GABRIEL-URBAIN DOUAND, natif de Tiffauges, chanoine de la cathédrale de Nantes.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
§ XI
Vie et martyre de GABRIEL-URBAIN DOUAND,
natif de Tiffauges,
chanoine de la cathédrale de Nantes,
du 15 au 16 novembre 1793.
GABRIEL-URBAIN DOUAND, chanoine de l'église cathédrale de Nantes, naquit vers 1730, à Tiffauges, qui appartenait alors au diocèse de Poitiers.
Il fit à Nantes ses études ecclésiastiques, sous l'épiscopat de Monseigneur Pierre Mauclerc de la Musanchère. Ce prélat l'ordonna prêtre, et le choisit pour son secrétaire particulier, titre que l'abbé Douand garda jusqu'à la mort de Monseigneur Mauclerc, en 1783, et auquel s'ajouta bientôt la dignité d'un double canonicat, dans l'une des collégiales de la ville et à la cathédrale.
Modèle parfait d'exactitude dans l'accomplissement des nombreux devoirs que lui imposaient ses fonctions, l'abbé Douand savait encore trouver du temps pour l'étude, pour les pieuses méditations et les œuvres de zèle.
Une de ses occupations favorites était d'aller faire le catéchisme, dans la maison du Bon-Pasteur, aux petites filles qu'on avait recueillies parmi les enfants trouvés.
Les principes et la vie du pieux chanoine étaient en opposition trop flagrante avec les idées nouvelles pour qu'il ne fut pas en butte aux coups de la persécution.
Après avoir refusé le serment schismatique de 1791, il continua, dans la ville de Nantes, l'exercice de son ministère, au péril de sa vie.
Il fut bientôt arrêté et condamné à la peine de la réclusion, sur le navire la Gloire, où il fit l'édification de tous les détenus, par sa douce et calme résignation, par sa délicate charité, et par les paroles d'encouragement qu'il prodiguait aux compagnons de son martyre.
GABRIEL-URBAIN DOUAND fut noyé dans les eaux de la Loire, la nuit du 15 au 16 novembre, à l'âge de 63 ans (1).
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(1) GUILLON, es Martyrs de la foi, T. III; p. 6. — LALLIÉ, les Noyades de Nantes, p. 85 et suiv.
A suivre : Martyre de CLAUDE MÉNARD, curé de Bournezeau.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ XII
Martyre de CLAUDE MÉNARD,
curé de Bournezeau,
1er décembre 1793.
L'abbé CLAUDE MÉNARD, curé de Bournezeau, ayant refusé de prêter le serment à la Constitution civile du clergé, fut arrêté au milieu de ses paroissiens, en novembre 1793, traîné devant la commission militaire du Pont-de-Cé, et condamné à mort « comme Brigand de la Vendée (1). »
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(1) GUILLON, T. IV, p. 56.
A suivre : Martyre des quatre sœurs VAS DE MELLO DE LA MÉTEYRIE, GABRIELLE, MARGUERITE, CLAIRE et OLYMPE.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ XIII
Martyre des quatre sœurs VAS DE MELLO DE LA MÉTEYRIE,
GABRIELLE, MARGUERITE, CLAIRE et OLYMPE,
19 décembre 1793.
D'origine portugaise, les VAS DE MELLO étaient venus se fixer dans le Bas-Poitou, au XVIIe siècle. Ils habitaient le petit fief de la Méteyrie, dans la paroisse du Poiré-sur-Vie.
Vers la fin de 1793, il ne restait plus de la famille que quatre sœurs, GABRIELLE, MARGUERITE, CLAIRE et OLYMPE.
Gabrielle, l'aînée, avait 28 ans, et Olympe, la plus jeune, n'en avait que 17.
« Privées de leur père et de leur mère, dit le vicomte Walsh, les quatre sœurs vivaient au lieu qui les avait vues naître. Elles ne savaient pas que secourir les pauvres, soigner les malades, consoler les affligés, c'était se rendre suspectes. Elles furent bientôt dénoncées, obligées de fuir et de se cacher (2).»
