Saint Vincent de Lérins (complet)
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gabrielle
Louis
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Chute de Tertullien.Portrait de Tertullien.
Il faut dire de Tertullien ce que je viens de dire d'Origène, les mêmes réflexions leur conviennent : autant que l'un s'est distingué dans l'Orient, autant l'autre a brillé dans l'Occident. Qui a jamais égalé Tertullien en science ? Qui a jamais acquis une connaissance plus étendue des Lettres humaines & divines ? Ce génie vaste & pénétrant s'était rendu parfait dans toutes sortes de Philosophies. Il avait compris, & chargé son esprit sans confusion de tout ce que chaque secte de Philosophes avait de singulier. Il n'ignorait l'histoire d'aucune nation. La vivacité & la force de son esprit étaient telles qu'il n'a jamais entrepris de combattre une opinion, qu'il ne l'ait renversée, qu'il ne l'ait détruite, tant il donnait de poids aux arguments qu'il employait dans la dispute.
Mais quelle fut la solidité & l'éloquence de son style, ses ouvrages sont issus (?) de raisonnements si liés, si vraisemblables, qu'il entraîne ceux mêmes qui semblaient les moins propres à être persuadés. Toutes ses expressions sont de courtes sentences pleines d'énergie, tous ses arguments sont des armes sûres de la victoire. Les Marcions , les Apelles , les Praxeas, les Hermogenes, les Juifs, les Gentils, les Hérétiques & tant d'autres l'ont éprouvé; eux dont il a réfuté les erreurs par tant d'ouvrages admirables, eux dont il a , pour ainsi dire, foudroyé les blasphèmes..
Tant de lumières & tant de victoires remportées pour la cause de la vérité, n'ont point empêché ce grand homme de tomber dans l'erreur…
(pp. 276-277.)
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Règle de précaution pour les Catholiques.Chute de Tertullien.
Tant de lumières & tant de victoires remportées pour la cause de la vérité, n'ont point empêché ce grand-homme de tomber dans l'erreur. Plus savant qu'heureux il a changé de party ; & trop peu attaché au dogme Catholique, il lui arriva, comme l'a remarqué saint Hilaire, que par les erreurs de ses derniers ouvrages, il rendit les premiers dangereux en les rendant suspects. Ainsi il devint une tentation dans l'Eglise.
Je n'en dirai pas davantage, je me fixerai à faire observer que sans égard pour le précepte de Moïse, il prit pour de vraies Prophéties cet enthousiasme de fureur qui s'était emparé de Montan, & ces rêveries monstrueuses que des femmes insensées débitaient comme une nouvelle doctrine. Il fallut se précautionner contre lui, & dire aux peuples qu'il eût pu séduire : S'il s'élève parmi vous un Prophète...... vous n'écouterez point les paroles de ce Prophète.............. parce que le Seigneur votre Dieu vous éprouve; afin qu'il paraisse publiquement, s'il est vrai que vous l'aimiez de tout votre cœur & de toute votre âme, ou non.
Tous ces exemples & tant d'autres que l'on pourrait tirer de l'histoire Ecclésiastique, joints aux préceptes de Deutéronome, doivent nous prouver évidemment & nous convaincre, que quand il arrive que dans l'Eglise un Docteur s'écarte du droit sentier de la Foy, Dieu permet par la sage disposition de sa providence , que les choses tournent ainsi pour nous éprouver, & pour connaître s'il est vrai que nous l'aimions de tout notre cœur & de toute notre âme.
(pp. 277-278.)
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Portrait d’un homme que la nouveauté a séduit.Règle de précaution pour les Catholiques.
De là il est aisé de former ce raisonnement : Pour être véritablement Catholique il faut aimer la vérité qui n'est autre que Dieu même : aimer l’Église: aimer le Corps mystique de JESUS-CHRIST. Il faut préférer à toutes choses la Religion sainte & la Foy Catholique. L'autorité d'un seul homme, l'amour que l'on a pour lui, la beauté du génie, l'éloquence, la science, rien, en un mot, ne doit faire balancer notre cœur. Fermes à mépriser tous ces talents, inébranlables dans la Foy, nous ne devons admettre que ce que l'Eglise a toujours & universellement crû : tout ce qu'un seul séparément, tout ce qu'un seul contre le sentiment de tous ose enseigner , est nouveau & inouï avant qu'il l'eût avancé , & dès lors un vrai Fidèle comprend que Dieu l'a permis pour éprouver les hommes, & non pour leur servir de règle de créance & de Religion.
Nous avons sur ce point quelque chose de formel dans saint Paul. Il dit dans sa première Epître aux Corinthiens (I. Cor, c.11) : Il faut qu'il y ait des hérésies, afin que l'on découvre par là ceux d'entre vous qui sont solidement à Dieu : C'est comme s'il disait; Dieu ne détruit pas d'abord les Auteurs des hérésies, afin que ceux qui sont solidement à lui , soient connus , & qu'il paraisse combien chaque particulier a du zèle , d'amour, de courage pour la foy & pour sa défense. En effet, lorsqu'une hérésie commence à se répandre, on voit bien tôt qui sont ceux que l'on doit regarder comme le froment, & ceux que l'on doit regarder comme la paille dans le champ du Seigneur. Tout ce qui était sans poids & sans solidité dans l’aire, est emporté par le souffle du premier vent.
(pp. 279-280.)
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
Portrait d’un homme que la nouveauté a séduit.
A dire vrai, on remarque alors des caractères différents. Les uns sont entièrement emportés ; les autres ne sont qu'émus & ébranlés; ils ont du penchant pour la nouveauté, mais ils craignent de périr par le schisme; ils vivent portant le trait qui les a blessés. La honte de leur lâcheté les retient hors du camp, ils sont à demi morts & à demi vivants: & la quantité de poison qu'ils ont bu, ne leur a pas entièrement ôté la vie. Situation douloureuse ! ils ne peuvent ni vivre, ni mourir; à quel trouble, à quelles agitations, ne sont-ils pas en proie ?
Ce n'est pourtant là qu'une partie de cette situation affreuse : tantôt poussés par l'esprit d'erreur comme par un vent impétueux ils sont transportés hors d'eux-mêmes; tantôt ils y sont reportés par un souffle contraire & deviennent le jouet du mensonge ; tantôt enflés d'un orgueil présomptueux, & décidant avec témérité, ils assurent ce qui est incertain ; tantôt follement timides ils craignent d'assurer les choses les plus certaines. Toujours flottants ils ne savent ni dans quel chemin marcher, ni par quel moyen ils pourraient revenir de leurs égarements : ils ne savent ni à quoi s'en tenir, ni de quoi ils doivent se défier.
Ô qu'ils seraient heureux ! s'ils pouvaient comprendre que ces agitations affligeantes sont un bienfait de la miséricorde divine sur eux. Loin du port salutaire de la Foy Catholique ils sont battus par une tempête effrayante, ils sont réduits à un danger extrême, & Dieu le permet, afin qu'ils abaissent ces voiles coupables d'un orgueil présomptueux dans lesquels ils avaient reçu ce vent fatal de la nouveauté qui les expose à l'orage ; afin qu'ils fassent de prompts efforts pour rentrer dans le port, dans le sein paisible de leur mère qui est l'Eglise.
Là ils doivent commencer par revomir les eaux amères de l'erreur donc ils s'étaient remplis, & boire ensuite les eaux vives, célestes & nourrissantes de la vérité.
Là ils doivent commencer à effacer de leur mémoire ce qu'ils n'avaient pu apprendre sans crime, & se mettre ainsi en état d'apprendre & de concevoir ce que Dieu veut que nous comprenions dans les mystères de la Religion; toujours humbles pour croire ce qu'ils ne comprennent pas.
Dans l'habitude que je me fais de méditer souvent toutes ces choses…
(pp. 280-282.)
