Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)

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Message  Louis Mar 03 Jan 2012, 12:12 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Mais quel sera cet agent proportionné? Nous avons nommé les corps célestes, dont l'action sur notre terre est d'une efficacité si universelle, si souveraine, si profonde, si absolue. Toutefois, nous l'avons dit aussi, cette efficacité ne s'exerce qu'à l'endroit d'une matière prédisposée et selon les dispositions de cette matière. Un aspect de ces dispositions nous est apparu dans le jeu des propriétés que nous avons marqué devoir se trouver en premier dans les éléments ou corps simples, et ensuite, progressivement, selon les degrés mêmes de l'ascension de la matière, dans les divers composés ou mixtes qui résultent, sous l'action des corps célestes, des éléments ou corps simples combinés entre eux.

Mais suffira-t-il de ces dispositions ascendantes et de l'action des corps célestes pour tout expliquer dans l'évolution ultérieure du monde de la matière sur notre terre? Et, par exemple, de même que, dans les conditions que nous venons de dire, la matière a évolué des premiers corps simples ou éléments jusqu'aux mixtes les plus parfaits dans le règne minéral, dirons-nous que, dans ces mêmes conditions et sans aucune entremise ou intervention d'agent nouveau ou de condition matérielle nouvelle, cette matière pourra continuer d'évoluer, passant du règne minéral au règne végétal, du règne végétal au règne animal et jusqu'au règne humain lui-même?

C'est, on le voit, la question même de la vie, qui se pose à nous maintenant, de son apparition dans le monde de la nature, de ses degrés, des conditions de sa transmission et de sa permanence.

Disons, tout de suite, que, pour saint Thomas, le passage du règne minéral au règne végétal ou même animal dans ses premiers degrés les plus infimes, était considéré comme possible dans les conditions marquées jusqu'ici, sans qu'il fût besoin de dispositions nouvelles dans la matière ou d'agent nouveau dans le monde des corps. Ce sentiment était imposé au saint Docteur par ce que nous appellerions les données de l'expérience. Il n'avait pas, pour le fixer, la ressource des expériences scientifiques telles que les a réalisées de nos jours le génie de Pasteur.

A ne juger que par le témoignage des sens, on voyait apparaître, dans le monde de la nature, de nouveaux êtres vivants, plantes ou animaux, en des milieux où ne semblait intervenir aucun vivant de même espèce, soit par son action directe, soit par des germes qu'il y aurait laissés. De certaine matière en putréfaction, sous la seule action de la chaleur solaire, émergeaient de nouveaux vivants, sans qu'on pût se rendre compte qu'aucun germe de vie eût préexisté dans ces milieux. Et, pour autant, on disait qu'ils étaient produits sans vivant de même espèce, uniquement de la matière minérale selon qu'elle se trouvait disposée par une évolution préalable, et que l'action des corps célestes amenait à l'acte d'être, dans cette matière, la forme substantielle d'ordre nouveau qu'était l'ordre ou le degré de l'être vivant, dont il est très certain qu'en effet, d'une certaine manière, il est en puissance dans les dispositions ou virtualités des êtres corporels inférieurs du monde des mixtes perfectionnés.

Il est aisé de voir que dans cette conception…

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Message  Louis Mer 04 Jan 2012, 6:31 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Il est aisé de voir que dans cette conception la forme substantielle nouvelle du vivant qui apparaissait était toujours attribuée à une cause ou à un agent supérieur à la matière ; puisque aussi bien, nous l'avons vu, aucune transformation substantielle, dans le monde de la nature, même pour les premières transformations amenant les premiers mixtes, n'était tenue comme possible en dehors de cette intervention d'un agent supérieur. La question pouvait être et pourrait être encore, dans l'ordre théorique, de savoir si l'action de cet agent supérieur, qui suffisait pour les transformations du monde purement minéral, pouvait suffire aussi pour cette transformation nouvelle introduisant la vie, même à l'un de ses degrés inférieurs.

Du temps de saint Thomas, la question était résolue par ce qu'on estimait être le fait d'expérience. Aujourd'hui, le fait d'expérience, précisé par le génie de Pasteur, exclut qu'il y ait de ces sortes de vivants apparaissant dans les conditions supposées. Toute apparition nouvelle de vivant, à quelque degré de vie qu'on le prenne, doit s'expliquer désormais par l'action d'un germe ou d'une semence, portant déjà la vie en puissance.

Resterait donc de savoir si, en soi, il y a impossibilité radicale à ce que la vie se manifeste, sur notre terre, dans les conditions supposées réelles autrefois. La question ainsi posée, il semble bien difficile d'y répondre avec une absolue certitude. Dès là que le vivant corporel, et surtout dans les premiers degrés de vie, est un composé de matière et de forme; que cette forme d'ordre nouveau, qui porte avec elle la vie, n'en garde pas moins la raison de forme substantielle, proportionnée à une matière, qui, dans son premier fond, n'est pas autre que la matière des éléments et des mixtes ; que les premières transformations de cette matière ou plutôt des premiers corps où était cette matière avec la forme des éléments et des mixtes ont pu se faire sous l'action des agents supérieurs qui sont les corps célestes; ne pourrait-il pas se trouver, dans la vertu de ces corps célestes, une efficacité suffisante pour faire passer la matière de l'état des mixtes supérieurs à celui des premiers degrés de vie? On ne voit pas que rien en soi permette de l'exclure d'une façon absolue.

Si le fait de ce passage existait, comme le croyaient les anciens sur les données d'une expérience imparfaite, aucune impossibilité préalable ne saurait être invoquée au nom de la raison. Étant donné que le fait n'existe pas, nous devons conclure, semble-t-il, que la vertu en question ne se trouve pas, en fait, dans l'action des corps célestes.

Mais rien ne nous autorise à affirmer, d'une façon absolue, au nom de la seule raison, qu'une telle vertu ne saurait s'y trouver. Et si jamais une expérience en sens contraire s'imposait, nous n'aurions à renier aucun principe établi par la raison philosophique dans l'ordre des transformations substantielles.

Toutefois, …

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Message  Louis Mer 04 Jan 2012, 12:19 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Toutefois, les données de l'expérience scientifique étant ce qu'elles sont maintenant, nous devons admettre qu'en fait, pour l'apparition de la vie et sa transmission, il ne suffit pas des dispositions de la matière, même élevée jusqu'au plus haut degré du règne minéral, et de l'action des corps célestes, mais un nouveau principe, ou une nouvelle cause, un nouvel agent doit ici intervenir : et c'est un vivant de même espèce. La conclusion était aussi admise dans toute sa rigueur, par saint Thomas, lorsqu'il s'agissait des vivants plus parfaits. Il ne nous déplaît pas que l'expérience scientifique l'étende aujourd'hui, sans exception, a tout le domaine des vivants, y compris les végétaux eux-mêmes.