Les Bleus les arrêtèrent dans une ferme, près de Nozay, avec leur bonne, Jeanne Roy, et les amenèrent devant le tribunal révolutionnaire de Nantes, qui les fit écrouer dans les prisons du Bouffay.
Un jour, Carrier apprenant qu'il manquait quatre têtes au nombre de victimes qu'il avait indiqué, ordonne de compléter ce nombre par l'exécution des quatre sœurs Vas de Mello de la Méteyrie.
On les garotte et on les traîne au pied de l'échafaud, le 19 décembre 1793.
En attendant leur tour, les nobles Vendéennes chantèrent une hymne à la sainte Vierge, d'une voix douce et si touchante que tous les témoins fondaient en larmes.
« Tous les habitants de Nantes, nous dit un historien, conservent le souvenir des quatre jeunes vierges martyres (1) »
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(2) Lettres vendéennes, p. 268. (1) Lettres vendéennes, p 268.— Chroniques du Bas Poitou, T. IV , p 177 DENIAU, T. III, p 511.— LALLIÉ, la Justice révolut. , p 106.
A suivre : Vie et martyre de LOUIS-JOACHIM DE LA ROCHE-SAINT-ANDRÉ.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
.§ XIV
Vie et martyre de
LOUIS-JOACHIM DE LA ROCHE-SAINT-ANDRÉ,
20 décembre 1793C'est quelque chose de si grand de souffrir pour la cause de Dieu !
(L.- J. de la Roche-Saint-André)
Cette incomparable grandeur de souffrir pour Dieu et pour la justice, l'abbé LOUIS-JOACHIM DE LA ROCHE-SAINT-ANDRÉ l'a merveilleusement réalisée dans sa longue vie d'apôtre, et dans sa glorieuse mort de martyr.
Nous sommes ici en présence de l'une des gloires les plus pures du clergé diocésain et de la Vendée catholique. Dans cette courte Notice, nous voudrions mettre en saillie tous les traits de cette sainte et majestueuse physionomie sacerdotale.
Louis Joachim de la Roche Saint-André naquit en 1706, à Montaigu, d'une très ancienne famille, dont la noblesse remonte jusqu'aux croisades.
Il se sentit appelé, comme plusieurs de ses ancêtres, à l'état ecclésiastique et c'est dans sa plus tendre enfance que cet appel d'en Haut se fit entendre à son cœur.
Elevé a l'honneur de la prêtrise, il prit le grade de bachelier en Sorbonne, et se distingua par sa science comme par sa piété.
A cette époque si profondément troublée par les erreurs et les tendances schismatiques du jansénisme, une des éminentes vertus de la Roche-Saint-André fut une soumission sans borne à tous les enseignements de l'Église romaine : et ces sentiments, qui dirigeaient l'ardeur de sa jeunesse sacerdotale, il les exprimait avec énergie dans la maturité de sa belle vieillesse.
Il écrit dans ses Élévations sur les Mystères : « On ne peut douter que saint Pierre ne soit le vicaire de Jésus-Christ, ainsi que tous ses successeurs sur le siège de Rome ; qu'il n'ait sur tous les pasteurs un pouvoir de juridiction et une primauté d'honneur et de distinction, que personne ne partage avec lui. Il est le Père des fidèles, le chef visible de l'Église militante. Il a droit au respect, à la vénération et à l'obéissance des pasteurs et des fidèles. Sa chaire est le centre de l'unité catholique, dans laquelle il faut vivre pour obtenir le salut.
« Quelle horreur ne devez-vous pas avoir pour toutes les hérésies, les nouveautés et les schismes, qui tendent à la destruction de l'unité de l'Église ! Gémissons donc sur l'aveuglement de ceux qui ont secoué le joug de la soumission qu'ils doivent au Saint-Siège, et qui, sous un masque hypocrite, font semblant d'en reconnaître l'autorité, tandis qu'ils frondent les décrets apostoliques, et travaillent, par mille subterfuges, à affaiblir dans les fidèles le respect et l'amour qu'ils doivent à leur Père commun (1). »
Ce dévoûment et cette docilité absolue à la doctrine du Saint-Siège…
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(1) Élévations sur les Mystères, p. 295, Lecoffre, 1870.