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
Portrait d’un homme que la nouveauté a séduit. (suite)
… Dans l'habitude que je me fais de méditer souvent toutes ces choses, je vois toujours avec un nouvel étonnement la folie & l'aveuglement impie de ceux qui par un amour capricieux de la nouveauté & de l'erreur, ne peuvent se soumettre aux règles de créance qu'une tradition ancienne a conservé , & qui par une inquiétude criminelle cherchent à ajouter, à changer, à retrancher quelque chose dans la Religion, comme si le dogme de la Foy n'était pas une révélation céleste qui suffit pour le salut, telle qu'elle est ; comme si ce dogme était ssemblable aux institutions humaines qui ne parviennent à leur perfection que par des changements continuels; & par des réformations journalières.
Les saintes Ecritures décident si précisément contre cet abus. (Prov. XXII, v. 28) Ne transportez pas, dit le Sage, les bornes que nos pères ont posées : ne jugez point après celui qui a droit de juger. Et il dit ailleurs ( Eccl. X, 8 ) : Le serpent mordra celui qui coupe la haie. Nous avons encore contre cet abus la belle maxime de l'Apôtre. On peut dire que c'est un glaive propre à couper toutes les nouveautés, & à les étouffer dans leur naissance. Voici comme il parle à son Disciple (I. Tim. VI, 20-21) : O Timothée ! gardez le dépôt qui vous a été confié, fuyant les profanes nouveautés de paroles, & tout ce qu'on op pose une doctrine qui porte faussement le nom de science ; dont quelques-uns faisant profession se sont égarés de la Foy.
Qui ne serait après cela surpris de trouver des hommes assez endurcis, assez impudents, assez opiniâtres pour résister aux Oracles si précis de la parole céleste & n'être ébranlés ni par le poids d'une si grande autorité , ni par la crainte d'un si grand malheur ?Fuyez dit l'Apôtre , les profanes nouveautés de paroles. Remarquez qu'il ne dit pas, fuyez ce qui est ancien , ce qui est immémorial ; il paraît au contraire que son intention est que l'on s'y attache. S'il faut éviter la nouveauté, concluez de là qu'il faut s'en tenir à ce qui a pour foi l'ancienneté: & que si la nouveauté est profane, ce qui est ancien est sacré.
Saint Paul ajoute : Fuyez tout ce qu'oppose une doctrine qui porte faussement le nom de science. Or ce nom de science fausse ne convient que trop à l'hérésie. C'est parmi les Hérétiques que l'ignorance passe pour habileté, que les brouillards épais sont le jour serein, & que les ténèbres sont regardées comme la vraie lumière.
L'Apôtre continue: Dont quelques-uns faisant profession se sont égarés de la Foi. Quand sont-ils tombés ? Lorsqu'ils ont fait profession d'une doctrine nouvelle & ignorée, avant qu'ils l'eussent imaginée. Pour les bien connaître, & mieux faire sentir combien ils sont dangereux, il est à propos de rapporter ici leurs discours les plus ordinaires.
(pp. 282-285.)
A suivre : Discours artificieux des Novateurs.
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
Discours artificieux des Novateurs.
Venez, disent-ils, venez pauvres malheureux & ignorants qui prenez le nom de Catholiques, apprenez de nous le vrai dogme de la Foy; nous sommes les seuls qui le comprenions dans son juste sens. Ce qui avait été caché pendant plusieurs siècles, nous a été depuis peu révélé par une prérogative singulière : n'attendez pas que nous vous l'enseignions en public, vous y perdriez beaucoup du plaisir que vous aurez à en être instruits en secret. Quand vous en aurez acquis une connaissance parfaite, enseignés en secret ce que vous aurez appris en cachette ; gardez-vous bien de déceler votre secret, & faites en sorte que l'Eglise ignore vos prétentions & votre intrigue. Il n'appartient qu'au petit nombre choisi de pénétrer dans les grands Mystères.
Que cette manière de parler me semble avoir du rapport avec ce que Salomon fait dire à cette Courtisane qui séduit les cœurs insensés. Qui est , dit-elle, le plus insensé d'entre vous , qu'il vienne à moi ? (Prov. IX. 16) Pour engager les plus dépourvus de raison, elle se sert de cette expression : Prenez avec liberté les pains cachés , & buvez en secret l'eau agréable que je vous présente. Ce qui trompe ces imprudents, c'est selon le Sage, que ces jeunes insensés ne savent pas que l'innocence des hommes fait un funeste naufrage chez cette Courtisane. Tels sont ceux qui faisant profession d'une science qui en porte faussement le nom, se sont égarés de la Foy.
Je crois devoir faire ici une expression plus étendue de cet endroit de l'Apôtre : O Timothée, dit- il, gardez le dépôt qui vous a été confié, fuyant les profanes nouveautés de paroles. Cette exclamation de saint Paul parlant à son disciple est une prédication , & un avertissement de charité. Déjà il prévoyait, déjà il déplorait les erreurs qui devaient s'élever un jour.
Qui tient aujourd’hui la place de Timothée? …
(pp. 285-286.)
Dernière édition par Louis le Ven 04 Mar 2011, 7:15 pm, édité 1 fois (Raison : Insérer la référence dans les Proverbes : fournie par un ami.)
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Quels progrès peut faire la Religion.Discours artificieux des Novateurs. (suite)
…Qui tient aujourd’hui la place de Timothée? c'est sans doute l''Eglise universelle, ou en particulier le corps des Pasteurs pour qui c'est un devoir de leur état d'avoir la science de la Religion, & de la communiquer aux autres : Gardez le dépôt qui vous a été confié. Garder le dépôt, c'est veiller contre les efforts des voleurs & des ennemis, de peur que pendant le sommeil des hommes , ils ne sèment de l'ivraie parmi le bon grain que le Fils de l'Homme a semé dans son champ. Ce terme de dépôt n'est pas indifférent; car c'est comme s'il disait : gardez ce qu'on vous a confié, & non ce que vous avez trouvé ; ce que vous avez reçu, & non ce que vous avez imaginé. Ce que l'on vous confie n'est pas l'ouvrage de votre esprit, c'est une doctrine que l'on vous a enseignée ; ce n'est point un bien qui vienne de vous, c'est une tradition qui vous est transmise : vous n'en êtes ni l'auteur, ni l'inventeur, vous en êtes seulement le dépositaire & le défenseur : Vous n'êtes point maître, ni guide, vous êtes disciple, & vous devez vous laisser conduire.
Gardez soigneusement le dépôt qui vous a été confié; c'est à dire , conservez entier le talent de la Foy Catholique qui vous a été mis entre les mains, & ne permettez pas qu'il souffre la moindre diminution. Gardez ce que vous avez reçu, & ne donnez que ce que vous avez reçu; vous avez reçu de l'or.
Donnez de l'or : soyez exact à observer cette règle. N'allez pas par une témérité insolente, ou par une supercherie criminelle donner du plomb pour de l'or, ce n'est pas de or apparent, c'est de l'or véritable que vous devez. O Timothée ! ô Prêtre! ô Ministre des choses saintes ! ô Docteur, si Dieu vous a donné de l'esprit, du talent, de la science pour vous mettre en état de servir l'Eglise , soyez le be (…) de son Tabernacle spirituel; taillez avec application & avec un art saint les pierres précieuses du Dogme divin , arrangez-les avec symétrie; mettez-les dans un ordre qui leur conserve tout leur éclat & toute leur beauté; c'est à dire, expliquez avec tant de netteté ce qui était obscur, qu'on le conçoive sans peine après vos explications : que la postérité se réjouisse de pouvoir entendre par votre secours ce que ceux qui l'ont précédée adoraient sans le comprendre. N'enseignez toutefois que ce que vous avez appris ; & en enseignant d'une manière nouvelle, n'enseignez rien de nouveau par ra-port à la Doctrine, & au fond du dogme.
(pp. 286-288.)
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Devoirs des Fidèles par rapport au bon grain. Du Dogme de la Foi.Quels progrès peut faire la Religion.
Mais quoi ? me direz vous, la Religion ne peut-elle point faire de progrès? Elle en fait, & elle en fait de très grands: il faudrait être inhumain & impie pour parler autrement ; mais d'autre part on doit craindre un inconvénient qui est de donner le nom de progrès à ce qui serait un vrai changement. Le progrès consiste dans la plus grande perfection d'une chose qui néanmoins demeure toujours la même: le changement au contraire est un partage d'une nature à une autre.
