Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
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Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Anna Maria Taïgi
La sainte aux sept enfants
Traduit du livre italien TAIGI, la santa con sette figli (Città nuova editrice, 1964)
P. Marcel LITALIEN, o.ss.t. Montréal, 1984
Ils étaient trois de Sienne
" Le saint est mort ! " La nouvelle explose dès les premières heures de la nuit, par des bandes de jeunes garçons de la rue des " Serpenti " ; elle s'infiltre dans toutes les petites rues, à travers les ruelles du quartier " des Monts ", arrive dans les buvettes, grimpe sur tous les balcons, déborde d'une place à l'autre, jusqu'aux confins de la périphérie de Rome. Puis, de la périphérie au centre, en un rien de temps, ce fut un fourmillement de nobles, de pauvres, d'artisans, de prêtres, de soldats, de commerçants, qui affluent vers le quartier " des Monts " rejoignent la foule accourue de partout, à travers la ville, à travers le quartier. On circule toute la nuit, sur la rue des " Serpenti " ; on y circule le jour et la nuit qui suivirent, jusqu'à ce que la dépouille mortelle de Benoit-Joseph Labre, la dépouille du saint, soit transportée dans l'église de Sainte-Marie-des-Monts, pour l'ensevelissement. Un cortège funèbre des plus imposants, suivra la dépouille ; les Romains n'en ont jamais vu de semblable, si ce n'est celui auquel ils avaient pris part lors de la sépulture de saint Philippe Néri.
Benoit-Joseph Labre était, depuis longtemps, une personnage familier et apprécié des romains, de ceux surtout qui habitaient ce vieux quartier alors le plus populeux et le plus pauvre de la ville. Pas un homme, pas une femme, pas un enfant qui ne le connut pas, aux Monts, pour l'avoir vu presque tous les jours, encore jeune cependant, courbé sous la souffrance et par les privations, maigre comme un ermite et vêtu de haillons, se traîner dans les venelles, se hâter vers cette église qui conserverait sa dépouille.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Benoit-Joseph Labre était né, 35 ans auparavant, dans un petit village de campagne perdu dans on ne sait quelle contrée de la France. Rapidement, il avait voué sa vie à la pénitence et aux pèlerinages dans les routes interminables de France, de Suisse, d'Espagne, d'Allemagne. Il s'adonna à cette pratique, jusqu'à l'épuisement de ses forces ; se traînant les pieds, il s'est oriente vers l'Italie, a traversé le pays par bien des chemins peu connus, et il a fini par atteindre Rome où, depuis lors, il avait passé ses journées à prier dans l'une ou l'autre des nombreuses églises, dans celle de Sainte-Marie-des-Monts qu'il affectionnait de façon particulière. Il avait passé ses nuits sous l'escalier d'une mansarde, sous les murs du Quirinal ou un arc quelconque du Colisée.
C'est précisément, en sortant de l'église de Sainte-Marie-des-Monts que, le 16 avril 1783, Benoit-Joseph Labre s'affaisse mourant, sur les marches de pierre de la façade de cette église. Quelqu'un accourt immédiatement, quelqu'un s'offre à le transporter dans sa maison, à le déposer sur une paillasse, rue des Serpents. Mais le saint agonisait dans un état irrémédiable et il mourut à 8 heures du soir. La nouvelle se répandit dans la rue, par la fenêtre, et les bambins cessèrent alors leur vacarme habituel du soir, pour se faire les hérauts de la nouvelle sensationnelle qui s'est vite répandue dans les quartiers, dans presque toute la ville : " Le saint est mort ! le saint est mort ! "
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Dans l'intervalle, on s'affairait à préparer le grand pèlerinage qu'occasionnerait l'inhumation du pénitent. Il se trouva quelqu'un pour dire que ce pauvre devait être nettoyé, revêtu et bien disposé, comme la piété l'exige en pareille circonstance. On suggéra le nom de Santa Giannetti, une pauvre mais brave domestique, habituée à ce genre d'actes de charité. Elle habitait à quelques pas de là, dans la rue " delle Vergini ". Il s'agissait de la faire demander.
Ils y allèrent ; et elle vint, accompagnée d'une jeune fille admirable, sa fille Anne Marie, âgée de quatorze ans, aux vêtements délicats et élégants pour autant. A l'observer de plus près, on remarquait sur son visage, les séquelles, caractéristiques de la variole.