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Ce dévoûment et cette docilité absolue à la doctrine du Saint-Siège, centre de l'unité catholique, l'abbé de la Roche-Saint-André les manifestait avec éclat dès le début de son ministère dans le diocèse de Nantes, par la fermeté qu'il mit à défendre la Bulle Unigenitus de Clément XI, contre l'hérésie janséniste.
L'évêque du diocèse, Monseigneur de Sansay, trouva ce zèle exagéré, et témoigna sa désapprobation par une disgrâce : il invita le jeune prêtre à s'éloigner. C'était une première et dure épreuve; elle engageait cette âme forte dans sa voie de sacrifice, et lui aidait à comprendre et à pratiquer déjà la vaillante maxime qu'elle exprimait plus tard : « Que c'est une grande chose de souffrir pour la cause de Dieu », en souffrant pour la cause de l'Église !
Chassé du diocèse de Nantes, l'abbé de la Roche se rendit à Paris. Là, il fut mis en relation avec l'évêque de Dax, Monseigneur Suarez d'Aulan, qui assistait aux états-généraux de 1745. Le prélat prit en si haute estime le jeune prêtre vendéen, qu'il voulut se l'attacher en qualité de vicaire général, et l'emmena dans son diocèse.
La Providence ouvrait ainsi une nouvelle carrière à cet apôtre, que dévorait la soif de glorifier Dieu par le salut des âmes. Son titre de vicaire général ne l'empêcha point de se livrer à toutes les fatigues des travaux apostoliques.
C'était l'époque du jubilé. Il se joignit, comme prédicateur et comme confesseur, aux missionnaires que l'évêque avait appelés pour ces solennels exercices.
L'abbé de la Roche fut à Dax ce qu'il était à Nantes, un défenseur inflexible de l'orthodoxie romaine contre les jansénistes, qu'il combattait en chaire comme au confessionnal.
Mais la secte avait partout ses partisans acharnés. Ils travaillèrent sourdement d'abord à discréditer l'abbé de la Roche auprès des fidèles, en taxant sa morale de relâchement scandaleux, et ils finirent par le dénoncer publiquement à l'évêque.
Le prélat couvrit son grand vicaire de sa haute approbation. Il voulut lui en donner une preuve éclatante, et le fit nommer, en 1750, abbé commandataire de l'abbaye de Ville-Dieu (ou Devielle), qui donnait à son titulaire 3.000 francs de revenus. C'était un ancien monastère de prémontrés, situé sur les bords de l'Adour, dans le diocèse de Dax (1).
Malgré tout, les hypocrites fauteurs du jansénisme ne désarmaient point, et bientôt l'animosité devint si violente que le prêtre vendéen crut devoir céder devant cette opiniâtre et fanatique opposition. Il mit en pratique le conseil du Maître : Lorsqu'on vous persécute dans une ville, fuyez dans l'autre, et en 1751, il venait se fixer à Montaigu, au centre de sa famille.
C'est là, près de son berceau, que ce fils des croisés vécut presque un demi-siècle de la vie cachée en Dieu avec Jésus-Christ.
Ce fut la vie préférée du divin modèle et de toutes les âmes séraphiques, la vie où s'alimentent les grandes vertus et toutes les activités fécondes dans l'ordre de la grâce.
En se dérobant à tous les regards du monde, pour ne plus vivre que sous les regards de Dieu, le saint abbé suivait un des plus doux et des plus puissants attraits de son âme. Il nous en fait lui-même la confidence, sans qu'il s'en doute, dans les méditations d'une piété si pénétrante et si savoureuse qu'il consacre à la vie cachée de Jésus, dans l'obscure petite maison de Nazareth.
