Vie de la Soeur Bourgeoys. (Table) COMPLET.

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Message  Louis Mer 05 Déc 2012, 11:47 am

XII. Notice sur Thoronhiongo,
grand-père de Thérèse. Sa piété.


Mais, pour mieux faire connaître la sœur Marie-Thérèse, il ne sera pas hors de propos d'ajouter ici un mot sur son grand-père, François Thoronhiongo, qui l'avait amenée, en 1677, de Tsonnonthouan au village naissant de la Montagne, et qui d'ailleurs est digne, par son mérite personnel, d'un éloge particulier. Il était Huron de nation, et avait été instruit et baptisé par le père de Brébeuf, cet illustre martyr de la Compagnie de Jésus, qui fut brûlé par les Iroquois lorsqu'ils saccagèrent les missions hurones. François Thoronhiongo avait été comme esclave à Tsonnonthouan, le plus grand village des Iroquois. Il y garda sa religion, comme un autre Tobie, avec une fidélité parfaite; et par sa probité et sa piété, qui le firent admirer de ces barbares, il passa pour un saint parmi eux.

Selon la coutume de cette nation, il fut regardé comme libre après la mort de ses maîtres; et alors, pour prier DIEU en paix, il quitta Tsonnonthouan, et alla à la mission iroquoise de la Montagne, conduisant avec lui sa petite-fille Gannensagouas, âgée de dix ans, et un fils marié, le seul qui lui restait. François s'y distingua bientôt par son respect pour les prêtres, par sa dévotion à l'église, et par sa charité envers les pauvres sauvagesses âgées, dont il bâtissait et raccommodait les cabanes.

Le trait suivant peut donner une idée de la piété de ce bon vieillard. Un jour qu'il commençait à raccommoder la porte d'écorce d'une cabane, ayant fait réflexion qu'il avait donné trois coups d'alène avant d'avoir fait le signe de la croix et d'avoir offert son action à DIEU, il s'écria incontinent: « Ah ! que je suis misérable! voilà trois coups d'alène perdus; j'ai oublié de les offrir au maître de ma vie (1). »

_______________________________________

(1) éloges de quelques personnes, etc., notice sur François Thoronhiongo.

A suivre : XIII. Thoronhiongo, devenu aveugle, prie tous les jours pour la conversion de son fils.

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Message  Louis Jeu 06 Déc 2012, 7:03 am

XIII. Thoronhiongo, devenu aveugle,
prie tous les jours pour la conversion de son fils.


Un homme si profondément religieux ne pouvait que goûter la plus douce consolation en voyant les progrès que sa petite-fille Thérèse, faisait chaque jour dans la piété, sous la conduite des sœurs de la Congrégation. Mais il avait aussi le cœur abreuvé d'amertume par la conduite de son fils, qui vivait en libertin, et semblait ne faire aucun compte des instructions que lui donnaient les missionnaires. Enfin, ce qui mit le comble à son affliction, ce fils, qu'on n'avait pu disposer au baptême, quitta la mission, abandonna sa femme, qu'il laissa enceinte, et retourna chez les Tsonnonthouan.

Peu de temps après, sa femme mit au monde un fils, et dans la suite François Thoronhiongo étant devenu aveugle, cet enfant le conduisit chaque jour l'après-dîner à l'église, et l'y laissait jusqu'au soir. C'était là que ce saint aveugle répandait son cœur devant DIEU en discours extatiques, et le priait avec ardeur pour la conversion de son fils :

« SEIGNEUR, disait-il, je ne regrette point la perte de mes yeux: il n'y a rien de beau au monde, et je te verrai bientôt. Je ne regrette point ma pauvreté: tu sais que c'est chez toi que j'ai amoncelé mes richesses. SEIGNEUR, c'est mon fils que je regrette ; il n'a point d'esprit. SEIGNEUR ne le jette point au feu qui ne s'éteint pas. »

DIEU exauça ce saint vieillard de la manière la plus étonnante, et voulut, par cet exemple qui semble tenir du prodige, montrer aux nouveaux chrétiens de la Montagne qu'une prière humble et persévérante obtient tout de sa bonté.

A suivre : XIV. Thoronhiongo obtient, par la ferveur de ses prières, la conversion de son fils.

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Message  Louis Jeu 06 Déc 2012, 12:24 pm

XIV. Thoronhiongo obtient, par la ferveur
de ses prières, la conversion de son fils.


Au mois de mars 1690, le petit-fils de François Thoronhiongo, qui était en âge de porter les armes, fut enrôlé dans un parti de guerre moitié français et moitié sauvage, commandé par M. de Beaucourt, et le 21 avril suivant, François Thoronhiongo mourut âgé de plus de cent ans. Or, à l'époque de cette mort, le parti de guerre dont nous parlons vint à découvrir, au bout du Sault Saint-François, sur une rivière appelée Kentsage, une troupe de Tsonnonthouans, parmi lesquels se trouvait le fils même de François Thoronhiongo. L'attaque fut violente, et la défense vigoureuse.

On combattit si vaillamment de part et d'autre que le chef de chacun des deux partis fut tué ; mais enfin, après bien des massacres, les ennemis ayant été défaits, le petit-fils de François Thoronhiongo fit prisonnier un sauvage Tsonnonthouan, qu'il lia et qu'il amena comme esclave au village de la Montagne. C'était son propre père, qu'il n'avait jamais connu. Quelle ne fut pas la surprise du prisonnier, lorsque, arrivé à Villemarie, il se vit conduire par son vainqueur au village de la Montagne, d'où il s'était enfui depuis tant d'années, et enfin dans la cabane même qu'il avait habitée auparavant ?

La mère du jeune guerrier reconnaît aussitôt son mari, le fils reconnaît son père; et à l'instant ce n'est qu'un cri de joie et d'admiration dans tout le village. Les anciens, accourus à la cabane, reconnaissent tous le prisonnier. On le délie, et on lui déclare qu'il n'est point esclave. Les missionnaires sont au comble de la joie de voir ainsi ramenée au bercail une brebis si longtemps perdue.

Ce fortuné captif ne venait en effet à la mission que pour y recevoir le baptême…

_______________________________

(1) éloges de quelques personnes mortes en odeur de sainteté, ibid.
A suivre…


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Message  Louis Ven 07 Déc 2012, 5:57 am

XIV. Thoronhiongo obtient, par la ferveur
de ses prières, la conversion de son fils.


(suite)



Ce fortuné captif ne venait en effet à la mission que pour y recevoir le baptême. Il arrivait tout malade de fatigues d'un chemin fait dans les neiges; et la maladie augmentant, on se mit en devoir de l'instruire pour le baptiser. Mais les missionnaires eurent lieu d'admirer encore ici l'effet des prières de son vertueux père ; car le malade, qui avant sa fuite de la mission avait montré si peu de zèle pour être instruit, et qui depuis avait vécu dans tous les excès ordinaires aux barbares adonnés à l'idolâtrie, se trouva alors comme éclairé surnaturellement. Il se souvint de toutes les prières chrétiennes et de son catéchisme; en sorte que, averti du danger où il était de sa vie, il demanda lui-même le baptême, et le reçut dans de grands sentiments de componction et de piété (*).

On lui parla de DIEU pendant trois heures, au bout desquelles il expira, laissant tous les sauvages remplis d'admiration pour une conduite si extraordinaire et si miséricordieuse, et d'une ferme confiance au crédit dont jouissait devant DIEU son bienheureux père, prières duquel chacun était convaincu devait une si sainte mort (1). Aussi, comme la vie de François Thoronhiongo avait été d'une si grande édification pour toute la mission, et qu'il avait fréquenté l'église avec tant d'assiduité, M. de Belmont fit exhumer son corps du cimetière où il avait d'abord été enterré (1), et le fit placer dans l'église même, avec cette inscription qu'on mit sur sa tombe :


ICI REPOSENT
LES RESTES MORTELS
DE
FRANÇOIS THORONHIONGO
HURON ,
BAPTISÉ PAR LE RÉVÉREND
PÈRE BRÉBOEUF.