Anne-Marie se tenait à l'écart, pour permettre à sa mère d'accomplir sa tâche. La maman enleva pieusement les haillons de ce corps consumé par les maladies et les mortifications, le lava avec l'aide de l'abbé Marchesi, lui mit des vêtements propres et le revêtit de la bure de la Compagnie de Notre-Dame-des-Neiges, avec lequel il fut ensuite enseveli.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Santa Giannetti et sa fille Anne-Marie n'étaient pas originaires de Rome ; comme Joseph-Benoit, elles venaient de l'extérieur, mais pas d'aussi loin que le saint pénitent français. Les deux cents kilomètres de chemin à parcourir pour en arriver à ce vieux quartier bruyant et misérable, elles les avaient tous, l'un après l'autre, parcourus à pied.
Elles venaient de Sienne où elles avaient habité une maison beaucoup plus accueillante que celle qui les hébergeait, rue " delle Vergini ". Leur existence était aussi beaucoup moins misérable, si on en juge par les contraintes de la vie qui était la leur, à ce moment-là.
À Sienne, le vieux Pierre Giannetti en était venu à se pourvoir d'une pharmacie de premier ordre. Il dut y investir des heures, des années de travail, des années d'épargne, pour en arriver, à la fin, à mettre la main sur une boutique parmi les plus belles de Sienne et de toute la Toscane. Des clients affluaient de partout, quand les médecins, dans les cas les plus compliqués, prescrivaient des potions et des liniments spéciaux qui dépassaient les prescriptions banales de la pharmacopée d'usage commun.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Louis Giannetti, le fils du pharmacien et pharmacien lui-même, hérita, à la mort de son père, d'un nom honorable, d'une fortune des plus enviables. Malheureusement, il n'avait pas comme son père, le tempérament discipliné, le sens de l'épargne, l'aptitude à ne pas compter les heures de travail. Dans l'espace de quelques années, il accumula des dettes qui finirent par lui rendre la vie impossible ; il en vint à la faillite.
Avec son peu de jugement, sa bonhomie extravagante, sa naïve prodigalité, le pire malheur lui arriva, celui d'entraîner dans la misère sa propre existence, celle de sa femme Santa, siennoise comme lui, son unique fillette qui lui était née six mois plus tôt, le 20 mai 1769, dans la belle maison de la rue " San Martine ", et avait été baptisée dés le lendemain, dans l'église paroissiale Saint-Jean-Baptiste, avec les noms : Anne-Marie, Antonia, Gesualda.
Cette même année 1769 qui avait vu naître Anne-Marie, avait aussi vu naître à Ajaccio, dans l'île de Corse, le " protagoniste exceptionnel de l'histoire ", celui qui déciderait, d'une façon tragique, de la vie et de la mort de la moitié de l'Europe. Les chroniqueurs de l'époque qui ne possédaient pas les vertus des prophètes, ne pouvaient prévoir ni annoncer les événements futurs, sur un ton apocalyptique.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Anne-Marie et Napoléon, nés la même année, sont des êtres humains, des créatures bien distinctes, aux destinées totalement différentes. Les desseins impénétrables de Dieu les feront se rencontrer dans le même sillon de l'histoire. Appelés à se rapprocher, l'un de l'autre, ils firent la preuve d'attitudes opposées à l'égard du pontife romain.
Elle avait grandi comme un ange, la fillette de Louis et de Santa Giannetti. Qui la voyait circuler dans les rues de Sienne, la petite-main dans la main délicate de sa maman, ne pouvait que s'arrêter pour l'admirer. " On la dirait fille d'un prince, non celle du pharmacien désaxé " disaient des gens émerveillés de la douceur, de la beauté des traits de son visage.
Anne-Marie n'était pas splendide que par les traits de son visage ; depuis sa tendre enfance, sa maman alimentait en elle la flamme la plus pure de l'amour de Dieu, l'enrichissait intérieurement, en modelant son caractère, en lui inculquant le sens du devoir, de la responsabilité, en l'amenant à agir sérieusement, sans porter atteinte à sa joie, à la vivacité débordante dont elle a toujours fait preuve.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Puis, vint la déchéance économique, la famine à la maison, le découragement de papa Louis au dehors, face à la torture de ne pouvoir se soustraire à la chasse de trop de créanciers qui le harcelaient sans relâche, ne lui donnaient pas le temps et les moyens de se mettre lui-même en chasse, comme il l'aurait voulu, contre ses nombreux débiteurs. En somme, en peu de mois, le sol de Sienne brûla à un point tel, sous les pieds des Giannetti, qu'il ne leur restait qu'une alternative, celle de fuir.
Mais une fuite lointaine, sous d'autres cieux, parmi des gens inconnus, pouvait-elle faire oublier le souvenir amer de la tranquille aisance perdue ? Quitter pour Florence, Livourne, Pise, Lucques, Arezzo, était trop proche ; il fallait aller plus loin, encore plus loin : à Rome !
