Saint Pierre Claver.
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IV. Il entreprend de réformer Carthagène; conversion extraordinaire de quelques libertins.(suite)
L'éclat de sa sainteté et le bruit de ses merveilles lui attira peu à peu un grand nombre de personnes de condition qui désiraient ardemment de se confesser à lui et de se gouverner par ses avis ; mais ce n'était ni aux riches, ni aux grands qu'il voulait s'attacher. Outre que le soin des nègres, des malades et des pauvres lui donnait assez d'occupation, et que d'ailleurs son humilité en souffrait, il savait qu'il y a communément peu à gagner et beaucoup à perdre avec ces sortes de gens, que leurs passions aveuglent et que leur prospérité enivre. Dès qu'ils se trouvaient dans l'affliction ou dans la disgrâce, il les recevait volontiers ; mais en toute autre circonstance, il fallait perdre avec eux beaucoup de temps en compliments, en cérémonies, en discours inutiles et mondains ; et pour lui, il ne savait que parler de Dieu, que s'occuper du salut des âmes. Aussi trouvait-il moyen de s'en défaire le plus honnêtement qu'il lui était possible, pour se livrer presque tout entier aux pauvres et aux malades.
Ses travaux auprès des Espagnols étaient suivis des mêmes succès qu'auprès des nègres et des infidèles : on eût dit que Dieu, pour l'intérêt de sa gloire, avait donné à ses paroles une vertu puissante, un charme secret dont il était impossible de se défendre.
Emmanuel Rodriguez attesta, en parlant de lui-même, qu'étant, le soir, derrière un arbre, pour attendre l'occasion de commettre un crime, le P. Claver passa près de là, en revenant de confesser un malade : quoique la nuit fût déjà si obscure qu'on ne pouvait distinguer les objets à deux ou trois pas, le serviteur de Dieu se tourna vers l'endroit où il se trouvait, en lui criant : « Prends garde, malheureux, car la mort est aux aguets derrière cet arbre. » Ces mots furent pour Rodriguez un coup de foudre: il prit aussitôt la fuite, et renonça de bonne foi à son projet criminel.
Cet ascendant qu'il avait pris sur les cœurs était si connu, que pour les pécheurs les plus désespérés, quand tous les autres moyens étaient inutiles, on avait soin d'appeler le saint apôtre de Carthagène.
On vint lui dire une fois qu'un ancien comte de Gelao…
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Louis- Admin
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A suivre : V. Ses travaux et ses succès au temps de l'arrivée des galions.
IV. Il entreprend de réformer Carthagène; conversion extraordinaire de quelques libertins.(suite)
On vint lui dire une fois qu'un ancien comte de Gelao, réduit à l'extrémité, était près de mourir en désespéré ; qu'il n'écoutait ni exhortations ni prières ; que, quand on lui présentait le crucifix, il détournait la tête comme un furieux ; et que les ministres les plus zélés n'avaient point jusqu'alors remporté d'autre fruit de toutes leurs peines, que le chagrin de le voir toujours plus endurci. Le Père y alla sur le champ, et, dès la première fois, il fut beaucoup mieux reçu que tous les autres. Ayant passé le reste du jour en prières pour ce malheureux, il revint le lendemain plein de confiance en Dieu; après avoir dit au malade tout ce que l'ardeur de son zèle lui inspirait en pareilles circonstances, il tire son crucifix de son sein, il lui ordonne de l'adorer et de mettre le bout de la croix sur sa bouche. A cet instant le cœur du moribond est attendri, il demande pardon à Dieu avec de grandes marques de repentir ; et après avoir reçu tous les sacrements avec une piété exemplaire, il laisse les assistants parfaitement rassurés sur son salut. Dès qu'il eut expiré, le saint homme pénétré de joie entra chez un gentilhomme dont il connaissait la vertu, et le pria de se joindre à lui pour rendre grâces à Dieu de la miséricorde qu'il avait exercée envers ce pécheur.
Il apprit qu'une femme espagnole, qui se trouvait en péril de mort, ne répondait à tous les avertissements salutaires qu'on lui donnait que par les paroles les plus abominables. On eût dit qu'elle était livrée à l'esprit impur ; de sorte que, pour ne pas augmenter ses crimes, chacun se faisait un scrupule de lui parler. Après l'avoir recommandée à Dieu, le Père l'alla voir, il dit un Évangile sur elle et il n'en reçut d'abord point d'autres réponses que tous les autres. Indigné d'entendre de pareilles ordures, le zèle du chaste directeur s'enflamme, et en lui présentant son crucifix : « Allez, lui dit-il d'une voix qui parut à cette malheureuse un coup de tonnerre, puisque vous voulez aller en enfer, allez-y : voici votre juge qui vous y condamne. » A ces mots, elle se tait enfin, sans oser même lever les yeux. Ce premier point gagné, le saint homme, à l'exemple d'un pasteur charitable qui ne frappe la brebis égarée que pour la ramener au bercail, change de ton, tâche de la faire revenir par la douceur, et la conjure d'espérer en la miséricorde d'un Dieu crucifié pour son salut. La malheureuse, pressée par tant de motifs si forts et si touchants, se rend enfin ; elle demande à se confesser et l'abondance de ses larmes ne laissa aucun lieu de douter de la sincérité de sa conversion.
Il n'en fut pas ainsi d'une autre femme que le serviteur de Dieu exhortait depuis longtemps à mener une vie plus régulière. Quelques efforts qu'il pût faire, elle résistait toujours, et remettait sa conversion à un autre temps. « Hé bien ! lui dit-il un jour avec une sainte colère, continuez à fermer ainsi l'oreille à la voix d'un Dieu qui vous appelle; dans peu, vous verrez le succès de votre obstination. » Le châtiment suivit de près la menace : en moins de deux semaines cette misérable fut attaquée d'un mal si subit et si violent, qu'elle mourut sans avoir le temps de se reconnaître.
Il avait la même grâce pour consoler les personnes affligées. La dame Léonore d'Ordas ayant perdu l'espérance de revoir son mari, qui était absent depuis longtemps sans qu'on pût apprendre de ses nouvelles, tomba dans une telle mélancolie, que pendant plus de quatre mois on crut qu'elle en perdrait l'esprit. Ce qui augmentait son chagrin, c'est qu'elle se trouvait chargée de quatre ou cinq enfants en âge d'être établis, et à qui elle n'avait pas de quoi fournir le nécessaire. Ne sachant à quoi se résoudre, elle vint un matin à l'église du collège et demanda le P. Claver avec beaucoup d'empressement. Après lui avoir exposé le sujet et l'excès de son affliction, elle le conjura de prier Dieu pour elle et de vouloir bien lui donner quelque chose qui lui eût appartenu. L'humilité du saint homme fut troublée à cette proposition ; mais la dame lui ayant fait entendre qu'elle ne pouvait survivre à son malheur, et que, pour peu que ses peines durassent encore, elle se donnerait la mort, il tira la croix qu'il portait sur sa poitrine, lui dit de la mettre sur son cœur, pendant qu'elle entendrait la messe, et l'assura qu'elle y trouverait tout ce qu'elle désirait. L'effet suivit de près la promesse : cette croix dissipa en un instant tous les nuages de son esprit, adoucit toutes les amertumes de son cœur, et la laissa aussi remplie de consolation, que si la cause de ses peines eût totalement cessé, mais craignant qu'elles ne se renouvelassent bientôt, si elle se dessaisissait de cette croix salutaire, elle l'emporta chez elle, sans rien dire. Le Père, qui la regardait comme son plus précieux trésor, l'envoya redemander, et, pour l'obtenir plus aisément, il assura la dame qu'elle n'en aurait plus besoin : ce qui arriva comme il l'avait promis.
A suivre : V. Ses travaux et ses succès au temps de l'arrivée des galions.
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Louis- Admin
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A suivre : VI. Dieu le favorise du don de miracles.
V. Ses travaux et ses succès au temps de l'arrivée des galions.
Quelque occupé qu'il fût à réformer, à secourir, à consoler ainsi les habitants de Carthagène, les quatre derniers mois de l'année fournissaient encore plus ample matière à son zèle. Depuis le commencement de septembre jusqu'à Noël, les flottes d'Espagne ont coutume de se rendre à la baie de Carthagène, pour y joindre les vaisseaux du Pérou, du Potosi et de Quito, qui y arrivent chargés de toutes les richesses des Indes : le grand nombre d'étrangers qui s'y trouvent y forme alors une nouvelle ville plus corrompue encore que la première. A peine sont-ils débarqués à terre, qu'ils se livrent impunément à toutes sortes d'excès. Les haines, les vengeances, les duels y exercent librement toutes leurs fureurs. Enfin l'inconduite, l'ivrognerie, les usures, les fraudes, les jurements et les blasphèmes font de cette multitude débordée un assemblage de païens. C'est à ce torrent d'iniquités que le saint apôtre de Carthagène entreprit de s'opposer.
Pour ce dessein, il prenait avec lui quelques jeunes gens bien instruits et formés à son école, et il allait avec eux à la grande place, où aboutissent les quatre principales rues de la ville. Là il passait une grande partie de la journée à instruire, à exhorter, à inviter les pécheurs à la pénitence ; et il le faisait avec tant de force, qu'on ne pouvait l'entendre sans être vivement touché. On ne peut dire le nombre des querelles qu'il étouffa, des scandales qu'il fit cesser, des usures, et des autres désordres qu'il abolit. Pour soustraire aux dangers de l'indigence une infinité de pauvres filles, trouva le moyen de les doter, soit par les aumônes qu'il allait lui-même recueillir dans la ville et sur la flotte, soit en faisant appliquer à cette bonne œuvre les amendes pécuniaires que les magistrats imposent en certains cas aux particuliers. En un mot, le fruit de ses travaux était si prodigieux, que vers la fin de l'année les confessionnaux étaient aussi fréquentés qu'ils le sont communément dans la semaine sainte.
A suivre : VI. Dieu le favorise du don de miracles.
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Louis- Admin
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VI. Dieu le favorise du don de miracles.
Tant de succès n'eussent pas aussi pleinement répondu aux travaux d'un seul homme, si Dieu lui-même ne l'eût fait dépositaire de sa puissance en le favorisant des dons qu'il a coutume de communiquer aux apôtres des nations infidèles ; je veux dire du don des miracles, du don de prophétie, du don de pénétrer le secret des cœurs. Je commencerai par le don des miracles.