C'est qu'aussi bien il ne sera pas de meilleur argument pour réfuter, du point de vue même de la science expérimentale, la doctrine de ceux qui voudraient que la vie ne fût qu'une manifestation nouvelle des seules forces physico-chimiques du monde de la nature. Le 8 février 1923, le journal des Débats publiait un article dans lequel était posée cette question : Quelle différence y a-t-il entre le minéral et le végétal, entre l'animé et l'inanimé, dans le monde des corps? L'auteur signalait la réponse de certains professeurs de Sorbonne enseignant que « la vie de l'être animé repose uniquement (lui-même soulignait le mot) sur les forces physico-chimiques ».

On voit, tout de suite, la portée de cette réponse…

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Message  Louis Jeu 05 Jan 2012, 6:40 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
On voit, tout de suite, la portée de cette réponse. Si la vie ne dépasse point la vertu des forces physico-chimiques, tout, dans le monde de la vie, devra pouvoir s'expliquer par le simple jeu de ces mêmes forces. Et comme le simple jeu des forces physico-chimiques ne dépasse point la sphère du monde minéral, la vie elle-même ne sera qu'une modalité de ce même monde. Entre le minéral et le végétal, il n'y aura pas une différence essentielle, générique; ce ne sera qu'une différence accidentelle, une différence de modalité dans le même genre, dans la même espèce d'action et d'être. La conception d'Aristote et de saint Thomas et la formule que nous en a laissée leur génie va nous apparaître tout autre. Elle n'est, du reste, que la suite logique du premier regard si profond jeté par eux sur la nature de l'être corporel.

Dès notre premier pas dans cette étude du monde corporel, nous avons pu nous convaincre, nous le rappelions tout à l'heure, que l'être corporel était composé de deux principes essentiels, dont l'un, la matière, expliquait ce qu'il y avait de passivité ou de réceptivité dans l'être corporel, tandis que l'autre, la forme, expliquait ce qu'il y avait de perfection en lui ; avec ceci, du reste, qu'à mesure qu'on monterait dans la perfection par la réception d'une forme plus excellente dans la matière, la matière elle-même devrait être conçue comme enrichie de virtualités plus hautes en harmonie avec cette nouvelle forme.

Il suit de là que, pour résoudre la question posée de savoir quelle différence existe entre le minéral et le végétal, nous devons nous demander si dans les deux existe un même genre ou une même qualité de forme substantielle proportionnée à une semblable disposition de matière, ou si, au contraire, dans les deux, les dispositions de la matière et la qualité de la forme doivent être tenues pour foncièrement différentes.

D'autre part, nous le savons, la matière première et la forme substantielle des êtres corporels ne nous sont pas accessibles directement et en elles-mêmes. C'est par leurs propriétés, par les facultés d'action qui en découlent, que nous pouvons les connaître. Et ces propriétés ou ces facultés elles-mêmes sont connues de nous par leurs opérations. Encore est-il que l'opération est spécifiée par son objet, par cela même sur quoi elle s'exerce.

Si donc nous voulons connaître la qualité de la forme du vivant, du végétal, et la disposition de sa matière, par comparaison à la matière et à la forme ou à la nature du minéral, c'est l'objet de leurs actions ou de leurs opérations que nous devons étudier directement et tout d'abord.

L'étude attentive de cet objet nous révèle une différence, nous allions dire une opposition irréductible…

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Message  Louis Jeu 05 Jan 2012, 2:16 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
L'étude attentive de cet objet nous révèle une différence, nous allions dire une opposition irréductible.

Dans le minéral, l'objet de son action est quelque chose d'extérieur à lui. Son action est essentiellement transitive. Elle consiste à perfectionner ou à modifier quelque chose qui est étranger à lui, extérieur. Qu'il s'agisse de mouvement local, de mouvement d'altération, de mouvement de transformation substantielle, le sujet de ces mouvements ou ce sur quoi ils portent n'est pas le minéral qui agit; c'est un autre être, un autre corps, qu'il atteint par son action, et que, par cette action, il modifie, le changeant de place, ou l'altérant dans ses qualités accidentelles, ou enfin le dépouillant de sa forme substantielle pour en introduire une autre dans le sujet, dans la matière, où se trouvait d'abord la forme précédente.

Dans l'action du végétal, comme tel, nous assistons à un phénomène exactement contraire. Ici, l'action a pour objet non pas un être extérieur au sujet qui agit, mais ce sujet lui-même. C'est au-dedans de lui, non au dehors, que l'action se fait. L'action n'est plus transitive; elle est immanente.

Il est vrai qu'elle supposera encore des actions extérieures et transitives. Le végétal tire du dehors le suc dont il vivra; par son action, il l'altère, il le transforme ; mais ce n'est point pour en faire quelque chose, hors de lui, et où se trouverait plus ou moins sa ressemblance : car tout effet porte la ressemblance de sa cause. Ce n'est pas cela. S'il attire à soi le suc du dehors, s'il l'altère, s'il le transforme, c'est pour l'absorber en lui, c'est pour en faire sa propre substance, c'est pour qu'il devienne lui-même considéré dans son identité numérique.

D'un mot, l'action du végétal, comme tel, c'est l'alimentation. Le végétal s'alimente. Son action consiste à s'alimenter. Et ce qui la spécifie, ce qui en est l'objet, à le prendre dans son sens le plus formel, c'est l'aliment. Le végétal se définit par l'aliment ou en fonction de l'aliment.

Or, l'aliment…

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Message  Louis Ven 06 Jan 2012, 7:12 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Or, l'aliment, l'alimentation, la fonction de s'alimenter, au sens pur et simple de ce mot, au sens où il comprend le végétal comme tel, selon toute l'étendue de son être, de son agir, implique trois étapes, trois stades, trois actes. L'être qui s'alimente a pour traits caractéristiques essentiels, qu'il se nourrit, qu'il croît, et qu'il se reproduit. Se nourrir, croître, se reproduire, voilà les trois fonctions du végétal. Ces fonctions sont distinctes. Elles sont tellement distinctes qu'elles peuvent ne pas coexister en même temps. Le végétal continue de se nourrir, alors qu'il a cessé de croître. Et il est un temps où il se nourrit et croît sans être encore à même de se reproduire.

Les fonctions étant distinctes, il faudra, dans le végétal, des principes immédiats de ces fonctions, qui ne soient pas les mêmes. C'est ce que nous appellerons les puissances ou facultés du végétal.

Mais, par cela même qu'elles sont multiples et que d'ailleurs elles nous apparaissent comme le principe immédiat des fonctions dont il s'agit, elles ne peuvent pas se confondre avec ses principes essentiels, matière et forme, dont le propre est de fixer l'être du végétal.

Toutefois c'est de ces principes essentiels, matière et forme, très spécialement de la forme, que dériveront, à titre de propriétés, les trois principes immédiats des fonctions. Et, comme ces principes sont multiples, avec un objet immédiat distinct, pour la réalisation duquel il faudra un organe proportionné, de là vient que, dans les dispositions de la matière, ou de la quantité, qui découle immédiatement de la matière, il faudra une différence de nature dans les parties destinées à l'une et à l'autre de ces trois fonctions.

