Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXIII.Le ciel est mû par une substance intellectuelle.SUITE
6º Toutes les fois que la nature est le principe actif d'un mouvement, il résulte de là que si une chose se porte naturellement vers une autre, la nature ne contribue en rien et s'oppose même à leur séparation: par exemple, en vertu d'une loi naturelle, un objet pesant descend en bas, et lorsqu'il prend une autre direction, c'est contrairement à sa nature. Si donc le mouvement du ciel était naturel, comme il tourne naturellement du côté de l'occident, il irait contre la nature en quittant l'occident pour revenir à l'orient; ce qui est impossible, puisqu'il n'y a dans ce mouvement rien de forcé ni de contraire à nature (4). Donc la nature ne peut être le principe actif du mouvement céleste. Donc il faut conclure des raisons qui précèdent que ce principe est une vertu capable d'appréhension, et qui meut par son intelligence. Donc le corps céleste est mû par une substance intellectuelle.
On ne peut nier cependant que le mouvement du ciel ne soit naturel. Un mouvement est naturel, non-seulement à cause de son principe actif, mais encore en raison de son principe passif. Nous en avons la preuve dans la production des corps simples, qui n'est point naturelle du côté du principe actif.
En voici la raison….
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(4) Saint Thomas raisonne ici d'après le système planétaire de Ptolémée, suivi encore de son temps. Cet astronome considère la terre comme le centre de l'univers, et tous les mouvements des astres se font d'orient en occident. Copernic, dont le système a prévalu, fait du soleil le centre du monde, et les planètes accomplissent leurs révolutions d'occident en orient, en sorte que le mouvement réel est pour nous l'opposé du mouvement apparent. Quelque système que l'on adopte, l'argument du saint Docteur n'en conserve pas moins toute sa force.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXIII.Le ciel est mû par une substance intellectuelle.SUITE
En voici la raison.
Un être est mû naturellement par son principe actif, lorsque ce principe est en lui; car la nature est un principe de mouvement dans l'être où elle se trouve. Or, le principe actif de la production des corps simples est extrinsèque à ces corps. Donc, si leur mouvement est naturel, ce n'est pas à cause du principe actif, mais seulement à raison du principe passif, c'est-à-dire de la matière, qui recherche naturellement sa forme naturelle. Ainsi donc, considéré comme provenant du principe actif, le mouvement du corps céleste n'est pas naturel, mais plutôt volontaire et intellectuel; tandis que relativement au principe passif, il est naturel, parce que le corps céleste est naturellement disposé à recevoir ce mouvement.
Il suffit, pour donner à cette vérité toute son évidence, d'examiner dans quelle disposition se trouve le corps céleste par rapport à son lieu propre…
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Dieu fin universelle.XXIII.Le ciel est mû par une substance intellectuelle.SUITE
Il suffit, pour donner à cette vérité toute son évidence, d'examiner dans quelle disposition se trouve le corps céleste par rapport à son lieu propre. Un être devient passif et reçoit un mouvement, parce qu'il est en puissance; il agit, au contraire, et devient moteur, selon qu’il est en acte. Or, le corps céleste, à raison de sa substance, est indifféremment en puissance pour tout lieu, de même que la matière première pour toute forme [ch. 22].
Il en est autrement d'un corps qui est pesant ou léger. Sa nature ne le laisse pas indifférent pour tout lieu, mais celui qu'il doit occuper se trouve déterminé d'après le caractère de sa forme. Donc le principe actif du mouvement des corps pesants ou légers n'est autre que leur nature, tandis que la nature des corps célestes n'est que le principe passif de leur mouvement.
On ne doit donc pas regarder comme force le mouvement de ces derniers, de même que celui des corps pesants ou légers auxquels nous l'imprimons par notre intelligence. Ces corps, en effet, sont naturellement aptes à être mus dans une direction contraire à celle que nous leur donnons. Il s'ensuit que nous leur faisons violence en les soumettant à ce mouvement; et cependant le mouvement que le corps de l'animal reçoit de son âme, en sa qualité d'être animé, n'est nullement forcé, quoiqu'il le soit si nous considérons l'animal comme quelque chose de pesant.
Quant aux corps célestes, ils n'ont aucune aptitude pour un mouvement contraire; mais elle se borne à celui qu'une substance intelligente leur imprime. Ce mouvement est donc en même temps volontaire, dans le principe actif, et naturel, dans le principe passif.
Quoique le mouvement du ciel soit volontaire dans son principe…
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Chap. XXIV. Tous les êtres, même privés d’intelligence, recherchent le bien.Dieu fin universelle.XXIII.Le ciel est mû par une substance intellectuelle.SUITE
Quoique le mouvement du ciel soit volontaire dans son principe actif, et que la volonté puisse choisir entre plusieurs objets, sans être déterminée à aucun, cela n'empêche pas ce mouvement d'être un et toujours uniforme; car de même que la nature se porte par sa propre vertu vers une seule chose, de même la volonté se détermine pour un seul objet par sa sagesse, qui la conduit infailliblement à une fin unique.