Un nommé François Lopez, chargé de recueillir les aumônes destinées à entretenir le luminaire de la confrérie du Saint-Sacrement, choisissait ordinairement pour faire cette quête, le temps de la plus grande ardeur du soleil ; parce qu'alors tout le monde se tient renfermé chez soi, pour éviter la chaleur. Dans l'exercice de cette bonne œuvre, il gagna une violente maladie qui le mit bientôt à l'extrémité. Pierre Mercado, son oncle, alla promptement chercher le P. Claver qui, à son arrivée, le trouva sans aucun signe de vie. Voyant que tout le monde le pleurait déjà comme mort : « Non, non, » dit-il avec confiance, « celui au service duquel il a perdu la santé saura bien la lui rendre ; et il n'a permis que le péril fût si grand, que pour mieux faire éclater la grandeur de sa miséricorde. » Il ordonna ensuite qu'on exprimât dans la bouche du malade l'eau d'une certaine espèce d'éponge, remède qui passe pour assez violent dans le pays ; mais un nègre fort expérimenté, qui se trouva présent, s'y opposa en soutenant que Lopez était mort. « Non », insista le saint homme, « il ne l'est pas : qu'on essaye seulement. » Puis il s'en retourna promptement à la maison, en recommandant le malade au Seigneur. On fit le remède ordonné, mais il n'opéra rien, et le nègre s'obstina plus que jamais dans son opinion. Tandis que toute la famille fondait en pleurs, Mercado va retrouver le Père, pour se consoler du moins avec lui. « Eh ! pourquoi», lui dit le serviteur de Dieu, « pleurez-vous ainsi votre neveu? Retournons, le remède aura peut-être plus de vertu une autre fois. » Aussitôt il se met en chemin, entre chez le malade, bénit la boisson qu'il avait d'abord ordonnée, remue lui-même l'eau avec la main ; et à peine l'eut-il donnée au malade, qu'on entendit celui-ci pousser un grand soupir. Dans le premier transport de joie, tous les assistants coururent à lui ; et le Père, entendant crier au miracle, disparut promptement. Quelque soin que son humilité eût pris de cacher ce prodige aux yeux des hommes, sa fuite précipitée, son air embarrassé, son espèce d'obstination à conseiller un remède, qui dans ces circonstances est souvent plus nuisible que salutaire, le trahirent malgré lui : et ce qui ne laissa plus aucun lieu d'en douter, c'est que dès ce même jour le malade fut parfaitement rétabli.
Le receveur André de Castro l'ayant fait appeler chez lui pour y baptiser un enfant qui paraissait en danger de mort, il voulut faire chauffer l'eau qui lui parut trop froide : mais comme il ne se trouva point alors de feu dans la maison et que le danger pressait, le saint se fit apporter l'eau, la bénit, la mêla avec la main, et à l'instant la personne qui tenait le vase d'argent sentit, au travers du métal, une douce chaleur qui la surprit extrêmement.
L'esclave d'une femme voisine du collège étant prête à expirer d'une…
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VI. Dieu le favorise du don de miracles.(suite)
L'esclave d'une femme voisine du collège étant prête à expirer d'une hémorragie, sa maîtresse fort affligée, parce qu'elle n'avait point d'autre domestique pour la servir, fit avertir le P. Claver de venir la confesser au plus tôt. Il y alla, et après lui avoir donné l'absolution : « Levez-vous, Marie », lui dit-il, « et servez votre maîtresse. » Elle obéit, et se trouva sur-le-champ en état de rendre dans la maison tous les services ordinaires.
La sœur de la dame Isabelle d'Urbina étant malade d'une petite vérole accompagnée de pourpre, Isabelle envoya une chaise à porteur au P. Claver, qui était alors fort âgé et fort infirme, en le conjurant de venir disposer sa sœur à la mort, et la consoler elle-même. En arrivant, le Père fit prendre à la malade un petit morceau de conserve fort commune ; après quoi il dit à Isabelle : « Ne craignez plus de voir mourir votre sœur : la mort est, à la vérité, venue bien près d'ici, mais elle a passé. » En achevant ces paroles, il sortit. Le médecin étant venu quelques moments après et trouvant la malade fort affaiblie, voulut lui faire donner l'Extrême-Onction ; mais les deux sœurs pleines de confiance dans les paroles de leur saint directeur, ne jugèrent pas à propos de se presser ; et en effet la parfaite guérison suivit de près la visite et le remède.
Mais Dieu voulut faire sentir à la même dame, par un événement bien différent, quoique non moins miraculeux, qu'il connaît beaucoup mieux que nous-mêmes ce qui nous est avantageux; et qu'en pareil cas, il faut s'abandonner avec confiance entre ses mains. Son mari ayant été attaqué d'une maladie contagieuse dans un petit château à quelque distance de la ville, on fit prier le saint homme de venir au secours de ce gouverneur, qui était presque à l'extrémité. Il porta avec lui une image du F. Alphonse Rodriguez, qu'il présenta au malade. Dès que celui-ci l'aperçut, il témoigna beaucoup de joie et de respect ; il promit, s'il guérissait, une grosse somme d'argent pour contribuer aux frais de la canonisation de ce grand serviteur de Dieu. Le Père lui-même se mit en prières, et récita un évangile sur le gouverneur qui, malgré l'espérance d'un prompt rétablissement, mourut bientôt après fort regretté de tout le monde. Isabelle, inconsolable d'une telle perte, s'imagina que le Père n'avait pas voulu prier le Seigneur pour la santé de son mari, ne doutant point qu'il n'eût été exaucé s'il l'eût fait : elle s'en plaignit à lui-même fort amèrement, et eut le courage de lui demander s'il ne l'avait point trompée ? « Non », répondit Claver, « et le F. Alphonse lui-même a demandé instamment à Notre-Seigneur la guérison du malade ; mais ce divin Sauveur lui a répondu, qu'il lui était beaucoup plus avantageux de mourir maintenant, parce qu'il ne serait jamais mieux disposé. Il assura depuis si positivement et si souvent que ce gentilhomme était sauvé, qu'on ne peut révoquer en doute ses connaissances sur ce point, et que la vertueuse épouse se consola de la perte de son époux, par la certitude de son bonheur.
D. Vincent de Villalobos fut attaqué d'un mal si violent, que …
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D. Vincent de Villalobos fut attaqué d'un mal si violent, que toute la famille en pleurs le regardait déjà comme mort. Une femme de sa connaissance lui dit qu'une de ses esclaves étant sur le point d'expirer, elle lui avait mis, par le conseil du P. Claver, une certaine racine sur la tête et que en peu de jours elle avait été totalement guérie. C'étaient effectivement quelques racines broyées que le saint homme employait ordinairement dans ces sortes de rencontres, plus pour cacher le miracle que pour servir de remède. Plein de confiance, ce gentilhomme se fit appliquer le même remède sur la tête et sur le front : il dormit ensuite tranquillement, l'appétit qu'il avait totalement perdu lui revint et son mal se dissipa.
Une esclave de Dona Marie-Anne de Bellido tomba si dangereusement malade, qu'en peu de temps elle fut réduite à l'extrémité. Déjà même on la croyait morte et on se disposait à l'ensevelir, lorsque le P. Claver arriva, sans avoir été ni appelé, ni averti. « Non, non », dit-il en la voyant, « elle n'est pas morte, et même elle ne mourra point » Il l'appelle aussitôt par son nom, elle ouvre les yeux, lui répond, se confesse et se trouve parfaitement guérie.
Un autre jour qu'on l'avait été chercher en hâte pour un malade, il le trouva déjà privé de tout sentiment. Comme tout le monde jugea qu'il avait expiré, le Père mit sur le corps la croix qu'il portait et se retira aussitôt, en donnant pourtant quelque espérance à ceux qui étaient présents. A peine eut-il fait quelques pas dans la rue, qu'on le rappela : le Frère qui l'accompagnait, demanda ce qu'on voulait ? et comme on lui répondit que le malade désirait parler au P. Claver, le bon Frère, qui croyait la chose impossible, voulut continuer son chemin ; mais on le pressa si fort, qu'ils revinrent et trouvèrent celui qu'on avait cru mort parfaitement guéri. Cet homme rendit la croix, en faisant mille remercîments à son bienfaiteur, qui de son côté, sans proférer la moindre parole, retourna promptement au collège : mais son compagnon, aussi étonné du silence du Père que du prodige même, n'y fut pas plus tôt arrivé, qu'il raconta à tout le monde ce qu'il venait de voir.
Les démons ne résistaient pas plus que les maladies à la vertu de son pouvoir…
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VI. Dieu le favorise du don de miracles.(suite)
Les démons ne résistaient pas plus que les maladies à la vertu de son pouvoir ; et le nombre des possédés qu'il délivra fut si grand que, dans les informations qui se firent après sa mort, on ne put recueillir qu'une partie des faits. En voici un exemple d'autant moins douteux, qu'il se passa à la vue d'une infinité de personnes. Dans l'hôpital de Saint-Sébastien, un nègre encore infidèle fut pris d'une maladie inconnue et qui paraissait incurable. Il oublia tout à coup sa langue naturelle, pour en parler une que personne ne pouvait entendre ; il sentait au dedans de lui-même une voix terrible qui le menaçait de mort, si jamais il songeait à se faire baptiser ; il devint enfin si furieux, qu'il voulait se détruire. Le P. Claver ayant été appelé, reconnut sans peine l'artifice et la rage de l'esprit des ténèbres : il dit quelques évangiles sur le malade et en lui mettant la main sur la tête, il récita le « Credo » à haute voix. A l'instant le démon prit la fuite, le nègre, devenu tranquille, parla sa langue ordinaire ; il demanda le baptême, et dès qu'il l'eût reçu, il se trouva délivré de toutes ses infirmités.
Ce n'est pas toujours par des guérisons ou des délivrances miraculeuses, que le Seigneur fait éclater la sainteté et la puissance de ses serviteurs. Une jeune négresse portant un panier plein d'œufs qu'elle allait vendre au marché, fut rencontrée par un Espagnol, qui, pour je ne sais quelle raison, lui donna un soufflet. Le coup fut si violent, que le panier tomba par terre et que tous les œufs furent cassés. La pauvre fille désolée de cette perte jeta de grands cris, qui mirent tout le voisinage en rumeur. Le P. Claver, qui passait par là, comme par hasard, fut touché de compassion ; et, s'étant approché de la négresse, il lui demanda ce qu'elle avait à pleurer ? « Ce que j'ai», répondit-elle: « voyez, mon Père, c'était là tout mon bien, tout ce que j'avais pour vivre pendant plusieurs jours.— Hé bien ! » répliqua le saint homme, « remettez vos œufs dans votre panier, et ne pleurez plus. » Ensuite, comme pour lui aider à les ramasser, il se mit à les pousser doucement vers elle avec le bout de son bâton, et, à mesure qu'il les touchait, ils devenaient aussi entiers qu'auparavant. L'esclave tout étonnée ne savait que penser et prenait tout ce qu'elle voyait pour un enchantement. Elle se retourna pour remercier son bienfaiteur, mais il avait disparu.