Or il faut que la Religion fasse des progrès, soit à l'égard de chaque particulier, soit à l'égard de toute l'Eglise en général : qu'il n'y ait point de temps, point de siècle où l’intelligence, la science, le goût des vérités divines ne croisse; mais qu'au milieu de tous ces progrès, la même foy, le même sens des paroles, le même dogme soit conservé sans altération. Il faut qu'il en soit en cela de l'âme comme des corps ; ils croissent, ils se développent par la succession des temps, mais ils sont toujours les mêmes : il est vrai qu'il y a beaucoup de différence entre la fleur de la jeunesse & la maturité d'un âge plus avancé, mais cependant celui qui est aujourd'hui un vieillard est le même que celui qui fut autrefois un jeune homme; les changements extérieurs ne l'ont pas fait changer de nature. Le corps d'un enfant à la mamelle est petit ; il croîtra sans cesser d'être le même : les parties qui composent le corps sont toujours les mêmes, & elles peuvent s étendre sans passer à une nature différente.
D'où je conclus que la règle d'une croissance parfaite dépend de la succession des temps qui développe avec proportion les parties que la sagesse du Créateur a d'abord resserrées dans les enfants, afin de les perfectionner peu à peu ; mais s'il arrivait que la figure extérieure qui est propre à l'homme devint différente d'elle-même; si de nouvelles parties se joignaient à celles qui font déjà , ou si quelqu'une de celles qui font soit retranchée ; alors le corps ou périrait , ou deviendrait monstrueux, ou perdrait sa force. Il faut juger de même de la Religion Chrétienne ; ces règles d'accroissement lui sont nécessaires, afin que le dogme s'affermisse par les années, se dilate, s’élève, & demeure toutefois le même en se perfectionnant sans rien perdre des parties qui lui sont essentielles, sans recevoir aucun changement, sans aucune variation dans les points sur lesquels il est posé comme sur un fondement solide.
(pp. 289-291.)
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
Devoirs des Fidèles par rapport au bon grain. Du Dogme de la Foi.
Nos ancêtres ont autrefois semé dans le champ de l'Eglise le pur froment de la Foy; il y aurait en nous de l'impiété, & de l'imprudence d'y moissonner non le grain de la vérité, mais l'ivraie empoisonnée de l'erreur. N'est-il pas plus agréable & plus utile pour nous de cueillir par des progrès soutenus le bon grain que produit la bonne semence ? Faisons-nous un plaisir salutaire de le cultiver, de le conserver dans la pureté du germe qui l'a produit.
Il est louable de cultiver, de donner un nouvel éclat à ce qui ne brillait pas assez, de développer ce qui n'était pas assez démêlé (1) ; mais il est toujours défendu de rien changer : ce serait faire un lieu couvert de ronces d'un endroit auparavant délicieux, ce serait dans un Paradis spirituel faire croître sur la tige des herbes salutaires & odoriférantes des herbes empoisonnées, & d'une odeur mortelle.
Je le répète donc; il faut que les enfants cultivent, conservent, fassent fleurir, conduisent par leur travail à une heureuse maturité, ce qu'ils ont reçu de leurs pères, ce que leurs pères ont semé & planté dans le champ de l'Eglise.
Oui, il est permis d'expliquer suivant les conjonctures des temps, de polir, d'éclaircir le Dogme invariable de la Foi; mais souvenez-vous qu'il est défendu d'y rien changer, d'en rien retrancher; mettez l'évidence de la vérité dans tout son jour, faites-la sentir par des distinctions, & des précisions justes; mais laissez au décret de la Foy toute son étendue, toute sa force; toute cette plénitude, pour parler ainsi, qui lui est propre & essentielle.
Si on laissait à chacun la pernicieuse liberté de changer à son gré ce qui doit être immuable, je frémis d'horreur en le disant, on verrait régner une dangereuse licence par qui la Religion serait bien tôt abolie; en effet si une fois vous retranchez un article de ceux qui sont de foi, bien tôt un autre esprit inquiet voudra retrancher un second article à son tour, & cette capricieuse présomption se répandant de plus en plus, on verra tous les jours de nouveaux retranchements , & par une suite nécessaire on verra la Religion périr entièrement.
Dès que le droit de mêler la nouveauté avec les anciennes vérités, les opinions étrangères avec celles qui sont dans l'Eglise depuis sa naissance, le profane avec le sacré; dès que ce droit se sera établi, c'en est fait de l'Eglise, il ne lui restera plus rien de fixe, d'inviolable, de sûre; un assemblage monstrueux changera le sanctuaire chaste & incorruptible de la vérité, en une caverne infâme qui servira de retraite au mensonge & aux erreurs les plus détestables.
Fasse le Père des miséricordes que ce malheur n'arrive jamais , que cette fureur soit le partage des impies : il n'en est pas ainsi de l'Église épouse de JESUS-CHRIST ; elle garde avec exactitude & vigilance le dépôt qui lui a été confié, elle n'y change elle n'y ajoute, elle n'y retranche rien ; attentive à maintenir la pureté de la Foy, elle ne rejette rien de ce qui est essentiel , elle n'introduit rien de superflu , elle conserve ce qui lui appartient, & n'admet rien d'étranger : son soin se borne à ne rien laisser perdre de ce qu'elle a reçu dès son origine. Il est vrai qu'elle travaille à éclaircir ce qui est obscur, à le polir en le rendant plus intelligible; mais elle garde avec un respect inviolable ce qui est assez clairement expliqué.
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(pp. 291-294.)
(1)
A suivre : Esprit de l’Église dans les Conciles.
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Suite de l’explication du passage de S. PaulEsprit de l’Église dans les Conciles.
Lorsque l'Eglise a assemblé des Conciles, son but a été d’y former des décrets, & de les former de telle sorte qu'ils servissent
à faire croire plus fortement ce que l'on croyait déjà, mais avec plus de simplicité & moins connaissance;
à faire prêcher avec plus de véhémence ce que l'on prêchait auparavant avec moins de hardiesse;
à faire respecter avec les sentiments d'un culte plus empressé, ce que l'on adorait déjà avec sureté.
Quand les hérésies se sont manifestées par des nouveautés impies, l'Eglise a assemblé des Conciles que s'est-elle alors proposé ? de faire publier dans des Décrets authentiques les vérités de Foy qu'elle avait reçues par la Tradition, & les faire passer par ce moyen dans toutes les parties de l'Univers. Dans ces Décrets on voit de grandes instructions réduites en peu de paroles : on y voit, non de nouveaux articles de Foy, mais de nouveaux termes qui fixent le sens des Dogmes de la Religion, & qui éclaircissent ce qui était moins clair auparavant.
(pp. 294-295.)
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Exemples de plusieurs Hérésiarques, pour montrer que l‘hérésie mène au Schisme.Suite de l’explication du passage de S. Paul
Mais je reviens à l'exposition du précepte de saint Paul. O Timothée ! gardez le dépôt qui vous a été confié, fuyant les profanes nouveautés de paroles : Fuyez, dit l'Apôtre; & comment faut-il fuir? comme on fuirait devant une vipère, devant un scorpion, devant un basilic, monstre redoutable dont la morsure peut donner la mort, mais dont les regards, & le souffle même sont mortels.
Qu'est-ce que fuir? c'est ne vouloir pas même manger avec ceux qui donnent dans les profanes nouveautés : telle est aussi la doctrine de saint Jean (2. Jean, 1, 10) : Si quelqu'un vient vers vous, dit il, & ne fait pas profession de cette doctrine. Or de quelle doctrine ne parle-t-il, si ce n'est de celle qui est Catholique & universelle, de celle qui porte les caractères de l'unité, & qui se conservant par une tradition pure, à toujours été la même dans tous les temps ?
Si quelqu'un ne fait pas profession de cette doctrine , ne le recevez pas dans votre maison, & ne le saluez point; car celui qui le salue participe à ses mauvaises actions. Fuyant les profanes nouveautés de paroles, Elles sont profanes parce qu'elles n'ont rien de saint, rien qui parte d'un fonds de Religion, rien qui puisse être avoué de l'Eglise qui est le Sanctuaire du Dieu vivant.