Il fut, par sa piété et par sa piété et par sa probité, l'exemple des chrétiens et l'admiration des infidèles; il mourut âgé d'environ 100 ans, le 21 avril 1690.
_________________________
(*) Le Père Frémin, dans une lettre insérée à la Relation des années 1669 et 1670, parle avec beaucoup d'éloges de François Thoronhiongo (1). Mais il paraît que sa mémoire ne l'a pas toujours servi dans les récits qu'il fait sur ce vertueux Huron, puisqu'il assure que François n'ayant plus qu'un enfant au monde, et ce fils étant allé en guerre, il l'avait confessé avant son départ (2). Ce Père aura confondu ici quelque autre sauvage avec François Thoronhiongo. Car il est bien certain que si, vers l'année 1669, ce vieillard n'avait plus qu'un seul fils, ce fils était le même qui, encore païen, suivit son père à la mission de la Montagne en 1677, et qui, en 1690, avait lui-même un fils en état d'aller à la guerre avec M de Beaucourt.
_________
(1) Relation des missions aux Iroquois, des années 1669 et 1670, chap. ix, p. 291 et suiv.
(2) Ibid., p. 294.

_________________________
(1) éloges de quelques personnes mortes en odeur de sainteté, ibid.
(1) Registres de la Montagne, sépultures 21 avril 1690.

A suivre : XV. Mort de Thérèse Gannensagouas.



Dernière édition par Louis le Ven 07 Déc 2012, 1:13 pm, édité 1 fois (Raison : orthographe)

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Message  Louis Ven 07 Déc 2012, 11:35 am

XV. Mort de Thérèse Gannensagouas.


Ce ne fut pas un petit sujet de joie pour l'heureuse Gannensagouas de voir de ses yeux les effets des prières de son saint aïeul, et d'avoir été témoin de la mort si consolante de son oncle. Elle ne leur survécut pas longtemps, ayant été atteinte peu après d'une maladie de langueur qui la conduisit insensiblement au tombeau. Son grand amour pour la modestie la porta, dans les moments qui précédèrent sa mort, à prier les sœurs de la Congrégation, ses compagnes, de l'enterrer après son décès dans ses pauvres petits habits, sans la dépouiller. Elle mourut en odeur de sainteté à la Montagne, le 25 novembre 1695, âgée de 28 ans, et fut inhumée comme grand-père dans l'église de la mission (1). Cette église ayant été démolie longtemps après, on transporta les restes de cette sainte fille avec ceux de son aïeul dans la tour du fort de la Montagne, qui sert maintenant de chapelle, et on mit au-dessus l'inscription suivante, qu'on y voit encore aujourd'hui, ainsi que celle de son aïeul que nous avons rapportée :

ICI REPOSENT
LES RESTES MORTELS
DE
MARIE-THÉRÈSE GANNENSAGOUAS
DE LA
CONGRÉGATION DE NOTRE-DAME.
Après avoir exercé pendant treize ans l'office de maîtresse d'école la Montagne, elle mourut en réputa vertu, âgée de 28 ans, le 23 novembre 1695 (*).
___________________________________
(*) On voit dans les registres de la Montagne la signature de la sœur Thérèse Gannensagouas qui y paraît plusieurs fois comme marraine. Nous la reproduisons ici, tant pour illustrer la mémoire de cette sainte fille, que pour honorer celle de la sœur Bourgeoys, aux prières et au zèle de laquelle on est redevable, après DIEU, de la vie sainte qu'a menée cette admirable Iroquoise.
Vie de la Soeur Bourgeoys. (Table) COMPLET.  - Page 11 Signat11
__________________________________
(1) Éloges de quelques personnes mortes en odeur de sainteté, ibid.

A suivre : XVI. Les sœurs missionnaires logées d’abord dans leurs cabanes. Leur grand esprit de mortification.

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Message  Louis Sam 08 Déc 2012, 6:25 am

XVI. Les sœurs missionnaires logées d’abord
dans leurs cabanes. Leur grand esprit de mortification.



Les sœurs de la Congrégation, comme nous l’avons dit, étaient alors logées dans des cabanes d'écorce, et quelque incommodes que fussent ces pauvres réduits, leur grand esprit de mortification les leur faisait trouver encore trop au gré de la nature. On peut en juger par les réflexions que fait la sœur Marie Barbier, parlant d'elle-même :

« En 1685, dit-elle, on délibéra de m'envoyer à la Montagne, et on me fit partir pour cette mission. On m'y avait préparé, selon le goût qu'on me connaissait, une cabane pour coucher : elle était tout entourée d'image, et d'ENFANTS JESUS. Tout était d'une propreté extraordinaire, et rien n'y manquait. Je regardai de tous côtés, le cœur pénétré de douleur, sans rien dire, sinon à DIEU, à qui je fis cette prière : Mon DIEU ce n'est pas le lieu que vous m'avez destiné, j'y suis trop bien voulez-vous me perdre ? Plutôt mourir que d'être si à mon aise!

Je n'y couchai qu'une nuit, la communauté ayant changé de sentiment, et voulant m'envoyer à l'île d'Orléans. On m'envoya donc quérir à la Montagne par la sœur Anne, dont je devais être la compagne. Elle me dit en entrant : Ma sœur, DIEU ne vous veut point ici. Il faut souffrir toutes sortes de privations. Cette cabane, que je vois si bien ornée, me fait mal au cœur pour vous. Il faut souffrir pendant la vie, et c'est ce que DIEU demande de vous. C'était répondre entièrement à mon attrait. La compagne que je devais avoir à la Montagne, parut sensiblement mortifiée de ce changement, auquel elle ne s'attendait pas. Elle me conseilla de faire d'humbles représentations ; mais je lui répondis que je voulais obéir, et que ce serait une grande miséricorde que DIEU me ferait, si je devais mourir de fatigue et de privation à l'île d’Orléans. Je retournai ainsi à la communauté pour m'embarquer deux jours après (1). »

Ce récit si naïf donne une juste idée de la ferveur, de l'esprit de pauvreté et de l'amour de la mortification qui que la sœur Bourgeoys avait su inspirer à ses filles; car les cabanes d'écorce qu'on avait eu soin de faire disposer pour elles, étaient tout ce qu'on peut imaginer de plus pauvre et de plus rustique ; d'ailleurs assez mal fermées, et par conséquent très-incommodes dans les grands froids de l’hiver.

______________________________

(1) Vie de la sœur Marie Barbier.

A suivre : XVII. Fortifications faites au village de la Montagne…

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Message  Louis Sam 08 Déc 2012, 11:33 am

XVII. Fortifications faites au village de la Montagne.
Les sœurs se logent dans deux tours du fort.


Les ecclésiastiques missionnaires n'étaient pas logés d'une manière plus commode dans les commencements. Comme la Mission augmentait, il fallut augmenter aussi le nombre de missionnaires, et les petits bâtiments qu'on avait élevés pour eux étant insuffisants, ils furent contraints de faire servir à leur usage une petite pièce qui servait d'étable auparavant. Enfin, dans l'extrême danger que la Mission courut de la part des Iroquois infidèles, très-irrités contre ceux qui avaient embrassé la foi, M. de Belmont fit construire en 1685 un fort de pieux pour mettre le village à l'abri des attaques des ennemis.

« J'aurais été bien aise, lui écrivait M. Tronson, de voir le plan de votre village et de votre fort à quatre bastions, autour de la chapelle. Vous avez bien fait d'allonger votre bâtiment. Il faut au reste que votre âne soit un âne de condition, puisque son appartement, dont vous avez agrandi votre maison, sert maintenant de réfectoire et de salle de récréation à la communauté (1). »

On fit encore quelques autres ouvrages de fortification les années suivantes (2), en sorte que jamais les ennemis, quelque nombreux qu'ils fussent, ne purent pénétrer dans le village de la Mission. Tous ces ouvrages étaient construits en bois.

