La règle de la Foi
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Re: La règle de la Foi
Chapitre deuxième
Nécessité du Magistère vivant.
12. Dans l’ordre présent de providence surnaturelle, il était nécessaire pour la fin que Jésus-Christ se proposait, qu’il instituât un Magistère vivant.
Note préliminaire. Il est aisé de comprendre a priori combien il convenait que fût institué dans l’Église un Magistère vivant. L’homme est naturellement fait pour vivre en société là seulement il atteint son vrai développement, ce qui se fait surtout par l’enseignement. « L’homme, a très bien dit Lacordaire, est un être enseigné » ; il ne se forme, ni ne progresse qu’en acceptant des maîtres. Or, Dieu, qui est l’auteur de la grâce comme de la nature, accommode son action surnaturelle aux inclinations et aux exigences qu’il a mises lui-même dans la nature. Il convenait donc, et qu’il groupât les fidèles en une société surnaturelle, et qu’il y instituât des maîtres pour instruire les fidèles dans la doctrine du salut.
Pour éviter toutefois le reproche que nous font volontiers les protestants, de traiter la question a priori et par les seules raisons de convenance, nous n’insistons pas sur ces raisons. Nous fondons notre argumentation sur les documents positifs de la révélation ; nous demandons au Christ lui-même, et à ses Apôtres, quelle fin il s’est proposée ; et, parce qu’il doit y avoir proportion entre la fin et les moyens, nous concluons que ce moyen nécessaire est le Magistère vivant.
Preuve. Le Christ a voulu que tous les hommes pussent connaître toute sa doctrine et se réunissent dans la profession d’une même foi. Nous l’avons prouvé ci-dessus (n. 5) [/size]et aussi dans le traité de L’Église 4 (n. 15). Or, il est impossible, sans l’institution du Magistère vivant, que cette volonté du Christ se réalise ; donc le Magistère est nécessaire. Nous montrerons que le Magistère est un moyen très apte à la fin voulue, et que nul autre proposé ne le remplace.
a) En effet, un Magistère vivant institué et assisté par Dieu est un moyen très apte à conserver la doctrine révélée : il fournit à tous un moyen sûr, efficace, facile de savoir ce qu’ils doivent croire ; il procure évidemment aussi une parfaite unité de foi entre les fidèles.
b) Au contraire, ôtez ce Magistère : 1. La doctrine révélée ne peut plus se conserver sans altération. Notez en effet qu’il s’agit d’une doctrine sublime, mystérieuse, contraire à l’orgueil de l’esprit et aux passions de la chair. Que de causes d’altération ! – 2. Il n’y a plus aucune règle sûre, facile pour guider notre foi. L’étude historique de la révélation ? Qui ne sait quels longs et pénibles travaux elle exige, et encore pour n’arriver, surtout en ces questions religieuses, qu’à des probabilités ? De plus, les enfants, les simples, les sauvages devront-ils se livrer à ces études ? ils en sont incapables ; et cependant eux aussi sont appelés à se sauver ; c’est même à eux de préférence que le Christ prêchait son Évangile : « Pauperes evangelizantur » (Luc VII, 22). Comment, sans maîtres qui les enseignent, seront-ils évangélisés ? – 3. Enfin, l’unité de foi périt fatalement, car le principe du libre examen est par nature un ferment de désordre et de désunion.
Note. Nous avons dit précisément : dans l’ordre présent de providence surnaturelle. Dieu sans doute peut absolument sans le Magistère vivant procurer la conservation intégrale de la vérité révélée et l’unité de foi ; par exemple au moyen de miracles multipliés. Mais nous constatons que ce n’est point là sa manière d’agir avec nous.
Objection. Nous ne pouvons admettre, répliquent les protestants, votre argumentation ni vos conclusions, En effet, nous revendiquons nous aussi un Magistère, les Écritures. Il a plu à Dieu de faire consigner sa parole en des livres inspirés ; ces écrits demeurent et peuvent être lus ou écoutés par tous. C’est assez ; pourquoi un autre Magistère : des maîtres vivants, qui feraient double emploi ? Quant au droit privé de libre examen, il n’est pas illimité ; il est contrôlé par l’autorité des divines Écritures, bien public de tous les chrétiens. – Tel est, en effet, le fond du débat que nous ayons à résoudre.
13. L’existence de livres sacrés, loin de supprimer la nécessité du Magistère vivant authentique, la renforce encore. – L’objection protestante, disons-nous, loin de détruire notre doctrine, devient un nouvel argument en sa faveur. Soient donc les trois preuves suivantes tirées de l’origine historique des livres saints, de leur caractère interne, enfin de l’expérience même tentée par le protestantisme.
Première preuve
Dernière édition par gabrielle le Mar 27 Aoû 2024, 12:18 pm, édité 1 fois (Raison : Insertion du lien (n.5))
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Première preuve. L’origine historique des livres sacrés montre à l’évidence que leurs auteurs n’ont pas voulu par ces livres remplacer le Magistère vivant, mais lui venir en aide. C’est un fait que le Christ n’a rien écrit, ni ordonné d’écrire ; que la plupart des Apôtres ni de leurs disciples immédiats n’ont rien écrit non plus. Chose vraiment étrange si l’Écriture devait être la règle nécessaire de la foi ! De plus, presque tous les livres sacrés du Nouveau Testament sont des écrits nés de circonstances fortuites, selon des occasions accidentelles, et non le fruit d’un système concerté. Ainsi Paul écrit pour réprimer un scandale, apaiser des querelles, répondre à des doutes, s’opposer aux agissements des judaïsants ; sans les désordres des agapes à Corinthe, il ne nous eût pas laissé par écrit le récit de la Cène. Remarquons qu’aucun de ces Livres n’est un traité didactique complet, un exposé méthodique de la doctrine chrétienne, tels que nos manuels ou nos catéchismes. Fait vraiment étrange, dirons-nous encore, s’il s’agissait de nous laisser une règle nécessaire de la foi ! Beaucoup des principaux dogmes sont énoncés en passant, dans une salutation, par allusion, ou par manière d’exhortation. Si Paul est amené à rappeler magnifiquement l’Incarnation et la Rédemption, c’est pour engager les Philippiens à l’humilité (Phil. II, 3-12). Au reste, ces livres sont souvent destinés par leurs auteurs, non à l’Église universelle, mais à des Églises particulières ; et les lecteurs sont manifestement supposés avoir été depuis longtemps déjà instruits de la religion par un enseignement oral, la Catéchèse ; l’écrivain sacré se contente de rappeler ce qui a pu être oublié, de compléter ou d’expliquer ce qui a déjà été dit.
Deuxième preuve
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Deuxième preuve. Le caractère interne des livres saints nous amène à la même conclusion.
L’Écriture, en effet, ne se suffit pas ; de plus, elle est souvent difficile à comprendre. Elle a donc besoin d’un témoin et d’un interprète. Il faut encore dans les controverses à son sujet un juge qui tranche le débat. Or, seul, un Maître authentique vivant peut remplir ce triple rôle, Prouvons ces affirmations.
A. L’Écriture ne se suffit pas ; il lui faut un témoin, un interprète, un juge.
1° Il lui faut un témoin. La règle de la foi, dit le protestant, ce sont les livres inspirés. Fort bien mais quels sont les livres inspirés ? qui me le dira sûrement ? qui m’en donnera la liste ? Admettons que quelques-uns de ces livres : les écrits des prophètes par exemple, l’Apocalypse, s’attestent eux-mêmes suffisamment comme livres sacrés ; tel n’est certainement pas le cas de tous. Ainsi les Évangiles sont-ils inspirés ? L’Écriture laisse la question sans réponse. De plus, qui certifiera aux fidèles la conservation du texte original, l’exactitude des versions dont ils sont bien obligés généralement de se contenter ?
2° Il lui faut un interprète.
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
2° Il lui faut un interprète. L’Écriture, en effet, présente de nombreuses obscurités. Qui s’en étonnerait ? C’est : a) un livre religieux qui renferme de profonds mystères. Saint Pierre ne disait-il pas des lettres de saint Paul « qu’il s’y rencontre des passages difficiles à entendue, et que des personnes ignorantes et mal affermies détournent, comme elles font les autres Écritures, pour leur perdition » (II Pet. III, 16) ? ;
b) un livre souvent poétique qui use d’images très vives et d’un langage difficile à saisir. Qu’on songe par exemple aux difficultés du style prophétique et apocalyptique 10 ;
c) un livre oriental écrit il y a près de vingt siècles, et bien davantage pour l’Ancien Testament, par des hommes dont les habitudes d’esprit, les mœurs, la vie différaient profondément des nôtres.
Nous avons donc besoin, comme l’Éthiopien, ministre de la Candace d’un interprète pour entendre le livre sacré : « Philippe, entendant l’Éthiopien lire le prophète Isaïe, lui dit : Comprends-tu ce que tu lis ? Celui-ci répondit : Comment le pourrais-je, si quelqu’un ne me guide ? » (Act. VIII, 30-31).
3° Il faut un juge des controverses. Pour deux raisons : l’une, générale tout livre, parce qu’il est une parole morte, figée, est matière inépuisable de discussions. La remarque de J. de Maistre : Sans une autorité qui les interprète, les livres ne servent qu’à alimenter la controverse, est profondément vraie. Un livre ne s’explique pas lui-même, c’est en vérité « un code sans tribunal » (Moehler). L’autre raison, particulière, tient au caractère religieux de la Bible : qui ne sait qu’en ces matières surtout, les passions, promptes à s’éveiller, obscurcissent la lucidité de l’intelligence et font perdre à la volonté son équilibre ?
10 Voir le traité des Fins dernières, pp. 75-77 et 80-81.
B. Seul un Maître authentique, vivant, peut remplir ce triple rôle.
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
B. Seul un Maître authentique, vivant, peut remplir ce triple rôle. Puisque l’Écriture ne se suffit pas, elle appelle nécessairement un maître vivant qui puisse en donner le sens. Or ce sera ou bien un homme recommandé par sa science, ou bien l’Esprit-Saint instruisant l’âme fidèle, ou enfin le Magistère authentique de l’Église. On ne saurait imaginer d’autres hypothèses, et seule la dernière est valable.