Il est également démontré qu'il n'y a rien dans le mouvement du ciel qui contrarie la nature, et qu'il ne s'approche ni ne s'éloigne d'aucun lieu. Lorsque les corps pesants ou légers sont en mouvement, leur condition est différente pour deux raisons: d'abord, parce que la tendance de la nature, en agissant sur ces corps, est déterminée à tel lieu; en sorte que, comme le mobile tend naturellement à occuper ce lieu, c'est contrairement à sa nature qu'il s'en éloigne; ensuite, parce qu'il y a contrariété entre deux mouvements, dont l'un s'approche du milieu et l'autre s'en éloigne. Si, lorsqu'il s'agit du mouvement de ces corps pesants ou légers, on considère, non pas le lieu extrême, mais celui qui tient le milieu, par là même que le mobile s'en approche naturellement, il s'en éloigne naturellement aussi, parce que la nature n'a qu'une seule intention et qu'il n'y a pas deux mouvements contraires, mais un mouvement unique et continu.
— Or, ceci s'applique au mouvement des corps célestes ; car nous venons d'observer que la nature ne recherche pas tel lieu déterminé. On peut même dire que le mouvement circulaire qui éloigne un corps d'un point fixe n'est pas opposé à celui qui l'on rapproche ; mais ce mouvement [dans son ensemble] est un et continu. D'où il suit que dans le mouvement du ciel tout lieu est un moyen, et qu'il n'y a pas d'extrême comme dans le mouvement en ligne droite (5).
Il importe peu, pour le présent, que la substance intellectuelle qui meut le corps céleste soit unie avec lui, à la manière des âmes, ou bien qu'elle en soit séparée. Il est également indifférent que chacun des corps célestes soit mû par Dieu, ou bien qu'il n'en meuve aucun immédiatement, mais au moyen de substances intellectuelles créées; ou encore que le premier seulement soit mû immédiatement par Dieu, et les autres par les substances créées, pourvu que nous arrivions à cette conclusion, que le moteur du ciel est une substance intellectuelle.
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(5) Saint Thomas raisonne ici comme Aristote, qui prouve, dans sa [i]Physique (liv. VIII, ch. 8 et 9), que le mouvement circulaire seul est continu et petit durer jusqu'à l'infini.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXIV.Tous les êtres, même privés d’intelligence, recherchent le bien.
Ces deux propositions étant admises: la première, que le ciel est mû par une substance intellectuelle [ch. 23]; la seconde, que ce mouvement a pour but la génération des êtres dans ce monde inférieur, il s'ensuit nécessairement que la génération et le mouvement de ces êtres procèdent de l'intention d'une substance intelligente; car l'agent principal et l'instrument qu'il emploie ont en vue la même fin.
Or, le ciel est la cause des mouvements inférieurs, en vertu du mouvement qu'il reçoit d'une substance intellectuelle. Donc il est en quelque sorte l'instrument de cette substance. Donc c'est une substance intellectuelle qui veut et réalise, en qualité d'agent principal, les formes et les mouvements des corps inférieurs, et le corps céleste en est la cause instrumentale.
Or, de même que les formes des objets d'art sont renfermées tout d’abord dans l'intelligence de l'artiste, d'où elles passent dans les effets, ainsi l'agent intellectuel doit avoir préalablement dans son intelligence les formes des êtres voulus et produits par lui. Donc toutes les formes des êtres inférieurs, et tous les mouvements qu'ils subissent, se trouvent déterminés par les formes intelligibles conçues dans l'intelligence d'une ou de plusieurs substances intellectuelles (1).
C'est ce qui a fait dire à Boëce, dans son livre De la Trinité, que « les formes qui résident dans la matière viennent des formes indépendantes de la matière (2). » Sous ce rapport, Platon est dans la vérité lorsqu'il dit que les formes séparées sont les principes des formes inhérentes à la matière (3). Mais son opinion diffère de la nôtre en ce qu'il considère ces formes comme subsistant par elles-mêmes et qu'il en fait les causes immédiates des formes sensibles, au lieu que, selon nous, elles existent dans une intelligence et produisent les formes inférieures au moyen du mouvement du ciel.
Toutes les fois que le moteur meut par lui-même [ou essentiellement] et non accidentellement, c'est lui qui dirige le mobile vers la fin à laquelle doit aboutir son mouvement. Or, le moteur du corps céleste est une substance intellectuelle, et lui-même il devient, par son mouvement, la cause de tous les mouvements produits dans les corps inférieurs. Donc le corps céleste tend vers la fin de son mouvement, et par conséquent, chacun des corps inférieurs recherche sa fin propre, en vertu de la direction donnée par cette substance intellectuelle.
On comprend donc maintenant, sans aucune difficulté, comment des corps naturels privés de toute connaissance se meuvent et agissent pour une fin…
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(1) Suivant que le ciel tout entier est mû par une seule de ces substances, ou bien que chacun des astres a son moteur particulier. Le saint Docteur ne décide pas ici cette question. — (2) Nous analysons ce passage de Boëce, sans rien changer à ses expressions : Ce passage de Boëce est libellé en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous. — (3) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXIV.Tous les êtres, même privés d’intelligence, recherchent le bien.SUITE
On comprend donc maintenant, sans aucune difficulté, comment des corps naturels privés de toute connaissance se meuvent et agissent pour une fin. Ils tendent à cette fin, parce qu'ils reçoivent une direction analogue à celle que suit la flèche, lorsqu'elle va frapper le but choisi par l'archer. De même, en effet, que la flèche suit la ligne qui conduit au but ou à une fin déterminée, en vertu de l'impulsion donnée par l'archer, ainsi les corps naturels obéissent à l'inclination qui les pousse vers telle fin en rapport avec leur nature, en vertu de l'action des moteurs naturels, dont ils reçoivent leurs formes, leurs vertus actives et leurs mouvements.