Le végétal sera donc un tout corporel…

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Message  Louis Ven 06 Jan 2012, 12:39 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Le végétal sera donc un tout corporel à parties hétérogènes selon la diversité des organes requis pour les trois puissances d'agir qui sont ses propriétés inaliénables. Et, par là, il se distinguera essentiellement du minéral, qui est un tout corporel dont les parties sont homogènes et dont les principes essentiels n'ont aucun besoin de fonctions surajoutées en vue de fonctions à remplir à l'intérieur du sujet. S'ils ont des propriétés actives et passives, c'est uniquement en fonction de l'action à exercer sur un sujet extérieur à celui qui agit.

De là vient que la forme substantielle du vivant, fixant l'être du végétal dans ce degré nouveau de perfection, d'un ordre si transcendant par rapport à l'être du minéral, prendra aussi un nom nouveau, marquant l'inauguration d'un monde nouveau, le monde de la vie. On l'appellera du nom d'âme.

Cette âme appartient, elle aussi, ou monde des corps, au monde de l'être mobile, au monde de la nature, au monde physique. Elle est un des deux principes essentiels qui constituent l'être du vivant corporel. Et, à ce titre, elle est, en toute vérité, une forme substantielle. Elle joue, dans le vivant corporel, le même rôle que jouaient les précédentes formes substantielles dans le monde des corps, depuis les premiers corps que sont les éléments, jusqu'aux mixtes les plus parfaits. C'est elle qui fixe dans son être le vivant corporel. Elle porte avec elle tout ce que portaient les précédentes formes en fait de perfection. Seulement, elle y ajoute ce degré nouveau, qui spécifie le vivant et le constitue lui-même : la vie. En même temps que forme substantielle faisant être, elle est aussi, elle est, proprement, principe vital.

Et c'est pour cela qu'avec elle, et à partir de ce premier degré dans le monde de la vie qui est celui du végétal, la forme substantielle ne s'appelle plus seulement du nom de forme substantielle, comme dans les êtres inférieurs; elle s'appelle, nous l'avons dit, du nom d'âme.

Aristote a pu la définir…

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Message  Louis Sam 07 Jan 2012, 6:32 am

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VI. LA VIE (suite)
Aristote a pu la définir : l'acte premier d'un corps physique organique pouvant exercer les opérations de la vie. Elle est acte premier, comme toute forme substantielle, fixant le sujet dans l'être, et ne disant pas seulement une perfection accidentelle dans l'ordre de l'agir, qui est l'acte second. Elle est l'acte premier ou la forme substantielle d'un corps physique ou réel parmi les substances du monde de la nature, et non pas seulement mathématique ou dans l'ordre de l'étendue abstraite. Et ce corps physique est organique, a des parties hétérogènes, faites pour exercer les diverses opérations vitales qui sont le propre du vivant, savoir : se nourrir, croître et se reproduire, quand il s'agit du premier degré de vie tel qu'il convient au végétal.

Il est aisé de voir, après cette analyse philosophique telle que nous la devons au génie d'Aristote et de saint Thomas, que la question de savoir s'il existe une différence entre le végétal et le minéral se trouve résolue. La différence est si grande qu'on pourrait dire qu'un abîme les sépare, même en rapprochant du vivant le plus infime le minéral le plus parfait. Ce sont deux mondes distincts. Et le second, le monde de la vie, même dans son premier degré qui est celui du végétal, est tellement supérieur, dans l'ordre de la perfection, qu'à supposer, comme le veut la science d’aujourd’hui, que notre soleil ne soit qu'un immense métal à l'état de fusion dans lequel toute vie est impossible et que les étoiles qui brillent dans notre firmament soient, elles aussi, des soleils analogues, un brin d'herbe cueilli sur notre terre, où nous apparaissent les opérations de la vie, doit être tenu, comme tel, pour chose plus excellente et plus parfaite, dans la hiérarchie des degrés d'être.

Mais peut-être ces professeurs de Sorbonne dont parlait l'auteur de l'article du journal des Débats que nous avons cité, voudraient s'inscrire en faux contre l'analyse philosophique d'Aristote et de saint Thomas, au sujet de la vie.

Cette analyse, nous l'avons vu, repose tout entière sur le fait que le vivant, le végétal s'alimente. Si, d'aventure, le minéral aussi s'alimentait, du même coup se trouverait ruinée toute l'argumentation que nous venons de reproduire.

Or, il en est qui veulent qu'en effet le minéral aussi s'alimente. Ne disons-nous pas couramment, au sujet du feu, qu'il se nourrit; qu'il croît même, dans la mesure où on lui fournit un nouvel aliment ; et que, dans les proportions où il croît, il peut se multiplier et engendrer autour de lui d'autres feux, qui sont ce qu'il est lui-même?

Oui, on dit cela, en effet…


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Message  Louis Sam 07 Jan 2012, 1:32 pm

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VI. LA VIE (suite)
Oui, on dit cela, en effet. Mais on ne le dit pas, on ne peut pas le dire dans le même sens où on le dit quand on parle du vivant véritable qu'est, même au degré de vie le plus infime, le végétal. On dit cela du végétal, au sens propre. On ne le dit du minéral, quel qu'il soit, que dans un sens figuré ou métaphorique. Et, en effet, même pour le feu, où ces expressions viennent surtout usitées, il ne s'agit que d'une lointaine analogie avec le phénomène vital constaté dans le vivant proprement dit. Quand nous disons du feu qu'il s'alimente, le mot feu ne désigne pas un être substantiel formant un tout individuel. Il désigne un ensemble de matières soumises à l'activité d'un corps plus chaud qui les consume, en leur communiquant sa propre chaleur. Encore est-il qu'en se communiquant à des matières nouvelles, la chaleur cesse d'être dans les premières qui se consument successivement et disparaissent. Ce seront des morceaux de bois qui brûleront successivement, et en brûlant ainsi conserveront la chaleur ou le feu dans un même foyer. Si donc il y a ici unité, c'est seulement en raison du foyer où se consument successivement ces divers corps; et il ne s'agit là, on le voit, que d'une certaine unité d'emplacement.

Dans le végétal, au contraire, c'est un même sujet substantiel et individuel qui s'unit, en l'absorbant et en la faisant sienne, une substance étrangère, la transformant en sa propre substance individuelle. Ici nous avons, au sens propre, un phénomène d'absorption, qui n'a rien de commun avec la substitution de nouveaux corps combustibles venant remplacer au fur et à mesure les premiers qui se consument et disparaissent. Ou, s'il y a substitution de parties à parties, c'est au sein d'un même tout substantiel dont la forme substantielle préside elle-même à cette substitution selon qu'il convient à la conservation et au perfectionnement du tout.