Mais l'année 1694, le village et l'église, ainsi que le fort, ayant été incendiés par l'imprudence d'un sauvage de la Mission, tombé en ivresse (1), M. de Belmont fit construire à ses frais le fort de pierre dont on voit encore des restes aujourd'hui, et donna aux sœurs de la Congrégation l'usage de deux tours, l'une pour s'y loger, et l'autre pour y faire leurs écoles (2). Ce fut là qu'elles demeurèrent et exercèrent leurs fonctions jusqu'à ce que la Mission eût été transférée au Sault-au-Récollet , comme nous le raconterons dans la suite de cet ouvrage.


Vie de la Soeur Bourgeoys. (Table) COMPLET.  - Page 11 Page_310
_______________________________________

(1) Lettres de M. Tronson ; Canada, lettre à M. de Belmont , 1686.
(2) Lettres du même , 1688 et 1692.
(1) Histoire de la guerre des Iroquois, par M. de Belmont.
(2) Vie de la sœur Bourgeoys , 1818, p. 116.

A suivre : Chapitre VII. La sœur Bourgeoys établit diverses missions françaises.

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Message  Louis Dim 09 Déc 2012, 6:51 am

.
CHAPITRE VII.

LA SOEUR BOURGEOYS ÉTABLIT DIVERSES MISSIONS FRANCAISES


I. La sœur Bourgeoys devait travailler surtout
à la sanctification des jeunes filles canadiennes.
Sa dévotion au mystère de la Visitation.


La sanctification des sauvages, l'unique but que DIEU proposa aux fondateurs de Villemarie pour les déterminer à cette grande œuvre, n'était pas cependant le motif principal que sa sagesse avait eu en vue, comme l'a fait voir l'extinction graduelle de la plupart de ces nations errantes. Son dessein était surtout de porter, par cette colonie, la foi catholique dans cette partie du Nouveau-Monde, qui bientôt devait être peuplée d'autres colonies entachées des erreurs des derniers temps. Pour y fixer le flambeau de la vérité, il inspira la pensée de l'établissement de Villemarie, destiné à jeter d'abord un si grand éclat par la sainteté de ses premiers citoyens, et à retracer dans ces pays nouveaux la ferveur de la piété de l'Église primitive. C'est pourquoi la sœur Bourgeoys, appelée de DIEU à concourir à ce dessein, exerça plus spécialement son zèle à l'égard des enfants des colons français, par les missions qu'elle établit dans les principales paroisses. Se proposant encore ici, conformément à sa vocation, de retracer la conduite de la très-sainte Vierge, elle aimait à offrir aux sœurs missionnaires, pour modèle de leur zèle, celui que Marie avait déployé dans le mystère de la Visitation.

« C'est de Marie, dit M. Olier, que tous les états et toutes les dignités de l'Église apprennent la perfection et les maximes de leur conduite; c'est dans le mystère de la Visitation que les missionnaires doivent puiser la grâce de leur état. Marie n'a pas sitôt conçu et formé NOTRE-SEIGNEUR en elle, qu'elle va le former dans le cœur de saint Jean, son précurseur. Elle accomplit sa mission avec amour et vitesse, oubliant sa faiblesse, son âge, sa délicatesse; animée du zèle de son fils et de l'amour de le faire connaître, elle court par les montagnes, annonçant JESUS- CHRIST dans son admirable apostolat, dont tous les pas portent la paix et l'Evangile. En partant ainsi avec zèle, sans provisions, sans sac, sans bourse, sans compagnie, pour annoncer JESUS-CHRIST, elle fit la première ce que firent ensuite les apôtres à son exemple, lorsque, après la réception du SAINT-ESPRIT, ils coururent par tout le monde, pour faire connaître le Fils de DIEU; car le premier en chaque genre est la règle des autres (1). »

L'Esprit de DIEU, dont la sœur Bourgeoys était remplie, lui découvrait les mêmes vues sur ce mystère, jusque-là qu'elle donna la Visitation pour fête principale à son institut.

« La visite que la sainte Vierge fit à sainte Élisabeth, écrit-elle, a été l'occasion du plus grand des miracles, en procurant à saint Jean sa purification du péché originel et sa sanctification, ainsi que celle de sa famille; et c'est sur ce modèle que les sœurs doivent faire leurs missions, dans le dessein de contribuer à la sanctification de tous les enfants (1) . »

_____________________________________________

(1) Écrits autographes de M. Olier.
(1) Écrits autographes de la sœur Bourgeoys.

A suivre : II. Succès des missions françaises établis par la sœur Bourgeoys.


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Message  Louis Dim 09 Déc 2012, 11:31 am

II. Succès des missions françaises établis par la sœur Bourgeoys.


L'expérience montra en effet que la dévotion singulière de la sœur Bourgeoys pour la Visitation n'avait pu lui être inspirée que par l'Esprit de DIEU, qui voulait lui faire trouver dans ce mystère une source féconde et abondante de grâces pour la sanctification de cette nouvelle Eglise. Car rien ne contribua tant au bien des âmes, que les diverses missions qu'elle établit. M. de Meulles, intendant du Canada et témoin des fruits étonnants que produisaient les sœurs missionnaires de la Congrégation partout où elles étaient répandues, écrivait en 1683 au ministre de la marine :

«Vous ne sauriez croire, Monseigneur, combien les filles de la Congrégation font de bien en Canada. Elles instruisent toutes les jeunes filles de tout côté dans la dernière perfection. Si on en pouvait disperser en beaucoup d'habitations, elles feraient un bien infini. Cette sorte de vie est tout à fait à estimer et vaut beaucoup mieux que si elles étaient renfermées. Elles sont d'une sagesse exemplaire et en état d'aller partout, et par ce moyen d'instruire toutes les filles qui seraient demeurées toute leur vie dans une très-grande ignorance (1). »

M. de Saint-Vallier, dans la visite qu'il fit en qualité de grand vicaire, rendait lui-même ce témoignage à leur vertu et à leur zèle : « Outre les petites écoles que les filles de la Congrégation tiennent chez elles pour les jeunes filles de Montréal, et outre les pensionnaires françaises et sauvages qu'elles élèvent dans une grande piété : de la maison de la Congrégation sont sorties plusieurs maîtresses d'école qui se sont répandues en divers autres endroits de la colonie, où elles font des catéchismes aux enfants et des conférences très-touchantes et très-utiles aux autres personnes de leur sexe qui sont plus avancées en âge. Il n'y a point de bien qu'elles aient entrepris dont elles ne soient venues à bout (2). »

« En formant l'établissement de la Congrégation, si utile à toute la colonie, la sœur Bourgeoys et ses compagnes, écrivait la mère Juchereau, ont élevé une des plus florissantes communautés du Canada, de laquelle la bonne odeur se répand dans tout le pays, et qui fait un très-grand bien dans les paroisses où elles ont des missions qu'elles entretiennent avec un soin , une ferveur et une régularité édifiantes (1). »

_______________________________________

(1) Archives de la marine, lettre de M. de Meulles à M. de Signelay, du 4 nov. 1683.
(2) État présent de l’Église de la Nouvelle-France, 1688, in-8º, p. 65-66.
(1) Histoire de l’Hôtel-Dieu de Québec p. 120.

A suivre : III. Premières missions. Esprit de pauvreté et de mortification des sœurs missionnaires.