En 1775, de longues colonnes de pèlerins venant du nord de la péninsule et de toutes les parties de la vieille Europe empruntaient les routes de Toscane et se déplaçaient vers Rome. Le pape Pie VI avait inauguré son pontificat solennellement, en ouvrant la porte sainte de la basilique Saint-Pierre ; l'avantage de gagner les indulgences de l'Année Sainte était offert.
A suivre...
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Le conclave avait duré cinq mois, des mois éternellement longs qui témoignaient des incertitudes dramatiques de cette douloureuse époque. À la fin, à l'annonce que le cardinal Braschi était élu pape, le peuple romain avait donné libre cours à une joie irrésistible ; elle débordait jour et nuit, en festivités d'une ardeur irrépressible.
" Vive le pape Braschi, vive Pie VI ". Toutes les rues de Rome faisaient des souhaits à l'homme extraordinaire que chacun, du prince au simple palefrenier, connaissait, estimait, aimait, parce qu'il était doux autant qu'énergique, rempli de sollicitude autant que de dignité.
Peu de temps après l'inauguration de l'Année Sainte, le peuple romain, de l'intérieur, s'efforçait de rendre la vie très intéressante aux foules de pèlerins. Et pendant que d'un côté, les autorités assuraient le ravitaillement des magasins pour qu'en aucun temps, on ne soit privé de denrées alimentaires, d'un autre côté, elles avaient recours à des mesures très énergiques, dans le but de dissuader les exploiteurs possibles, de les amener à mettre un frein à leur trop grande avidité. Elles tentaient de les maintenir au niveau de la nécessité ; des groupes de citoyens volontaires attendaient les colonnes de pèlerins au débouché des grandes routes, pour les conduire dans de bons logements. On pourvoyait à leurs besoins, toute la durée de leur séjour à Rome. Et ce ne fut pas une mince organisation, si on pense qu'en cette année et en ces moments, comme l'attestent les chroniqueurs d'alors, le nombre de pèlerins s'élevait à 280,000. La plupart, venus et retournés à pied.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Puis, vint la déchéance économique, la famine à la maison, le découragement de papa Louis au dehors, face à la torture de ne pouvoir se soustraire à la chasse de trop de créanciers qui le harcelaient sans relâche, ne lui donnaient pas le temps et les moyens de se mettre lui-même en chasse, comme il l'aurait voulu, contre ses nombreux débiteurs. En somme, en peu de mois, le sol de Sienne brûla à un point tel, sous les pieds des Giannetti, qu'il ne leur restait qu'une alternative, celle de fuir.
Mais une fuite lointaine, sous d'autres cieux, parmi des gens inconnus, pouvait-elle faire oublier le souvenir amer de la tranquille aisance perdue ? Quitter pour Florence, Livourne, Pise, Lucques, Arezzo, était trop proche ; il fallait aller plus loin, encore plus loin : à Rome !
En 1775, de longues colonnes de pèlerins venant du nord de la péninsule et de toutes les parties de la vieille Europe empruntaient les routes de Toscane et se déplaçaient vers Rome. Le pape Pie VI avait inauguré son pontificat solennellement, en ouvrant la porte sainte de la basilique Saint-Pierre ; l'avantage de gagner les indulgences de l'Année Sainte était offert.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Le conclave avait duré cinq mois, des mois éternellement longs qui témoignaient des incertitudes dramatiques de cette douloureuse époque. À la fin, à l'annonce que le cardinal Braschi était élu pape, le peuple romain avait donné libre cours à une joie irrésistible ; elle débordait jour et nuit, en festivités d'une ardeur irrépressible.
" Vive le pape Braschi, vive Pie VI ". Toutes les rues de Rome faisaient des souhaits à l'homme extraordinaire que chacun, du prince au simple palefrenier, connaissait, estimait, aimait, parce qu'il était doux autant qu'énergique, rempli de sollicitude autant que de dignité.