1° En effet, un Maître ou des Maîtres humains, versés dans la science des Écritures, sont un secours précieux, souhaitable. Mais, quelle que soit leur science, ils sont seulement des hommes, ils sont donc sans autorité pour exiger l’obéissance intellectuelle, la foi. Hommes, ils peuvent se tromper. On connaît d’ailleurs les divergences des savants : comment finiraient-ils les controverses ? ils en feraient naître plutôt.
2° Ce maître n’est pas non plus le Saint-Esprit Nions-nous donc que la lumière de l’Esprit de Dieu éclaire l’esprit du fidèle ? Bien au contraire, nous l’affirmons, mais en un sens très différent des protestants. Nous disons que la lumière dont l’Esprit-Saint illumine l’âme n’est pas une révélation ; elle ne lui propose pas l’objet à croire, elle ne lui met pas sous les yeux la vérité à professer. C’est un secours intérieur, grâce auquel nous croyons la vérité révélée, quand du dehors elle a été suffisamment proposée. Ainsi l’aptitude d’un esprit pour les sciences mathématiques ne lui révèle pas les théorèmes de la géométrie, mais fait que, ces théorèmes lui étant proposés, il les saisit aisément. « Deux éléments, dit saint Thomas, sont requis pour la foi : le premier est une inclination de notre coeur à croire, c’est là un don de la grâce ; l’autre est la proposition déterminée de la vérité à croire, cela vient de la prédication entendue » (Comment. in Ep. ad Rom.).
Selon les protestants, le témoignage intérieur de l’Esprit-Saint
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Selon les protestants, le témoignage intérieur de l’Esprit-Saint est une révélation ou équivaut à une révélation, car c’est le Saint-Esprit qui expose intérieurement au lecteur de la Bible le sens de ce qu’il lit ; c’est lui qui, à l’occasion de cette lecture, présente à notre esprit l’objet qu’il doit croire, lui atteste la vérité qu’il doit recevoir.
Cette théorie protestante contredit la Bible elle-même, d’après laquelle la foi est bien une grâce mise dans l’âme, mais naît aussi de la prédication : « Fides ex auditu » (Rom. X, 17). C’est Dieu qui nous donne d’assentir, mais la vérité à laquelle nous donnons notre assentiment nous est proposée par la prédication : « Le Seigneur ouvrit le coeur de Lydie pour qu’elle fût attentive à ce que disait Paul » (Act. XVI, 14). Même quand Dieu intervient miraculeusement pour amener l’homme à la foi : le ministre d’Éthiopie (Act. VIII, 26-40), Saul de Tarse (ib. IX, 6), le centurion Corneille (ib. x, 5, 33), il les envoie ensuite aux Maîtres vivants de son Église. Cette théorie suppose faussement aussi que nous ayons conscience des motions divines, en tant que telles ; l’action ordinaire de la grâce n’est pas directement saisissable par la conscience. Si donc, en lisant l’Écriture, je me sens incliné à préférer tel sens d’un passage difficile : ou bien j’attribue obstinément cette inclination à l’action de Dieu, et c’est une illusion, puisque d’autres sont inclinés à un sens contraire ; ou bien je n’oserais prétendre que ma préférence vient sûrement de Dieu, alors de quel droit m’y fier ? Et de même « le goût intérieur, que, selon Calvin, les âmes pieuses sentent en lisant un livre inspiré, » ne peut pas décider si vraiment le livre est de Dieu. N’est-il pas évident, en effet, que l’âme éprouvera plus sûrement ce goût intérieur à la lecture de l’Imitation, qui n’est pas inspirée, qu’à celle du Lévitique ou des Nombres, qui sont cependant l’œuvre du Saint-Esprit ? N’est-ce pas un fait encore que des contresens bibliques ont paru remplis de « saveur » à des âmes fort spirituelles et mystiques ? L’expérience enfin convainc de fausseté la théorie, lorsqu’on voit par exemple des esprits aussi doctes que saints : un Jérôme, un Augustin, hésiter ou même différer profondément sur le sens de certains passages. On voit aussi combien aisément la théorie protestante ouvre la voie à l’illuminisme et au fanatisme.
Troisième preuve. L’histoire du protestantisme confirme notre thèse. C’est un fait constant que, dès les débuts de la prétendue Réforme, les protestants se sont dispersés en une foule de sectes, et que de nos jours un trop grand nombre incline au rationalisme. Divisions, incroyance sont les suites logiques et fatales du principe de libre examen. Pour beaucoup d’entre eux la vérité absolue n’existe pas en religion ; ils se rejettent dans le sentimentalisme religieux.
Conclusion. Il apparaît donc avec évidence que seul le Magistère vivant et authentique de l’Église nous peut assurer ces trois biens : et la possession de l’Écriture, et la vraie doctrine touchant l’Écriture, et la pleine vérité contenue dans l’Écriture.
Chapitre troisième
Infaillibilité du Magistère vivant.
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Chapitre troisième
Infaillibilité du Magistère vivant 11
14. Ce qu’est l’infaillibilité – C’est la prérogative de ne point errer et de ne pouvoir errer. Dieu seul est infaillible par essence, mais il ne peut communiquer par grâce cette prérogative à l’homme. La raison humaine, il est vrai, ne se trompe pas devant la vérité évidente ; toutefois on ne peut la dire infaillible, car de soi elle reste toujours exposée à l’erreur. Il va sans dire, bien que nos adversaires affectent parfois de s’y tromper, que l’infaillibilité n’est pas l’impeccabilité, qui consiste à être incapable de pécher.
Nous établirons que Dieu a donné à son Église le privilège de l’infaillibilité, et de deux façons : d’abord une infaillibilité active, qui réside dans les Maîtres vivants et qui consiste à enseigner sans possibilité d’erreur la doctrine de la foi ; puis l’infaillibilité passive, qui réside dans les fidèles et qui consiste à croire sans erreur la doctrine qui leur est enseignée. La première est cause efficiente de la seconde et lui est ordonnée comme à sa cause finale : c’est pour le bien des fidèles que le Magistère a reçu la prérogative de l’infaillibilité.
15. — A. Infaillibilité active Le Christ a donné au Magistère vivant la prérogative de l’infaillibilité. Doctrine catholique. Pour conserver pure la doctrine de la foi, l’Église reçoit de Dieu un secours surnaturel appelé assistance qui la préserve de tout danger d’erreur. Cette assistance diffère de la révélation : elle n’apprend pas à l’Église des vérités nouvelles, car la révélation officielle est close à la mort des Apôtres. Elle diffère aussi de l’inspiration : les symboles de foi, les constitutions et définitions des Conciles, les Actes du Magistère ne sont pas inspirés, ils n’ont pas Dieu pour auteur, ils ne sont pas formellement, comme l’Écriture, la parole de Dieu 12. Qu’est donc l’assistance ? C’est une providence divine par laquelle, selon la promesse du Christ, l’Esprit-Saint « guide l’Église dans toute la vérité » (Jo. XVI, 13), et l’empêche d’errer. Cette protection de la Providence consiste en une influence, soit indirecte par l’action des causes secondes, soit directe par des lumières et des motions intérieures données aux Maîtres et aux fidèles. Loin de remplacer l’activité humaine, elle l’exige : le Pape et les Évêques doivent chercher avec soin la vérité révélée, s’aider des travaux des théologiens et des exégètes ; quoique la valeur de la définition dogmatique ne dépende pas de la valeur de la recherche.
11 Cette question a déjà été touchée dans le traité de L’Église, (nn. 78, 90, 93). Elle est étudiée ici plus
complètement.
12 Voir La Règle de la Foi, II. L’Écriture,
Adversaires. D’abord les Protestants
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Adversaires. D’abord les Protestants les protestants orthodoxes admettent bien que l’Église du Christ est infaillible, mais il s’agit pour eux de l’Église invisible, formée des seuls justes. Cette infaillibilité est donc insaisissable et, en pratique, ne sert de rien. Les protestants libéraux nient absolument l’infaillibilité. Les Anglicans, certains Gallicans, les Régaliens et les Jansénistes font reposer l’infaillibilité uniquement dans le peuple chrétien. C’est lui seul qui, en adhérant à une vérité proposée par le Magistère, la rend certaine et définitive. Déjà les Montanistes attribuaient l’infaillibilité à une élite dans l’Église, aux « Spirituels », à « l’Église-Esprit disait Tertullien devenu hérétique non à l’Église-majorité des Évêques » (De pudic., 21). Après le Concile du Vatican, Doellinger, chef des Vieux-Catholiques, déclara que le jugement suprême sur la vérité révélée appartient, non aux évêques, mais aux théologiens. Les Modernistes font un mélange de toutes ces erreurs. Le Magistère, disent-ils, n’a point à enseigner la foi avec autorité ; son rôle est de traduire et d’exprimer la foi du peuple chrétien. S’il est infaillible, c’est uniquement comme écho de l’Église universelle ; et encore celte infaillibilité de l’Église n’est-elle pas absolue, mais seulement relative aux diverses époques et pratique, c’est-à-dire commandant l’attitude de notre esprit et de notre volonté. Entre les chrétiens il faut écouter les plus savants et les plus pieux, qui représentent le mieux la foi de l’Église de l’avenir, de l’Église en perpétuelle évolution.
Note de la proposition. Elle est de foi. Le Concile du Vatican déclare, en effet, que le Pontife Romain possède « cette même infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu doter son Église pour définir la doctrine de la foi et des moeurs » (Const. De Eccl. ch. IV. T. 330).
Preuves. L’Écriture.