Il ressort encore clairement de là que toute production de la nature est l'œuvre d'une substance intelligente; car l'effet se rattache, comme à sa cause principale, bien plus au premier moteur qui conduit le mobile à sa fin qu'aux instruments qui agissent d'après sa direction supérieure, et c'est pour cette raison que les opérations de la nature, aussi bien que celles du sage, se font toujours suivant l'ordre exigé par la fin.
Il est donc évident que les êtres mêmes qui n'ont point la faculté de connaître peuvent agir pour une fin, rechercher le bien en vertu de leur appétit naturel et tendre à la ressemblance divine et à leur propre perfection. Au reste, ces expressions diverses ont toutes le même sens; car les êtres s'efforcent de devenir parfaits par cela seul qu'ils recherchent le bien, puisque la bonté d'une chose est proportionnée à sa perfection.
L'être qui s'efforce de devenir bon tend également à ressembler à Dieu, puisque cette ressemblance consiste dans la bonté ; et tel ou tel bien particulier n'est capable d'exciter une appétence quelconque [suivant la nature de l'être], qu'autant qu'il reproduit la ressemblance de la bonté première [et essentielle]. Si donc il recherche son bien propre, c'est parce qu'il veut arriver à la ressemblance divine, et non réciproquement. Ce qui prouve que tous les êtres recherchent cette ressemblance avec Dieu comme leur fin dernière.
On peut considérer-le bien d'un être…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXIV.Tous les êtres, même privés d’intelligence, recherchent le bien.SUITE
On peut considérer le bien d'un être sous différents rapports.
— Premièrement, telle chose est son bien propre comme individu : l'animal, par exemple, recherche son bien propre en même temps que sa nourriture qui doit lui conserver l'être.
— Secondement, ce bien est tel en raison de l'espèce : ainsi l'animal recherche son bien propre en engendrant d'autres animaux, en prenant soin de les nourrir, et généralement en faisant tout ce qui peut contribuer à la conservation ou bien à la sûreté des individus de son espèce.
—Troisièmement, le bien se rapporte au genre ; et c'est en ce sens que l'agent équivoque (4), tel que le ciel, recherche son bien propre en produisant son effet.
— Quatrièmement, ce bien consiste encore dans une ressemblance d'analogie entre les effets et leur principe : Dieu, qui est en dehors de tout genre [ liv. I, ch. 25], donne l'être à tout ce qui existe en vue de son bien propre.
Ceci nous démontre que, plus la vertu active d'un être est parfaite et sa bonté élevée, plus aussi l'appétence du bien se développe en lui, et il recherche et opère ce bien dans les êtres qui s'éloignent de lui davantage. En effet, un être imparfait, ne va pas au-delà du bien qui lui est propre, comme individu; l'être parfait recherche le bien de l'espèce, et celui qui est plus parfait encore aspire au bien de tout le genre. Quant à Dieu, dont la bonté atteint le suprême degré de la perfection, il veut le bien de l'être dans son sens le plus étendu.
C'est donc avec raison…
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(4) L'agent ou la cause est équivoque, lorsque l'effet produit est d'une nature différente. Le soleil, qui par sa chaleur fait germer la graine et croître les plantes, est un agent équivoque.
Dernière édition par Louis le Sam 27 Jan 2024, 6:54 am, édité 1 fois (Raison : Correction en dehors de la citation.)
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXIV.Tous les êtres, même privés d’intelligence, recherchent le bien.SUITE
C'est donc avec raison que plusieurs ont dit, en parlant du bien, qu'en sa qualité de bien il tend à se répandre (5), parce qu'en s'améliorant un être communique sa bonté à d'autres qui sont à une distance plus considérable de lui. Comme aussi l'être le plus parfait de chaque genre est le type et, en quelque sorte, la mesure de tous ceux qui entrent dans ce genre, Dieu, qui l'emporte en bonté sur tout ce qui existe et qui la communique à tout sans exception, est nécessairement, par la manière dont il opère cette diffusion, le modèle de tous les êtres qui en font participer d'autres à leur propre bonté; car un être s'élève à un degré supérieur dans l'ordre des causes à mesure qu'il étend plus loin la diffusion de sa bonté.
Nous devons encore tirer de là cette conclusion, qu'un être, en s'efforçant de ressembler à Dieu en ce qu'il devient la cause d'autres êtres, n'est point détourné de la recherche de son bien propre. Il ne répugne donc point de dire que les corps célestes sont mus, et que leurs moteurs agissent en vue des corps produits par voie de génération et soumis à la corruption, et qui leur sont inférieurs en noblesse; car ceux-ci ne sont pas la fin dernière des autres, et les corps célestes, par là même qu'ils tendent à les produire, se portent aussi vers leur bien propre et recherchent la ressemblance divine, qui est leur fin dernière.
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(5) Du nombre de ces auteurs est saint Denys l'Aréopagite, qui nous représente Dieu communiquant sa bonté aux créatures, dont les plus parfaites s'efforcent de rendre bons les êtres inférieurs. — Ce passage de saint Denys est libellé en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous.
Chap. XXV. Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.