Il arriva une autre fois que le P. Claver, tout absorbé en Dieu au moment qu'il donnait la communion au peuple avec la plus belle chasuble de l'église, alla heurter contre une lampe dont l'huile se répandit sur lui. Quand il retourna à la sacristie, le Frère, tout désolé de voir son ornement perdu, ne put s'empêcher de lui en faire des reproches très vifs et en des termes peu mesurés ; mais voyant que le Père ne répondait rien, il alla en murmurant mettre la chasuble dans un coin séparé, de crainte qu'elle ne gâtât les autres. Le saint homme se retira dans l'église, en priant Dieu pour celui qui venait de le traiter si mal. Dès le lendemain, le sacristain étant allé revoir la chasuble, fut bien étonné de la trouver aussi propre et plus brillante même qu'auparavant. La surprise et la joie furent égales dans ce bon religieux, qui parut presque aussi sensible au recouvrement de son ornement qu'au prodige qui le lui avait rendu.
Il faudrait un volume entier, pour rapporter toutes les guérisons subites, ou désespérées, toutes les merveilles que le saint apôtre opéra dans l'exercice de son ministère, soit en visitant seulement le malade, soit en récitant sur lui un évangile, soit en lui envoyant quelques conserves, soit enfin en lui appliquant quelque relique. En voici un trait singulier, et qui fit plus de bruit que la plupart des autres….
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A suivre : VII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.
VI. Dieu le favorise du don de miracles.(suite)
Un jeune Catalan, particulièrement connu du P. Claver, résolut de s'embarquer en qualité de chirurgien, sur un vaisseau qui partait pour l'île de Cuba, de conserve avec celui qui portait le gouverneur de la Jamaïque. Avant que de mettre à la voile, il alla prendre congé du Père, à qui il demanda des reliques pour sa sauvegarde durant le voyage ; et en ayant obtenu quelques-unes, qui étaient renfermées dans un papier, il les attacha sur sa poitrine. Lorsque les deux vaisseaux furent en vue de la Jamaïque, on aperçut un gros navire ennemi qui leur donna la chasse. Celui qui portait le gouverneur eut le temps de gagner le port, tandis que l'autre, resté seul, était obligé de soutenir un feu terrible. Au milieu du combat, une balle frappa le chirurgien à la poitrine; il tomba sous le coup, on le crut mort et on le retira promptement à fond de cale. Comme on le déshabillait, pour tenter de lui donner quelques secours s'il n'était que blessé, on vit tomber de son sein une grosse balle qui, s'étant arrêtée contre le papier, ne lui avait laissé qu'une légère contusion sur la chair. On lui demanda avec étonnement la cause d'un événement si extraordinaire ; et ayant répondu qu'il était redevable de son salut à ce papier qui venait du P. Claver, il fut obligé de le partager, aussi bien que les reliques entre tous les gens de l'équipage. Cependant les ennemis, contents de la prise du vaisseau, débarquèrent leurs prisonniers dans l'île de la Jamaïque, où le bruit de ce prodige se répandit en peu de temps. Le gouverneur, de retour à Carthagène, eut soin de l'y publier ; et le jeune chirurgien étant venu remercier le Père, prit à part le F. Gonzalez, lui raconta le fait et le pria de l'écrire, afin que la mémoire d'un événement si miraculeux ne se perdît point.
La vertu communiquée au serviteur de Dieu semblait n'être inutile que pour lui-même; de sorte que, dans les infirmités dont il était accablé, il ne trouvait de ressource que dans sa patience et sa soumission à la volonté de Dieu. Cependant, un jour qu'il était tombé fort gravement et s'était fait à la tête une blessure qui ne fut pas bien traitée par un chirurgien peu habile, on en fit venir un autre plus expert. Celui-ci jugea à propos d'ouvrir la plaie de la largeur de plus d'un doigt, et, le lendemain, l'ayant trouvée parfaitement guérie sans aucune autre marque qu'une petite cicatrice rouge, « Il a passé par ici, » dit-il aussitôt avec étonnement, « un plus grand chirurgien que moi. » Il demanda ensuite un nouveau linge au Frère infirmier, sous prétexte de changer l'appareil, mais en effet pour avoir la consolation d'emporter celui qui était déjà teint du sang d'un si saint homme. En arrivant chez lui, il l'appliqua sur les yeux de sa femme, qui depuis trois mois était incommodée d'une grosse fluxion, et dans le même instant elle se trouva guérie.
A suivre : VII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.
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VII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.
Il n'était pas toujours nécessaire qu'on s'adressât à lui, pour éprouver l'effet de son pouvoir auprès de Dieu. On a déjà remarqué plus d'une fois, que souvent il connaissait par une lumière surnaturelle les personnes malades, affligées, qui avaient besoin de son secours. C'est ce qui fut juridiquement prouvé dans les informations canoniques, on en verra avec plaisir quelques exemples.
Un pauvre homme, nommé Alphonse Nicolas, étant tombé dangereusement malade, fut tout surpris de voir le P. Claver entrer chez lui, parce qu'il ne l'avait point fait avertir, et que d'ailleurs son logement était si écarté qu'on ne pouvait le trouver que très difficilement. Après lui avoir dit quelques paroles de consolation, le saint homme l'exhorta à se confesser ; et, ayant appris de lui qu'il s'appelait Nicolas, il lui demanda s'il voulait voir son patron. Le pauvre répondit qu'il le voulait bien. Aussitôt le Père tire de sa poche un livre où était l'image du saint et la présente au malade. On y voyait une troupe de démons fuyant à l'aspect du saint évêque, et dont la figure terrible fit une si forte impression sur Alphonse qu'au moment même il conçut une vive douleur de ses péchés, et que, pour commencer une vie plus chrétienne, il voulut faire une confession générale. Le Père lui fit en sortant une aumône considérable, il continua de le visiter tant qu'il fut malade ; et, après lui avoir rendu les plus humiliants services, il baisait les ulcères dont il était couvert. Quand le malade fut en état de marcher, il venait tous les jours à l'église du collège ; dès que le P. Claver l'apercevait, il se levait du confessionnal et le prenait par le bras, pour l'aider à se traîner jusqu'à la chapelle du Christ, où il avait soin de le placer de manière qu'il pût entendre la messe commodément.
On vit alors se renouveler mille fois, en faveur des Espagnols, les merveilles opérées en faveur des nègres qui avaient besoin d'un prompt secours. Comme il allait un jour voir un malade pour qui on l'avait appelé, il s'arrêta tout à coup au milieu du chemin, puis s'adressant à son compagnon : « Mon Frère, » lui dit-il en homme inspiré, « retournons sur nos pas, et allons sauver une âme. » A ces mots il marche en diligence vers l'endroit que lui marquait l'esprit de Dieu, et il entre dans une cabane où il trouve un pauvre Espagnol que la misère et le désespoir avaient réduit à se pendre. Comme il respirait encore, le P. Claver coupe la corde, reçoit ce malheureux entre ses bras et le fait revenir à force de soins. S'appliquant ensuite à la guérison de son âme, il lui fait vivement sentir le risque qu'il avait couru de périr éternellement ; et le voyant pénétré d'une sincère douleur de son crime, il le confesse, le console et le laisse enfin déterminé à recevoir avec soumission la croix dont Dieu l'avait chargé.
Une dame espagnole, dont le fils avait mal réussi dans quelques affaires qu'on lui avait confiées, se voyant accablée de dettes et poursuivie par des créanciers impitoyables, dont elle essuyait tous les jours les menaces et les mauvais traitements, tomba dans un si violent désespoir qu'elle prit la résolution de s'empoisonner. Au moment qu'elle descendait pour fermer la porte de la maison, afin que personne ne vînt la troubler dans l'exécution de son dessein, le P. Claver, conduit par une inspiration particulière, entra dans la cour. « Qu'y a-t-il donc, Madame, » lui dit-il en la regardant d'un air de bonté et de compassion ? Frappée d'une visite à laquelle elle ne s'attendait pas et revenue à elle-même: « Ah! mon Père, s'écria-t-elle, soyez le bien-venu : c'est sans doute un ange que Dieu m'envoie pour me secourir. » En même temps, elle se jette à ses pieds et lui montre le poison qu'elle avait préparé. Le Père l'ayant reprise avec fermeté, lui fit une vive exhortation sur la dette éternelle qu'elle allait contracter, sur les exigences tyranniques des démons auxquels elle voulait se livrer, et sur les avantages des afflictions et de la patience. « Eh ! pourquoi, ajouta-t-il, désespérer, même en cette vie ? Que n'avez-vous recours à Dieu ? Ne savez-vous pas que c'est un père qui n'abandonne jamais ceux qui se confient en lui ? » La dame, vivement touchée, reconnut sa faute, la confessa et, après en avoir reçu l'absolution, se résigna parfaitement à tout ce qu'il plairait à la Providence de lui envoyer.
Dans une maison de Carthagène distinguée par sa piété…
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Louis- Admin
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Re: Saint Pierre Claver.
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VII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.(suite)
Dans une maison de Carthagène distinguée par sa piété, il y avait un grand nombre de négresses à qui on ne permettait pas de sortir. Une d'entre elles, ne pouvant supporter une pareille contrainte, prit le parti de s'enfuir. Au bout de quelque temps, elle eut de vifs remords; mais la crainte du châtiment l'empêchant de retourner, elle résolut de se donner la mort. Dans ce dessein, elle se munit d'une corde, sort de la maison où elle se tenait cachée, monte sur un arbre, et s'étant déjà mis la corde au cou, elle s'écrie : « JÉSUS, soyez avec moi. » A ce nom si doux et si puissant, la corde rompt ; la négresse tombe à terre pénétrée de repentir, et, faisant le signe de la croix, elle bénit la miséricorde divine de l'avoir délivrée d'un tel péril, mais sans pourtant oser encore retourner chez ses premiers maîtres. Au milieu de son embarras, elle entendit une voix secrète qui lui disait d'aller à l'église des jésuites et de s'adresser au P. Claver : elle y alla sur-le-champ et se confessa de son crime, en lui montrant la corde rompue. Le saint homme, après lui avoir donné tous les avis nécessaires, la ramena lui-même à ses maîtres, et en obtint le pardon de cette malheureuse esclave, en les assurant de son repentir.