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Un trouble avec mon fichier... je reviens dès que je peux
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
Preuves. L’Écriture. Tous les textes qui prouvent l’existence du Magistère (nn. 7-10) prouvent aussi que le Christ promet à ce Magistère une assistance divine perpétuelle pour remplir sa mission, assistance incompatible avec l’erreur : « Tout pouvoir m’a été donné… Allez donc, enseignez toutes les nations. » (Matth. XXVIII, 18-19). Sera-ce pour leur enseigner l’erreur ? On sait que la formule biblique : « Voici, je suis avec vous… » (ib. XXVIII, 20) marque la protection spéciale de Dieu pour l’accomplissement de la mission qu’il impose. Dira-t-on que le Christ « est avec ses disciples » pour approuver et couvrir des aberrations ? De même que Jésus promet à ses disciples d’être toujours avec eux, il leur promet aussi que l’Esprit-Saint, envoyé par le Père en son nom, demeurera sans cesse avec eux. Or, c’est « l’Esprit de vérité. Il vous enseignera toutes choses, et vous rappellera tout ce que je vous ai dit… Quand le Paraclet, l’Esprit de vérité sera venu, il vous guidera dans toute la vérité » (Jo. XIV, 16, 26, xv, 13). La promesse de Jésus serait-elle restée vaine, ou l’Esprit de vérité n’est-il pas un guide sûr ? L’Écriture enfin nous répète avec insistance que la parole des Apôtres est la parole de Dieu même ; elle est donc l’infaillible vérité. Les Apôtres sont les envoyés de Dieu ; les recevoir, c’est recevoir le Christ (Matth. x, 40) les écouter ou les mépriser, c’est l’écouter ou le mépriser lui-même (Luc X,16; Jo,XIII,20). Leur parole n’est pas celle d’un homme : « Vous avez reçu notre prédication, non comme une parole humaine, mais, ainsi qu’elle l’est vraiment, comme la parole de Dieu » (I Thess. II, 13). « Nous ne frelatons pas la parole de Dieu, mais c’est dans sa pureté, telle qu’elle vient de Dieu, que nous la prêchons devant Dieu en Jésus-Christ » (II Cor. II, 17).
La raison théologique. Dieu même nous oblige, sous peine de condamnation, de croire tout ce qu’enseigne le Magistère : « Allez, prêchez l’Évangile… ; qui croira sera sauvé, qui ne croira pas sera condamné » (Mc. XVI, 15-16). Il est clair qu’une telle obligation chez le disciple nécessite l’infaillibilité chez le maître. Dieu ne peut nous obliger à croire un maître exposé à l’erreur 13.
13 Il peut arriver accidentellement qu’un chrétien mal informé s’estime obligé à croire une doctrine fausse ; mais cette erreur n’est pas plus imputable à la doctrine chrétienne que ne l’est à la morale chrétienne l’erreur invincible d’une conscience mal formée qui se croit obligée à faire un acte matériellement mauvais.
La Tradition.
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
La Tradition.
Nous avons vu (n. 10) saint Ignace d’Antioche inculquer fortement l’union nécessaire avec l’évêque afin de rester dans la vérité. Citons encore ces mots : « Jésus-Christ, en effet, est la pensée du Père, comme les évêques établis en divers lieux partagent la pensée du Christ » (ad Eph. xvII). Saint Irénée, qu’on a pu appeler à juste titre « le premier théologien de l’infaillibilité » (Batiffol), écrit : « Il faut obéir à ceux qui, dans l’Église, succèdent aux Apôtres et qui, avec la succession de l’épiscopat, ont reçu par la volonté de Dieu le Père le charisme (don) certain de la vérité. Il faut apprendre la vérité là où se trouvent les charismes divins » (Adv. Hær., 1. IV, 26). Saint Cyrille de Jérusalem : « L’Église est appelée catholique parce qu’elle est répandue dans le monde entier, parce qu’elle enseigne universellement et sans défaillance toutes les vérités que les hommes doivent connaître » (Catéch. XVIII, n. 23). Saint Hilaire nous dit que ceux qui sont hors de l’Église, « ne peuvent avoir l’intelligence de la parole divine », c’est dans l’Église « qu’a été établie la parole de vie » (In Matt. XIII, 1). Comme preuve de la validité du baptême administré aux enfants, saint Augustin invoque l’autorité infaillible de l’Église : « C’est la pratique que suit l’autorité de notre mère l’Église ; c’est la conduite que tient cette règle assurée de la vérité. Contre cette force, contre ce mur inexpugnable, quiconque donne de la tête sera lui-même brisé » (Serm. cxciv, n. 17).
16. Le Pontife Romain quand il parle « ex cathedra » a la même infaillibilité que l’Église enseignante. –Les paroles du Christ (Matth. xxviii, 20) donnant à son Église la prérogative de l’infaillibilité s’adressent au Collège apostolique tout entier, donc aussi au corps épiscopal qui lui succède, mais non pas à chaque Apôtre, encore moins à chaque évêque en particulier. De ce Collège, Pierre est le chef ; la primauté de Pierre et de ses successeurs implique-t-elle aussi le pouvoir suprême de Magistère ? autrement dit, le Pontife Romain comme tel est-il infaillible ? Telle est la question.
Note théologique. Le dogme de l’infaillibilité pontificale a été défini de foi par le Concile du Vatican, le 18 juillet 1870 (T. 330).
Adversaires. Naturellement, tous les non-catholiques.
gabrielle- Nombre de messages : 19789
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: La règle de la Foi
ADVERSAIRES. Naturellement, tous les non-catholiques. Autrefois, parmi les catholiques, les Gallicans surtout tendaient à restreindre le plus possible le pouvoir du Pape. En politique, le gallicanisme déniait à l’Église tout pouvoir, même indirect, sur les rois comme rois ; en religion, il déniait au Pape l’autorité souveraine sur l’Église. Cette erreur est née, semble-t-il, du Grand Schisme d’Occident, quand, la chrétienté se trouvant divisée entre trois obédiences, le Concile de Constance déclara que le Concile est supérieur à un Pape douteux, et c’était vrai ; mais on alla ensuite jusqu’à prétendre que le Concile est supérieur même au Pape certain, et c’était faux. Pierre d’Ailly, Gerson soutinrent cette théorie erronée que combattirent Biel, Torquemada, Cajetan. Au Concile de Bâle, d’abord légitime et orthodoxe, mais devenu après 1437 nettement schismatique, ces erreurs s’accentuèrent, et les décisions du Concile contre le Pontife romain furent condamnées par Pie II et Léon X. En décroissance au XVIe siècle, les prétentions gallicanes se ravivèrent au XVIIe siècle, sous l’action de diverses causes : défaite de la Ligue, hostilité des Parlementaires (Pithou, Richer, etc.) contre Rome, le Jansénisme et Pascal, démêlés de Louis XIV avec le Saint-Siège. La doctrine gallicane se formula enfin en 1682, dans la Déclaration du Clergé de France qui fut rédigée par Bossuet et déclarée nulle en 1690 par Alexandre VIII (T. 382). Les luttes jansénistes contre Rome, au XVIIIe siècle, développèrent cet esprit gallican d’où sortit, en 1790, la Constitution civile du Clergé. Les Évêques de France, qui n’avaient pas su empêcher le vote de cette loi schismatique, acceptèrent l’exil et quelques-uns la mort plutôt que de se séparer de Rome. Après la Révolution, se produisit au cours du XIXe siècle avec J. de Maistre, Lamennais, Veuillot, les évêques Pie, Parisis, une forte réaction ultramontaine, à laquelle firent opposition Dupanloup, Montalembert, Darboy, Maret.
DOCTRINE GALLICANE. Les Gallicans ne furent pas hérétiques, puisque la question de l’infaillibilité pontificale restait ouverte ; ni schismatiques, puisqu’ils ne refusaient pas l’obéissance au Pape. Quelle était donc leur théorie ? La voici l’Église est une société monarchique, mais tempérée d’aristocratie (formule trop vague, malheureuse, qui se prête à l’erreur aussi bleu qu’à la vérité). Ils reconnaissaient la primauté du Pape, mais s’efforçaient de la limiter : ainsi d’après eux, les évêques sont subordonnés au Pape, et cependant l’épiscopat réuni garde sur lui quelque prééminence ; le Pape a bien la première place dans l’Église, mais non le souverain pouvoir qui appartient au corps pastoral tout entier, dont le Pape est la tête. Il n’est donc infaillible qu’uni aux évêques et par cette union même ; donc ses décisions doctrinales ne sont définitives et irréformables que par le consentement au moins tacite de l’Église enseignante universelle. Bossuet distinguait avec insistance les prérogatives de la Chaire de Rome, Sedes, et celles de l’Évêque qui l’occupe, Sedens, en ce sens que l’Église de Rome ne peut errer, au moins longtemps, mais que l’Évêque de Rome peut errer et, de fait, a erré, quoique rarement ! – Sans doute, répondons-nous, la distinction comporte un sens vrai : il est évident premièrement que la Chaire de Rome, l’institution pontificale et les droits qui y sont attachés, demeurent sans interruption, tandis que celui qui occupe cette Chaire meurt et a des successeurs de même l’institution pontificale et ses prérogatives sont indépendantes des mérites du titulaire. Il y a longtemps que le pape saint Léon le Grand écrivait : «Très divers sont les mérites des Occupants, immuables sont les droits des Sièges» (Ep. CXIX, c. 3). Mais il est faux de prétendre que celui qui occupe le siège ne possède pas, tant qu’il l’occupe, tous les droits du Siège lui-même. Et que pourrait donc signifier au juste cette distinction d’un enseignement infaillible de la Chaire pontificale et d’une doctrine erronée de Celui qui l’occupe ?
Le Fébronianisme. En 1763, Hontheim, coadjuteur de l’évêque de Trèves, publia, sous le pseudonyme de Fébronius, un livre intitulé De Statu Ecclesiæ, où il soutenait que le Pape ne tient pas directement son pouvoir d’institution divine, mais par la délégation de l’Église, à laquelle il est donc toujours soumis. Le seul droit du Pape est de conseiller, d’exhorter. Cette doctrine est hérétique. Grâce à l’appui de l’empereur Joseph II, elle se propagea rapidement en Autriche et en Allemagne. Le pape Pie VI la condamna en 1786 (T. 384) ; en 1794, il condamnait à nouveau ces mêmes erreurs reprises par le Synode janséniste de Pistoie, en Italie (T. 385).
EXPLICATION DES TERMES...