Puisque tous les êtres, y compris même ceux qui sont dépourvus d'intelligence, se rattachent à Dieu comme à leur fin; puisque, d'un autre côté, tous atteignent cette fin en ce qu'ils participent en quelque chose à sa ressemblance, les créatures intelligentes s'approchent de lui d'une manière plus spéciale, c'est-à-dire au moyen de leur opération propre, qui consiste à le connaître. D'où il suit nécessairement que la fin d'une créature intelligente est de connaître Dieu. En effet :
1° Nous avons établi [ch. 18] que Dieu est la fin universelle des êtres. Donc chacun d'eux tend à s'unir à Dieu comme à sa dernière fin, autant que le comporte sa nature. Or, un être s'unit plus intimement à Dieu lorsqu'il peut arriver jusqu'à sa substance, et c'est ce qui a lieu pour qui connaît quelque chose de la substance divine, que s'il lui ressemble seulement sous quelque rapport. Donc toute substance intellectuelle s'efforce d'arriver à la connaissance de Dieu, comme à sa dernière fin.
2° L'opération propre d'un être s'identifie avec sa fin; car cette opération est une seconde perfection (1), et pour cette raison on regarde comme bon et doué de vertu celui qui est convenablement disposé pour réaliser son opération propre. Or, connaître est l'opération propre des substances intelligentes. Donc c'est aussi leur fin. Donc la fin dernière est ce que l'on trouve de plus parfait dans l'opération, surtout lorsqu'il s'agit d'opérations qui ne doivent pas se terminer à un fait, telles que sont celles de connaître et de sentir. Or, comme les opérations de ce genre se spécifient d'après leurs objets, qui les font aussi connaître, celle-là devra atteindre le plus haut degré de perfection dont l'objet est le plus parfait. Par conséquent, la connaissance qui a pour objet le plus parfait de tous les êtres intelligibles, c'est-à-dire Dieu, est aussi la plus parfaite des opérations de ce genre. Donc la fin dernière de toute substance intelligente est d'avoir de Dieu une connaissance intellectuelle.
On pourra raisonner contre nous de la manière suivante : …
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(1) Saint Thomas explique ailleurs en quoi consistent la première et la seconde perfection d'un être. « On distingue, dit-il, deux perfections dans un être, la première et la seconde. La première existe lorsque l'être est parfait sous le rapport de la substance, et elle consiste dans la forme du tout, qui résulte de l'intégrité des parties. La perfection seconde d'un être est sa fin. Cette fin est une opération: par exemple, la fin du joueur de harpe est de faire résonner son instrument; ou bien une chose à laquelle on arrive par l'opération: ainsi l'architecte a pour fin la maison qu'il construit au moyen de son art. La perfection première est la cause de la seconde; car la forme est le principe de l'opération. La perfection dernière, qui est la fin de tout l'univers, est la parfaite béatitude des saints, qui se réalisera à la consommation des temps. La première perfection, c'est-à-dire l'intégrité de l'univers, a existé dès l'origine des choses « ( Summa theolog., Ia q. 73, a. 1, in corp.).
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.SUITE
On pourra raisonner contre nous de la manière suivante : Il est vrai que la fin dernière des substances intellectuelles est de connaître le plus parfait des êtres intelligibles. On ne peut cependant pas affirmer que l'être qui est intelligible au plus haut degré pour telle ou telle intelligence est absolument le plus parfait de tous; mais à mesure que la substance intellectuelle s'élève, l'être qui, pour elle, est le premier des intelligibles, se trouve placé dans un degré supérieur. Il suit de là que, relativement à la plus élevée des substances intellectuelles créées, l'être intelligible le plus parfait est réellement celui qui l'emporte sur tous les autres; et, par conséquent, elle trouvera son bonheur dans la connaissance de Dieu. Mais la félicité de chaque substance intellectuelle subordonnée à celle-là consistera à connaître un être intelligible inférieur, qui sera cependant le plus élevé de tous ceux qu'elle est capable de connaître. L'intelligence humaine surtout, à raison de sa faiblesse, ne saurait arriver à la connaissance de l'être intelligible dont la perfection est absolue; car elle est, par rapport à cet objet souverainement intelligible, dans les mêmes conditions que l'œil du hibou relativement à la lumière du soleil (2).
Mais il est bien certain que la connaissance de Dieu est la fin de toutes les substances intellectuelles, même du dernier degré; car nous avons démontré [ch. 18] que Dieu est la fin dernière vers laquelle tendent tous les êtres. Or, quoique l'intelligence humaine soit la dernière dans l'ordre des substances intellectuelles, elle est cependant supérieure aux êtres dépourvus d'intelligence. Donc, puisqu'il répugne que la substance la plus parfaite existe pour la fin la moins noble, Dieu sera aussi la fin de l'intelligence humaine. Or, nous avons vu [ch. 22] que chacun des êtres intelligents arrive à sa dernière fin par la connaissance qu'il en a. Donc l'intelligence de l'homme s'élève jusqu'à Dieu, comme à sa fin, en ce qu'elle le connaît.
3° De même que les êtres sans intelligence se portent vers Dieu…
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(2) Cette comparaison est celle d’Aristote — Ce passage d’Aristote libellé en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous.
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Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.SUITE
3° De même que les êtres sans intelligence se portent vers Dieu, comme vers leur fin, en s'assimilant à lui, les substances intellectuelles tendent vers lui, ainsi que nous l'avons déjà vu, par la connaissance qu'elles en ont. Or, quoique les êtres privés d'intelligence s'efforcent de ressembler à leurs agents prochains, la nature ne s'arrête pas là, mais sa fin est d'arriver jusqu'à la ressemblance du souverain bien [ch. 19]; et cependant ces êtres ne sont capables de lui ressembler que d'une manière très imparfaite. Donc, quelque incomplète que soit la connaissance de Dieu acquise par une intelligence, elle lui conviendra beaucoup plus comme fin dernière que la connaissance parfaite d'êtres inférieurs.