Il est vrai qu'un élément commun, non métaphorique, celui-là, semble se trouver…

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Message  Louis Dim 08 Jan 2012, 6:46 am

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VI. LA VIE (suite)
Il est vrai qu'un élément commun, non métaphorique, celui-là, semble se trouver, de part et d'autre, dans le phénomène du végétal qui s'alimente au sens propre, et du feu dont nous disons aussi, par métaphore, qu'il s'alimente ou se nourrit. Cet élément commun, d'ordre très réel, au sens propre, c'est l'action de la chaleur. La même chaleur semble se trouver dans le feu qui s'empare des nouveaux combustibles et dans le végétal qui dissout, par un vrai travail de décoction, l'aliment qu'il s'assimile. Nous disons le végétal, bien que cette action du calorique se manifeste plutôt dans le phénomène d'alimentation qui est celui de l'animal. Ale considérer dans l'animal, il ne fait, du reste, que donner plus de force à l'objection ; puisque aussi bien la vie de l'animal étant plus parfaite, si le phénomène de l'alimentation chez lui est dû à l'action d'une chaleur semblable à celle du feu, les conditions de la vie en général pourront donc être ramenées à la simple action des forces ou des agents physico-chimiques dans la nature.

L'objection n'est pas nouvelle. Saint Thomas se l'était déjà faite. Et il a aussi formulé la réponse.

Cette réponse est une simple application de la grande doctrine aristotélicienne qui commande tout dans l'ordre des choses de la nature vu à la lumière de la raison philosophique. La chaleur dont il est ici question est une qualité ou forme accidentelle de certains corps. Mais toute qualité ou forme accidentelle agit en dépendance de la forme substantielle des corps dont elle est la propriété. Si donc la forme substantielle porte avec elle dans un corps un degré d'être supérieur, les qualités actives qui seront les propriétés de ce corps auront une vertu bien autrement grande et produiront des effets bien autrement précieux. De là vient que la même qualité active appelée du nom de chaleur, étant au service de la forme substantielle d'un corps inférieur au monde de la vie, produira des effets d'un ordre bien inférieur à celui des effets qu'elle produira, mise au service d'une forme substantielle supérieure comme est l'âme du vivant. Aussi bien la chaleur animale, dans le vivant, contribuera à transformer en chair l'aliment matériel qu'elle consume ; tandis que la chaleur purement physico-chimique du monde minéral ou des éléments n'aboutira jamais qu'à la mise en acte, dans la matière, d'une forme substantielle de même ordre.

Oui, vraiment, le vivant est…


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Message  Louis Dim 08 Jan 2012, 11:45 am

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VI. LA VIE (suite)
Oui, vraiment, le vivant est d'une qualité d'être absolument transcendante à la qualité d'être du minéral, élément ou mixte, quelque parfait qu'on le suppose. Ce sont deux mondes qu'un abîme sépare, quelque rapprochés du reste qu'ils nous apparaissent et qu'ils soient en effet. Si le monde corporel est déjà en ascension, par les transformations substantielles qui le conduisent des éléments aux mixtes : quand il passe des mixtes de l'ordre minéral à la substance des êtres corporels doués de vie, c'est une sorte d'infini qu'il franchit d'un seul coup dans l'ordre de la perfection.

La perfection de ce nouveau degré dans l'échelle des êtres a été exprimée par saint Thomas, à la suite d'Aristote, en une formule qu'il sera bon de retenir dès ce premier pas que nous venons de faire dans l'étude du monde de la vie. Voulant définir la vie par l'acte même qui la manifeste, saint Thomas l'a appelée « un mouvement venant de l'intérieur : motus ab intrinseco ». Tout être mû, dont le mouvement a pour principe ou pour cause propre et immédiate un autre être, est un être qui est en dehors, comme tel, du monde de la vie. Un être, au contraire, dont l'action ou le mouvement a pour cause, qui l'explique immédiatement et adéquatement dans l'ordre de sa cause propre, un principe qui est intérieur à cet être, appartient au monde des vivants. L'être vivant est celui dont le mouvement n'est pas dû à un autre, mais qui se meut lui-même. Ce caractère distinctif de la vie apparaît en pleine clarté dans le vivant parfait qu'est l'animal se mouvant d'un mouvement progressif. Tout animal qui remue de lui-même est tenu pour vivant. Si, au contraire, il demeure immobile et qu'il ne remue que sous une impulsion venue de dehors, à moins qu'il ne sorte de cet état dans un temps déterminé, on le tient pour mort.

La plante ou le végétal ne présente pas…

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Message  Louis Lun 09 Jan 2012, 6:17 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
La plante ou le végétal ne présente pas, au même degré ou sous la même forme, ce caractère de mouvement par le dedans essentiel à tout vivant. Mais on l'y trouve sous la forme qui convient à ce premier degré de vie. La plante ne se meut pas, comme l'animal, d'un mouvement de translation. Son degré de vie ne le comporte pas. Elle n'a pas, à cet effet, un organisme adapté avec faculté motrice proportionnée pour la locomotion.

Cependant, elle a, dans son degré de vie à elle, le même caractère de mouvement par le dedans qui fait juger de la présence ou de l'absence de la vie en elle. La plante, nous l'avons dit, a pour caractère propre de s'alimenter. Tant que fonctionne en elle le phénomène de l'alimentation, elle vit : dès que ce phénomène cesse, elle est morte. Et, dans la mesure où ce phénomène a sa pleine perfection, son plein effet, la plante est à l'apogée de sa vie. Mais ce phénomène de l'alimentation pour la plante est un phénomène dont le foyer d'action est au centre même de la plante. Et c'est dans la plante elle-même ou pour elle que le phénomène se déploie. La sève a son action au sein même de la plante. C'est dans la plante qu'elle circule. Et l'on peut dire que c'est sa circulation même qui constitue la vie de la plante. A cette fin, la plante a, elle aussi, nous l'avons noté, des parties hétérogènes, constituant des organes divers, adaptés aux diverses fonctions de la sève dont le mouvement, au-dedans de la plante, est l'acte même de sa vie.

Cet acte vital est à un triple degré ou se manifeste sous une triple forme : la nutrition ; la croissance ; la reproduction. Chacune de ces trois formes, dans le végétal, a son organe ou ses organes proportionnés. Mais les trois actes ou les trois formes de mouvement vital, avec leurs organes respectifs, demeurent essentiellement ordonnés en fonction de l'ensemble du mouvement vital, qui est un en raison de sa fin : la vie de la plante. Le caractère intérieur de ce mouvement et son unité s'impose au regard de la raison philosophique. Il n'est point perçu, comme tel, par la raison scientifique expérimentale. Celle-ci, en effet, a plutôt pour office d'étudier les dispositions matérielles du vivant qu'est la plante ou le végétal. Elle s'occupe plutôt d'analyse et de dissection. Et son dernier mot est le contrôle ou la constatation des diverses parties organiques distinguées jusque dans leur plus menus détails.