Les profanes nouveautés de paroles. Sous ce nom de paroles, comprenez tous les Dogmes, toutes les opinions, tous les sentiments qu'enfante la nouveauté, & qui n'ont aucun des traits des anciens décrets de la Foy : opinions qui ne peuvent être approuvées, qu'en même temps la foi des saints Pères ne soit détruite au moins en partie, pour ne pas dire toute entière ; nouveautés que l'on ne peut embrasser qu'en prétendant que les Fidèles de tous les siècles, que tous les Saints, les hommes les plus chastes & les plus irréprochables, les Vierges , les Clercs, les Diacres, les Prêtres, les Evêques, la multitude innombrable de Confesseurs & de Martyrs qui nous ont précédé se sont trompés: qu'en prétendant que tant de Villes , de Provinces, de Royaumes, de Nations ; tant de Rois & de grands Hommes, en un mot que l'Univers entier qui est entré par la Foy dans le corps de JESUS-CHRIST, c'est à dire l'Église , s'est trompé & a vécu dans l'erreur avant ces nouvelles doctrines : Fuyant les nouveautés profanes de paroles; nouveautés qui ont toujours été la marque certaine par où l'on a pu sans se tromper distinguer l'hérétique qui en est le Sectateur, du Catholique qui les déteste.
Remontez à la naissance des hérésies, vous les verrez toutes naître dans un certain lieu, dans un certain temps, & paraître sous quelque nom de parti; vous verrez tous les Hérésiarques se signaler par le Schisme en se séparant de la Communion de l'Église Catholique & en se déclarant contre la croyance généralement reçue ; je ne dis rien que je ne puisse démontrer par une longue induction d'exemples.
(pp. 295-298.)
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte.Exemples de plusieurs Hérésiarques, pour montrer que l'hérésie mène au Schisme.
Avant Pélage s'était-il trouvé un homme qui osât soutenir que le libre arbitre pouvait par ses propres forces se déterminer au bien sans avoir besoin du secours de la grâce, & sans que ce secours fût nécessaire pour les saintes Actions ?
Avant Celestius ce monstrueux disciple du superbe Pélage avait-on soutenu que le péché d'Adam n'eut pas souillé l'origine de toute sa postérité ?
personne n'avait avant Arius dogmatisé contre l'unité de la Très-Sainte Trinité,
& avant l'impie Sabellius personne n'avait par une erreur sacrilège confondu les Personnes, dans cette adorable Trinité.
Avant le barbare Novatien, personne n'avait donné de Dieu une idée cruelle en soutenant comme cet impie que Dieu aimait mieux la mort du pécheur dans l'impénitence, que sa vie par la conversion & la pénitence.
Simon le Magicien que saint Pierre châtia avec tant de justice en le châtiant avec sévérité: ce
Simon fut le premier qui enseigna que Dieu croit auteur du mal, c'est à dire, de l'impiété, & des crimes les plus noirs :
Les erreurs de cet homme odieux par une secrète & continuelle succession ont passé jusqu'au détestable Priscillien.
Si on les croit, Dieu en créant l'homme lui a donné une nature corrompue qui par un mouvement propre, & une détermination nécessaire ne peut que le péché, & n'est pas capable de vouloir autre chose. Nature corrompue dans sa source, & qui emportée par une inclination au mal qu'on doit appeler une fureur se précipite, sans pouvoir se retenir sur le penchant dans toutes sortes de vices ,& d'abominations.
Je pourrais ajouter ici un grand nombre d'autres hérésies dont je ne parle pas, afin de ne point trop m'étendre; ce que j'ai dit doit suffire pour montrer que le caractère général de tous les Hérésiarques est d'aimer la nouveauté, de se déclarer contre l'ancienne Doctrine de l'Église, & d'y opposer une doctrine qui porte faussement le nom de science, & dont ils ne peuvent faire profession sans faire un mal heureux naufrage par la perte de la Foy.
Que les sages maximes des Catholiques sont éloignées de ce procédé impie! ils gardent avec fidélité le dépôt sacré d'une foi pure qu'ils ont reçue de leurs ancêtres, ils condamnent les nouveautés profanes, ils règlent leur conduite sur cette expression si précise de saint Paul : Si quelqu'un vous annonce un Evangile différent de celui, que vous avez reçu, qu'il soit anathème. (Galat. I, v.9)
(pp. 298-300)
Les caractères gras sont ajoutés par Louis.
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte.
On attend sans doute de moi que je marque ici la manière dont les Hérétiques se servent de l'Ecriture sainte; ils le font tous, & le font avec beaucoup d'ostentation: leurs ouvrages sont semés de citations tirées des livres de Moïse, de l'histoire des Rois, des Psaumes, des Prophètes, de l'Evangile & des Apôtres.
Ce n'est pas dans leurs livres seulement que leur (style) est nourri de passages des Livres sacrés, ils les répandent dans leurs conversations, dans leurs discours, soit particuliers soit publics, dans leurs entretiens avec les personnes de leur Secte, & avec ceux qui n'en sont pas, dans leurs festins, & pour tout dire en un mot, ils ont sans cesse les paroles de l'Ecriture dans la bouche;
parcourez les livres de Paul de Samosate, de Priscillien, d'Eunome, de Jovinien, & de tous les autres Hérésiarques, vous y verrez toutes les pages chargées de passages tirés de l'Ancien & Nouveau Testament; mais c'est en cela même qu'ils sont plus impies & plus dangereux;
cachés, pour ainsi dire, sous cette ombre respectable de la Loi divine, ils espèrent de se rendre moins suspects, ils n'ignorent pas que l'odeur empoisonnée qu'ils exhalent les ferait rejeter s'ils paraissaient tels qu'ils sont en effet, ils tâchent donc de la tempérer cette odeur de mort en se servant, pour m'exprimer de la sorte, du parfum des Paroles saintes : artifice dangereux & concerté par lequel ils se promettent de faire approuver l'erreur sous ce déguisement;
ainsi ils imitent ceux qui pour faire boire aux enfants des potions amères les trompent en frottant de miel les bords du verre, afin que l'enfant imprudent ne se défie pas d'une amertume qui est précédée par une douceur décevante ; telle est aussi l'artifice des empoisonneurs qui marquent avec des étiquettes trompeuses les pots où ils conservent leurs poisons.
C'est contre ce danger que JESUS-CHRIST veut que nous mettre en garde : (Matth. c. 7. v. 15.): Défiez-vous, dit-il, des faux Prophètes qui viennent à vous vêtus comme des brebis , & qui sont au dedans des loups ravisseurs. Que nous marque cet habit de brebis ? si ce n'est ces expressions tirées des Prophètes & des Apôtres, dont ces serviteurs fidèles ont fait un vêtement précieux à l'Agneau sans tache qui efface les péchés du Monde. Que doit-on entendre par ce terme de loups ravisseurs ? si ce n'est ces sens condamnables, & impies, dont les Hérétiques se servent pour répandre la contagion dans le troupeau de J. C. dans son Eglise qui est son bercail. Ils sont attentifs pour éviter d'être connus, ils ne gardent rien de l'extérieur du loup, ils en conservent seulement la rage au fond du cœur; & se couvrent des expressions de l'Ecriture comme d'une Toison trompeuse.
Vient-on à les toucher…
(pp. 300-303.)
A suivre.
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte. (suite)
…Vient-on à les toucher, on leur trouve une douceur qui prévient en leur faveur, & qui éloigne la défiance; mais que nous dit le Sauveur ? Vous les connaîtrez par leurs fruits, c'est à dire, lorsqu'ils commenceront non seulement à prononcer, mais à expliquer les divines Paroles de l'Ecriture, & à les étendre par leurs interprétations;
alors vous découvrirez leur aigreur, ou plutôt leur rage;
alors le poison répandra sa première odeur;
alors la nouveauté profane commencera à se montrer ;
alors vous les verrez couper la haie que le Seigneur avait plantée, & franchir les bornes que ¬nos pères ont posé avec sagesse;
alors vous les verrez se déclarer contre la foi Catholique, & la doctrine de l'Eglise.