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
- Nombre de messages : 17586
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: La règle de la Foi
EXPLICATION DES TERMES. Le Concile du Vatican déclare que le Pontife Romain possède la même infaillibilité que l’Église et grâce à la même assistance de l’Esprit-Saint. Donc ses décisions dogmatiques sont irréformables par elles-mêmes et non par le consentement de l’Église ; mais il faut que le Pape parle ex cathedra, ce qui requiert plusieurs conditions : a) du côté de l’objet, qui doit directement ou indirectement appartenir à la foi ou aux mœurs (voir ci-dessous, ch. V) ; b) du côté de la forme ; il faut que la parole du Pape soit une définition. Le Pape, en effet, peut parler à titre personnel, comme docteur privé 14, et comme tel, il n’est pas infaillible. Il peut encore parler comme Pasteur et Docteur, enseigner, exhorter, commander avec autorité, sans toutefois engager son autorité suprême, et là encore il n’est pas infaillible. Il parle enfin comme Pasteur et Docteur de l’Église universelle, et use de son autorité suprême apostolique pour définir ; alors il est infaillible. Il n’y a pas pour ces définitions de formule exigée ; il suffit que soit manifeste l’intention de déclarer la vérité à l’Église universelle, de porter un jugement péremptoire et final, d’obliger tous les fidèles à un assentiment ferme. Il y a alors obligation de croire. Remarquons que le Concile s’est abstenu de cette expression : infaillibilité personnelle, pour ne pas donner à entendre que l’infaillibilité appartient au Pape, personne privée. Il est infaillible en tant qu’il est une personne publique, officielle, et qu’il décrète pour le bien commun de l’Église. Ajoutons que l’infaillibilité est jointe étroitement à l’autorité suprême aussi le Pape ne peut la déléguer, ni conférer à personne le droit de définir en son nom.
PREUVES. L’ÉCRITURE. Les mêmes textes qui prouvent la primauté de Pierre prouvent aussi son infaillibilité. C’est qu’en effet, dans l’Église, l’autorité qui régit a pour première fonction d’enseigner (n. 7). Rappelons les trois passages principaux :
a) Matth. XVI, 16-19 : « Et Moi Je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre Je bâtirai Mon Église, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle…»
Pierre est posé par le Christ comme le fondement assuré de Son Église ; Il est donc la raison de la solidité et de la stabilité de cette demeure. Donc, pas plus que l’Église infaillible appuyée sur Lui, Pierre ne peut se tromper quand il définit la foi et les mœurs : un édifice solide ne saurait s’appuyer sur un fondement ruineux.
b) Jo. XXI, 15-17 : « Simon, fils de Jean, M’aimes-tu plus que ceux-ci ? Il lui répondit : Oui, Seigneur, Vous savez bien que je Vous aime. Jésus lui dit : Pais Mes agneaux… Pais Mes brebis ».
Pierre est constitué par le Christ chef suprême et pasteur du troupeau, qui doit donc écouter la voix de Pierre et lui obéir, « tous, les agneaux et les brebis, et les petits et les mères, et les pasteurs mêmes : pasteurs à l’égard des peuples et brebis à l’égard de Pierre» (Bossuet, Sermon sur l’Unité de l’Église). Mais alors est-il possible, Dieu peut-Il permettre que le pasteur qu’il faut suivre conduise le troupeau dans les pâturages empoisonnés de l’erreur ?
c)) Luc XXII, 31-32 : « Le Seigneur dit : Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ; mais J’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point ; et toi, à ton tour [ou : une fois revenu de ta faute], affermis tes frères ».
Pierre, à qui Jésus avait déjà promis la primauté, doit affermir ses frères dans la foi. Afin qu’il soit digne de sa mission et que sa foi ne défaille jamais, Jésus prie pour Lui. Oserait-on prétendre que cette prière du Christ n’a pas été exaucée ? Certes elle est efficace, elle équivaut à une promesse : la foi de Pierre échappera aux assauts de Satan, elle ne défaillira pas, et par elle la foi des Apôtres et de leurs successeurs sera affermie.
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14. Ainsi parlait le pape Jean XXII dans la question béatifique (voir le traité des FINS DERNIÈRES, PP. 21-23)
LA TRADITION…
Dernière édition par Louis le Ven 19 Juil 2024, 7:26 am, édité 1 fois (Raison : Lien du chapitre V.)
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Re: La règle de la Foi
LA TRADITION… Saint Ignace d’Antioche exalte en termes magnifiques l’Église de Rome (et l’on sait que pour Ignace, l’Église, c’est l’Évêque) : « Église digne de Dieu, digne d’honneur, digne d’être proclamée bienheureuse, digne de louange, digne de voir ses vœux exaucés, dignement chaste et qui présides à l’universelle assemblée de la charité, qui possèdes la loi du Christ, qui es ornée du nom du Père, je te salue au nom de Jésus-Christ, Fils du Père… Jamais vous n’avez jalousé personne, vous avez instruit les autres. Pour moi, je veux tenir fermement ce que vous enseignez et ordonnez… Tous ceux qui appartiennent à Dieu et à Jésus-Christ, ceux-là sont unis à l’évêque » (Ad. Rom., tit., III, 1 ; ad. Phil. III, 2).
Saint Irénée nous a laissé dans son livre Adversus hæreses un témoignage célèbre sur la prééminence de l’Église romaine. Le texte grec original est malheureusement perdu, et la version latine que nous en avons laisse place à quelques discussions de détail. Mais le sens général est clair et remarquable. Il commence par appeler cette Église « très grande, très ancienne, connue de tous, fondée et établie à Rome par les deux très glorieux Apôtres Pierre et Paul », puis il ajoute : « Car c’est avec cette Église qu’il est nécessaire, à cause de sa supérieure prééminence, que toute Église s’accorde, c’est-à-dire les fidèles qui viennent de partout, toute Église dans laquelle se sera toujours conservée la Tradition qui remonte aux Apôtres » (loc. cit. CXI, 3, 2). Ainsi, selon Irénée, toute Église vraiment apostolique s’appliquera à s’accorder avec l’Église de Rome. Des paroles d’Irénée on a pu dire très justement : « Il est difficile de trouver une expression plus nette : 1°/ de l’unité doctrinale dans l’Église universelle ; 2°/ de l’importance souveraine, unique de l’Église romaine comme témoin, gardienne et organe de la tradition apostolique ; 3°/ de sa prééminence supérieure dans l’ensemble des chrétientés » (Duchesne, Églises séparées) 15 .
Saint Optat de Milève, répondant à l’hérétique donatiste Parménion, écrit : « Tu ne peux pas prétendre ignorer que Pierre le premier à Rome a occupé la chaire épiscopale ; c’est là qu’a siégé Pierre, le chef des Apôtres ; c’est cette unique chaire qui pour tous conserve l’unité, de crainte que chaque Apôtre ne défendît la sienne propre, si bien qu’est schismatique et pécheur celui qui contre cette chaire unique élève une autre chaire. Donc Pierre le premier a occupé cette chaire unique et première» (Cont. Parm., II, 2).
Saint Ambroise : « C’est à Pierre que le Christ a dit : Tu es Pierre et sur cette pierre Je bâtirai Mon Église. Donc où est Pierre, là est l’Église ; où est l’Église, nulle mort, mais la vie éternelle » (In. Ps. XL, n. 30).
Saint Grégoire de Nazianze appelle la Rome nouvelle « celle qui préside à tout l’univers chrétien » (Carm. de vita sua).
L’historien Suzomène, parlant de la lettre du pape Damase aux Églises d’Orient, dit : « La controverse terminée par le jugement de l’Église de Rome, tous se tinrent en repos » (H. E. VI, 22).
Saint Augustin dit de même : « Des lettres sont venues du Siège apostolique ; la cause est finie» (Serm. CXXXI, 10).
C’est pourquoi le gallican Tournely avoue « qu’il est difficile, en présence d’une telle masse de témoignages [des Pères], de ne pas reconnaître l’autorité certaine et infaillible de l’Église romaine ».
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15. On trouvera une étude détaillée du texte de saint Irénée dans l'ouvrage de Mgr Battifol, L'ÉGLISE NAISSANTE ET LE CATHOLICISME, P 249-253.
LES REVENDICATIONS MÊMES DES PONTIFES ROMAINS…
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Re: La règle de la Foi
LES REVENDICATIONS MÊMES DES PONTIFES ROMAINS. En effet ils s’attribuent l’infaillibilité :
a) implicitement, quand, de leur autorité propre et en dehors des Conciles, ils condamnent péremptoirement des erreurs contraires à la foi. Ainsi Anicet exclut de l’Église Marcion et Valentin ; Victor, les Montanistes ; Calixte, les Sabelliens, etc.
b) explicitement, quand ils déclarent définitives et irréformables les décisions doctrinales de Rome : « Il n’a jamais été permis, dit le pape Boniface Ier, de remettre en question ce qui a été décidé par le Siège apostolique» (Ep. XLIII, n. 2). Et Célestin Ier : « Les décisions du bienheureux Siège apostolique sont inviolables» (Ep. XXI, c. II) ; etc.
LES CONCILES OECUMÉNIQUES EUX-MÊMES reconnaissent aussi l’infaillibilité des Souverains Pontifes. Au Concile de Chalcédoine (en 454), après avoir entendu la lecture de la lettre dogmatique envoyée par le pape saint Léon le Grand, les Pères dirent : « Tous nous croyons ainsi ; les orthodoxes croient ainsi ; anathème à qui ne croit pas ainsi. Pierre a parlé ainsi par la bouche de Léon » (Harduin, II, 306). Le second Concile de Lyon, en 1274, le Concile de Florence en 1439 (T. 366, 368), affirment aussi la primauté du Siège apostolique et le plein pouvoir doctrinal des successeurs de Pierre : « Le Pontife romain est le successeur de Pierre, le vicaire du Christ, le chef de toute l’Église ; le père et le docteur de tous les chrétiens… plein pouvoir lui a été donné par le Christ de paître, de diriger, de gouverner l’Église universelle» (Décret pour les Grecs).