« Quelle étonnante conduite de Dieu sur la personne de son Fils ! écrit-il. Il l'envoyait pour sanctifier la terre et pour éclairer le monde, et il le retient dans une retraite obscure, pendant 30 ans, occupé au travail des mains, passant au milieu de son peuple pour le fils d'un artisan et artisan lui-même. Ah ! quelle condamnation de l'envie que nous avons de paraître et de nous faire valoir, comme si Dieu avait besoin de nous !
« Avez-vous jamais médité cette vie cachée de Jésus-Christ à Nazareth ? Si vous vous en étiez occupé avec foi, vous vous estimeriez heureux d'être oublié des hommes ; vous vous plairiez dans la solitude, où Jésus-Christ se fait sentir aux âmes et parle au cœur avec tant de grâce, de douceur et d'onction. Votre union à Jésus-Christ caché, pour vivre en la présence de son Père, vous remplirait de consolation.
« Que de leçons touchantes Jésus ne donne-t-il pas par ses exemples aux religieux dans le cloître, aux artisans dans leur atelier, aux laboureurs dans leurs champs ! Ce divin Enfant n'était occupé que de la gloire de son Père et du salut du monde ; il rapportait tout à ces deux fins, et il a autant enrichi l'Eglise par ce qu'il a fait dans sa vie cachée, que par ce qu'il a fait dans sa vie publique. Il apprenait à ses serviteurs à se cacher aux yeux des hommes, jusqu'à ce qu'il plût à Dieu de les produire au grand jour, pour l'édification du prochain. Il méritait aux âmes intérieures l'avantage de comprendre le prix des occupations domestiques sous les yeux de Dieu. Il les invitait par avance à entrer dans son adorable intérieur, pour y contempler son esprit d'obéissance et d'humilité, son amour pour le travail, son assiduité à la prière dans les emplois qui lui étaient assignés par Joseph et par Marie.
« Dites-moi si vous ne trouvez pas dans cette union avec Jésus-Christ caché…
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(1) L'abbé de la Roche résigna celte abbaye en 1786. En 1770, il fut pourvu de la petite abbaye de Trizay, près Mareuil.
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Louis- Admin
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« Dites-moi si vous ne trouvez pas dans cette union avec Jésus-Christ caché autant de ressources pour vous entretenir avec Dieu, que dans toutes les bibliothèques du monde ?
« L'ambition et la vainc gloire sont le poison qui détruit presque toutes les vertus. On ne saurait trop précautionner l'homme contre le désir qu'il éprouve de se montrer et de se faire connaître. Or, Jésus-Christ ayant passé presque toute sa vie dans un état obscur, vil et abject aux yeux du monde, préparait et offrait aux superbes un remède sûr pour guérir leur orgueil. Est-il quelqu'un parmi les mortels qui puisse le disputer avec Jésus par la naissance, l'autorité, la sagesse ? Eh bien ! Jésus, qui ne pouvait se méprendre, ni pour lui ni pour les autres, a donné son estime à tout ce qui nous dérobe aux yeux des créatures, et à ce qui nous concentre et nous fixe sous les yeux du Créateur.
« O mon divin Maître, le parti que vous avez pris est le seul qui me reste à prendre.
« Après avoir mérité d'être écrasé sous le poids de la colère de Dieu, je ne puis éviter un châtiment si terrible, qu'en m'anéantissant devant lui, et en prenant la dernière place par estime et par choix, afin de témoigner à Dieu qu'à lui seul appartient l'honneur et la gloire.
« Divin Rédempteur, daignez imprimer fortement en moi ces maximes et m'y rendre docile jusqu'au dernier soupir. C'est la seule ressource d'un pécheur qui a mérité l'enfer, et qui ne saurait être trop méprisé et trop confondu (1) ».
Ce doux et humble de cœur qu'était l'abbé de La Roche-Saint-André vient de nous manifester, dans ces pages pieuses, le fond intime de son âme et les célestes pensées qui sanctifièrent cette solitude toute nazaréenne, où il resta caché pendant plus de 40 ans. Les longs jours qu'il passa dans les calmes loisirs de sa retraite étaient des jours pleins, tout occupés par la prière et la méditation, par l'étude et les bonnes œuvres que la Providence lui mettait sous la main.
