DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon

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Message  Monique Ven 25 Déc 2020, 9:30 am

Il est vrai qu'il y a eu quelques saints dans des sentiments contraires ; mais c'était dans des temps où ce mystère n'était pas encore assez connu. Ils disaient que la fête qui en était célébrée, n'était pas approuvée des Souverains Pontifes ; ils disaient qu'il n'y avait que des églises particulières qui en faisaient la solennité. Mais ces raisons pourraient-elles aujourd'hui avoir quelque force, puisque la fête est reçue par le Saint-Siège, et de toute l'Église universelle ? De plus, il y a de graves auteurs, et des chroniques d'un grand ordre, qui rapportent que ces saints paraissant visiblement après leur mort, se sont rétractés de leurs opinions, et ont avoué la vérité de la Conception Immaculée.

L'on peut encore remarquer que les oppositions de ces saints n'ont servi qu'à faire paraître avec plus d'éclat la pureté sans tache de la bienheureuse Vierge en sa conception toute sainte : car si l'on objecte que leur autorité est grande, c'est ce qui doit persuader davantage la vérité qu'ils ont impugnée, quoi qu'avec respect, puisque toutes les écoles de théologie ayant tant de déférence pour leur doctrine, si elles ne la suivent pas en quelque matière, c'est une des marques les plus fortes que l'on puisse avoir qu'elle n'est pas vraie.

Mais y a-t-il rien de plus puissant, pour nous convaincre les esprits, que l'inclination générale de l'Église universelle ? Si elle parle du péché originel dans le dernier concile œcuménique, elle déclare qu'elle n'y comprend pas l'immaculée Mère de Dieu. Dès les premiers siècles, le grand saint Augustin a enseigné que lorsqu'il s'agit du péché il ne voulait en aucune façon parler de la bienheureuse Vierge. Et, de vrai, le Saint-Esprit ne lui dit-il pas, dans les Cantiques, qu'elle est toute belle et sans aucune tache ? Et ne pouvons-nous pas assurer avec justice que c'est ce même Esprit qui unit les esprits de presque tous les fidèles, pour conspirer unanimement à la pieuse croyance de cette vérité ? En sorte que, si l'on demande à tous les peuples qui viennent en foule louer le Seigneur en sa sainte Mère par toute la terre habitable, en autant de lieux qu'il y a des églises, le jour de la fête de sa Conception, ce qu'ils viennent honorer en la solennité de ce mystère, sans doute qu'ils répondront qu'ils ont dessein d'honorer la Conception Immaculée de la Mère de Dieu. Et en cette rencontre, toutes les chaires de nos temples retentissant de cette vérité, toute la terre fait comme un écho à toutes les voix qui s'y font entendre, répétant cette vérité, qui s'y publie par autant de bouches qu'il y a de personnes qui les écoutent.

Ajoutons à ceci que les souverains pontifes ont approuvé l'office de l'immaculée Conception, qui se fait dans tout l'ordre de Saint-François, non-seulement le jour de la fête, mais tous les samedis de l'année, hors le temps de carême, quand ils ne sont pas empêchés par quelque fête ; qu'il y a des ordres institués en l'honneur de ce mystère, de grandes indulgences accordées à ceux qui y ont une dévotion spéciale.


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Message  Monique Sam 26 Déc 2020, 9:05 am

Davantage le ciel conspire avec la terre pour l'établissement d'une si sainte dévotion, qu'il ne peut autoriser plus efficacement que par le grand nombre de miracles qu'il fait en sa faveur. Le fameux Avila, prédicateur apostolique d'Espagne, qui vivait dans une extrême pauvreté, n'ayant rien et ne possédant rien, quoiqu'il ne fût pas religieux, mais prêtre dans le siècle, annonçant d'une force merveilleuse les vérités de l'Évangile, exhortait tous les fidèles à la dévotion de la toute sainte Conception, et assurait que c'était un singulier moyen pour être délivré de l'impureté, rapportant de grands miracles que Dieu, tout bon, faisait pour soutenir une dévotion si avantageuse à sa très-sainte Mère. Ces miracles continuent tous les jours, et il y a peu d'années qu'il s'en est fait d'admirables.

La séraphique Thérèse avait une dévotion très spéciale à ce privilège de la glorieuse Vierge ; et c'est une des plus anciennes dévotions de l'ordre du mont Carmel, qui tient par tradition que la connaissance en avait été donnée par révélation au saint patriarche Elie. Elle le faisait honorer particulièrement tous les samedis par sa communauté ; et elle rapporte qu'un religieux ayant été délivré d'une attache déshonnête qu'il avait pour une malheureuse, qui s'était servie d'un petit portrait qu'elle lui avait donné, où était attaché un maléfice pour le gagner, s'étant défait de ce portrait, elle estime que cette grâce lui a été donnée à raison de la dévotion qu'il portait à l'Immaculée Conception.

L'on doit ici remarquer que les maléfices, et tous les démons qui en sont les auteurs, ne peuvent pas forcer la volonté, et que la seule cause du consentement que les hommes donnent au péché par ces maléfices est le mauvais usage de la grâce de Dieu, qui est donnée pour y résister ; le peu de soin que nous avons de nous servir des moyens propres pour ne nous pas laisser vaincre, comme des sacrements, de l'oraison, des veilles, des jeûnes, du recours à la protection de la sainte Vierge et des saints anges ; et enfin notre faiblesse à nous laisser aller à nos inclinations et à ne pas éviter les occasions, et autres choses qui contribuent à notre perte. Le vénérable P. Jean de la Croix, premier Carme déchaussé, et singulièrement dévot à la très pure Conception, après avoir mené une vie toute cachée avec Jésus en Dieu, par l'amour des humiliations et mépris, et s'étant rendu une belle image vivante de l'adorable crucifié en sa vie et en sa mort, a participé à la gloire de sa résurrection, Dieu l'avant honoré de plusieurs miracles ; et il semble que le ciel ait pris plaisir à le faire paraître aux yeux des hommes, après sa mort, à proportion qu'il s'y était voulu caché pendant sa vie, faisant voir des images miraculeuses de différents mystères et de divers saints dans les moindres parcelles de sa chair très pure, pour marquer qu'il avait l'esprit de ces mystères et les grâces de ces saints.

Mais ce qui est bien considérable, c'est que le mystère de l'Immaculée Conception y paraissait d'une manière tout extraordinaire, comme si cet homme, tout de croix en son nom et en ses actions, cet homme de vertus et de prodiges, n'eût pas été content de n'avoir qu'une bouche et qu'une langue, durant sa vie, pour en persuader la dévotion, et qu'il eût obtenu de Dieu, après sa mort, que les moindres parties de son corps fussent changées comme en autant de langues admirables, pour l'enseigner d'une manière toute-puissante aux âmes les moins zélées.


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Message  Monique Dim 27 Déc 2020, 8:07 am

Disons donc que la raison nous porte à honorer ce mystère, et que l'autorité nous en persuade le respect. Disons que l'inclination de l'Église universelle, les approbations, indulgences et autres grâces du Saint-Siège, n'en doivent laisser aucun doute dans nos esprits, qui doivent être tout convaincus par les miracles. Mais disons encore que le ciel ayant parlé clairement sur ce sujet, il n'y a plus d'apparence de ne se pas rendre.

Les Révélations de sainte Brigitte ont été approuvées de l'Église, et cette grande sainte assure qu'il lui a été révélé que la très pure Vierge a été conçue sans péché originel. Je sais que le cardinal Cajetan, répondant à cette objection, cite sainte Catherine de Sienne, qui a été dans un sentiment contraire. Mais ce n'est pas répondre à la difficulté de l'objection, dont la force n'est pas dans l'autorité seulement d'une sainte, mais dans la révélation qu'elle en a eue de Dieu. Sainte Brigitte dit nettement qu'elle en a eu révélation du ciel ; et sainte Catherine de Sienne ne parle que selon ses pensées, dont il ne faut pas s'étonner, puisqu'en cela elle suit l'opinion de la plupart des docteurs de son ordre.