Tels étaient ceux contre qui saint Paul parle avec tant de force…
(p. 303.)
A suivre.
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Le démon se sert de l’Écriture sainte pour tromper les âmes.La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte. (suite)
…Tels étaient ceux contre qui saint Paul parle avec tant de force dans sa seconde Epître aux Corinthiens (c. 11. v.13.): Ce sont de faux Apôtres, des ouvriers trompeurs qui se transforment en Apôtres de Jésus-Christ. Que veut dire cette expression , Qui se transforment en Apôtre de Jésus-Christ ? en voici l'explication ?
Les Apôtres confirmaient leur doctrine par le témoignage des Prophètes , les Hérétiques faisaient la même chose; mais parce que les interprétations des uns étaient bien différentes de celles des autres, on commençait par cette différence à distinguer la foi pure & sincère des Apôtres, de la malignité artificieuse des faux Prophètes; cela ne doit pas surprendre, car Satan sait se transfigurer en Ange de lumière, & par conséquent ses ministres peuvent aussi se transfigurer en Ministres de justice & de vérité.
Nous apprenons donc ici de l'Apôtre que toutes les fois que les faux Apôtres, les faux Prophètes & les faux Docteurs se servent de passages empruntés de l'Ecriture sainte pour appuyer & pour donner du poids à leurs erreurs, ils imitent en cela le démon Prince & Chef de tous les Hérétiques car cet esprit de ténèbres & de malignité ne leur inspirerait pas un artifice si sacrilège s'il ne savait qu'il n'est pas de moyen plus propre & plus sûr pour séduire les âmes que de les tromper en cachant l'erreur, en l'enveloppant, pour ainsi dire, dans les expressions vénérables de la Parole céleste.
(pp. 303-305.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Moyen de connaître ceux qui abusent de la sainte Écriture.Le démon se sert de l’Écriture sainte pour tromper les âmes.
Si quelqu'un doutait de cette coutume du démon a abuser des Paroles saintes , il serait facile de le convaincre par le témoignage de saint Matthieu ; car voici ce que nous lisons dans l'Evangile (Matt. c.4.v.5-6) : Alors le démon le transporta ; c'est à dire, Notre Seigneur JESUS-CHRIST, & le mit sur le haut du Temple, & lui dit: si vous êtes le Fils de Dieu, jetez vous en bas; car il est écrit : il ordonnera à ses Anges d'avoir soin de vous, & ils vous soutiendront de leurs mains , de peur que vous ne vous heurtiez le pied contre quelque pierre.
Que n'ont pas à craindre des hommes faibles de celui qui ne respecte pas le Dieu de majesté, & qui se sert pour l'attaquer des saintes Ecritures ? Si vous êtes, dit-il , le Fils de Dieu jetez vous en bas. Pourquoi ? parce qui est écrit, ajoute cet esprit de ténèbres.
Il nous importe extrêmement de méditer & d'approfondir cet endroit de l'Evangile, afin qu'il nous serve de règle; toutes les fois que nous verrons quelqu'un employer l'autorité des Apôtres & des Prophètes pour dogmatiser contre la foi Catholique, ne doutons pas que le démon ne parle par la bouche de ces personnes; car comme le chef des méchants se servit de l'Écriture pour tenter le chef des Justes; les Hérétiques qui sont les disciples de ce premier chef se servent aussi du même artifice contre les Fidèles qui sont les membres de Jésus-Christ.
Mais quel est le langage de ces Hérétiques séducteurs ? le voici : Si vous êtes le Fils de Dieu jetez-vous en bas; c'est à dire , si vous voulez être enfant de Dieu & avoir part à l'héritage céleste, abandonnez la doctrine & la tradition de l'Eglise qui est le Temple de Dieu: jetez-vous du haut de la pureté de la Foy qui élève l'homme jusqu'à Dieu, dans l'abîme de l'erreur qui le précipite dans le sein des démons. Que si dans cette situation vous demandiez à un de ces Hérétiques; mais pourquoi voulez-vous que j'abandonne la doctrine de l'Eglise Catholique, par où me prouvez-vous que je dois le faire? il vous répondrait aussitôt : Car il est écrit & continuant son discours artificieux il entasserait je ne sais combien d'autorités & de passages tirés de la Loi , des Psaumes, des Prophètes, des Apôtres ; il donnerait à tous ces passages des sens & des interprétations favorables à l'erreur, & propres à faire tomber les âmes imprudentes du rempart de la Foy saine & Catholique dans le gouffre du Schisme & de l'hérésie.
L'attention avec laquelle ils travaillent à faire tomber les âmes dans le piège par de magnifiques promesses, n'est pas moins surprenante; ils ont la hardiesse d'assurer que dans leurs Eglises, c'est à dire, dans la petite assemblée des personnes de leur communion, on reçoit une grâce grande, singulière & personnelle; de sorte que sans aucun travail , sans aucun effort, sans aucune attention, sans demander, sans chercher , sans frapper à la porte, dès que l'on entre dans cette société , la protection de Dieu est si certaine & si appliquée, qu'elle met l'homme sous la garde des Anges, & que ces Esprits bienheureux ne manquent pas de veiller pour qu'il ne se heurte pas le pied contre la pierre, & ne fasse jamais aucune chute.
(pp. 305-308.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : Manière utile de servir d’autorité des Pères.Moyen de connaître ceux qui abusent de la sainte Écriture.
Ici on fait cette objection; mais s'il est vrai que le démon & que les Hérétiques qui sont ses disciples, dont les uns sont de faux Apôtres, les autres de faux Prophètes & de faux Docteurs : que peuvent faire alors les Catholiques, les enfants soumis de la sainte Eglise ? comment pourront-ils distinguer ceux qui se servent mal de l’Ecriture, & ceux qui la font servir à éclaircir la vérité ? Ils n'ont qu'à faire ce que je leur ai conseillé au commencement de ce traité; c'est à dire, qu'ils n'ont qu'à imiter les saints Pères qui nous ont précédés, qu'à expliquer comme eux l'Ecriture sainte par la tradition universellement reçue, & par les règles de la Foy généralement admises dans tous les temps.
Il est essentiel de suivre dans l'Eglise Catholique le sentiment universel, le consentement unanime & ancien; & de préférer ce consentement sain & unanime au sentiment corrompu d'une partie.
C'est une loi indispensable, toutes les fois qu'un petit nombre se déclare contre la multitude, que la nouveauté s'élève contre le sentiment ancien , & qu'une poignée d'hommes égarés se fait un système contraire aux décrets de la foy Catholique; c'est alors que ce qui est ancien doit l'emporter sur ce qui est profane , parce qu'il est nouveau; que dans ce qui est ancien on doit faire céder les opinions d'un petit nombre à celles du corps entier, & rien ne doit être d'un si grand poids que les Conciles généraux.
Que si après toutes ces précautions il reste de l’obscurité, la ressource certaine est de se ranger du côté de ceux dont le nombre est plus grand, & dont les sentiments paraissent plus probables. Si nous sommes fidèles à observer avec attention, avec prudence, & avec exactitude toutes ces règles, Dieu viendra à notre secours, & nous démêlerons sans peine la vérité salutaire de l'erreur pernicieuse.
(pp. 308-309.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre : En quelle considération doit être l’autorité des Saints Pères.Manière utile de servir d’autorité des Pères.
C'est ici le lieu où il est à propos que j'explique de quelle manière on doits se servir de l'autorité & du témoignage des anciens Pères, en les réunissant pour en former un tout qui serve à faire découvrir , & à faire condamner l'erreur.
Au reste ce n'est pas pour les difficultés légères qu'il faut avoir recours à cette règle; c'est pour les difficultés importantes qui regardent la Foy ; & alors il faut l'observer exactement.
D'ailleurs cette méthode regarde non les anciennes, mais les nouvelles Hérésies, c'est à dire que lorsqu'elles commencent à paraître & à corrompre le dogme de la Foy Catholique, dans ce commencement il faut presser l'Hérésie avec vivacité, & ne lui pas donner le loisir de corrompre les ouvrages des Pères, en s efforçant de répandre son venin mortel sur leur doctrine. La manière de combattre les anciennes Hérésies, est différente de celle-là ; parce que les sectateurs du party ont déjà eu tout le temps de donner des sens détournés aux expressions des Pères qui ont expliqué la vérité.