Mais ce dernier mot ne peut être donné……

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Message  Louis Lun 09 Jan 2012, 12:42 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Mais ce dernier mot ne peut être donné que lorsque la plante ou le végétal n'est déjà plus lui-même. Il faut que le vivant soit mort pour être disséqué jusqu’'en ses dernières fibres. Et, assurément, ce n'est point quand il est mort qu'il est possible de constater sa vie. La constatation de la vie n'est donc pas, à proprement parler, affaire de science expérimentale, si l'on distingue cette science de là simple perception ordinaire des sens. Le vivant, comme tel, ou dans la réalisation parfaite de son mouvement vital, nous apparaîtra d'autant mieux qu'il sera plus intégralement lui-même. Et il n'est intégralement lui-même, qu'à la condition de n'être privé d'aucune de ses parties soit intérieures, soit extérieures. La moindre égratignure faite à son écorce est, pour lui, une altération, qui peut servir à l'améliorer, sans doute, mais qui, de soi, constitue une atteinte à l'absolue perfection de sa vie. Cette vie n'est absolument parfaite qu'à la condition de n'être perçue, par nos sens, que dans ses manifestations extérieures. En elle-même ou dans ce qui la constitue proprement le motus ab intrinseco dont nous a parlé saint Thomas, elle ne peut être saisie que par la raison philosophique. Pour la vie, comme pour les principes essentiels du corps, c'est au philosophe qu'il appartient de se prononcer. Ces questions ne peuvent être que de son ressort.

Mais elles sont excellemment du ressort du philosophe. Et si, déjà, la conclusion démontrée par lui au sujet de la vraie nature des corps était d'une portée si grande, que dire de sa conclusion touchant la nature de la vie?

Désormais, nous sommes sur un terrain duquel nous n'aurons plus à sortir…

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Message  Louis Mar 10 Jan 2012, 5:25 am

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VI. LA VIE (suite)
Désormais, nous sommes sur un terrain duquel nous n'aurons plus à sortir. Quand il s'agissait des corps, comme tels, s'il est vrai que sous la raison d'être qu'ils ont en commun, dans l'ordre d'une communauté d'analogie, avec tout ce qui est, sans en excepter les esprits et Dieu Lui-même, toutefois leur nature d'êtres corporels les enfermait dans un domaine où, comme tels, ne pouvaient communiquer en rien les êtres spirituels.

Pour la vie, il n'en va plus de même. Son caractère essentiel, que saint Thomas nous a fixé d'un trait de génie, demeurera et se retrouvera dans tous les vivants. Dieu Lui-même, qui sera le Vivant par excellence ou par antonomase, verra sa vie se définir, autant que nous pouvons parler de définition quand il s'agit de Lui, par les mêmes mots qui viennent d'être prononcés par saint Thomas au sujet de la plante ou du végétal : « motus ab intrinseco : un mouvement du dedans ».

Ce ne sera plus désormais qu'une question de degrés, une question de perfection. Mais le fond, l'essence, la définition, la raison qui vient d'être donnée n'aura pas à changer.

Parvenus à ce degré de notre ascension, c'est donc une échappée directe qui s'ouvre pour nous sur les plus hauts sommets où devra nous conduire la suite de nos études.

Mais n'anticipons pas. Et continuons à procéder par degrés.

Dans notre prochaine étude, nous aborderons un nouveau degré d'être qui sera le second degré de vie.

A SUIVRE : VII. LA SENSATION

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Message  Louis Mar 10 Jan 2012, 12:00 pm

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VII. LA SENSATION
Parmi les êtres qui nous entourent, qui sont avec nous sur notre globe terrestre, nous avons constaté l'existence d'êtres spéciaux, qui appartiennent assurément au monde des corps, mais qui se distinguent des corps étudiés jusque-là et qui n'étaient que des éléments ou corps simples et des mixtes résultant de leur combinaison pour constituer le règne minéral. Au-dessus de ces êtres du monde des éléments ou des minéraux, nous sont apparus d'autres êtres, supérieurs aux premiers dans des proportions que nous n'avons pas craint d'appeler en quelque sorte infinies. Avec eux, en effet, c'était un monde nouveau qui se révélait à nous, le monde de la vie.

Le caractère essentiel de ce nouveau monde était celui que saint Thomas nous a défini en l'appelant « un mouvement du dedans, motus ab intrinseco ». Nous l'avons étudié à son premier degré dans le règne végétal. Et, en effet, nous avons pu constater, à la seule inspection du végétal ou de la plante, qu'il se produit là une série de phénomènes ordonnés dont l'explication dernière ne peut être que dans un principe qui y préside à l'intérieur même du sujet. La plante, mise en terre, puise, dans le sol, un suc qu'elle transforme au-dedans d'elle-même et par le concours duquel nous la voyons se conserver, puis grandir, puis se reproduire. Par là, elle se distingue essentiellement des êtres corporels inférieurs, qui ont bien, en eux, un principe d'action leur permettant de communiquer leur nature, mais, seulement, par voie d'action extérieure, en modifiant une matière qui est et demeure en dehors d'eux ; tandis que la plante communique sa propre nature à une matière attirée en elle et qu'elle transforme au plus intime d'elle-même, se l'assimilant, et la mettant à même de retourner, ainsi transformée et devenue une autre elle-même, au dehors, pour y subsister à son compte et y continuer un semblable phénomène de vie.

Il est donc vrai que…

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Message  Louis Mer 11 Jan 2012, 6:02 am

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VII. LA SENSATION (suite)
Il est donc vrai que le caractère essentiel de la vie, défini par saint Thomas « un mouvement du dedans », se trouve, à son premier degré, dans le monde des végétaux. Tout végétal est un vivant. Et, à ce titre, il domine, sans proportion, le monde minéral.

Mais, pour être, sans proportion, au-dessus du minéral, le végétal n'en demeure pas moins au premier degré, au degré le plus infime du monde des vivants.

C'est qu'en effet, dans ce monde nouveau de la vie, qui débute avec le végétal, nous aurons à constater une merveilleuse gradation dans l'échelle de la perfection. Pour l'apprécier, nous n'aurons qu'à considérer la perfection même de ce caractère essentiel que nous avons trouvé dans le premier degré de vie et qui se retrouvera dans tous les degrés supérieurs. Nous avons vu qu'il consistait dans un certain mouvement d'ordre intérieur, qui n'a point à s'expliquer par l'intervention d'un agent ou moteur étranger au sujet où il se trouve.

Il suit de là que dans la mesure où cette note d'intérieur dans le mouvement dont un être est mû sera plus parfaite, plus absolue, dans cette mesure-là le vivant lui-même, comme tel, ou sous sa raison propre de vivant, sera plus excellent et plus parfait.

