LA RELIGION DE COMBAT PAR L’Abbé Joseph LÉMANN

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Message  Monique Mer 31 Jan 2024, 7:51 am

Il n’y a pas de missionnaire qui n’ait eu, à l'aurore de sa vocation, cette vision de saint François Xavier dont on soutient les bras : et ces bras qui se fatiguaient l’ont enthousiasmé ! Se tournant vers son crucifix, le jeune prêtre s’est levé et il a dit à son divin Maître : « O mon Sauveur, vous, le premier, vous avez fatigué vos bras en les étendant sur le monde ; les miens aussi se fatigueront pour vous; et il est parti. Et lorsqu'après bien des voyages, des fatigues, et aussi, peut-être, bien des déboires et des espérances déçues, la lassitude commençait à le gagner, tout à coup une douce apparition s’est approchée de lui et soutenait ses bras : c'était la charité de ses amis d’Europe qui venait à son secours ! Oui, il y a des heures où le missionnaire n’en peut plus, où l’angoisse oppresse son âme, où la foi et l'espérance sont comme en pleurs à ses côtés : que ferait-il alors s’il n’y avait pas la charité, s’il ne lui venait de son pays natal, de sa France, des lettres qui lui disent qu’on l’admire, et des secours qui lui prouvent qu’on est avec lui ! Alors le pauvre missionnaire reprend courage ; il sent qu’il peut continuer, qu’il est soutenu contre la défaillance. A ce moment, c’est la vision de saint François Xavier dans les plaines de Travancor, admirée, enviée, par le missionnaire 1 dans son enfance, qui se réalise aussi pour lui : la douce charité a soutenu ses bras !


1 Le tableau suivant de Louis Veuillot est bien touchant, quoiqu'un peu sombre ! « Ce que le missionnaire apprend, c'est l'art de mourir à tout, et tous les jours et toujours !

« Il meurt d’abord à sa famille selon la chair; il la quitte, il ne lui appartient plus, et, selon toute apparence, il ne la reverra plus. Il meurt ensuite à ses frères selon l’esprit, parmi lesquels il s'est engagé pour prendre une part de leurs travaux : il quittera aussi cette seconde maison paternelle, et probablement pour n' y plus rentrer. Il meurt encore à la patrie : il ira sur une terre lointaine, où ni les cieux, ni le sol, ni la langue, ni les usages, ne lui rappelleront la terre natale ; où l'homme même, bien souvent, n’a rien des hommes qu'il a connus, sauf les vices les plus grossiers et les plus accablantes misères.

« Et quand ces trois séparations sont accomplies, quand ces trois morts sont consommées, il y en a une autre encore où le missionnaire doit arriver et qui ne s'opérera pas d'un coup, mais qui sera de tous les instants, jusqu’à la dernière heure de son dernier jour ; il devra mourir à lui-même, non seulement à toutes les délicatesses et à tous les besoins du corps, mais à toutes les nécessités ordinaires du cœur et de l'esprit.

« Le missionnaire n’a pas de demeure fixe, pas d'asile passager, pas une pierre où reposer sa tête; il n'a pas d’ami, pas de confident, pas de secours spirituel permanent et facile. Il court à travers de vastes espaces. Quelques chrétiens caches sur un territoire immense, voilà sa paroisse et son troupeau. Il en fait la visite incessante à travers des périls incessants. Trois sortes d’ennemis l'entourent sans relâche : le climat, les bêtes féroces, et, les plus cruels de tous, les hommes. Si Dieu lui impose encore l'épreuve d'une longue vie, il vieillira dans ce dénuement terrible, et chaque jour l'amertume des ans comblera et fera déborder le vase de ses douleurs. Il n'aura plus cette vigueur et ces ardeurs premières qui donnent un charme à la fatigue, un attrait au danger, une saveur au pain de l’exil. Il se traînera sur les chemins arrosés des sueurs de sa jeunesse, et qui n'ont pas fleuri. Il portera dans son âme ce deuil, qui fut le fiel et l’absinthe aux Lèvres de l'Homme-Dieu, le deuil du père qui a enfanté des fils ingrats !

Contemplant ce peuple toujours infidèle, énumérant les lâchetés, les obstinations, les refus, les ignorances coupables, les perversités renaissantes, hélas! les apostasies, voyant le sang de Jésus devenu presque infécond par l’effet de la malice humaine, il baissera la tête, et il entendra dans son cœur un écho de l'éternel gémissement des envoyés de Dieu : Curavimus Babylonem, et non est sanata. Ainsi s’achèveront ses jours, fanés presque des l’aurore : Dies mei sicut unibra declinaverunt, et ego sirut fœnum arui. Ainsi il attendra que son pied se heurte a la pierre où il doit tomber, que sa vie s'accroche à la ronce où elle doit rester suspendue : une masure, une cachette au fond des bois, un fossé sur la route. Car le cimetière même, cet asile dans la terre consacrée, le missionnaire ne l’a pas toujours. Trouvant à mourir jusque dans la mort, il se dépouille aussi du tombeau.»


Louis Veuillot.



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Message  Monique Jeu 01 Fév 2024, 7:07 am

CHAPITRE V

LES SÉRAPHINS DE LA TERRE


******


I. Aveuglement, et même effroi, chez les chrétiens relativement à ce rôle, le plus beau dans l’Église parce qu’il fait pendant à celui des Séraphins dans les cieux. —II. Une étincelle (l'amour qui, se détachant des Séraphins des cieux, prend la direction de la terre : elle se dirige vers l'innocence, et aussi vers le repentir. — III. Ce qui constitue les séraphins de la terre : premièrement, la soif de Dieu; le cantique du cerf altéré traduit en action. — IV. Deuxièmement, la tendresse pour Dieu et pour Jésus : explication des blessures au cœur. — V. Troisièmement, le sentiment de l'indignité : la confusion des séraphins de la terre, heureux contrepoids à l'orgueil du monde. — VI. Quatrièmement, l'amertume de l'exil et l'ardeur vers la patrie des cieux : mélancolie et fierté des filles de Sion auprès des fleuves de Babylone perpétuées par les vierges chrétiennes. — VII. Cinquièmement, l’acceptation magnanime de la souffrance, comme moyen d'aimer Dieu : l’amour ne vaut qu'autant qu'il sait souffrir; et comme moyen d'aider au salut des pécheurs : le vol des séraphins de la terre dans les abîmes de la perdition, dernier effort de l'amour.


I

Nous sommes à une époque où l’égoïsme glace les âmes. Quelle immense multitude, un effet, d'âmes glacées, froides connue le métal qu'elles poursuivent avec avidité ! C'est en pensant à ces âmes que Bossuet déjà de son temps : Je mets en tremblant les mains sur l'avenir.

Il faut absolument combattre ces tendances désastreuses. Un des moyens les plus efficaces pour les combattre est d’opposer aux âmes glacées des âmes séraphiques.

Dans la belle année des enfants de lumière, ce sont les âmes séraphiques qui occupent le rang d'honneur et remplissent le rôle le plus excellent.

Et cependant, beaucoup de familles même très chrétiennes se soucient peu d’un pareil rang d’honneur et disputent avec Dieu à propos de ce rôle : elles craignent que leurs enfants deviennent des séraphins 1.

O aveugles! vous n’avez jamais compris la célèbre vision du Prophète dont l’Eglise catholique a été héritière, et qu’elle consulte et rappelle avec allégresse toutes les fois qu’elle établit un couvent.

« Je vis le Seigneur assis sur un trône sublime et élevé, et le bas de son vêtement remplissait le temple: « Des séraphins étaient autour du trône, ils avaient chacun six ailes; avec deux d'entre elles, ils se voilaient le visage, avec deux autres, ils se couvraient les pieds ; ils volaient avec les deux dernières. « Et ils se disaient l'un à l'autre : Saint, Saint, SAINT EST LE SEIGNEUR, LE DIEU DES ARMÉES ; toute la terre est pleine de sa gloire 2. »


1 Notre froide société confine à deux égoïsmes, par rapport aux enfants : l’un les enlève à Dieu, l’autre les lui refuse.
2 Isaïe , chap. VI.




