Les Soeurs Grises dans l'Extrême-Nord : Cinquante ans de Missions

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Message  Louis Jeu 28 Jan 2016, 2:28 pm

CHAPITRE  VI

LE COUVENT DES SAINTS-ANGES

Mission de la Nativité du Lac Athabaska

(1874)

(suite)

Les Soeurs Grises dans l'Extrême-Nord : Cinquante ans de Missions  - Page 3 Page_110

Nous ne raconterons pas les voyages des sœurs missionnaires d'Athabaska dans leurs dix-sept volumes, les lettres écrites du rocher d'Athabaska, sous le flot des impressions toutes vives. Elles seraient des plus intéressantes pour les lecteurs étrangers à ces sauvages pays, car toutes nous ont captivé, quoique la description des lieux et des dangers eût perdu pour nous l'attrait de l'inconnu.

En dehors de ces voyages d'obédience, les Sœurs Grises n'en entreprennent guère. Au cours de l'été cependant, elles apprêtent parfois leurs enfants, et les conduisent à des promenades qui, pour être promenades du Nord, doivent s'agrémenter de quelques imprévus malencontreux. Pourquoi ne fixerions-nous pas ici le souvenir d'un de ces pique-niques, pris à la plume pittoresque de Sr Dufault, une des anciennes d'Athabaska? Il y sera montré comme le "vieux-gris" — ainsi désigne-t-on le diable dans le Nord — s'ingère jusque dans les amusements, et comme aussi on l'en déloge en s'adressant à quelqu'un plus puissant que lui.

"Lac Athabaska, 31 décembre 1901—... Le 11 Septembre (1900), fête de Mère Vicaire, nous préparâmes un grand congé. C'était un pique-nique à l'Ile-aux-Outardes, c'est-à-dire près de deux heures en bateau. A huit heures du matin, tout le personnel de la mission avait pris place dans le Saint-Joseph. La journée se passa gaiement. Comme nous finissions de souper, des nuages s'amoncelèrent à l'horizon. Nous nous empressâmes de plier bagage, et l'ancre fut levée; mais déjà le veut soufflait fort et commençait à nous inquiéter. Nous avancions quand même. Voilà tout l'équipage pris du mal de mer, et le bateau ballotté terriblement. Je n'avais jamais vu de vagues aussi hautes; pourtant nous n'étions pas encore au large.

Enfin, nous redoutâmes tellement des accidents, que nous nous décidâmes à rebrousser chemin; car outre le danger menaçant, nous aurions manqué de bois pour le foyer de la chaudière, le bateau n'avançant que très difficilement. Pour comble de malheur, l'esquif attaché à l'arrière du vaisseau s'était brisé. Impossible d'aller à terre: il fallut se résignera passer la nuit à l'ancre. Toujours en mouvement, on se serait cru dans un grand berceau; mais personne ne pouvait dormir. Il faisait froid, nous n'avions pas une couverture. Les enfants étaient couchés à fond de cale. La nuit fut bien longue, et le jour fut salué avec enthousiasme: l'heure du départ allait peut-être sonner. Le vent cependant n'avait pas cessé. On se demandait comment nourrir la troupe affamée; il ne restait plus rien de la veille! Mais la Providence nous avait ménagé un petit sac de farine, seule provision du bateau. Un autre malheur nous attendait. On s'était approché autant que possible du rivage: sans qu'on s'en aperçût, les eaux du lac se retirèrent, et le bateau resta échoué. Les Frères et les petits garçons travaillèrent…

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Message  Louis Ven 29 Jan 2016, 7:07 pm

CHAPITRE  VI

LE COUVENT DES SAINTS-ANGES

Mission de la Nativité du Lac Athabaska

(1874)

(suite)

Les Frères et les petits garçons travaillèrent toute la journée par différents procédés pour pousser au large. Enfin, désespérés, ils abandonnèrent la tâche. Il fallait attendre que l'eau remontât, ce qui pouvait nous mener à plusieurs jours. Déjà nous avions invoqué notre vénérable Mère d'Youville: on voulut faire un dernier effort en criant tous ensemble, pendant que les hommes agissaient: "Vénérable Mère d'Youville, secourez-nous!" Au grand étonnement de tous, le bateau glissa, et tout le monde de crier: "Vive notre Vénérable Mère d'Youville!" Le P. Charbonneau voulut avoir son image près de sa machine. Toute la journée, Sr Saint-Pierre et moi avons fait de la galette sur un tout petit poêle. A peine cuite, elle était dévorée. Enfin, l'équipage se prépara à partir, il était cinq heures... A huit heures, nous débarquions, bienheureux d'arriver chez nous. Ma Sr Supérieure et ma Sr Jobin avaient passé la nuit et la journée dans des angoisses mortelles. Elles avaient vu la tempête: quelque grand malheur ne nous était-il pas arrivé? On s'embrassa avec autant de joie que si nous fussions parties depuis an an. Voilà un congé qui fera époque dans notre vie du Nord."

Ce à quoi l'auteur du présent chapitre pourrait bien ajouter que…

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Message  Louis Sam 30 Jan 2016, 10:36 am

CHAPITRE  VI

LE COUVENT DES SAINTS-ANGES

Mission de la Nativité du Lac Athabaska

(1874)

(suite)

Ce à quoi l'auteur du présent chapitre pourrait bien ajouter que, quinze ans plus tard, invité à un pique-nique aux bluets (myrtils), sous la présidence du P. de Chambeuil, avec les Sœurs Dufault, Laverty et Saint-Cyr, F. Courteille mécanicien, et F. Crem pilote, on fit vapeur vers le lac Brochet, communiquant à quelque vingt milles seulement avec le lac Athabaska; que le soleil du départ frappait magnifique le miroir du lac; que subitement les chants et !es rires de la jeunesse des Saints-Anges stoppèrent sur un banc


de sable; que le lendemain au soir seulement, d'échouement en échouement, les derniers huit milles furent conquis; que de l'oasis aux bleuets nous revînmes au bateau, brisés, trempés, ayant pour orchestre un orage diluvien; que trois jours d'inquiètes manœuvres furent dépensés à reprendre les vingt milles contre le vent, la houle, la pluie et le grésil ; que le grand lac atteint déchaîna sur le Saint Emile ses fureurs de 1900, déjà oubliées par Sr Dufault; et qu'enfin, le soir du samedi, par cinq degrés centigrades au-dessous de zéro, au sein d'une tourmente opaque de neige, quatre jours après le 8 septembre, fête patronale de la mission Nativité, et date extrême fixée pour le retour, nous touchâmes le rocher des Saints-Anges.

Quel pays! Et comme il fait payer ce qu'il accorde, jusqu'à ses plaisirs!

N'importe, il y avait, pour les desserts de l'hiver sept cents livres pesées de baies veloutées; personne ne fut malade : pas un ne toussa ; et, tout de suite, enfants, sœurs, frères et pères se mirent à projeter le pique-nique 1917, dont le devoir sera de battre tout record, puisqu'il sera celui du jubilé... (1)

Le couvent des Saints-Anges, situé dans le vicariat apostolique d'Athabaska, est resté sous la juridiction de Mgr Grouard, bien qu'il lasse partie de la "province du Mackenzie" des Sœurs Grises.

Sans être à l'abri des épidémies et des disettes qui peuvent fondre sur tous les couvents de ces régions, il a atteint un degré de prospérité qui lui permet de recevoir de nombreux élèves, et de leur donner une éducation complète, fruit et honneur de notre sainte religion.

Maintes allusions à ses épreuves et à ses succès reviendront, plus loin, dans nos considérations d'ensemble sur l'oeuvre des sœurs missionnaires du Nord.

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A suivre : Chapitre VII. L'Hospice Saint-Joseph.

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Message  Louis Dim 31 Jan 2016, 1:31 pm

CHAPITRE VII

L'HOSPICE SAINT-JOSEPH

Fort-Résolution du grand lac des Esclaves

(1903)

L'Hôpital du Sacré-Cœur et le couvent des Saints-Anges restèrent longtemps les deux seuls établissements des Sœurs Grises dans l'Athabaska-Mackenzie. Mais l'année 1901, qui vit s'accomplir la division de l'ancien vicariat et la formation des deux vicariats distincts de l'Athabaska et du Mackenzie, marque aussi le commencement d'une ère nouvelle pour les missions des Sœurs Grises dans ces immenses régions.

La première fondation que nous rencontrons à cette époque est celle de l'Hospice Saint-Joseph, qui s'élève aujourd'hui gracieusement sur le bord du Grand Lac des Esclaves, si célèbre dans l'histoire des missions du Nord. Du seuil du couvent, se voit l'endroit du large où Mgr Grandin passa la nuit du 15 décembre 1863, égaré dans la tourmente de neige. A bout de force, se croyant perdu, il confessa son petit compagnon, s'enveloppa avec lui contre le traîneau et les chiens, et attendît la mort.

La résidence du missionnaire se trouva alors sur l'Ile d'Orignal, en face, à trois milles du Fort-Résolution, situé en terre ferme.

La mission Saint-Joseph eut pour père Mgr Faraud, qui vint planter la croix au Grand Lac des Esclaves, en 1852. Il y fit, dès sa première visite soixante-huit baptêmes. Déjà ces bons sauvages Montagnais avaient envoyé une députation au P. Taché, au lac Athabaska, en 1848:

— Hâte-toi, lui faisait dire un vieillard, mes cheveux sont tout blancs: je crains de me coucher dans ma tombe avant  d'avoir entendu ta parole.