Il consacrait une partie de son temps à l'éducation de quelques élèves ecclésiastiques. Dans ces dernières et obscures fonctions, Dieu lui réservait le privilège de travailler à la restauration du clergé des deux diocèses de Luçon et de la Rochelle, en lui donnant le mérite de contribuer à la formation cléricale d'un tout jeune enfant, qui fut le vénérable Père Louis-Marie Baudouin.
« Les rapports du jeune Louis-Marie avec Monsieur de La Roche-Saint-André servirent beaucoup à augmenter sa dévotion envers la mère de Dieu. Ce vertueux prêtre lui parlait souvent de cette auguste Vierge, et il le faisait d'une manière si touchante, que le pieux enfant en fut plus d'une fois attendri jusqu'aux larmes (1) »
C'est dans les derniers jours de sa vie que l'abbé de La Roche composa son ouvrage intitulé : Élévations sur les principaux Mystères de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de sa très sainte Mère.
Elles ont été publiées en 1870, par un de ses petits-neveux, Monsieur l'abbé de Suyrot.
Si le lecteur n'y sent point les coups d'aile de l'Aigle de Meaux, il y savoure l'onction d'une piété éminente; il y respire la bonne odeur d'une sainteté qui a mûri et qui s'achève dans les plus vives lumières de la foi. Le saint prêtre a mis, dans ces méditations, la sagesse calme et consommée de sa vieillesse. On peut dire que les Élévations sont le fruit où son âme a déposé le plus pur de sa substance et la pleine sève de sa maturité.
Le plan de l'auteur est bien simple, simple comme l'Evangile. Il suit le Sauveur pas à pas, dans les principales circonstances de sa vie cachée, publique et douloureuse ; dans sa vie mystique au sacrement de l'eucharistie.
Et en suivant le Dieu fait homme dans le cycle de ses adorables Mystères, avec le Fils il rencontre toujours la Mère, dont la vie est partout si gracieusement entrelacée à la vie de Jésus.
C'est ainsi que le vénérable auteur ne cesse de vivre dans la compagnie de Jésus et de Marie, conservant et méditant chaque jour, avec la Vierge mère, chacune des paroles qui tombent des lèvres de l'homme Dieu, chacun des miracles qui émanent de son cœur, de ses mains et de toute sa divine personne.
En lisant les Élévations, on voit que l'âme…
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(1) Élévations sur les Mystères, pp. 121-129. — (1) Vie du R. P. Baudouin, pp. 5 et 6.
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En lisant les Élévations, on voit que l'âme de l'écrivain habite la Terre Sainte, théâtre de la naissance, de la vie et de la mort du Sauveur des hommes, et le tabernacle dans lequel Jésus-Christ a déposé, pour toutes les générations chrétiennes, le souvenir vivant et la réalité de tous les divins Mystères accomplis dans la Palestine.
Quelques citations nous feront mieux comprendre la nature et la valeur de ces méditations.
« Jésus est le trésor inépuisable, l'abîme immense où se sont plongés tous les saints. Considérez, étudiez, adorez, aimez et imitez ce parfait modèle, et ne vous glorifiez pas d'autre chose que de le connaître, de lui ressembler et de lui appartenir.
« C'est un usage des grands de conserver les portraits de leurs ancêtres. On les montre avec complaisance ; on parle des belles actions des personnages que ces portraits représentent.
« Combien plus les chrétiens, qui composent la famille la plus distinguée de l'univers, doivent-ils avoir à cœur d'imprimer fortement en eux les traits, la figure, le caractère, les maximes, les mœurs, les vertus de celui qu'ils reconnaissent pour leur Père, et qui les destine à devenir des rois, dans le royaume éternel dont il est l'architecte et le souverain !
« Avec quelle admiration ne doivent-ils pas considérer ce divin portrait, en qui sont réunies toutes les beautés, et qui ravit éternellement les anges, éternellement avides de Je contempler ! Portrait uniquement beau, qu'aucune bouche mortelle ne peut louer dignement, dont un seul trait fait pâlir l'éclat des astres et toutes les gloires de la terre et des cieux !