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Message  Monique Ven 02 Fév 2024, 8:12 am

Les âmes séraphiques, enveloppées de leurs voiles, adorent sur la terre, comme les séraphins, enveloppés de leurs ailes, adorent dans les cieux.

Quelle est, d’une façon précise, la fonction des séraphins dans les cieux ? De plus, ont-ils des rapports avec les hommes ?

Les séraphins ont pour fonction, dans l'armée céleste, d’exprimer l’amour ; ils sont composés d’amour : heureux séraphins ! Ce sont des foyers où le nom de Jéhovah est entouré d’ardeurs inénarrables. Le buisson ardent n’a paru qu’un instant sur la montagne d'Horeb : au ciel, il est éternel, et c’est le rôle des séraphins de brûler devant le Seigneur comme brûlait le buisson ardent.

Mais leur fonction ne se borne pas à brûler d’une façon solitaire. Dans l'œuvre divine, tout est commun au moyen de la hiérarchie ; le bien fait la cascade, on reçoit pour communiquer plus bas. C’est pourquoi les séraphins ont encore pour fonction de faire descendre sur d’autres leurs ardeurs séraphiques. Ce sont des foyers de flammes : il s’en échappe des milliards d’étin celles, et ces étincelles de l'amour se répandent sur les anges des ordres inférieurs d'abord, puis parviennent jusqu'aux humains.


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Message  Monique Sam 03 Fév 2024, 6:03 am

II

Je me représente une de ces étincelles merveilleuses dont je viens de parler, se détachant de ces foyers d'ardeur qui sont devant la face de Dieu, les séraphins : une étincelle qui se détache d’eux et qui prend la direction de la terre... sur qui va-t-elle tomber ? Qui va devenir une âme séraphique ?

Est-ce seulement quelque âme pure, une âme dont les joies auront toujours été naïves, dont les sentiments auront toujours été délicats ? Il semble que cela devrait être, mais l’adorable Miséricorde en a jugé autrement. Disons tout de suite, pour la consolation des âmes égarées et repentantes, que l’étincelle des séraphins va chercher la boue non moins que le nid de colombes, la pauvre feuille tombée et décolorée non moins que le lis éclatant de blancheur. Le divin Maître, en effet, n’a-t-il pas eu avec le Pharisien ce sublime dialogue, le jour où Marie Madeleine se repentait à ses pieds :

« Simon, j'ai quelque chose à le dire. » Et Simon lui dit: « Maître, dites. »

— « Un homme avait deux débiteurs, l'un qui lui devait cinq cents deniers, et l'autre, cinquante. « Ni l'un ni l'autre, n'ayant de quoi lui rendre, il remit à tous les deux leur dette. Lequel donc des deux l'aime le plus?

— Simon répondit : « Je pense que c'est celui auquel il a remis davantage.

— Et Jésus lui dit : « Tu as bien jugé. »


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Message  Monique Dim 04 Fév 2024, 9:35 am

Tu as bien jugé. Depuis cette sentence rendue au festin du Pharisien, il s’est formé deux phalanges d’âmes séraphiques : l’une où l’étincelle des séraphins vient chercher les âmes innocentes, récompense de leur innocence ; l'autre, où l’amour séraphique s’allume dans des âmes longtemps pécheresses, chez lesquelles il devient l’expression touchante de leur reconnaissance et de leur réparation ; deux phalanges, mais qui se réunissant et se confondent dans l’amour, devenu leur confluent.

Il est utile, il est doux d’insister sur cette pensée qui est extrêmement consolante : une âme pécheresse, mais repentante, peut aimer Dieu séraphiquement, et cela, parce que Jésus a dit au pharisien : tu as bien jugé; en vertu de ce décret de la Miséricorde, l’étincelle des séraphins descend sur la pauvre feuille morte non moins que sur le lis en fleur ! Oh ! qu’une telle pensée est consolante : je puis aimer Dieu séraphiquement, malgré mes fautes !

La Providence permettra peut-être qu’une âme désespérée lise ces lignes; je l’en supplie, qu’elle ne doute pas de la possibilité de cette transition : de la boue à l’ardeur des séraphins! Et si un dernier encouragement lui est nécessaire, qu’elle l’accueille dans ces mots : N'éteignez pas la mèche qui fume encore. C’est Jésus également qui a usé de cette comparaison si expressive : N'éteignez pas la mèche qui fume encore ! N’éteignez pas : la voici qui se rallume, qui reprend, elle brille, elle s’élance... Chère âme rallumée, revivifiée par la miséricorde, prends courage, développe-toi! ton amour peut même surpasser celui des âmes innocentes.

Et ainsi pour la formation d’une âme séraphique, toute âme est bonne, n’importe quelle âme ; l’étincelle céleste descend avec liberté.


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Message  Monique Lun 05 Fév 2024, 8:04 am

III

Voilà donc l’étincelle des séraphins qui prend la direction d'une âme, innocente ou repentante selon le choix de Dieu : examinons maintenant ce qu’elle va produire en elle. Elle allume en cette âme des sentiments de flamme, des énergies qui constituent essentiellement les séraphins de la terre.

Le premier est la soif de Dieu. Sainte Thérèse exprime ainsi cette soif. « Du brasier « divin est tombée l'étincelle qui m’embrase tout entière. Oh ! combien de fois, livrée à ce suave tourment, me suis-je souvenue de ces paroles de David : « Comme le cerf (altéré) soupire après une source « d'eau vive, ainsi mon âme soupire vers vous, Ô mon « Dieu. » Cette soif dont parle sainte Thérèse, si bien exprimée par David sous l’image du cerf haletant, a été ressentie par toutes les âmes séraphiques. Elles ont soif de Dieu, comme les mondains ont soif de plaisirs. Ce sont des âmes altérées : altérées de l’invisible, de l'infini, de l’éternelle Beauté, de l’éternel Amour ! Elles ont un feu intérieur, duquel procède leur soif.

Lorsque saint Louis de Gonzague, lorsque saint Philippe de Néri, au sortir de leurs méditations ou de leurs extases, étaient contraints de s’appliquer des linges d’eau glacée sur la poitrine pour modérer et calmer les ardeurs qui les dévoraient, ils ne faisaient que traduire en acte ce soupir du Prophète royal, éternel soupir des séraphins de la terre: Comme le cerf haletant soupire après la fontaine d'eau vive, ainsi mon âme vous demande, Ô mon Dieu. Oui, les âmes séraphiques sont des âmes altérées de Dieu !

O fils des Nations chrétiennes, de la Nation française, respectez et protégez, dans celles de vos sœurs ou de vos filles qui seraient des séraphins de la terre, cette soif de Dieu !


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Message  Monique Mar 06 Fév 2024, 7:49 am

IV

Le deuxième sentiment qui caractérise ces âmes est la tendresse pour Dieu, pour Jésus. La plupart du temps, on aime Dieu, mais sans aller jusqu’à la tendresse. La tendresse est un amour qui se sent profondément au cœur, s’identifie vraiment avec notre cœur, le résume tout entier, l’exprime tout entier. Lorsqu’on aime Dieu tendrement, on a besoin de le lui exprimer : par la parole, par l'empressement à le contenter, par la jubilation de se sentir à son service. On lui répète souvent qu’on l’aime. On lui dit : mon Maître, mon bon Maître, mon très bon Maître. Hélas ! d’ordinaire, Dieu est aimé froidement, sèchement, courtement; notre amour a de la peine à aller jusqu’à la tendresse. Il n’en est pas ainsi chez les âmes séraphiques. Elles aiment Dieu tendrement, affectueusement, longuement. elles le lui disent pendant des heures entières. L’étincelle qui les a pénétrées attendrit, liquéfie leur cœur, parce que c’est la propriété du feu de liquéfier, d’attendrir. Aussi, quelle belle collection on ferait des soupirs exhalés par ces âmes, des traits de flamme échappés à leurs lèvres ! Le ciel les racontera tous ; en voici quelques-uns :

C’est quelque chose de beau d’avoir un cœur, et tout petit qu'il est, de pouvoir s’en servir pour aimer Dieu : pensée du curé d’Ars. Il y avait dans la manière dont il prononçait l’adorable nom de Jésus et dont il disait : Notre-Seigneur! un accent dont il était impossible de n’être pas frappé : il semblait que son cœur se répandît sur ses lèvres. Il appelait la sainte communion un bain d’amour. Lorsqu'on a communié, disait-il encore, l’âme se roule dans le baume de l'amour comme l’abeille dans les fleurs.