Peu de temps après l'inauguration de l'Année Sainte, le peuple romain, de l'intérieur, s'efforçait de rendre la vie très intéressante aux foules de pèlerins. Et pendant que d'un côté, les autorités assuraient le ravitaillement des magasins pour qu"en aucun temps, on ne soit privé de denrées alimentaires, d'un autre côté, elles avaient recours à des mesures très énergiques, dans le but de dissuader les exploiteurs possibles, de les amener à mettre un frein à leur trop grande avidité. Elles tentaient de les maintenir au niveau de la nécessité ; des groupes de citoyens volontaires attendaient les colonnes de pèlerins au débouché des grandes routes, pour les conduire dans de bons logements. On pourvoyait à leurs besoins, toute la durée de leur séjour à Rome. Et ce ne fut pas une mince organisation, si on pense qu'en cette année et en ces moments, comme l'attestent les chroniqueurs d'alors, le nombre de pèlerins s'élevait à 280,000. La plupart, venus et retournés à pied.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Au nombre des 280,000 pèlerins, figuraient trois fugitifs animés par une motivation secondaire. Il s'agit de Louis, Santa et Anne-Marie Giannetti qui, se faufilant à travers un groupe d'étrangers, aux premières lueurs de l'aube, tentent d'éviter tout soupçon parmi les Siennois. Ils apportent très peu de choses ; un baluchon et rien en poche. Ils font une halte à Radicofani et, de là, poursuivent leur route par Acquapendente, Bolsena, Montefiacano, Viterbe ; des jours et des jours de marche éreintante sur les bords d'une interminable route où se meuvent dans la poussière, le père en avant, la mère derrière, avec la fillette de 6 ans à sa charge, agrippée par la main à son vêtement. Ils se trouvèrent enfin réunis aux portes de Rome, où ils furent mis sous la protection d'un groupe de citoyens qui, en un tour de main, avaient résolu pour eux, comme pour les autres pèlerins, leurs problèmes, à commencer par celui du logement, un problème qui, à première vue, semble insoluble à quiconque arrive, inconnu et privé de tous moyens, dans une ville immense et ignorée.
Pour Anne-Marie, le problème des problèmes était unique, à ce moment : s'arrêter, fermer les yeux et dormir. La petite avait atteint Rome littéralement brisée de fatigue, les cheveux blanchis par la poussière, les souliers percés, les pieds ensanglantés. Elle ne vit rien de la grande ville, rien de ses monuments fascinants et de ses rues joyeuses d'un monde aimable et rieur. Elle vit enfin une petite porte basse dans la via " delle Vergini " et un petit escalier qui, dans l'ombre, de biais, menait là-haut. Elle trouve la force de monter ce sombre escalier parce qu'elle avait deviné qu'au dessus, un lit l'attendait. Et quand elle l'aperçut, le petit lit tellement désiré, elle eut à peine la force de se jeter dessus. Et déjà, elle dormait d'un sommeil profond comme elle n'en avait jamais eu.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Les jours et les semaines passèrent et le logis de la " Via delle Vergini ", qui ne devait être qu'un refuge provisoire pour les pèlerins, le temps de bénéficier des indulgences et de repartir, devint, pour les Giannetti, leur logement définitif. Pour prendre racine en quelque point de ce monde, il faut pouvoir se sauver ; et pour se sauver, il n'y a qu'à travailler. Le raisonnement sonnait plus que logique pour maman Santa. Le papa Louis qui avait quitté Sienne avec tout l'imbroglio que nous connaissons, ne pensait pas autrement ; il croit à l'importance du travail mais se préoccupe davantage de la chasse à la fortune qu'on ne saisit pas toujours comme on saisit un papillon sur le coin des rues, pas plus à Rome et encore moins dans ce pauvre quartier " des Monts " quand on ne sait où donner de la tête à la suite des ennuis causés à Pierre, son père, profondément déçu de son fils.
Comme le papa Louis continue à se nourrir de chimères, il incombe à maman Santa de gagner le véritable pain quotidien. Elle le fit avec un sens paisible de la réalité ; de l'élégante dame qu'elle était, elle se transforme en une infatigable domestique à temps partiel, un peu par ici, un peu par là, auprès de cette famille-ci, de cette famille-là, afin d'y gagner une poignée de menue monnaie qu'elle apportera le soir à la maison, assurant ainsi sa propre subsistance, celle de son mari, et de sa fillette, au cours de la journée qui suivra.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Santa fera davantage pour cette dernière ; en plus de lui assurer son pain quotidien, elle se souciera de son éducation, de son instruction. Le temps venu, elle la prend par la main et la conduit " Via Graziosa " à l'école Sainte-Agathe. Cette école s'appelait ainsi parce qu'elle était érigée prés de la vieille église Sainte-Agathe-des Goths, une église du quartier des " Monts ". C'était une école très importante, florissante, renommée dans toute la cité ; elle était le lieu d'aboutissement de plusieurs autres écoles de garçons et de filles, détachées mais reliées à elle, dans les différents quartiers de Rome, toutes fondées par une dame remarquable de jugement et de vertu : Lucia Filippini, siennoise elle-même.
