Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
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Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEII. LE MOUVEMENT (suite)Et l'on voit la portée de cette question. Si, en effet, un tel mouvement existe, si l'être corporel peut être changé quant à son dernier fond, quant à son être substantiel, et si notre raison se rend compte ou prend conscience qu'il en est ainsi, alors tout s'illumine des plus vives clartés dans le monde de la nature. Les transformations incessantes qui se produisent parmi les êtres du règne minéral, et, plus encore, dans le règne végétal ou animal, prennent tout leur sens. Il s'agit de transformations qui permettent aux êtres supérieurs d'utiliser les êtres inférieurs pour le plein et parfait épanouissement de leur nature à l'effet d'amener ou d'assurer, dans sa radieuse harmonie, la hiérarchie des divers êtres qui constituent l'univers matériel. C'est ainsi que le minéral transformé passe dans la nature du végétal ; et celui-ci, à son tour, fait vivre l'animal.
Or, nul doute qu'il n'en soit ainsi aux yeux de la saine raison. Le puissant génie d'Aristote a mis cette vérité dans tout son jour.
Il a su découvrir, dans les deux principes essentiels qui constituent le corps, la possibilité et les conditions intrinsèques du changement dont il s'agit.
Nous avons vu, eu effet, que tout corps était essentiellement composé de deux principes : l'un, principe d'étendue et de passivité, que nous avons appelé du nom de matière première; l'autre, principe d'unité et d'activité, que nous avons appelé du nom de forme substantielle. L'union de ces deux principes amène l'existence de l'être corporel dans sa substance que revêtent toujours les propriétés accidentelles découlant de ces deux principes ou en harmonie avec eux : telle, l'étendue avec ses configurations propres ; telles aussi les qualités qui permettront à l'être corporel d'entrer en rapport d'action ou de passion avec les autres êtres corporels.
Or, c'est au moment où l'être corporel entre ainsi en rapport d'action ou de passion avec les autres êtres corporels que se produit, pour lui, la possibilité d'altération dont nous avons déjà parlé, faisant que sous l'action d'un autre être corporel il est modifié, altéré dans ses propres qualités accidentelles. Et comme ces qualités accidentelles sont au service de la substance qui les porte et de qui elles découlent en quelque sorte, dans la mesure où le mouvement d'altération se prolongera et deviendra plus intense, plus profond, il se pourra que l'être substantiel lui-même du corps ainsi altéré finisse par se trouver atteint, au point d'en être ébranlé et même ruiné ou détruit. Cette destruction se produira du seul fait que les deux principes essentiels qui constituent ce corps cesseront d'être unis. De même que l'union des deux principes, matière première et forme substantielle, constituait l'être de ce corps; de même leur séparation constituera sa destruction ou son non-être.
Toutefois, cette destruction ne sera jamais une annihilation. Elle ne sera qu'une transformation ; mais une transformation substantielle….
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEII. LE MOUVEMENT (suite)
Toutefois, cette destruction ne sera jamais une annihilation. Elle ne sera qu'une transformation ; mais une transformation substantielle. Et cela veut dire qu'à la première substance corporelle succède une nouvelle substance corporelle. Tout ne sera pas entièrement nouveau dans cette nouvelle substance corporelle. Quelque chose de la première se retrouvera en elle. Mais quelque chose qui ne devra pas être conçu à la manière d'un corps ou d'un être corporel. Dans ce cas, en effet, il n'y aurait point production d'une nouvelle substance corporelle ; il n'y aurait simplement que disposition nouvelle dans un nouveau tout d'une substance corporelle préexistante. Et le nouveau tout ne serait plus qu'un tout accidentel.
Pour que nous ayons une substance nouvelle, il faut que la substance précédente ait cessé d'être elle-même, sans que cependant tout ce qui faisait partie d'elle-même ait été détruit.
Ce qui reste ainsi d'elle-même c'est un de ses principes essentiels, celui des deux qui était en elle, mais qui ne la constituait pas elle-même comme principe formel spécifique. Et c'est le principe que nous avons appelé la matière première.
Lors donc qu'un être corporel quelconque est détruit dans le monde de la nature, il demeure toujours de lui sa matière première. Et c'est parce que cette matière première perd sa première forme substantielle pour en acquérir une nouvelle, que le premier être corporel se trouve détruit et fait place à un nouvel être corporel, appelé d'un nom nouveau, celui-là même de la nouvelle forme substantielle qui le constitue maintenant et le spécifie.
Voilà, dans son exposé très simple et si pleinement satisfaisant pour la raison philosophique travaillant sur les données les plus obvies et les plus constantes de nos sens, la pensée d'Aristote et de saint Thomas sur le plus profond des changements qui existent dans le monde matériel.
Cette pensée est la seule qui puisse satisfaire la saine raison philosophique.
Comment donc se fait-il qu'elle n'ait pas été connue de tous, dès que la raison humaine s'est appliquée à fixer et à préciser la nature des mouvements constatés dans le monde des corps? Comment se fait-il qu'à tout le moins elle n'ait pas été et qu'elle ne soit pas acceptée de tous, après que le génie d'Aristote l'a eu formulée parmi les hommes ?
Saint Thomas nous a déjà fourni la réponse à cette double question…
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Louis- Admin
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Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEII. LE MOUVEMENT (suite)
Saint Thomas nous a déjà fourni la réponse à cette double question.
Il en est de la transformation substantielle comme de la forme substantielle elle-même et de la matière première. Les sens ne sauraient les percevoir, bien que, sous un certain aspect, ils en rendent témoignage. Et, par suite, l'imagination, qui est rivée aux perceptions sensibles, ne saurait se les représenter ou s'en former une image. Les sens et l'imagination ne perçoivent ou ne se représentent que des corps, des êtres corporels. S'ils saisissent des changements, des mutations, c'est toujours en raison d'un sujet qui existe en soi, dans le monde des corps. Ils perçoivent le mouvement local pour autant qu'ils perçoivent un sujet corporel, un corps existant en soi, au dehors, sous le coup d'un changement de place ou de lieu. Pour le mouvement d'altération, ils le perçoivent encore, mais plutôt en raison du mouvement local qui est à la base, selon que les dimensions d'un sujet corporel varient, ou sa couleur, ses propriétés sensibles extérieures.
Dans le cas du mouvement de transformation substantielle, les sens ne perçoivent qu'une chose, que tel sujet corporel cesse d'être ou qu'un nouvel être corporel apparaît. Ils perçoivent aussi que ce n'est pas d'une façon absolue ou quant à tout son être que tel sujet corporel disparaît ou apparaît dans le cas de la destruction du premier et de la production du second. Quand le morceau de bois est jeté au feu, le bois n'est plus; mais il reste de la cendre. Et si, au moment de la moisson, on recueille un épi, c'est parce qu'un grain de blé avait été jeté en terre.