Le P. Gascon, décédé à Saint-Boniface en 1914, à l'âge de 87 ans, et le P. Dupire, toujours vivant, jeune et gai, furent les colonnes de la mission, pendant les quarante-cinq ans qui vont de 1858 à l'arrivée des sœurs. Ce fut le P. Dupire, directeur depuis vingt-cinq ans, qui eut l'honneur de recevoir les premières Sœurs Grises, en 1903.

Le Fort-Résolution, rendez-vous de fervents et nombreux sauvages, était l'un des sites les plus favorables à l'oeuvre constamment poursuivie de l'éducation de l'enfance. L'un des premiers soins de S. G. Mgr Breynat, premier titulaire du nouveau vicariat du Mackenzie, fut de solliciter de la T. H. Mère  Hamel  de nouvelles missionnaires. Il  les obtint, aux conditions anciennes: "prier, travailler, jeûner ensemble. ''



Les Soeurs Boisvert. supérieure, Généreux, Mc-Quillan, Honorine et Ernestine quittèrent Montréal, le 20 avril 1903, et arrivèrent, le 16 juin, à bord du Saint-Alphonse, au Grand Lac des Esclaves, en compagnie de Mgr Breynat et des PP. Duport et Laperrière.

Elles furent accueillies par la population avec affection et curiosité.

— Leur habit serait bien plus beau, s'il était rouge, faisait remarquer une sauvagesse.

La surprise de Monseigneur et des soeurs avait été grande, de n'apercevoir, en approchant de la côte, qu'une demi-charpente nue, là où chacun croyait trouver le couvent promis.

— Mais nous ne vous attendions pas du tout! fut le premier mot de la réception...

Et cependant, ce qu'elles étaient désirées! L'explication se fit bientôt, courte et convaincante.

L'été de l'année précédente 1902, Mgr Breynat…

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Message  Louis Lun 01 Fév 2016, 11:29 am

CHAPITRE VII

L'HOSPICE SAINT-JOSEPH

Fort-Résolution du grand lac des Esclaves

(1903)


(suite)

L'été de l'année précédente 1902, Mgr Breynat, partant du Grand Lac des Esclaves pour la France, avait prévenu le P. Dupire que, s'il parvenait à s'assurer le concours des soeurs pour le printemps suivant, il lui écrirait de poursuivre la construction commencée. Sinon, le père emploierait l'hiver à des travaux plus pressés.   Sa Grandeur eut plein succès à Montréal et écrivit immédiatement.

La lettre arriva... un mois après les soeurs elles-mêmes.

C'est ainsi que, de toutes les religieuses missionnaires, ce fut la communauté du Grand Lac des Esclaves qui trouva le plus misérable Bethléem. A La Providence, une maison avait été bâtie pour elles; à Athabaska, elles eurent un hangar à elles; à Résolution, elles habitèrent un grenier d'emprunt.

La Sœur Boisvert écrit :

"Le 16 juin, nous arrivions enfin au cher Fort-Résolution, notre terre promise. Notre première visite fut à l'église pour rendre nos hommages au divin Maître, et lui offrir nos humbles personnes pour travailler à sa plus grande gloire et au salut des âmes. Nous avions aussi les plus vives actions de grâces à rendre à Dieu, de nous avoir protégées au milieu des nombreuses difficultés contre lesquelles nous avons eu à lutter, pour arriver au terme de notre voyage. Mais les fatigues, le froid surtout et le mauvais temps, loin d'affaiblir les forces semblaient en donner â celles qui n'en avaient pas, et les augmenter à celles qui en avaient déjà. La petite Sœur Ernestine seule fait exception à cette règle. Elle s'est sentie malade tout le long du voyage, ne pouvant même garder un peu de bouillon. A Saint-Albert, elle parut se remettre; mais à peine partie, une rougeur, que nous avions prise d'abord pour une piqûre de maringouin, lui causa de fortes douleurs.    Celle rougeur s'est agrandie et devenue une plaie.   Je fais reposer cette chère sœur et la soigne du mieux que je puis.

Nous avons eu la déception de ne pouvoir habiter notre couvent: les travaux ne sont pas assez avancés.

Nous  y entrerons, je crois, au commencement d'août.

En attendant nous avons pour logis le grenier de la maison des Révérends Pères.   Nous ne pouvions commencer une mission plus pauvrement. C'est bon signe, paraît-il.''

Le grenier en question mesurait quatre pieds de hauteur.  C'était  la remise  pour les attelages des chiens, traîneaux et  instruments divers, le garde-manger à viande et poissons secs, le dépôt des denrées alimentaires; et au surplus, ainsi que tout bon grenier du Mackenzie. il était hanté de souris, "qui, en nombre de mouches, paraissaient mécontentes de l'intrusion qui venait troubler la liberté de leurs ébats"!

Dans ce grenier, les religieuses…

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Message  Louis Mar 02 Fév 2016, 11:49 am

CHAPITRE VII

L'HOSPICE SAINT-JOSEPH

Fort-Résolution du grand lac des Esclaves

(1903)


(suite)

Dans ce grenier, les religieuses passèrent tout le temps de la canicule du Nord, laquelle est aussi extrême que ses froids. Chacune gagnait, en marchant à genoux, la couchette qui lui était assignée sous combles.

Le 24 juillet, sonna la délivrance.

Les frères, libres du service du Saint-Alphonse, qui les avait retenus pour la desserte annuelle des missions, s'étaient remis à l'œuvre. Le 23, ils commencèrent à poser le plancher  inférieur. Le lendemain, à quatre heure de  l'après-midi,  les sœurs étaient installées, avec cinq enfants, reçus le jour même de leurs parents sauvages retournant aux bois pour l'hiver: trois filles et deux garçons. Le couvent n'avait encore ni chambres, ni cloisons. Des couvertures tendues en faisaient l'office, et une échelle menait à l'unique étage.



Le premier et invariable article du programme, dans l'éducation du Nord, est le lavage complet des enfants. Ils arrivent déguenillés, crasseux, chassieux, grouillants de vermine, les pauvres petits !... Une heure après, vous les prendriez pour de petits blancs, beaux à croquer. Mais encore faut-il les blanchir: tâche peu commode, vu leur épouvante devant leur premier bain! Donc. Sr Honorine, cette après-midi du 24, venait de passer à l'eau l'un des deux... L'ayant déposé délicatement dans un tas de copeaux, le temps de s'en aller prendre, derrière la couverture voisine, petite chemise et petit pantalon frais, c'en fut assez. Elle trouva les copeaux frémissants. Le sauvageon, épris de la forêt, s'était enfui. Un frère, par bonheur, l'avait aperçu au passage. Il le ramenait déjà.

Aménagement et ameublement se poursuivirent.

Le P. Dupire, dans sa chronique, rend hommage aux vertus pratiquées durant ces semaines: " Le 30 août, le F. O'Connell installait les poêles dans la maison des sœurs, qui depuis longtemps grelottaient de froid dans leur palais, où tous les vents ont libre accès, et où elles acquéraient des mérites dont Dieu seul connaît la valeur, en supportant, non seulement avec courage et patience, mais de très bon cœur, la privation de toutes les commodités. Chères sœurs, ma conscience me rend le témoignage que j'ai fait l'impossible pour éviter les difficultés présentes... Dieu sait que nul plus que moi ne reconnaît, dans la sincérité de son cœur, que vous êtes des auxiliaires incomparables du missionnaire, et n'apprécie à sa juste valeur votre abnégation et votre dévouement."

Cette maison de vingt pieds sur trente fut, pendant  six années, l'hospice Saint-Joseph. C'en fut trois de trop, car le nombre des recrues ne tarda guère a déborder !a capacité de l'enceinte.

Le P. Mansoz, assistant du P. Dupire, lors de l'arrivée des religieuses, et témoin de tontes les épreuves, s'en exprime de la sorte: …

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Message  Louis Mer 03 Fév 2016, 2:16 pm

CHAPITRE VII

L'HOSPICE SAINT-JOSEPH

Fort-Résolution du grand lac des Esclaves

(1903)


(suite)

Le P. Mansoz, assistant du P. Dupire, lors de l'arrivée des religieuses, et témoin de toutes les épreuves, s'en exprime de la sorte:


"Ce local provisoire suffisait aux cinq sœurs et aux vingt-cinq enfants des trois premières années; mais le personnel des religieuses s'étant porté de cinq à neuf, et nos pupilles de vingt-cinq à quarante-cinq, cette habitation n'offrait plus même le confortable le plus indispensable. Durant le jour, il était relativement facile de placer tout le monde, car les cours de récréation étaient souvent mises à contribution; mais, le soir venu, la chose devenait scabreuse, et lorsque les sœurs, se réservant à peine un petit coin discret, alignaient tout leur petit monde, les juchant sur les tables et les armoires, ou les glissant dans les meubles, les anges gardiens étaient ravis devant ces prodiges d'adresse. Sans nul doute, Dieu se penchait alors paternellement sur nos orphelins; et leurs dévouées institutrices, pour les préserver de tout danger. Cependant, était-il permis de tenter le Ciel plus longtemps? On se pressa donc, on déploya tant d'activité, que le nouveau couvent et l'évêché furent emportés d'assaut avec décembre 1909."