4° Chaque être désire pardessus tout sa fin dernière. Or, l'intelligence humaine recherche la connaissance des choses divines dans laquelle elle se complaît, bien que cette vue soit très limitée, et elle la préfère à la connaissance qu'elle possède des êtres inférieurs. Donc la fin dernière de l'homme est de connaître Dieu, n'importe à quel degré.
Tout en général recherche la ressemblance divine…
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Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.SUITE
5° Tout en général recherche la ressemblance divine, comme sa fin propre. Donc on doit considérer comme la fin dernière d'un être ce qui le rend autant que possible semblable à Dieu. Or, ce qui établit la ressemblance la plus parfaite entre Dieu et la créature intelligente, c'est la qualité d'être intelligent inhérente à cette dernière ; car elle possède, à l'exclusion du reste des créatures, cette ressemblance qui renferme toutes les autres. Or, cette ressemblance spéciale avec Dieu est plus parfaite dans l'être qui connaît [en] acte que dans celui dont la connaissance est seulement habituelle ou en puissance, parce que la connaissance est toujours actuelle en Dieu [liv. I, ch. 56]. De plus, l'être qui connaît actuellement ressemble davantage encore à Dieu, si Dieu est l'objet de sa connaissance ; car Dieu connaît tout en se connaissant lui-même [liv. I, ch. 46]. Donc la connaissance actuelle de Dieu est la fin dernière de toute substance intellectuelle.
6º Si une chose ne mérite d'être recherchée qu'en vue d'une autre chose, sa raison d'exister est …
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Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.SUITE
6º Si une chose ne mérite d'être recherchée qu'en vue d'une autre chose, sa raison d'exister est l'être que l'on doit aimer seulement pour lui-même ; car si l'on étendait jusqu'à l'infini un appétit naturel, cette tendance de la nature serait vaine, puisque rien de ce qui est infini ne peut passer (3). Or, les sciences, les arts et les aptitudes pratiques ne méritent d'être aimés que pour autre chose; car ils n'ont pas pour fin la science, mais l'action.
Quant aux sciences spéculatives, on peut les aimer pour elles-mêmes, parce que leur unique fin est la science. Si l'on excepte les études spéculatives, il ne se fait, dans l'ordre des choses humaines, aucune action qui ne se rapporte pas à une fin. Le jeu lui-même, qui semble n'avoir aucun but, a aussi une fin qui lui convient, celle de récréer l'esprit, pour lui permettre de se livrer ensuite avec plus de vigueur aux opérations qui demandent une grande application; car si l'on jouait simplement pour jouer, on ne devrait jamais interrompre cet exercice; et personne n'admettra une telle conséquence.
Donc les arts pratiques se rattachent à ceux qui sont spéculatifs, et toute opération humaine a pour fin les contemplations de l'intelligence. Or, toutes les fois que certains arts ou certaines sciences sont coordonnés entre eux, nous voyons que la fin dernière est déterminée par cette science ou cet art qui dirige les autres et leur trace des règles : par exemple, l'art du pilote duquel dépend la fin du navire, c'est-à-dire son usage, est le premier par rapport à l'art de construire les vaisseaux, et ce dernier est soumis à sa direction.
Il en faut dire autant de la première philosophie (4) par rapport aux autres sciences spéculatives; car toutes dépendent d'elle, en ce sens qu'elle renferme en elle leurs principes fondamentaux et les dirige dans la manière de réfuter ceux qui les nient. Cette philosophie a elle-même pour dernière fin la connaissance de Dieu, et c'est pour cela que nous l'appelons une science divine. Donc la connaissance de Dieu est la fin dernière de toute connaissance et de toute opération humaine.
7° Lorsque plusieurs agents et moteurs sont coordonnés ensemble…
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(3) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous. — (4) C'est-à-dire la métaphysique, ou plutôt encore la théologie ; car elle renferme les premiers principes qui doivent servir de base à l'édifice des connaissances acquises par la raison humaine et de critérium à ses découvertes.
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Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.SUITE
7° Lorsque plusieurs agents et moteurs sont coordonnés ensemble, la fin que cherchent à atteindre le premier agent et le premier moteur est nécessairement la fin dernière de tous les autres : ainsi le général et tous les soldats qui combattent sous ses ordres n'ont qu'une seule fin. Or, de toutes les parties de l'homme, son intelligence est le moteur supérieur ; car c'est elle qui meut l'appétit en lui proposant son objet. L'appétit intellectuel, ou la volonté, meut le double appétit sensitif auquel nous donnons le nom d'irascible et de concupiscible; ce qui fait que nous n'obéissons jamais à la concupiscence sans un ordre de la volonté. Lorsque intervient le consentement de la volonté, l'appétit sensitif met à son tour le corps en mouvement. La fin propre de l'intelligence est donc aussi la fin de toutes les actions humaines. Or, la vérité est la fin et le bien de l'intelligence, et par conséquent, sa fin dernière est la première vérité. Donc la fin dernière de l'homme tout entier, de toutes ses opérations et de tous ses désirs, est de connaître la première vérité, qui est Dieu.