Davantage, plusieurs ont estimé que ce qui se lit de cette matière dans les écrits de cette grande sainte y a été ajouté, et n'est nullement d'elle. Mais supposons qu'il en soit ainsi, les prophètes ne parlent pas toujours en prophètes ; ils ont leurs lumières propres, dans lesquelles ils se peuvent tromper.


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Message  Monique Lun 28 Déc 2020, 8:20 am

Enfin, l'on me dira que la foi ne nous oblige pas de croire ce privilège de la Mère de Dieu, et il est vrai : c'est pourquoi, comme nous l'avons déjà dit, étant en liberté de le croire, ou de ne nous y pas arrêter, c'est en cela que nous pouvons donner des marques de notre zèle (1). Un célèbre théologien, dans un gros volume qu'il a intitulé Theologia Mariana, qui est l'un des plus savants et des plus dévots ouvrages que l'on ait composés en l'honneur de notre incomparable maîtresse, dit que si l'on disputait la noblesse à une personne considérable en la présence d'un grand roi, et le roi ne décidant pas absolument la chose, déclarât cependant qu'on lui ferait plaisir de tenir cette personne pour noble, sans doute qu'elle aurait juste sujet de se plaindre de ceux qui combattrait sa noblesse, et elle pourrait dire qu'ils seraient ses ennemis : car pourquoi attaquer de gaieté de cœur une qualité qui lui est avantageuse ? Le roi même aurait lieu de s'en offenser, pour la résistance que l'on ferait à ses inclinations.

Or de même, dit ce savant homme, ne semble-t-il pas que c'est se déclarer contre la sainte Vierge, que de lui disputer un de ses plus grands privilèges ? Pourquoi ne pas lui donner une faveur, et ne demeurer pas d'accord d'une grâce qui lui est si glorieuse, le pouvant faire en bonne conscience ? N'a-t-elle pas lieu de demander pourquoi on lui envie sa gloire ? Mais l'Église n'y oblige pas. Faut-il pour prendre des sentiments avantageux de la Mère de Dieu, y être obligé ? Quelle preuve serait-ce de l'amitié que nous aurions vouée à une personne que nous considérerions beaucoup, d'attendre à la servir quand nous y serions contraints ? Quelle apparence donc d'être au service de la reine du ciel à de telles conditions ? Pour peu de zèle que l'on puisse avoir pour ses intérêts, y a-t-il occasion que l'on n'embrasse quand il s'agit de les soutenir ?

Mais disons plus, que si l'Église ne nous oblige pas à croire l'Immaculée Conception, elle nous le permet, et même elle nous y invite, et propose des faveurs, et n'a que des grâces pour ceux qui se rangent de cette pieuse croyance. Après cela, qui nous empêche d'entrer dans le parti de ses fidèles dévots ? Nous le pouvons, c'est ce qui est incontestable : pourquoi donc ne le pas faire ! L'Église nous y invite, pourquoi résister à ses mouvements ? Elle nous accorde de grandes grâces pour ce sujet : pourquoi nous priver de ces bénédictions ? Reprenons ces pensées, et nous mettant en présence de la divine Marie, considérons-les un peu avec attention. Ô très sainte Vierge, je puis vous obliger en prenant des sentiments très glorieux touchant vos privilèges : mais je n'en veux rien faire, n'y étant pas obligé par la foi : cependant il est entièrement en ma liberté de vous marquer en cette rencontre mon zèle : mais je n'en ferai rien : ce n'est pas que je ne connaisse assez que les inclinations de l'Église en vont là ; mais j'aime mieux suivre les mouvements de quelques particuliers et les lumières de mon esprit. Je vois, de plus, qu'il y a de grandes bénédictions et des faveurs et grâces non pareilles, mais je choisis plutôt de perdre toutes ces grâces, et de me priver de toutes ces bénédictions, que de vous accorder une faveur que soutiennent toutes les plus fameuses écoles de théologie, et qui fait le sentiment presque universel de tout le monde : je veux faire bande à part, et m'attacher à une opinion que l'on n'oserait enseigner publiquement, que l'on ne peut plus prêcher, et dont même il n'est pas permis de disputer dans les entretiens particuliers.

Voilà ce que font ceux qui tiennent l'opinion contraire de la toute sainte Conception, et en vérité c'est ce que je ne comprends pas : nous ne les condamnons pas, mais nous nous étonnons comme ils peuvent agir de la sorte envers la très sainte Mère de Dieu.


(1) L'Immaculée Conception de la très sainte Vierge est un dogme de notre foi depuis le 8 décembre 1854


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Message  Monique Mar 29 Déc 2020, 8:08 am

Il y a déjà longtemps que notre France s'est déclarée pour le glorieux privilège de celle qu'elle reconnaît pour sa puissante protectrice, étant plus que jamais en sa dépendance, à raison du vœu et de la donation que lui en a faite le feu roi Louis le Juste, de glorieuse mémoire, renouvelée et confirmée par le roi Louis Dieudonné, à présent régnant, et ratifiée et acceptée par tous ses sujets catholiques. Sa plus florissante université n'accorde la qualité de docteur qu'à condition de défendre un privilège si avantageux à la mère de toute la science des saints : et ces années dernières l'on a vu dans la capitale du royaume une maison de saintes religieuses établies par la piété de notre grande reine, qui sont toutes dédiées en l'honneur de la très pure Conception, après la solennité d'une grande fête, suivie d'octave, dans laquelle pendant tous les jours de ladite octave plusieurs princes de l'Église et autres fameux prédicateurs publiaient les grandeurs, aussi bien que la vérité du mystère.

Il est bien difficile d'en douter à celui qui considérera que la très sainte Vierge, si elle n'avait été exempte de péché originel, aurait été sujette du démon : car quelle apparence que celle qui devait briser la tête du serpent infernal en fût l'esclave ? Quelle apparence que celle qui devait triompher avec tant de gloire de enfer, y fût assujettie ? Non, dit un ancien Père, la justice ne permettait pas que ce vaisseau d'élite fût déshonoré par des misères qui sont communes au reste des hommes. Mais peut-on croire, que si dans la terre où il y a si peu d'ordre, les maitres cependant y sont préférés aux valets, les rois à leurs sujets ; que dans le ciel l'on considère davantage les serviteurs, que celle qui en est l'auguste reine ? Si Marie a été sujette au péché originel, il faut dire qu'en cela Adam a eu plus de privilège, et que les anges ont été plus heureux, leur pureté n'ayant jamais été souillée de la moindre tache d'aucun péché. Disons de plus, qu'il y allait de l'honneur de son Fils qu'elle en fût préservée ; parce que comme la gloire des pères descend jusqu'à leurs enfants, de même leur ignominie retourne en quelque manière sur eux. Saint Thomas se sert de cette raison pour prouver que la très sainte Vierge n'a jamais commis aucun péché véniel.

Mais si cette preuve est forte à l'égard du péché véniel, elle l'est bien plus à l'égard du péché originel, puisque l'âme par le péché véniel ne sort pas de la grâce et de l'amitié de Dieu, et n'est pas sous la domination du démon : ce qui arrive par le péché originel. Si donc, l'Angélique docteur ne peut souffrir la pensée du plus petit péché véniel en l'âme de la très sainte Vierge, s'il estime que son Fils en aurait été déshonoré, qu'il y allait de ses divins intérêts de ne le pas permettre ; comment pourra-t-on se persuader que cette âme toute sainte ait tombé dans le péché d'origine, qui est un péché mortel, qui prive du paradis et de la grâce ? En vérité la seule idée en donne l'horreur : car serait-il bien possible que Marie, la plus aimée, aussi bien que la pus aimante des créatures, eût été le sujet de la haine de son Fils, eût été le sujet de l'aversion d'un Dieu qui l'avait destiné pour sa Mère ? Serait-il bien possible que le diable pût se vanter de l'avoir eue sous son empire, et de l'avoir détenue captive sous ses fers, et garrottée en ses chaînes ?