Cette dame avait réuni autour d'elle un groupe de religieuses et de laïques non liées par des vœux, leur avait infusé son enthousiasme et son engagement. Ces laïques n'étaient pas missionnaires au sens strict ; elle les avait engagées dans la mission de soustraire à la rue les enfants pauvres et bien d'autres, de les éduquer à une vie honnête, de les intéresser à un métier profitable. Le menu peuple l'avait vite surnommée " la pieuse maîtresse, la sainte institutrice " par qui s'exerçait l'action providentielle, de Dieu.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
La méthode que Lucia Filippini appliquait dans ses écoles, en accord avec le cardinal Grégoire Barbarigo, réussissait à doser avec une admirable sagesse le travail et la prière, la culture et la pratique d'une vie chrétienne vécue. Les jeunes gens et les jeunes filles, leurs études terminées, sortaient de ces écoles, avec un bagage intéressant de connaissances et de savoir-vivre. Ils savaient lire, écrire, compter, possédaient une solide formation spirituelle, un grand amour pour le travail, un sens profond de leurs responsabilités, aux plans individuel, familial, social.
À l'école-mère de Sainte-Agathe où affluaient alors les jeunes de 7 à 14 ans de toutes les parties du vieux quartier, Anne-Marie Giannetti excellait dans la lecture ; elle sera, toute sa vie, une lectrice acharnée. Elle apprit, avec une facilité exceptionnelle, la doctrine chrétienne et tout ce qui a trait à la religion. On dira, plusieurs années après, qu'elle récitait de mémoire, à merveille, les psaumes, en savait autant qu'un curé et pouvait être un professeur dans l'intérêt de tous ; elle pouvait enseigner à quiconque. Elle s'initia aussi aux travaux de la cuisine et à ceux de la maison. Elle s'ingénia à séparer la soie, à l'enrouler en bobines ; c'était un métier prometteur, à cette époque où la machine n'avait pas encore remplacé les mains. Les usines, en effet, n'avaient pas encore liquidé l'artisanat domestique. Par contre, elle n'eut pas le temps d'apprendre à écrire ; la petite vérole la frappa et retarda ses études. Mais la variole, si elle gâta l'éclat tout simple de son visage, ne réussit pas à en détruire la beauté ; des traits délicats et de douces lignes suffirent à la lui conserver.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
A 11 ans, la petite Anne-Marie entra dans la basilique de Saint-Jean-de-Latran et elle y fut confirmée. À 13 ans, elle fit sa première communion dans léglise saint-François-de-Paule, au quartier " des Monts ". Elle désirait ardemment et depuis longtemps se nourrir au banquet sacré, mais il fallait alors attendre au moins jusqu'à la fin de cet âge.
À 14 ans, survint l'épisode qui devait influer sur toute sa vie : l'événement grandiose du pèlerinage de tout Rome auprès de la dépouille mortelle de saint Benoit-Joseph Labre.
Anne-Marie connaissait bien le " saint ", elle avait perçu dés ses premiers contacts avec lui toute sa grandeur spirituelle. Mais ce ne fut que devant la dépouille vénérée, à la vue de l'humble témoignage d'amour que lui offrait sa maman accourue sans sourciller pour nettoyer ses plaies, revêtir ses membres, q'intervint dans le cœur de la fillette, quelque chose de si profond, quelle en a été marquée pour le reste de sa vie.
Le temps qui suivit n'annonça pas d'éclaircie dans le petit firmament de la famille Giannetti, même si ce brave homme, papa Louis, s'était finalement décidé à se faire serviteur, en parole plus qu'en vérité. Tout emploi qu'il trouvait, durait peu. En somme, serviteur à temps perdu, il avait besoin, disait-il, de liberté, pour ne pas courir le risque de se laisser passer la fortune sous le nez, le jour où elle serait à sa portée.
Maman Santa était toujours hors de la maison, à s'éreinter là où elle était requise. Elle y trouvait cependant son épanouissement, du matin au soir ; et les quelques sous quelle réussissait à glaner, suffisaient pour nourrir chaque jour, de pain et de viande, les trois personnes, y compris la fillette devenue grande.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Au jugement de Santa, il était temps qu'Anne-Marie aussi se perfectionnât dans les travaux féminins. Elle serait en mesure de la remplacer totalement, à la maison ou, bien sûr, de s'engager demain auprès de quelqu'un, de laider, avec son salaire, à maintenir à flot cette barque familiale démantibulée, qui prenait eau par tous les coins.
Ainsi, Santa Giannetti confia Anne-Marie à deux vieilles dames laborieuses autant qu'estimées, qui avaient ouvert un modeste ouvroir dans le but d'apprendre aux jeunes filles désireuses de s'initier aux divers travaux quil importait alors de connaître, et de se rendre aptes à les exécuter. De plus, elles faisaient participer leurs élèves aux revenus de leur entreprise.