Toutefois, si les sens perçoivent les deux termes du mouvement, ou le double état du corps ainsi changé, pour autant qu'il était d'abord et qu'il n'est plus ensuite sous sa raison de tel corps, de tel être corporel, de telle substance corporelle, ils ne perçoivent pas, ils ne peuvent pas percevoir les conditions intrinsèques de ce changement essentiel. Ce changement essentiel, en effet, porte sur les principes du corps, selon qu'ils sont en eux-mêmes distinctement et séparément; puisque aussi bien le mouvement dont il s'agit consiste à les séparer l'un de l'autre, ou à faire qu'un nouveau principe remplacera l'un des deux. Les sens qui ne perçoivent que les corps, non les principes des corps, ne peuvent donc pas, absolument pas percevoir le mouvement dont il s'agit. Ils n'en perçoivent que les extrêmes ou les termes, ce qui était avant et qui n'est plus après, avec ceci pourtant qu'il en reste quelque chose, mais qui est autre chose, puisqu'on l'appelle d'un nouveau nom ; ou ce qui est maintenant et qui n'était pas auparavant, mais qui cependant était précédé de quelque chose qui explique sa nouvelle venue.
Dans le changement accidentel qu'est le mouvement d'altération…
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Louis- Admin
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PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEII. LE MOUVEMENT (suite)
Dans le changement accidentel qu'est le mouvement d'altération, les sens peuvent saisir les conditions du mouvement, pour autant que le sujet corporel demeure le même, toujours accessible à la perception des sens et que la modification accidentelle qu'il subit tombe elle-même sous les sens. Tel le bloc de marbre qui était d'abord informe, et qui, transformé par l'artiste, devient ensuite la statue de César.
Et, aussi bien, est-ce par là, par l'image ou la vue d'une transformation accidentelle, que notre raison peut être amenée à concevoir, d'une certaine manière, ou à se représenter intellectuellement la transformation substantielle. De même, en effet, que dans la transformation accidentelle il demeure, au témoignage même de nos sens, un sujet qui reste identique et sans changer en lui-même sous de multiples formes accidentelles ; de même, dans la transformation substantielle, nous concevons un certain sujet demeurant toujours identique dans son dernier fond, malgré tous les changements qui se produisent en lui. Seulement, à la différence de la transformation accidentelle, le fond qui demeure ici n'est pas un sujet existant en lui-même, dans l'ordre des êtres corporels. Et voilà pourquoi nos sens ne le perçoivent pas, ne peuvent pas le percevoir, ni notre imagination se le représenter. Mais notre intelligence le saisit, parce qu'il faut qu'il soit pour expliquer ce que nos sens perçoivent.
Dès là, en effet, qu'un être corporel change non plus seulement dans ses formes accidentelles, mais jusqu'à cesser d'être lui-même, jusqu'à perdre son nom ; et que, cependant, tout ce qui était de cet être n'est pas détruit, qu'il en reste quelque chose, un quelque chose qu'on retrouve en un autre être radicalement distinct du premier, notre raison en conclut inéluctablement que des deux principes essentiels qui constituaient ce premier être corporel, l'un, celui-là même qui spécifiait cet être et lui donnait son nom, a disparu pour faire place à un autre qui constitue une autre espèce et donne un nouveau nom, et que l'autre est celui en qui s'est fait ce changement ou cette substitution, comme le bloc de marbre est le sujet en qui se font les changements et les substitutions de formes accidentelles.
Encore un coup, rien de plus rationnel, de plus exigé par la saine raison, qu'une telle doctrine ; mais rien non plus qui soit davantage hors de la prise ou du contrôle des sens. Rien, par conséquent, qui soit plus essentiellement d'ordre philosophique et hors des limites de la science expérimentale. Les sens et l'expérience ne peuvent pas plus saisir sur le fait ou en soi la transformation substantielle qu'ils ne peuvent saisir la forme substantielle elle-même et la matière première.
De là vient que les anciens philosophes naturalistes…
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Louis- Admin
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De là vient que les anciens philosophes naturalistes n'ont jamais soupçonné cette doctrine, habitués qu'ils étaient à ne tenir pour réel que ce qui tombait sous les sens ou pouvait être imaginé. Et de là vient aussi que cette doctrine est aujourd'hui encore si peu comprise de tant d'esprits, surtout dans le monde de la pure science expérimentale, ou de la philosophie qui a le tort de ne pas distinguer assez l'objet de la raison, de celui de l'expérience sensible.
Et, pourtant, outre qu'elle seule répond aux exigences de la saine raison philosophique, elle est aussi la seule qui donne aux sciences de la nature leur dignité foncière. Nous avons déjà fait remarquer que si tout se ramenait, dans le monde de la nature, à de simples déplacements d'atomes ou de molécules formant des configurations accidentelles, dont la diversité constituerait la seule raison de la diversité des êtres de la nature, l'objet des diverses sciences ne serait plus que ces configurations sans consistance, d'autant plus vaines que ces molécules ou ces atomes devraient être conçus, nous l'avons aussi fait remarquer, sans action ou réaction aucune des uns sur les autres. Dès là, en effet, qu'on admettrait une action ou réaction quelconque, il faudrait admettre un principe de cette action ou de cette réaction qui ne serait plus d'ordre quantitatif, mais d'ordre qualitatif, et qui, par suite, ne se rattacherait plus au simple mouvement local, mais appartiendrait au mouvement d'altération, acheminement fatal vers le mouvement de transformation substantielle.
Cette même doctrine de la transformation substantielle est encore la seule qui donne un sens plausible à la question de l'évolution, puisque aussi bien l'évolution porte sur le passage d'une espèce à l'autre ; et qui permette aussi de résoudre cette question comme il convient.
Si, en effet, tout se ramenait, dans le monde de la nature, aux configurations accidentelles des atomistes…
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Si, en effet, tout se ramenait, dans le monde de la nature, aux configurations accidentelles des atomistes, pourquoi parler d'espèces et de passage d'une espèce à l'autre ? Ces mots n'auraient aucun sens. Par contre, si les êtres de la nature, dans leur diversité spécifique, constituent, chacun, dans leur être individuel, un tout ayant sa forme substantielle qui le fixe dans telle espèce, comment concevoir qu'il puisse, en restant lui-même , perdre sa forme substantielle et en recevoir une autre?