17. — B. Infaillibilité passive : L’Église universelle est infaillible dans sa foi. - Il s’agit ici de l’Église enseignée prise dans son ensemble, car en particulier tel fidèle ou telle Église (sauf l’Église romaine, à cause de son chef) peut errer. Le peuple chrétien considéré universellement est préservé de l’erreur. L’Esprit-Saint assiste aussi bien, quoique différemment, les disciples et les maîtres ceux-ci pour bien enseigner la doctrine, ceux-là pour la bien recevoir. L’infaillibilité passive des fidèles consiste donc à écouter comme il faut le Magistère. La même pure vérité est enseignée par les uns, acceptée par les autres ; acceptée, non subie par contrainte ; acceptée vitalement et non appliquée du dehors. L’Esprit-Saint, âme de l’Église, anime le cœur des pasteurs et des fidèles pour en tirer cet admirable accord, prélude de l’harmonie parfaite du ciel.
PREUVES. L’ÉCRITURE. ...
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Re: La règle de la Foi
PREUVES. L’ÉCRITURE. a) L’indéfectibilité de l’Église. L’Église est indéfectible ; le Christ le lui a solennellement promis ; or cette indéfectibilité implique l’infaillibilité. En effet l’Église catholique prise dans son ensemble sera éternellement l’Église de Dieu et du Christ, son royaume, son épouse, le moyen et la voie du salut. Or c’est premièrement par sa foi incorruptible que l’Église vérifie tous ces titres. L’Église indéfectible est aussi l’Église dont la foi infaillible est virginalement pure d’erreur,
– b) La fin du Magistère. Comme toute autorité est pour le bien de la société, ainsi le Magistère est pour le bien des fidèles. Le Christ a confié le dépôt de la révélation à des Maîtres authentiques, non pour qu’ils se le réservassent, non pour qu’ils le gardassent à la manière d’une chose morte, d’un trésor caché aux regards et improductif, mais pour qu’ils fissent naître et entretinssent la foi dans l’âme des fidèles par une active prédication. Or, si l’ensemble du peuple chrétien errait dans la foi, c’est que le Magistère, pourtant assisté de Dieu, aurait manqué son but, et cela ne peut être. L’infaillibilité passive est corrélative de l’infaillibilité active.
– c) Déclarations explicites. Saint Paul montre l’Église comme le soutien et l’appui de la vérité : «Je t’écris ces choses…afin que tu saches comment il faut te conduire dans la maison de Dieu, qui est l’Église du Dieu vivant, colonne et base de la vérité» (I Tim. III, 15), Et encore ce beau passage qui résume toute notre proposition : « Oui, manifestement, vous êtes une lettre du Christ écrite par notre ministère, non avec de l’encre, mais par l’esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur vos cœurs» (II Cor. III, 3).
LA TRADITION.
Saint Irénée : « Où est l’Église, là est l’Esprit de Dieu, et où est l’Esprit, là est l’Église et toute grâce ; or l’Esprit est vérité ». (Adv. hær. III, 24).
Saint Vincent de Lérins : « Nous suivrons la foi catholique, si nous professons que celle-là est l’unique vraie toi, que confesse toute l’Église dans tout l’univers » (Commonit. 2).
– Les images mêmes sous lesquelles les Pères désignent l’Église indiquent aussi son infaillibilité : elle est le port où l’on se réfugie, la tente qui sert d’abri contre tempête des hérésies, l’arbre qui s’enracine d’autant plus profondément dans le sol de la vérité qu’il est plus secoué par le vent, la vierge qui ne souffre aucune souillure de l’erreur, l’ancre de la foi, la voie royale de la vérité, etc.
– Dans les controverses avec les hérétiques, les Pères font appel comme à un témoignage irréfutable tantôt à la foi déclarée du peuple chrétien, tantôt à ses coutumes, c’est-à-dire à la foi enveloppée dans la pratique chrétienne. Ils opposent aux novateurs le sentiment de l’Église, le sens catholique, la conscience commune de la foi, la foi écrite dans les cœurs. Nul plus que saint Augustin n’a usé de cet argument. C’est par cette « voix du peuple » qu’il prouve la validité du baptême des enfants, les effets de l’Eucharistie, le péché originel, la nécessité de la grâce pour accéder à la foi, pour la persévérance.
CONCLUSION. Ainsi le siège propre de la vérité chrétienne est la conscience collective de l’Église ; la doctrine chrétienne est un trésor social auquel les individus ne participent qu’autant qu’ils sont agrégés et unis l’Église.
Chapitre quatrième L'exercice du Magistère...
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Re: La règle de la Foi
CHAPITRE QUATRIÈME
L’EXERCICE DU MAGISTÈRE
18. Double exercice du Magistère. – Le Magistère authentique s’exerce de deux façons : l’une solennelle et extraordinaire, l’autre quotidienne et ordinaire.
1°/ MAGISTÈRE SOLENNEL ET EXTRAORDINAIRE.
Il s’exprime soit par la bouche du Pontife suprême parlent ex cathedra, soit surtout par le Concile œcuménique. Nous avons déjà vu (n. 16) les conditions de l’enseignement ex cathedra ; disons ce
qu’est le Concile œcuménique.
19. Concile œcuménique. Conciles particuliers. – On appelle en général concile une assemblée légitime de Pasteurs de l’Église réunis pour traiter et décider de questions religieuses. Ces conciles sont particuliers ou généraux. Si le concile particulier réunit les évêques d’une province ecclésiastique, c’est un concile provincial ; s’il groupe les évêques de plusieurs de ces provinces, il s’appelle plénier. On a vu parfois des réunions groupant tous les évêques d’un pays ; on leur a donné le nom de conciles nationaux. Le Code de Droit canonique ne connaît pas ces sortes de réunions. On trouvera dans le Code, cc. 281-292, les règles qui régissent les conciles provinciaux et pléniers. Le concile général ou œcuménique (c’est-à-dire de toute la terre habitée, οικουμένικος) réunit les évêques du monde entier. Il est régi par les cc. 222-229 du Code canonique.
20. — A. Nature du concile œcuménique.
COMPOSITION. De droit divin y doivent être convoqués tous les évêques ayant juridiction (évêques résidentiels) ; de droit ecclésiastique : les Cardinaux, même non-évêques, les Abbés, les Supérieurs des Ordres religieux exempts. Les évêques titulaires (sans diocèse), s’ils sont convoqués au concile, y ont voix délibérative ; les théologiens ou canonistes qui seraient invités n’ont qu’une voix consultative. Sans doute, il n’est pas nécessaire que tous les évêques du monde soient présents de fait ; cependant ils doivent être en assez grand nombre pour représenter vraiment l’Église enseignante universelle.
CONVOCATION. La convocation, c’est-à-dire l’acte qui formellement constitue l’assemblée en concile légitime, ne peut venir que du Pape. Toutefois, il a pu arriver que les évêques fussent mandés et réunis par l’autorité civile qui prenait l’initiative de cette convocation et fournissait les moyens matériels de sa réalisation. Ainsi en usèrent autrefois certains empereurs chrétiens ; mais la réunion ne devient concile qu’avec l’assentiment du Pape. Le Pape peut aussi légitimer ensuite un concile d’abord illégitimement tenu. C’est le Pape qui préside le concile par lui-même ou par ses légats : la présidence accordée parfois à des princes temporels n’était qu’honorifique et sans réelle autorité. Deux conditions sont donc requises pour qu’un concile soit œcuménique : que l’épiscopat catholique soit réuni et qu’il soit réuni en accord avec son chef, le Pontife romain. Le concile œcuménique, en effet, représente l’Église entière ; or, sans l’union au Pape, l’Église n’est plus entière, pas plus que le corps n’est entier sans l’union des membres à la tête, ni l’édifice sans la liaison des parties au fondement.
SANCTION DES DÉCRETS. Pour le vote des décrets l’unanimité absolue n’est pas requise, ni même l’unanimité morale, la majorité suffit. Le Pape pourrait même sanctionner le vote de la minorité ; mais ce décret, ainsi devenu irréformable et infaillible, ne pourrait être appelé un décret conciliaire. Pour obtenir force définitive, les décrets du concile doivent être sanctionnés par le Pontife romain ; mais il n’est pas nécessaire que cette sanction soit notifiée à l’Église par un acte exprès ; une approbation tacite suffit. Le Pape peut aussi sanctionner définitivement les actes d’un concile particulier ; ce fut le cas des Conciles de Milève et second Concile d’Orange. Ces actes ont alors une valeur égale à ceux d’un concile général. Toutefois le concile particulier, même ainsi confirmé, ne compte pas parmi les conciles œcuméniques.
21. B. Utilité du concile œcuménique.
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21. — B. Utilité du concile œcuménique. – Le concile œcuménique ne serait nécessaire que dans le cas tout à fait exceptionnel d’un Pape douteux. En règle ordinaire, le concile œcuménique n’est pas absolument nécessaire, puisqu’il existe un autre tribunal suprême, la Chaire Apostolique, qui peut trancher les controverses et condamner efficacement les erreurs. Ainsi furent condamnées, sans concile général, les hérésies pélagienne, janséniste, moderniste. L’autorité suprême du Pape, celle des évêques dispersés, mais unis au Pape, suffit à la direction ordinaire de l’Église.
Néanmoins ces conciles généraux sont fort utiles. Ils apportent évidemment à l’Église d’abondants secours naturels : plus de lumière jaillissant des délibérations, secours surnaturels aussi selon la promesse du Christ : «Car, là où deux ou trois seront réunis en Mon Nom, Je suis au milieu d’eux» (Matth. XVIII, 20) La solennité des définitions conciliaires donne à la vérité plus d’éclat ; les lois disciplinaires promulguées par l’Église assemblée sont acceptées et obéies avec plus d’efficacité, les condamnations portées atteignent plus fortement les rebelles ; enfin l’union entre les évêques s’y resserre et la charité du Christ qui aime Son Église y resplendit. Cependant la fréquence des conciles ne manquerait pas d’inconvénients, ne serait-ce que l’absence prolongée et simultanée des évêques loin de leurs diocèses. Ils furent naturellement plus nombreux autrefois, alors que l’infaillibilité papale n’avait pas été pleinement mise en lumière.