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Message  Louis Lun 10 Déc 2012, 6:25 am

III. Premières missions. Esprit de pauvreté
et de mortification des sœurs missionnaires.



Nous connaissons bien peu de choses des premières missions établies par la sœur Bourgeoys. Les guerres survenues ensuite dans le pays et les ravages des Iroquois ayant dû interrompre ces missions, il n'en est resté presque aucun souvenir. On dit que les premières furent établies dans l'île de Montréal (2); et il paraît qu’en 1676 la sœur Bourgeoys en avait déjà formé hors de cette île. Car M. de Laval, dans ses lettres d'établissement de la Congrégation données le 6 août de cette année, semble le supposer ainsi, en disant que la sœur Bourgeoys et ses compagnes s'étaient employées depuis plusieurs années à élever gratuitement les petites filles dans l'île de Montréal et autres lieux (3). Il désigne probablement ici la mission des paroisses de Champlain et de Batiscan, dont M. de Meulles faisait l'éloge à M. de Seignelay le 4 novembre 1683 (4), et qui fut ensuite interrompue.

Quoi qu'il en soit, on comprend assez les privations que les sœurs missionnaires avaient à endurer pour subsister dans les paroisses nouvelles, où l'on manquait encore de toutes les commodités de la vie. La sœur Bourgeoys nous apprend en effet que dans leurs premières missions elles n'avaient ni draps, ni lits, ni matelas; qu'elles manquaient de beaucoup d'ustensiles et ne vivaient pas d'une autre manière que les plus pauvres gens de la campagne ; qu'enfin, à l'imitation des apôtres, elles travaillaient de leurs mains pour n'être à charge à personne et exercer leurs fonctions gratuitement. Elle ajoute : « et tout cela réussissait (1).

Il eût été difficile que DIEU ne…

___________________________________

(2) Mémoire particulier des sœurs de la Congrégation.
(3) Archives des sœurs de la Congrégation.Archives de l’Archevêché de Québec.
(4) Archives de la marine, lettre de M. de Meulles, du 4 novemb. 1683.
(1) Écrits autographes de la sœur Bourgeoys.



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Message  Louis Lun 10 Déc 2012, 12:28 pm

III. Premières missions. Esprit de pauvreté
et de mortification des sœurs missionnaires.


(suite)


Il eût été difficile que DIEU ne versât pas abondamment ses bénédictions sur les travaux de ces saintes filles uniquement animées du désir de sa gloire et du salut du prochain, et toujours prêtes à se dévouer aux humiliations, aux privations et aux souffrances. On peut se former une idée de la pureté de leurs dispositions et de la ferveur de leur zèle par les paroles que leur adressait leur admirable fondatrice en les envoyant en mission:

« Pensez, mes chères sœurs, leur disait-elle, pensez que dans votre mission vous allez ramasser les gouttes du sang de JESUS-CHRIST qui se perdent. Oh ! qu'une sœur qu'on envoie en mission sera contente, si elle pense qu'elle y va par l'ordre de DIEU et en sa compagnie; si elle pense que dans cet emploi elle peut et elle doit témoigner sa reconnaissance à celui de qui elle a tout reçu ! Oh ! qu'elle ne trouvera rien de difficile et de fâcheux ! Elle voudra au contraire manquer de toutes choses, être méprisée de tout le monde, souffrir toutes sortes de tourments et mourir même l'infamie (1). »

Telles étaient à la lettre les dispositions avec lesquelles ces ferventes missionnaires s'acquittaient de leurs fonctions. On en jugera par les détails que nous allons donner sur les commencements de la mission de l'île d'Orléans.

______________________________

(1) Vie de la sœur Bourgeoys, 1818, p. 126.— Vie de la même, par M. Ransonet, p. 97.

A suivre : IV. Mission de l’île d’Orléans…

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Message  Louis Mar 11 Déc 2012, 6:51 am

IV. Mission de l’île d’Orléans.
Ferveur apostolique
des sœurs Anne et Marie Barbier.



En 1685, M. Lamy, curé de la paroisse de la Sainte-Famille dans l'île d'Orléans (*), frappé des grands fruits que les sœurs de la Congrégation produisaient partout où elles exerçaient leur zèle, désira d'attirer quelques-unes de ce filles dans sa paroisse, et pria M. de Saint-Vallier d'en faire lui-même la demande à la sœur Bourgeoys. Ce prélat lui en écrivit, et elle se mit en devoir de répondre sans délai à son invitation. En conséquence, la sœur Anne fut aussitôt désignée pour être à la tête de l'œuvre; on lui adjoignit la sœur Barbier, la même qu'on avait d’abord envoyée à la Montagne (1) (**).

« Avant de partir pour l'île d'Orléans, dit cette dernière, je voulus faire une confession comme pour me préparer à la mort, sans penser du tout à ce qui nous manquait pour le temporel. C'était à la Saint-Martin, il faisait froid comme en hiver, et nous n'avions pour nous deux qu'une couverture qui ne valait presque rien, très-peu de linge, point d'autres hardes que ce qui pouvait nous couvrir fort légèrement. Pour moi je n'avais qu'une demi-robe et du reste à proportion. Nous pensâmes geler de froid dans ce voyage, et j'étais parfaitement contente de ce que je commençais à souffrir. »

En arrivant, ces deux ferventes missionnaires eurent occasion de mettre en pratique cette recommandation que la sœur Bourgeoys leur faisait en les envoyant en mission:

« De ne se désister point pour toutes les peines et tout le blâme qu'elles pourraient recevoir, mais de se préparer à rendre quelque gloire à DIEU et quelque service au prochain par la prières, par les mortifications et par les autres vertus propres de leur état.»

« A notre arrivée à Québec, continue la sœur Barbier, nous ne manquâmes pas d'humiliations : tout notre avoir était un petit paquet que nous portions fort à l'aise; on se moqua de nous, et nous fûmes fort humiliées de toute manière. On nous demanda où étaient nos lits et notre équipage ; quelques-uns disaient même que nous mourions de faim chez nous, et qu'on nous envoyait chercher fortune ailleurs. Nous arrivâmes ainsi à l'île d'Orléans. Je pensai mourir ce jour-là, le froid nous ayant si vivement saisies que nous croyions être gelées. Pour mon particulier j'aurais eu de la joie de mourir de froid, et je m'appliquai à consoler ma compagne qui était demi-morte. Nous souffrîmes beaucoup pendant ce premier hiver. Nous aurions dû mourir de froid sans une protection de DIEU (1). »

_____________________________________

(1) Vie de la sœur Bourgeoys , 1818, p. 127.— Vie de la sœur Marie Barbier.
(1) Vie de la sœur Marie Barbier.
A suivre : Explication des notes (*) et (**).



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Message  Louis Mar 11 Déc 2012, 11:11 am

IV. Mission de l’île d’Orléans. Ferveur apostolique des sœurs Anne et Marie Barbier.

[Explication des notes (*) et (**)]


(*) M. Lamy, venu de France en 1673, à l'âge d'environ 30 ans, fut chargé de desservir la Sainte-Famille et Saint-François. Ces deux paroisses, de trois lieues d'étendue, contenaient, en 1683, quatre-vingt-une familles, formant une population de 548 âmes (1). L'année suivante, M. Lamy fut rendu inamovible dans ce poste, par lettres de M. de Laval en date du 3 novembre (2), et ce fut immédiatement après qu'il prit les moyens de former dans l'île d'Orléans un établissement de sœurs de la Congrégation.


(**) On envoya à la mission de la Montagne la sœur Marie Barbier, comme nous l'avons rapporté déjà.