8° Tous les hommes désirent naturellement connaître la cause des phénomènes qui se passent sous leurs yeux. C'est ce qui les porta tout d'abord à méditer sur certains faits sensibles qui leur causaient de l'étonnement et dont ils ignoraient les causes, et lorsqu'ils les avaient découvertes, ils cessaient leurs recherches. Or, il reste toujours quelque chose à découvrir tant que l'on n'est pas arrivé à la première cause, et quand on la connaît, on croit posséder une notion complète de la chose. Donc l'homme éprouve naturellement aussi le désir de connaître la première cause, en la prenant pour sa fin dernière. Or, Dieu est la première cause de tous les êtres. Donc la fin dernière de l'homme est de connaître Dieu.
9° L'homme est porté par sa nature à rechercher la cause de tout effet connu. Or, par son intelligence il connaît l'être universel. Donc il désire naturellement connaître sa cause, et cette cause n'est autre que Dieu, ainsi que nous l'avons prouvé [liv. II, ch. 15]. Or, aucun être n'a encore atteint sa fin dernière tant que son désir naturel n'est point satisfait. Donc la connaissance d'un être intelligible, quel qu'il soit, ne suffit pas pour faire le bonheur de l'homme, qui est sa fin dernière, si la connaissance de Dieu ne vient mettre un terme à son désir, comme étant sa dernière fin. Donc la fin dernière de l'homme est de connaître Dieu.
10º Le mouvement d'un corps qui se porte, en vertu d'une appétence naturelle, vers son lieu propre…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
Dieu fin universelle.XXV.Toute substance intellectuelle a pour fin la connaissance de Dieu.SUITE
10º Le mouvement d'un corps qui se porte, en vertu d'une appétence naturelle, vers son lieu propre, augmente d'intensité et de rapidité, à mesure qu'il approche du terme (5). C'est ce qui conduit Aristote à prouver que le mouvement naturel en ligne droite ne peut se prolonger jusqu'à l'infini [ou indéfiniment]; car [s'il était infini] il ne serait pas plus intense dans le second instant que dans le premier (6).
Donc l'être qui tend avec plus de force vers un autre dans l'instant qui suit que dans celui qui précède ne reste pas infiniment en mouvement, mais il se porte vers un objet déterminé. La même chose a lieu lorsqu'une personne est possédée du désir de la science; car plus elle sait et plus elle éprouve le désir de savoir. Donc le désir de la science, qui est naturel à l'homme, a une fin déterminée. Or, cette fin ne peut être que l'objet le plus élevé de la science, c'est-a-dire Dieu. Donc la connaissance de Dieu est la fin dernière de l'homme. Or, la fin dernière de l'homme et de toute substance intellectuelle s'appelle la félicité ou le bonheur; car toute substance intellectuelle aspire au bonheur comme à sa fin dernière et le recherche pour lui-même. Donc le souverain bonheur et la dernière félicité d'une substance intellectuelle, quelle qu'elle soit, consiste à connaître Dieu.
Nous trouvons cette vérité exprimée dans ces paroles do l'Écriture : Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu'ils verront Dieu [Matth., V, 8]. Vous connaître, vous le Dieu unique et véritable, c'est la vie éternelle [Joan., XVII, 3].
Aristote professe le même sentiment lorsqu'il dit que le comble de la félicité pour l'homme est de contempler l'être le plus excellent qu'une intelligence puisse connaître (7).
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(5) C'est une loi physique qui n'admet aucune exception, que les vitesses d'un mobile soumis à une force accélératrice agissant sans interruption, telle que la force de pesanteur qui attire tous les corps vers le centre de la terre, croissent dans la même proportion que le nombre des instants écoulés depuis l'origine du mouvement; de telle sorte que, étant représentée par 10 la vitesse à la fin de la première seconde du mouvement, elle sera de 20 à la fin de la deuxième, de 30 à la fin de la troisième, et ainsi de suite. Quant aux espaces parcourus par le mobile avec ces vitesses croissantes, ils sont proportionnels aux carrés des nombres employés à les parcourir.
(6) Aristote prouve, dans le traité Du ciel (liv.I, c. 4 et 5), que le mouvement qui se fait en ligne droite, ou suivant une ligne courbe, quel que soit son rapport avec le cercle, ne peut infiniment durer, parce que cette ligne a deux extrémités, le commencement et la fin, et l'infini ou l'indéfini, ce qui revient au même dans le cas présent, n'admet pas de fin. Du moment donc que la ligne suivie par le mobile a une fin, comme c'est une loi constante de la nature que le mouvement s'accélère à mesure que le mobile approche de sa fin, ce mouvement aura nécessairement une fin. — Le même philosophe, s'appuyant toujours sur les mêmes principes, démontre dans sa Physique (liv. VIII, c. 8 et 9) que le mouvement circulaire peut seul se continuer jusqu'à l'infini; car la ligne que suit le mobile n'ayant pas de fin, ce mouvement sera toujours uniforme.
(7) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous.
Chap. XXVI. La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.
1° En considérant qu'une substance intellectuelle arrive jusqu'à Dieu par son opération, qui consiste non-seulement à le connaître, mais encore à le désirer par un acte de la volonté, à l'aimer et à se délecter en lui, on sera porté à croire que la connaissance de Dieu n'est pas la fin dernière de l'homme et le comble de sa félicité, mais qu'il atteint bien plutôt ce but en se mettant en rapport avec Dieu par l'amour ou tout autre acte de la volonté, par cette raison surtout que la volonté a pour objet le bien qui est une fin, et que le vrai, qui est l'objet de l'intelligence, n'est une fin qu'autant qu'il est lui-même un bien. Il paraît donc suivre de là que l'homme arrive à sa fin dernière, non par un acte de l'intelligence, mais par un acte de la volonté.