Dans le végétal, dans la plante, la note d'intérieur existe assurément, caractérisant essentiellement le mouvement qui s'y manifeste. Et, pour autant, nous l'avons dit, la plante appartient déjà au monde de la vie. Mais cette note ou ce caractère est encore d'ordre imparfait, le mouvement vital de la plante qui a son principe clans la plante et qui se déploie ou se réalise à l'intérieur de la plante elle-même n'a point, dans la plante seule, toute sa raison. Au début, il suppose quelque chose d'extérieur. C'est, en effet, du dehors, de la terre ou de l'air, que la plante tire, par ses racines ou par ses feuilles, l'aliment dont elle vit. Et il est vrai que cet aliment, une fois dans la plante, s'y trouve transformé par une vertu, proprement vitale ou d'ordre intérieur, qui l'incorpore à la substance même du sujet qui est le sien. Une nouvelle vertu a même pour effet de préparer cet aliment en vue de la reproduction du sujet qui se survivra en un autre lui-même. Et ce fruit merveilleux de la vie en est comme l'épanouissement parfait dans la plante ou le végétal.

Toutefois…


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Message  Louis Mer 11 Jan 2012, 12:10 pm

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VII. LA SENSATION (suite)
Toutefois, une imperfection se mêle à cette perfection dans l'ordre du caractère essentiel de la vie. Le fruit de la plante, quand il est parfait comme fruit, ne demeure pas en elle. Il en sort et s'en détache, pour constituer, indépendamment du premier sujet et en dehors de lui, un nouvel être vivant du même ordre.

Ainsi donc la vie de la plante, bien qu'elle appartienne vraiment à l'ordre de la vie et qu'elle en ait le caractère essentiel, n'est encore qu'une vie imparfaite. Si son mouvement est d'ordre intérieur, il ne laisse pas que de se rattacher au dehors d'une certaine manière, soit qu'il s'agisse de son commencement, soit qu'il s'agisse de son terme.

Au-dessus de cette vie de la plante, même pour les êtres qui vivent sur notre terre, un nouveau degré de vie se révèle à nous. C'est celui de l'animal…

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Message  Louis Jeu 12 Jan 2012, 6:45 am

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VII. LA SENSATION (suite)
Au-dessus de cette vie de la plante, même pour les êtres qui vivent sur notre terre, un nouveau degré de vie se révèle à nous. C'est celui de l'animal.

Puisqu'il s'agit d'un degré de vie, il s'agira donc, ici encore, de mouvement d'ordre intérieur; et puisque c'est un degré nouveau de vie, supérieure celui de la plante ou du végétal, la note d'intérieur que nous constaterons dans ce mouvement vital devra, comme telle ou sous celle raison d'intérieur, avoir quelque chose de plus parfait, c'est-à-dire de plus intime.

Or, il en est bien ainsi, en effet.

Pour bien saisir ce degré nouveau de perfection dans le mouvement vital qui caractérise l'animal et lui assigne une place plus excellente dans l'ordre des vivants, il importe de remarquer que l'animal garde, en lui, aussi, le degré de vie qui est celui du végétal ou de la plante. Nous sommes toujours dans le monde des corps. Le premier degré qui caractérise ce monde des corps demeure toujours à la base des degrés supérieurs qui se superposent à lui. Tout être corporel, vivant ou non, est un composé de matière et de forme. Et même, s'il s'agit des êtres corporels qui ne sont pas l'un des éléments ou premiers corps simples, il portera en lui nécessairement un certain mélange ou une certaine combinaison de ces premiers corps simples ou éléments. Ceux-ci demeureront en lui, non pas sous la raison propre d'éléments ou corps simples et avec leur propre forme substantielle. Chacun d'eux aura été transformé. Toutefois dans cette transformation, les virtualités de chacun d'eux persistent. Et ce sont ces virtualités elles-mêmes qui constituent la disposition matérielle d'où l'agent supérieur tirera, l'amenant à l'acte par son action, la forme substantielle nouvelle qui sera celle du nouveau corps. Et il en est ainsi, nous l'avions déjà fait remarquer, dans toute l'ascension du monde corporel où l'on va d'un degré inférieur à un degré supérieur d'être, par les transformations substantielles qui s'y produisent.

De même donc…

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Message  Louis Jeu 12 Jan 2012, 12:44 pm

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VII. LA SENSATION (suite)
De même donc que le végétal porte en lui les virtualités des minéraux mises au service du principe vital qu'est sa forme substantielle d'ordre supérieur ; de même l'animal garde on lui toutes les perfections du végétal comme tel ou dans l'ordre de la vie selon qu'elle se trouve en lui au premier degré, et à ces perfections présupposées il ajoute les perfections propres à la forme substantielle nouvelle, d'ordre supérieur, qui est la sienne. La forme substantielle nouvelle, d'ordre supérieur, qui sera celle de l'animal, aura en elle, portées à un degré de perfection plus élevée selon qu'il convient à son nouveau degré d'être formel, toutes les virtualités des formes inférieures, qu'il s'agisse de la forme des éléments ou corps simples, de la forme des mixtes, ou de la forme du végétal. À elle seule, elle remplira les fonctions de toutes ces formes inférieures, et y ajoutera la fonction spécifique nouvelle qui sera la sienne propre. Et c'est ainsi que, par sa forme nouvelle d'animal, l'animal sera et sera selon tous les degrés d'être parcourus depuis les formes élémentaires jusqu'au végétal, comme il serait par ces formes inférieures et par chacune d'elles; et qu'il vivra du premier degré de vie qui est celui du végétal, comme s'il avait une âme végétale, pouvant donc s'alimenter, se nourrir, croître, se reproduire, comme le végétal. Il n'y aura qu'une différence : c'est que toutes ces fonctions seront en lui plus parfaites, émanant d'une forme supérieure, qui a de pouvoir y vaquer, comme les formes inférieures, mais en fonction d'une fin plus haute, qui est la sienne propre comme nouvelle forme substantielle d'un nouveau degré d'être dans l'échelle ascendante des êtres qui sont.

L'animal sera donc aussi un végétal mais d'ordre supérieur, en raison de son nouveau degré d'être qui le caractérise et le spécifie.

Ce nouveau degré d'être, puisqu'il est supérieur à celui du végétal qui appartenait déjà à l'ordre de la vie, sera lui-même un degré d'être appartenant aussi, et plus excellemment encore, à l'ordre de la vie.

C'est ce nouveau degré d'être ou de vie, et le caractère propre de sa perfection, en tant qu'il se distingue du végétal et s'y surajoute en le supposant et en le perfectionnant, que nous devons maintenant essayer de définir.

Il s'appelle d'un nom nouveau, qui va nous révéler, lui aussi, tout un monde nouveau, avec des échappées plus éblouissantes encore que celle de la vie à son premier degré.

C'est le caractère ou le degré de la sensation….


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Message  Louis Ven 13 Jan 2012, 6:44 am

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VII. LA SENSATION (suite)
C'est le caractère ou le degré de la sensation.