Saint Bonaventure, le docteur séraphique, disait : O mon très cher Seigneur, si j ’avais été la pierre et la terre où fut plantée votre croix, quelle grâce et quelle consolation j ’aurais eues de recevoir le sang qui coulait de vos blessures. Si j ’avais été le fer de la lance, je n’aurais jamais voulu sortir de votre cœur!...

Que d’âmes tendres ont envié la fonction de la petite lampe solitaire qui brûle et la nuit et le jour devant Jésus-Hostie. « O lampe, que tu es heureuse de ne pas le quitter! Que ne suis-je de la nature de l’huile pour me consumer en son honneur! » Et celle qui a été l’ostensoir de son divin Cœur, la bienheureuse Marguerite-Marie, quels n’ont pas été ses épanchements de tendresse séraphique ? Qui nous empêchera, disait-elle souvent, d'être saintes, puisque nous avons des cœurs pour aimer et des corps pour souffrir!... Elle disait encore : Pour aller à Jésus-Christ, s'il me fallait marcher sur un chemin de flammes, il me semble que cette peine ne me serait rien.

Entreprendre de citer les accents de tendresse de sainte Thérèse serait se perdre dans la beauté et en multiplicité des citations. Je rapporterai seulement le mot incomparable de Notre-Seigneur lui-même, qui s’est annoncé comme devant être un jour le panégyriste de l’amour de Thérèse : « O ma fille, j'attends le jour du jugement pour faire voir aux hommes combien tu mas aimé! »


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Message  Monique Mer 07 Fév 2024, 7:37 am

Telle est la tendresse des âmes séraphiques. Et cependant — chose admirable et qui confond notre froideur ! — ces âmes, et en général tous les saints se sont reprochés d'être durs, d’être insensibles. Ce n’est pas étonnant. La dureté est la conséquence du péché, et tous les saints se croyaient de très grands pécheurs. Aussi, ils demandaient avec larmes à Dieu d’amollir leur cœur, et Dieu leur accordait cet amollissement, cette tendresse du cœur.

Le Roi des cœurs se complaît tellement dans cette tendresse, il en est tellement jaloux, que pour l’obtenir d’un cœur qu’il a prédestiné et qu’il poursuit, il n’y a rien qu’il ne fasse, qu’il n’emploie. Il frappe ce cœur, il le blesse; il a recours et au fer et au feu pour obtenir qu'il devienne tendre. Gela explique pourquoi les saintes âmes passent souvent par de si étranges ravages. O saintes âmes, vous souffrez, vous êtes noyées dans vos larmes : consolez-vous, c’est afin que vous deveniez tendres; que vous, déjà si aimantes, vous disiez : Jésus, mon Jésus ! avec un accent plus doux encore si c’est possible, que vous incliniez avec plus d’abandon votre tête sur les pieds de votre crucifix ; c’est afin que des restes de dureté disparaissent de votre intérieur, de vos gestes, de vos paroles !

O blessure au cœur des saints, c’est par toi que s’est écoulé le fleuve de leur tendresse ! Que cette blessure soit causée par le dard de feu d'un chérubin, comme il advint pour sainte Thérèse et saint François d’Assise, ou causée par le glaive de la douleur comme il arrive pour nos âmes plus obscures, disons, oh ! disons : blessure heureuse, bienheureuse blessure ! C’est par elle que nous allons enfin nous attendrir ; c’est par elle que notre cœur s’écoulera, se liquéfiera : semblable au rocher frappé par Moïse, ce cœur entrouvert versera ses flots d’amour, non plus du côté du monde, mais du côté de l’éternité !

O fils des Nations chrétiennes, de la Nation française, respectez et protégez dans celles de vos sœurs ou de vos filles qui seraient des séraphins de la terre, cette tendresse pour Dieu, pour Jésus!

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Message  Monique Jeu 08 Fév 2024, 7:51 am

V

Un autre sentiment est profondément ancré dans leur cœur : celui de l'indignité et de la confusion. Plus une âme s’approche de Dieu par la purification et l’amour, et plus elle se trouve indigne : ce que l’auteur de l' Imitation exprime par cette admirable réflexion : L’amour m'a fait rentrer plus avant dans mon néant.

Aussi il n’est pas croyable combien les âmes séraphiques, se regardant comme indignes, tendent de toutes leurs forces vers l’obscurité et l’oubli. Le besoin de l’anéantissement est leur signe caractéristique, comme les ailes, dans la vision d’Isaïe, servaient aux séraphins pour se voiler devant la majesté de Dieu.

Cette confusion est parfaitement légitime. En effet, leur lumière est grande sur Dieu, sur sa beauté, sa sainteté, ses perfections, et en même temps leur amour est perspicace : y a-t-il un regard plus perspicace que celui de l’amour ? Or, dans la clarté de cette lumière, dans la connaissance de ces perfections, dans la perspicacité de leur amour, elles aperçoivent leurs fautes : et alors, ce sont, à leurs yeux, des monstres d’horreur, des montagnes d’ingratitudes. Elles reculent, elles voudraient s'anéantir : Dieu est si beau , Dieu est si saint !

De plus, les faveurs de Dieu sont si délicates, si jalouses : autre motif à leur obscurité, à leurs anéantissements. De là, cette chaste crainte de perdre la grâce ; de là, ce besoin de se cacher à tous les regards ; de là, cette soif des mépris, des humiliations, cette tendance à rentrer dans le néant, à s’abîmer dans la dépendance des supérieurs : Poussière, apprends à obéir... Fils du néant, qu' as-tu à te plaindre ?... Pécheur couvert d'ignominies, qu'as-tu à répondre1 ?...

— Tout de Dieu, et rien de moi ; tout à Dieu, et rien à moi; tout pour Dieu, et rien pour moi1 ! — 0 mon Dieu, je crains de vous trahir, et vos dons ne sont pas en sûreté chez moi2.

Ne semble-t-il pas, devant ces expressions d’anéantissement, qu’on aperçoive les séraphins d’Isaïe dont les ailes battent d’effroi et d'amour ? L’amour les entraîne, et la crainte les voile !

1 Imitation, liv. III, chap. XIII.
1 Pensée de la B. Marguerite-Marie, Vie par ses contemporaines, t. I, p. 38-39.
2 Ibid.




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Message  Monique Ven 09 Fév 2024, 8:25 am

Quel heureux contrepoids à l'orgueil du monde que l’humilité de ces âmes ! Devant l’insolence sans exemple dont ce siècle s’arme contre Dieu, ne faut-il pas des âmes qui s’anéantissent au centre de la terre ? Cela seul suffit pour légitimer l’existence et la nécessité des couvents. Juste ciel, qu’adviendrait-il de notre pauvre terre, sans eux !

« Nous avons appris, dit le même prophète qui a eu la vision des séraphins, quel est l'orgueil de Moab. Il est étrangement superbe. Mais sa fierté, son insolence et sa fureur sont plus grandes que n'est son pouvoir. C'est pourquoi Moab hurlera contre Moab. Ils seront tous dans les hurlements3. »

Sous la Loi de grâce et d'amour, les gémissements de ces âmes plaintives et humiliées empêchent les hurlements ; leur abaissement éloigne l’anéantissement des coupables.

O fils des Nations, de la Nation française, respectez et protégez, dans celles de vos sœurs ou de vos filles qui seraient des séraphins de la terre, cette sainte obscurité, ce voile qui cache et conserve des anges tutélaires !

3 Isaïe, XVI. Moah est, dans la bouche du prophète, le type de toutes les nations arrogantes contre le Seigneur..



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Message  Monique Sam 10 Fév 2024, 8:02 am

VI

La soif de Dieu et la tendresse pour Dieu, surmontant le sentiment de l’indignité et de la confusion, sont accompagnées, chez les âmes séraphiques, d’un nouveau sentiment vainqueur : celui de l’exil, elles se sentent comme exilées, et elles regardent la terre comme un lieu d’attente et de départ. Jésus avait dit : Mon royaume n'est pas de ce monde; et ces âmes faisant écho à la parole de leur royal époux, disent : Mon héritage n’est pas ici-bas, ma vraie patrie n’est pas de ce monde!