Dans le cas d'une transformation substantielle, l’individu d'une espèce ne demeure jamais, pas plus que ne demeure la forme substantielle. Seule la matière demeure , mais la matière première , qui, par elle-même et séparée de la forme, non seulement n'est pas un être individuel, mais ne peut même pas être conçue comme appartenant au monde de l'existence ou du réel : elle n'est jamais, dans la réalité, qu'elle ne soit unie à une forme substantielle.
Et il est vrai que parce qu'elle demeure, au fond de toutes les transformations substantielles, et parce que toutes les formes substantielles peuvent être reçues et sont reçues en elle, successivement, depuis les formes qui portent avec elles le degré d'être spécifique le plus infime, jusqu'à celles qui porteront le degré d'être spécifique le plus parfait, c'est-à-dire, comme nous le montrera toute la suite de notre étude, depuis les formes élémentaires jusqu'à la forme humaine, il s'ensuit qu'en elle se produit, par les transformations substantielles, une merveilleuse évolution ascensionnelle, que nous appellerons, si on le veut, l'ascension de la matière.
Mais cette ascension ou cette évolution ascensionnelle ne doit ni ne peut être conçue comme l'évolution d'un être déterminé : individu ou espèce. L'espèce n'évolue pas, c'est évident; puisqu'elle constitue, par définition, une limite d'être, ou un degré d'être déterminé. Si on change cette limite ou ce degré, il s'agira d'une autre espèce, non de la première qui aurait évolué.
Quant à l'individu, nous avons déjà dit que l'évolution spécifique le détruit par le fait même, puisqu'elle implique la transformation substantielle. L'individu ne peut demeurer et se perfectionner ou évoluer que dans la ligne de la transformation accidentelle. Et cette transformation, par définition, demeure en-deçà de la transformation de l'espèce : elle se produit toujours dans les limites de la même espèce.
Une confirmation de cette vérité se trouve en ceci que jamais on ne trouverait, dans la nature, un être appartenant…
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Louis- Admin
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Une confirmation de cette vérité se trouve en ceci que jamais on ne trouverait, dans la nature, un être appartenant à telle espèce déterminée, qui aspirerait à faire partie d'une autre espèce. Ce serait là une aspiration contraire à ce qu'il y a de plus radical et de plus profond dans tous les êtres qui sont, et qui est de se conserver dans l'être. Or, ils ne se conserveraient pas dans l'être, ils cesseraient d'être, s'ils passaient d'une espèce à l'autre, puisque, nous ne saurions trop le répéter, ils perdraient la forme substantielle qui les fait être purement et simplement. Seule, la matière première, qui n'a, de soi, aucune forme, et peut les recevoir toutes par voie de transformations substantielles, pourra être dite aspirer, d'une aspiration naturelle, à recevoir les diverses formes : aspiration qui est, du reste, toute passive et qui se ramène à une simple puissance de recevoir ces diverses formes. Mais aucun être individué, dans la nature, ayant son être à lui par telle forme spécifique déterminée, ne peut aspirer à changer de forme ou de nature.
L'erreur, ici, comme toujours — et c'est encore saint Thomas qui nous en avertit —…
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Louis- Admin
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L'erreur, ici, comme toujours — et c'est encore saint Thomas qui nous en avertit — est due à l'imagination prenant la place de la raison. « Parce que, dit le saint Docteur, l'homme désire monter en grade ou en dignité, dans l'ordre de certains biens accidentels qui peuvent croître sans que le sujet soit détruit, on a pensé qu'il pouvait — lui ou tout autre être dans la nature — « aspirer à un degré de nature » ou d'espèce « plus élevé, auquel il ne pourrait parvenir qu'en cessant d'exister ou d'être » lui-même. Et un tel désir, une telle aspiration, serait chose monstrueuse, absolument contre nature (I, q. 63, a. 3).
Et voilà — notons-le en passant — sur quel fondement repose, — vue des yeux de la raison philosophique, — toute la doctrine de ce qu'on a appelé l'évolution des espèces. Il n'en est pas qui soit plus antirationnelle, antinaturelle, allant tout ensemble contre la raison même de transformation substantielle et contre ce qu'il y a de plus foncier, de plus radical, de plus irréductible, de plus inaliénable, dans les aspirations naturelles de tous les êtres qui sont.
Il est vrai qu'il sera une raison qui expliquera l'ascension graduée des diverses espèces dans le monde de la nature, et une aspiration ou une volonté qui aura réalisé cette gradation. Mais cette raison et cette aspiration ne seront pas dans les êtres de la nature. Elles seront dans l'Intelligence sage qui aura établi d'une façon graduée le plan de ces espèces et qui l'aura établi avec un telle perfection de sagesse que c'est à peine si l'on pourra distinguer le passage d'un degré à l'autre, tant sera ménagée la transition de l'une à l'autre; et la réalisation en sera due à la volonté toute-puissante qui aura fait passer de la puissance à l'acte chacune de ces espèces, chacune de ces natures selon le degré ou la limite d'être qui leur appartient en propre.
Que, dans cette réalisation, pour le monde de la nature ou des êtres mobiles que sont les corps, il y ait un sujet où se seront déroulées, ou se déroulent et se dérouleront encore, tant que durera l'état du monde actuel, ces diverses manifestations d'espèces graduées et ascendantes, avec des phases d'ailleurs très diverses, selon les divers âges du monde, rien de plus conforme aux exigences de la raison philosophique, aux constatations de la science expérimentale, et, nous aurons à le dire plus tard, aux données de la foi. Mais ce sujet n'est pas un être préalable ou préjacent, qui aurait lui-même en lui-même une nature propre. Il n'est qu’un fond de puissance, qui, de soi, n'est rien de déterminé dans le monde des corps, mais qui, par cela même, peut recevoir toutes les déterminations, et devenir successivement ou alternativement toutes choses, dans l'ordre des êtres corporels, à mesure ou selon qu'il se trouvera uni à tel ou tel principe formel, le constituant dans telle espèce ou dans telle autre.
Ce fond merveilleux que le génie d'Aristote a été le premier à découvrir dans le monde de la nature et…
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Louis- Admin
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PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEII. LE MOUVEMENT (suite)
Ce fond merveilleux que le génie d'Aristote a été le premier à découvrir dans le monde de la nature et que le génie de Thomas d'Aquin a su mettre en si vive lumière, n'est pas autre que cette mystérieuse matière première, conçue non pas seulement comme principe indispensable pour expliquer la nature du corps, ainsi que nous l'avions établi dans notre précédente étude — et qui s'imposerait toujours inéluctablement, même dans l'hypothèse des atomistes excluant toute transformation substantielle et n'admettant qu'une seule substance, celle des atomes, avec la seule modification accidentelle tout extérieure du mouvement local ; — mais aussi, conçue comme premier sujet de ces transformations autrement profondes, qui vont jusqu'à changer le corps, l'être corporel, en lui-même, dans son être propre, non pas seulement accidentel, mais substantiel, et amènent ces merveilleuses variétés ou diversités d'êtres qui constituent le tout du monde de la nature : transformations dans lesquelles une partie substantielle, un principe essentiel de l'être corporel est atteint et disparaît pour faire place, dans le sujet potentiel premier qui demeure toujours, à travers toutes les transformations, à un nouveau principe essentiel qui constituera une nouvelle substance, un nouvel être dans ce même monde des corps.