Anne-Marie y demeura environ six ans. Le climat était absolument sain, j'oserais dire " spirituel ". Les deux bonnes maîtresses savaient le susciter et le maintenir. Elle apprit à faufiler, à préparer les repas, à confectionner des corsets, des vêtements et, finalement, des chaussures.
Anne-Marie se jeta donc corps et âme au travail, se souciant en même temps de son cheminement spirituel, des progrès à réaliser dans la pratique des vertus. C'est au cours de ces années, de ses allées et venues, de sa demeure à louvroir, qu'elle eut fort à faire ; belle comme elle était, il lui fallait se soustraire à des pièges plus ou moins subtils, des pièges dont sont, par malheur et en tout temps, exposées les jeunes filles du peuple des grandes villes, quand elles sont ornées de grâce et d'amabilité. Anne-Marie était d'autant plus exposée que, à ces deux dons, s'en ajoutait un troisième, d'attrait indiscutable : la suavité de sa douce voix siennoise.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Anne-Marie quitta l'atelier de couture, quand elle sut qu'elle devait se dévouer entièrement à la maison, pour permettre à sa mère de respirer un peu, de se remettre des longues fatigues qui l'accablaient, des chagrins continuels, des gênes économiques qui avaient fini par épuiser les forces de la pauvre femme ; sans oublier l'étiolement de son âme, l'aigreur de son caractère qui était pourtant si doux et si serein.
Après un certain temps, Anne-Marie en arrive à la conclusion qu'elle pourrait apporter une aide encore plus grande à sa famille, si elle s'engageait comme fille de chambre auprès d'une dame quelconque. En plus de ses deux bras, elle offrira à ses parents un peu d'argent qui remédiera au malaise qui se fait sentir.
Elle en parle à sa maman qui partage sans plus ce dessein, parce que ce qui lui pèse le plus sur l'âme, c'est la préoccupation de devoir laisser seule, durant de longues journées, cette jeune fille bénie, sans surveillance, sans défense, devant des assauts possibles que pouvait provoquer sa beauté. On sait que le pollen attire les abeilles... " Mieux vaut la savoir en sécurité dans une maison fiable " ; Santa bénit la proposition d'Anne-Marie.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
En ces jours, papa Louis était entré dans une de ses périodes de résipiscence : il s'était mis au service, et cette fois-ci, ça semblait sérieux, d'une dame Maria Serra Marini qui habitait au palais Maccarini, au pied du Quirinal, du côté de la Fontaine de Trevi. Elle était une dame dont on disait beaucoup de bien, pendant que d'autres la trouvaient distante et sévère.
Un soir, Louis piqua une pointe à la maison et, parlant de la pluie et du beau temps, il en vint à dire que sa patronne cherchait une femme de chambre. Aussitôt dit, aussitôt fait, dès le lendemain matin, Anne-Marie, parée de ses plus belles toilettes. les cheveux arrangés avec une certaine élégance, avec laide de sa mère, papa Louis lui dit : " La première impression compte pour beaucoup, ma fille ! ". Flanquée de son père, elle fait son entrée au palais Maccarini.
La première impression eut certainement un effet positif. La jeune fille se comporta d'une façon telle qu'elle gagna l'estime et l'affection, difficiles à obtenir, de Donna Maria Serra Marini. Maman Santa crut toucher le ciel du doigt et crut quenfin, elle se sentirait tranquille parce que des lors, sa fille serait bien gardée.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Malheureusement, les choses se présentèrent bien autrement : les pièges et les assauts se multipliaient derrière les murs sévères du palais Maccarini, et ce, peu de temps après son arrivée.
Elle se rendit compte des périls qui la menaçaient et opposa une résistance courageuse qui s'appuyait sur les énergies que sa foi pouvait lui fournir. Elle en vint à se convaincre que l'unique bouclier derrière lequel elle pouvait définitivement préserver son honnêteté, était le mariage.
Ceci dit, elle comprit que le Seigneur avait déjà mis sur son chemin, l'homme destiné à devenir le père de ses enfants. Cet homme, un peu plus âgé qu'elle, mais pas vieux du tout, c'était Dominique Taïgi qui venait tous les jours accomplir quelque mission de la part de ses patrons, auprès de la Dame Maria Serra Marini.
Dominique lui avait manifesté une certaine sympathie qui tranchait sur les élans trop intéressés, manifestés par beaucoup d'autres.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Les voix et le soleil
" Anne-Marie, que demandes-tu ?