Les âmes terrestres se trouvent bien sur la terre, s’accommodent volontiers de la terre et redoutent de la quitter. Les âmes célestes ne s’en accommodent pas, et ne peuvent s’y faire. C’est saint Augustin assis le soir au bord de la fenêtre d’Ostie, à côté de sa mère, contemplant avec elle le ciel étoilé, et disant : « Notre élan d'amour, ensemble, vers la région éternelle, était si hardi et si puissant, que nous y touchâmes en quelque sorte par un bond du cœur. »

C’est saint Bernard partant pour la solitude de Clairvaux avec ses six frères gagnés à la vie monastique, et disant au plus jeune : « C'est à toi, mon petit frère, que nous laissons ce beau manoir;» et Nivard de répondre : « Oh! les parts ne sont pas égales, tous prenez le ciel, et vous me laissez la terre! » Et peu après, il les rejoignit.

C’est saint Ignace de Loyola répétant sans cesse : « Que je méprise la terre, quand je regarde le ciel! » Sainte Thérèse est la grande exilée ; ses plaintes s’élèvent plus haut que toutes celles de ses compagnons d’exil : « O vie longue, disait-elle, ô vie pénible, ô vie dans laquelle on ne vit pas! ô solitude trop seule! ô Jésus, ô mon bien, que la vie de l'homme est longue, quoiqu'on dise qu'elle soit courte! » Et alors dans un élan de tendresse, de langueur et d'impatience, la grande exilée compose son cantique où chaque strophe se termine par ce soupir de flamme : Je me meurs de ne pouvoir mourir!


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Message  Monique Dim 11 Fév 2024, 7:34 am

L’attitude de tous ces exilés rappelle une mélancolie célèbre. Ne semble -t-il pas qu’on voie se renouveler, mais d’une façon supérieure, cette scène imposante : Les filles de Sion assises en exil auprès des fleuves de Babylone. Qu’il est beau, leur cantique d’exil conservé dans la Bible ! qu’elle était touchante leur tristesse ! que leur attitude était noble, et que leur réponse à leurs solliciteurs est fière ! Voici comme elles sont tristes, et aussi comme elles répondent :

Au bord des fleuves de Babylone, nous nous sommes assises, et nous avons répandu des larmes en nous souvenant de Sion :

Nous avons suspendu nos harpes aux branches des saules dans la campagne ;

Ceux qui nous ont emmenées captives, nous ont demandé de chanter : « Chantez-nous donc quelque cantique agréable entre ceux de Sion. »

Nous avons répondu : « Comment chanterions-nous sur la terre étrangère?... » O Jérusalem, si je viens à t’oublier, que ma main droite se sèche; et que ma langue s’attache à mon palais, si quelque joie l'emporte jamais sur toi!

Tel est ce cantique de l’exil, ce Super flumina Baby Louis à jamais célèbre, ou la mélancolie est si touchante, et où la fierté est rehaussée par la tristesse.

Eh bien, cette fierté et cette tristesse au bord des fleuves de Babylone étaient l’annonce et la figure des sentiments de toutes les grandes âmes chrétiennes qui devaient sentir leur exil ; les filles de Sion préludaient aux âmes séraphiques !


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Message  Monique Lun 12 Fév 2024, 7:46 am

L’âme vraiment chrétienne, en effet, se regarde comme exilée sur le rivage de ce monde, au bord du fleuve du temps, et elle répand des larmes en songeant au ciel. « Le ciel où Dieu m’attend, s’écrie-t-elle, oh! quelle belle patrie ! et la terre où je suis reléguée, oh ! quel dur exil ! »

Les mondains, s’approchant d’elle, lui renouvellent le langage que les habitants de Babylone adressaient aux filles de Sion : « Pourquoi ne viens-tu point prendre part à nos fêtes ? Pourquoi ne pas mettre à profit tes talents, ta voix, ta beauté ? Ta voix, qu’on dit si belle, fais-la entendre dans nos fêtes. » Et l’âme séraphique répond : « Comment me réjouirais-je sur une terre étrangère ? Vous voulez que je chante des chants de joie comme à Jérusalem, et je suis à Babylone ! L’exilée n’a pas le cœur à chanter. »

C’est la raison pour laquelle, lorsqu’on écoute à la porte des monastères, séjour plus particulier des âmes séraphiques, la psalmodie que l’on entend sortir est monotone, grave, gémissante : c’est la psalmodie de l’exil. Non pas certes que l’Eglise catholique renonce aux chants d’allégresse et de triomphe ; oh non ! elle n’y renonce pas; mais elle les réserve surtout pour Jérusalem, pour la patrie des cieux. Ecoutez, ô mondains qui voulez nous attirer à vos plaisirs et à vos fêtes, nous ne brisons pas nos luths et nos harpes : nous les suspendons seulement : comme les filles de Sion, nous les suspendons aux saules, afin que, suspendus, ils attirent en haut nos regards! Un jour viendra où nous détacherons des arbres nos harpes frémissantes qui convenaient peu à notre exil, mais qui conviendront à notre triomphe et à nos actions de grâces ; et nous rentrerons dans Sion, — nous entrerons au ciel — couronnés de fleurs, avec des hymnes et des cantiques... Mais jusqu’au jour venu de la Jérusalem des cieux, ma voix se taira pour le monde... O céleste Jérusalem, demeure l’unique objet de mes pensées et de mes désirs ; que je ne sois affligé ou consolé que par rapport à toi ; que l’espérance de t’habiter un jour m’inspire un mépris général pour tout autre bonheur ; et que ton souvenir me soit si présent qu'au milieu même de Babylone je ne voie, n’entende et ne goûte que ce qui te rappelle à moi : Si je viens à t'oublier, ô Jérusalem, — ô ma belle patrie, — que ma main droite se sèche; et que ma langue s'attache immobile à mon palais, si quelqu'autre joie l'emporte jamais sur toi!

O fils des Nations chrétiennes, de la Nation française, respectez et protégez celles de vos sœurs et de vos filles qui, séraphins de la terre, se regardent comme assises en exil auprès des fleuves de Babylone : 11e troublez pas leurs soupirs vers la patrie des cieux !


A suivre...
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Message  Monique Mar 13 Fév 2024, 7:44 am

Un dernier sentiment achève la formation de l'âme séraphique, et ce sentiment tempère en elle l’amertume de l’exil, c’est la joie de la souffrance.

Elle est heureuse de souffrir, parce qu’en souffrant, elle prouve à son Jésus qu'elle l’aime ; qu’elle l’aime à la sueur de son front, et à la sueur du sang de l’âme ! La souffrance est, pour elle, moyen d’amour. En effet, sans douleur, on ne vit pas bien dans l'amour, mot profond de l’auteur de l’Imitation, sine dolore non vivitur in amore 1. Que cela est vrai, on ne vit point sans douleur dans l’amour ; l’amour ne vaut qu’autant qu’il sait souffrir! Or ces Ames qui veulent vivre largement dans l’amour divin, pénétrer profondément en lui, en demandent la clef à la douleur, et il n’est pas rare que la douleur, unie à l’amour, ne produise en elles la consomption. Qui n’a rencontré, même au foyer des familles, de ces êtres angéliques, nullement faits pour la terre : la médecine n’expliquait pas leur mal; la première douleur les a rendus à Dieu !

Les âmes séraphiques aiment également la souffrance comme moyen efficace d’aider au saint des pauvres pécheurs. Personne ne comprend le salut des pécheurs comme une âme séraphique. Si elle a le désir et la soif de Dieu, elle a concurremment un autre désir, une autre soif : c’est que le monde entier aime Dieu et eu jouisse avec elle-même. Cette ambition pour les autres constitue la grande différence de l’amour divin d’avec l’amour mondain. Ces deux amours sont également jaloux. Mais tandis que dans sa jalousie l’amour mondain veut aimer tout seul et être aimé tout seul, l’amour divin, ayant goûté Dieu, ayant compris ce qu’il est, souverainement beau, souverainement bon, voudrait, dans son bonheur, que tout le monde le connût et que tout le monde l’aimât.