« Tel est Jésus-Christ, Fils de Dieu dans l'éternité, fils d'une Vierge dans le temps, le roi des anges, le sauveur des hommes, le souverain des rois, le prince de la paix.
le Père des siècles futurs, le juge des vivants et des morts ; l'arbitre de nos éternelles destinées.
« C'est ce Jésus qui a fait les délices de la très sainte Vierge sa mère, qu'elle a porté dans ses bras, qu'elle a baigné de ses larmes, devant qui elle se prosternait si souvent, qu'elle contemplait avec un mélange de joie et d'amertume, comme son fils et comme le Rédempteur du monde, destiné à mourir sur une croix pour les pécheurs.
« Oh ! qui me donnera la grâce de ne jamais perdre de vue cet objet charmant, de l'imprimer si avant dans ma mémoire, que je me ressouvienne toujours de ce qu'il est, de ce qu'il a dit et fait pour mon salut? Qu'il dévore par ses ardeurs toute ma substance, qu'il réside seul en moi, et que les créatures n'y trouvent plus d'entrée. Qu'il m'attire si puissamment à demeurer en lui, que je sois consommé dans son unité, avec le Père et le Saint-Esprit.
« Pénétrer dans les Mystères de l'homme Dieu, c'est entrer dans une carrière immense, où toutes les richesses de la grâce sont entassées et offertes à ceux qui les désirent. Dieu épuise la source de ses miséricordes, en vous donnant son Fils (1). »
L'abbé de la Roche trouve au pied de la croix de Jésus mourant des pensées et des paroles comme celles-ci : …
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(1) Élévations, pp. 15-20, passim.
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L'abbé de la Roche trouve au pied de la croix de Jésus mourant des pensées et des paroles comme celles-ci : « O Jésus qui, comme un roi magnifique, distribuez les couronnes sur votre croix, je veux me réfugier dans son ombre, espérant entendre au fond du cœur, à l'heure de la mort, la promesse que vous avez faite au bon larron.
« Cher lecteur, vous étiez présent à la pensée de Jésus mourant, ainsi que tous les hommes. Qu'a-t-il demandé pour vous à Dieu son Père?
« Oh ! pendant les trois heures qu'il demeura attaché à la croix, il pria pour vous, il vous enferma dans son cœur, et vous rendit l'héritier de tous ses mérites.
« Il vous a dit, en vous montrant Marie : « Voilà ma mère. » Ah ! quand un Dieu donne sa propre mère aux hommes, l'honneur infini qu'il leur fait exigerait une reconnaissance infinie. Grâce vous soit rendue, ô mon divin Sauveur, pour le présent que vous nous avez fait, en nous léguant Marie pour mère. C'est le témoignage le plus éloquent de votre amour pour nous. Sous de tels auspices, nous osons tout attendre d'un Fils qui ne saurait rien refuser à sa mère (1). »
Dans ses Élévations sur l'eucharistie, l'abbé de la Roche nous révèle tout à la fois l'étendue de sa doctrine et l'ardeur de sa piété. On sent qu'il a goûté et qu'il a compris combien le Dieu Sauveur est suave dans ce sacrement, qui est l'abrégé divin de tous les Mystères de l'Évangile et de toutes les merveilles de la Rédemption.
« Le sacrement de l'eucharistie, nous dit-il, est le rempart de l'Église, le boulevard de la religion, le plus ferme appui des trônes et le lien de la société.
« Les anges protecteurs du monde entourent, jour et nuits, nos tabernacles, comme autant de sentinelles de la maison d'Israël. Ils sont là, pour faciliter l'entrée du palais du grand Roi à ceux qui veulent lui rendre leurs hommages et lui demander ses grâces. Jésus y regarde tous les hommes ; il est toujours disposé à se donner à eux.
« Quelle nation est plus heureuse que la nôtre, et peut se flatter d'avoir des dieux aussi près d'elle que le nôtre est près de nous ?