2º Selon le Philosophe, la délectation…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.
2º Selon le Philosophe, la délectation qui résulte de l'opération la rend aussi parfaite que possible, de même que la beauté perfectionne la jeunesse (1). Si donc l'opération parfaite est une fin dernière, la fin dernière sera une opération de la volonté, plutôt que de l'intelligence.
3° On désire tellement la délectation pour elle-même, que jamais…
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(1) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous.
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.
3° On désire tellement la délectation pour elle-même, que jamais on ne la recherche en vue d'autre chose, et il serait ridicule de demander à une personne pourquoi elle veut se procurer quelque plaisir. Or, il entre dans la condition de la fin dernière qu'on la recherche pour elle-même. Donc la fin dernière paraît consister dans l'opération de la volonté plutôt que dans celle de l'intelligence.
4º L'appétence de la fin dernière est commune à tous les êtres, parce qu'elle est naturelle…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.
4º L'appétence de la fin dernière est commune à tous les êtres, parce qu'elle est naturelle. Or, le plus grand nombre recherche la délectation plutôt que la connaissance qui la procure. Donc la première est plutôt une fin que la seconde.
5° La volonté est une puissance supérieure à l'intelligence ; car …
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.
5° La volonté est une puissance supérieure à l'intelligence ; car c'est la volonté qui dirige l'intelligence vers sa fin, puisque l'intelligence considère en acte les choses qui sont habituellement en elle lorsque le sujet le veut. Donc l'action de la volonté est plus noble que celle de l'intelligence. Donc la fin dernière, qui est la béatitude, consiste plutôt dans l'acte de la volonté que dans celui de l'intelligence.
Cette conclusion présente évidemment une impossibilité, et nous le démontrons ainsi :…
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(1) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous le publierons. Bien à vous.
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De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.SUITECette conclusion présente évidemment une impossibilité, et nous le démontrons ainsi :…
1° Comme la béatitude est le bien propre de la nature intellectuelle, elle ne peut lui convenir qu'à raison de ce qui lui appartient, à l'exclusion de toute autre. Or, la nature intellectuelle ne possède pas en propre l'appétit que nous trouvons dans tous les êtres, quoiqu'il y soit de différentes manières, suivant la nature de chacun. Cette diversité vient de ce qu'ils ne sont pas tous également disposés à connaître. Les êtres privés de toute connaissance ont seulement l'appétit naturel; ceux dont la connaissance s'arrête aux sens ont l'appétit sensitif, qui comprend l'irascible et le concupiscible ; enfin, ceux qui connaissent par l'intelligence sont doués d'un appétit proportionné à cette connaissance, savoir la volonté. Donc la volonté n'est pas le propre de la nature intellectuelle en sa qualité d'appétit, mais seulement en ce qu'elle dépend de l'intelligence. Quant à l'intelligence, elle appartient essentiellement en propre à cette nature. Donc la béatitude ou la félicité consiste substantiellement et principalement dans l'acte de l'intelligence bien plutôt que dans l'acte de la volonté.
2° On peut dire de toutes les puissances mues par leurs objets que les objets précèdent naturellement les actes de ces puissances, de même que le moteur est naturellement antérieur au mouvement actuel produit dans le mobile. Or, la volonté est une puissance de ce caractère; car c'est l'objet désirable qui excite le désir. Donc l'objet de la volonté est naturellement avant son acte. Donc le premier objet de cette faculté précède tout acte émané d'elle. Donc l'acte de la volonté ne peut être le premier objet voulu. Or, ce premier objet est la fin dernière, c'est-à-dire la béatitude. Donc il répugne que l'acte même de la volonté constitue la béatitude ou la félicité.
3° Toutes les fois que la puissance peut revenir sur ses actes [par une sorte de réflexion], l'acte de cette puissance doit tout d'abord se porter sur un objet, et elle revient ensuite sur cet acte même. En effet, si l'intelligence connaît qu'elle connaît, elle doit connaître premièrement une chose, et arriver, en second lieu, à connaître son acte de connaître; car cet acte de connaître connu par l'intelligence se termine à un objet. D'où il suit qu'il faudra remonter ainsi jusqu'à l'infini; ou bien, si l'on doit arriver à un premier objet connu, ce sera, non pas l'acte même de connaître, mais un être intelligible. De même, le premier objet voulu ne saurait être la volition elle-même, mais quelque autre bien. Or, la béatitude ou la félicité est le premier de tous les objets voulus par une nature intellectuelle; car c'est en vue de l'obtenir que nous voulons quoi que ce soit. Donc la félicité ne peut consister essentiellement dans un acte de la volonté.
4° Chacun des êtres est en possession de sa véritable nature, lorsqu’il possède les principes constitutifs de sa substance :…
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De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.SUITECette conclusion présente évidemment une impossibilité, et nous le démontrons ainsi :…SUITE
4° Chacun des êtres est en possession de sa véritable nature, lorsqu’il possède les principes constitutifs de sa substance: ainsi l'homme vrai diffère de l'homme peint en vertu des principes qui constituent la substance humaine. Or, ce n'est pas l'acte de la volonté qui établit une différence entre la vraie et la fausse béatitude; car si la volonté désire, aime ou se délecte, elle est dans une disposition identique, quelque objet qu'on lui propose, à tort ou à raison, comme étant le souverain bien, et lorsqu'il s'agit de prononcer si cet objet est réellement ou n'est pas le souverain bien, c'est à l'intelligence à faire cette distinction. Donc la béatitude ou la félicité consiste essentiellement dans l'intelligence et non dans un acte de la volonté.