« Mais j'avais un pressentiment, dit cette dernière, que je serais envoyée à l'Ile d'Orléans, et une espèce de certitude intérieure que mon bien spirituel dépendait de là; que j'aurais occasion d'y mourir à toutes mes méchantes inclinations. Avant mon départ pour la Montagne, M. Guyotte, prêtre de Saint-Sulpice et curé de Villemarie, m'ayant dit par manière de conversation qu'on n'avait pas encore nommé de compagne pour ma sœur Anne, je lui dis que ce serait moi. Il en parut surpris, et me dit que cela ne pouvait se faire pour toutes sortes de raisons qu'il m'allégua. Je le priai de n'en rien dire, et qu'il venait à la fin que c'était la volonté de DIEU de m'envoyer à l'île d'Orléans. »

« Quelques jours après, M. le curé m'ayant dit qu'une autre, qu'il me nomma, était déjà destinée pour être compagne de la sœur Anne dans cette mission, que cela avait été arrêté par la communauté, je lui dis en riant que quand elle serait dans la barque je n'en croirais rien, et que ce serait moi-même. On me fit donc partir pour la mission de la Montagne, et où on ne pensait à rien moins qu'à moi pour l'île d'Orléans.

« Cependant la communauté changea de sentiment à l'égard de la sœur désignée pour y aller, voulant envoyer tantôt une sœur et tantôt une autre. Le prêtre qui nous conduisait, M. Bailly, et qui m'avait exclue lui-même du nombre de celles qui pourraient être envoyées à l'île d'Orléans, fut contraint, afin de laisser plus de liberté aux sœurs, d'en venir aux suffrages secrets. Toutes, sans le vouloir, me donnèrent leur voix; et chacune en particulier croyant qu'il n'y aurait qu'elle qui me donnerait la sienne, il se trouva que je les eus toutes ; et tout le monde fut content. On m'envoya donc quérir à la Montagne. Je retournai ainsi à la communauté pour m'embarquer deux jours après (1). »

_______________________________

(1) Archives de la marine , 1683. État présent des cures.
(2) Ibid. Curés titulaires par lettres de M. de Laval.
(1) Vie de la sœur Marie Barbier.

A suivre : V. Privations et souffrances qu’endurent les sœurs missionnaires à l’île d’Orléans.



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Message  Louis Mer 12 Déc 2012, 6:23 am

V. Privations et souffrances qu’endurent les sœurs missionnaires à l’île d’Orléans.


Comme il n'y avait point de maison préparée pour les nouvelles missionnaires, elles furent obligées de loger d'abord chez une veuve et d'y exercer leurs fonctions. Il y avait dans cette maison plusieurs domestiques, des hommes, des enfants, ce qui en rendait le séjour assez incommode aux sœurs, qui ne purent pendant tout cet hiver y faire leurs exercices qu'avec beaucoup de contrariété.

« N'étant point encore sortie dans le monde, continue la sœur Barbier, je me trouvai là comme dans un enfer, me voyant obligée d'être continuellement parmi des hommes et des femmes et de manger pêle-mêle avec eux. L'église était à plus d'un demi-quart de lieue de la maison où nous demeurions; et nous en revenions le plus souvent toutes mouillées et couvertes de glaçons, sans oser nous approcher du feu à cause du monde (1). »

Un jour que ces deux ferventes missionnaires revenaient de la sainte messe par un violent et cruel vent de nord, accompagné d'une grande poudrerie , qui les empêchait de voir où elles allaient, la sœur Barbier tomba dans un fossé plein de neige :

« Ma compagne, dit-elle, était bien loin devant moi qui n'en pouvais plus. Je ne pouvais me retirer de ce fossé, n'ayant plus de force, et la neige me couvrant de plus en plus. Alors je priai le saint Enfant JESUS de m'aider, s'il voulait prolonger ma vie pour sa gloire et pour me donner le temps de faire pénitence. J'étais tout enfoncée dans la neige, et il ne paraissait plus que l'extrémité de ma coiffe. Sa couleur noire fit croire à quelques personnes du voisinage pensaient que c'était une de leurs bêtes qui était tombée dans le fossé. Ils y accoururent promptement, et m'ayant retirée de là avec peine, ils me laissèrent au bord du fossé, d'où j'eus bien de la difficulté de me rendre à la maison. Cela joint au grand froid et à toutes les incommodités que je ressentis durant l'hiver dans cette demeure, me fit contracter des infirmités assez considérables. Pourvu que DIEU en tire sa gloire et que mon orgueil en soit écrasé, j'en suis contente. Les miséricordes de DIEU à mon égard sont trop grandes; depuis ce temps-là, ce n'est que grâce sur grâce ; qu'il en soit béni éternellement (1). »

____________________________________

(1) Ibid.

A suivre : VI. Fruits de sanctification par les sœurs de l’île d’Orléans.



Dernière édition par Louis le Mer 12 Déc 2012, 2:35 pm, édité 2 fois (Raison : orthographe)

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Message  Louis Mer 12 Déc 2012, 1:36 pm

VI. Fruits de sanctification par les sœurs de l’île d’Orléans.


Un dévouement si généreux et une conduite si apostolique attirèrent sur les travaux des deux sœurs missionnaires les plus abondantes bénédictions. La paroisse de l'île d'Orléans avait peut-être plus besoin qu'aucune autre du secours de ces ferventes missionnaires, à cause de la vie libre et dissipée que les jeunes filles y menaient alors. Il y régnait même un certain esprit d'indévotion, d'immodestie et de libertinage, qui, sans ce remède, aurait eu les suites les plus funestes. Les jeunes filles ne s'assemblaient pas seulement dans les maisons particulières pour discourir sur des sujets frivoles et légers avec des personnes de l'autre sexe, elles tenaient encore ces sortes de discours à la porte des églises et quelquefois jusque dans l'église même, sans que la sainteté du lieu leur inspirât plus de retenue.

Aussi les sœurs eurent-elles à essuyer bien des moqueries et des contradictions de la part de ces jeunes filles. Mais par la constance de leur charité, de leur patience, de leur douceur, et surtout par leurs ardentes prières auprès de DIEU, elles triomphèrent en peu de temps de tous les obstacles. Elles retirèrent un grand nombre de filles de cette vie libre et dissipée, et les portèrent heureusement à l'amour et à la pratique d'une vie chrétienne par leurs manières douces et insinuantes.

Enfin, à l'île d'Orléans, comme partout où elles exerçaient leur ministère, elles établirent, outre les écoles pour les filles, la Congrégation externe pour toutes les jeunes personnes de la paroisse. Les jours de fête et de dimanche, elles les assemblaient avant le service divin, leur faisaient des instructions et des conférences pour leur apprendre leurs devoirs et la manière de se conduire saintement dans le monde, et les conduisaient ensuite à l'église toutes ensemble, rangées par ordre et marchant deux à deux. Les travaux des deux missionnaires eurent un succès si complet, qu'ils renouvelèrent en peu de temps l'esprit de la paroisse. La piété, la religion, la modestie succédèrent à la légèreté et à l'indévotion.

Enfin plusieurs de ces jeunes personnes, touchées des instructions et des exemples de leurs saintes maîtresses, et dégoûtées tout à fait du monde, se consacrèrent à DIEU dans la Congrégation pour se livrer elles-mêmes à la sanctification des enfants et aux œuvres du zèle apostolique.

Pour procurer aux sœurs…



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Message  Louis Jeu 13 Déc 2012, 5:00 am

VI. Fruits de sanctification par les sœurs de l’île d’Orléans.


(suite)


Pour procurer aux sœurs un moyen de subsistance, et pour assurer par là à sa paroisse le bien qu'elles y produisaient, M. Lamy avait acheté une terre de trois arpents de front sur la profondeur de la moitié de l'île d’Orléans, où étaient construites une maison, une grange et ses dépendances. En 1687 il y ajouta un arpent de plus sur la même profondeur, et fit donation du tout aux sœurs de la Congrégation, le 5 septembre 1692 (1). L'île d'Orléans appartenait alors à M. François Berthelot, secrétaire général de l'artillerie, qui l'avait acquise de M. de Laval, évêque de Québec, et l'avait fait ériger en comté sous le nom de Saint-Laurent (2).