22. — C. Autorité des décisions conciliaires. – L’Église les a toujours reçues avec le plus grand respect. Le Pape saint Grégoire le Grand († 604) écrivait au patriarche Jean de Constantinople : «Comme je reçois et vénère les quatre saints Évangiles, ainsi je professe recevoir et vénérer les quatre Conciles (16) » (Ep. 25)
INTERPRÉTATION DES DÉCISIONS. Quand il est établi qu’un document émane certainement d’un concile approuvé par le Pape, il faut :
a) considérer s’il s’agit d’une définition. Il n’y a d’ailleurs pas de formule déterminée de définition, il faut donc voir si la volonté de définir ressort des termes employés, comme par exemple : Je crois, l’Église croit, Nous définissons, Si quelqu’un dit…, qu’il soit anathème !
b) voir ce qui est défini ; à quoi servira la connaissance des délibérations conciliaires, des consultations des théologiens qui préparent et expliquent les définitions. Notons que dans la définition même peuvent se présenter des considérations qui ne sont pas elles-mêmes objet défini ; ainsi les arguments produits, les textes de l’Écriture apportés par manière de preuve ne rentrent pas d’ordinaire dans la définition. S’il y a doute qu’une vérité ait été définie, on ne peut tirer argument du décret pour taxer d’hérésie la proposition contraire.
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16. Nicée, Constantinople, Éphèse, Chalcédoine, les quatre premiers conciles œcuméniques.
IIº/ LE MAGISTÈRE ORDINAIRE...
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Re: La règle de la Foi
IIº/ LE MAGISTÈRE ORDINAIRE.
23. Ce qu’il est et comment il s’exerce. – C’est l’enseignement donné journellement, sous la direction du Pape, par tous les Évêques dispersés dans le monde. Ce Magistère s’exerce : expressément, quand l’évêque expose la doctrine ou condamne l’erreur ; implicitement, quand il promulgue des lois disciplinaires, liturgiques, approuve des livres ou des pratiques pieuses ; tacitement, quand il laisse certaines croyances ou pratiques se propager parmi les fidèles.
Pour cet exercice du Magistère, l’Évêque se sert, comme de ministres, des prêtres qui dépendent de lui curés, vicaires, etc., et à qui il communique son autorité ; des religieux exempts à qui il fait appel ; et aussi des laïques compétents dont il réclame et utilise la collaboration (voir lettres de Pie XI au cardinal Bertram, 13 nov. 1928, et au cardinal Segura, 6 nov. 1929).
24. L’évêque dans son diocèse est le Maître authentique, mais non infaillible, de la doctrine.
PREUVE Le Christ a confié à Ses Apôtres, et à personne en dehors d’eux, la charge d’enseigner Sa doctrine ; Il leur a promis collectivement une assistance qui les préserve de l’erreur (Matth. XXVIII, 18-20). De ce magistère un et indivisible chaque évêque détient solidairement une part ; chacun d’eux est donc, de droit divin, docteur de la foi pour le peuple qui lui est confié : « Chaque évêque est vraiment, sous l’autorité du Pontife romain, docteur, c’est-à-dire maître, pour les fidèles commis à ses soins» (Code, c. 1326).
Dans son diocèse il est l’unique docteur, puisque seul il appartient au Magistère divinement institué les autres n’enseignent que par sa délégation. Les Jansénistes, voulant exalter les curés aux dépens des évêques, comme les évêques aux dépens du Pape, prétendirent que les curés, réunis en synode diocésain avec l’évêque, étaient comme lui et de droit divin juges de la foi. Cette prétention a été condamnée (T. 410, 40). Sans doute les curés sont pasteurs, puisque le soin (cura) des âmes leur est confié, et qu’ils ont une juridiction ordinaire ; mais toute cette institution est ecclésiastique et non divine. La plénitude du pouvoir doctrinal, à qui seule est jointe l’infaillibilité, n’appartient donc pas à chaque évêque, mais au corps épiscopal entier. L’histoire montre que, de fait, des évêques se sont trompés.
On admet généralement que chaque Apôtre était infaillible, mais ils tenaient ce privilège de leur qualité de fondateurs de l’Église, et non expressément de la promesse du Christ instituant le Magistère, promesse qui n’est faite qu’à la collectivité comme telle. Ils n’ont donc pas transmis ce privilège à leurs successeurs individuels. Leurs écrits, s’ils en ont laissé, sont sans erreur, parce qu’ils sont inspirés.
25. Le Magistère ordinaire des évêques dispersés dans le monde jouit de la même infaillibilité que les conciles œcuméniques, et on lui doit la même obéissance.
PREUVES. L'ÉCRITURE. Dispersés aussi bien que réunis en concile, les évêques forment un seul collège apostolique et un seul corps enseignant. Or, comme tels et prêchant unanimement aux fidèles les mêmes doctrines, ils sont infaillibles (Matth. XXVIII, 18-20). Le Christ a institué un Magistère destiné à enseigner toutes les nations, et Il est avec lui tous les jours, donc avec le Magistère ordinaire et dispersé, et non pas seulement de temps en temps, dans les circonstances extraordinaires. C’est surtout, en effet, dans leur enseignement quotidien des peuples que les « ministres de la parole » (Act. VI, 5) s’acquittent de leur fonction.
LES PÈRES. Citons deux des plus anciens. Saint Ignace, martyr : « Jésus-Christ est la pensée du Père, comme les évêques, établis par toute la terre, sont [unis] dans la pensée de Jésus-Christ» (ad Eph. III, 2); Saint Irénée : « Ayant reçu du Christ cette prédication et cette foi, l’Église répandue dans le monde entier la conserve avec soin» (Adv. Hær. I, 10).
LES PAPES ET LES CONCILES. Pie IX écrit à l’évêque de Munich, en 1863 : « Cette soumission de foi doit s’étendre à ce que le Magistère ordinaire de l’Église universelle répandue dans le monde enseigne comme divinement révélé » (T. 61). Le Concile du Vatican : « Il faut croire de foi divine ce que l’Église, par un jugement solennel ou par le magistère ordinaire universel, propose à croire comme divinement révélé» (De fide, ch. III. T. 160).
NOTE. Comment constater cet enseignement ordinaire universel ? Cet accord apparaîtra : directement, par exemple si une vérité est enseignée dans tous les catéchismes ; si une dévotion est approuvée par tous les évêques ; si tous ont demandé au Pape de définir telle vérité ; si encore ils ont accepté les décrets d’un concile particulier, etc. ; – indirectement, s’ils laissent, sans réclamer, une dévotion se répandre dans tout le peuple chrétien ; si l’on voit, à l’occasion d’une controverse, quelques évêques entrer en ligne de telle façon qu’ils apparaissent à tous comme les champions de la foi chrétienne : ainsi saint Augustin dans la défense de la doctrine de la grâce contre Pélage.
26. Y a-t-il un seul ou deux sujets de l’infaillibilité ? Le Pontife romain et le corps épiscopal, tous deux infaillibles, sontils un seul sujet de l’infaillibilité, ou faut-il en reconnaître deux ? La réponse des théologiens n’est pas unanime.
Certains répondent : il y a deux sujets : le Pape et le corps épiscopal soit dispersé, soit réuni en concile, mais toujours considéré en union avec son chef (voir Traité de l’Église, n. 98). D’autres n’admettent qu’un seul sujet de l’infaillibilité, à savoir le Pontife romain, puisque le concile œcuménique lui-même n’a l’autorité suprême ni l’infaillibilité que par la sanction pontificale. Dans toute société, disent-ils encore, il n’y a qu’un sujet (homme ou assemblée) en qui réside la plénitude du pouvoir suprême. Il en est de même dans l’Église, où ce pouvoir suprême est infaillible aussi. Les évêques sont disciples à l’égard du Pape et docteurs à l’égard des fidèles, «pasteurs à l’égard des peuples et brebis à l’égard de Pierre» (Bossuet). Les deux opinions sont soutenables, étant d’ailleurs bien entendu que ceux qui reconnaissent deux sujets de l’infaillibilité, ne les posent pas totalement distincts et séparés, pas plus que ne sont totalement distincts et séparés la tête et les membres qu’elle unit.
CHAPITRE CINQUIÈME : OBJET DU MAGISTÈRE VIVANT...
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Re: La règle de la Foi
1°/ LES CONCLUSIONS THÉOLOGIQUES...CHAPITRE CINQUIÈME
OBJET DU MAGISTÈRE VIVANT
27. Objet limité. Comment il s’oppose l’erreur. – L’objet du Magistère de l’Église n’est pas toute vérité, mais la vérité religieuse révélée à laquelle se limite l’enseignement authentique. C’est d’ailleurs le Magistère lui-même qui fixe ses limites, et ce pouvoir de juger en sa propre cause ne saurait avoir ici d’inconvénient. En effet, ce Magistère est infaillible et discerne sans erreur son objet de ce qui ne l’est pas. Quand l’Église juge définitivement une cause, par là même elle affirme qu’elle a reçu de Dieu le pouvoir de juger, et elle ne se trompe pas dans cette affirmation ; du fait nous remontons légitimement au droit. De plus, comme il est évident que deux propositions contradictoires ne peuvent être vraies à la fois, il s’ensuit que si l’Église définit positivement une vérité, elle condamne donc l’erreur opposée ; et qu’inversement elle a le droit de condamner infailliblement une doctrine ouvertement opposée à sa foi. Or, précisément parce que les Conciles ou les Papes ne formulent d’ordinaire leurs définitions qu’à l’occasion d’erreurs nouvelles, ils les édictent volontiers sous cette forme de condamnation : « Si quelqu’un dit… qu’il soit anathème !»
28. Division du sujet. – L’objet du Magistère est double d’abord l’objet principal et direct : ce sont les vérités formellement ou virtuellement révélées ; puis l’objet secondaire et indirect : ce sont les faits en connexion telle avec la vérité révélée, que la défense de cette vérité rend nécessaire dans l’Église le pouvoir de juger infailliblement ces faits ; on les appelle faits dogmatiques.
1°/ OBJET PRINCIPAL: LES VÉRITÉS RÉVÉLÉES.