Un jour, sortant du collège, le P. Claver rencontra sur son chemin une jeune dame: « Où allez-vous, lui dit-il ?» La pauvre femme hésitant à répondre: « Donnez-moi, ajouta-t-il, avec bonté, ce que vous portez là. » Elle, le regardant comme un homme inspiré, tira aussitôt de sa poche une corde qu'elle lui montra, en lui avouant que le désespoir la lui avait fait prendre pour terminer ses jours. « Hé ! pourquoi, ma fille, reprit-il encore, voulez-vous mourir, tandis que je suis ici, prêt à vous donner tous les secours nécessaires ? » Il lui ordonna ensuite de retourner chez elle, lui fit faire une confession générale et l'engagea à mener désormais une vie chrétienne.
Il tira encore du même péril une malheureuse esclave désespérée de ne pouvoir obtenir la liberté que son maître lui avait souvent promise pour récompense de ses services. Toutes les fois qu'elle faisait réflexion à son malheur, le démon lui apparaissait tout disposé à la délivrer de ses maux : « Que tardes-tu »? lui disait-il, en lui témoignant beaucoup de compassion de son état. « Que ne te donnes-tu la mort ? C'est la fin de tous les maux de la vie. Te voilà esclave et malheureuse pour toujours ; et si tu avais assez de courage pour exécuter ce que je te conseille, tu serais admise dans le ciel au nombre des martyres. » Un jour qu'elle était à une fenêtre, où il y avait des grilles et des barres propres au dessein du prétendu médecin : « Voilà, lui dit-il, une belle occasion de te rendre heureuse ; mais dépêche-toi, car je vois venir ici un homme que je hais, parce qu'il est mon plus grand ennemi ; et s'il arrive, nous ne pourrons achever. Déjà elle s'était passé la corde au cou, lorsque le P. Claver entra dans la maison :
« Ne te l'avais-je pas bien dit ? » lui cria le démon, en prenant la fuite.
— « Et qu'est-ce ceci ? » lui dit à son tour le saint homme en l'abordant. « Que faites-vous ? Pourquoi cette corde ?
— Hélas ! mon Père », répondit la pauvre esclave en versant des torrents de larmes, « c'est la peine de mes péchés, j'étais perdue sans vous.
— Hé bien! » répliqua-t-il, en lui présentant le crucifix, « voici qui vous pardonnera ces péchés, si vous vous en repentez vivement à ses pieds. » Il la disposa ensuite à faire une confession générale et la laissa très contente de passer le reste de sa vie dans l'esclavage pour expier son crime.
Souvent Dieu ôte aux hommes les biens périssables de la fortune…
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VII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.
Souvent Dieu ôte aux hommes les biens périssables de la fortune, pour leur inspirer le désir des biens éternels : mais il en est peu qui imitent la résignation de Job ; et la plupart ne deviennent malheureux dans le temps que pour le devenir plus encore dans l'éternité. Combien de gens à Carthagène auraient éprouvé ce funeste sort, sans le zèle et la charité du saint apôtre ? Il suffira d'en rapporter quelques traits des plus remarquables. Un homme ayant perdu tout son bien en conçut un chagrin d'autant plus violent, qu'il se voyait tourmenté sans cesse, d'un côté, par des créanciers avides qui voulaient être payés, et, de l'autre, par une nombreuse famille qui lui demandait de quoi vivre. Dans les accès de sa douleur et de son désespoir, il entendit une voix secrète qui lui répétait sans cesse : « Pends-toi, pends-toi. » Quoiqu'il ne pût ignorer d'où partait un semblable conseil, aveuglé par son chagrin et par sa passion, il était sur le point de s'y rendre, lorsque Dieu en eut pitié, le conduisit dans la maison d'un de ses amis, qui, à son air égaré, se doutant de son dessein, le mena sur-le-champ au P. Claver. Le saint homme le prit en particulier ; et, par ce talent de persuader qui lui était propre, il le détermina à faire une bonne confession : après quoi il lui mit au cou une médaille de saint Ignace, et le renvoya si consolé, que dans l'espace de quinze jours il recouvra la joie et la santé.
La même chose arriva à un homme de condition, mais avec des circonstances beaucoup plus singulières. Outré de se voir presque réduit à la mendicité, ce malheureux résolut de se détruire. Pour exécuter son dessein en liberté, il envoya sa femme chercher le P. Claver, sous prétexte de venir le consoler. Déjà la dame était à la moitié du chemin, lorsque, faisant réflexion au risque qu'il y avait à laisser ainsi son mari seul en proie à ses idées noires, elle se sentit comme inspirée de retourner sur ses pas. En rentrant dans la maison, elle entend un grand bruit du côté du jardin : elle y court avec précipitation, et trouve son mari pendu à un arbre, mais qui luttait encore contre la mort. Sa douleur lui donnant des forces, elle le soulève par les pieds, en appelant à grands cris les voisins à son secours. On arriva assez à temps pour détacher ce malheureux avant qu'il expirât ; mais dès qu'il fut revenu à lui, il entra dans une telle fureur, qu'il cherchait une épée ou un couteau pour se percer. Le P. Claver, appelé en hâte, eut à peine pris la main de ce maniaque, en lui mettant au cou une médaille de saint Ignace, qu'à l'instant il devint tranquille. Il employa une grande partie de la nuit à se confesser ; et dès le lendemain matin, le gentilhomme vint à l'église pour rendre ses actions de grâces à saint Ignace, mais en publiant hautement que c'était par l'entremise du fils qu'il était redevable au père d'un tel bienfait.
Citons pour terminer un événement plus extraordinaire encore…
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A suivre : VIII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.
VII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.(suite)
Citons pour terminer un événement plus extraordinaire encore. Le Frère sacristain ayant aperçu, dans la cour du collège, un homme qui marchait d'un air triste et paraissait réduit au désespoir, eut envie de lui parler pour lui donner quelque consolation ; mais cet homme refusa obstinément de l'écouter en disant qu'il était déjà trop tard. Le bon Frère redoubla ses instances : tout ce qu'il put tirer de lui, c'est que Dieu sans doute l'avait conduit en ce lieu, pour mettre fin à ses malheurs, mais qu'il ne pouvait lui en découvrir la cause. Le sacristain l'engagea enfin à s'adresser au P. Claver, qui, après lui avoir parlé en secret, le retint dans la maison pendant toute la nuit et lui servit lui-même à souper. Le matin, cet homme, devenu plus tranquille, se confessa avec de grands sentiments de repentir, et, délivré tout à coup de ses inquiétudes, il conjura le Père de lui aider à rendre grâces à Dieu de ses infinies bontés, et de raconter à tout le monde ce qui l'avait amené au collège et ce qui lui était arrivé.
Voici ce qu'il rapporta lui-même.
« J'avais perdu tout mon bien, lui dit-il, et ne sachant plus comment vivre, je pris le parti de me donner la mort. Dans cette résolution, je me mis en chemin vers une montagne peu éloignée de la ville. En ce moment un homme inconnu se présenta à moi ; et, m'ayant dit avec beaucoup de douceur de ne rien craindre, de me fier à lui, et de le suivre, il me conduisit par un sentier tout hérissé d'épines et de buissons touffus, où, pour faire un pas, il fallait m'ouvrir le chemin avec des peines infinies. Surpris de me voir tout déchiré et tout couvert de sang, je dis à mon guide : « Eh ! JÉSUS ! où me conduisez-vous ? » A ces mots le fantôme disparut; et moi, ayant fait aussitôt le signe de la croix, je retournai sur mes pas pour retrouver mon chemin. Dès que j'y fus arrivé, j'aperçus la même figure qui se présenta de nouveau, en me répétant les mêmes paroles que la première fois. Alors ne pouvant plus douter de ce que c'était, je fus saisi de frayeur, et je m'enfuis à toutes jambes vers le collège des jésuites. J'y restai quelque temps, flottant entre le désir de me délivrer de mes peines et la honte d'en avouer le sujet. Deux fois je voulus sortir, mais je fus toujours arrêté par la vue du même fantôme, qui du milieu de la rue me faisait signe de venir. Enfin, dans le temps qu'aux approches de la nuit je voulais encore m'en retourner, le sacristain de votre maison m'a rencontré. Vous savez tout le reste. »
A suivre : VIII. Dieu lui fait connaître ceux qui ont besoin de son secours.
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VIII. Il pénètre dans le secret des coeurs.
A ce don de faire des miracles et de consoler les personnes réduites au désespoir, Dieu voulut encore unir celui de prédire l'avenir et de pénétrer dans le secret des consciences. Tant d'âmes qu'il secourut si à propos, sans avoir pu naturellement être instruit de leur état, ainsi qu'on vient de le rapporter, en seraient déjà une preuve incontestable ; mais ses lumières ne se bornaient pas à ces connaissances. Il lisait dans le cœur des nègres qu'il confessait, et ne manquait pas de leur rappeler les péchés qu'ils oubliaient, ou que la honte leur faisait dissimuler. Quelque soin qu'ils prissent de se cacher, il découvrait leurs dissensions, leurs rancunes secrètes, ou le dessein qu'ils avaient formé de s'enfuir. Il n'est pas croyable combien il en retint par là dans le devoir.
Il y avait dans un monastère quatre négresses fort vertueuses, qui faisaient tour à tour l'office de portière. Le Père, qui les estimait beaucoup, leur parlait de Dieu toutes les fois qu'il y allait. Une religieuse, fort curieuse de savoir ce qu'il pouvait leur dire, se cacha un jour pour l'écouter ; et ne trouvant pas dans ses discours tout ce qu'elle avait espéré, elle ne put s'empêcher de murmurer en elle-même. A peine avait-elle porté ce jugement peu favorable, que le Père interrompant la suite de son discours, dit en élevant la voix : « Au reste, ce n'est pas pour les blanches, mais pour les noires que je parle de la sorte et d'une manière si simple. » La religieuse, bien étonnée de ce qu'elle entendait, apprit à ne pas précipiter ainsi ses jugements.