Et c'est, précisément, en raison de ces changements substantiels, atteignant l'être corporel au plus profond de lui-même et dissociant ou associant ses principes essentiels constitutifs, que le corps, l'être corporel, mérite d'être appelé, dans son sens plein et entier, du nom d'être mobile, par lequel le désignent toujours Aristote et Thomas d'Aquin.
L'être mobile, en effet…
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Louis- Admin
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PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEII. LE MOUVEMENT (suite)
L'être mobile, en effet, n'est pas autre que l'être qui est, mais dont l'être même est soumis au mouvement; du moins, à prendre l'être mobile dans son sens le plus profond et le plus formel. Il est bien vrai que même l'atome intransformable des atomistes, dès là qu'il est un corps soumis au mouvement local, peut être appelé du nom d'être mobile.
Toutefois, ce nom d'être mobile conviendra par excellence à l'être dont la substance composée de deux principes essentiels, a ces deux principes dans un tel rapport que le principe formel spécifique peut être séparé du principe matériel potentiel, et, par le fait même, non pas seulement changer de place ou de lieu comme dans le mouvement local, ou même d'état accidentel dans l'ordre de ses qualités, comme il arrive par le mouvement d'altération, mais cesser d'être purement et simplement pour faire place à un être nouveau qui lui succède dans le monde des corps : ce qui est le propre de la transformation substantielle.
Toute la suite de nos études aura pour objet la connaissance de ces transformations substantielles ou des êtres divers qui en résultent dans le monde de la nature.
A SUIVRE : PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE— III. Les causes.
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Louis- Admin
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PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEIII. LES CAUSES
Un premier regard jeté sur le monde qui nous entoure et au milieu duquel nous vivons, dont nous faisons partie nous-mêmes, nous a fait saisir tout de suite que ce monde est constitué par un ensemble d'êtres ou de choses à dimensions, c'est-à-dire d'êtres ayant pour caractéristique propre l'étendue. Car c'est cela que signifie le mot corps : un être doué d'étendue. Appliquée à cet être, la raison philosophique a immédiatement dégagé cette première conclusion, d'une portée immense : que tout corps est composé de deux principes essentiels, justement appelés par Aristote : la matière et la forme, à prendre ces mots non pas dans un sens accidentel et second, si l'on peut ainsi dire, mais dans le sens le plus profond, qui va jusqu'à l'essence de la chose substantielle qu'est l'être corporel.
Si les corps nous apparaissent tout de suite avec l'attribut caractéristique de l'étendue, ils nous apparaissent presque en même temps, du moins en telles ou telles de leurs individualités ou de leurs catégories, comme soumis au mouvement. Nous constatons qu'ils changent de place, qu'ils changent d'état, qu'ils changent même de nature. C'est pour traduire ces changements, que nous parlons de mouvement local, de mouvement d'altération, de mouvement de transformation substantielle.
La raison philosophique, bien loin de s'opposer à la vérité…
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Louis- Admin
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Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEIII. LES CAUSES (suite)
La raison philosophique, bien loin de s'opposer à la vérité de ces mouvements, les a reconnus tous trois nécessaires pour expliquer les faits dont nos sens témoignent. Elle montre d'ailleurs leur parfaite harmonie avec la nature du corps telle que nous l'avions pu découvrir et formuler dès notre premier contact avec le monde des corps. Puisque le corps est un composé de deux principes essentiels, qui, par leur union, constituent son être, nous comprenons, sans aucun effort, que ces deux principes puissent être séparés : ce qui amène nécessairement un changement d'essence parmi les êtres corporels : et c'est cela même que nous appelons du nom de transformation substantielle. Cette transformation implique, comme les mots même l'indiquent, qu'une forme substantielle fait place à une autre forme substantielle. Toutes deux ont pour sujet commun la matière première, qui, n'étant pas, de soi ou déterminément, fixée à l'une ou à l'autre, peut, successivement ou alternativement, les recevoir l'une et l'autre. Et c'est à cette succession de formes substantielles dans le sujet commun de la matière première, que se ramène, en son sens le plus profond, toute l'économie de ce que nous appelons en philosophie la science de l'être mobile et, dans l'acception ordinaire des mots, la science de la nature.
Par la composition du corps, nous expliquons la possibilité radicale des changements dont il s'agit. Mais pour que ces changements se produisent en fait, la seule considération des deux principes essentiels reconnus par la raison philosophique ne saurait suffire. Ces deux principes, nous l'avons dit, sont essentiels à l'être corporel. Ils le constituent dans son essence, dans sa nature. Ils sont donc, pour lui, et au plus haut point, intrinsèques. Leur action directe, comme principes d'essence et de nature, est de faire, par leur union, que l'être corporel soit. Ils suffisent, dès là qu'ils sont et qu'ils sont unis — d'ailleurs, ils ne peuvent être, dans la réalité des choses, que s'ils sont unis —, pour expliquer l'être du corps, de tel corps. Ils ne sauraient, par eux-mêmes, sans rien autre, expliquer soit les déplacements, soit les divers états, soit plus encore la venue à l'être ou la disparition du sujet qu'ils constituent.
Et, de fait, …
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Louis- Admin
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Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEIII. LES CAUSES (suite)
Et, de fait, aucun de ces êtres corporels ne change de place, aucun d'eux ne change d'état, à plus forte raison, aucun d'eux n'apparaît nouvellement parmi les êtres corporels ou ne disparaît du milieu de ces êtres corporels, sans que nous constations le plus souvent et sans qu'il doive demeurer toujours possible en soi de constater l'action de quelque autre sujet qui existera, distinct du premier, dans le monde des corps : avec ceci d'ailleurs qu'au terme de la ligne des sujets pouvant et devant expliquer ces changements, par leur action, dans le monde des corps, se trouvera et ne pourra pas ne pas se trouver l'action de quelque sujet d'un autre ordre qui n'appartiendra plus au monde des corps.
Qu'il en soit ainsi, que tout changement, parmi les êtres qui composent le monde des corps, exige l'action ou l'intervention d'un sujet distinct du sujet où le changement se produit, les sens eux-mêmes sont là pour en témoigner, et la raison philosophique le démontre, surtout quand il s'agit du plus universel de ces changements, savoir le mouvement local affectant ou pouvant affecter tout corps, quel qu'il soit, du simple fait qu'il est un corps.