De 1906, date où le P. Mansoz dut prendre la direction de la mission, à ce mois de décembre 1909, que de labeurs et de tours de force furent accomplis! Le couvent projeté exigeait, pour la partie principale, deux cent mille pieds de bois, et le moulin qui devait les livrer n'était pas lui-même construit. Pères et frères, â la suite de Monseigneur, se mirent au travail. Au cours de mars et avril 1907, les fondations du moulin furent jetées, malgré le froid intense. Dès le mois de mai, il attaquait un énorme radeau de cinq cents billots. Les planches sciées, toutes les énergies se tourneront vers le couvent et le nouvel évêché.

Monseigneur résolut de bâtir dans le bois, parce que la propriété de la Mission dans le Fort, se trouvant trop resserrée au milieu dès constructions voisines, n'eût point permis de donner aux édifices et à leurs dépendances les proportions désirables. L'emplacement choisi fut donc défriché, déblayé, et les frères purent poser les fondements, avant l'hiver.

En juin 1908, les Frères O'Connell et Kérantret, M. Gagnon, brave canadien, et quelques ouvriers indiens ou métis reprirent les travaux. L'hiver transporta sur d'autres champs, notamment celui de la pêche, très précaire celle année-là, l'activité générale. L'été 1909 passa aussi sans que ni couvent ni évêché fussent encore habitables... Pourtant il tardait à tous de vivre enfin !

"Le 2 novembre, les travaux reprirent avec plus d'élan encore...

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Message  Louis Jeu 04 Fév 2016, 12:15 pm

CHAPITRE VII

L'HOSPICE SAINT-JOSEPH

Fort-Résolution du grand lac des Esclaves

(1903)


(suite)

"Le 2 novembre, les travaux reprirent avec plus d'élan encore. Sa Grandeur, ayant prévu la possibilité d'achever l'année dans le nouvel emplacement, anima les volontés et fit déployer, en tout novembre, une activité prodigieuse, dans les deux communautés Saint-Joseph. Les pères et les frères, ayant à leur tête Monseigneur, consacrèrent leurs journées aux travaux d'installation les plus nécessaires. Les sœurs, pendant la dernière quinzaine du mois, firent les derniers préparatifs de déménagement et d'aménagement. Tous les jours, on vit défiler une troupe joyeuse d'enfants ployant sous leur fardeau, heureux d'aller meubler eux-mêmes leur futur palais... Le jour de l'invasion fut vraiment un jour de joie et de fête pour tous, car tous avaient été à la peine. Le premier dimanche de décembre, une messe d'actions de grâces fut chantée dans la chapelle du couvent. Le 8 décembre, on se réunit pour les agapes. Il n'y eut pas de discours prononcés, pas de toasts pour dire la joie de tous, c'était superflu. Le joyeux gazouillis des enfants et leurs éclats de rire nous arrivaient des salles voisines, et exprimaient assez éloquemment ce que chacun éprouvait dans l'intimité. Faire autour de soi des heureux, n'est-ce pas le comble du bonheur pour le coeur de l'apôtre? "

Sr Sainte-Albine se chargea de traduire à la maison-mère la joie des sœurs missionnaires.

" .. .Depuis la visite de notre bonne Mère Vicaire notre maison a subi une grande transformation. C'est à ne s'y pas reconnaître. Nous nous croyons nous mêmes sous l'impression d'un beau rêve. Mais, ré-



jouissez-vous avec nous, c'est bien une réalité; nous habitons enfin notre couvent neuf. A son retour de France, Mgr Breynat a poussé les travaux avec une telle activité, qu'en dépit des prévisions nous avons pu déménager au commencement de décembre. Ce fut un jour de grandes réjouissances et surtout d'actions de grâces. Aussi malgré l'extrême fatigue du déménagement, la joie, le contentement se lisaient sur toutes les figures. Pour sa part, Monseigneur semblait avoir déposé un lourd fardeau qui l'accablait depuis longtemps. Il est admirable de bonté et de dévouement pour nous. La bénédiction de la maison fut faite par Sa Grandeur, et fut suivie d'un salut d'actions de grâces où, de toute l'effusion de notre cœur, nous avons remercié le bon Dieu et notre père saint Joseph de l'heureuse issue de cette entreprise hérissée de difficultés sans nombre.

Quoique à demi-terminé, notre couvent est confortable; les appartements sont vastes et bien éclairés. Notre petite chapelle est jolie et porte au recueillement. Le système de chauffage fonctionne à merveille, et nous fait oublier la rigueur de nos froids polaires. Jusqu'aux mouches et aux maringouins qui, en sentant cette douce chaleur, se sont réveillés, croyant l'été arrivé. Ils bourdonnent à qui mieux mieux. C'est joli en hiver, mais ça promet pour l'été prochain. Bien sûr, il y aura de quoi expier toutes nos sensualités..."

Pauvres sœurs, les sensualités du Mackenzie!

Elles n'attendirent pas l'époque des maringouins pour…

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Message  Louis Ven 05 Fév 2016, 12:36 pm

CHAPITRE VII

L'HOSPICE SAINT-JOSEPH

Fort-Résolution du grand lac des Esclaves

(1903)


(suite)

Pauvres sœurs, les sensualités du Mackenzie!

Elles n'attendirent pas l'époque des maringouins pour les expier, ni pour apprendre qu'en cage dorée on peut encore souffrir... et de la faim.

Elles écrivaient bientôt :

"Le nombre de nos enfants est limité par notre crainte de les faire jeûner. Nous manquons de poisson; une partie de la pêche d'automne est gâtée par le dégel. La pêche faite sous la glace ne rapporte presque rien relativement aux besoins. Il n'y a pas de caribous cet hiver, et nous sommes à bout de provisions. Notre situation est vraiment critique. Nous prions et faisons force promesses à saint Joseph... Cette détresse nous fait sentir que Dieu seul est notre protecteur, et nous sommes heureuses de souffrir pour la belle oeuvre qu 'il nous a confiée."

Le chroniqueur de la mission nous dépeint lui aussi cette extrême disette, mais finalement il conclut comme on devait s'y attendre, par une louange à l'honneur du père nourricier du Mackenzie:

'"L'année 1910 fut riche en épreuves, surtout pendant les quatre premiers mois. Monseigneur fut heureusement parmi nous, pour nous encourager et nous diriger.

"'Notre grenier était vide: les souris même étaient inconsolables... Nos soixante enfants durent être rationnés plus que jamais. Confiants en la Providence, nous essayâmes tous les moyens possibles pour sortir de cette pénurie désolante. Cinquante hameçons furent tendus près de l'Ile-aux-Œufs (â dix-huit milles environ du Fort) ; plusieurs furent essayés aussi avec quelques rets, aux Iles Brûlées. Ce dernier essai étant nul, et la pêche à l'lle-aux-Œufs, sans être abondante, donnant meilleur résultat, nous continuâmes jusqu'à fin mars, époque des carpes à la rivière au Bœuf... Lorsque, après la retraite annuelle, en février, les Frères Joseph Beeksehoeffer et Kérautret partirent pour le chantier, le P. Duport et le F. Jean-Marie continuèrent la pêche à l'Ile-aux-Œufs, ramenant une quinzaine de truites chaque fois. N'ayant à leur service que les chiens impotents, laissés ici à cause de  leur inutilité, ils passèrent de bien tristes moments sur le lac. Dieu, ayant pour agréables leur bonne volonté et les sacrifices si généreusement acceptés, récompensa leur dévouement et bénit leurs pénibles travaux. Ces deux vaillants trouvèrent pour nos enfants le pain quotidien...

"Ceux qui connaissent la truite de nos grands lacs du Nord savent qu'à la longue, ce poisson fatigue et le goût et les estomacs. Nos enfants tirent une neuvaine à saint Joseph, le priant, de leur trouver un morceau de viande. Le bon Patriarche s'émut sensiblement à la prière de ces petits et, le 19 mars, jour de sa fête, il nous envoya six orignaux. Le cher Saint reçut les remerciements et les actions de grâces de tous, surtout du bon père économe, le P. Duport, qui revoyait dans ses greniers l'abondance d'autrefois."

Et ainsi, d'abondance à disette, dans la joie des enfants de Dieu toujours, s'écoulèrent les années.

Le couvent Saint-Joseph du Grand Lac des Esclaves, tout achevé depuis quelques mois, avec ses cinquante embrasures, sur ses cent quarante-quatre pieds de front, surmonté de son toit "français", couronné de son beffroi à la croix blanche, est sans doute le plus beau monument élevé par le Mackenzie, à la gloire de Dieu et de l'Eglise.

Dix sœurs missionnaires y préparent à la vie chrétienne cent enfants, venus de tous les bois, qui bordent la rivière des Esclaves et le Grand Lac.

A suivre : Chapitre VIII. Nouvelles Fondations.

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Message  Louis Sam 06 Fév 2016, 12:17 pm

CHAPITRE VIII

NOUVELLES  FONDATIONS

Fort-Smith —  Fort-Simpson  — MacMurray

Les Esquimaux


(1914-1916)


FORT-SMITH

La Mission montagnaise Saint-Isidore du Fort-Smith forme le seuil du vicariat du Mackenzie. Etablie par le P. Gascon qui la visitait du Grand Lac des Esclaves, elle eut pour premier missionnaire résidant, en 1888, le P. Joussard, aujourd'hui évêque auxiliaire de Mgr Grouard.

Le Fort-Smith, situé au pied des derniers rapides infranchissables à la navigation vers l'Océan Glacial arctique, et par suite, entrepôt nécessaire des voies fluviales de l'Alberta et du Mackenzie, armé de pouvoirs hydrauliques inépuisables, sera sans doute l'un des premiers centres actifs des exploitations industrielles futures de l'Extrême-Nord. Cette perspective ne pouvait échapper au regard du premier pasteur du Vicariat, et c'est pourquoi Mgr Breynat voulut doter le Fort-Smith d'un hôpital et d'une école.