29. Vérités formellement et virtuellement révélées. – Une vérité est formellement révélée, si elle est expressément enseignée par Dieu, par exemple la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie : « Ceci est Mon corps, ceci est Mon sang ». Une vérité est virtuellement révélée, si elle est enseignée par Dieu, non pas expressément et dans son énoncé direct, mais dans ses principes, dans ses causes logiques. C’est une vérité qui découle par une conséquence absolument nécessaire d’autres vérités formellement révélées, en vertu de ces vérités. Ainsi il est formellement révélé que Marie est mère de Jésus et que Jésus est Dieu ; donc cette autre vérité : Marie est mère de Dieu, qui découle nécessairement des deux premières, est aussi une vérité révélée, une vérité virtuellement révélée, en vertu des deux autres. On pourrait encore la définir une vérité dont la négation emporterait nécessairement la négation d’une vérité révélée : si Marie n’est pas mère de Dieu, c’est donc qu’elle n’est pas mère de Jésus, ou que Jésus n’est pas Dieu.
30. Les vérités formellement révélées sont l’objet principal du Magistère. C’est, en effet, pour prêcher Son enseignement, Sa révélation que le Christ a institué Ses Apôtres maîtres infaillibles, et qu’Il les assiste sans cesse dans cette fonction (Matth. XXVIII, 18-20). Donc, toute Vérité contenue formellement dans le dépôt de la foi est l’objet direct et principal de l’enseignement infaillible du Magistère.
31. Les vérités virtuellement révélées sont aussi l’objet principal du Magistère. – On peut ramener ces Vérités trois catégories : les conclusions théologiques, les préambules de la foi, les préceptes de droit divin, c’est-à-dire les Vérités d’ordre pratique qui constituent la règle divine des mœurs.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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Re: La règle de la Foi
1°/ LES CONCLUSIONS THÉOLOGIQUES. On appelle ainsi toute proposition déduite par un raisonnement certain, soit de deux propositions formellement révélées, comme dans l’exemple ci-dessus (n. 29), soit d’une proposition formellement révélée et d’une autre métaphysiquement certaine à la raison ; ainsi la conclusion de ce raisonnement : le pardon des péchés dans le sacrement de Pénitence est donné en forme de sentence judiciaire ; or, pour prononcer une sentence judiciaire il faut avoir reçu juridiction ; donc, la juridiction est nécessaire pour absoudre les péchés ; — est une conclusion théologique.
La connaissance des conclusions théologiques est fort utile, parfois nécessaire, pour l’intelligence des vérités formellement révélées. C’est de cette manière, par exemple, qu’on prouvera la liberté du sacrifice du Christ, Sa science infuse et Sa vision béatifique. Leur usage est fécond : c’est grâce à elles que certains dogmes peuvent produire leurs conséquences pratiques (tel l’exemple cité) ; ainsi la légitimité de la dévotion au Sacré-Cœur repose sur cette conclusion théologique : le Cœur de Jésus est adorable. Au contraire la négation de ces conclusions est un grave danger pour la foi, puisqu’elle entraîne logiquement la négation des vérités formellement révélées. C’est pourquoi le Magistère a souvent condamné des erreurs immédiatement opposées à des conclusions théologiques : par exemple les erreurs de Wicleff, Jean Huss, Baïus, Quesnel, etc.
2º/ PRÉAMBULES DE LA FOI. On appelle ainsi des vérités profanes de leur nature, surtout des vérités philosophiques, qui sont préalablement requises pour juger de la crédibilité de la foi. On ne les range pas parmi les conclusions théologiques, car elles ne sont pas déduites des vérités révélées ; elles se présentent plutôt comme des principes qui, de l’extérieur, mènent aux vérités révélées. Ces préambules font cependant partie des vérités virtuellement révélées. En effet, nier ou du moins ébranler ces principes, c’est rendre fausse ou du moins douteuse la révélation chrétienne. Ainsi, il faut choisir : ou bien le criticisme kantien, qui ruine les certitudes rationnelles préalables à la foi, est faux, ou notre foi est vaine ; ou bien les théories de Hume contre la connaissance et la valeur du miracle sont fausses (17) , ou notre foi repose sur un fondement ruineux. Et de même, certaines théories philosophiques se trouvent logiquement mêlées aux exigences préliminaires de tel ou tel dogme. Ainsi le dogme de la transsubstantiation exige une distinction réelle de la substance d’avec les accidents (18) .
C’est pourquoi l’Église a toujours revendiqué et exercé le droit de définir quels sont les préambules de la foi, de proscrire les affirmations contraires de la fausse science. C’est ainsi que Pie IX dans sa lettre à l’évêque de Munich condamnait les erreurs philosophiques de Frohschammer (T. 201-3), Léon XIII, celles de Rosmini ( T. 655-8 ), et que le Concile du Vatican dans la Constitution De Fide, ch. 4, établissait les justes rapports de la raison et de la foi.
17. Voir La Vraie Religion, pp. 68-70.
18. Voir Les Sacrements, tome II, nn. 32, 33
3°/ LES PRÉCEPTES DE DROIT DIVIN.…
Dernière édition par Louis le Dim 10 Mar 2024, 6:39 am, édité 1 fois (Raison : Orthographe.)
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Re: La règle de la Foi
3°/ LES PRÉCEPTES DE DROIT DIVIN. – Ce sont ou bien des préceptes formellement révélés ou bien des applications de ces préceptes. Par conséquent la science morale qui dirige les actes humains à l’unique fin dernière de la vie éternelle, est une science théologique dont l’Église se proclame la maîtresse suprême : « C’est au Pontife romain, écrivait Léon XIII, de déclarer par son autorité souveraine ce qui est honnête et ce qui ne l’est pas, ce qu’il faut faire ou éviter pour obtenir le salut ; autrement, il ne serait plus l’interprète certain des oracles de Dieu, ni un guide sûr de la vie humaine » (Encycl. Sapientiæ æternæ).
CONCLUSION. Toute vérité virtuellement révélée appartient donc directement, quoique médiatement, au magistère infaillible. Les deux ordres de vérités formellement et virtuellement révélées forment un corps unique de la doctrine du salut, en vue de laquelle le Sauveur a directement institué le Magistère apostolique. On ne peut séparer ces deux ordres sans les détruire tous deux, puisqu’ils se tiennent par une absolue nécessité logique, puisque, sous peine de contradiction, l’esprit est obligé de les admettre ou de les rejeter tous deux (19).
COROLLAIRE. Il appartient aussi au Magistère infaillible de juger les doctrines sociales, économiques et politiques, dans la mesure où ces doctrines se confondent avec la doctrine morale religieuse. Les Papes de nos jours ont été souvent amenés à rappeler leur autorité en ces matières. Beaucoup, venus de camps bien divers : libéraux, même catholiques, radicaux, socialistes s’en indignent mêmement, et pour des raisons opposées. L’Église, disent-ils, sort de son domaine, et volontiers ils remettraient « leur curé à sa place » ! Est-il donc si difficile de comprendre que, dans ces controverses, il s’agit, soit de la dignité de la personne humaine et de ses droits essentiels : droit de propriété, d’association, de grève, juste salaire et juste prix; soit de la notion même et des principes immuables de la société familiale et civile ? Ne sont-ce pas là des questions morales au premier chef, et l’Église, gardienne infaillible de la vérité morale, n’est-elle pas « à sa place », quand elle les juge ?
II°/ OBJET SECONDAIRE: LES FAITS DOGMATIQUES.
32. Ce qu’est le fait dogmatique. – Ce qui n’est pas révélé, formellement ou virtuellement, n’est pas dans le dépôt de la foi confié par le Christ à Son Église, et n’appartient donc pas directement au Magistère. Néanmoins, indirectement et en raison d’une connexion extérieure avec la vérité révélée, certaines vérités tombent sous le pouvoir de ce Magistère. Le lien entre ces vérités et la vérité révélée n’est pas intrinsèque et noué par la nécessité logique ; aussi leur négation n’entraîne pas logiquement la négation du dogme. Mais ce lien cependant est réel quoiqu’extrinsèque, il est noué par les circonstances ; vouloir le trancher, c’est empêcher l’Église de remplir sa mission, qui est non seulement de prêcher la vérité révélée, mais aussi de la défendre efficacement.
On appelle ces vérités, ainsi liées au dogme, des faits dogmatiques ; non pas qu’ils fassent eux-mêmes partie du dogme : ainsi le fait que Jésus est mort sous Ponce-Pilate ne fait évidemment pas partie intrinsèque du dogme de la rédemption ; mais parce que leur reconnaissance est nécessaire pour défendre le dogme : ainsi, le caractère œcuménique de ce concile, la légitime élection de ce Pape. Ce sera surtout le cas de la détermination certaine du sens des mots et des livres ainsi les mots consubstantiel, transsubstantiation sont-ils aptes à exprimer le dogme ? quelle est la vraie doctrine de Calvin ? la Vulgate est-elle une version authentique de l’Écriture ? etc.
L’Église, disons-nous, est infaillible dans le jugement des faits dogmatiques, et spécialement quand il s’agit du sens exprimé par l’auteur d’un livre en matière religieuse. C’est ce qu’il faut établir avec soin.
19. Il va de soi que l’Église ne condamne jamais une proposition scientifique, expressément nomme objet de science. Mais, parce qu’une vérité ne peut être contradictoire à une autre, elle déclare qu’une proposition vraie en religion ne peut être fausse dans la science, que l’opposition à la vérité révélée convainc de fausseté la prétendue proposition scientifique
33. Le pouvoir du Magistère infaillible s’étend aux faits dogmatiques….
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Re: La règle de la Foi
33. Le pouvoir du Magistère infaillible s’étend aux faits dogmatiques – Cette affirmation est théologiquement certaine ; son importance apparaît clairement, à la mesure même des oppositions qu’elle soulève.
ADVERSAIRES. C’est la querelle janséniste surtout qui, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, obligea l’Église à préciser cette doctrine. En 1653, Innocent X condamnait cinq propositions sur la grâce extraites du livre de Jansénius, l’Augustinus 20. Les Jansénistes convinrent que les propositions étaient condamnables, mais ils soutinrent opiniâtrement qu’elles n’étaient pas dans Jansénius, du moins dans le sens condamné par le Pape. Ce fut la distinction entre la question de droit et la question de fait. L’Église, disaient-ils, est infaillible sur la question de droit, à savoir le sens erroné des propositions condamnées, mais non sur la question de fait, la présence des propositions dans le livre de Jansénius.