Nous savons, en effet, que le corps, comme tel, dit simplement un être à dimensions. Or, un être à dimensions, si nous ne considérons en lui que cette raison d'être à dimensions, nous apparaît comme une masse essentiellement inerte, c'est-à-dire immobile. A supposer qu'elle occupe une place, telle place, elle y demeure, et, de soi, y demeurerait toujours, à moins que quelque chose d'extérieur à elle ne vienne agir sur elle, la pousser, l'ébranler, la mouvoir, la changer de place.
Il est vrai qu'il y a des êtres corporels…
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Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEIII. LES CAUSES (suite)
Il est vrai qu'il y a des êtres corporels qui se meuvent ou changent de place, indépendamment de cette action physique extérieure qui consisterait à les pousser , comme nous venons de le supposer pour la masse à dimensions. Tels sont les êtres vivants dont nous aurons à parler dans la suite et qui se meuvent eux-mêmes d'un mouvement de progression, allant et venant comme il leur plaît. — Mais il faut remarquer que ces êtres corporels se meuvent eux-mêmes d'un mouvement de progression, allant et venant comme il leur plaît. — Mais il faut remarquer que ces êtres corporels forment une catégorie spéciale d'êtres corporels. Et la propriété qu'ils ont de se mouvoir de la sorte leur vient non pas de ce qu'ils sont des êtres corporels, mais de ce qu'ils sont tels êtres corporels appartenant à telle catégorie dans le monde des corps. Si l'animal peut aller et venir, de lui-même, et changer de place à son gré, sans qu'il y ait à le pousser du dehors, il n'en est pas de même pour la pierre inerte qui repose sur le sol. De soi elle demeurera où elle est, et y demeurerait toujours si quelque chose d'extérieur à elle n'agissait sur elle pour la mouvoir et la changer de place.
Quant à ces êtres corporels qui d'eux-mêmes peuvent changer de place et aller et venir à leur gré, s'ils ont cette prérogative, ce n'est pas, nous venons de le dire, du seul fait qu'ils sont des êtres corporels ou des êtres à dimensions; sans quoi tous les êtres corporels l'auraient pareillement. C'est, nous l'avons dît aussi, parce qu'ils sont tels êtres corporels. D'autre part, nous le savons, par nos précédentes études, tel être corporel n'est tel être corporel qu'en raison de sa forme substantielle. C'est elle qui le distingue, qui le spécifie, qui le fait être de telle espèce dans le monde des êtres corporels. Et parce que la forme substantielle, nous l'avons dit aussi, est reçue dans la matière co-principe substantiel qui a raison de puissance par rapport à elle, il s'ensuit qu'il faut qu'il y ait proportion entre toute forme substantielle et la matière qui la reçoit. Si donc la forme substantielle appartient à un degré d'être plus parfait, si elle porte avec elle ce degré d'être, il faudra que la matière qui la reçoit corresponde à ce degré de perfection. Et parce que les parties quantitatives qui constituent l'étendue relèvent de la matière, ces parties quantitatives devront être tout autres selon qu'il s'agira d'un être corporel ayant telle forme substantielle ou telle autre forme substantielle. De là viendra que pour le vivant dont la forme substantielle aura des perfections telles, comme nous aurons à le dire plus tard, qu'il lui faudra pouvoir aller et venir à son gré, la matière, et, par suite, les parties quantitatives seront disposées de telle sorte que l'une pourra agir sur l'autre et la mouvoir. C'est ainsi que s'explique le fait de son mouvement.
Par où l'on voit que là aussi le principe invoqué et constaté garde toute sa valeur; puisque aussi bien si le vivant se meut, ce n'est point que telle de ses parties se meuve elle-même ; c'est parce que l'une de ses parties en meut une autre. Quant au principe premier qui explique le mouvement, dans l'animal, ce n'est point quelque chose d'étendu ou d'être à dimensions sous cette seule raison d'être à dimensions, sans quoi toutes ses parties auraient le même privilège; c'est, ici encore, en raison d'un quelque chose qui lui vient du principe formel qu'est l'âme du vivant.
Mais peut-être en sera-t-il qui se demanderont…
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Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEIII. LES CAUSES (suite)Mais peut-être en sera-t-il qui se demanderont pourquoi l'on n'admettrait pas qu'il en est de même pour tout être corporel, ou toute partie d'être corporel, surtout si nous raisonnions dans l'hypothèse de l'unique substance corporelle, se ramenant aux parties minuscules de la matière comme l'entendent les atomistes. Pourquoi ne pas admettre que chaque atome a une vertu motrice, dans l'ordre du mouvement local, comme on admet qu'a cette vertu la partie initiale qui cause le mouvement dans l'être vivant. On le pourra d'autant plus, semble- t-il, que, dans chaque atome nous retrouvons, à la lumière de la raison philosophique, une forme substantielle reçue dans la matière première qu'elle détermine dans l'être, dans l'être même d'atome que ces deux principes constituent.
L'hypothèse a le seul tort de confondre l'atome avec l'être vivant. La forme substantielle de l'atome, n'étant pas du même degré que l'âme du vivant, n'a pas besoin d'être unie à une matière qui ait des parties de différente nature. L'atome ne forme pas un tout organique, ayant des parties hétérogènes, dont l'une, plus parfaite, aura raison de principe moteur, par rapport aux autres moins parfaites. L'atome, comme tel, est constitué de parties quantitatives identiques en nature ou homogènes. Dès lors, il n'y a plus à faire pour lui l'hypothèse d'une partie mouvant l'autre.
Il est vrai encore que…
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Il est vrai encore que dans la doctrine aristotélicienne et thomiste de la forme substantielle constituant à titre de principe essentiel, conjointement avec la matière, l'être du corps, nous pouvons et devons admettre que tout corps, par cela seul qu'il a sa forme substantielle, aura raison de principe actif. Seule, la matière première, ou la matière conçue indépendamment de la forme substantielle, est purement passive ou réceptive. Toute forme substantielle ayant raison de principe actuel d'être porte avec elle une source d'activité. De ce chef, l'être corporel le plus infime ne sera pas simplement passif; il sera aussi, d'une certaine manière, actif. Pourquoi, dès lors, ne serait-il pas, lui aussi, principe de mouvement?
Nous l'accordons. Et c'est ici l'un des points où la doctrine aristotélicienne et thomiste se montre, d'une part, supérieure à toute conception purement atomiste ou mécanique du monde de la matière, et, d'autre part, en harmonie parfaite avec les observations des sens ou même de la science expérimentale la plus perfectionnée.