L'hôpital fonctionne depuis 1914, et l'école depuis 1915, aux mains des Soeurs Grises.

Les fondatrices, Révérende Mère Léveillé, provinciale et supérieure locale, Sœurs Fortin, Gadbois et Beaudry, celle-ci bientôt remplacée par Sr Jobin, arrivèrent aux premières vêpres de la Saint-Jean-Baptiste. La construction de l'hôpital était à peine commencée. Un appentis étroit fut la demeure provisoire des sœurs. Un malade venu trop tôt dut se contenter de la chambre de Monseigneur, au presbytère. Mais le moulin à scie de Résolution avait fait bonne besogne: les planches étaient là, et les travaux, sous la direction du P. Josso, allèrent bon train.

Le 24 août, les sœurs prirent possession de l'édifice actuel, destiné lui-même à devenir l'aile droite d'une grande construction. Le P. Mansoz, supérieur de la mission, y célébra la première messe, le 8 septembre, fête de la Nativité de Marie; et le 31 décembre, il écrivait dans son journal:

"Que Dieu soit à jamais béni de nous avoir donné de mener à bonne fin l'achèvement de l'hôpital, dont la belle oeuvre est connue le point de départ d'une ère de prospérité et de bénédictions pour la mission du Fort-Smith."

L'hôpital, déjà insuffisant en 1916…

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Message  Louis Dim 07 Fév 2016, 12:24 pm

CHAPITRE VIII

NOUVELLES  FONDATIONS

Fort-Smith —  Fort-Simpson  — MacMurray

Les Esquimaux


(1914-1916)


FORT-SMITH

(suite)

L'hôpital, déjà insuffisant en 1916, vient d être agrandi. (1)

Auprès de l'hôpital, l'école, la jolie petite école.

Elle fut littéralement envahie, le jour de son ouverture, 6 septembre 1915, à la surprise de tous ceux qui connaissent l'apathie indienne. Protestants et catholiques y accourent au premier son de la cloche, même par les cinquante et soixante degrés de froid, qu'enregistre parfois le thermomètre du Fort-Smith.   (2)

Et même — va-t-on le croire? — il arriva à Sr Gadbois, en l'honneur du centenaire des Oblats, 25 janvier 1916, de poser la question que maîtres et maîtresses de tous les temps et de tous les pays posèrent sans doute quelquefois:

— Que voulez-vous pour demain, mes enfants, car c'est grande, grande fête: la classe ou un congé?

— La classe, ma sœur, la classe ! ! !

Et le cri venait de l'âme. Depuis, l'institutrice, à qui il n'est pas défendu de tenir aux congés plus que ses élèves, se garde bien de parler de la sorte. Elle impose.



— Demain, ce sera congé.

Et les petites têtes rouges de s'incliner par résignation. Le temps redouté, honni au Fort-Smith, est celui des vacances.

Oyez, petits Canadiens blancs !

Ajouterons-nous, pour citer une épreuve, que pendant l'automne, l'hiver et le printemps 1915-1916, les religieuses et religieux du Fort-Smith furent privés de pommes de terre, ce pain du pauvre ! Une gelée profonde de septembre les avait atteintes dans le sein du sol. Saint-Joseph du Grand Lac des Esclaves, mission voisine, à 190 milles, qui était largement pourvue, ne put trouver qu'au bout de neuf mois et quelques jours le moyen d'en faire parvenir aux affamés.

A suivre : FORT-SIMPSON

_________________________________________________

(1) L'un des principaux ouvriers de l'hôpital du Fort-Smith fut Isidore Mercredi, ancien élève du couvent du lac Athabaska. et devenu menuisier accompli, à l'école du célèbre Frère Ancel, O.M.I.

L'hôpital a compté, pour sa première année: 1582 pansements, 1642 prescriptions du médecin ou de la Sœur infirmière, 578  visites à domicile, et 6 opérations chirurgicales.   Il n'y eut que deux décès.

(2) Au Fort-Smith et au Fort-Résolution, le gouvernement a confié aux Soeurs ses postes de météorologie. Elles consignent chaque jour leurs observations, et en dressent des rapports périodiques fort appréciés.

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Message  Louis Lun 08 Fév 2016, 10:55 am

CHAPITRE VIII

NOUVELLES  FONDATIONS

Fort-Smith —  Fort-Simpson  — MacMurray

Les Esquimaux


(1914-1916)


FORT-SIMPSON

Simpson a été dénommé, selon les points de vue, le cœur du Mackenzie, la Babylone du Nord, la citadelle du protestantisme.

Cœur du Mackenzie, Simpson l'est de par sa Situation centrale, du Fort-Smith à l'Océan Arctique. Il l'est aussi par son grandiose emplacement, au confluent  de la rivière des Liards, qui descend du  Sud-Ouest par un cours plus impétueux que celui du grand fleuve Mackenzie même, et qui apporte à Simpson les pelleteries des Forts Liard et Nelson.

Ces raisons décidèrent, dès le commencement, la Compagnie de la Baie d'Hudson à établir, à Simpson, la tête de son "district Mackenzie". Là se succédèrent des bourgeois dont beaucoup furent justes et libéraux, mais dont plusieurs n'honorèrent pas toujours la haute administration, digne celle-ci, du titre d'Honorable que se décerne la Compagnie. De tous les désordres que favorise l'éloignement de la civilisation, il n'y en a guère qui n'aient été perpétrés à Simpson! Ces désordres, le protestantisme ne les épargna que trop, occupant plutôt ses flèches à viser les missionnaires de la vérité et de la justice. D'où les noms: "Babylone" et "citadelle de l'erreur".

C'est en 1858, que le P. Grollier, le premier, alla y porter l'Evangile. Il eut la sainte inspiration d'appeler Simpson : la Mission du Sacré-Cœur de Jésus.

Voici que le divin Cœur triomphe. Les tristesses, les déceptions, la persévérance inconsolée de tant de missionnaires, qui croyaient s'être sacrifiés en vain, portent enfin leurs fruits. La religion véritable s'est emparée de presque tous les sauvages. Il reste à les parfaire... Ce sont des Esclaves!

Pourquoi, d'autre part, Simpson ne deviendrait-il pas, à son heure, centre commercial et ville considérable ?

Alors le Sacré-Cœur serait bien le titulaire du Cœur du Mackenzie.

A ce règne, les Sœurs de la Charité travailleront désormais.

En 1911, le gouvernement canadien instituait à Simpson une agence indienne chargée de pourvoir aux intérêts des sauvages, et de représenter devant tous, en maintes occurrences, le gouvernement lui-même. M. Gérald Card fut le premier agent.

Avec une loyauté d'esprit et de cœur qui n'a jamais dévié, et tout a l'honneur de nos frères séparés qui sont de bonne foi, M. Card se dévoua à la cause du bien et se déclara l'ami du prêtre. En 1912, croyant le temps venu, il entra en pourparlers avec le P. Andurand, supérieur de la mission, au sujet d'un hôpital général pour les indiens Esclaves, Peaux-de-Lièvre et Loucheux du Mackenzie. Lors de son passage, en juillet suivant, Mgr Breynat approuva le projet et en accepta les charges. En 1914, Sa Grandeur fixa définitivement l'emplacement et, durant l'été, les PP. Andurand et Moisan, le F. Kraut et M. Ouellet, jeune et aimable charpentier canadien, jetèrent les fondations d'un édifice à trois étages, et de quarante pieds sur soixante. M. Card procura, en planches, et autres services, tout ce que sa position lui permettait. II obtint également du gouvernement d'Ottawa le premier ameublement.  (1)

En 1915, l'hôpital…

____________________________________________________

(1) M. Card, remplace à Simpson par M. Harris (catholique), a été transféré à Fort-Smith, on il continue sa bienveillance à nos œuvres.

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Message  Louis Mar 09 Fév 2016, 2:19 pm

CHAPITRE VIII

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Fort-Smith —  Fort-Simpson  — MacMurray

Les Esquimaux


(1914-1916)


FORT-SIMPSON

(suite)


En 1915, l'hôpital était habitable. Par un concouru de circonstances que l'on sut bientôt providentiel, les religieuses attendues en vinrent pas. (2)

Les fondatrices, installées en 1916, furent Sr Girouard, ex-supérieure de l'Hospice Saint-Joseph, Sr Boursier, Sr Latrémouille et Sr Marie, celle-ci de la tribu des Peaux-de-Lièvre elle-même.

Elles prirent, au passage, pour les conduire au nouvel hôpital, lu plupart des malades habitués de Providence.

Quelques jours après leur arrivée, le 15 août, elles eurent la triste consolation de fermer les yeux au P. Ducot, l'ardent apôtre des Peaux-de-Lièvre, dont le Port Good-Hope, le Grand Lac d'Ours et le Fort-Norman se partagèrent la vie, pendant quarante et un ans. Le P. Ducot s'était particulièrement gagné la reconnaissance des sœurs missionnaires de Providence, en leur envoyant de nombreux enfants de ses missions polaires, et en leur faisant, lors de la grande épreuve de 1881, le sacrifice dont nous avons parlé. Partant pour le ciel, en la fête de l'Assomption de la Très Sainte Vierge, qu'il avait tant aimée et tant fait aimer de ses indiens, il a laissé à l'oeuvre naissante des Sœurs de la Charité, la bénédiction précieuse entre toutes devant Dieu, celle de la mort des saints.