D. Diégue de Villegas était depuis quelque temps fort inquiet, au sujet d'une affaire de conséquence qui l'embarrassait et qu'il n'osait communiquer à personne. Ne sachant quel parti prendre, son esprit était sans cesse dans une agitation qui le détournait de ses autres devoirs. Un jour, au sortir de l'église, ayant été prendre de l'eau bénite au pilier le plus proche du confessionnal du Père Claver, le saint homme sortit pour un moment, et lui dit en l'abordant d'un air d'autorité : « Laissez cela, abandonnez tout à Dieu. — Hé ! quelle est donc la chose que je dois ainsi abandonner ?» lui répondit l'Espagnol tout surpris. Alors le Père lui découvrant à lui-même ce qu'il s'obstinait à tenir caché, le conjura de ne plus tant s'inquiéter et de se confier en Dieu qui aurait soin de tout. D.Diégue sortit de l'église, si frappé de ce qu'il venait d'entendre et si convaincu que, dans cet événement, il y avait quelque chose, de surnaturel, que depuis il regarda toujours le Père comme un saint et un prophète inspiré de Dieu.
On pourrait citer une infinité de faits semblables, pour prouver que D. Diégue ne se trompait pas. Il y avait déjà longtemps qu'un nommé Thomas Lopez conservait une haine mortelle contre un homme qui avait tué son frère, et que le P. Claver faisait inutilement tous ses efforts pour l'engager à pardonner à son ennemi. La mère de Lopez, qui n'était pas moins animée que lui, étant tombée malade, le Père l'alla visiter avec sa charité ordinaire ; et, comme elle était fort pauvre, en la quittant il lui mit en main une somme assez considérable. Le fils, instruit de ce bienfait, s'imagina que le saint homme avait voulu acheter à ce prix la réconciliation qu'il désirait, et que ce don n'était pas une pure aumône. Dans cette persuasion, il reporta l'argent au Père, qui en le voyant et sans lui donner le temps de proférer une seule parole, lui dit avec douceur : « Non, mon fils, il n'en est pas comme vous le pensez : mon intention a été de faire une aumône et non pas un achat. » Lopez demeura interdit, et voyant qu'il perdrait sa peine à disputer plus longtemps contre un saint qui lisait au fond des cœurs, il se réconcilia sincèrement avec son ennemi, et s'abandonna lui-même tout entier aux soins de son bienfaiteur.
Un autre jeune homme fort déréglé…
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Louis- Admin
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A suivre : IX. Il est favorisé du don de prophétie.
VIII. Il pénètre dans le secret des coeurs.(suite)
Un autre jeune homme fort déréglé, pressé par les sollicitations de ses parents, prit enfin le parti d'aller trouver le P. Claver et lui demanda s'il voulait le confesser ? « Hé ! pourquoi ne le voudrais-je pas ? répondit-il. Mais vous, pourquoi ne venez-vous pas bien disposé à recevoir cette grâce ? Allez promptement au pied de l'autel, disposez-vous mieux, et revenez. » Le jeune homme, après quelques prières faites plus par complaisance que par piété, vint se représenter au saint homme qui, en le voyant, lui dit avec quelque émotion : « Mon fils, on ne se moque pas ainsi de Dieu : vous voilà encore moins bien disposé qu'auparavant ; est-il possible que vous ne vouliez pas vous détacher de cette occasion de péché? » Puis il le prend par la main, et le conduit lui-même devant le Saint-Sacrement, où il lui fait réciter cinq Pater et cinq Ave. Dans l'instant même le jeune homme se trouve changé, il conçoit une vive douleur de ses désordres et se confesse avec beaucoup de sincérité.
Vers le même temps il arriva une petite aventure bien propre à confirmer l'idée qu'on avait des lumières surnaturelles du saint religieux. Dona Constance de Luna avait deux enfants, qui jour et nuit ne faisaient que se tourmenter et que crier, jusqu'à troubler sans cesse le repos de toute la maison. La famille, ne pouvant découvrir la raison de ces agitations continuelles, eut recours au P. Claver, comme à un homme particulièrement éclairé de Dieu et tout puissant auprès de lui. Il se rend chez la dame, et en voyant les deux enfants : « Sont-ce donc là, dit-il en souriant, ces deux petits méchants qui troublent tout ?» On lui répondit que c'était eux-mêmes. « Mais, ajouta-t-il, où donc est l'eau pour les baptiser ?» On l'assura qu'ils avaient été baptisés. « Je le sais, reprit-il, mais ils ont été mal baptisés.» On interrogea les témoins du baptême et, sur leurs réponses, on découvrit qu'on avait omis une circonstance essentielle dont le défaut rendait le baptême nul. Alors le Père les ayant baptisés lui-même, ils devinrent tranquilles et le calme fut rétabli dans la maison.
A suivre : IX. Il est favorisé du don de prophétie.
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IX. Il est favorisé du don de prophétie. — Diverses prédictions en conséquence.
L'Avenir ne lui était pas plus caché que le fond des cœurs, et le besoin des malheureux.
Dona Théodora Banquelez, épouse de Don Gabriel de Mendez, gouverneur de Sainte-Marthe, étant sur le point de repasser en Europe avec son mari, voulut prendre congé de l'apôtre de Carthagène et se recommander à ses prières : « Madame, lui répondit-il avec politesse, allez avec la bénédiction de Dieu ; mais sachez que peu après ce voyage qui sera heureux, il vous en faudra faire un autre bien plus long.» Comme elle se montrait curieuse de savoir ce qu'il voulait dire par là, il lui déclara nettement que ce voyage serait pour l'autre vie ; qu'elle mourrait peu de jours après son arrivée en Espagne ; et que Dieu voulant l'appeler à lui, il fallait se soumettre à sa volonté sainte, qui fait tout pour notre bien. La dame, quoique jeune et en parfaite santé, suivit le conseil du P. Claver ; elle se disposa sérieusement à paraître devant Dieu, et sa mort, qui suivit de près son débarquement en Espagne, justifia la sagesse de ses précautions.
Une autre fois, étant allé chez Dona Marie-Anne de Villedo, il demanda avec beaucoup d'instance à parler à un certain esclave de la maison ; mais, comme il venait de sortir à l'heure même, il chargea la maîtresse de le lui envoyer, dès qu'il serait revenu. « Que voulez-vous donc ? mon Père, » lui dit le nègre en l'abordant. « Que vous vous confessiez tout à l'heure, comme pour mourir, » répondit le Père. Après s'en être défendu quelque temps sur ce qu'il n'avait rien à craindre et qu'il se portait bien, il obéit enfin et se confessa. Quand il fut retourné à la maison, il mangea de bon appétit, se coucha plein de santé, et le lendemain matin on le trouva mort dans son lit.
Le bruit s'étant répandu quelque temps après dans Carthagène, que le mari de la même dame avait été tué à la guerre de Catalogne, une de ses amies alla pour la consoler dans son affliction, et tâcha de la rassurer sur ce qu'on n'en avait point encore appris de nouvelles certaines. Voyant qu'elle ne gagnait rien sur l'esprit de l'épouse désolée, elle lui conseilla d'envoyer chercher le P. Claver, qui était plus que personne en état de lui dire la vérité. On le pria donc instamment de venir, mais il le refusa toujours en disant: « Eh ! pourquoi irais-je ? puisque je n'ai rien à lui apprendre qui puisse lui donner quelque espérance ? » Bientôt après on reçut, par des lettres d'Espagne, la nouvelle certaine de la mort du gentilhomme espagnol.
Le capitaine Pierre Doriola, ayant envoyé son fils en Espagne pour faire ses études à Salamanque, vint prier le P. Claver de recommander à Dieu ce jeune homme qui était alors en mer. « C'est ce que je faisais dans ce moment, répondit-il, parce que les galions essuient à l'heure qu'il est une violente tempête ; mais, par la protection divine, ils ne périront pas. » Le capitaine remarqua le jour et l'heure de la prédiction ; et les premières lettres qu'il reçut de son fils lui apprirent la vérité de tout ce qu'on lui avait déclaré.
D. Antoine de Bétancour étant venu prendre congé du Père, avant que de se rendre à son gouvernement de la Jamaïque : « Partez, lui dit le saint homme, mais ne manquez pas d'emmener vos enfants avec vous. » Le gouverneur suivit ce conseil, sans savoir pourquoi on le lui donnait ; mais il ne fut pas longtemps sans en apprendre la raison. Peu après, la ville de Carthagène fut affligée d'une violente peste, qui y fit de grands ravages.
Il tira d'un danger encore plus pressant…
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IX. Il est favorisé du don de prophétie. — Diverses prédictions en conséquence.(suite)
Il tira d'un danger encore plus pressant un grand nombre de personnes qui étaient sur le point de périr, sans le savoir. En passant un jour devant une maison de la ville, il avertit tous ceux qui y étaient d'en sortir sans différer, s'ils ne voulaient pas être écrasés sous les ruines. Ils obéirent, quoique avec assez de répugnance, parce qu'ils ne voyaient aucun péril : mais à peine eurent-ils fait quelques pas, que la maison croula et ne fut bientôt plus qu'un tas de bois et de pierres.
D. Juan d'Uvriarte Araoz, un de ses pénitents, désolé de voir sa fille unique à l'extrémité, résolut d'aller au collège la recommander aux prières de son saint directeur. « Non, non, lui dit le Père en le voyant arriver, et avant qu'il eût encore pu dire une parole. — Mais, mon Père, répartit D. Juan, que voulez-vous me dire par là? Croyez-vous que je vienne me confesser? — Vous voulez, répliqua le saint homme, que je recommande votre fille à Dieu; rendez-lui plutôt grâces de ce qu'il veut la prendre pour le ciel: il n'est pas même nécessaire de dire la messe pour elle. » Par toutes les perquisitions qu'on fit à ce sujet, on reconnut qu'il n'était pas possible que le Père eût été informé de la maladie subite de cette fille. Elle mourut le jour même, et les parents ne doutant point de son salut, se consolèrent plus aisément de sa perte.
Il lui arrivait souvent de prédire ces sortes de morts heureuses, plus consolantes et plus précieuses que la santé. Étant allé voir Augustin de Baraona qui languissait depuis quelque temps, le malade voulut se confesser pour se mieux disposer à la mort. Sa femme et son fils voyant qu'ils avaient déjà passé plus d'une heure et demie ensemble, eurent la curiosité d'écouter ce qu'ils disaient et se glissèrent doucement derrière les rideaux. Ils furent bien surpris de voir le Père à genoux, qui, les mains jointes, suppliait son malade de le recommander à Dieu, dès qu'il serait avec lui, ce qui arriva le lendemain ; Baraona le lui promit, en l'embrassant avec tendresse. Cependant la dame, affligée d'entendre que la mort de son mari était si proche, fondait en larmes: mais son fils la consola enfin, en lui rappelant les paroles que le saint homme avait ajoutées. La mort de Baraona arriva le lendemain, ainsi que le Père l'avait prédit.