Le Père Ferdinand de Saint-Louis, trinitaire déchaussé, avait pris place, prés de l'autel, du côté de l'Évangile, en étole et surplis blancs. Autour de lui, étaient réunis tous les religieux du couvent, dans leur longue tunique blanc-crème, la croix rouge et bleue sur la poitrine.
Sous l'architecture bizarre de Borromini, dans la pénombre de Saint-Charles-aux-Quatre-Fontaines, la foule se pressait, ne voulait perdre aucun détail de la belle cérémonie qui se déroulait au début de ce splendide matin du 26 décembre 1808, fête de saint Etienne.
La demande du Père Ferdinand résonna très claire, dans tous les coins de l'église. L'émotion de la dame agenouillée sur le marchepied de l'autel, une émotion qui s'exprimait par des soupirs et des sanglots, se calma comme par enchantement. Elle était d'une rare beauté malgré ses trente-neuf printemps, le dévouement déployé auprès de ses six enfants, la rigoureuse modestie de ses vêtements.
" Anne-Marie, que demandes-tu " ?
" L'habit du tiers-Ordre de la Très-Sainte-Trinité et la miséricorde de Dieu ". La voix de la postulante était celle de toujours, vibrante et ferme, délicieusement caractérisée par l'accent pur et doux de la région de Sienne.
" As-tu la ferme volonté de le porter avec dévotion, jusqu'à la mort " ?
" Oui, Père, avec l'aide de Dieu ".
À ce " oui ", le Père Ferdinand se leva et tourné vers l'autel, prononça quelques prières. Il aspergea ensuite d'eau bénite, un scapulaire à la croix rouge et bleue qu'il présenta à la dame pour qu'elle le baisât.
" Que le Seigneur te dépouille du vieil homme, avec toutes ses actions, te revête de l'homme nouveau créé dans la vraie justice, et la vraie sainteté " ajouta le Père Ferdinand. Il lui imposa alors le scapulaire sur les épaules en disant : " Reçois l'habit de la Très Sainte Trinité, au nom du Père, du Fils, du Saint-Esprit ".
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
On considérait la cérémonie terminée, même si à l'arrière, d'autres prières étaient récitées. Le tout atteint son point culminant par le chant du " Veni Creator Spiritus ". La coupole de l'église Saint-Charles l'accueillit dans son élan audacieux vers le ciel, pour l'emporter dans l'infini.
À l'époque de sa vêture, dans cette église des trinitaires déchaussés qui occupe un angle du célèbre carrefour romain des Quatre-Fontaines, Anne-Marie comptait dix-huit ans de mariage.
Ses fiançailles avec Dominique n'avaient duré que quarante jours. Et la rapidité avec laquelle avaient été célébrées les noces, avait suscité une kyrielle de critiques et de commérages sur le compte de la jeune fille. Mais, Anne-Marie était d'avis et elle le sera dans l'avenir, avec ses propres filles, qu'une fois le choix fait, compte tenu de la religion, de l'honnêteté de l'époux, il faut éviter les longues fréquentations à la maison, se hâter, agir pour le mieux ; laisser traîner les choses en longueur, donne, de part et d'autre, naissance à des ennuis, et il en ressort de funestes conséquences.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
De son homme, Anne-Marie avait soupesé les qualités et les défauts. Sur un plateau de la balance, elle avait déposé les manières rustres, la grossièreté du langage, l'entêtement opiniâtre, le caractère querelleur et violent, la médiocrité du talent. Sur l'autre, elle avait placé la belle apparence, la force robuste, et surtout, la bonté d'âme qui se cachait sous cette écorce rude, les fermes convictions religieuses de ses mœurs. La balance pencha du côté des qualités.
Dominique Taïgi, même si à converser avec lui, on ne l'eut jamais soupçonné, était la dernière pousse, l'ultime rameau d'un arbre généalogique d'anciennes et célèbres familles nobles. La famille Taïgi s'était distinguée en Lombardie, avait obtenu des franchises et des distinctions des ducs de Milan, avait fourni des personnages illustres dans le domaine de la science, plus particulièrement. Dans le cours des siècles, les différents rameaux s'étaient plus ou moins desséchés. Un seul survivant qui, le 18 octobre 1761, avait vu naître Dominique à Castaeggio, dans la Valtellina.