L'hôpital de Simpson, à cent soixante milles en aval de Notre-Dame de la Providence, est donc la fondation la plus lointaine aujourd'hui des Sœurs Grises de Montréal. Elles y sont allées avec l'ardeur de la charité pour les pauvres, qui est l'objet de leur quatrième vœu de religion. Par elles, s'accomplira l'oracle du Sacré-Cœur: "'Je règnerai, malgré Satan et tous mes ennemis."

_____________________________________________________

(2) Le mobilier et le dispensaire de l'hôpital se trouvaient à bord du vapeur McMurray, qui fit naufrage en juillet, dans la rivière La Paix. Ces pièces ne purent être renouvelées et dépêchées à destination qu'en 1916.


A suivre : MC MURRAY.

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Message  Louis Mer 10 Fév 2016, 7:34 am

CHAPITRE VIII

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Fort-Smith —  Fort-Simpson  — MacMurray

Les Esquimaux


(1914-1916)


MC MURRAY

McMurray, à 184 milles au sud du lac Athabaska, marque 1'extrémité nord de la longue chaîne des rapides qui jalonnent la rivière Athabaska.

Les visites périodiques des missionnaires suffirent longtemps à sa minime population de petit Fort de la Compagnie.

En 1906, l'aspect changea soudain. L'asphalte, le pétrole, l'espoir d'autres trouvailles minières alléchèrent de puissantes compagnies, et l'affluence des voyageurs s'accentua. La construction d'un chemin de fer, avec Edmonton pour base, fut décidée.

Il importait à la religion catholique de s'y fixer au plus tôt. Le P. Laffont quitta donc la mission de La Nativité, pour aller fonder dans la pauvreté — seconde nature du missionnaire — la future paroisse.

Paroisse des plus complexes du premier coup. Outre les blancs accourant de toutes parts. McMurray était le rendez-vous "de Montagnais, religieux par nature, doux et faciles, passionnés pour le chant des cantiques, et de Cris, superstitieux, paresseux, danseurs, et muets à l'église." Le P. Lafont y entretient son auditoire du dimanche, en français, en anglais, en cris, en montagnais... Il y ajouterait, au besoin, l'italien, l'espagnol, etc.

Or, il écrivait, en 1915:

"Le missionnaire veut un hôpital — non pas lui, mais ses paroissiens — McMurray sera une ville industrielle, par conséquent avec beaucoup de machines, qui font beaucoup de blessés; donc il nous faut des sœurs. Ce n'est que ces médecins qui nous soigneront comme il faut. Et puis nous sommes à trois cents milles de tout secours sanitaire C'est donc une mesure sage que d'avoir un bon hôpital. Donc envoyez-nous des sœurs. Avec elles nous serons tranquilles, car nous les avons vues à l'oeuvre."

"Enfin les petits enfants, les bénis de Jésus. Il me semble le voir, ce bon Maître, caressant de sa main divine ces petites têtes innocentes. Mais ces enfants ont une âme qu'il faut nourrir. Pour cela, j'ai mon petit ciboire tout plein de petits pains bien blancs. Oui. mais leur intelligence, leur coeur... — Oh, les



mamans s'en occupent! — Pas toujours. D'ailleurs quelques-uns n'ont plus cette maman: il faut leur en donner d'autres. Et même les mamans qui sont encore là, bien portantes, demandez-leur ce qu'elles en pensent: "On ne peut pas tout faire. On a tant de travail!" Et alors qui apprendra à lire à ces petiots? Qui leur apprendra le catéchisme? Qui leur parlera du bon Dieu? Il nous faut donc une école, et nous l'aurons... "

Ces médecins et ces mamans seront encore les Sœurs Grises.

L'établissement de McMurray sera comme naturellement la maison provinciale... Portées jusque-là par la vapeur, les jeunes sœurs missionnaires de l'avenir franchiront en un jour, les trois cents milles des longs et douloureux voyages d'autrefois. Du wagon "moelleux" elles salueront ces cascades, ces "rapides" mugissants, à jamais désertés. Elles respireront l'affection et la paix d'une seconde maison-mère, d'où elles s'élanceront, ainsi que leurs aînées, par le vieux fleuve calme, et les grands lacs tourmentés, au secours des pauvres.

A suivre : LES ESQUIMAUX

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Message  Louis Jeu 11 Fév 2016, 9:28 am

CHAPITRE VIII

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Les Esquimaux


(1914-1916)


LES ESQUIMAUX

Note de Louis:

Ici, dans le livre en pdf qui me sert pour la présente publication, il manque deux pages; la divine Providence aidant, j'ai retrouvé la suite du même R. P. Duchaussois…dans une édition anglaise de 1919. Ce qui suit est une traduction approximative de ce texte.

Bien à vous.

De la traduction anglaise, a écrit:

En 1860, le jour de l'Exaltation de la Sainte Croix, fête privilégiée des Sœurs Grises, le P. Grollier, près des bouches du Mackenzie, la main d'un chef Esquimau et de celle d'un Loucheux, placées dans la sienne, au pied de la Croix, leur fit jurer qu'ils vivraient désormais en paix l'un avec l'autre. Un triomphe de l'influence religieuse sur de vieilles coutumes de trahisons et de massacres —  triomphe d'un côté du moins, pour les Loucheux qui se firent chrétiens en très grand nombre.

Cependant pour la race esquimaude, le jour de la conversion n'était pas encore levé.

En 1892, le jeune P. Lefebvre, O.M.I., quoique connaissant l'échec des autres, fit une nouvelle tentative pour prêcher les vérités de l'Évangile à cette race fourbe (deceitful) et superstitieuse. A peine eut-il un auditoire.

Dans un autre endroit de l'Extrême-Nord, dans les « Barren Lands », entre le Grand Lac à l'Ours et l'Océan Arctique, le P. Rouvière, O.M.I., envoyé par Mgr Breynat, y trouve quelques Esquimaux à la Fête de l'Assomption en 1911 et souhaita faire du bien parmi eux. En 1912, Il fut rejoint par le P. Le Roux, O.M.I.  En 1913, ces deux missionnaires partent du Grand Lac à l'Ours avec une tribu esquimaude; tribu qu'ils voulaient accompagner jusqu'à la mer. Deux hommes de la tribu ont assassiné brutalement les deux prêtres.

Les meurtriers furent arrêtés en 1916. Selon les preuves recueillies par les hommes courageux de la Police Montée du Nord-Ouest, sous la direction de l'Inspecteur La Nauze, le meurtre survint à la fin d'octobre 1913. Les missionnaires étaient sur le chemin du retour du camp esquimau du Golfe du Couronnement (Coronation Gulf) avec l'intention de passer l'hiver dans leur cabane au Grand Lac à l'Ours. Ils furent suivis par deux Esquimaux. Le P. Le Roux, qui était avec le traîneau à chiens, fut poignardé dans le dos. Le meurtrier dit à son compagnon d'achever (to finish) le visage pâle; il se saisit alors du fusil de chasse et tire sur le P. Rouvière, qui marchait en avant du traîneau, dégageant le chemin pour les chiens qui arrivaient difficilement à tirer le traîneau. Les meurtriers mangèrent une partie du foie de leurs victimes, disant que cela a toujours été dans leurs coutumes, dans les temps anciens, lorsqu'ils tuaient un homme blanc.

L'endroit de cette terrible tragédie était près de Bloody Fall, à la rivière Coppermine, environ 15 milles de l'Océan Arctique. Des restes de victimes furent retrouvés à cet endroit.   *

__________________________________________________

* Il y a une autre Mission chez les Esquimaux, sur la Côte de la Baie d'Hudson, à Chesterfield Inlet, dans le vicariat apostolique du Keewatin. Elle fut érigée par les Pères Turquetil, O.M.I., et Le Blanc, O.M.I. Cette Mission eut aussi sa victime. Le Père Le Blanc, usé de corps et d'esprit, par les difficultés de son poste, s'en retournait à la maison de l'Évêque à la Pas, au nord du Manitoba, quand il se noya. Mgr Charlebois, O.M.I., écrit de lui :

« Je sens que mon vicariat perd, en la personne de R.P. Le Blanc, un missionnaire dévoué, prêt à tous les sacrifices et aux plus grandes privations pour la conversion des pauvres Esquimaux. Je considère qu'il est victime de son grand dévouement pour le salut des âmes. Puisse sa mort ainsi que celle des Pères Le Roux et Rouvière hâter la conversion de cette race malheureuse. »

FIN de la traduction anglaise.

Suite de notre texte français :

Dieu attendait-il que les missionnaires eussent jeté sur ces glaces la semence de leur sang?... C'est fait. Et c'est pourquoi Mgr Breynat a décidé de poursuivre l'évangélisation de ces païens dont le P. Rouvière écrivait, le 14 septembre 1912: …


Dernière édition par Louis le Dim 14 Fév 2016, 12:51 pm, édité 1 fois (Raison : correction : remplacer "l'embouchure du Mackenzie" par "les bouches du Mackenzie".)

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Message  Louis Ven 12 Fév 2016, 8:09 am

CHAPITRE VIII

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Les Esquimaux


(1914-1916)


LES ESQUIMAUX

(suite)

Dieu attendait-il que les missionnaires eussent jeté sur ces glaces la semence de leur sang?... C'est fait. Et c'est pourquoi Mgr Breynat a décidé de poursuivre l'évangélisation de ces païens dont le P. Rouvière écrivait, le 14 septembre 1912:

"J'ai encore bien plus d'espoir que l'année dernière, au sujet de mes Esquimaux. Le peu que je leur avais montré, non seulement ils ne l'ont pas oublié, mais ils l'ont appris à ceux qui ne le connaissaient pas. Dans quelques années, s'ils persévèrent dans leurs bonnes dispositions, on aura de bons auxiliaires parmi eux aussi bons, sinon meilleurs, que nos autres indiens."