Alexandre VII, en 1656, condamna la distinction janséniste, et imposa la signature d’un formulaire de condamnation. Beaucoup le signèrent mais déclarèrent réserver leur assentiment intérieur et s’abriter derrière « un silence respectueux ». Clément XI, en 1705, condamna ce silence respectueux.
Arnauld, dans sa Lettre à un duc et pair, Pascal, dans ses 17e , 18e , 19e Provinciales, avaient exposé les arguments des Jansénistes : ce qui n’est pas révélé de Dieu et n’appartient donc pas au dépôt de la foi, ne relève pas du magistère ecclésiastique ; c’est aux yeux de décider les questions de fait et non à l’autorité ; le jugement du Pape ne peut prévaloir contre le témoignage de l’auteur incriminé, de ses amis et de ses disciples 21 .
SENS DU LIVRE; SENS DE L'AUTEUR. On n’entend pas nécessairement par là le sens que l’écrivain pouvait avoir en son esprit, le sens subjectif, et qu’il n’a pas réussi peut-être à exprimer. De celui-là l’Église ne se porte pas juge. On entend le sens qu’exprime objectivement le livre, le sens de l’auteur en tant qu’auteur, la doctrine qui ressort du texte tel qu’il est. C’est celui-là que l’Église prétend juger.
PREUVES. La pratique constante de l’Église. Dès ses origines, l’Église n’a pas hésité à juger solennellement les faits dogmatiques. Ainsi le Concile de Nicée condamne comme hérétique le livre d’Arius, Thalia, et consacre au contraire le mot « consubstantiel ». Le Concile d’Éphèse anathématise les écrits de Nestorius. Le Concile de Trente, à son tour, approuve le mot « transsubstantiation » et déclare authentique la version Vulgate, etc. Contre Arnauld et les Jansénistes on dirigeait cet argument ad hominem : Vous reconnaissez, et justement, que l’Église par un jugement définitif a approuvé la doctrine essentielle d’Augustin sur la grâce ; vous reconnaissez donc qu’elle a le pouvoir de juger les questions de fait, si elle peut déclarer infailliblement quelle est la doctrine d’Augustin.
20. Voir La GRÂCE, pp. 34-35.
21. Pascal écrivait au P. Annat, jésuite : « On vous défia de citer les pages de Jansénius où vous aviez trouvé ces propositions ». On souffre de voir un si grand esprit soulever une objection aussi enfantine. Sans doute, on ne prétend pas que les cinq propositions se lisent de mot à mot dans Jansénius, mais elles présentent un résumé exact de sa doctrine. Celle-ci était habilement voilée, mais d’autant plus dangereuse pour les esprits inaptes à discerner l’erreur. C’est le rôle de l’Église de déchirer ces voiles et d’exprimer en formules brèves et claires la doctrine erronée. L’échappatoire des Jansénistes a servi depuis aux Modernistes, condamnés par Pie X, et à d’autres encore ; c’est le refuge ordinaire des révoltés.
LA RAISON THÉOLOGIQUE…
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Re: La règle de la Foi
LA RAISON THÉOLOGIQUE. L’autorité infaillible du Magistère doit s’étendre à des vérités qui, sans être révélées, sont cependant la condition requise pour que le dépôt de la foi soit conservé sûrement, prêché utilement et défendu solidement. En effet, le Christ n’a pu confier au Magistère la charge de conserver, de prêcher, de défendre la foi, sans lui assurer toute l’autorité nécessaire à cette mission. Eh bien ! la connaissance des faits dogmatiques est précisément pour l’Église la condition requise à l’accomplissement de sa fonction. Montrons-le.
Il est clair que le pouvoir nécessaire au Magistère ne peut pas être simplement un pouvoir théorique, abstrait et pratiquement inutile ; ce doit être un pouvoir réel, qui lui permette de porter des décrets efficaces, obligeant les fidèles en conscience aussi bien que dans leur conduite extérieure, et ainsi de protéger la foi. Or, le Magistère ne peut porter ces décrets efficaces, ni obliger vraiment les fidèles, s’il ne peut infailliblement juger les faits dogmatiques. En effet, si vraiment il est permis aux fidèles de mettre ces faits en doute, par exempte de discuter sans fin si le Concile de Trente fut bien œcuménique, si le Pape régnant a été légitimement élu, s’il a eu vraiment en telle circonstance l’intention d’obliger, etc., rien dès lors n’est assuré, toutes les constitutions des Papes et des Conciles s’évanouissent.
Il est clair, en particulier, que le Magistère doit pouvoir juger authentiquement du sens des termes et des propositions. L’homme ne communique à autrui une doctrine que par les mots. Si donc l’Église ne peut juger infailliblement de leur sens et de leur portée, comment pourra-t-elle défendre la vérité et proscrire l’erreur ? De même, c’est son rôle de prémunir les fidèles contre les livres dangereux et les faux docteurs ; comment le fera-t-elle, si elle ne peut reconnaître et dénoncer certainement ces livres et ces docteurs ennemis de la foi ? Aussi les Apôtres recommandent-ils instamment d’éviter « les discours vains et profanes, la fausse science » (I Tim. VI, 20), et condamnent-ils très précisément tels livres, tels hérétiques (Act. XIX, 19 ; Apoc. II, 14 ; II Tim. II, 16).
Les Jansénistes n’ont pas compris ce rôle nécessaire de l’Église. Certes, ils entendaient bien lui demeurer fidèles : ils condamnaient avec elle les cinq propositions hérétiques ; mais, aveuglés par la passion, ils ne voyaient pas, ce qui pour nous est si clair, que les propositions étaient dans Jansénius. Ils s’obstinaient donc à lire le livre, par suite à s’emplir l’esprit de ses erreurs, et à leur insu, ils s’écartaient de la foi. L’Église prit le seul moyen capable de préserver les âmes ; elle les avertit gravement que de fait les cinq propositions étaient contenues dans ce livre qu’ils ne pouvaient donc garder la foi s’ils ne renonçaient au jansénisme et à Jansénius.
34. L’Église est infaillible dans la canonisation des saints…
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34. L’Église est infaillible dans la canonisation des saints.
CE QU’EST LA CANONISATION C’est un jugement définitif du Pape déclarant qu’un homme jouit de la béatitude céleste, et le proposant au culte de tous les fidèles. Elle diffère donc de la béatification qui n’est pas un jugement définitif, et plus encore des simples inscriptions au martyrologe faites autrefois et où ont pu se glisser des erreurs. Les règles suivies actuellement en cette matière sont dues à Benoît XIV, qui étant encore cardinal (cardinal Lambertini) écrivit en 1747 son remarquable, Traité « De la béatification et de la canonisation des serviteurs de Dieu ». Selon Mabillon, la plus ancienne canonisation officielle est celle de saint Ulrich par Jean XV, en l’an 993 (voir T. 833). Dès les premiers temps de l’Église, on honore les Apôtres, les Martyrs ; à la fin du IVe siècle, on commence à honorer les Confesseurs, tel saint Martin. Chaque Église vénérait ses saints, du consentement ou par le jugement de l’évêque ; puis les diverses Églises se communiquaient leurs listes, et cette «reconnaissance universelle», qui déférait à un personnage les honneurs de la sainteté, équivalait à la canonisation. Notre présente proposition ne s’entend que de la canonisation officiellement décrétée.
PREUVES. LES DOCUMENTS ECCLÉSIASTIQUES.
Le Pontife romain est infaillible quand il édicte une sentence définitive, et qu’au nom de son autorité suprême il oblige les fidèles à tenir une chose pour vraie. Or tel est le cas de la sentence de canonisation : « Par l’autorité de N.-S. J.-C., des Bienheureux Apôtres Pierre et Paul, et la Nôtre, nous déclarons et définissons que N… est saint, nous l’inscrivons au catalogue des saints, et ordonnons que l’Église universelle honore sa mémoire d’un culte pieux… Que personne ne se permette de déchirer cette page de notre définition ; qu’il sache qu’il encourrait l’indignation du Dieu Tout-Puissant ». Une telle sentence est nécessairement infaillible, car il ne se peut que l’Église entière soit astreinte par son chef à honorer un damné ni un homme inexistant.
Notons toutefois que ce jugement infaillible n’exclut pas toute erreur sur certaines circonstances accidentelles de la vie du saint : son nom, détails de sa vie, etc., voire la confusion de deux saints en un seul personnage ou au contraire le dédoublement d’un même unique saint. L’enquête que fait l’Église pour la canonisation est une étude historique où suffit la certitude du même ordre sur la vie et les miracles du saint. Le jugement dogmatique de la canonisation, assuré de l’assistance du Saint-Esprit, dépasse en certitude la condition préliminaire de l’étude historique, sans évidemment la contredire. Ajoutons que depuis longtemps déjà la rigueur des procès de canonisation est telle que même une erreur historique importante y est pratiquement quasi-impossible.
LA RAISON THÉOLOGIQUE. L’Église juge infailliblement des faits dogmatiques or la canonisation des saints en est un. En effet, que tels hommes, par exemple François d’Assise, Vincent de Paul, etc., aient vécu saintement et mérité la vie éternelle, ce sont des faits dont la certitude est une condition requise pour que l’Église puisse dûment proposer aux fidèles la vérité chrétienne. Comment pourra-t-elle leur enseigner, comme il faut, cette vérité révélée que les saints règnent dans le ciel avec le Christ, doivent donc être honorés et invoqués, si elle est incapable de déterminer infailliblement au moins quelques hommes entrés dans la gloire ? Le peuple chrétien sera réduit à un culte vague et peu utile. De plus, la morale évangélique doit être prêchée aux fidèles, non seulement théoriquement mais surtout pratiquement, et par des exemples concrets qui valent mieux que tous les préceptes :Les exemples vivants sont d’un autre pouvoir ;
Un prince dans un livre apprend mal son devoir.
(Corneille, Le Cid, I, 3).
« Dans les actions et les passions humaines, dit saint Thomas, où l’expérience a tant de prix, les exemples meuvent plus que les paroles » (Ia IIæ q. 34, a. 1). C’est la méthode indiquée par saint Paul : « Soyez mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ» (I Cor. XI, 1). Il faut donc que l’Église puisse désigner infailliblement aux fidèles les saints qu’ils imiteront sûrement.
35. Note sur la foi aux faits dogmatiques…
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