Etant donc jalouses que Dieu soit aimé, les âmes séraphiques, pour obtenir ce succès d'amour, s'immolent. Immolation de sainte Thérèse qui disait: O hommes, vous ne connaissez pas mon trésor, car si vous le connaissiez, vous ne pourriez plus l'offenser. Immolation de saint François Xavier qui s’écriait : Des âmes, mon Dieu! Je vous en conjure, donnez-moi des âmes. Immolation de la Bienheureuse de Paray qui, lors qu’on avait recommandé un pécheur à ses prières, se jetait la face contre terre, s’écriant : Frappez, mon Dieu, et n'épargnez ni mon corps, ni ma vie, ni ma chair, ni mon sang, pourvu que vous sauviez éternellement cette âme!


1 Imitation. liv. III. chap. V. § 7.



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Message  Monique Mer 14 Fév 2024, 7:47 am

Toutes ces immolations trouvaient leur courage dans cette pensée première : « Dieu est si beau, Dieu est si bon! Il faut procurer Dieu à tout le monde; » mais également dans cette autre pensée : « une âme qui perdra Dieu, sera si malheureuse ! » Le saint curé d’Ars n’a-t-il pas dit : C’est quelque chose de si doux d'avoir un cœur, et tout petit qu' il est, de pouvoir s'en servir pour aimer Dieu. Or, une âme perdue ne pourra plus aimer; en se perdant, elle aura perdu la puissance d’aimer qu’elle avait reçue originellement et dont elle aura mésusé. Dans le lieu de la perdition, son cœur sera desséché comme la grappe lorsqu'elle a passé sous le pressoir. C’est fini, jamais plus de bonheur pour cette âme, parce qu’en elle il n’y aura jamais plus d'amour! Cette pensée est accablante : ne plus pouvoir aimer 1 ! C’est elle qui remue, consterne et enflamme les cœurs séraphiques, qui les entraîne en esprit sur le chemin des pécheurs pour leur dire en suppliant : « Je vous en conjure, ne soyez pas perdus pour Dieu! et ne perdez pas Dieu! Et afin que vous ne le perdiez pas, je m’immolerai pour vous. »

Il est une scène rapportée dans la Bible, dont la lecture attentive émeut toujours, émeut profondément, parce qu’elle est la figure des âmes qui se perdent, la peinture de l'inénarrable affliction de Dieu qui perd ces âmes, et du désespoir de ces âmes qui perdent Dieu : c’est la scène où Ésaü, de retour de sa chasse, apprend que Jacob a été béni, et que pour lui, il n’a plus de bénédiction à recevoir. Scène indescriptible! Quel désespoir ! quelle effrayante douleur ! quels rugissements ! « Esaü poussait des rugissements, dit le Livre sacré, irrugiit clamore magno. » Et cependant, ce n’est pas la faute de son vieux père s’il n’a pas été béni, car le patriarche a appelé Esaü, vocavit Esau; c’est Esaü qu’il a appelé. « Mon fils, j’ai voulu vous bénir !... »

« Mon père, s’écrie le malheureux qui ne se rappelait plus qu’il avait vendu son droit d’aînesse, mon père, donnez-moi, à moi aussi, votre bénédiction. » Et li patriarche s’en défend : car, au temps de la famille patriarcale, la bénédiction était un testament ; elle était la promesse du Messie qui passait en héritage à celui qui avait été béni ; conséquemment, elle était tout.

Esaü insiste encore : « N'avez-vous donc, mon père, qu'une seule bénédiction ? Je vous conjure de « me bénir aussi. » Il jeta ensuite, dit l’Ecriture, un grand cri désespéré, tellement que son vieux père, qui était devenu aveugle, en fut ému. Le patriarche entrevit alors, dans la lumière du Messie à venir, que la terre est pour chacun, jusqu’au dernier soir de la vie, le lieu de la miséricorde, le lieu de la bénédiction. Et c’est pour quoi ses deux mains tremblantes se levèrent, et il bénit aussi Esaü, mais d’une bénédiction secondaire. Esaü, hélas ! n’en profita pas.


1 Voir ci-dessus pages 123-26.



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Message  Monique Jeu 15 Fév 2024, 7:54 am

Cette scène est la saisissante figure des âmes qui se perdent. La patriarche étendant ses bras sur Esaü non moins que sur Jacob, c’est Jésus-Christ qui veut bénir tous les hommes, même les mauvais, ceux qui se perdent et qui courent à l’abîme : J'ai voulu vous bénir, je vous ai appelés comme Ésaü ; mes bras étaient étendus, je suis mort pour vous!... Hélas! au jour du dernier jugement, les réprouvés pousseront des clameurs désespérées, les rugissements d’Esaü.

Lorsqu’ils entendront  cette parole qui sera dite aux élus : Venez, les bénis de mon Père, ils comprendront que la bénédiction n'est plus possible pour eux, qu'elle est à jamais épuisée. Ce sera alors des rugissements de désespoir, des pleurs et des grincements de dents.

Mais jusqu’à l’heure de cette séparation finale, voici ce que feront toujours les âmes séraphiques : Attendu que, jusqu’au dernier soir de la vie, la terre est pour n’importe qui le lieu de la miséricorde et de la bénédiction, les âmes séraphiques chercheront à s'emparer de tous les pécheurs, et, à force de supplications et d’immolations, à les ramener entre les bras de Jésus-Christ, pour qu'ils soient bénis aussi. « O Sauveur, ô mon Dieu, bénissez aussi ces pauvres âmes... O Jésus-Christ, vous n'avez pas qu'une seule bénédiction, vous êtes la bénédiction infinie ! qu'il y en ait une pour cette âme, pour mon père, pour mon pauvre enfant égaré ; je vous en supplie, ô Jésus-Christ, bénissez-le, qu’il soit sauvé ! » En définitive, les âmes séraphiques voudraient, si c’était possible, qu’il n’y eût pas d'Esaü, qu'il n’y eût que des Jacob, que des bénis pour l'éternité ! et s'il fallait, pour procurer cette félicité aux autres, renoncer à une part de bénédiction que Dieu permettrait, elles y renonceraient : J'eusse désiré de devenir moi-même anathème pour mes frères 1 !

Ces sentiments ne sont pas exagérés. Il y a eu des saints qui auraient souhaité pouvoir, avec leur corps, se coucher en travers du puits de l'abime, pour le fermer et empêcher les âmes d'y tomber. Un jour que la séraphique épouse du Sacré-Cœur, la bienheureuse Marguerite-Marie, réfléchissait sur le sort des réprouvés et sur leur amour perdu, elle s'écria : « Je voudrais, ô mon divin Sauveur, si c'était votre volonté, souffrir tous les tourments de l'enfer, pourvu que je vous aimasse autant qu'auraient pu vous aimer dans le ciel tous ceux qui souffriront toujours et qui ne vous aimeront jamais 1. » N’est-ce pas la dernière limite de la charité? S’offrir à ressentir l'enfer en soi-même pourvu que, par cette souffrance, on put combler le déficit de l’enfer en amour, c’est le vol suprême du séraphin de la terre, du séraphin qui aspire en haut, mais qui descend au plus profond de l’abîme pour en rapporter en soi-même et sur ses ailes de flamme, sinon les cœurs perdus, du moins l’amour de tous ces cœurs !

O fils des Nations chrétiennes, de la Nation française, respectez et protégez celles de vos sœurs ou de vos filles qui se consument et s'immolent pour votre salut éternel : vous leurs pères, leurs frères, leurs amis, leurs concitoyens !