Mais il faut des prêtres!

Veuille le divin Maître combler les vides faits dans nos rangs, et dans nos scolasticats, par les balles meurtrières de cette guerre, plus encore que par le poignard des Esquimaux... Qu'il se souvienne des âmes rachetées de son sang, et que sur elles retombe, en pluie de grâces, le sang de leurs propres missionnaires.

Il faudra des religieuses aussi.

Seule, une oeuvre de dévouement à toutes leurs misères physiques et morales convaincra ces sauvages, intelligents il est vrai, hardis, énergiques et habiles, mais défiants par-dessus tout
.


Quelles seront-elles? Encore les Sœurs Grises. L'hôpital esquimau est accepté d'avance, dût-ce être sur l'Océan Glacial.

—Que Monseigneur fasse un signe du doigt, et nous partons, a dit la T. H. Mère Générale.

Et voilà que, par la vénérable Mère d'Youville, autant que par Mgr de Mazenod, aura été accomplie la prophétie: Les extrémités de la terre ont vu le salut de Dieu.

N'allez point leur représenter l'hiver perpétuel, les iglous infects, les huttes de glace, les dégradations abominables de ces barbares. C'est de quoi elles ne s'inquiètent. "Elles ne refuseront aucun ouvrage", leur a-t-il été prescrit.

Nous entendions, il y a peu de jours, ici même, au Mackenzie, où nous écrivons ces lignes, des religieuses, vétérans des missions du Nord, dire le plus simplement du monde :

— Que j'aimerais donc être envoyée là !... Cela vaudrait la peine, au moins! Ce serait du missionnaire, ça !

Et lorsque le vicaire apostolique traverse son vicariat, dans toutes les missions des Sœurs Grises ce sont les mêmes instances :

—Monseigneur, quand recommencerez-vous les Esquimaux?...  Ce qu'on a hâte!... Vite donc!
A suivre : Chapitre IX. Les sources du dévouement.

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Message  Louis Sam 13 Fév 2016, 8:02 am

CHAPITRE IX

LES SOURCES DU DÉVOUEMENT

D'où vient à de frêles et humbles religieuses tant de courage? Quelle fascination les attire à des sacrifices constamment surhumains? Quelle force agit en elles?   Quelles sont les sources de ces dévouements?

Ces questions ne seraient-elles pas une énigme, aux yeux d'un lecteur étranger à notre foi? Parcourant nos pages, ne se croirait-il pas en présence du mystère ou de la folie, et ne trouverait-il pas cent raisons de conclure à celle-ci?

Le mystère n'est point pour nous. Nous savons de quel ''Coeur transpercé" jaillit la flamme apostolique, et notre consolation sera toujours de le redire, à la gloire de notre Dieu comme à l'honneur de l'Eglise catholique, "la grande faiseuse d'âmes".

D'abord "la Bonté qui s'étend sur toute la nature" a mis dans les privations mêmes qui constituent la vie, aux pays glacés, un soutien puissant des forces du corps. La circulaire de mars 1878 annonce de cette originale façon la mort de Sr Hedwidge Dandurand:


" Une première victime des Missions de l'Extrême-Nord.—Depuis près de vingt ans, la foi, l'obéissance, le zèle le plus désintéressé conduisent dans les vastes plaines de la Saskatchewan et sur le bord des grands lacs, plusieurs d'entre nous. Là, les privations, les souffrances et les sacrifices ont éprouvé les courageuses missionnaires. Chose étrange cependant, avec une santé débile chez la plupart, constamment privées de pain, souvent affamées après s'être rassasiées d'un poisson insipide, la vie s'est soutenue dans leur constitution délicate si fortement ébranlée. Aujourd'hui, aujourd'hui seulement, la mort a fait sa première victime... Elle repose dans le cimetière de l'Ile à la Crosse, au milieu des sauvages qu'elle avait désirés comme la part de son héritage... "


D'où se confirme l'adage: La misère ne tue pas.

"Quoique nous soyons réduites à manger du poisson sec, écrit-on d'Athabaska en 1879, nos santés n'en sont nullement altérées; au contraire, on dirait qu'elles se refont, puisque nous ne nous sommes jamais si bien portées que maintenant; tant il est vrai que quand Dieu retire d'un côté, il donne de l'autre."

Le mot est dit: Il donne de l'autre. Il donne à la fade nourriture la santé, et au rude climat sec la salubrité... Combien de Sœurs Grises, dont la phtisie eût consumé les vingt ans parmi les remèdes, les médecins et les douceurs de Montréal, ont fourni chez les sauvages du Nord, une longue et forte carrière!

Avec la santé, reluit sur les fronts du Mackenzie la gaieté, fleur de la paix. Coeur content bat longtemps. Les croyez-vous moroses, sombres, sous leurs toits, sept mois ensevelis sous la neige? Nulle part dans ce monde, religieuses n'ont ri davantage. La première relation des jubilaires de Providence, 1867, porte déjà l'hymne à la joie:

"L'hiver a commencé le premier octobre. Tout gèle. Le matin on trouve l'eau et l'encre durs comme pierre, et ce matin encore, par un froid de quarante-trois degrés, j'ai été obligée de faire dégeler mon encre, avant de continuer à vous écrire. J'ai oublié, ou plutôt je me suis trompée, tout ne gèle pas: il faut en excepter la gaieté, le bonheur, la joie, le contentement, car aucune de ces si bonnes choses, surtout dans les missions du Nord-Ouest, n'a fait encore défaut.. "

Et puis, on se contente de si peu!

Chateaubriand a dit dans ses "Mémoires d'outre tombe": "Le vrai bonheur coûte peu; s'il est cher, il n'est pas d'une bonne espèce." Vers le même temps, en 1849, et mieux que Chateaubriand, le P. Taché écrivait de l'Ile à la Crosse:

"Vive le Nord! Je crois que c'est le pays du monde où l'on apprend le plus efficacement, et le plus pratiquement, combien il faut peu de chose pour rendre l'homme heureux."

Est-il sœur missionnaire qui, montrant le pauvre grabat de son repos, n'eût trouvé la réponse de Louise de  France, devenue carmélite, â  Gustave de Suède. C'est ici, Monsieur, qu'on dort mieux qu'à Versailles!

Personne ne s'y méprendra toutefois…

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Les Soeurs Grises dans l'Extrême-Nord : Cinquante ans de Missions  - Page 3 Empty L'Église catholique, "la grande faiseuse d'âmes."

Message  ROBERT. Sam 13 Fév 2016, 11:17 am

Louis a écrit:
CHAPITRE IX
LES SOURCES DU DÉVOUEMENT

...Nous savons de quel ''Coeur transpercé" jaillit la flamme apostolique, et notre consolation sera toujours de le redire, à la gloire de notre Dieu comme à l'honneur de l'Eglise catholique, "la grande faiseuse d'âmes".
.
https://messe.forumactif.org/t6795p75-les-soeurs-grises-dans-l-extreme-nord-cinquante-ans-de-missions#125869
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Message  Louis Dim 14 Fév 2016, 7:49 am

CHAPITRE IX

LES SOURCES DU DÉVOUEMENT

(suite)

Les Soeurs Grises dans l'Extrême-Nord : Cinquante ans de Missions  - Page 3 Page_110

Personne ne s'y méprendra toutefois. Les quelques avantages d'un affreux désert ne retiendraient pas un mortel à qui la naissance ne l'aurait donné pour patrie. Les pourchassants de la fourrure regagnent, dès qu'ils le peuvent, la chaude civilisation, et laissent d'ordinaire sans regret les hivers qui les ont enrichis. Le bonheur des missionnaires n'était pas naturellement du sol glacé, ni du souffle des tempêtes.

D'un coup d'aile, cette pensée de l'une des recluses de Providence nous transporte à la vraie hauteur, à la vraie source du courage et du sacrifice joyeux :

" Qu'est-ce que d'avoir soin de quarante enfants, comparé aux œuvres si prospères de nos autres missions! Et pourtant, en réfléchissant sur la valeur d'une âme, nous estimons à un haut prix le peu de bien que nous pouvons faire à celles qui nous sont confiées dans ce pauvre pays, et qui seraient, sans les missionnaires, privées de la connaissance de la vérité et plongées dans l'erreur par les ministres protestants."

En réfléchissant sur la valeur d'une âme. Autrement dit: la foi, la foi qui a découvert Jésus et le prix de son sang, dans l'âme des petits enfants, voilà le levier.



Le regard de la foi tourné vers le ciel, en fera sans cesse venir la joie et l"espérance :

"Nos trente mille poissons semblent vouloir se gâter sous l'influence du temps doux. Pauvre poisson sans saveur, il faudra te manger quand même, en dépit de nos goûts. Au ciel, les mets raffinés et délicats..."

Sr Saint-Michel des Saints vient de raconter la terrible disette de 1883. Au lac Athabaska, alors que des mères mangèrent leurs enfants morts dans les bois, et que des enfants mangèrent leurs mères. Bien des fois, les sœurs, qui se réservaient les restes du repas des orphelins, se couchèrent sans souper...

" Un de ces soirs, dît-elle, un petit de six ans vient frapper à la salle des sœurs:

— Ma Sœur, comme j'suis pas capable de dormir, parce que j'ai trop faim !...