M. Berthelot, voulant favoriser l'établissement de cette mission si utile à ses censitaires, donna un arpent de terre, où fut construite en 1688 une maison en bois pour l'usage des sœurs (1), en attendant que M. Lamy leur en eût fait bâtir une en pierre, comme nous le dirons dans la suite. Ce fut là qu'elles exercèrent depuis leurs fonctions, au grand bien et à la satisfaction de toute la paroisse de la Sainte-Famille (2), soit par leurs écoles et leur pensionnat, soit par la Congrégation des filles externes.

___________________________________________

(1) Archives de l’archevêché de Québec. Remarques sur les missions.
(2) Histoire de la Nouvelle-France, par le P. de Charlevoix , t. III, p. 67.
(1) Remarques sur les missions, ib.
(2) Vie de la sœur Marie Barbier.

A suivre : VII. Établissement de la maison de la Providence à Québec.

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Message  Louis Jeu 13 Déc 2012, 12:38 pm

VII. Établissement de la maison de la Providence à Québec.


C'était surtout dans la ville même de Québec que DIEU voulait faire éclater la grâce de la Congrégation, en fournissant à la sœur Bourgeoys l'occasion d'y travailler à la sanctification d'une multitude d'âmes. Dans la visite qu'il fit à Montréal, M. de Saint-Vallier fut frappé de l'esprit de piété et de ferveur qu'il remarqua dans la maison de la Providence, où la sœur Bourgeoys avait réuni, comme on l'a raconté, de grandes filles pauvres pour leur apprendre à travailler et à vivre chrétiennement.

Ce prélat désira donc de procurer un semblable établissement à sa ville épiscopale ; et jugeant que les sœurs de la Congrégation, dont DIEU se plaisait à bénir si visiblement toutes les entreprises, étaient seules capables de le former et de lui communiquer le même esprit, il écrivit à la sœur Bourgeoys pour lui offrir d'en prendre la conduite. Il acheta pour cela, le 13 novembre 1686, avec cour et jardin, dans la haute ville, proche de la grande place Notre-Dame (1), et enfin on choisit pour être à la tête de l'œuvre la sœur Marie Barbier, à laquelle on adjoignit la sœur Saint-Ange, envoyée de Villemarie à ce dessein (2).

Le prélat ne fut point trompé dans son attente; car jamais, peut-être, on ne vit d'une manière plus sensible la bénédiction de DIEU sur une œuvre, qu'on eut lieu de l'admirer dès le commencement de celle dont nous parlons.

________________________________

(1) Archives de l’archevêché de Québec.
(2) Vie de la sœur Marie Barbier.


A suivre : VIII. Fruits que produit l’établissement de la Providence à Québec.

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Message  Louis Ven 14 Déc 2012, 6:22 am

VIII. Fruits que produit l’établissement de la Providence à Québec.



Par le zèle des deux sœurs missionnaires, il s'établit et il régnait dans cette maison, connue sous le nom de Providence de la sainte Famille , un esprit d'innocence, de ferveur et de simplicité dignes des communautés les plus parfaites (*). La dévotion envers la sainte Famille y fut introduite dès le commencement ; chaque jour donnait lieu à quelque nouvelle pratique pour honorer l'Enfant JESUS, la très-sainte Vierge et le glorieux saint Joseph ; en sorte que cette dévotion, qui à Québec avait été jusque alors comme réservée aux mères de famille, devint bientôt commune à toutes les jeunes personnes sans distinction. Depuis plusieurs années l'amour de la parure ayant pénétré dans toutes les classes de la société, un grand nombre de femmes et de filles affectaient dans leurs habits un luxe beaucoup au-dessus de leur condition et ne respectaient pas toujours les règles de la décence, spécialement dans la coiffure. M. de Laval, pour arrêter cet abus, avait défendu en 1682, aux prêtres de son diocèse, de recevoir à la participation des sacrements toutes celles qui seraient vêtues d'une manière indécentes (1).

Toutefois le luxe n'avait fait que s'accroître de plus en plus; et en 1680 il régnait partout avec plus de licence et de scandale que jamais (2). Ce que les efforts de M. de Laval n'avaient pu opérer, les sœurs de la Congrégation, par les sentiments de piété qu'elles avaient su inspirer aux jeunes filles de la Providence, l'obtinrent d'elles sans leur en avoir même témoigné le désir. Car le 12 juin 1680, veille de la fête du Saint-Sacrement, ces filles, voulant renoncer à tout ce qui pouvait ressentir les vanités du monde, formèrent de concert la résolution de s'interdire l'usage certains ornements superflus qu'elles avaient portés jusque alors, et allèrent le suspendre devant l'image de la très-sainte Vierge dans leur oratoire pour les offrir comme en sacrifice; en sorte que le lendemain on les vit, avec autant de surprise que d'édification, assister à l'office divin et à la procession générale, toutes vêtues de la manière la plus simple et la plus modeste (3) (**).

_____________________________________________

(1) Archives du séminaire de Villemarie, Mandement de M. de Laval.
(2) Ibid., Mandement de M. de Saint-Vallier, du 22 octobre 1686.
(3) Vie de la sœur Marie Barbier.

A suivre : Explication des notes (*) et (**) …


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Message  Louis Ven 14 Déc 2012, 11:28 am

VIII. Fruits que produit l’établissement de la Providence à Québec.

Explication des notes (*) et (**)


(*) C'était principalement la sœur Barbier qui servait d'instrument aux opérations de la grâce sur ces filles. Par ses manières simples et engageantes, non moins que par ses instructions et ses discours, elle les portait toutes à la pratique de la plus haute perfection, et leur donnait dans sa propre personne l'exemple des vertus les plus sublimes. Une sorte d'instinct lui découvrait souvent leurs besoins spirituels; et toujours elle leur en procurait le remède, soit en leur donnant des avis pleins de sagesse et tout à fait convenables à leur état, soit en les adressant au confesseur de la maison ; car elle ne pouvait souffrir ni péché ni imperfection dans aucune de ses filles. Elle avait un don si efficace de s'insinuer dans leurs cœurs et de gagner leur confiance, que plusieurs de ces filles avaient plus de facilité à lui découvrir leurs dispositions intérieures, qu'elles n'en éprouvaient à l'égard de leur propre confesseur. Elle se servait de ces ouvertures pour les porter à faire des confessions humbles, entières et sincères, et à ne point rougir des aveux les plus humiliants. Aussi avait-on lien d'admirer les fruits merveilleux que les sacrements produisaient dans toutes ces filles (1). Quoique cette maison fût établie en faveur des filles canadiennes, il paraît qu'on y reçut aussi des sauvagesses; du moins M. de Saint-Vallier, dès le commencement, y mit une sauvagesse, pour la faire élever (2).
_________________________________

(1) Vie de la sœur Marie Barbier.
(2) État présent de l’Église de la Nouvelle-France , p. 111-112.

A suivre : Explication de la note (**).

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Message  Louis Sam 15 Déc 2012, 6:27 am

VIII. Fruits que produit l’établissement de la Providence à Québec.

Explication de la note (**)


(**) L'esprit de piété qui animait les filles de la Providence, et surtout la ferveur de leurs saintes maîtresses, rendent très-croyables divers traits qu'on raconte de la bonté divine à leur égard dans leurs pressantes nécessités temporelles. On vit souvent dans cette maison le pain, la viande, et les autres provisions, se multiplier lorsqu'on n'avait pas le moyen de s'en procurer d'ailleurs.

Un jour qu'il ne restait que peu de farine, et qu'on n'avait aucune ressource pour en acheter, la sœur Barbier monte au grenier, et là, s'étant prosternée devant l'image de l'Enfant JESUS, qu'elle avait portée avec elle, elle adressa au SAUVEUR la prière suivante :

« Vous qui avez autrefois multiplié les pains dans le désert, vous pouvez avec autant de facilité multiplier ceux qui restent en très-petite quantité dans cette maison. »

La confiance de cette sainte fille fut en effet si agréable à DIEU, que le pain qu'on avait alors, et qui devait ne suffire que pour quelques jours aux personnes de la communauté, les nourrit néanmoins pendant près de trois semaines.