Pour Aristote et saint Thomas, tout corps, du simple fait qu'il est, c'est-à-dire qu'il a sa forme substantielle unie à sa matière et le constituant dans l'être, a, en lui, un principe d'action qui doit lui permettre d'agir et de pouvoir agir, quand il se trouve dans les conditions de milieux propices pour l'exercice de son principe d'action. Mais, qu'on le remarque soigneusement, ce principe d'action n'a pas à s'exercer sur le sujet lui-même; il est fait pour s'exercer sur un autre sujet.
Encore est-il qu'il s'exercera…
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Encore est-il qu'il s'exercera sur tel autre sujet non point par mode d'impulsion, à ne considérer que la raison de corps commune à tout être corporel. Ce principe d'action s'exercera par mode d'action altérante, si l'on peut ainsi s'exprimer. Ce n'est pas un principe de mouvement local, du moins à le considérer dans son action immédiate et directe; c'est un principe de mouvement d'altération. Il agit, non point par lui-même, si nous le considérons sous sa raison de forme substantielle; mais par l'entremise de formes accidentelles qui découlent de la forme substantielle et en sont les propriétés. C'est par ces formes accidentelles, appelées ici du nom de qualités, que la forme substantielle du corps, ou plutôt le corps lui-même agit sur les autres êtres corporels, atteignant directement leurs formes accidentelles ou leurs qualités qui ont raison de qualités passives par rapport à ses propres qualités actives, et tendant par son action à dépouiller ces autres sujets corporels de leur forme substantielle pour y substituer la sienne propre.
On le voit, rien de plus véritable et de plus profond que le principe d'action ou d'activité reconnu, par Aristote et saint Thomas, à tout être corporel, quel qu'il soit, du seul fait qu'il est. Mais ce principe n'a pas, de soi et par le seul fait qu'il est principe d'activité dans l'être corporel, d'exercer son action sur le sujet lui-même ; ni, non plus, d'exercer son action, même quand il agit sur d'autres sujets, par mode de mouvement local.
Il demeure donc que le mouvement local des corps qui sont mus de ce mouvement — à la seule exception des êtres corporels vivants que constituent les animaux — ne s'explique ni ne peut s'expliquer par les principes intrinsèques du sujet qui en est affecté. Par rapport à ce mouvement, l'être corporel ordinaire, ou considéré sous la seule raison d'être corporel, est purement passif.
Cela est vrai surtout dans la conception du monde matériel ou corporel selon que les modernes l'opposent à la conception antique telle qu'Aristote l'avait formulée.
Pour les modernes…
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Cela est vrai surtout dans la conception du monde matériel ou corporel selon que les modernes l'opposent à la conception antique telle qu'Aristote l'avait formulée. Pour les modernes, l'ensemble du monde physique, en ce qui est du mouvement local que nous y constatons, est gouverné par ce qu'on a appelé la loi de la gravitation universelle. Tout être corporel est conçu comme purement passif en lui-même eu égard au mouvement local. C'est ce qu'on appelle l'inertie de la matière. Mais, à l'endroit des autres corps, il est conçu comme doué d'une vertu attractive, dans la mesure où sa masse l'emporte sur celle des autres.
Le globe terrestre, par exemple, est, de soi, inerte, ou indifférent au fait d'être en mouvement. Mais, s'il est mis en mouvement, par l'action d'un moteur quelconque, son mouvement continuera ininterrompu et sans variation aucune, toujours dans la même ligne, à moins qu'un agent extérieur vienne le modifier. En fait, cet agent extérieur existe. C'est le soleil, qui, par sa masse, agit sur le globe terrestre, l'attirant vers lui. Cette attraction, combinée avec le premier mouvement rectiligne, selon la loi du parallélogramme des forces, amène, comme résultat, le mouvement de la terre autour du soleil.
Il est aisé de voir que, dans cette conception, tout être corporel, comme tel, est purement passif en lui-même pour ce qui est de son mouvement local. S'il est mû de ce mouvement, c'est uniquement par l'action de quelque agent ou moteur extérieur qui le lui imprime.
Dans la conception aristotélicienne, le monde corporel formait un tout où chacune des grandes catégories des êtres corporels avait sa place assignée selon sa nature. Par suite, il fallait qu'il eût, dans sa nature même, un principe de mouvement qui le fît se porter à la place qui était la sienne, quand il ne l'avait pas, et s'y reposer quand il l'avait. C'est par là qu'Aristote expliquait les mouvements de ce que nous appelons les corps lourds et les corps légers. Si les uns descendaient ou tombaient et si les autres s'élevaient ou montaient, c'était en vertu de ce principe naturel qu'ils avaient en eux-mêmes.
Toutefois, dans la conception aristotélicienne,…
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Toutefois, dans la conception aristotélicienne, il y avait un corps, ou une catégorie de corps, de beaucoup les plus considérables, qui n'avaient, dans leur nature, qu'une aptitude à être mus du mouvement local qui pouvait leur convenir selon leur nature. C'était ce qu'il appelait les corps célestes, comprenant tout ce qui n'était pas de notre terre ou de notre atmosphère jusqu'à ce qu'il nommait l'orbe de la lune. Ce corps céleste avait comme mouvement naturel, non plus le mouvement rectiligne de bas en haut ou de haut en bas, comme les corps de notre monde terrestre ; mais le mouvement circulaire ou de rotation, consistant en ceci, comme le mot l'indique, que tel orbe ou telle sphère était apte à tourner sur elle-même, transportant avec elle l'astre ou les astres qui lui appartenaient. Mais ce mouvement lui était imprimé par un moteur distinct d'elle, qui présidait à ce mouvement un peu comme notre âme préside au mouvement de son corps : ce qui, du reste, avait amené la question de savoir si, pour Aristote, les corps célestes étaient animés.
Ainsi donc, pour Aristote, le mouvement, tous les mouvements ou changements et mutations que nous constatons dans le monde des corps s'expliquaient par ceci que les corps célestes étaient eux-mêmes mis en mouvement d'un mouvement local circulaire par certains moteurs qui n'appartenaient pas comme tels ou dans leur nature propre au monde des corps. Et c'était ensuite ce mouvement circulaire qui expliquait, par ses diverses combinaisons amenant ce que nous appelons les diverses saisons parmi nous sur notre terre, tous les mouvements ou changements et altérations et transformations substantielles qui constituent la trame de notre monde terrestre.