De toutes les personnes de Carthagène, Dona Isabelle d'Urbina fut celle qui eut le plus souvent occasion de reconnaître dans son saint directeur le don de prophétie et de lumières. Un jour, après l'avoir confessée, il lui imposa pour pénitence de prier Dieu pour les esclaves qu'elle avait dans une habitation fort éloignée de Carthagène; « et surtout pour ce pauvre martyr », répéta-t-il par deux fois avec une émotion extraordinaire. Huit jours après elle apprit qu'à la même heure, le maître des esclaves en avait aperçu un qui s'était retiré pour prendre un peu de repos, parce qu'il se sentait fort malade; et que s'étant imaginé que ce malheureux quittait le travail par négligence, il l'avait fait traîner rudement en prison, où, chargé de fers, il périssait de misère et de langueur.
Quelques jours avant le carême, étant entré chez la même dame, à qui sa sœur était venue tenir compagnie: « En vérité, dit-il, de tout ce carême, on n'aura pas besoin ici de parures. » Dès le premier dimanche, D. Juan d'Urbina, leur père, tomba si malade, que les deux sœurs ne furent presque occupées qu'à le soigner. Au bout d'un mois, il lui prit une si grande défaillance qu'on pensa à lui donner le viatique ; et comme sa fille était toute désolée de voir que le médecin voulait différer, le P. Claver la rassura, en lui disant qu'il n'était pas encore temps. Quelques jours après, il survint au malade de grands vomissements qui firent craindre pour sa vie, et le lendemain Dona Isabelle courut à son saint directeur pour lui demander le secours de ses prières. « Quoi! lui dit-il, en frappant deux fois de la main sur une petite table qui était placée vis-à-vis de son confessionnal, quoi! des prières pour ce saint homme Job! Dieu lui destine une brillante couronne dans le ciel; mais ce ne sera que la semaine sainte. » Il mourut en effet le dimanche des Rameaux.
Il se trouvait alors à Carthagène un jeune Espagnol de grande espérance, nommé Emmanuel Alvarez…
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Re: Saint Pierre Claver.
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A suivre : LIVRE CINQUIÈME.
IX. Il est favorisé du don de prophétie. — Diverses prédictions en conséquence.(suite)
Il se trouvait alors à Carthagène un jeune Espagnol de grande espérance, nommé Emmanuel Alvarez. Le P. Claver le pressa vivement de quitter le monde et de prendre l'habit religieux, parce qu'il devait mourir plus tôt qu'il ne pensait, en telle année et en tel mois qu'il lui marqua. Alvarez, incertain de ce qu'il devait faire, ne découvrit rien à personne de tout ce qu'on lui avait dit et continua pendant quelques années ses études à Santa-Fé. Après y avoir pris les grades ordinaires, il revint à Carthagène, où il ne trouva plus le serviteur de Dieu qui était mort depuis quelque temps, et où il prit enfin l'habit de Saint-François. Au milieu de son noviciat, il tomba malade; et comme ses supérieurs voulaient le renvoyer chez ses parents pour se rétablir, parce que le mal paraissait devoir être long et dangereux : « Non, non, dit-il alors avec assurance, tout cela serait inutile : je dois mourir cette année, dans ce lieu même, et ce sera au commencement du mois prochain. Il y a longtemps que mon saint P. Claver me l'a prédit, et cela arrivera assurément. » En effet, le novice mourut saintement dans les premiers jours du mois suivant.
D. Lopez d'Estrada, fils aîné de la sœur d'Isabelle d'Urbina, ayant été puni par son maître pour quelque négligence dans ses études, se retira de dépit au couvent de Saint-Jacques, dans le dessein de se faire religieux. Ses parents en eurent beaucoup d'inquiétude. Le P. Claver étant allé voir la mère du jeune homme, cette dame lui fit part de son chagrin, en lui disant que, quoiqu'elle désirât voir ses enfants prendre une route aussi sainte, celui-ci n'était pas encore en état d'embrasser un tel parti. « Ne craignez rien, lui répondit le saint homme. D. Lopez ne sera jamais religieux ; mais il faudra vous résoudre à consacrer à Dieu vos deux cadets qui entreront chez les jésuites. » L'aîné changea bientôt en effet de résolution, et les deux frères, qui n'avaient jamais pensé à se faire religieux, sollicitèrent fortement leur entrée dans la Compagnie: mais D. Pédro d'Estrada, leur père, ne put jamais se résoudre à y consentir. Quelque temps après, le jeune D. Lopez s'étant embarqué sur la Capitane pour aller à l'île de Sainte-Catherine, le navire heurta rudement sur un rocher à l'entrée même du port, et se brisa. La nouvelle en vint bientôt à Carthagène, et les débris qu'on aperçut tout le long de la côte ne servirent que trop à la confirmer. La mère du pilote vint tout éplorée trouver le P. Claver pour lui demander le secours de ses prières dans ce malheur. « Consolez-vous, lui répondit-il, ne pleurez point: le navire à beaucoup souffert à la vérité, mais il n'a péri aucun homme de l'équipage. » Il confirma la même chose à la mère de D. Lopez, en ajoutant que bientôt elle reverrait son fils. Cependant Don Pedro ne pouvait se rassurer. Un jour que ce gentilhomme priait avec beaucoup de ferveur dans l'église des jésuites, il promit à Dieu que, s'il lui venait de bonnes nouvelles de son aîné, il consentirait de bon cœur à ce que les deux autres se fissent religieux. A peine eut-il fait cette promesse, qu'au sortir de l'église il trouva un homme avec une lettre de D. Lopez, qui lui mandait qu'il était en sûreté à Porto-Belo, avec tous les gens du navire. Peu de temps après, les deux cadets entrèrent chez les jésuites, où ils vécurent avec une grande réputation de vertu.
Le saint missionnaire, qui venait de donner des assurances si positives de la vie de D. Lopez, eut bientôt l'occasion d'en donner de fort tristes à son sujet. Ce jeune gentilhomme étant passé en Espagne durant le siège de Barcelone, ne voulut pas manquer une si belle occasion de signaler son courage. Un jour que le P. Claver confessait Isabelle d'Urbina sa tante, il lui dit qu'au mois de novembre elle aurait une mort à pleurer, et la laissa dans une grande inquiétude. Au bout de quelques jours, l'ayant rencontrée avec sa sœur, mère de D. Lopez: « Pour octobre, leur dit-il, pour octobre. » Comme il les regardait toutes deux en ce moment d'un air fort affligé, chacune d'elles craignit pour soi et ne savait que penser. Enfin la flotte d'Espagne étant arrivée au mois de novembre, apporta des lettres par lesquelles on apprit que, le sept d'octobre, D, Lopez avait été tué au siège de Barcelone.
A suivre : LIVRE CINQUIÈME.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Saint Pierre Claver.
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A suivre : II. Son oraison continuelle. — Faveurs qu'il y reçoit.
LIVRE CINQUIÈME.
Ce sont les vertus qui font les saints, plutôt que les prodiges, les révélations et les extases, quoique ces dons singuliers supposent ordinairement une grande sainteté dans ceux qui en sont favorisés. Ce qu'on a vu jusqu'ici du P. Claver, ne peut donner que la plus haute idée de ce grand serviteur de Dieu ; mais tout admirables que paraissent et que soient effectivement ses œuvres, elles le sont encore plus dans leur principe; je veux dire dans les vertus éminentes de ce saint apôtre. Avant donc que de parler de l'heureuse mort et de la récompense éclatante dont le Seigneur voulut les couronner, j'espère qu'on ne sera pas fâché de les voir réunies ici sous un seul point de vue; elles n'en serviront que mieux à rendre croyables, et les prodiges que nous avons déjà rapportés, et ceux qui nous restent à raconter encore.I. Son amour pour Dieu.
La reine des vertus et celle d'où naissent toutes les autres, était aussi celle qui avait jeté de plus profondes racines dans son cœur. Rien de plus ardent et de plus tendre tout à la fois que son amour pour Dieu. Toutes ses entreprises, tous ses travaux, toutes ses peines, toutes ses mortifications partaient du même principe, de son désir extrême d'endurer quelque chose pour Dieu et de lui marquer par là son amour. Quoi qu'il pût faire et souffrir pour lui, il croyait toujours ne rien souffrir et ne rien faire, parce qu'il ne faisait et ne souffrait rien qui répondît à la grandeur de sa charité. De là cette oraison continuelle que, ni les occupations les plus laborieuses, ni les maladies les plus accablantes, ni le sommeil même, n'étaient capables d'interrompre : de là cette union intime avec Dieu, qui paraissait plutôt celle d'un séraphin habitant du ciel, que d'un homme encore attaché à la terre.
A le voir si modeste, si recueilli, si solitaire, au milieu même du plus grand tumulte, il était aisé de juger qu'il était sans cesse comme absorbé en Dieu ; et ni le bruit, ni le péril, ni quelque chose que ce pût être, ne le détournait de cet objet. Comme il passait un jour dans une rue de Carthagène, les chevaux d'un carrosse, ayant pris le mors aux dents, vinrent avec furie à sa rencontre : on lui criait de toutes parts de s'écarter ; mais comme il ne s'apercevait pas du danger, le frère qui l'accompagnait fut obligé de le prendre promptement entre ses bras et de le retirer dans une boutique voisine. Pour lui, il n'avait rien vu, ni entendu, et il ne demanda pas même à son compagnon de quoi il s'agissait.
A suivre : II. Son oraison continuelle. — Faveurs qu'il y reçoit.
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A suivre : III. Sa dévotion particulière à la passion de JÉSUS-CHRIST.