On remarqua encore qu'un tas de farine qu'on avait dans la maison, se maintint toujours dans la même quantité, quoiqu'on en eût pris plusieurs fois, jusqu'à ce qu'on fût en état de s'en procurer de nouvelle.

On raconte d'autres traits semblables qui étaient comme l'accomplissement littéral de cette promesse du sauveur dans l'Évangile: « Cherchez d'abord le royaume de DIEU et sa justice, et tout le reste vous sera donné par surcroît; car votre Père céleste connaît tous vos besoins. »

Mais ce qui dans la sœur Barbier est plus admirable encore que ces attentions de la divine Providence, c'est son amour insatiable pour les croix. En vue d'attirer les bénédictions de DIEU sur l'œuvre qui lui était confiée, elle avait demandé à NOTRE-SEIGNEUR avec amour de la rendre participante de ses souffrances, et il daigna l'exaucer pleinement. Elle ne fut pas plutôt entrée dans la maison de la Providence qu'elle se vit accablée de peines, tant intérieurement qu'extérieurement, des plus vives et des plus aiguës; et il ne lui fallait rien de moins que sa vertu forte et généreuse pour l'empêcher jeter les hauts cris. Dans cet état elle faisait compassion à la sœur Saint-Ange, sa compagne. Mais ces douleurs, quelque vives qu'elles fussent, ne l'empêchaient pas, pour l'ordinaire, de vaquer à ses emplois, ni même d'observer fidèlement les jeûnes de l'Église, et de continuer toujours les affreuses pénitences auxquelles elle s'était condamnée.

Son principal attrait était l'amour de la croix, de la vie cachée et des humiliations de JESUS-CHRIST. Cet amour semblait s'accroître en elle à l'approche des solennités, surtout de celle de l'Assomption, où elle ressentait toujours quelque redoublement dans ses souffrances; elle mettait ces occasions au rang des plus insignes faveurs qu'elle recevait de la très-sainte Vierge, ce qu'elle appelait le bonheur de souffrir .

L'année 1688, peu de jours avant l’Assomption, la sœur Bourgeoys étant descendue à Québec, accompagnée d'une de ses sœurs, pour y faire la visite de la mission de cette ville et de celle de l'île d'Orléans, trouva la sœur Barbier si grièvement malade qu'on fut obligé de lui administrer les derniers sacrements. Elle releva cependant de cette maladie, et la regarda depuis comme un de ces bouquets de myrrhe que la très-sainte Vierge avait coutume de lui donner chaque année à l'occasion de la fête de son Assomption (1).

_____________________________

(1) Vie de la sœur Marie Barbier.

A suivre : IX. Fruits de la mission de la Sainte-Famille…

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Message  Louis Sam 15 Déc 2012, 12:04 pm

IX. Fruits de la mission de la Sainte-Famille.
Mandement relatif aux petites filles.


L'exemple de ces filles fut imité l'année suivante par celles de l'île d'Orléans. La sœur Anne, missionnaire de cette île, en écrivit en ces termes à la sœur Barbier, à Québec, le 12 juin 1687 : « Nos filles sont présentement conformes pour leur toilette à celles de votre communauté; et voici comment la chose s'est passée. Pendant l'espace de quatre à cinq jours nous leur avons recommandé d'examiner dans leurs petites réflexions, et dans leurs visites au très-saint Sacrement, si elles n'avaient rien qui fût opposé à l'esprit du saint Enfant JÉSUS. Après y avoir pensé, elles nous ont dit qu'elles ne connaissaient rien qui pût y être contraire, sinon quelques ornements de tête, dont elles souhaiteraient de tout leur cœur se priver. Jugez combien volontiers nous avons adhéré à cette bonne inspiration (1). »

Enfin, M. de Saint-Vallier, encouragé par ces heureux résultats, désira de les voir s'étendre à toutes les écoles de filles de son diocèse. Dans la visite de celles de Villemarie qu'il fit en 1690, il vit avec satisfaction que la plupart des petites filles étaient vêtues selon les règles de la plus édifiante modestie. Mais en ayant remarqué quelques-unes qui mettaient dans leur toilette une certaine affectation, et craignant que leur exemple ne fût pernicieux aux autres, en affaiblissant l'effet des bonnes instructions que les sœurs leur faisaient touchant la simplicité dans les habits, il jugea la chose assez importante pour publier un Mandement sur cet objet. Ce n'est pas qu'il voulût empêcher par là les filles de qualité de porter des vêtements conformes à leur état ; seulement il recommanda à toutes en général de se vêtir modestement selon leur condition, et d'éviter, dans la coiffure, toute affectation de rubans et de dentelles (2). Ainsi, cette utile réforme fut un nouveau fruit que produisit le zèle des sœurs missionnaires de Québec.

____________________

(1) Ibid.
(2) Archives de la Congrégation, Mandement de M. de Saint-Vallier, du 4 octobre 1690.
A suivre : X. La sœur Bourgeoys visite les missions de la Congrégation…


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Message  Louis Dim 16 Déc 2012, 5:44 am

X. La sœur Bourgeoys visite les missions
de la Congrégation. Son esprit d’humilité.


Les visites que la sœur Bourgeoys leur faisait de temps en temps ne contribuaient pas peu à exciter cette ferveur, en ranimant en elles l'esprit de leur sainte vocation, surtout l'amour de la pauvreté, de l'humilité et de la mortification. Ayant remarqué que dans trois églises, probablement celles de Champlain, de l'île d'Orléans et de Québec, on usait de quelque distinction à l'égard des sœurs en leur distribuant le pain bénit, son humilité en fut alarmée; et elle voulut qu'on cessât cette pratique.

« Je dis au prêtre qui célébrait la sainte messe, écrit-elle, que n'étant que de pauvres filles, nous ne devions point recevoir d'honneurs particuliers dans l'église. Que s'il voulait nous faire la charité d'un morceau de pain bénit, le bedeau pourrait le mettre à la sacristie, et que la sœur sacristine le prendrait là. Cet ecclésiastique me répondit que je lui faisais plaisir, et que ce n'était pas son avis qu'on nous le donnât autrement. Un autre à qui je fis la même observation, me dit qu'il avait permis qu'on nous le donnât en cérémonie à cause que c'était la coutume ; et le troisième, sans y faire réflexion. Lorsque j'étais à Québec, une personne nous envoya un coussin de pain bénit en cérémonie; je le reçus, crainte de lui faire de la peine ; et après je priai que cela ne se fit plus, ce que la personne trouva bon.

Nous ne devons recevoir aucun honneur, comme une place distinguée, un cierge, un rameau et toute autre chose singulière. Le caractère de cette communauté doit être la petitesse et l'humilité ; et comme on en distingue tous les ustensiles et les hardes à la marque de la Congrégation, il faut aussi que dans tous les emplois et les offices il paraisse des marques de la pauvreté, n'y recherchant jamais ce qui a de l'éclat ou quelque marque de hauteur. La très-sainte Vierge, notre très-chère institutrice et fondatrice, ne s'attribuait aucun des honneurs rendus à son fils par les rois, les bergers et les autres (1). »

___________________________________

(1) Écrits autographes de la sœur Bourgeoys.
A suivre : XI. La sœur Bourgeoys donne naissance à l’hôpital général de Québec.


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Message  Louis Dim 16 Déc 2012, 2:02 pm

[328]

XI. La sœur Bourgeoys donne naissance à l’hôpital général de Québec.


M. de Saint-Vallier, charmé du succès de l'établissement de la Providence, désira que les sœurs de la Congrégation étendissent à toutes les petites filles en général le bienfait de l'éducation, en ouvrant des écoles gratuites pour elles, comme elles le faisaient à Villemarie et ailleurs. Elles commencèrent donc, en l'année 1688, ce nouvel établissement dans la maison de la haute ville (2), qui même fut bientôt destinée à ce seul usage.