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Message  Monique Mer 30 Déc 2020, 8:33 am

Il est vrai qu'il y a eu quelques saints dans des sentiments contraires ; mais c'était dans des temps où ce mystère n'était pas encore assez connu. Ils disaient que la fête qui en était célébrée, n'était pas approuvée des Souverains Pontifes ; ils disaient qu'il n'y avait que des églises particulières qui en faisaient la solennité. Mais ces raisons pourraient-elles aujourd'hui avoir quelque force, puisque la fête est reçue par le Saint-Siège, et de toute l'Église universelle ? De plus, il y a de graves auteurs, et des chroniques d'un grand ordre, qui rapportent que ces saints paraissant visiblement après leur mort, se sont rétractés de leurs opinions, et ont avoué la vérité de la Conception Immaculée.

L'on peut encore remarquer que les oppositions de ces saints n'ont servi qu'à faire paraître avec plus d'éclat la pureté sans tache de la bienheureuse Vierge en sa conception toute sainte : car si l'on objecte que leur autorité est grande, c'est ce qui doit persuader davantage la vérité qu'ils ont impugnée, quoi qu'avec respect, puisque toutes les écoles de théologie ayant tant de déférence pour leur doctrine, si elles ne la suivent pas en quelque matière, c'est une des marques les plus fortes que l'on puisse avoir qu'elle n'est pas vraie.

Mais y a-t-il rien de plus puissant, pour nous convaincre les esprits, que l'inclination générale de l'Église universelle ? Si elle parle du péché originel dans le dernier concile œcuménique, elle déclare qu'elle n'y comprend pas l'immaculée Mère de Dieu. Dès les premiers siècles, le grand saint Augustin a enseigné que lorsqu'il s'agit du péché il ne voulait en aucune façon parler de la bienheureuse Vierge. Et, de vrai, le Saint-Esprit ne lui dit-il pas, dans les Cantiques, qu'elle est toute belle et sans aucune tache ? Et ne pouvons-nous pas assurer avec justice que c'est ce même Esprit qui unit les esprits de presque tous les fidèles, pour conspirer unanimement à la pieuse croyance de cette vérité ? En sorte que, si l'on demande à tous les peuples qui viennent en foule louer le Seigneur en sa sainte Mère par toute la terre habitable, en autant de lieux qu'il y a des églises, le jour de la fête de sa Conception, ce qu'ils viennent honorer en la solennité de ce mystère, sans doute qu'ils répondront qu'ils ont dessein d'honorer la Conception Immaculée de la Mère de Dieu.

Et en cette rencontre, toutes les chaires de nos temples retentissant de cette vérité, toute la terre fait comme un écho à toutes les voix qui s'y font entendre, répétant cette vérité, qui s'y publie par autant de bouches qu'il y a de personnes qui les écoutent. Ajoutons à ceci que les souverains pontifes ont approuvé l'office de l'immaculée Conception, qui se fait dans tout l'ordre de Saint-François, non-seulement le jour de la fête, mais tous les samedis de l'année, hors le temps de carême, quand ils ne sont pas empêchés par quelque fête ; qu'il y a des ordres institués en l'honneur de ce mystère, de grandes indulgences accordées à ceux qui y ont une dévotion spéciale.


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Message  Monique Jeu 31 Déc 2020, 8:39 am

Davantage le ciel conspire avec la terre pour l'établissement d'une si sainte dévotion, qu'il ne peut autoriser plus efficacement que par le grand nombre de miracles qu'il fait en sa faveur. Le fameux Avila, prédicateur apostolique d'Espagne, qui vivait dans une extrême pauvreté, n'ayant rien et ne possédant rien, quoiqu'il ne fût pas religieux, mais prêtre dans le siècle, annonçant d'une force merveilleuse les vérités de l'Évangile, exhortait tous les fidèles à la dévotion de la toute sainte Conception, et assurait que c'était un singulier moyen pour être délivré de l'impureté, rapportant de grands miracles que Dieu, tout bon, faisait pour soutenir une dévotion si avantageuse à sa très-sainte Mère. Ces miracles continuent tous les jours, et il y a peu d'années qu'il s'en est fait d'admirables.

La séraphique Thérèse avait une dévotion très spéciale à ce privilège de la glorieuse Vierge ; et c'est une des plus anciennes dévotions de l'ordre du mont Carmel, qui tient par tradition que la connaissance en avait été donnée par révélation au saint patriarche Elie. Elle le faisait honorer particulièrement tous les samedis par sa communauté ; et elle rapporte qu'un religieux ayant été délivré d'une attache déshonnête qu'il avait pour une malheureuse, qui s'était servie d'un petit portrait qu'elle lui avait donné, où était attaché un maléfice pour le gagner, s'étant défait de ce portrait, elle estime que cette grâce lui a été donnée à raison de la dévotion qu'il portait à l'Immaculée Conception. L'on doit ici remarquer que les maléfices, et tous les démons qui en sont les auteurs, ne peuvent pas forcer la volonté, et que la seule cause du consentement que les hommes donnent au péché par ces maléfices est le mauvais usage de la grâce de Dieu, qui est donnée pour y résister ; le peu de soin que nous avons de nous servir des moyens propres pour ne nous pas laisser vaincre, comme des sacrements, de l'oraison, des veilles, des jeûnes, du recours à la protection de la sainte Vierge et des saints anges ; et enfin notre faiblesse à nous laisser aller à nos inclinations et à ne pas éviter les occasions, et autres choses qui contribuent à notre perte.

Le vénérable P. Jean de la Croix, premier Carme déchaussé, et singulièrement dévot à la très pure Conception, après avoir mené une vie toute cachée avec Jésus en Dieu, par l'amour des humiliations et mépris, et s'étant rendu une belle image vivante de l'adorable crucifié en sa vie et en sa mort, a participé à la gloire de sa résurrection, Dieu l'avant honoré de plusieurs miracles ; et il semble que le ciel ait pris plaisir à le faire paraître aux yeux des hommes, après sa mort, à proportion qu'il s'y était voulu caché pendant sa vie, faisant voir des images miraculeuses de différents mystères et de divers saints dans les moindres parcelles de sa chair très pure, pour marquer qu'il avait l'esprit de ces mystères et les grâces de ces saints. Mais ce qui est bien considérable, c'est que le mystère de l'Immaculée Conception y paraissait d'une manière tout extraordinaire, comme si cet homme, tout de croix en son nom et en ses actions, cet homme de vertus et de prodiges, n'eût pas été content de n'avoir qu'une bouche et qu'une langue, durant sa vie, pour en persuader la dévotion, et qu'il eût obtenu de Dieu, après sa mort, que les moindres parties de son corps fussent changées comme en autant de langues admirables, pour l'enseigner d'une manière toute-puissante aux âmes les moins zélées.


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Message  Monique Ven 01 Jan 2021, 8:14 am

Disons donc que la raison nous porte à honorer ce mystère, et que l'autorité nous en persuade le respect. Disons que l'inclination de l'Église universelle, les approbations, indulgences et autres grâces du Saint-Siège, n'en doivent laisser aucun doute dans nos esprits, qui doivent être tout convaincus par les miracles. Mais disons encore que le ciel ayant parlé clairement sur ce sujet, il n'y a plus d'apparence de ne se pas rendre.