Il faut donc en combattant contre ces anciennes erreurs, contre ces Schismes qui ont duré longtemps, employer pour toutes armes l'autorité de l'Écriture, & quand les Conciles ont parlé, il faut s'en tenir à leurs Décisions, & n'avoir jamais sans nécessité aucune société avec ceux qui ne s'y soumettent pas.
Du moment donc que l'on s'aperçoit qu'une nouvelle erreur commence à se répandre, & que ceux qui en sont Auteurs, s'efforcent de la soutenir par des autorités prises de l'Ecriture sainte ; alors pour éclaircir & fixer le sens du Texte sacré, il faut consulter les anciens Pères, & rassembler les interprétations pour en former une lumière de doctrine qui fasse découvrir le venin de l’erreur, & qui en donne de l'aversion en la faisant connaître. Pour marcher sans danger dans cet examen, il faut parmi les Pères choisir ceux qui ont vécu dans la communion Catholique, dont les mœurs & la doctrine ont été irréprochables, & qui sont morts avec une foy pure en JESUS-CHRIST, ou qui ont donné par le martyre leur vie pour JESUS-CHRIST.
Il ne faut d'ailleurs s'en tenir à leurs décisions, que quand tous ou plusieurs sont d'un même sentiment, que quand ils se sont expliqués clairement, sans variation & jusqu'à la fin, en sorte que ce consentement unanime forme cornme une espèce de Concile ; dans ces circonstances ce que les Pères ont décidé est la règle certaine de la Foy, & il n'est jamais permis de s'en écarter: de là il est facile de conclure que tout ce qu'un Evêque seul, un Confesseur, un Martyr a avancé contre le sentiment commun & généralement reçu, tout cela doit être regardé comme une opinion singulière , & ne doit point être confondu avec la doctrine publique & universelle de l'Eglise. Agir contre cette maxime c'est tomber dans l'impiété sacrilège des Hérétiques & des Schismatiques, en abandonnant la vérité de la Foy ancienne, pour s'attacher aux erreurs naissantes d'un seul homme qui sort du droit sentier.
(pp. 309-312.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
En quelle considération doit être l’autorité des Saints Pères.
Ne croyez pas que l’on puisse, sans commettre un grand crime, mépriser cette autorité du consentement unanime des Saints Pères. Car saint Paul nous instruit là-dessus; en nous disant (1 Cor. c. 12.v.28): Dieu a établi dans son Eglise premièrement des Apôtres ; & il était lui-même du nombre.
Secondement des Prophètes : tel était Agabus dont il est parlé dans les Actes des Apôtres.
Troisièmement des Docteurs; c'est ce que nous appelons maintenant les Prédicateurs, à qui saint Paul donne aussi quelquefois le nom de Prophètes; parce qu'ils expliquent dans leurs discours les Mystères annoncés autrefois par les Prophètes.
Or quiconque méprise ces Ministres légitimes, établis pour être les dispensateurs de sa parole, & qui conservent dans sa pureté le dogme d'une même foy, quoi que répandus en différents lieux: celui-là méprise non des hommes, mais Dieu même.
Dans la crainte que nous ne tombions dans ce malheur, saint Paul nous exhorte d'une manière plus prenante encore quand il dit : Or je vous conjure, mes Frères, par le nom de Jésus Christ Notre Seigneur, d'avoir tous un même langage, & de ne point souffrir parmi vous de division, ni de schisme; mais d'être tous unis ensemble dans un même esprit & dans un même sentiment (1 Cor. c.1. v.10)
Si quelqu'un ose s'écarter de cette règle, il sera condamné, ajoute ce grand Apôtre : Car Dieu est le Dieu de paix , & non de confusion (ibid. c. 14 v. 33); c'est à dire qu'il est le Dieu de ceux qui par l'amour de la paix demeurent dans la soumission à la foi, & non de ceux qui rompent par leur révolte le lien de la paix.
C'est ce que j'enseigne dans toutes les Eglises des Saints. Cela doit s'entendre des Eglises Catholiques; elles sont les Eglises des Saints, parce qu'elles demeurent fermes dans l'unité de la Foi.
Comme il pouvait y avoir quelque danger, qu'il ne se trouvât des personnes assez présomptueuses pour croire mériter d'être écoutées seules préférablement à tous les autres, Saint Paul dit peu de versets après : Est-ce de vous que la parole de Dieu est premièrement sortie ? ou n'est-elle venue qu'à vous seuls ?
Afin qu'on sentit mieux qu'il parlait avec réflexion, & que ce qu'il disait était important, il continue: Si quelqu'un croit être parfait ou spirituel parmi vous y qu'il reconnaisse que les choses que je vous écris sont des ordonnances du Seigneur. Quelles sont donc ces ordonnances; si ce n'est que tout Prophète, tout homme spirituel & maître dans les choses spirituelles, doit se conserver avec un soin extrême dans l'égalité & dans l'unité ; doit préférer le sentiment universel au sien particulier, & ne jamais s'écarter des anciennes règles de la Foy ? Si quelqu'un veut l'ignorer, il sera ignoré.
Celui qui n'est pas appliqué à s'instruire de ce qu'il ignore, ou qui méprise ce qu'il a appris, sera lui-même ignoré; il se rendra indigne d'être traité de Dieu comme ceux qui humbles & égaux dans leur procédé, se sont maintenus dans l'union de la Foi. Et je ne sais s'il y a & s'il peut y avoir un malheur plus grand que celui-là. Cette menace de l'Apôtre a des suites terribles. Nous le voyons dans l'exemple de Julien, ce disciple coupable de Pélage; bien loin de demeurer uni avec ses collègues, il a voulu par une présomption insensée faire un party séparé.
Mais il est temps de mettre ici le modèle que j'ai déjà promis ; c'est à dire un Recueil de passages des Saints Pères, qui serve de preuve de la conformité de leurs sentiments sur la Foy. Ce Recueil autorisé par le Décret d'un Concile général, pourrait servir de règle de foi dans les matières de Religion. Voilà ce que je réserve pour un second Traité : je ne m'étendrai pas davantage sur celui-ci.FIN de cette référence de l’année 1700.
(pp. 312-316.)
A suivre : Passages des Saints Pères selon Œuvres de S. Vincent de Lérins et de S. Eucher de Lyon, par J.F. Grégoire et J. (B.) Collombet , Lyon, Paris 18(5)4, pp. 171-189.
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Louis- Admin
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre.Passages des Saints Pères selon Œuvres de S. Vincent de Lérins et de S. Eucher de Lyon, par J.F. Grégoire et J. (B.) Collombet , Lyon, Paris 18(5)4, pp. 171-189.
Mais il est temps de faire voir, comme nous l'avons promis, en quel lieu et de quelle manière ont été réunis les divers passages des saints Pères, pour servir, d'après le décret et l'autorité du Conciles, de règle à la foi de l'Eglise. Pour l'exécuter plus commodément, terminons ici ce Commonitoire, afin de tirer d'un autre principe ce qui doit suivre.
XXIX. Les choses étant ainsi, il est à propos de récapituler, à la fin de ce second avertissement, ce qui a été dit en ces deux Commonitoires. Nous avons dit plus haut que ce fut toujours, que c'est encore aujourd'hui la coutume des catholiques , de reconnaître la vraie foi par ces deux manières : d'abord , par l'autorité des divines Ecritures, ensuite par la tradition de l'Eglise catholique ; non que l'Ecriture ne soit d'elle-même suffisante à toutes choses, mais parce que plusieurs interprétant à leur gré les paroles divines, pourraient engendrer différentes opinions, différentes erreurs, et qu'il est nécessaire conséquemment que l'intelligence des célestes Ecritures soit dirigée suivant la seule règle du sens ecclésiastique, surtout dans les questions qui servent de base à tout le dogme catholique.