« Jésus-Christ a réuni dans cette merveille tout ce qu'il y avait de plus grand et de plus saint dans l'ancienne loi. Il y rappelle à ses fidèles tout ce qu'il a fait pour eux dans la loi de grâce et d'amour. En assistant à la célébration de ce profond mystère, nous avons sous les yeux ce que quarante siècles ont désiré voir, ce que les apôtres ont réellement vu et touché dans l'adorable personne du Sauveur. Qui ne serait ému et ravi en méditant ces grands sujets?
« Comment ne pas fondre en larmes, en pensant que nous possédons, dans le tabernacle et dans l'hostie, tout ce que les patriarches et les prophètes brûlaient du désir de contempler?
« C'est Jésus-Christ présent dans l'eucharistie qui était la force des martyrs.
« O Jésus, réveillez en nous cette foi que vos saints apôtres, vos généreux confesseurs, vos vierges courageuses ont confirmée par leurs travaux, leurs miracles, l'effusion de leur sang, et toutes les vertus dont vous êtes l'auteur dans le temps, et dont vous serez le consommateur dans l'éternité.
« Un des effets les plus désirables de la participation à ce Mystère, c'est de nous faire mourir à nous-mêmes, et de nous donner les forces de suivre Jésus dans la route du Calvaire. Plus vous communierez, et plus vous devrez vous attacher à former en vous cette vie de mort à tout.
« Il n'y a rien dans la religion qui honore autant l'homme que l'eucharistie. Ouvrir la bouche et le cœur pour recevoir Jésus-Christ !
« N'est-il pas raisonnable que nous tenions compagnie à ce divin solitaire du tabernacle? Oh! que cette solitude est délicieuse pour une âme qui a la foi ! Tout l'univers lui devient insipide.
« Elle est assurée d'être là dans la société d'une multitude d'esprits célestes et d'âmes bienheureuses, qui ont demandé et obtenu la grâce d'être jusqu'à la fin des siècles autour de l'autel, pour y chanter les louanges de l'Agneau et les miracles de son amour. C'est là que les âmes séraphiques trouvent leur ciel, et la plus riche portion de l'héritage de leur Père.
« O Jésus, je vous demande la même faveur, jusqu'au grand jour de l'éternité. »
Il nous semble que notre Notice se continue dans ces extraits. N'ayant presque rien à raconter de cette vie cachée, que notre solitaire ne confiait qu'à la mémoire éternelle de Dieu, nous racontons les pensées du pieux écrivain et « l'homme intérieur qui rirait au fond de son âme. (») N'est-ce pas la meilleure manière de peindre au vrai, et de mettre en lumière les traits les plus expressifs de cette belle physionomie de prêtre ?
Mais approchait le grand jour dont nous parlait tout à l'heure le fervent auteur des Élévations…
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(1) Élévations, pp. 257-262, passim.
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Mais approchait le grand jour dont nous parlait tout à l'heure le fervent auteur des Élévations, et l'abbé de la Roche-Saint-André allait entrer, par le martyre, dans son éternité bienheureuse.
Il était de ces privilégiés dont il vient de nous dire qu'ils puisaient dans l'eucharistie la force de confirmer leur foi par l'effusion de leur sang.
Depuis 1789, le vénérable abbé partageait sa retraite avec son beau-frère, le vertueux amiral Louis-Charles Du Chaffault, et s'employait, comme l'énergique marin, à combattre les idées révolutionnaires. Il déployait contre la Constitution civile du clergé ce même zèle qu'il avait mis à combattre le jansénisme. Il n'en fallait pas tant pour le désigner à la cruelle vengeance des persécuteurs.
Voyant que sa tête était menacée, il s'était d'abord caché dans la maison d'un domestique ou homme d'affaires, nommé Aigron. Mais, n'y trouvant pas un asile assez sûr, il prit le parti de se retirer chez l'un de ses fermiers, à la Basse-Baurie, dans la paroisse de Treize-Septiers.