1 Epitre aux Rom., IX, 3.
1 Lettre CXXVIII, au Père Rolin, t. II p. 280.




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Message  Monique Ven 16 Fév 2024, 8:32 am

CHAPITRE VI

UNE VOIE LACTÉE DANS L'ÉGLISE DE DIEU, COMME AU FIRMAMENT


*****


— I. Sors de ta tente et considère le ciel! Cette invitation de Dieu à Abraham est entendue des âmes méditatives. Magnificence du firmament, sa voie lactée.
— II. Les profondeurs de la voûte céleste : bandes d'étoiles presque imperceptibles et en quantités innombrables. Les profondeurs de la miséricorde dans l'Eglise : bandes d'enfants de lumière presque inaperçus. Signalement de quelques-unes. Les enfanta de la promesse ou la superbe postérité promise à Abraham, réalisée.
— III. Pourquoi le Créateur a fait les étoiles de la voie lactée si imperceptibles et si multipliées : pour être une preuve étincelante des soins de sa Providence à l'égard des plus petits êtres. La petitesse employée également, dans l’Église de Dieu, comme expression du véritable amour. Combien le Seigneur a pour agréables les riens où il y a de l’amour !
— IV. Ce que signifient les voies lactées : elles ressemblent à des chemins dans l’azur qui mènent à un terme final ; destinée dernière de ces milliards d’étoiles. L’Église de Dieu en marche vers ce terme; sublime cantique d’Isaïe sur cet acheminement : caravanes de dromadaires dans Jérusalem, caravanes de peuples dans l'Église, caravanes d'élus dans le ciel, symbolisées par les caravanes d'étoiles.
— V. Souhait rattaché à cette étude sur les enfants de lumière.



I

Sortons un moment dans la nuit, comme Dieu fit sortir Abraham de son pavillon pour considérer le ciel.
Regardes le firmament, lui dit Dieu, et comptez les étoiles, si vous pouvez 1.
C’est une salutaire pratique que de contempler le firmament par une nuit sereine. Bien souvent, lorsqu’on sent le besoin d’agrandir les vues de son âme et de surmonter les tristesses du temps, on y réussit par cette contemplation. Le spectacle du firmament purifie la pensée et remonte le cœur.

D’abord, on aperçoit, dans sa lueur douce et pleine de charmes, l’astre des nuits : il répand sur la nature entière je ne sais quelle mystérieuse beauté. Le commun des hommes ne connaît de la nuit que le repos qu’elle amène, que le sommeil qui les enveloppe et les confond avec les animaux. « La lune, cette humble sœur du jour, n’existe pas pour eux, parce qu'ils n'existent pas pour elle, et ils s’offenseraient avec mépris des appels qui leur seraient faits de venir la contempler. Mais il est des esprits délicats, des âmes tendres et méditatives pour lesquels le spectacle de la nuit a des charmes ravissants, des harmonies secrètes, et s’illumine de mystérieux reflets. Dans la contemplation silencieuse de cette beauté voilée qui répond si bien à la nature humble et à la fois élevée de leurs sentiments, ils puisent une disposition méditative qui se prolonge pendant le jour, et qui, les soutenant au-dessus des impressions de la terre, les porte à lever des regards exercés vers le ciel. »

Ensuite, on est émerveillé et ravi par le scintillement et le cortège de ces étoiles vives et brillantes, qui, de distance en distance, et chacune à son rang, se tiennent autour de leur reine, semblables à des perles sur le vêtement de la nuit. Ces étoiles radieuses sont innombrables, mais pourtant distinctes, et comme les fleurs d'une vaste prairie, elles ont par leur nature même une immense variété de couleurs.


1 Genèse, XV, 5.



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Message  Monique Sam 17 Fév 2024, 7:51 am

Dans le langage de la Liturgie et des Docteurs, l’Église catholique est très justement comparée à l’astre des nuits. La lune, en effet, au disque changeant, courrière inégale, représente admirablement les diverses phases de l’Eglise ici-bas, selon que Dieu lui envoie des jours prospères ou des épreuves. Mais quelles que soient les inégalités de l’astre des nuits, il n’en a pas moins cette pudique et mystérieuse beauté qui est aussi celle de l'Église, l’épouse bien-aimée du Sauveur, dont il est écrit aux Cantiques qu’elle est belle comme la lune 1.

Le brillant cortège des étoiles distinctes a aussi sa signification. Il figure ceux et celles des enfants de l’Église qui lui font le plus d'honneur en ce monde, soit par l’éclat de leur grande position, soit par leur sainteté reconnue.

Mais la contemplation du firmament n’est pas finie. Qu’apercevons-nous encore, par une nuit sereine, dans les détails de cette voûte d’or? Une grande trace de lumière blanche et diffuse qui traverse presque toute la sphère céleste ; ce sont comme des bandes irrégulières qui se développent et flottent en forme de ceintures, elles ont une lueur blanche comme le lait, et quand il les regarde au télescope, on y distingue des amas d’étoiles tellement pressées qu'on peut à peine les énumérer 1.

Ces bandes lumineuses composent la voie lactée. Cette voie est donc produite par un nombre prodigieux d’étoiles : gouttes de lumière, gouttes de lait sur l’azur des cieux 2.

Admirons-la, interrogeons-la, comme symbole consolant qui va compléter nos études sur la physionomie et le nombre des enfants de lumière. En effet, nous avons, dans les chapitres qui précèdent, célébré et décrit les vrais maîtres et guides sûrs, les apôtres, les missionnaires au loin, les séraphins de la terre : autant de splendides étoiles distinctes dans le firmament de l’Église. Mais tout le monde ne peut être docteur, ni apôtre, ni missionnaire au loin, ni séraphin de la terre. Heureusement que la bonté créatrice, qui a orné la voûte des cieux d’une voie lactée, en a tracé une autre dans son Église : multitude d’âmes humbles, petites, inaperçues, semblable aux bandes pressées d'étoiles! Il sera donc consolant d’étudier parallèlement la voie lactée du firmament et celle de l’Eglise.


1 Cantic., VI, 9.
1 Herschell en a compté plus de cinquante mille dans une bande de trente degrés de long sur deux de large.
2 La Fable dit que la voie lactée se forma de quelques gouttes de lait échappées des mamelles de la chèvre
Amalthée qui avait nourri Jupiter.— On croyait également que c’était par là que les dieux se rendaient à la cour du Maître du ciel.




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Message  Monique Dim 18 Fév 2024, 7:02 am

Dans le langage de la Liturgie et des Docteurs, l’Église catholique est très justement comparée à l’astre des nuits. La lune, en effet, au disque changeant, courrière inégale, représente admirablement les diverses phases de l’Eglise ici-bas, selon que Dieu lui envoie des jours prospères ou des épreuves. Mais quelles que soient les inégalités de l’astre des nuits, il n’en a pas moins cette pudique et mystérieuse beauté qui est aussi celle de l'Église, l’épouse bien-aimée du Sauveur, dont il est écrit aux Cantiques qu’elle est belle comme la lune 1.

Le brillant cortège des étoiles distinctes a aussi sa signification. Il figure ceux et celles des enfants de l’Église qui lui font le plus d'honneur en ce monde, soit par l’éclat de leur grande position, soit par leur sainteté reconnue.

Mais la contemplation du firmament n’est pas finie. Qu’apercevons-nous encore, par une nuit sereine, dans les détails de cette voûte d’or? Une grande trace de lumière blanche et diffuse qui traverse presque toute la sphère céleste ; ce sont comme des bandes irrégulières qui se développent et flottent en forme de ceintures, elles ont une lueur blanche comme le lait, et quand il les regarde au télescope, on y distingue des amas d’étoiles tellement pressées qu'on peut à peine les énumérer 1.

Ces bandes lumineuses composent la voie lactée. Cette voie est donc produite par un nombre prodigieux d’étoiles : gouttes de lumière, gouttes de lait sur l’azur des cieux 2.

Admirons-la, interrogeons-la, comme symbole consolant qui va compléter nos études sur la physionomie et le nombre des enfants de lumière. En effet, nous avons, dans les chapitres qui précèdent, célébré et décrit les vrais maîtres et guides sûrs, les apôtres, les missionnaires au loin, les séraphins de la terre : autant de splendides étoiles distinctes dans le firmament de l’Église. Mais tout le monde ne peut être docteur, ni apôtre, ni missionnaire au loin, ni séraphin de la terre. Heureusement que la bonté créatrice, qui a orné la voûte des cieux d’une voie lactée, en a tracé une autre dans son Église : multitude d’âmes humbles, petites, inaperçues, semblable aux bandes pressées d'étoiles! Il sera donc consolant d’étudier parallèlement la voie lactée du firmament et celle de l’Eglise.