Les Révélations de sainte Brigitte ont été approuvées de l'Église, et cette grande sainte assure qu'il lui a été révélé que la très pure Vierge a été conçue sans péché originel. Je sais que le cardinal Cajetan, répondant à cette objection, cite sainte Catherine de Sienne, qui a été dans un sentiment contraire. Mais ce n'est pas répondre à la difficulté de l'objection, dont la force n'est pas dans l'autorité seulement d'une sainte, mais dans la révélation qu'elle en a eue de Dieu. Sainte Brigitte dit nettement qu'elle en a eu révélation du ciel ; et sainte Catherine de Sienne ne parle que selon ses pensées, dont il ne faut pas s'étonner, puisqu'en cela elle suit l'opinion de la plupart des docteurs de son ordre. Davantage, plusieurs ont estimé que ce qui se lit de cette matière dans les écrits de cette grande sainte y a été ajouté, et n'est nullement d'elle. Mais supposons qu'il en soit ainsi, les prophètes ne parlent pas toujours en prophètes ; ils ont leurs lumières propres, dans lesquelles ils se peuvent tromper.


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Message  Monique Sam 02 Jan 2021, 8:16 am

Enfin, l'on me dira que la foi ne nous oblige pas de croire ce privilège de la Mère de Dieu, et il est vrai : c'est pourquoi, comme nous l'avons déjà dit, étant en liberté de le croire, ou de ne nous y pas arrêter, c'est en cela que nous pouvons donner des marques de notre zèle (1). Un célèbre théologien, dans un gros volume qu'il a intitulé Theologia Mariana, qui est l'un des plus savants et des plus dévots ouvrages que l'on ait composés en l'honneur de notre incomparable maîtresse, dit que si l'on disputait la noblesse à une personne considérable en la présence d'un grand roi, et le roi ne décidant pas absolument la chose, déclarât cependant qu'on lui ferait plaisir de tenir cette personne pour noble, sans doute qu'elle aurait juste sujet de se plaindre de ceux qui combattrait sa noblesse, et elle pourrait dire qu'ils seraient ses ennemis : car pourquoi attaquer de gaieté de cœur une qualité qui lui est avantageuse ?

Le roi même aurait lieu de s'en offenser, pour la résistance que l'on ferait à ses inclinations. Or de même, dit ce savant homme, ne semble-t-il pas que c'est se déclarer contre la sainte Vierge, que de lui disputer un de ses plus grands privilèges ? Pourquoi ne pas lui donner une faveur, et ne demeurer pas d'accord d'une grâce qui lui est si glorieuse, le pouvant faire en bonne conscience ? N'a-t-elle pas lieu de demander pourquoi on lui envie sa gloire ? Mais l'Église n'y oblige pas. Faut-il pour prendre des sentiments avantageux de la Mère de Dieu, y être obligé ? Quelle preuve serait-ce de l'amitié que nous aurions vouée à une personne que nous considérerions beaucoup, d'attendre à la servir quand nous y serions contraints ? Quelle apparence donc d'être au service de la reine du ciel à de telles conditions ? Pour peu de zèle que l'on puisse avoir pour ses intérêts, y a-t-il occasion que l'on n'embrasse quand il s'agit de les soutenir ? Mais disons plus, que si l'Église ne nous oblige pas à croire l'Immaculée Conception, elle nous le permet, et même elle nous y invite, et propose des faveurs, et n'a que des grâces pour ceux qui se rangent de cette pieuse croyance. Après cela, qui nous empêche d'entrer dans le parti de ses fidèles dévots ? Nous le pouvons, c'est ce qui est incontestable : pourquoi donc ne le pas faire ! L'Église nous y invite, pourquoi résister à ses mouvements ? Elle nous accorde de grandes grâces pour ce sujet : pourquoi nous priver de ces bénédictions ?

Reprenons ces pensées, et nous mettant en présence de la divine Marie, considérons-les un peu avec attention. Ô très sainte Vierge, je puis vous obliger en prenant des sentiments très glorieux touchant vos privilèges : mais je n'en veux rien faire, n'y étant pas obligé par la foi : cependant il est entièrement en ma liberté de vous marquer en cette rencontre mon zèle : mais je n'en ferai rien : ce n'est pas que je ne connaisse assez que les inclinations de l'Église en vont là ; mais j'aime mieux suivre les mouvements de quelques particuliers et les lumières de mon esprit. Je vois, de plus, qu'il y a de grandes bénédictions et des faveurs et grâces non pareilles, mais je choisis plutôt de perdre toutes ces grâces, et de me priver de toutes ces bénédictions, que de vous accorder une faveur que soutiennent toutes les plus fameuses écoles de théologie, et qui fait le sentiment presque universel de tout le monde : je veux faire bande à part, et m'attacher à une opinion que l'on n'oserait enseigner publiquement, que l'on ne peut plus prêcher, et dont même il n'est pas permis de disputer dans les entretiens particuliers. Voilà ce que font ceux qui tiennent l'opinion contraire de la toute sainte Conception, et en vérité c'est ce que je ne comprends pas : nous ne les condamnons pas, mais nous nous étonnons comme ils peuvent agir de la sorte envers la très sainte Mère de Dieu.


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Message  Monique Dim 03 Jan 2021, 8:21 am

Il faut ici ajouter que les Turcs reconnaissent qu'entre les enfants d'Adam, Marie a été conçue sans péché. Après cela serait-il bien possible que nous voulussions lui dénier un privilège que les mahométans, ses plus cruels ennemis lui accordent ? Quoi ! Il serait vrai de dire qu'un malheureux Turc, qu'un misérable infidèle aurait des sentiments plus avantageux de la Conception de la toute aimable Marie ! C'est ce qu'un bon cœur aura toujours bien de la peine à supporter.

Le dévot Jean Berchmans, de la Compagnie de Jésus, avait signé de son sang qu'il défendrait toujours l'Immaculée Conception, et c'était un ange de la terre, aussi n'y est-il pas longtemps demeuré ; ces âmes innocentes sont plus propres pour l'empirée que pour le monde qui n'en est pas digne, étant tout rempli de corruption : et comme l'on rapportait au grand cardinal Bellarmin la dévotion de cette âme angélique, il s'écria fortement : « Ô sainte Vierge ! Vous l'avez voulu avoir de votre parti. » Il ne faut pas en être surpris, puisque le dévot Alphonse Rodriguez a eu révélation qu'une des raisons pour lesquelles Dieu a suscité la Compagnie de Jésus dans son Eglise, est de soutenir l'opinion de la Conception Immaculée ; et de vrai, l'effet qui en est suivi, en a bien fait voir la vérité, tant de savantes plumes de cette société s'étant employées pour la défendre, tant d'éloquents prédicateurs en ayant prêché avec des persuasions si vives la vérité, tant de célèbres docteurs l'ayant enseignée dans les écoles avec une force nonpareille , tant de congrégations de cette Compagnie en ayant établi la dévotion en toutes les contrées du monde.


A suivre...
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Message  Monique Lun 04 Jan 2021, 6:54 am

CHAPITRE III

Honorer avec toute sorte de respect la maternité divine,

et l'amour incomparable du précieux cœur

de la glorieuse Vierge



********



C'est une chose qui n'avait jamais été ouïe, dit le dévot saint Bernard, qu'une Vierge fût mère et vierge tout ensemble : mais si vous considérez de qui elle est Mère, où est-ce que nous portera l'admiration d'une si éminente dignité ? N'est-ce pas Marie, qui peut sans crainte appeler le Dieu et le Seigneur des anges, son fils, disant : Mon Fils, pourquoi avez-vous fait cela ? (Luc, II, 48) Qui est-ce des anges qui oserait parler de la sorte ? Mais Marie se connaissant mère, donne avec assurance le nom de fils à cette sublime Majesté que les anges adorent avec respect ; ce Dieu à qui les anges font hommage, à qui les principautés et puissances obéissent, était sujet à Marie, et non-seulement à Marie, mais aussi à Joseph pour l'amour de Marie. Qu'une Vierge, poursuit ce Père, domine dessus un Dieu, c'est une sublimité qui n'a jamais eu et qui n'aura jamais de pareille. Mais toutes ces élévations si éminentes ont pris leur origine de ses humiliations abîmables : c'est par l'humilité qu'elle a conçu, disent les Pères, s'abîmant devant l'infinie majesté de Dieu, qui s'anéantissait pour nous dans ses pures entrailles au moment de l'incarnation : et ce fut pour lors qu'étant élevée à une dignité presque infinie par la qualité de Mère de Dieu, que le ciel lui donnait, elle ne prit que celle de sa servante, et l'on peut bien croire qu'elle choisit même le plus bas et vil degré de servitude, qui est celui de l'esclavage.