Parler de sensation, c'est parler de connaissance. Il s'agit dès maintenant de ce que nous appellerons la connaissance sensible. Le monde de la connaissance sensible et de tout ce que celte connaissance comprend, voilà, proprement et formellement, ce dont il s'agit, quand il est question de l'animal, ou de son degré de vie, se distinguant du végétal ou de la vie de la plante, et s'y surajoutant dans l'échelle des êtres.

Puisqu'il s'agit d'un nouveau degré de vie, et que la vie, nous le savons, se définit « un mouvement du dedans : motus ab intrinseco », la sensation sera donc un phénomène qui aura son principe au-dedans du sujet qui sent. Ce ne sera pas une action ou un mouvement qui ait pour objet de perfection quelque chose d'extérieur au sujet qui agit ; c'est une action dont le bénéficiaire, si l'on peut ainsi dire, sera le sujet lui-même. Ce sera une action immanente ; non transitive. Mais parce que c'est un nouveau degré de vie, supérieur à celui du végétal ou de la plante, et que la perfection de la vie se mesure au degré d'intimité ou au caractère et à la note d'intérieur qu'a le mouvement vital, il s'ensuit que le nouveau degré de vie qu'est la sensation ou la connaissance sensible et tout ce qui s'y rattache, sera quelque chose de plus intime ou dont le caractère sera encore plus intérieur que n'était le mouvement vital constituant le premier degré de vie tel qu'il nous est apparu dans la plante ou le végétal.

Dans la plante ou le végétal, nous avons constaté que le mouvement vital, bien qu'il fût, en soi et dans son déploiement, d'ordre intérieur, se rattachait encore cependant, d'une certaine manière, à l'extérieur ou au dehors. C'est du dehors que venait le suc dont la plante s'alimentait. Et, à mesure que cette alimentation de la plante devenait plus parfaite ou donnait son plein, si l'on peut ainsi s'exprimer, le mouvement vital tendait à retourner au dehors. Quand la plante a pris pour elle tout l'aliment dont elle a besoin pour se conserver et atteindre sa perfection individuelle, ce qui reste de cet aliment ou son superflu est transformé, par la vertu génératrice qui est dans la plante, en une semence ou un germe, qui fera que la plante se reproduira au dehors en une autre plante distincte d'elle-même et renouvelant sa propre vie.

Cette vie, nous l'avons dit,…

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Message  Louis Ven 13 Jan 2012, 12:31 pm

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VII. LA SENSATION (suite)
Cette vie, nous l'avons dit, sera aussi dans l'animal, qui, dans l'ordre de la vie ou du mouvement vital, doit avoir tout ce qui est dans le végétal, mais d'une manière plus excellente et plus parfaite. Toutefois, ce n'est point par cette plus grande excellence et perfection de la vie végétative, en lui, que se distingue proprement l'animal, et que se caractérise ou se spécifie la perfection du nouveau degré de vie qui doit cire le sien, comme animal, distinct du végétal.

Ce nouveau degré de vie, qui spécifie l'animal et le distingue du végétal, c'est la sensation, la connaissance sensible et tout ce qui s'y rattache. C'est donc là, dans la connaissance sensible, que nous devons rechercher ce caractère d'intimité ou cette note d'intérieur, dans le mouvement vital, qui doit marquer, proprement, l'excellence ou la perfection de la vie de l'animal par rapport à la vie du végétal. Bien que végétal plus parfait, l'animal, en tant qu'animal se distinguant proprement du végétal, et apportant avec lui un nouveau degré de vie, ne doit pas se considérer dans l'ordre de la vie végétative, ou comme végétal, mais dans l'ordre delà vie qui est la sienne comme animal. Et cet ordre est celui de la connaissance. Tout l'animal, comme tel, ou tel qu'il se surajoute au végétal, se ramène à l'ordre de la connaissance sensible.

Et c'est bien, en effet, dans cet ordre de la connaissance sensible, que sa vie ou son degré de vie va nous apparaître avec un degré de perfection déjà merveilleusement transcendant.

Il aura ceci de commun encore avec le mouvement vital de la plante, qu'il dépendra du dehors ou de l'extérieur dans son commencement. La connaissance sensible suppose, en effet, de toute nécessité, à son début, l'action d'un objet extérieur qui frappe le sens, et, d'une manière mystérieuse, mais tout à fait réelle, quoique non déjà plus strictement matérielle, imprime en lui sa forme ou sa ressemblance. S'il n'y avait pas, hors du sujet qui est apte à voir , une couleur venant agir sur son organe de la vue et s'imprimer en lui, jamais le vivant qu'est l'animal ne réaliserait ce premier acte vital de vie sensible qui consiste à voir. S'il n'y avait pas, hors de ce même sujet qui est apte à entendre, un son venant agir sur son organe de l'ouïe et se graver en lui, jamais l'animal ne réaliserait cet autre acte vital de vie sensible qui consiste à entendre. Et il en faut dire autant des autres organes de perception sensible, qui donnent sur le dehors : comme l'odorat, destiné à percevoir les odeurs ; le goût, à percevoir les saveurs ; le toucher, destiné à percevoir les divers qualités tangibles des corps qui entourent l'animal.


Tous ces sens extérieurs sont…

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Message  Louis Sam 14 Jan 2012, 6:49 am

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VII. LA SENSATION (suite)
Tous ces sens extérieurs sont comme autant de portes donnant accès sur le monde du dehors, ou plutôt permettant au monde du dehors de pénétrer à l'intérieur de l'être vivant qui possède en lui le degré de vie sensible propre à l'animal. Et, sans doute, nous l'allons voir, c'est bien au-dedans de l'animal que se produira le mouvement vital nouveau qui consistera à connaître d'une connaissance sensible et à vivre selon l'ordre de cette connaissance. Mais tout ce mouvement vital intérieur de connaissance sensible aura pour point de départ l'action du monde extérieur sur les sens extérieurs de l'animal. II y a donc, ici, comme pour le végétal, un point de départ ou un commencement qui vient du dehors. Et, de ce chef, nous n'aurions pas, semble-t-il, à marquer un degré de perfection plus élevé dans la vie de l'animal que dans celle du végétal.

Toutefois, même en gardant ce point de ressemblance, quelle perfection nouvelle, en réalité, et d'ordre transcendant, dès ce commencement ou point de départ, dans la vie de l'animal ! Ce n'est pas de la même manière que le monde extérieur agit sur lui ou qu'il va prendre au dehors ce qui alimentera sa vie, et que le végétal allait y puiser ce qui alimentait la sienne. Pour le végétal, il s'agissait d'un aliment matériel en fonction d'une vie matérielle à conserver, à développer, à reproduire. Ici, il s'agit d'un aliment en quelque sorte spirituel déjà. Tandis que le suc de la terre destiné à nourrir le végétal pénètre en lui selon la matéria-lité de sa substance corporelle, l'objet extérieur qui pénètre dans le sens et y devient matière de vie sensible, demeure au dehors selon son être propre et n'est changé en rien dans sa substance ; et, s'il pénètre vraiment dans le sens de l'animal, c'est par une sorte de dédoublement de lui-même : ou plutôt, il envoie au sens, par l'entremise d'un milieu proportionné, comme sa propre image, sa forme, son espèce, pour garder le mot dont se sert ici le langage technique de la philosophie aristotélicienne et thomiste. Encore est-il que ce mot n'est technique qu'en fonction d'un manque d'usage dans la langue de tout le monde; puisque aussi bien espèce, à proprement parler, signifie image, ou, plus exactement, ce qui tombe sous le sens de la vue, ce qu'on voit.