5º Si la félicité se trouvait dans un acte de la volonté, cet acte serait ou le désir, ou l'amour, ou la délectation. Or, un désir ne peut être la fin dernière; car on désire, parce que la volonté se porte vers un bien qu'on ne possède pas encore ; ce qui contredit la notion de la fin dernière.
L'amour ne saurait être non plus la fin dernière, parce qu'on aime, non-seulement le bien que l'on possède, mais encore celui dont on est privé; car c'est l'amour qui nous fait désirer et nous porte à rechercher ce qui nous manque, et si l'amour de l'objet qu'on possède est plus parfait, cela vient de ce que l'on possède le bien que l'on aime. Donc il ne faut pas confondre la possession du bien, qui est une fin, avec l'amour, qui est imparfait avant la possession et parfait après.
La délectation n'est pas davantage la fin dernière; car la possession du bien est une cause de délectation, soit lorsque nous sentons le bien actuellement possédé, soit lorsque nous gardons le souvenir du bien possédé autrefois, soit encore lorsque nous espérons posséder quelque bien dans l'avenir. Donc la délectation n'est pas la fin dernière. Donc nul acte de la volonté ne doit être envisagé comme étant substantiellement la félicité même.
6° Si la délectation était notre fin dernière…
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6° Si la délectation était notre fin dernière, elle renfermerait en elle ce qui nous la fait rechercher. Or, il n'en est point ainsi. Il est important, au contraire, d'examiner quelle est sa nature, d'après le principe d'où elle découle ; car celle qui provient des opérations bonnes et désirables est elle-même bonne et désirable, et celle qui prend sa source dans des opérations mauvaises est mauvaise, et on doit l'éviter. Donc la délectation est bonne et désirable en vertu d'un principe extrinsèque. Donc elle n'est pas la fin dernière que nous appelons la félicité.
7° Il y a analogie entre l'ordre déterminé par une règle et celui qu'établit la nature (2); car les êtres qui suivent la nature sont coordonnés sans erreur avec leur fin. Or, la nature produit la délectation dans ces êtres en vue de l'opération, et non réciproquement, puisqu'il est facile de constater qu'elle accompagne de délectation les opérations des animaux qui ont pour but de réaliser certaines fins indispensables : tels sont l'usage des aliments, qui a trait à la conservation de l'individu, et les jouissances charnelles, d'où résulte la conservation de l'espèce; et il en est ainsi, parce que si ces choses nécessaires ne causaient aucune délectation, les animaux les délaisseraient complètement. Donc il répugne d'admettre la délectation comme fin dernière.
8° La délectation nous paraît être…
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(2) Les êtres intelligents sont soumis au premier, et ils ont connaissance des lois qu'ils exécutent; la nature impose le second aux êtres sans raison, qui s'y soumettent aveuglément.
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De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.SUITECette conclusion présente évidemment une impossibilité, et nous le démontrons ainsi :…SUITE
8° La délectation nous paraît être simplement le repos de la volonté dans un bien qui lui convient, de même que le désir est une inclination de la volonté vers le bien qu'il s'agit d'obtenir. Or, de même que la volonté de l'homme l'incline vers une fin dans laquelle il se repose, ainsi les corps naturels sont inclinés par la nature vers leurs fins propres, et ils s'y reposent, lorsque chacun d'eux est arrivé à sa fin. Or, il serait absurde de dire que la fin du mouvement d'un corps pesant n'est pas de le placer dans son lieu propre, mais uniquement de mettre un terme à la tendance qui le portait vers ce lieu ; car si la nature n'avait en vue que de calmer cette inclination, elle ne la mettrait pas dans ce corps. Mais elle la lui donne, afin que par elle il se porte vers le lieu qui lui convient, et lorsqu'il y arrive comme à sa fin, cette inclination se trouve apaisée. Par conséquent, ce résultat n'est pas une fin, mais il est simplement attaché à la fin. Donc, à plus forte raison, aucun acte de la volonté ne constitue la félicité.
9° Si la fin d'un être lui est extrinsèque, sa fin dernière est dans l'opération qui le fait arriver la première jusqu'à cette chose : par exemple, c'est la possession et non l'amour ou le désir de l'argent que recherchent ceux qui font une fin de l'argent. Or, Dieu est la fin dernière des substances intellectuelles. Donc l'opération qui fait principalement arriver l'homme jusqu'à Dieu est substantiellement sa béatitude ou sa félicité. Or, telle est l'opération de connaître; car nul ne peut vouloir ce qu'il ignore. Donc l'homme trouve substantiellement sa félicité parfaite dans la connaissance intellectuelle de Dieu, et non dans un acte de sa volonté.
Nous trouvons dans ce qui précède de quoi résoudre les objections ci-dessus énoncées :…
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Re: Somme de la Foi catholique contre les Gentils.
De la vraie félicitéXXVI.La félicité ne consiste pas dans un acte de volonté.SUITE
Nous trouvons dans ce qui précède de quoi résoudre les objections ci-dessus énoncées :
1° De ce que la félicité est l'objet de la volonté, par la raison qu'elle est le souverain bien, on n'est pas forcé de conclure qu'elle est substantiellement l'acte même de la volonté, ainsi qu'on le prétend en premier lieu; et même il est certain qu'étant l'objet principal de la volonté, elle ne peut être l'acte de cette faculté.
2° Nous rejetons ce principe, énoncé dans le second argument, que…
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