Dieu ayant arrêté les yeux sur cette humilité de sa servante, comme elle le chante elle-même dans son divin cantique (Luc., I, 46 et seq.), c'est la cause pour laquelle toutes les nations la disent bienheureuse : mais plus grand bonheur, et qui est la source de toutes les autres faveurs dont le ciel l'a comblée, est sa maternité divine, qui, lui donnant la qualité de souveraine des anges et des hommes, de reine du ciel et de la terre, fait le fondement de la dévotion de son saint esclavage. C'est pourquoi tous ses esclaves doivent avoir tous les respects possibles pour sa maternité ; ils doivent vivre et mourir dans une dépendance très étroite d'une dignité si glorieuse ; invoquer souvent la très-sainte Vierge sous le nom de Mère de Dieu : qualité admirable, qui a fait le sujet de toutes les plus tendres et plus fortes affections des premiers fidèles, et de tous les plus zélés catholiques.


A suivre...


Dernière édition par Monique le Mer 06 Jan 2021, 9:21 am, édité 1 fois (Raison : Correction d'un mot)
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Message  Monique Mar 05 Jan 2021, 7:55 am

Les fidèles esclaves doivent de plus honorer grandement l'amour de cette mère de la belle dilection, et son cœur virginal, qui a été le siège de cet amour et le principe de la vie humaine et sensible du saint enfant Jésus, puisque pendant que l'enfant est dans le ventre de sa mère, le cœur de la mère est tellement la source de la vie de l'enfant, aussi bien que de sa propre vie, que la vie de l'enfant n'en dépend pas moins que celle de la mère. Cœur, principe de deux vies si nobles et si précieuses, principe de la vie très pure et très sainte de la Mère de Jésus, principe de la vie humainement divine, et divinement humaine du fils de Marie : cœur sur lequel le divin enfant Jésus a pris tant de fois son repos, qui par sa chaleur naturelle a produit et formé le très pur lait dont il a été nourri ; cœur, la partie la plus noble et la plus vénérable du corps virginal qui a donné un corps au Verbe éternel, qui sera éternellement l'objet des adorations de tous les esprits bienheureux.

C'est ce qui donne à ce cœur, lorsqu'il est considéré non-seulement comme matériel et corporel, mais encore en tant qu'il signifie tout l'intérieur de l'admirable Vierge Mère de Dieu, des grandeurs qui sont entièrement ineffables : car je rencontre dans ce cœur l'amour des séraphins, la plénitude de la science chérubins, la paix des trônes, la grandeur des dominations, la force des puissances, le gouvernement des principautés, l'excellence des vertus, le soin, le zèle, la charité, la pureté des archanges et des anges. Ô cœur ! Que tu es admirable ! J'y trouve la justice des patriarches, la connaissance des prophètes, la religion d'Abel, la piété d'Enoch, l'a foi d'Abraham, l'obéissance d'Isaac, la constance de Jacob, le zèle de Moïse et d'Elie, et tous les plus fervents désirs des anciens Pères. Ô cœur glorieux, qui renferme toi seul toutes les excellences et vertus de l'Ancien Testament !

Je remarque dans ce cœur la charité des apôtres, la force des martyrs, la fidélité des confesseurs, la pureté des vierges, la retraite des solitaires et toute la sainteté des âmes les plus éminentes. Ô cœur tout divin, rempli de toutes les grâces de la loi nouvelle ! Est totum quod vides, tout ce qui s'entend, tout ce qui se lit, tout ce qui se voit, tout ce qui y a de grand au ciel et en la terre, c'est ce cœur sacré et tout précieux. Ramassez en un toutes les lumières du soleil, de la lune et des étoiles ; mettez vous devant les yeux toutes les clartés des corps des bienheureux : ô mon Dieu quel spectacle ! Il n'y a point de corps de bienheureux qui n'ait plus de clarté que le soleil. Mais combien y en aura-t-il dans l'Empyrée ? Combien donc d'aimables soleils dans ce séjour de félicité ? Cependant ce cœur glorieux a plus lui seul de lumières. Figurez-vous toute la puissance des anges, dont un seul vaut plus qu'une armée, selon le témoignage de l'Écriture. Considérez la force du moindre des démons, qui n'ayant plus de grâce ne jouit plus que de ce qu'il a en sa nature, et ne laisse pas d'être terriblement redoutable ; méditez ensuite qu'elle doit être la puissance d'un bon ange, et de tous les saints anges ensemble ; ce grand et digne cœur est lui seul plus puissant. Joignez en un tous les amours, ce cœur très aimant en a plus et pour Dieu et pour les hommes : Est totum quod vides, et totum quod non vides. Hélas ! après avoir tout dit, nous n'avons rien dit encore.

Ce cœur n'aime pas comme les séraphins, ne connaît pas comme les chérubins, n'est pas saint comme les plus grands saints, puisque tous ces amours, toutes ces lumières, toutes ces saintetés ne sont que des amours, des lumières et des saintetés de serviteurs ou d'amis ; mais les grandeurs de Marie sont des grandeurs d'une mère qui a pour fils un Dieu : et ces grandeurs sont plus hautes que le ciel, plus profondes que les abîmes, plus larges que la région des airs, et aussi longues que l'éternité même. Il n'y a que celui-là seul qui l'a faite, qui la connaisse pleinement. Si l'on mettait d'un coté ce cœur virginal, et de l'autre tous les anges et tous les saints ensemble, ce seul cœur, le très uniquement unique cœur entre tous les bons cœurs des pures créatures l'emporterait. Dieu fait plus d'état de lui seul, Dieu en est plus glorifié, et il est plus cher à Dieu.

Ah ! Cœur donc la merveille de tous les cœurs ! Ah ! Cœur dont l'amour est le miracle de tous les amours ! Cœur le plus ravissant de tous les cœurs, puisque tu as ravi le cœur du Père éternel, son Fils bien-aimé ; cœur, le roi de tous les cœurs, puisque tu es le cœur de la Mère d'un Dieu ; cœur béni entre tous les cœurs, puisque tu es une source inépuisable de bénédictions ; cœur le plus obligeant de tous les cœurs après l'incomparable cœur de Jésus, puisque les obligations que nous lui avons, sont presque infinies et en quantité et en qualité. Qu'un chacun porte ses dévotions où il voudra : pour moi, j'entends qu'après mon Dieu, ô aimable, ô doux, ô ravissant objet, tous les désirs qui s'écloront dans mon cœur, tous les mouvements qui s'élèveront dans mon âme, tous les actes qui se formeront dans ma volonté, toutes mes actions soient consacrées à ta gloire pour la gloire de Jésus, qui doit lui seul être aimé et loué en tous les amours et en toutes les louanges. Ô cœur inestimable ! Je t'aime plus que mes yeux, plus que mon cœur, plus que ma propre vie, plus que les anges, plus que les saints. Mais c'est ici, mon cœur, où il faut s'élargir dans l'aveu que ce cœur mérite plus d'amour que tous les cœurs, puisqu'il y a plus de Dieu seul. Repassons par notre esprit, considérons toutes les dévotions des âmes les plus ferventes de l'ancienne et de la nouvelle loi. Quel zèle pour les saints anges, quelle ferveur pour tant de saints et de saintes dans les cœurs de leurs dévots ! Mettons en suite et joignons ensemble tout ce zèle, toutes ces ferveurs, ce n'est pas encore assez pour ce cœur admirable, qui mérite l'empire de tous les cœurs. S'ils étaient tous en mon pouvoir, ils en deviendraient bientôt la conquête, ils en seraient bientôt les esclaves, puisque Dieu même s'y est bien voulu assujettir : et c'est ce qui l'a rendu un abîme de grâces, qui contient en soi un nombre presque infini de toutes sortes de bénédictions.