Il est une partie de cette conception ancienne ou plutôt de son énoncé…
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Il est une partie de cette conception ancienne ou plutôt de son énoncé qui demeure encore aujourd'hui et que tout le monde reconnaît. Nul ne met en doute que les changements constatés sur notre terre n'aient pour cause prépondérante la vertu solaire s'exerçant avec les phases diverses que marquent les saisons, selon que le soleil se trouve plus ou moins rapproché de nous ou exerce son action d'une manière plus rapide ou plus prolongée, restant plus ou moins longtemps au-dessus de notre horizon. Tout cela est incontestable. C'est l'évidence même des faits qui constituent la trame incessante de nos journées.
Mais, où l'explication d'aujourd'hui n'est plus celle d'Aristote, c'est quand il s'agit de la distinction des corps célestes et des corps terrestres en ce qui est de la nature de leurs mouvements respectifs et du principe de ces mouvements. La distinction entre les corps qui auraient pour nature de se mouvoir d'un mouvement rectiligne et d'autres corps qui auraient dans leur nature une aptitude au seul mouvement circulaire ou de rotation sur eux-mêmes n'est plus admise. Tous les corps sont conçus comme étant de même nature à l'endroit du mouvement local. Et cette nature, nous l'avons dit, à ne considérer le corps que comme corps, est d'être purement passive à l'endroit de ce mouvement, dans le sujet lui-même. C'est ce qu'on a appelé l'inertie de la matière, entendant par matière, non pas la matière première aristotélicienne, mais la matière seconde ou l'être corporel constitué dans son être corporel par l'union de sa matière et de sa forme. Il est bien évident que l'inertie appliquée au corps ainsi compris ne devra s'entendre que du corps au plus bas degré de l'échelle dans le monde des corps, c'est-à-dire du corps formé ou constitué par la matière première commune à tous les corps et par les plus infimes des formes substantielles; car, à mesure que nous monterions dans l'échelle des êtres corporels, nous constaterions que ce principe de l'inertie ne s'appliquerait plus. Tel, par exemple, le cas des vivants parfaits que sont les animaux ayant dans leur nature de pouvoir se mouvoir eux-mêmes, dans l'ordre du mouvement local, et aller et venir selon qu'il leur plaît.
Du reste, même pour le corps, à son degré infime, l'inertie dont il s'agit ne s'entend que du mouvement local à se donner à soi-même ou à prendre de soi ; puisque, aussi bien, la théorie de l'attraction veut reconnaître, en tout être corporel, un principe actif pouvant amener le mouvement local d'un autre corps inerte ou modifier son mouvement s'il l'a déjà. Et plus l'observation progresse, plus on découvre, dans les êtres matériels qui constituent le monde infime du règne minéral, des principes d'action d'une puissance et d'une variété prodigieuses.
Encore est-il que, soit dans la conception moderne, soit dans la conception antique, il y a un moment où l'explication du mouvement, des mouvements que nous constatons dans le monde des corps, supposera une intervention étrangère à ce monde des corps…
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Encore est-il que, soit dans la conception moderne, soit dans la conception antique, il y a un moment où l'explication du mouvement, des mouvements que nous constatons dans le monde des corps, supposera une intervention étrangère à ce monde des corps. Pour Aristote, cette intervention était celle des moteurs des orbes célestes. Pour la science moderne, l'intervention sera double. L'une, qui devra expliquer la mise en mouvement rectiligne du globe supposé inerte. Et l'autre, qui devra expliquer la vertu motrice, sous forme de principe attractif dans la masse centrale qui brise constamment, par son action, le mouvement rectiligne et amène le mouvement de translation circulaire. Il faudra, du reste, que ce mouvement se combine avec d'autres pour expliquer les diverses phases amenant les diverses saisons dont l'importance est si grande pour toutes les transformations constatées à la surface de notre globe terrestre, surtout parmi les vivants.
Quelles que soient d'ailleurs les modalités selon lesquelles pourra ou devra se concevoir l'intervention d'un principe moteur dans l'ordre des mouvements ou des changements corporels, la nécessité de cette intervention demeure absolue, aux yeux de la raison philosophique, du simple fait que ces mouvements existent. La nature même de l'être corporel, telle que nous la connaissons, exige impérieusement l'intervention d'un moteur extérieur à l'être corporel en mouvement, pour expliquer son mouvement.
A ne considérer que sa raison d'être à dimensions, l'être corporel n'a pas en lui-même un principe qui explique un changement quelconque dans l'ordre de ces dimensions et de la place ou du lieu qu'elles occupent. Si l'on considère son double principe essentiel de matière première et de forme substantielle, comme ces deux principes se trouvent joints et, par leur union, constituent son être, il faudra expliquer le fait de leur union. Il faudra l'expliquer d'autant plus, qu'ils ne sont pas, de soi, nécessairement unis et qu'ils peuvent être séparés, qu'ils le sont même, à tour de rôle, pourrait-on dire, et incessamment dans les transformations du monde de la nature, en ce qui est des divers êtres corporels qui se succèdent. Que ces transformations se produisent, et qu'elles se produisent avec la régularité ou l'ordre que nous constatons, cela prouve manifestement l'intervention, l'action d'un principe moteur qui devra être appelé, de son vrai nom, la cause de ces mouvements : cause qui pourra être multiple selon que le champ de ces transformations sera plus ou moins vaste, plus ou moins varié ; mais ces multiples causes devront cependant demeurer dans une certaine liaison entre elles et subordonnées ou hiérarchisées jusqu'à une première cause de ces mouvements et de ces transformations, expliquant, par son action souveraine, l'ordre qui y préside.
Qu'un être à dimensions, comme est tout être corporel, soit mû d’un mouvement local,…
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PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUEIII. LES CAUSES (suite)Qu'un être à dimensions, comme est tout être corporel, soit mû d'un mouvement local, si nous ne considérons que ses dimensions en elles-mêmes, nous n'y pouvons trouver la raison du mouvement qui en affecte le sujet. Dans telle catégorie d'êtres corporels, comme sont les vivants de la vie sensible parfaite, animaux et êtres humains, le mouvement local dont nous voyons qu'ils sont mus pourra s'expliquer par un principe qui est intrinsèque au sujet; mais ce sera en raison de la diversité des parties matérielles qui composent un tel sujet et qui font que l'une de ces parties a raison de principe moteur par rapport aux autres. En ces sortes d'êtres, le principe intrinsèque de mouvement se rattache à l'excellence de l'un des deux principes essentiels qui les constituent, savoir la forme substantielle, appelée du nom d'âme. On peut dire aussi qu'en tout être corporel, à le considérer du côté de son principe essentiel qu'est la forme substantielle, même dans le degré le plus infime des êtres corporels, il y a un certain principe de mouvement ou d'action à l'endroit des changements ou mutations d'ordre corporel. Mais, à la différence des vivants dont nous parlions tantôt, ce principe de mouvement ou de changement n'a pas d'agir sur le sujet lui-même : il a son action à l'endroit d'un sujet extérieur.