1 Cantic., VI, 9.
1 Herschell en a compté plus de cinquante mille dans une bande de trente degrés de long sur deux de large.
2 La Fable dit que la voie lactée se forma de quelques gouttes de lait échappées des mamelles de la chèvre
Amalthée qui avait nourri Jupiter.— On croyait également que c’était par là que les dieux se rendaient à la cour du Maître du ciel.




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Message  Monique Lun 19 Fév 2024, 7:41 am

Les profondeurs de la miséricorde ! Elles ne sont pas moins insondables que celles du firmament, que celles de la foi, que celles des conseils de Dieu. Elles ont été creusées par le sang de Jésus-Christ, et une seule goutte de ce sang pénètre à une telle profondeur dans les abîmes de la bonté et de la pitié que le cœur humain doit renoncer à l’atteindre. Saint Paul n’a-t-il pas dit : Les trésors incompréhensibles de l'amour que Jésus-Christ a eus pour nous1 !

Or, c’est dans ces profondeurs de la miséricorde que se meuvent des milliers et des milliers d’enfants de Dieu, d’enfants de lumière, mêlés, confus, presque inaperçus dans leur lumière de grâce, comme les étoiles de la voie lactée sont presque imperceptibles dans leur clarté. Faut-il nommer quelques-unes de ces bandes d’enfants de Dieu?

Ce sont d’abord beaucoup d’enfants destinés à mourir dans l’âge tendre, beaucoup d’âmes pures dont le Livre sacré définit ainsi l’heureux sort : Le Seigneur l'a enlevé, de peur que la vanité ne séduisit son âme2. « Dieu a fait un pacte avec la mort, et lui donnant une précocité divine, il l’a chargée de moissonner avant l’âge du mal la troisième partie du genre humain. L’ange exterminateur est donc devenu le bras droit du Christ ; il choisit parmi nous l’innocence avant que la raison en ait terni le premier éclat, et il conduit au ciel les multitudes à qui l'éternité ne coûte que d’avoir passé ici-bas pour y sourire à leur mère1. » Mais en passant, heureux petits enfants, quelle voie lactée, tout à la fois douce et mystérieuse, vous tracez : des bras de vos mères, vous arrivez dans le sein de Dieu !

Ce sont, ensuite, à l'autre extrémité de la vie, auprès de pauvres vieillards réunis par groupes, ces bandes angéliques qu’on appelle les Petites Sœurs des pauvres. Discrètes et charmantes petites sœurs, elles ressemblent à des perles de lumière dans le soir 1 de ces pauvres vieillards, où tout devient sombre. Qui les connaît par leurs noms? Personne. Elles étaient peut-être de souche illustre dans le monde, un brillant avenir les attendait. Elles se sont enfoncées et perdues dans les profondeurs de la miséricorde, pour elles-mêmes et pour leurs bons vieux. Sous leurs voiles amples et sombres, elles sont devenues imperceptibles comme les étoiles de la voie lactée.


Investigabiles divitias Christi. (Ephes., III, 8.)
2 Sap., IV, II.
1 Lacordaire, LXXIe conférence.




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Message  Monique Mar 20 Fév 2024, 7:45 am

Mais voici d'autres bandes d’enfants de lumière, non moins confuses, non moins pressées : tant de travailleurs honnêtes qui aiment Dieu à la sueur de leur front, tant d’indigents qui endurent, mais qui regardent le ciel et espèrent, tant d’affligés qui pleurent en secret, la tête inclinée sur le crucifix, tant d'opprimés qui ont faim et soif de la justice. Bienheureux êtes-vous dans vos souffrances inaperçues, ô vous tous! dans votre petitesse, vous faites partie de la voie lactée. C’est de vous que le Christ a dit avec action de grâces : Je vous rends grâces ô mon Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que vous avez caché ces choses aux sages et aux savants, pour les révéler aux petits 1.

Tout ce que nous avons essayé de discerner n’est rien en comparaison de ce qui demeure contenu et caché dans les profondeurs de la miséricorde. Temps des pâques, époques des jubilés, quelles bandes immenses de nébuleuses ne jetez-vous pas dans ces divines profondeurs ? Voici un enfant de lumière, puis à côté deux autres, et encore à côté vingt autres. Les annales ecclésiastiques racontent qu’un chrétien demanda à être joint à des prisonniers que l’on conduisait au martyre. Les païens cédèrent à ses instances, et comme son nom est resté inconnu, l’Eglise l’honore sous le nom de saint Adjoint, Ajouté, Adauctus 2. Que de frères inattendus se joignent aux bandes d’enfants de lumière dans les temps de pâques et de jubilés! Leurs noms, ne cherchez pas à les connaître : ils s’appellent adjoints, Adaucti.

Sommes-nous au bout des merveilles de notre voie lactée ? Ah ! qui n’a entendu parler de l'âme de l'Eglise, cette insondable profondeur de la miséricorde ? Il y a, de par le monde, des protestants de bonne foi et parfaitement honnêtes, des israélites de bonne foi et qui, attardés sur la route des siècles, attendent le Libérateur ; il y a aussi, dans la vaste étendue des missions catholiques, des païens qui ont le baptême de désir, mais que d’invincibles obstacles empêchent d’aller au delà; à l’égard de tous ces cœurs droits, l’espérance catholique exprime cette ardente prière : « Mon Dieu, faites qu’ils appartiennent à l’âme de l’Eglise ; faites que la robe nuptiale ou la grâce sanctifiante leur soit secrètement apportée, au besoin par un ange ; et qu’ils soient du nombre de ces enfants inconnus de leur mère, quoique portés dans ses entrailles ! » Dieu les lui fera connaître dans les surprises de la consommation finale, quand il exposera aux regards de sa sainte épouse les fruits de sa brillante fécondité : et ce sera un motif de plus à son bonheur et à son action de grâces. En attendant, ils sont confus et perdus dans les profondeurs de la miséricorde, comme une de ces traînées blanchâtres dans le firmament étoilé !


1 Saint Matthieu, XI, 25.
2 Voici ce que dit le Bréviaire romain : « Sous l'empire de Dioclétien, Félix, qui avait embrassé la foi chrétienne, fut torturé sur le chevalet, et conduit enfin sur le chemin d'Ostie pour être frappé de la hache. Dans le trajet, il fut rencontré par un chrétien de sa connaissance, qui le voyant mené au martyre, s'écria : Et moi aussi, je vis sous les mêmes lois que celui-ci. J'adore le même Jésus-Christ. Ensuite il embrassa Félix, et eut la tête tranchée en même temps que lui, le 30 du mois d’août. Son nom n’étant point connu des fidèles, il fut appelé Adauctus, qui veut dire adjoint, parce qu'il avait été adjoint à saint Félix pour la couronne du martyre. »




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Message  Monique Mer 21 Fév 2024, 7:51 am

Et telle est la voie lactée de l’Eglise catholique ! Dans une de ces nuits étincelantes dont le ciel d’Orient a le privilège, le Seigneur faisait donc sortir Abraham de sa tente et lui disait :

Levez les yeux au ciel, et comptez les étoiles, si vous pouvez. Et le Seigneur ajouta : Ainsi se multipliera voire postérité1.

En raison de cette promesse divine, la postérité d’Abraham a reçu, dans les Ecritures, le nom d’enfants de la promesse2. Mais les Ecritures ont bien soin de précise:' que les enfants de la promesse sont moins ceux qui continuent le sang: d'Abraham que ceux qui continuent sa foi1. Sont compris parmi les enfants de la promesse tous ceux qui, à travers la succession des siècles, ont obéi à Moïse, puis aux Prophètes, puis au Fils de Dieu fait homme, puis à ses Apôtres, et maintenant à son Eglise. Elle est donc nombreuse, très nombreuse, la belle postérité des enfants de la promesse. Dieu soit béni.

Comptez, si vous pouvez, les étoiles : ou pourrait, à la rigueur, se mettre à compter les étoiles distinctes et radieuses, et bientôt le vertige arrêterait le calcul : mais les immenses quantités d’étoiles agglomérées dans les voies lactées, qui les compterait?