Il faudrait être sans cœur pour ne pas honorer d'une manière très spéciale ce cœur maternel de notre très bonne mère et très glorieuse dame, particulièrement après que Notre-Seigneur a bien voulu de sa propre bouche en enseigner la dévotion, en la personne de sainte Mathilde, de l'ordre de Saint-Benoit, qui, étant en peine quelle dévotion elle pratiquerait pour se rendre plus agréable à la très sainte Vierge, cet adorable Sauveur lui apprit à saluer son béni cœur. Le bienheureux Herman, de l'ordre de Saint-Dominique, l'honorait tous les jours par quelque pratique pieuse : sainte Gertrude lui était singulièrement dévote.


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Message  Monique Mer 06 Jan 2021, 7:54 am

Mais il a plu à Dieu de susciter en nos jours en son Église une très sainte congrégation de missionnaires ; instituée par le révérend P. Jean Eudes, l'un des plus zélés et fervents serviteurs de notre auguste princesse, qui est toute dévouée et consacrée en l'honneur de cet aimable cœur. Ces dignes missionnaires, très recommandables pour la pureté de leur doctrine, et leur zèle incroyable pour le salut des âmes, prêchant l'Évangile avec une vertu sans pareille dans les villes et campagnes, y établissant à même temps la dévotion solide du cœur virginal de Marie : ils procurent que l'on y érige une association ou confrérie en son honneur par la permission de nos seigneurs les prélats, ayant dressé à cette fin de beaux statuts et d'excellents règlements : ils obtiennent le pouvoir d'en faire la fête tous les ans le 8 de février ; et comme leur amour est grand, ils inspirent quantité de moyens pour bénir et louer cet aimable cœur. Ils ont fait bâtir un magnifique temple sous l'invocation de ce saint cœur en la ville de Coutances en Normandie, où l'on en célèbre la fête tous les ans, comme il a été dit, le 8° jour de février, avec une octave solennelle. Ils en font mémoire dans l'office comme de patron, et leur zèle a reçu tant de bénédictions du ciel, que cette dévotion, malgré toutes les oppositions de l'enfer et de la terre, et même de quelques gens de bien, commence à se répandre en grand nombre de lieux de différentes provinces. Les séminaires de Rouen, de Lisieux et de Bayeux en font une haute profession, aussi bien que celui de Dijon, ville qui, conservant encore l'esprit de dévotion envers la sainte Vierge, qu'elle a autrefois reçue de saint Bernard, se rend considérable par les honneurs extraordinaires qu'elle rend à son précieux cœur.

L'office de ce sacré cœur composé par le révérend P. Jean Eudes, que nous avons loué ci-dessus, remplit les langues, dit un grand archevêque, du miel et du lait de la sainte épouse ; et le cœur de la tendresse des plus saintes affections, et il l'appelle un recueil, et comme une empreinte de toutes les suavités que les saintes lettres et les saints Pères ont laissées à l'Église, tirées avec tant de pureté que les vérités de notre foi ni les pratiques des bonnes mœurs n'y courent aucun hasard, mais y peuvent être goûtées comme en leur source. L'on peut dire avec vérité que c'est un office des plus dévots que nous ayons, et qu'il semble que la sainte Vierge en ait inspiré la douceur ; il est bien difficile de le lire avec attention sans avoir le cœur saintement attendri. Grand nombre de prélats ont reçu cette dévotion en leurs diocèses, en ont approuvé l'office, et permis aux prêtres de le faire et d'en célébrer la fête le jour que nous avons marqué. Il s'en fait une grande solennité en la célèbre abbaye de Montmartre, par la singulière piété, de la princesse qui en est la très digne abbesse. La même dévotion se pratique chez les religieuses Bénédictines du Saint-Sacrement de Paris, qui étant toutes dédiées à l'amour de Jésus au très-saint Sacrement, ne respirent que la gloire de la Mère de cet adorable Dieu-Homme, qu'elles honorent comme leur abbesse, ayant mis leur maison, leurs personnes, tout ce qu'elles ont, tout ce qu'elles font, sous la direction et dépendance très particulière de la glorieuse Mère de Dieu, par les soins de leur vertueuse et zélée supérieure, l'une des plus fidèles esclaves de notre auguste maîtresse.


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Message  Monique Jeu 07 Jan 2021, 8:33 am

CHAPITRE IV

Pratiques de dévotion pour tous les ans, les mois, les semaines et les jours


********


Nous avons déjà dit que la seule bonne volonté était nécessaire pour être associé au nombre des esclaves de la sainte Mère de Dieu ; que cette dévotion était très facile, en ce qu'elle n'imposait aucune charge, et qu'elle ne demandait aucun autre exercice de piété des esclaves, que ceux que l'obligation de leur état prescrit, ou la prudente conduite d'un sage directeur. Ainsi, cette dévotion n'ordonne aux ecclésiastiques, aux religieux ou religieuses et aux autres personnes dont la conduite est réglée, d'autres exercices que ceux qu'ils pratiquent : mais parce qu'il y en a plusieurs qui sans se gêner, ou sans se trop charger d'exercices, peuvent en pratiquer quelques-uns avec la bénédiction de l'Esprit de Dieu, qui sont spécialement propres aux esclaves de la sainte Vierge ; nous en proposerons pour tous les ans, les mois, les semaines et les jours, que l'on pourra pratiquer autant que l'Esprit de Dieu le demandera d'un chacun ; exhortant seulement de faire une sérieuse attention sur cette vérité, que la gloire de Dieu ne se rencontre pas précisément dans le grand nombre de prières, d'actes et de pratiques, mais dans la ferveur avec laquelle on fait ces choses ; et que Dieu et sa très digne Mère sont plus glorifiés d'un psaume, d'un cantique ou d'une antienne, récités avec dévotion, que de tout le psautier, ou d'un grand nombre d'autres prières que l'on ferait à la hâte et avec négligence ; ce qui est bien à remarquer par plusieurs personnes, qui, mettant leur dévotion dans la multitude des pratiques, s'en acquittent avec précipitation et avec peu de sentiment de la grandeur infinie de la majesté de Dieu, à qui ils les adressent ; c'est pourquoi les saints Pères recommandaient grandement l'usage des oraisons jaculatoires, parce qu'ordinairement elles se font avec plus de vue de Dieu.

Oh ! Combien il y en a qui seront châtiés dans les feux redoutables du purgatoire pour la négligence qu'ils ont eue dans leurs exercices, qui souvent ont été des péchés véniels et non pas des actions dignes d'aucune récompense ! Combien y en a-t-il qui, au jour du jugement, se trouveront coupables pour des dévotions qu'ils ont pratiquées par amour-propre, suivant en cela leur inclination naturelle et non pas le mouvement de la grâce ; leurs propres lumières plutôt qu'une conduite réglée ; se rendant propriétaires de leurs exercices, voulant les faire par leur propre volonté, y étant attachés, ne considérant pas qu'il n'y a que Dieu seul qui est la fin de tous les moyens à qui nous devions nous attacher, et non pas aux moyens qui conduisent à lui, que nous ne devons prendre qu'avec une parfaite indifférence, pour nous en servir seulement dans son ordre, n'écoutant nullement les mouvements propres de la nature, ne les quittant pas à la vérité par inconstance ou négligence, mais selon le bon plaisir divin, qui demande des choses en un temps qu'il veut qu'on quitte en d'autres, changeant nos états comme il lui plaît ; et en tout cela la fidélité de l'âme consiste à ne vouloir que ce que Dieu veut, demeurant dans un état et dans les exercices de l'état autant qu'il le veut, et changeant de disposition comme il l'ordonne. Ainsi elle s'arrête à la méditation autant que sa grâce l'y attache ; elle passe à la contemplation lorsqu'elle y est appelée ; elle fait avec soin tous ses exercices de piété, sans en omettre pas un par ennui, par tentation, par dissipation, par infidélité ; mais elle est bien paisible lorsqu'elle ne les peut pas faire, soit par maladie ou par quelques occupations où elle est obligée de se rendre dans l'ordre de Dieu ; car ce qu'elle regarde est de faire la volonté de Dieu, sans se mettre en peine des moyens qui servent à aller à Dieu, sinon en tant qu'ils sont conformes à son bon plaisir.