II. Son oraison continuelle. — Faveurs qu'il y reçoit.
Dès qu'il n'était pas occupé au service du prochain, il se délassait par la prière de ses travaux apostoliques. Le P. Sébastien de Morille, qui fut recteur du collège de Carthagène, avait coutume de dire qu'il ne savait pas quand le P. Claver finissait son oraison, parce que, à quelque heure qu'il allât dans sa chambre, il l'y voyait toujours en prières. Quelquefois, ouvrant doucement la porte, il le trouvait, ou une couronne d'épines sur la tête, ou une corde au cou, souvent si hors de lui-même, que, pour ne le pas troubler, il se retirait sans lui rien dire. Ceux qui l'ont observé de plus près, ont attesté qu'il ne donnait que deux ou trois heures au sommeil, et qu'il passait le reste de la nuit en oraison, répandant une grande abondance de larmes ; son sommeil même était souvent interrompu par de tendres aspirations vers Dieu. Comme les orages sont terribles à Carthagène, surtout pendant la nuit, le F. Gonzalez, qui était son voisin, allait quelquefois tout transi de peur se renfermer dans la chambre du saint homme : il se mettait même à son côté, pour se mieux rassurer. Dès que l'orage avait cessé, il sortait, sans que le P. Claver l'eût entendu, ni qu'il fût revenu un seul instant de sa contemplation.
On n'a jamais pu connaître les faveurs célestes qu'il éprouvait dans son oraison, parce qu'il prit toujours un très grand soin de les cacher; mais son humilité profonde, sa prodigieuse mortification, sa patience invincible dans les travaux, son parfait détachement des créatures, son extrême mépris de lui-même, sa pureté de vie, cet esprit prophétique qui lui découvrait les besoins des absents, les choses futures et les secrets des cœurs, en un mot, ses ravissements et ses extases sont des preuves incontestables de ses communications intimes avec Dieu et du sublime degré de contemplation auquel il fut élevé.
On le vit souvent, soit quand il offrait le divin sacrifice, soit quand il récitait les prières au milieu de ses pauvres de Saint-Lazare, soit quand il assistait les criminels à la mort, environné d'une lumière brillante qu'on ne pouvait regarder sans en être ébloui. Quelqu'un qui passait un soir près de sa porte vit à travers des fentes une clarté si extraordinaire, qu'il crut que le feu était dans la chambre. Il entra brusquement, et il aperçut au milieu d'une lumière aussi douce que vive, le serviteur de Dieu élevé de terre, immobile et abîmé dans une profonde contemplation.
La même chose arriva au nègre qui le servait. Une nuit qu'il entrait dans sa chambre, il la vit remplie d'une lumière si éclatante que d'abord il s'arrêta court. Ayant ensuite cherché le Père, il le trouva suspendu en l'air, les yeux tendrement attachés sur un crucifix qu'il tenait en main, mais à genoux et dans la posture où il était avant ce ravissement Le saint resta plusieurs heures en cet état, jusqu'à ce qu'enfin on le vit descendre peu à peu à terre. Le Frère qui était chargé de le soigner dans sa dernière infirmité, fut une fois témoin du même prodige. Il en fut si frappé, qu'il douta quelque temps s'il n'appellerait point les autres religieux à ce merveilleux spectacle; mais craignant de blesser l'humilité du P. Claver, il attendit qu'il fût revenu à lui pour le remettre sur son lit. Le saint homme, très mortifié d'avoir été surpris dans cet état, fit promettre le silence au Frère qui, après la mort du Père, attesta le fait avec serment.
Malgré tant de faveurs extraordinaires, il se préparait à l'oraison avec une simplicité de novice, comme s'il n'eût fait que d'être initié à ce saint exercice.
A suivre : III. Sa dévotion particulière à la passion de JÉSUS-CHRIST.
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A suivre : IV. Sa dévotion envers le Saint-Sacrement.
III. Sa dévotion particulière à la passion de JÉSUS-CHRIST.
La passion de JESUS-CHRIST était son plus doux attrait : il commençait presque toujours ses oraisons en se représentant les mystères douloureux de l'Homme-Dieu; et de la tendre considération de ses peines, il était insensiblement élevé à la sublime contemplation de son essence, sans perdre un instant de vue ce divin objet.
Dans ces moments il tenait ordinairement en main quelque petite image qui lui représentait le mystère qu'il méditait : on les trouva toutes après sa mort, mais presque effacées par ses baisers et par ses larmes. Les jours qu'il n'en était pas empêché par ses occupations auprès du prochain, il allait faire des stations devant un grand crucifix placé dans un endroit écarté de la maison; et quand il croyait n'être entendu de personne : « Ah! mon JÉSUS, s'écriait-il, Dieu crucifié pour moi, je vous aime beaucoup, oui beaucoup, de tout mon cœur. » Sans cesse il parlait de la passion de son Sauveur, et toujours avec des larmes, des soupirs d'amour, qui inspiraient à tous ceux qui l'entendaient une sainte tristesse mêlée d'une joie pure. Quoiqu'il eût toujours le visage maigre et décharné par la rigueur de ses austérités, dans la semaine sainte il devenait si défait et si abattu de douleur, qu'il n'était plus reconnaissable et qu'il paraissait une image vivante de JÉSUS-CHRIST affligé. Un religieux qui le fréquenta familièrement pendant plusieurs années, était convaincu que les instruments de la passion étaient gravés dans son cœur, comme on le rapporte de quelques saints. Tous les vendredis il sortait la nuit de sa chambre, sans être aperçu, et la corde au cou, une couronne d'épines sur la tête, une croix sur les épaules, il allait dans les endroits les plus écartés de la maison comme pour suivre JESUS-CHRIST montant au Calvaire.
A suivre : IV. Sa dévotion envers le Saint-Sacrement.
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Re: Saint Pierre Claver.
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A suivre : V. Sa dévotion à la sainte Vierge et à quelques saints particuliers.
IV. Sa dévotion envers le Saint-Sacrement.
Si le seul souvenir de la passion du Sauveur le pénétrait ainsi d'une tendre compassion, la présence de ce même Sauveur dans l'Eucharistie l'embrasait d'amour. Il se tenait devant lui comme s'il l'eût vu de ses propres yeux. L'humanité sainte de son Dieu, sa divinité, sa toute-puissance, son infinie bonté dans cet auguste mystère, attiraient tour à tour les mouvements de son esprit et de son cœur ; et sa foi l'élevait, en quelque sorte, jusqu'à l'état des bienheureux qui le contemplent face à face. C'était au pied de ce divin Sacrement qu'il passait une grande partie de ses oraisons : il le visitait plusieurs fois le jour, et dans sa dernière maladie, ne pouvant y aller de lui-même, il s'y faisait porter le plus souvent qu'il lui était possible. En marchant dans la ville, quand il trouvait une église ouverte, il ne manquait pas d'y entrer pour adorer le Dieu caché sur nos autels ; et il s'affligeait de voir sa cour si déserte, tandis que les places publiques étaient remplies. La veille des grandes fêtes ou des jours marqués par quelque indulgence particulière, il allait dans les rues exhorter tout le monde à se mettre en état de communier le lendemain. Il avait surtout grand soin que les nègres ne fussent pas privés du bonheur de recevoir le saint viatique ; et pour que la cérémonie se fît avec plus de décence, il allait balayer lui-même et parfumer leurs loges : il portait l'attention jusqu'à couvrir alors leurs lits d'une courtepointe de soie, dont on lui avait fait présent pour cet usage.
Il eut bien des contradictions à essuyer au sujet de ces pauvres esclaves : plusieurs trouvaient à redire qu'il les fit communier si souvent, et l'accusaient de suivre plus en cela sa piété que la prudence ; mais, comme il était parfaitement instruit de ce qui était convenable, et qu'il savait exclure à propos de cette grâce ceux qui n'étaient pas bien disposés à la recevoir, sans rien répliquer au discours des hommes, il suivait le parti que Dieu lui inspirait. S'ils étaient ignorants et grossiers, il se donnait des peines infinies pour les instruire avant que de les admettre à la participation des saints mystères. S'ils étaient regardés au dehors comme le rebut de la nature, il respectait la beauté de la grâce dont ils étaient ornés au dedans, et c'en était assez pour les lui rendre chers. « Eh ! pourquoi, disait-il quelquefois, sous prétexte que ce sont des misérables, les priverait-on d'un Sacrement spécialement destiné aux pauvres, aux petits, aux faibles et aux infirmes ? »
Dieu lui-même prit soin de justifier la conduite de son ministre par un trait qui mérite d'avoir place ici. Une religieuse d'une éminente vertu, s'entretenant un jour avec un homme d'un ordre respectable, et d'ailleurs distingué par sa doctrine, fit tomber le discours sur la sainteté du P. Claver. « Je respecte fort sa piété, reprit le religieux, mais je ne puis excuser sa facilité à faire communier les nègres. » Le jugement d'un homme estimé pour son mérite fit naître quelques doutes dans l'esprit de la religieuse, mais elle fut bientôt détrompée. La nuit suivante, elle vit en songe le P. Claver debout et tout brillant de gloire, avec le religieux à genoux devant lui et qui lui demandait humblement pardon d'avoir voulu obscurcir par ses discours l'éclat de sa sainteté.
Mais c'est particulièrement au saint sacrifice de la messe que sa dévotion éclatait d'une manière plus sensible. Il appréhendait si fort que les fidèles ne manquassent d'y assister les jours d'obligation, que pour la commodité du public, il avait obtenu la permission de dire deux messes les jours des principales fêtes de l'année, et en particulier celui de la fête du Saint-Sacrement. Il avertissait le sacristain de ne lui point donner les ablutions ordinaires, s'il s'apercevait qu'après un certain temps il entrât du monde pour chercher une messe. Quelque nombreuses que fussent ses occupations, après s'être confessé avec une grande abondance de larmes, il employait une demi-heure à se préparer à ce divin sacrifice. Depuis ce moment jusqu'à la fin de son action de grâces, il ne parlait à personne et restait tout absorbé dans la pensée et dans l'amour de Dieu qu'il allait offrir et recevoir. A l'autel, son visage paraissait si enflammé, son air si pénétré de respect, surtout aux fêtes de Notre-Seigneur et de sa sainte Mère, qu'il inspirait la modestie, la piété et la dévotion aux plus insensibles, et qu'une infinité de personnes trouvaient une véritable consolation à entendre sa messe. Pendant toute son action de grâces, la grandeur infinie, la bonté incompréhensible d'un Dieu abaissé jusqu'à servir d'aliment à sa créature, la vue de sa propre bassesse, et le sentiment de son indignité le frappaient tour à tour si vivement, que, n'ayant point alors assez de paroles, ni de sentiments pour exprimer sa reconnaissance, il recourait à la sainte Vierge, pour la prier de suppléer à sa faiblesse, et de l'aider elle-même à remercier son Fils.
A suivre : V. Sa dévotion à la sainte Vierge et à quelques saints particuliers.