Ainsi donc l'objet extérieur…

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Message  Louis Sam 14 Jan 2012, 12:13 pm

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VII. LA SENSATION (suite)
Ainsi donc l'objet extérieur, dans la connaissance sensible que va être la vie de l'animal comme tel, met en branle cette vie et en est le commencement ou le point de départ, non plus par une action ou une fonction d'ordre matériel, mais par une action d'ordre quasi spirituel, comme s'exprime saint Thomas, ou, selon un autre terme classique dans la question qui nous occupe, d'ordre intentionnel : et ce dernier mot s'oppose au mot physique, toujours dans le sens d'action matérielle due au jeu des forces physico-chimiques. C'est ainsi qu'une couleur sera dite agir naturellement ou physiquement sur un objet, quand, par son action, elle fera que cet objet soit coloré. Lorsque, au contraire, la couleur agit sur l'organe du sens de la vue, dans l'animal, elle ne fait pas que l'œil soit coloré. Et, pourtant, elle agit sur cet œil, puisque, par son action, elle fait que l'œil devient elle, en quelque sorte. S'il ne devenait pas elle, en effet, d'une certaine manière, il ne la verrait pas. Avant qu'elle agisse sur lui, l'œil était en puissance seulement quant au fait de la voir. Et il était de telle sorte en puissance, qu'il n'était, de soi, déterminé à voir aucune couleur. Il pouvait les voir toutes; mais s'il a vu celle-là, ce n'est pas seulement parce que cette couleur aura excité sa faculté de voir. Elle a fait plus. Elle l'a déterminé à voir telle couleur en faisant que telle couleur soit en lui. Si, au lieu de la couleur blanche, c'eût été la couleur rouge ou jaune, ou toute autre, il n'aurait pas vu la couleur blanche, mais la couleur rouge, ou jaune, ou toute autre qui aurait agi sur lui.

Si donc l'œil voit telle couleur, c'est vraiment parce que cette couleur a agi sur lui et l'a fait devenir en quelque sorte elle-même. Et cependant il n'est point devenu cette couleur de façon à être altéré par elle et à devenir matériellement ou physiquement ce qu'est cette couleur, comme était altéré l'objet dont nous parlions tantôt, qui, sous l'action de telle couleur agissant physiquement sur lui, devient lui-même coloré. Dans l'acte de vision provoqué par la couleur et se terminant à la couleur, l'œil, qui produit cet acte de vision, n'est pas lui-même coloré. Et, cependant, il est devenu, d'une certaine manière, cette couleur, déterminé à elle seule, de façon à la voir elle et non pas une autre. La couleur a pénétré chez lui, en lui. Elle lui a donné une détermination qu'il n'avait pas, sa propre détermination.

Elle est devenue sa forme.

Et retenons bien ce mot…

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Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET) - Page 7 Empty Re: Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)

Message  Louis Dim 15 Jan 2012, 6:27 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VII. LA SENSATION (suite)
Elle est devenue sa forme..

Et retenons bien ce mot. Il nous donne, d'un coup, et dès le début, la clé philosophique du mystère de la connaissance.

Dans l'ordre de la connaissance, il se passe quelque chose d'analogue, mais transposé sur un plan plus haut, à ce qui se passe dans l'ordre de l'être, même de l'être corporel ou physique, tel que nous l'avons étudié jusqu'ici.

Dans cet ordre de l'être réel physique et corporel, deux principes essentiels, nous le savons, interviennent nécessairement, pour le constituer : l'un, la matière, ayant raison de principe en puissance, de soi indéterminé à être n'importe quoi parmi les divers êtres corporels ; l'autre, la forme, ayant raison de principe en acte, qui porte avec lui une détermination dans l'ordre des êtres corporels, et, du seul fait qu'il est uni à la matière, la détermine à être cet être même dont il est la détermination.

Ce rôle de la matière et de la forme est manifeste aux yeux de tous, quand il s'agit de l'être accidentel, comme nous l'avons vu quand nous avons parlé du bloc de marbre pouvant être la statue de n'importe qui, mais devenant déterminément la statue de César, quand il a reçu la forme accidentelle de César.

Quand il s'agit de l'être substantiel, le rôle de la matière et de la forme n'est plus accessible aux sens. Il n'est perçu que par la raison seule, cette raison que nous avons appelée la raison philosophique, pour la distinguer de la raison propre à la science expérimentale, privée, de soi, au contrôle des sens. Mais, pour échapper à la science expérimentale, il n'en est pas moins réel, et il est bien autrement important ou profond que celui qui relève de l'expérience.

Il en sera de même…


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Message  Louis Dim 15 Jan 2012, 1:12 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VII. LA SENSATION (suite)
Il en sera de même, seulement dans une sphère nouvelle, qui déjà nous achemine à la sphère des esprits, quand il s'agira de l'ordre de la connaissance. Ici encore, comme pour l'ordre de l'être, soit accidentel, soit substantiel, nous allons avoir à parler de matière et de forme, quoique ce soit, répétons-le encore, dans un sens nouveau et qui commence à se spiritualiser.

La faculté de connaître, ou, pour parler d'une façon plus précise encore et plus concrète, quand il s'agit de la connaissance sensible, l'organe du sens, par exemple l'œil pour la vue, est, non plus dans l'ordre de l'être, mais dans l'ordre du connaître, en puissance ou indéterminé par rapport aux divers objets qui peuvent être connus par lui. De soi et en soi, il n'en porte, il n'en contient aucun. Et c'est pourquoi, laissé à lui seul, il ne connaît rien, il ne voit rien. Il est seulement en puissance à connaître, à voir, dès que quelque chose, dès qu'un objet apte à être connu, à être vu, se présentera à lui. Encore est-il que s'il connaît, s'il voit quand cet objet se présente, ce n'est pas seulement pour cette raison que cet objet l'aura fait sortir de ce qui ressemblerait au sommeil ou à la torpeur, lui permettant ensuite de connaître ou de voir en lui-même et par lui-même des objets de connaissance ou de vision qu'il porterait en lui. Nullement : car il ne voit jamais que l'objet qui agit sur lui au moment où il voit. S'il est déterminé à voir, et à voir quelque chose, et à voir cette chose, c'est uniquement parce que cette chose agit sur lui et le détermine à la voir. Et il ne voit jamais rien que dans ces mêmes conditions.

Par où il est manifeste que…

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