"De tous les pays qui existent sur le globe, il serait difficile, je crois, d'en trouver un semblable à celui-ci, où les misères de toutes sortes se trouvent réunies. C'est assurément le chemin du ciel, parce qu'il en a toutes les marques.''

Sur ce chemin du ciel qu'est le Mackenzie…

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Message  Louis Mar 16 Fév 2016, 7:48 am

CHAPITRE IX

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(suite)

Les Soeurs Grises dans l'Extrême-Nord : Cinquante ans de Missions  - Page 3 Page_110

Sur ce chemin du ciel qu'est le Mackenzie, les sœurs missionnaires trouvèrent toujours en abondance la  nourriture qui soutient   les âmes, car elles avaient appris à quelles sources inépuisables s'alimentent la foi, l'espérance, la charité et le zèle pour la gloire de Dieu.

Ce fut, en premier lieu, dans la dévotion au Sacré-Cœur.

De cette grande dévotion, Mère d'Youville avait été l'un des premiers apôtres, au Canada. Elle remit à ses religieuses le soin de la faire fleurir, parmi elles d'abord, et ensuite dans toutes leurs missions. Aussi, partout où elles travaillent, les fêtes du Sacré-Cœur, les premiers vendredis du mois, deviennent-ils autant de triomphes. Leur première fondation du Mackenzie fut l'Hôpital du Sacré-Coeur. Le Coeur de Jésus, gravé sur la croix de leur poitrine, enflamme leur coeur virginal de toutes les ardeurs du sacrifice, et oriente leur vie entière vers le divin Modèle, Victime d'amour. Et c'est pourquoi Notre-Seigneur a béni leurs entreprises, consolé leurs peines, donné à leur âme le talent de toucher les pécheurs les plus endurcis, et écrit leur nom dans son Coeur, d'où il ne se sera jamais effacé.

Elles ont compris, au surplus, que la dévotion profonde au Coeur de Jésus s'unit à la dévotion à la sainte Eucharistie.

Mgr Grandin ne pensait pas uniquement à ses missionnaires, mais aussi aux religieuses qui allaient venir, et dont il avait bâti lui-même la première maison, à Providence, lorsque, dans une audience du saint pape Pie IX, il demandait la permission de conserver le Saint-Sacrement, sans la lampe du sanctuaire.

— Mais, dit le Pape, je ne puis accorder pareille chose que dans le cas de persécution, et, grâce à Dieu, vous n'en êtes pas encore là.


—Très Saint Père, répondit Mgr Grandin avec émotion, nous ne sommes pas persécutés, c'est vrai, mais nous avons tant à souffrir! Il nous arrive souvent de ne pouvoir célébrer la sainte messe qu'avec une seule lumière... Si vous nous enlevez le bon Dieu, que deviendrons-nous !

Le Pape céda.

— Gardez le bon Dieu, dit-il... Vous avez tant besoin de Notre-Seigneur ! Mon cher évêque de Satala, dans votre vie, toute de sacrifices et de privations, vous avez le mérite du martyre sans en avoir la gloire.

Dans leurs chapelles froides et pauvres, si froides et si pauvres qu'en effet elles ne purent, pendant près de cinquante ans…

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Message  Louis Mer 17 Fév 2016, 7:28 am

CHAPITRE IX

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(suite)

Dans leurs chapelles froides et pauvres, si froides et si pauvres qu'en effet elles ne purent, pendant près de cinquante ans, donner à Jésus la petite lampe de son tabernacle, les sœurs gardent le bon Dieu. Et le bon Dieu les garde. Chaque matin, elles vont unir de nouveau à la sienne leur immolation religieuse, et de l'autel, par la divine Hostie, descend en elles la force de porter le poids d'un autre jour... Fera-t-on sur la terre des communions plus ferventes, plus fructueuses que celles des solitudes du Nord, où rien ne distrait, dans cette retraite qui n'a de douceur que la présence et l'amour du divin Maître? Aussi quels élans à l'Eucharistie s'échappent de leur plume, quand elles racontent à la maison-mère les événements de leur vie!... Une enfant de Montréal, Sr Galipeau, venait de mourir au Mackenzie, couvent de Providence, le 27 juin 1893. Sa supérieure rapporte ainsi ses sentiments intimes:

"Administrée le 28 mai, dernier samedi du mois de Marie, voyant pleurer les sœurs, elle pleura aussi. On lui représenta que ce n'était pas à elle de s'affliger ainsi, puisqu'elle allait bientôt entrer dans la vie bienheureuse. — C'est bien vrai, répondit-elle; mais pour aller au ciel il me faut vous quitter. Ah, si nous pouvions partir ensemble!... Son unique désir fut celui de la communion. L'état de sa gorge, gagnée par le mal qui l'emportait, menaçait de l'en empêcher. Un docteur en route pour le Klondyke passa. Son verdict fut que la malade ne tarderait pas à partir pour le ciel. Il le lui dit; c'était une bonne nouvelle. " Mais en attendant, répliqua-t-elle, ne pourriez-vous pas soulager ma gorge que je puisse communier!" Communier, pour apprendre à mieux mourir, était devenu sa seule prière. Grâce aux remèdes du docteur, elle en eut jusqu'au bout le bonheur. C 'est deux heures après cette divine et puissante consolation, qu'elle s'endormit pieusement dans le Seigneur."

Près de Jésus-Hostie, la  divine Mère, la Très Sainte Vierge Marie, veille aussi sur ses enfants. Elle leur envoya, des Pyrénées à Providence, sa statue blanche et bleue de Lourdes, par une voie merveilleuse. Le précieux colis venait d'arriver à l'Ile à la Crosse, quand éclata la guerre de 1885. Les sauvages et les métis païens se ruèrent sur le dépôt des missions et le saccagèrent sans merci. Un coup de hache s'abattit sur la caisse contenant la statue, et rouvrit, entaillant légèrement la figure de la Vierge. A la vue de "cette femme couchée dans ce cercueil", les vandales épouvantés prirent la fuite. Un sauvage catholique restitua la sainte image. Cette statue de l'Immaculée-Conception, qui sourit encore dans la chapelle de l'hôpital du Sacré-Cœur, et un ciboire, furent les seule épaves sauvées du pillage.   (1)

Et saint Joseph, le grand pourvoyeur, que n'en dirions-nous pas! …

____________________________________________________________________

(1) La nouvelle de l'insurrection arriva aux Sœurs, l'année suivante. Elles l'apprirent des sauvages qui, interrogés par elles, au sujet de caisses ensanglantées qu'ils débarquaient en les touchant avec une extrême répugnance, répondirent:

—C'est du sang qui vient de l'Ile à la Crosse. On se bat par là-bas, et on tue des Sœurs comme vous autres.

On devine l'angoisse des religieuses, qui demeurèrent longtemps sous l'impression de ce rapport, dont elles ne pouvaient déterminer l'exagération.

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Message  Louis Jeu 18 Fév 2016, 12:26 pm

CHAPITRE IX

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(suite)

Et saint Joseph, le grand pourvoyeur, que n'en dirions-nous pas! Avec quelle confiance ne l'a-t-on pas invoqué, et invoqué encore, aux jours de peine! Saint Joseph est personnage vivant et agissant dans les missions du Nord.   De lui, on parle le plus natu-


rellement, le plus familièrement, comme s'il était là, tout à côté, membre de la communauté et qu'il ne manquerait que de le voir.—"Saint Joseph a fait ceci; saint Joseph a donné cela.— Tiens, c'est le temps de prier saint Joseph.— Allons, une neuvaine à saint Joseph!" Les neuvaines au bon saint s'enchevêtrent parfois, et se compliquent au point qu'il est bien le seul à s'y pouvoir reconnaître. Il va à la pêche, à la chasse, au jardin, au fond de l'eau... Mgr Faraud lui avait depuis longtemps confié son vicariat; Mgr Breynat l'a nommé officiellement premier procureur vicariat, et Père Lefebvre le second. Des interventions de saint Joseph, le mot "miracle'' ne se prononce pas tout haut, par respect pour l'Eglise qui se le réserve; mais les convictions sont faites. On le croit même capable de reproduire le prodige de la bonté compatissante, opéré un jour par Jésus, pour la grande foule qui le suivait et avait faim.

Athabaska, 8 septembre 1912.— "L'an dernier, notre récolte de patates fut mince. On parla d'abord de rationner les enfants pour prolonger notre provision. Au bout de quinze jours, les patates pourrissaient tellement dans la cave qu'il fallut en faire le triage complet. Mieux vaut ne pas les ménager alors, pensa-t-on ; quand il n'y en aura plus, on s'en passera. Mais non, saint Joseph n'est pas dans la cave pour rien; il s'agit, non seulement de garder, mais de pourvoir au besoin.   Ainsi fut fait, de part et d'autre, puisque loin notre personnel a été servi de patates trois fois par jour jusqu' 'au commencement de septembre, et qu'elles étaient meilleures que jamais à pareille époque.   Merci à notre cher pourvoyeur."