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Message  Monique Ven 08 Jan 2021, 8:24 am

Ces choses supposées, je dis que celui qui prétend à la glorieuse qualité d'esclave de la Mère de Dieu doit choisir quelque jour pour se donner à la souveraine des anges et des hommes en cette qualité, et s'y disposer par une confession générale, si jamais il n'en a fait, prenant garde que la réitération des confessions générales souvent vient de la nature, qui veut se satisfaire en se soulageant de quelques peines, qui ne sont que des scrupules, ce qui n'est suivi d'aucune bénédiction : car ordinairement, dit le grand saint François Xavier, au lieu d'un scrupule que l'on prétend ôter, ces confessions en font regermer dix. Le jour étant arrivé, après la sainte communion, il fera la protestation à sa bonne maîtresse, telle qu'elle est ci-après à la fin de ce livre, se donnant entièrement à elle en qualité d'esclave, et cela non-seulement des lèvres, mais du plus profond du cœur, entrant véritablement dans les dispositions que l'on doit avoir en la volonté, et conformément à ce que nous en avons dit particulièrement aux chapitres 2 et 6 de la 1ère partie : c'est pourquoi il sera bon de les lire avec attention, pour savoir en quoi consiste la dévotion de l'esclavage de la très sainte Vierge, dont il est traité au chapitre 2, et être éclairci des difficultés que l'on y peut former, dont il est parlé amplement au chapitre 6.

Si les Romains autrefois achetaient leurs esclaves en présence de cinq témoins, il est bon de se donner à l'auguste impératrice du ciel en cette qualité, prenant pour témoins d'une action si sainte son bon ange, saint Gabriel, saint Joseph, saint Jean l'Évangéliste, et le saint ou la sainte dont on porte le nom.

Que n'a point fait le dévot P. Barthélemy de los Rios pour cette fin ? Mais ses soins ont reçu une telle bénédiction du ciel, que l'on voit à présent cette confrérie établie en grand nombre de villes, en différentes provinces, et en plusieurs royaumes, et un nombre presque infini de personnes de toutes sortes de qualités et d'états qui font gloire de vivre dans l'esclavage de la reine du ciel, dont la servitude est préférable à toutes les couronnes. Malheur à nous qui voyons ces choses, qui les louons et approuvons, pendant que nous demeurons oisifs à ne rien faire, nous contentant de quelques paroles ! Ô mon Dieu, quelle confusion de voir ce que le zèle d'un seul homme peut faire, et a fait, assisté du ciel, si nous considérons le peu que nous faisons ! En vérité, il faut dire que l'amour de nos cœurs pour celle que nous regardons comme notre très douce mère et très aimable maîtresse, n'est pas grand chose, puisqu'il agit si peu ; l'amour étant du naturel du feu qui agit toujours, et qu'on ne peut cacher.


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Message  Monique Sam 09 Jan 2021, 9:22 am

Il faut de plus que l'esclave de la Mère de Dieu sache qu'il doit porter hautement son service dans toutes les occasions, se déclarer hardiment pour son serviteur et dévot contre les libertins, et ne faire jamais rien d'indigne d'une si glorieuse qualité.

Il aura soin de célébrer avec une dévotion très particulière, et avec toute la solennité possible, les fêtes de l'Immaculée Conception, de l'Annonciation, et du précieux cœur de la glorieuse Vierge, comme les grandes fêtes de l'Association de l'esclavage de la Mère de Dieu. Il aura aussi une vénération singulière pour le très doux nom de Marie, dont la fête se fait le 22 de septembre, et il ne prononcera jamais ce sacré nom qu'avec un très profond respect ; il l'invoquera avec confiance en tous ses besoins, il aura recours en toutes ses tentations, et il la pourra honorer quelquefois récitant en son honneur cinq psaumes, ou cinq antiennes ou hymnes qui se commencent par les lettres qui le composent : par exemple, récitant le Magnificat ; - Ad Dominum cum tribularer ; - Retribue servo tuo ; - In convertendo Dominus captivitatem Sion ; - Ad te levavi oculos meos ; ou bien, Magnificat ; - Ave maris stella ;  - Regina cli laetare ; - Inviolata ; - Ave Regina cælorum.

Il faut prendre quelqu'une des susdites fêtes pour le jour de la rénovation du dessein que l'on a pris de vivre et mourir esclave de la très digne Mère de Dieu. Pour ce sujet l'on fera avec une nouvelle ferveur d'esprit la protestation de lui céder tout le droit que l'on a en ses bonnes actions, et que l'on peut lui donner : comme aussi on renouvellera le dessein que l'on a eu de l'honorer en tous les moments de sa vie. L'on fera aussi un sérieux examen (ce qui serait bon de pratiquer tous les mois) de toutes ses actions, pour voir si, dans la vérité, elles sont toutes à la divine Marie : car si elles lui appartiennent (ce qui doit être à raison de la qualité d'esclave) le monde, ni la chair, ni les démons n'y doivent avoir aucune part. C'est ici qu'il faut bien examiner si la profession que l'on fait du saint esclavage est sincère, si elle consiste plus en paroles qu'en effets : et si l'on n'en a pas encore bien pénétré l'obligation, il faut commencer de le faire une bonne fois en la présence de Dieu et des saints anges. L'on considérera les fautes que l'on a commises, comme par exemple en s'appropriant quelques heures ou quelques jours de sa vie, quelqu'une de ses actions (ce qui est une injustice, puisque l'on en a fait cession entre les mains de l'auguste reine du ciel) ou bien en négligeant de travailler puissamment dans le service de sa bonne maîtresse à la pratique des vertus : car enfin la qualité d'esclave dit deux choses. La première, que, mettant la personne en la possession du maitre ou seigneur, tout ce qu'elle a et tout ce qu'elle fait est à lui : la seconde, que toute l'occupation de sa vie est de travailler pour son maître. Ces deux choses bien considérées, il y aura lieu de s'humilier fortement, et en suite de faire quelque pénitence pour demander pardon à notre sainte dame, prenant la discipline, ou jeûnant quelques jours, ou faisant quelque autre action semblable : car c'est le propre des esclaves d'être châtiés quand ils tombent en faute. L'on pourra aussi donner quelques aumônes, pour marque du tribut que l'on doit rendre à l'impératrice du ciel et de la terre, ou bien faire brûler quelques cierges devant ses images, ou contribuer en ce que l'on peut à la décoration de ses temples ou autels, selon le mouvement que l'esprit de Dieu en donnera.