Son domestique, Hilaire Robin, allait souvent à Montaigu, pour y faire des provisions. Ses allées et ses venues fréquentés entre la petite ville et Treize-Septiers éveillèrent des soupçons.
Les agents révolutionnaires de Montaigu l'abordent un jour.
— Citoyen, lui disent-ils, ce n'est pas sans doute pour ta cuisine que tu viens si souvent ici acheter les bons morceaux ; c'est pour ton maître ? Où est-il caché?
Puis, ils mettent le malheureux Robin à une sorte de torture, par des promesses et des menaces. Sa lâcheté en fit un traître, et tout en aimant son maître, il le vendit (1).
Guidés par les indications qu'il donna, les émissaires de Carrier, vers la fin de 1793, se rendent secrètement à la Basse-Baurie, s'emparent sans peine du saint vieillard, et l'emmènent à Nantes, où il est écroué à la prison du Bouffay.
Il n'y resta que quelques jours, et le 19 décembre, il comparaissait devant le tribunal révolutionnaire, qui siégeait à l'Hôtel de Bellisle.
Nous donnons ici le texte de la partie essentielle du jugement…
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(1) Sa trahison ne lui sauva pas la vie ; quelque temps après, il était guillotiné à Nantes.
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Re: Le Martyre de la Vendée.
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Nous donnons ici le texte de la partie essentielle du jugement.
« Les juges formant le tribunal révolutionnaire du département de la Loire-Inférieure, séant à Nantes, après avoir entendu Goudet, accusateur public, dans son accusation contre Louis-Joachim de la Roche-Saint-André, prêtre, ci-devant abbé commandataire, domicilié à Montaigu, âgé de 88 ans, présent..., qui déclare qu'il n'a point prêté le serment de fidélité à la République, qu'il a habité un pays en insurrection, afin de mieux fanatiser les habitants des campagnes, le condamne à la peine de mort ; déclare ses biens acquis au profit de la République française ; ordonne qu'il sera dressé une expédition du présent jugement, lequel sera exécuté dans les 24 heures de ce jour, imprimé et affiché partout où besoin sera. »
En entendant sa sentence de mort, l'admirable vieillard entonna le psaume Lætatus sum: Je me réjouis dans les paroles que j'ai entendues ; nous irons dans la maison de Dieu.
Pendant le trajet de l'Hôtel de Bellisle à la prison du Bouffay, il ne cessa de témoigner, par ses chants, la joie céleste qui débordait de son âme. Il chantait l'hymne des martyrs : Deus tuorum militum : O Dieu, vous couronnez vos soldats en vous donnant à eux pour récompense.
Dans sa prison, il mit à profit les quelques heures qui lui restaient avant son supplice, pour ranimer le courage de ses compagnons, et leur offrit les secours de son ministère : il s'efforça de les affermir dans la foi par le chant d'un cantique qu'il avait composé lui-même, et qui avait pour but de soutenir les fidèles, pendant cette redoutable épreuve de la Terreur.O vous, peuple saint, peuple roi,
O vous, innocentes victimes
Des fléaux vengeurs de nos crimes,
Illustres soutiens de la foi,
De ses amoureuses haleines
Puisse l'Esprit Consolateur
De vos maux tempérer l'ardeur,
Alléger le poids de vos chaînes.***
Dans les succès, dans les revers,
Avec amour et sans contrainte,
Adorons la volonté sainte
Du Dieu qui régit l'univers.
Il nous éprouve, mais en Père,
Jaloux de nous rendre parfaits.
Le méchant seul boit à longs traits
Dans la coupe de sa colère.
***
De ces faux biens qu'on nous ravit
Nous n'étions que dépositaires.
Nos corps sont les vivantes pierres
Que le ciseau taille et polit.
O mort, quelle est donc ta victoire ?
Ces agneaux, percés de tes coups,
Avec Dieu jugeront les loups,
Au jour de terreur et de gloire.
« Le lendemain, 20 décembre, nous dit le baron de Wismes son petit-neveu, le vieillard fut conduit au supplice…
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