Nous avons dit aussi que, en l'Eglise elle-même, il faut envisager le consentement de l'universalité et de l'antiquité tout à la fois ; de peur que nous ne soyons emportés, du sein de l'entière unité, à quelque partie de schisme , où précipités, du sein de l'antiquité religieuse, dans les nouveautés des hérésies.
Nous avons dit encore que, dans l'ancienneté même de l'Eglise, il faut soigneusement et attentivement observer deux choses, et s'y attacher du fond de l'âme, si l'on ne veut être hérétique. La première, c'est de suivre ce qui aurait été anciennement décidé par tous les Evêques de l'Eglise catholique, avec l'autorité d'un Concile universel; la seconde, c'est, dans le cas où surgirait une question nouvelle non encore définie, de recourir aux sentiments des saints Pères, mais de ceux-là seulement qui, en des lieux et en des temps divers, auraient persévéré dans l'unité de communion et de foi, et seraient devenus ainsi des docteurs recevables ; alors, tout ce qu'on verrait avoir été par eux enseigné d'un consentement unanime, l'on pourrait sans aucun scrupule le regarder comme la doctrine véritable et catholique de l'Eglise.
Mais, pour ne pas avoir l'air d'avancer tout cela plutôt d'après notre présomption que d'après l'autorité ecclésiastique, nous avons invoqué l'exemple du saint Concile qui fut célébré , il y a plus de trois ans, à Ephèse en Asie , sous le consulat des deux nobles personnages , Bassus et Antiochus.
Là, quand il fut question de poser les règles de la foi, pour empêcher qu'il ne se glissât quelque nouveauté profane, comme cela avait eu lieu dans le synode frauduleux de Rimini, tous les Evêques jugèrent que c'était chose très-catholique, très-utile à la foi et très-sage de rapporter les sentiments des saints Pères, qui auraient été, de l'aveu général, les uns Martyrs, les autres Confesseurs, mais tous des Docteurs constamment fidèles à la foi catholique; afin que, d’une manière usitée et solennelle, leur consentement et leurs décisions servissent à confirmer les dogmes antiques de l'Eglise, et à condamner les blasphèmes de la nouveauté profane.
Les choses s'étant ainsi passées , l'impie Nestorius fut, avec justice et à bon droit, déclaré contraire à l'ancienneté catholique , tandis que le bienheureux Cyrille fut reconnu pour le partisan de la sainte antiquité. Et, afin que rien ne manquât à la preuve des choses, nous avons publié les noms et précisé le nombre (pour l'ordre, il nous est échappé), de ces Pères, dont les sentiments unanimes et uniformes servirent alors à interpréter les paroles de la loi sainte, puis à établir la règle du dogme divin; dans le but de fortifier notre mémoire, je ne crois pas qu'il soit superflu de les rappeler ici.
(pp. 171-175.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre.XXX. Tels sont donc ces hommes dont les écrits furent lus dans ce Concile, ou comme un jugement, ou comme un témoignage. — St. Pierre, évêque d'Alexandrie, docteur éminent et martyr bienheureux. — St. Athanase, pontife de la même cité, maître si fidèle, confesseur si éminent. — St. Théophile, évêque de la même ville, assez renommé pour sa foi, pour ses vertus, sa science, et auquel a succédé le vénérable Cyrille, qui fait aujourd'hui l'ornement de l'Eglise d'Alexandrie. Et, de peur qu'on ne regardât peut-être cette doctrine, comme celle d'une seule cité, d'une seule province, on y ajouta même ces grandes lumières de Cappadoce : — St. Grégoire, évêque de Nazianze, et confesseur. — St. Basile, évêque de Césarée en Cappadoce, et Confesseur. — Et cet autre St. Grégoire, évêque de Nysse, très-digne frère de Basile, par le mérite de sa foi, de sa vie, de son intégrité et de sa sagesse. Or, afin de prouver que non-seulement la Grèce ou l'Orient, mais le monde occidental et latin avait toujours ainsi pensé, on lut encore là quelques lettres de St. Félix martyr, et de St. Jule, tous deux évêques de la ville de Rome. Et, afin que, dans cette cause, les parties du monde rendissent aussi témoignage avec leur capitale, on cita, pour le midi, le bienheureux Cyprien, évêque de Carthage; pour le septentrion, St. Antoine, évêque de Milan.
Voilà donc tous les Docteurs qui, au nombre sacré de dix, furent produits à Ephèse, comme maîtres, comme conseillers, comme témoins et comme juges. Le bienheureux Synode, s'attachant à leur doctrine, adhérant à leur conseil, croyant à leur témoignage, obéissant à leur jugement, prononça sur les règles de la foi, sans contestation, sans présomption et sans partialité. On aurait pu, sans doute, en citer un bien plus grand nombre; mais cela n'était point nécessaire, parce qu'il ne fallait pas consacrer à entendre une multitude de témoins le temps que réclamait cette affaire, et qu'il était assez manifeste que ces dix Pontifes pensaient absolument comme tous leurs autres collègues.
(pp. 175-179.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre.XXXI. Après cela, nous avons encore ajouté la décision du bienheureux Cyrille, renfermée dans les actes du même Concile. Car, après la lecture d'une lettre de St. Capréole, évêque de Carthage, qui ne prétendait, qui ne demandait rien autre chose, sinon que l'on s'opposât à la nouveauté, que l'on défendît l'antiquité, l'évêque Cyrille parla et conclut de la sorte. Il ne semble pas hors de propos de rapporter ici ses paroles ; or, il dit à la fin des Actes :
Cette Lettre du vénérable et très-religieux Evêque de Carthage, Capréole, dont on vient de faire lecture, sera insérée dans les actes du Synode ; ses sentiments sont manifestes. Car il veut que l'on confirme les dogmes de l'antique foi, que l'on réprouve et que l'on condamne la doctrine nouvelle, comme superflue et criminellement répandue. Tous les Evêque s'écrièrent : C'est là notre langage à nous tous, c'est là ce que nous disons tous, ce sont là nos vœux à nous tous.
Et, que voulaient enfin ces clameurs générales, ces vœux universels, sinon que l'on gardât l'antique tradition, que l'on rejetât les inventions récentes? Alors nous avons admiré et nous avons loué l'humilité, la sainteté de ce Concile où se trouvèrent tant d'Evêques, métropolitains la plupart, d'un savoir si vaste, d'une érudition si profonde, que presque tous pouvaient décider en matière religieuse; quand même cette réunion paraissait leur donner la hardiesse d'oser et de statuer d'eux-mêmes tout ce qu'ils voulaient, ils n'innovèrent cependant en rien, ne se permirent, ne s'arrogèrent absolument rien, mais prirent bien garde de laisser à la postérité autre chose que ce qu'ils avaient reçu des anciens , attentifs surtout non-seulement à régler avec sagesse les difficultés présentes, mais encore à donner un exemple qui pût instruire la postérité à révérer aussi les dogmes de la sainte antiquité, et à condamner les inventions des nouveautés profanes.
Nous avons encore blâmé la criminelle présomption de Nestorius,
qui se vantait d'avoir seul et le premier entendu la sainte Ecriture ;
qui accusait d'ignorance à cet égard tous ses devanciers dans l'interprétation des paroles divines , c'est-à-dire tous les Evêques , tous les Confesseurs et les Martyrs, dont les uns avaient expliqué la loi de Dieu, dont les autres avaient approuvé et sanctionné ces explications précédentes ;
qui prétendait enfin que l'Eglise errait encore et avait toujours erré, pour avoir suivi et pour suivre encore, comme il lui semblait, des docteurs ignorants et égarés.
(pp. 179-181.)
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
A suivre.XXXII. Tout cela suffit abondamment, sans doute, à l'extinction totale des nouveautés profanes ; cependant, afin qu'il ne manquât rien à la plénitude des preuves, nous avons ajouté, en terminant, deux autorités du Siège apostolique, celle du saint Pape Xyste, qui fait aujourd'hui l'ornement de l'Église Romaine, et celle de son prédécesseur, le pape Célestin, de bienheureuse mémoire, que nous avons jugé nécessaire de rapporter ici.