Par où nous voyons qu'à parler d'une façon pure et simple, les mouvements ou changements que nous constatons dans le monde des corps exigent, en plus des deux principes essentiels qui se trouvent en chaque être corporel, l'action ou l'intervention d'un autre ordre de principes, extérieurs au sujet lui-même, que ces principes soient eux-mêmes d'ordre corporel et se rattachent à un sujet de même espèce ou d'espèce supérieure, ou qu'ils soient d'ordre transcendant et appartiennent à un autre monde que le monde de l'être mobile, au sens aristotélicien de ce mot. Et nous aurons à établir, en effet, bientôt, qu'en dehors et au-dessus du monde de l'être mobile se trouve ce que nous appellerons, toujours avec Aristote et saint Thomas, le monde de l'être tout court.
C'est de ce monde de l'être que devra partir en dernière analyse et en première source tout ce qui a trait à l'économie des mouvements et des changements que nous constatons dans le monde des corps.
Mais…
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Mais en remontant à cette première source ou à cette première origine dans l'ordre des principes extérieurs du mouvement, que nous appelons du nom de cause, à prendre ce mot dans le sens de cause efficiente ou motrice, nous trouverons aussi, comme dans sa première source et dans son origine, un autre genre de cause, qui s'ajoutera à celles que nous connaissons déjà et dont nous avons vu l'absolue nécessité pour expliquer ce que nous constatons dans le monde des corps. Je veux parler de la cause finale.
À vrai dire, et si nous y prenons garde, c'est cette cause-là, et elle seule, qui sera le dernier mot de tout, pour notre raison philosophique, dans le domaine des faits constatés par nous dans ce monde des corps.
Pour expliquer le mouvement, le mouvement local consistant dans le déplacement de tel être corporel, il fallait évidemment que nous eussions, comme sujet de ce mouvement, un être à dimensions , un corps étendu et limité : être à dimensions ou corps dont nous avons dit qu'il ne pouvait se concevoir, aux yeux de la raison philosophique, sans l'union en lui de deux principes essentiels constituant sa nature, que nous avons appelés des noms de matière première et de forme substantielle. Ces deux principes nous donnaient déjà un double genre de causes : la cause matérielle et la cause formelle. Leur rôle était tout intrinsèque. Il consistait à faire que par leur union l'être corporel soit lui-même. Et il est vrai que, du fait que ces deux principes essentiels ou ces deux causes sont dans le rapport d'union qui doit être le leur, l'être corporel existe : il est constitué par cette union.
Mais comme cette union n'est pas chose qui s'explique toute seule ou d'elle-même…
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Mais comme cette union n'est pas chose qui s'explique toute seule ou d'elle-même; qu'elle pourrait ne pas être, qu'elle peut avoir commencé d'être, qu'en fait, pour beaucoup d'êtres corporels que nous connaissons, elle a commencé d'être et qu'elle doit cesser d'être, il faut chercher, en dehors des deux principes ou des deux causes intrinsèques qui l'expliquent quand elle est, un autre genre de principe ou de cause qui expliquera qu'elle soit, qu'elle ait commencé d'être ou qu'elle cesse d'être.
Ce nouveau genre de principe ou de cause est celui de la cause efficiente. Il est, évidemment, extérieur au sujet lui-même dont il s'agit d'expliquer les changements, du moins s'il s'agit du changement qui consistera dans la nouvelle apparition de tel être parmi les corps. Pour agir, en effet, il faut être. Et, par hypothèse, il s'agit d'un être corporel qui n'était pas, dont il faut expliquer l'être nouveau. La cause de ce changement, celle qui amènera l'être nouveau qui n'était pas, devra être de toute nécessité une cause distincte des deux causes qui constitueront cet être quand il sera et que nous appelons les causes matérielle et formelle de cet être.
Il se pourra que la cause nouvelle dont nous parlons, distincte de la cause matérielle et formelle, soit elle-même une cause de même nature. Et, par exemple, s'il s'agit d'expliquer l'apparition nouvelle d'un foyer de chaleur, d'une plante, d'un animal, d'un être humain, nous aurons, comme principe ou cause efficiente, un foyer de chaleur de même nature, une plante, un animal, un être humain, ou plusieurs unis ensemble et constituant, par leur union, un seul et même principe de l'être nouveau. Il se pourra aussi et nous avons dit qu'à la première origine de cette sorte de causes il faudra que nous trouvions, exigée par notre raison philosophique, une cause transcendante, d'une autre nature que l'être matériel produit : laquelle, nous l'avons dit aussi, devra expliquer, par son action souveraine et universelle, le côté harmonieux et hiérarchisé que nous constatons dans l'ensemble des êtres corporels ou de leurs actions selon qu'ils concourent eux-mêmes à la manifestation des changements et des transformations existant parmi eux.
Et ce sera surtout dans l'ordre de cette cause efficiente…
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Et ce sera surtout dans l'ordre de cette cause efficiente transcendante que nous devrons reconnaître, de toute nécessité, une raison, un motif, un but, une fin présidant à son action. Par cela même, en effet, que cette action s'exerce d'une manière ordonnée et non pas au hasard, c'est qu'un but, une intention y préside; puisque aussi bien, par définition, le hasard est ce qui se produit en dehors de tout ordre voulu.
Si la cause première, dont l'action souveraine explique seule, en dernier ressort, tout ce qui nous apparaît dans le monde de la nature, a établi ce monde tel que nous le voyons, avec l'ordre parfait dont la suite de notre élude nous révélera la splendeur et l'harmonie, elle avait un but, une fin, une intention qu'elle se proposait de réaliser. Et c'est ce but, cette fin, cette intention, que nous appelons du nom de cause finale. Elle-même, la cause efficiente, n'a agi que pour réaliser cette fin. D'où il suit, manifestement, que, sans cette fin, elle n'aurait pas agi.
C'est donc bien la cause finale qui a mû — pour autant que nous pouvons parler ici de motion — la cause efficiente à agir.
Et puisque c'est la cause efficiente qui explique, à son tour, les causes matérielles et formelles dont l'union constitue tous les êtres matériels que nous voyons et dont les propriétés, à leur tour, actives ou passives, entrant en jeu, parmi ces divers êtres, sous l'action première et souveraine de la première cause efficiente, expliqueront, en ce qui est de la part d'action revenant à chacun de ces êtres, toutes les manifestations, toutes les transformations, tous les changements du monde de la nature, c'est donc bien la cause finale, agissant sur cette première cause efficiente, qui sera la cause par excellence, la cause des causes, comme on a pu justement l'appeler.
Et parce que la science…
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