Car l'année suivante, M. de Saint-Vallier, voyant les grands avantages de la maison de la Providence, conçut le dessein d'un autre établissement qui put être d'une utilité plus générale à la classe indigente. Ce fut de fonder à Québec un hôpital, sur le modèle des maisons établies dans la plupart des villes de France, connues sous le nom d'hôpitaux généraux (1), où l'on renfermerait alors les pauvres mendiants pour les y employer à divers ouvrages, afin d'empêcher l'oisiveté de ceux qui négligeaient de travailler, quoiqu'ils fussent encore en état de se rendre utiles (2). Ayant donc vu par expérience les bénédictions que DIEU se plaisait à verser sur les travaux des sœurs de la Congrégation, il jugea qu'elles étaient très-propres à procurer le succès de ce nouvel établissement ; et en conséquence, au printemps de l'année 1689, il écrivit à la sœur Bourgeoys pour l'engager à faire le voyage de Québec, afin d'en conférer avec elle.

Elle n'eut pas plutôt appris les désirs du prélat,…

_______________________________

(2) Archives de l’archevêché de Québec, — Remarques sur les missions.
(1) Vie de la sœur Marie Barbier. Vie de la sœur Bourgeoys, 1818, p. 128.
(2) Édits concernant le Canada , t. I, p. 281-282.

A suivre…


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Message  Louis Lun 17 Déc 2012, 6:21 am

XI. La sœur Bourgeoys donne naissance à l’hôpital général de Québec. (suite)


Elle n'eut pas plutôt appris les désirs du prélat, qu'incontinent elle se mit en chemin à pied, car la navigation n'était pas encore libre à cause des glaces. Dans ce voyage, elle eut à endurer des fatigues incroyables, étant obligée souvent de se traîner sur les genoux, tantôt dans les neiges, tantôt sur la glace, et quelquefois dans l'eau. C'est ainsi qu'elle avait coutume de voyager l'hiver; et si dans les autres saisons de l'année elle faisait ses voyages en barque, c'était pour elle un exercice de zèle, et autant de véritables missions en faveur des matelots et des passagers, auxquels elle donnait surtout des exemples touchants de pauvreté, d'humilité et de mortification.

A Québec, elle apprit donc de M. de Saint-Vallier le dessein qu'il avait de la charger de la direction de l'hôpital général, qu'il voulait substituer à la maison de la Providence. Quoiqu'elle vit bien qu'une œuvre de cette nature était peu compatible avec la fin de son institut, la sœur Bourgeoys entra néanmoins aveuglément dans les vues du prélat, et se livra à des travaux durs et humiliants, portant elle-même sur ses épaules, de la basse ville à la haute, les meubles et les ustensiles nécessaires au nouvel établissement (1).

Bien plus, après avoir employé à ce pénible travail les quatre premiers jours de la semaine sainte, elle passa la nuit entière du jeudi au vendredi à genoux et immobile devant le très-saint Sacrement (2).

Enfin, pour seconder les desseins de son évêque, elle appela à Québec la sœur Anne Hioux, qui depuis près de quatre ans dirigeait la mission de la Sainte-Famille dans l'île d'Orléans, et envoya la sœur Marie Barbier pour tenir sa place (3).

Ainsi les sœurs de la Congrégation furent l'instrument dont la divine Providence se servit pour donner commencement à l'hôpital général de Québec, où tant de personnes délaissées devaient trouver des ressources assurées contre la misère, et des moyens abondants de sanctification et de salut. Elles en eurent la conduite jusqu'en l'année 1692, où le prélat, après avoir obtenu des lettres patentes du roi en faveur de cette maison (1), se décida à la confier à des filles qui gardassent la clôture, et y mit des Hospitalières (2) (*).

_______________________
(*) La sœur Juchereau rend ce témoignage aux sœurs de la Congrégation dans son histoire de l'Hôtel-Dieu de Québec: « M. de Saint-Vallier donna le soin de l'hôpital général de Québec aux sœurs de la Congrégation, qui s'en acquittèrent fort bien tant qu'elles en furent chargées ; mais dès l'année 1692 il en ôta les sœurs et y mit des hospitalières. »
_______________________
(1) Vie de la sœur Bourgeoys, 1818, p. 128.
(2) Vie de la même, par M. Ransonet, p. 99-100.
(3) Vie de la sœur Marie Barbier.
(1) Édits concernant le Canada, t. I, p. 281.
(2) Histoire de l’Hôtel-Dieu de Québec, par la mère Juchereau, p. 356.

A suivre : XII. La sœur Bourgeoys établit des écoles à Québec…

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Message  Louis Lun 17 Déc 2012, 11:39 am

XII. La sœur Bourgeoys établit des écoles à Québec.
Les sœurs y sont d’abord logées dans une étable.


DIEU voulut sans doute que M. de Saint-Vallier changeât ainsi de vues à l'égard des sœurs de la Congrégation pour les faire rentrer dans les fonctions propres de leur institut, l'instruction et la sanctification des jeunes filles. Car ce prélat, en leur ôtant la direction de l'hôpital général, ne priva pas sa ville épiscopale de leurs services.

Au contraire, pour les fixer à Québec, il leur avait fait donation, par acte du 19 janvier 1689, de la maison qu'elles occupaient à la haute ville, en mettant pour condition expresse que si elles venaient à se transporter dans quelque autre quartier, cette maison serait vendue à leur profit, et le prix employé à l'achat du nouvel emplacement où elles s'établiraient. Il ajoutait cependant que, dans le cas où la mission de Québec viendrait à s'éteindre, la propriété des choses données retournerait à l'évêque, qui en disposerait pour le plus grand bien de ses diocésains. La sœur Bourgeoys accepta cette donation le 12 mars de cette même année (1).

La liberté que M. de Saint-Vallier laissait aux sœurs de vendre cette maison, eut pour motif le peu d'avantage qu'elle offrait pour l'œuvre dont elles étaient chargées. Aussi ne tardèrent-elles pas à en acquérir une autre où elles se transportèrent. Mais elles y étaient à peine établies, qu'elles se virent menacées d'en être expulsées par une personne qui prétendit mettre opposition à la vente qu'on venait de leur en faire (2); et au sortant de là elles ne trouvaient qu'une pauvre étable pour tout logement.

« Je me suis réjouie d'apprendre que vous alliez loger dans une étable, leur écrivait la sœur Bourgeoys ; mais en même temps j'ai de la peine de savoir le mécontentement que les personnes que vous connaissez ont témoigné ; car j'ai un grand désir de demeurer unie avec tout le monde, à cause que DIEU nous commande d'aimer notre prochain. C'est ce qui m'a fait différer de faire ensaisiner le contrat en question (1). »

Les sœurs quittèrent enfin la maison et allèrent se loger dans ce triste réduit, comme si la Providence eût permis les oppositions dont nous parlons, pour donner à l'établissement de Québec un nouveau trait de ressemblance avec la formation de la Congrégation à Villemarie, où elle n'avait eu qu'une pauvre étable pour berceau. Il faut que les sœurs aient eu bien à souffrir dans ce lieu, pour que la sœur Bourgeoys, si avide de privations et si mortifiée, en ait pu parler en ces termes : «Nos sœurs, après avoir quitté le logement où elles n'avaient pu demeurer, s'étaient logées dans un autre avec quelques pensionnaires. Elles y étaient si mal ! quelles sortes de misères quand elles en sont sorties (2) ! »

_____________________________________

(1) Archives de l’archevêché de Québec.
(2) Écrits autographes de la sœur Bourgeoys.
(1) Vie de la sœur Bourgeoys , 1818, p. 129.
(2) Écrits autographes de la sœur Bourgeoys.

A suivre : XIII. Par délicatesse pour les Ursulines,…


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