Pareillement, ô mon Dieu, l'impossibilité du calcul s'applique aux innombrables enfants de lumière, tant ceux qui sont apparents que ceux qui sont cachés dans les profondeurs de votre miséricorde ; heureuse impossibilité, qui est la réalisation de votre promesse au patriarche : ainsi se multipliera votre postérité.

O Seigneur, vous êtes Celui qui s'appelle le Fidèle et le Véritable2.


1 Genese, XV, 5.
2 Épître aux Galates, IV, 28
1 Epître aux Romains, IX, 8.
2 Apoc., XIX 11.




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Message  Monique Jeu 22 Fév 2024, 7:56 am

III

Quand on considère ce prodigieux entassement d’étoiles qui forment la voie lactée, un pourquoi respectueux se présente à l’esprit qui admire el adore :

Pourquoi Dieu a-t-il fait ces étoiles si imperceptibles et si multipliées ? N’est-ce pas afin d’inscrire, pour l'homme, au firmament, cette leçon : combien sa Providence est bonne, et attentive dans ses soins.

Il y a, au 140° psaume, cette parole : Le Seigneur compte la multitude des étoiles, et il les appelle, chacune, par leur nom. Le témoignage d’intérêt le plus réel qu’on puisse donner à un être, c’est de savoir son nom, et de le retenir : car il semble qu’on ne soit rien quand on n’a point de nom ! C'est aussi une preuve de sollicitude, de tendresse. On ne nomme pas ce que l’on méprise ou ce que l’on déteste. Au jour des rétributions, le Christ ne dira-t-il pas aux réprouvés : Je ne vous connais pas, je ne sais pas vos noms, nescio vos1 ! En nous assurant donc, par le Chantre royal, que ces étoiles si imperceptibles et si multipliées sont, cependant, connues de lui, comptées par lui, et appelées, chacune, par leur nom, le Seigneur a voulu nous inculquer cette leçon si douce : combien sa Providence est attentive, soigneuse, amoureuse autour des plus petits êtres, et que, nonobstant le nombre prodigieux de ces étoiles perdues en quelque sorte dans leur agglomération, il n’est pas
embarrassé pour reconnaître chacune, la nommer et en avoir soin.

Leçon divine ! qui trouve son achèvement dans l’Eglise catholique. Là, en effet, la petitesse est devenue le vrai moyen d’amour entre l’âme humaine et son Dieu. « Plus on se fait petit, et plus on est aimé de lui; plus on se fait petit, et plus on est sûr de l'aimer. Sous cette persuasion, s’est formée, dans le firmament de l’Église, cette immense voie lactée composée de milliards de petites énergies d'amour : petits offices, petites vertus, petites croix.


1 Saint Matthieu, XXV , 12



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Message  Monique Ven 23 Fév 2024, 7:24 am

Petits offices : les hauts emplois sont dangereux, et souvent le cœur s'y refroidit. Au contraire, dans un emploi rabaissé, dans un office humble et obscur, quelle sécurité ! quelle paix ! et surtout, lorsqu'on s’y tient avec fidélité et persévérance, quel paradis où Dieu parle ! quelles profondeurs de délices inénarrables!

Petites vertus : elles sont ces vertus usuelles, dont l’usage fréquent, quotidien, est commun à tous les états, à toutes les conditions de la vie : l’affabilité, la condescendance, la simplicité, la mansuétude, la douceur dans le regard, dans les actions, dans les manières, dans les paroles. L’acte de ces vertus se fait en un clin d’œil, il est rapide comme le geste, comme la parole. Véritables nébuleuses, elles sont imperceptibles, tant elles s’exercent en secret, dans l’obscurité : mais quelle sérénité, quelle unité, quel calme, semblable à celui d’une nuit sereine, ne dénotent - elles pas dans la vie des familles et des communautés ?

Petites croix : l’orgueil de la nature peut demander, rechercher, et même choisir et embrasser les croix visibles, éclatantes ; mais de choisir et de bien joyeusement porter les croix petites et obscures, ce ne peut être que l’effet d’une grande grâce et d’une grande fidélité à Dieu. A la moindre petite traverse qui arrive, dire: Dieu soit béni! mon Dieu, je vous remercie; puis cacher dans la mémoire de Dieu, où rien ne se perd, a croix que l’on vient d’accepter, et ne plus s’en souvenir que pour répéter toujours : Merci, mon Dieu ! c’est un exercice de l’âme qui dépasse en profit et en douceur tout ce qu’on peut exprimer.

0 voies lactées de ces petites énergies d’amour évanouies devant le regard des hommes, petits offices, petites vertus, petites croix, que vous êtes précieuses devant le Maître des mondes ! « Le Seigneur compte la multitude des étoiles, et il les appelle, chacune, par leur nom. » Il compte aussi la multitude de ces petits riens accomplis pour son amour, et discerne chacun à part. « Vous avez ravi mon cœur, ma sœur, mon épouse, vous avez ravi mon cœur par un regard de vos yeux, par une boucle du vos cheveux.[/size]» Qu’est- ce qu’un regard? qu’est-ce qu’une boucle de cheveux? qu’est-ce qu’une petite vertu? qu’est-ce qu’un petit emploi ? qu'est-ce qu’une petite douleur bien supportée ? Rien, à peu près rien. Dieu s’y complaît, pourtant, parce qu’il est l’immense et que le contraste avec les riens forme ses délices : il bouleverserait les mondes plutôt que de laisser perdre un rien accompli pour son amour !


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Message  Monique Dim 25 Fév 2024, 8:48 am

IV

Profondeurs du firmament, et en parallèle, profondeurs de la miséricorde dans l’Église ; — bandes pressées d’étoiles presque imperceptibles : bandes innombrables d’enfants de lumière presque inaperçues;— providence de Dieu attentive à chacune de ces petites étoiles : complaisance particulière et infinie de Dieu pour les moindres petits témoignages d’amour de la part de ses enfants ; voilà bien les diverses harmonies que nous avons constatées et contemplées entre l’œuvre d lea création sur nos têtes et l’œuvre de la grâce au milieu de nous. Mais il en reste une dernière :

Que signifie cette voie lactée dans le firmament ? Et qu’y a-t- il en correspondance dans l'Eglise de Dieu ? Voie lactée : c’est donc une voie, un chemin ; et qui dit chemin dit implicitement terme, but à atteindre ; ces étoiles sont en chemin, en route, elles vont à un but. C’est encore l’importante leçon de ces brillantes voies lactées, mais leçon, hélas ! bien peu comprise. Les hommes ne donnent pas une attention suffisante à la grande loi du terme, que tout, cependant, leur rappelle. Ainsi, qui comprend bien le sons de la carrière du soleil? Avec quelle pompe et avec quelle profusion de lumière il commence sa course ; de quelle couleur il embellit la nature ; de quelle magnificence il est lui-même revêtu en s’élevant sur l’horizon, comme l’époux que le ciel et la terre attendent, et dont il fait les délices ; cet astre, disent les Saintes Lettres, semblable à un époux qui sort de sa chambre nuptiale ; mais elles ont bien soin d’ajouter : il pari, plein d'ardeur, pour courir, comme un géant dans sa carrière à la majesté et aux grâces d’un époux, le soleil allie donc la course rapide d’un géant qui songe moins à plaire qu'à porter partout la nouvelle de l’arrivée du Prince qui l’envoie. Pareille est la mission de ces traînées d’étoiles qui forment les voies lactées, et elles aussi s’en acquittent fidèlement. Routes créées dans les champs de l’azur, elles semblent dire à la terre : nous sommes en marche pour le terme, imitez-nous ! Et en effet, dessinées dans le ciel en traînées prodigieuses, elles se suivent comme des hommes en marche. On croirait voir une grande armée entrer, par toutes les portes, dans une1 capitale pour une fête : la ville est remplie de soldats, pendant que d’autres arrivent, et que l’on voit encore au loin dans la campagne leurs lignes immenses !

Mais le terme que toutes ces voies lactées rappellent, quel sera-t-il pour elles-mêmes ?



1 Cantique, IV. 9.
1 Psaume XVIII.
1 Ps. XCII.




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