Le saint pape Xyste disait donc, en une lettre qu'il adressa à l’Evêque d'Antioche, au sujet de Nestorius : Puisque, suivant l'Apôtre, il n'y a qu'une foi, croyons ce qu'elle a jugé digne d'être annoncé, et annonçons ce qu’elle a jugé digne d'être cru. Quelles sont donc ces choses dignes d'être crues et annoncées? Il poursuit, et dit : Qu'il ne soit rien permis à la nouveauté , parce qu'il ne faut rien ajouter à ancienne doctrine. La pure foi, la pure croyance des anciens ne doivent point être altérées par quelque mélange de corruption.
C'est bien parler en apôtre, que de désigner sous le nom de pureté la croyance des ancêtres, que de signaler comme un mélange de corruption les nouveautés profanes.
Le saint pape Célestin parle aussi dans le même sens et de la même manière; car, en une lettre adressée aux Evêques des Gaules, après les avoir blâmés de ce que, par une sorte de connivence, ils se taisaient sur l'antique foi, et laissaient ainsi s'élever des nouveautés profanes, il ajoute:
Nous sommes grandement responsables, si notre silence favorise l'erreur. Qu'on réprimande donc de semblables novateurs, et qu'il ne leur soit plus libre de parler à leur gré.
L'on demandera peut-être quels peuvent être les hommes à qui l'on doit ôter la liberté de parler d'après leurs caprices; sont-ce les prédicateurs de l'antiquité, ou les inventeurs des doctrines nouvelles?
Qu'il le dise, lui-même, qu'il dissipe lui-même les doutes du lecteur. Car il poursuit de la sorte :
Si la chose est ainsi, (c'est-à-dire, s`il est vrai, comme plusieurs me le disent au sujet de vos cités et de vos provinces, que, par une coupable dissimulation, vous les fassiez adhérer à quelques nouveautés); s'il en est ainsi, que la nouveauté cesse enfin d'assaillir l'antiquité.
La sainte opinion du bienheureux Célestin est donc, non pas que l'ancienne foi cesse d’écraser les doctrines nouvelles, mais plutôt, que les doctrines nouvelles cessent d'assaillir l'ancienne foi.
(pp. 181-185.)
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
XXXIII. Si quelqu'un s'oppose à ces décrets apostoliques et catholiques, il faut d'abord
qu'il insulte à la mémoire de saint Célestin, qui décide que les nouvelles doctrines doivent cesser d'assaillir l'antique foi; puis,
qu'il se rie des définitions du pape Xyste, qui prononce qu'il ne faut rien permettre à la nouveauté, parce que l'on ne doit rien ajouter à l'antiquité;
qu'il méprise les statuts du bienheureux Cyrille, qui combla d'éloges le zèle du vénérable Capréole, en ce qu'il souhaitait que l'on confirmât les dogmes de l'antique foi., que l'on condamnât les inventions nouvelles ; enfin ,
qu'il foule aux pieds le Synode d'Ephèse, c'est-à-dire, les arrêts des saints Evêques de presque tout l'Orient, qui, par une inspiration divine, jugèrent qu'il ne fallait transmettre à la postérité d'autre croyance que les doctrines saintes professées unanimement, dans le Christ, par les Pères anciens, qui, tout d'une voix, tout d'une acclamation, proclamèrent que leur commun langage, leur commune pensée, était de condamner Nestorius auteur de nouveautés, ennemi de l'antiquité, comme avaient été condamnés avant lui presque, tous les hérétiques, contempteurs de l'antique doctrine et sectateurs des opinions nouvelles. Or, quiconque trouve mauvaise cette conformité, si divinement inspirée par le don de la céleste grâce, que prétend-il autre chose, si ce n'est que les impiétés de Nestorius ont été injustement condamnées ?
Qu'il méprise donc aussi, comme choses viles,
l'Eglise universelle du Christ, les Apôtres et les Prophètes ses docteurs, et principalement le bienheureux apôtre Paul;
l'Eglise, parce qu'elle n'a jamais cessé de garder le culte et l'observance de la foi qui lui a été donnée ;
l'Apôtre , parce qu'il a écrit ces mots : 0 Timothée, gardez le dépôt qui vous a été confié, évitant les profanes nouveautés de paroles. Et encore: Si quelqu'un vous annonce autre chose que ce que vous avez reçu, qu'il soit anathème.
S'il ne faut attenter ni aux définitions apostoliques, ni aux décrets de l'Eglise, par lesquels, suivant le saint accord de l'universalité et de l'antiquité, les hérétiques de tout âge, et récemment encore Pélage, Céleste, Nestorius ont été justement condamnés,
il faut bien désormais que tous les catholiques, qui sont jaloux de se montrer enfants légitimes de leur mère l'Eglise, s'attachent à la sainte foi des saints Pères, y persévèrent et y meurent; qu'ils détestent, au contraire, qu'ils aient en horreur, qu'ils combattent, qu'ils poursuivent les nouveautés profanes des profanes hérétiques.
Telles sont à-peu-près les choses que j'ai traitées plus au long dans ces deux Commonitoires, et que je viens de récapituler sommairement ; ma mémoire, pour l'appui de laquelle j'ai entrepris ce travail, se trouvera sans cesse rafraîchie par une lecture assidue, et ne sera jamais accablée par une longueur fastidieuse.
(pp. 185-189.)
A suivre : Table des Matières.
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Re: Saint Vincent de Lérins (complet)
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TABLE des MATIÈRES
Le Commonitoire de S. Vincent de Lérins
Ce qui a porté l’Auteur à écrire ce Traité.
Dessin de ce Traité.
Moyen de démêler la vérité de l’erreur.
Nécessité de joindre la Tradition à l’Écriture sainte.
Il faut se séparer des Hérétiques et demeurer attaché à l’Eglise.
Exemples qui servent de règle.
Maux que l’Arianisme a causé.
Peinture que saint Ambroise a fait de l’Arianisme.
Les Confesseurs ne se sont attachés qu’à ce qui était universellement reçu.
Exemple qui prouve la justice du zèle contre la nouveauté.
Evénement du Concile d’Afrique tenu par les Donatistes.
Combien on doit craindre d’être auteur d’hérésie.
Zèle de S. Paul contre les nouveautés.
Il n’est jamais permis d’innover dans les choses de Foi.
Pourquoi Dieu permet que de grands hommes tombent quelques fois dans la nouveauté.
Exemples qui éclaircissent le précepte de Moïse (Nestorius).
Exemple de Photin.
Exemple d’Apollinaire.
Abrégé de la doctrine de Nestorius, de Photin & d’Apollinaire.
Abrégé de la doctrine de Nestorius.
Abrégé de la doctrine de Nestorius, de Photin & d’Apollinaire. (conclusion)
Exposition de la Foi de l’Église.
C’est que Persona en latin signifie la personne, & en même temps un personnage de théâtre.
Répétition abrégée des Hérésies.
Il faut bien faire comprendre au Peuple qu’il est dangereux d’écouter les Novateurs.
La chute d’Origène.
La chute d’Origène. (suite)
La chute d’Origène. (fin)
Portrait de Tertullien.
Chute de Tertullien.
Règle de précaution pour les Catholiques.
Portrait d’un homme que la nouveauté a séduit.
Portrait d’un homme que la nouveauté a séduit. (suite)
Discours artificieux des Novateurs.
Discours artificieux des Novateurs. (suite)
Quels progrès peut faire la Religion.
Devoirs des Fidèles par rapport au bon grain. Du Dogme de la Foi.
Esprit de l’Église dans les Conciles.
Suite de l’explication du passage de S. Paul
Exemples de plusieurs Hérésiarques, pour montrer que l'hérésie mène au Schisme.
La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte.
La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte. (suite)
La manière dont les Hérétiques se servent de l’Écriture sainte. (fin)
Le Démon se sert de l’Écriture sainte pour tromper les âmes.
Moyen de connaître ceux qui abusent de la sainte Écriture.
Manière utile de servir d’autorité des Pères.
En quelle considération doit être l’autorité des Saints Pères.
Les passages des Saints Pères.
Dernière édition par Louis le Sam 13 Mai 2017, 9:38 am, édité 5 fois (Raison : Correction de sous-titre et formatage.)
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