Après Notre-Seigneur, la Sainte Vierge et saint Joseph, la confiance des sœurs missionnaires va tout entière à la vénérable Mère d'Youville, qui demeure vraiment l'âme de leur apostolat. Jalousement, elles accumulent toutes les occasions de mérites que leur procure l'Extrême-Nord et les joignent au capital des prières et des sacrifices qui, de tous les couvents des Sœurs Grises, montent vers Dieu pour obtenir la glorification solennelle de la fondatrice. Déjà les sœurs du Mackenzie comptent des grâces extraordinaires obtenues par sa puissance, et qui, dans leur humble espoir, suffiraient à appeler le jugement de l'Eglise: ainsi la guérison du P. Rapet, à l’Île à la Crosse, en 1885; trois incendies subitement éteints, au lac Athabaska, et nombre d'autres prodiges. Comment n'être pas heureuses sons la particulière protection d'une si bonne Mère!

Dans la dévotion filiale à Mère d'Youville s'avive et s'entretient pareillement la passion qui transportait Saint Paul : "la folie de la croix". Nous croyons que le plus amer désappointement d'une sœur missionnaire, arrivant au Mackenzie, serait de n'y plus trouver les souffrances du passé.   Une jeune professe…

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Message  Louis Ven 19 Fév 2016, 8:00 am

CHAPITRE IX

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(suite)

Nous croyons que le plus amer désappointement d'une sœur missionnaire, arrivant au Mackenzie, serait de n'y plus trouver les souffrances du passé. Une jeune professe de la première phalange du Grand Lac des Esclaves ne peut s'empêcher de s'écrier:

" Notre-Seigneur veut que toutes nos missions soient fondées sur la croix, afin que nous soyons les vraies filles de Mère d'Youville. Voici venu l'honneur de l'imiter dans les privations de sa vie religieuse, et de montrer à notre Epoux céleste que nous sommes heureuses d'accomplir les promesses que nous lui avons faites, le jour de notre profession. "

Un trait des "Annales" de Montréal trouve ici sa place toute naturelle:

"La nouvelle du départ de Sr Pigeon avait jeté sa mère dans une extrême désolation. N'écoutant que sa tendresse maternelle, Mme Pigeon multiplie ses instances pour qu'on lui épargne ce sacrifice; elle allègue par-dessus tout que sa fille ne peut manger de poisson, et que par conséquent elle mourra bientôt là-bas, puisque c'est l'unique nourriture du pays. Cette représentation parut juste à notre T. H. Mère; elle crut devoir s'y rendre. A l'insu de Sr Pigeon, elle fait venir Sr Métivier, de Lawrence, pour la remplacer. Mais quand Sr Pigeon apprend tout ce qui s'est passé, et qu'elle voit sa compagne toute prête à se sacrifier pour elle, elle devient à son tour inconsolable. Sans tarder un instant, elle accourt supplier notre T. H. Mère de maintenir sa première décision. — "Il est vrai que je n'ai jamais mangé de poisson, parce qu'ayant toujours eu d'autres mets à ma disposition, je n'y ai jamais été forcée; mais quand je n'aurai pas d'autre nourriture, je saurai bien m'y habituer. Laissez-moi partir, ma Mère, ou je mourrai de peine.'' Puis, en ayant obtenu la permission, elle fait venir sa mère, et, avec les termes les plus persuasifs, elle lui représente que Dieu lui demande ce sacrifice, et qu'il saura bien pourvoir à sa subsistance. Vaincue, Mme Pigeon ne voulut plus s'opposer au départ de sa fille, elle la bénit. Triomphante cette fois, Sr Pigeon eut une dernière épreuve à subir. Sr Métivier, ayant goûté par anticipation au bonheur du sacrifice, n'était pas d'avis de lui céder son obédience. De là, assaut de générosité entre ces deux âmes courageuses, assaut auquel certains témoins ne purent assister sans verser des larmes d'attendrissement. Finalement la victoire décida en faveur de Sr Pigeon."

Les vraies épreuves, les uniques inconsolables, sont les bornes mises au dévouement par la pauvreté.

" Le séjour que j'ai fait dans nos maisons du Nord, témoigne la Mère Charlebois…

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Message  Louis Sam 20 Fév 2016, 8:10 am

CHAPITRE IX

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(suite)

" Le séjour que j'ai fait dans nos maisons du Nord, témoigne la Mère Charlebois, m'a fait comprendre la pénible position dans laquelle se trouvent nos chères sœurs, lorsqu'elles sont forcées de refuser, faute de moyens, de pauvres orphelins, des jeunes filles abandonnées, des vieilles femmes délaissées; leurs sacrifices, leurs privations continuelles ne sont rien, comparés à cette peine que je partage avec elles, en priant Notre-Seigneur d'inspirer aux âmes généreuses de leur venir en aide. "

Que dirons-nous de l'ecce quam bonum ? Comment doivent donc s'aimer et se chérir des Sœurs de la même Charité, pressées dans les bras de la même Mère, Marie, au pied du même tabernacle, loin de la patrie, au fond du même exil !... A redire les scènes d'affection fraternelle dont ces cinquante hivers furent les témoins, nous couvririons trop de pages.

Mais ce flot de la charité fraternelle, qui circule au sein des communautés rejetées aux extrémités du monde, ne s'y renferme pas; il en déborde, et reflue par un canal ininterrompu de pensées, de désirs, de souhaits, à l'écluse d'où il s'est épanché, à la chère maison-mère.

Nous avons beaucoup lu des Sœurs Grises; nous avons écouté, observé aussi, puisque tel fut notre devoir; nous permettra-t-on d'exprimer ce qui nous a le plus frappé, ce qui nous a le plus fortement établi dans la conviction que leur Congrégation est un édifice élevé par Dieu qui en a joint toutes les parties par le ciment indestructible de la divine charité, et contre lequel ne prévaudront ni la mort, ni les persécutions, ni les ruines, ni le temps? C'est le spectacle de l'union qui rattache les filles à leur Mère; c'est la fidélité des missionnaires au berceau de leur vie religieuse et apostolique, c'est, en un mot, l'amour filial. La maison-mère, la supérieure, générale, ses assistantes, les compagnes du noviciat, les anciennes vénérées, tout ce monde habite l'Extrême-Nord : il est là, allant venant, parlant, souriant avec les sœurs missionnaires; le souvenir en revient chaque jour; il dicte les lettres; inspire et anime les conversations; il a tissé, si l'on peut ainsi parler, les récits des premières sœurs parties, et des dernières encore.

Celles de la Rivière-Rouge d'abord:…

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Message  Louis Dim 21 Fév 2016, 7:23 am

CHAPITRE IX

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(suite)

Celles de la Rivière-Rouge d'abord:

"Je ne sais ce qui m'a soutenu au matin du 24, quand nous avons fait nos adieux. Je ne me console de mon exil dans ce pays lointain, qu'en pensant que je puis m'unir toujours à toutes nos sœurs, et participer à leurs bonnes œuvres... "

A mesure que les missionnaires de 1867 s'éloignent vers le Mackenzie, les cœurs se pressent autour de celles qui demeurent au foyer:

"'30 juin, Dimanche. C'est le dimanche surtout, bien-aimée Mère, que l'esprit se transporte à la chère maison-mère... Nous avons des tentes: si nous allions camper quelque bon soir pour avoir le plaisir de passer la récréation avec vous toutes, que cela serait bon! Que la pensée même d'une telle jouissance fait du bien ! Que de choses à raconter après une si longue séparation! Mais, non, jamais plus ici-bas, nous n'aurons ce bonheur.   Mais au ciel ! ! !... "

"8 juillet. — Fête de notre chère Sœur assistante. Après une fervente prière pour notre bien-aimée Mère des missions lointaines, nous prîmes congé le plus gaiement possible...  Bonsoir, Très Honorée Mère, bien-aimée Sœur assistante, et bien chères sœurs;



nous vous souhaitons un heureux et gai congé, et nous vous demandons un petit souvenir aux pieds de notre Mère commune, pour les soeurs missionnaires qui s'éloignent tous les jours de celles qu'elles aiment tant..."

"28 juillet. La solitude des prairies nous invite à la réflexion; nous en profitons pour nous unir à nos bien-aimées sœurs, que nous trouvons réunies pour la retraite mensuelle, si nous nous transportons à Montréal."

"21 août. — Fête de notre T. H. Mère Générale. Point de messe, point de communion, hélas! Mais à Montréal, à Saint Boniface, il y a de joyeuses réunions, pour fêter cette bonne Mère, si tendrement aimée. Nous nous unîmes donc à ces bien-aimées soeurs qui jouissent du bonheur de vivre auprès de vous, ma bonne Mère, et à celles qui, comme nous, sont privées de ce plaisir, confiant aux anges de porter sur leurs ailes d'azur, jusqu'aux pieds de sainte Jeanne de Chantal, nos voeux et nos souhaits. Oui, nos prières étaient ardentes en ce beau jour; nous l'avons passé en esprit auprès de vous, et la douce pensée que nous vous fêterions plus tard là-haut, est venue nous consoler dans notre lointaine demeure... Là, il n'y aura plus de missions du Nord-Ouest, plus de séparation; nous serons assemblées pour jamais dans le sacré-coeur de notre divine Mère; c'est là que vous nous avez donné rendez-vous, ma bonne Mère, en nous faisant don de la charmante petite statue de Notre-Dame du Sacré-Cœur, que nous conservons précieusement..."

Il s'ensuit que la rareté des courriers est profondément ressentie. Cette triste spécialité du Nord a nom, au vocabulaire des Sœurs Grises: le jeûne de lettres. Il est entendu qu'au jeûne de lettres, on ne se fait pas. Si la curiosité en recevait toute seule les coups, la mortification finirait peut-être par s'en accommoder; mais l'affection en souffre plus encore. De là, les longs et fréquents regards interrogateurs sur l'horizon du lac, aux époques de la "malle''. De là, les plaintes: …

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