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Louis- Admin
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V. Sa dévotion à la sainte Vierge et à quelques saints particuliers.
Il avait sucé, pour ainsi dire, avec le lait, la dévotion envers cette auguste Mère de Dieu, qu'il regardait comme le canal par lequel JÉSUS-CHRIST se plaît à nous communiquer ses grâces, pour nous engager à avoir pour elle plus de respect et plus d'amour. Le saint commerce qu'il avait eu avec saint Rodriguez, si chéri de cette Reine du ciel, n'avait pas peu contribué à augmenter les sentiments qu'il avait pour elle : il portait sur sa poitrine un petit livre où la vie et les mystères de la sainte Vierge étaient représentés : il les regardait souvent, il les méditait sans cesse ; et jamais il ne les voyait sans se sentir pénétré de l'amour le plus tendre pour cette bonne Mère. Toutes les fois qu'il entrait dans la maison, ou qu'il en sortait, après avoir adoré le Saint-Sacrement, il ne manquait pas d'aller la saluer dans sa chapelle.
Il l'appelait ordinairement « la Mère du bel amour » ; et, pour obtenir par son intercession un amour de Dieu plus vif et plus tendre, on l'entendait souvent, au milieu de ses prières et de ses ravissements, répéter ces paroles si touchantes: « Ah ! ma bonne Mère, apprenez-moi, je vous en conjure, apprenez-moi à aimer votre divin Fils : obtenez-moi une étincelle de ce pur amour dont votre cœur brûla toujours pour lui ; ou prêtez-moi le vôtre, afin que je puisse du moins le recevoir dignement en moi. »
Il célébrait toutes ses fêtes avec une piété singulière ; et dès la veille il s'y préparait par des prières, des pénitences et des jeûnes extraordinaires : il consacrait l'après-midi de ces jours-là à confesser les enfants des écoles publiques, pour leur inspirer de bonne heure l'amour de Marie. Il avait engagé quelques personnes riches et vertueuses à lui envoyer un repas où rien ne manquait pour la propreté et pour l'abondance : il en faisait porter une partie à l'hôpital de Saint-Lazare, et lui-même il distribuait l'autre à la porte, où il avait soin de préparer une table commode pour les pauvres: il s'y asseyait avec eux, mais toujours à la dernière place : il y faisait aussi venir quelques joueurs d'instruments pour les réjouir. A la fin du repas, il leur faisait une petite exhortation propre à exciter leur respect et leur confiance pour celle dont la fête les rassemblait ; il récitait avec eux le chapelet, et les renvoyait enfin charmés de ses vertus et de sa bonté.
On ne saurait dire combien il distribua de chapelets. Sans compter ceux qu'il donnait au confessionnal, dans les hôpitaux et dans les prisons, tous les ans il en dépensait huit à neuf mille pour les nègres nouvellement arrivés, et il avait grand soin que tous fussent exacts à le porter. Il employait le temps des récréations communes à faire lui-même des chapelets avec ses interprètes.
Chaque jour de l'année était marqué…
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A suivre : VI. Son amour pour le prochain.
V. Sa dévotion à la sainte Vierge et à quelques saints particuliers.(suite)
Chaque jour de l'année était marqué par quelque petit service qu'il tâchait de rendre à la Mère de son Dieu ; et, à chaque heure du jour, il ne manquait pas de la saluer par l'hymne de l'Église consacré à cet office. Il était principalement si touché de la pureté de sa conception immaculée, et de la gloire de son assomption triomphante, qu'il l'en félicitait souvent avec une joie visible jusque sur son visage.
Il ne pouvait tarir sur les louanges et les vertus de Marie. Un jour de l'Annonciation, se trouvant dans la chapelle de la maison de D. André de Vauquecel, où il s'entretenait familièrement avec lui et avec toute sa famille des grandeurs de la Mère de Dieu, il tira une petite image où était représenté le mystère dont on célébrait la mémoire. Après s'être étendu quelque temps sur les obligations infinies que les hommes avaient à cette heureuse Vierge, il poussa un profond soupir, perdit peu à peu l'usage de ses sens et resta plus d'une heure en cet état, au milieu de tous les assistants qui répandaient des larmes de dévotion, jusqu'à ce qu'enfin son compagnon, voyant qu'il était temps de retourner au collège, le tira fortement, et le fit revenir à lui.
Après JÉSUS-CHRIST et sa sainte Mère, sa principale dévotion était à son ange gardien, à saint Pierre, son patron, et à son père saint Ignace dont il portait toujours une médaille sur lui. Mais il avait de plus choisi vingt-quatre saints pour ses protecteurs, et il s'adressait à chacun d'eux tour à tour ; afin qu'il n'y eût pas une seule heure dans la journée, où, comme il le disait lui-même, il n'eût un avocat particulier auprès de Dieu. Ceux qui seraient tentés de regarder toutes ses attentions comme des minuties, ne savent guère ce que c'est qu'une dévotion animée par une foi vive et une tendre charité.
A suivre : VI. Son amour pour le prochain.
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Louis- Admin
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A suivre : VII. Il soulage les âmes du purgatoire.
VI. Son amour pour le prochain.
Une des preuves les moins équivoques de l'amour dont il brûlait pour Dieu et de l'intérêt qu'il prenait à son culte et à sa gloire, c'est l'amour même qu'il avait pour le prochain et le zèle dont il était dévoré pour son salut: amour si pur et si désintéressé, que dans les hommes il ne cherchait, il ne voyait rien que Dieu, rien que des âmes rachetées de son sang ; zèle si empressé et si ardent, qu'après s'être épuisé de travaux pour ses frères, il gémissait encore de ne pouvoir rien faire pour eux. Il est inutile de rappeler que ce fut ce zèle ardent du salut des âmes qui le fit sortir d'Espagne, traverser les mers et souffrir un long martyre de quarante années dans un pays où tout conspirait à affliger la nature ; mais ce qui est surtout remarquable, c'est cet amour désintéressé du prochain qui l'attacha aux pauvres, aux misérables et aux esclaves si particulièrement, qu'il ne connaissait pas même de nom la plupart des gens riches ou qualifiés de Carthagène. Instruire les ignorants, consoler les affligés, visiter les captifs, assister les infirmes, fournir à toutes les nécessités des malheureux, c'étaient les plus chères délices de son cœur.
Plusieurs personnes dignes de foi ont attesté que, pendant tout le temps de son apostolat à Carthagène, il ne se passa pas un seul jour où il n'eût exercé quelque acte héroïque de charité ; de manière que, selon qu'il est rapporté dans les procès dressés pour sa canonisation, il est en ce point plus admirable qu'imitable. Sans rien répéter ici de ce qu'il fit au service des nègres, que ne lui en coûta-t-il point pour les empêcher de périr ? Ces malheureux prenaient souvent le parti de se laisser mourir de faim pour terminer par là toutes leurs misères, et il n'y avait que la charité du P. Claver qui fût capable de vaincre leur obstination sur ce point. Un d'eux, accablé de maux et tout couvert d'ulcères, ayant pris cette funeste résolution, le saint homme l'alla trouver et, à force de prières, le décida à prendre du moins un morceau. Celui-ci l'ayant tenu quelque temps dans sa bouche, le rejeta avec dégoût dans le plat. « Mon fils », lui dit alors le Père, « ce n'est pas ainsi qu'il faut faire ; regardez-moi. » En même temps il prend le morceau, et l'avale aux yeux du nègre, qui, étonné de son zèle et de son courage, se détermina à manger, et guérit enfin.
A suivre : VII. Il soulage les âmes du purgatoire.
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Re: Saint Pierre Claver.
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A suivre : VIII. Son zèle pour le salut des âmes.
VII. Il soulage les âmes du purgatoire.
Il n'abandonnait pas les âmes de ses frères après la mort, ainsi qu'on l'a déjà pu remarquer: pénitences, prières, messes, indulgences, il leur appliquait tout ce qui dépendait de lui : aussi arrivait-il souvent que ces âmes affligées, sûres de son crédit auprès de Dieu, venaient lui demander le secours de ses prières. La délicatesse et l'incrédulité de notre siècle ne m'empêcheront pas d'en rapporter ici quelques traits. Ils paraîtront peut-être dignes de la raillerie des esprits forts ; mais ne suffit-il donc pas de reconnaître un Dieu maître de ces sortes d'événements, et que d'ailleurs ils soient bien attestés, pour qu'ils puissent trouver place dans une histoire écrite pour des lecteurs chrétiens.
Un nègre malade, qu'il avait retiré dans sa chambre et couché dans son lit, ayant entendu la nuit de grandes plaintes, courut au P. Claver qui était à genoux en oraison : « Ô mon Père, lui dit-il, quel est donc ce grand bruit qui m'effraye ainsi, et qui m'empêche de dormir ? — Retournez, mon fils », lui répondit le saint homme, « et dormez sans crainte. » Alors, l'ayant aidé à se remettre au lit et lui ayant posé la couverture sur la tête, il ouvrit la porte de la chambre, il dit quelques paroles et tout à coup les plaintes cessèrent.
Plusieurs autres nègres étant occupés à travailler dans une habitation éloignée de la ville, un d'eux alla couper du bois sur une montagne voisine. Comme il approchait de la forêt, il entendit que, du haut d'un arbre, on l'appelait par son nom: il leva les yeux vers l'endroit d'où partait la voix, et ne voyant personne, il voulut s'enfuir pour rejoindre ses compagnons : mais il fut arrêté à un passage étroit par un spectre effrayant, qui commença à décharger sur lui de grands coups d'un fouet garni de fer tout rouge de feu, en lui disant : « Pourquoi n'as-tu pas ton chapelet ? Porte-le désormais, et le dis pour les âmes du purgatoire. » Il lui ordonna ensuite de demander à la maîtresse de l'habitation quatre écus qu'elle lui devait, et de les porter au P. Claver pour faire dire des messes à son intention ; après quoi il disparut. Cependant, au bruit des coups et aux cris du nègre, ses compagnons étant accourus, ils le trouvèrent plus mort que vif, et encore tout meurtri des coups qu'il avait reçus, sans pouvoir leur dire une parole. On le porta à l'habitation, où la maîtresse avoua qu'elle était effectivement redevable de la somme en question à un nègre qui était mort peu de temps auparavant. Le P. Claver ayant été informé de tout ce détail, fit dire les messes qu'on demandait et donna un chapelet au nègre.
A suivre : VIII. Son zèle pour le salut des âmes.
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