Ainsi, Dominique était venu à Rome pour trouver la fortune mais elle ne lui avait pas souri. Cependant, il y avait trouvé du travail et avait appris immédiatement à s'adapter comme serviteur et commissionnaire de confiance dans la maison des princes Chigi. Son salaire : six écus par mois et les restes de la table des patrons qui devaient, cependant, être répartis entre les nombreux serviteurs, parmi lesquels existait un ordre de préséance. Plusieurs devançaient le commissionnaire ; l'ordre hiérarchique prévu par un accord tacite, était rigoureusement observé dans tous les palais des familles patriciennes de Rome qui existaient à l'époque. Dominique ne pouvait donc pas compter sur le meilleur des restes et la quantité était loin d'être assurée.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
Sa décision prise, Anne-Marie demanda le consentement de ses parents. La maman Santa le lui donna immédiatement et avec joie. Moins enthousiasmant fut le " ça-va ! " du papa Luigi qui, sans doute, aurait espéré davantage pour sa jolie fille, et souhaité un peu plus de réflexion. L'approbation des parrains est aussi immédiatement accordée et la donna Maria Marina, d'un côté, le prince Chigi de l'autre, couronnèrent leur assentiment par un cadeau princier.
Plus libéral, le prince concéda aux deux époux l'usage d'un petit appartement dans son palais " al Corso ", à l'angle de la place Colonna. Les deux chambrettes et la cuisine étaient situées dans la partie réservée au service ; les fenêtres donnaient sur la venelle du Sdrucciolo. C'était une faveur qui avait cependant, une contrepartie.
Le prince s'organisait pour avoir toujours près de lui, jour et nuit, comme il en avait toujours été jusque là, son fidèle serviteur qui demeurera au rang qu'il occupait depuis son entrée en service. Il l'appréciait à un point tel, qu'il se faisait suivre par lui, lors des conclaves, quand il y accédait à titre de maréchal.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
La cérémonie des noces fut des plus simples, à l'image des gens du peuple. Elle eut lieu le 7 janvier 1790. Dominique Taïgi, 28 ans, du diocèse de Como, et Anne-Marie Giannetti, 20 ans et sept mois, de Sienne, s'unirent en mariage, avec la bénédiction de l'abbé Massetti, dans léglise Saint-Marcel de Rome.
Les premiers mois de mariage furent plutôt désordonnés, sans souci du lendemain, plutôt bohèmes ; ils ont, du moins, semblé tels, pour un bout de temps. En réalité, les choses se passèrent ainsi : Dominique s'était enflé la tête d'orgueil, tel un paon. Cet orgueil venait du fait qu'il avait épousé une si belle jeune fille. Il ne se rassasiait pas de se pavaner en public, l'ayant à ses côtés. Il allait de long en large sur le " Corso ", à telle ou telle fête, au théâtre, sur la Place Saint-Pierre, le dimanche. Il voulait que son Anne-Marie se vête des robes les plus élégantes que la donna Maria Serra Marina mettait de côté, même si elles étaient presque neuves, pour les lui donner, à part celles qu'il achetait lui-même, en tenant compte de la mode qu'adoptaient les nobles dames qui fréquentaient le palais Chigi.
Il rognait ainsi le magot d'argent que ses années de service lui avaient permis d'accumuler. Pour atteindre son but, il épargnait plus que tout autre, plus qu'lsaac le regrattier. Il en est venu, malgré ses épargnes, à être sans le sou pour acquérir un anneau d'or, une paire de boucles d'oreilles, une chaîne d'or, une chaîne de perles. Il ne pouvait ajouter quoi que ce soit, à la chaîne dor, à la chaîne de corail qu'Anne-Marie reçut en cadeau, de sa patronne, à l'occasion des noces. Ces bijoux, Anne-Marie les portait avec joie, était heureuse d'en faire l'étalage, parce que pour Dominique Taïgi, l'élégance de sa femme comptait pour beaucoup.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Anna Maria Taïgi - La sainte aux sept enfants.
D'autre part, Anne-Marie, depuis le jour de son entrée sous le nouveau toit marital, avait considéré Dominique comme son maître et son seigneur ; elle lui vouait une obéissance affectueuse, une soumission aimante dont elle avait toujours fait preuve, à l'égard de ses propres parents.
Elle comblait ses désirs et allait même au delà ; ce qui ne troublait en rien, son sens rigoureux de l'honnêteté. Elle se complaisait dans les attitudes de son mari, parce qu'elle nourrissait en elle-même, une certaine vanité innée, une joie explosive de vivre, qui allait dans le sens de son caractère jovial et éveillé, de son goût tout à fait toscan, pour les choses éclatantes, les habits élégants.
Puis, avec le temps, la durée de quelques mois, vinrent le repentir, le trouble grandissant, l'angoisse, dans les profondeurs de l'âme. Anne-Marie était cependant certaine de ne pas offenser directement le Seigneur par sa vie joyeuse, vaniteuse ; elle n'en éprouvait pas tellement de regret.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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