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Message  Monique Dim 10 Jan 2021, 8:35 am

Pline rapporte qu'on a autrefois payé des tributs pour l'ombre : un empereur en a imposé non-seulement pour tout ce que la terre pouvait donner, mais encore pour l'air que l'on respirait. Froton, roi de Danemark, l'exigeait pour toutes les parties du corps, il est bien plus juste que nous le payons à notre Dieu en l'honneur de sa divine Mère. Les Lacédémoniens demandèrent aux Samiens pour tribut un jour de jeûne, c'est-à-dire qu'ils leur payassent autant qu'ils auraient dépensé en ce jour, eux, leurs valets et leurs chevaux. Les personnes riches peuvent en faire autant pour la gloire de la reine du ciel, donnant en aumônes ce qu'ils auraient pu employer dans les repas dont ils s'abstiennent. Louis XI offrit en hommage à la souveraine du ciel le comté de Boulogne ; saint Henri, empereur, fit bâtir ou réparer près de mille églises en son honneur ; saint François jeûnait tous les jours depuis la fête de saint Pierre jusque l'Assomption ; sainte Élisabeth pratiquait le même jeûne, mais c'était au pain et à l'eau ; le savant cardinal Tolet, de la Compagnie de Jésus, jeûnait pendant ces quarante jours qui précèdent la fête du triomphe de la reine du paradis avec la même austérité, ne mangeant que du pain et ne buvant que de l'eau. Il ne faut qu'aimer et faire ; car l'amour est tout plein d'industries, et il inspirera toujours assez de moyens aux véritables esclaves de payer le tribut à leur bonne maîtresse. C'est une excellente pratique, d'avoir une boite où l'on mette tous les jours ou toutes les semaines quelque argent de ce qu'on aura pu épargner, pour l'offrir ensuite comme un tribut. Une tentation que l'on aura surmontée, une occasion dangereuse dont l'on aura été délivré, quelque fâcheux accident dont l'on aura été préservé, un acte de vertu que l'on aura pratiqué, quelques grâces particulières que l'on aura reçues, peuvent servir d'une juste occasion pour faire quelque petite épargne, pour mettre dans ce que l'on amasse pour le tribut de notre glorieuse maîtresse ; mais l'exercice intérieur de la pratique des vertus lui sera sans doute encore plus agréable.

Ainsi, le fidèle esclave, devant travailler continuellement dans son service, s'appliquera à lui rendre quelques devoirs plus particuliers, prenant à tâche de surmonter le vice auquel il est le plus sujet, et de dompter l'inclination qui le domine davantage, ou de pratiquer la vertu qui lui est nécessaire ; et tous les actes qu'il fera de la mortification de son inclination, ou de la vertu dont il a plus de besoin, pourront composer un bouquet sacré et mystique qu'il offrira ou tous les mois, ou tous les ans, au jour de la rénovation, à la sainte dame, conférant les mois avec les mois, et les années où il est avec les années précédentes, pour remarquer s'il avance ou recule dans le service de la Mère de Dieu.


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Message  Monique Lun 11 Jan 2021, 8:26 am

La vénérable Mère de Chantal, très digne première fille du glorieux saint François de Sales, avait ramassé et mis dans une oraison tous les actes de vertu que l'on peut produire, ayant ensuite formé l'intention que toutes les fois qu'elle ferait un certain signe ou dirait de certaines paroles elle entendrait produire tous ces actes. C'est encore une pratique excellente, et qui peut suppléer en peu de temps au pouvoir que l'on n'a pas, de dire et de faire tout ce qu'un bon cœur voudrait bien. Celui qui ne fait pas le mal, mais qui le veut faire, ne laisse pas d'être criminel devant Dieu, qui regarde le cœur de l'homme ; de même, la bonne volonté de faire le bien en est considérée quand elle est sincère. Le vénérable Alphonse Rodriguez, de la Compagnie de Jésus, étant portier en l'une des maisons de cette Compagnie, avait la volonté lorsqu'il allait à la porte, de s'y rendre comme si Notre-Seigneur et sa sainte M'ère y eussent frappé eux-mêmes, et il en fut récompensé par une faveur admirable, notre débonnaire Sauveur et la glorieuse Vierge paraissant visiblement et l'embrassant avec des tendresses dignes de l'admiration de tout le paradis. Aussi était-il de la grande faveur auprès de cette aimable princesse qui, pendant les ardeurs de l'été, lui essuyait la sueur qui coulait de son visage, par un amour ineffable, avec un linge miraculeux. Ce bon frère jetant un jour du blé d'un lieu en un autre fut tellement transporté du zèle des âmes qu'il disait bonnement à Notre-Seigneur qu'il aurait eu bien le désir de convertir autant d'âmes qu'il jetait de grains de blé ; et l'adorable Jésus eut tellement agréable sa bonne volonté qu'il lui révéla qu'il aurait la même récompense pour ses désirs comme si l'effet en était arrivé.

Il faut avoir une image de la sacrée Vierge en sa chambre ou en quelque lieu de la maison, et l'honorer et faire honorer par tous ceux sur qui l'on a quelque pouvoir, comme l'image de celle qui en est la maitresse, prenant soin qu'un chacun la salue en passant, y faisant brûler quelques cierges, et l'ornant selon son pouvoir.


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Message  Monique Mar 12 Jan 2021, 7:38 am

Sainte Brigitte demandant à Notre-Seigneur quelque prière qui lui fût agréable, il lui révéla que ce serait de bénir et honorer tous les membres du corps virginal de sa très pure Mère ; et la sainte Vierge lui apparaissant ensuite lui dit que c'était elle qui lui avait obtenu la grâce de cette dévotion, et que lorsqu'elle s'en acquitterait elle serait consolée de son Fils. Nous avons déjà parlé de cette dévotion ; mais disons à présent que saint Jean Damascène la pratiquait, et Richard de Saint-Laurent, pénitencier de Rouen, qui vivait il y a plusieurs siècles. Ce grand homme exhortait de bénir tous les membres du corps sacré de la bienheureuse Vierge, pour être bénis en tous les membres de nos corps. Voici sa pratique :

« Je vous bénis, ô pieds aimables de ma bonne maîtresse, qui n'avez jamais marché que pour Notre-Seigneur ; je vous bénis, ô pures entrailles qui l'avez porté ; je vous bénis, ô cœur très aimant qui l'avez tant aimé ; je vous bénis, ô glorieuses mamelles, qui l'avez allaité ; je vous bénis, ô mains sacrées qui l'avez servi ; je vous bénis, ô bouche sainte qui lui avez donné des baisers si chastes ; je vous bénis, ô langue divine qui n'avez jamais parlé que pour lui seul ; je vous bénis, ô oreilles fidèles à écouter ses paroles ; je vous bénis, ô beaux yeux qui l'avez regardé uniquement en toutes choses ; enfin je vous bénis, ô corps tout virginal, ô âme toute céleste qui avez été le sanctuaire du divin amour, et le temple auguste de la suradorable Trinité. »

On peut faire une génuflexion à chaque salutation, et pratiquer cette dévotion ou tous les mois, ou au moins une fois l'année.

La même sainte Brigitte a eu révélation que la très sainte Mère de Dieu donnerait sa bénédiction à toutes les familles et aux personnes qui, ayant recours à elle avec une confiance filiale, lui réciteraient dévotement par trois fois le verset de l'Ave maris stella : Monstra te esse matrem.

C'est un exercice à établir dans toutes les familles, et particulièrement dans les communautés religieuses, qui attirera sans doute de grandes grâces de la mère de miséricorde.


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Message  Monique Mer 13 Jan 2021, 8:50 am

La glorieuse Vierge a fait aussi connaitre qu'elle prenait plaisir à la dévotion des sept joies principales qu'elle a eues en ce monde, et de celles dont à présent elle est comblée dans l'éternité sainte. C'est donc une louable coutume que de les honorer ; mais il ne faut pas oublier le culte que l'on doit rendre à ses douleurs, dont il y en a sept qui sont les plus remarquables.

La première est celle qu'elle porta en la circoncision de son fils bien-aimé ; la seconde, en la fuite qu'elle fut obligée de prendre en Égypte ; la troisième, en la perte de Notre-Seigneur dans le temple ; la quatrième, lorsqu'elle dit le dernier adieu à son cher Fils étant sur le point de sa douloureuse mort ; la cinquième, en la rencontre qu'elle en fît portant sa croix ; la sixième, lorsqu'elle l'assista sur le Calvaire ; la septième, le voyant expirer et le tenant mort ensuite entre ses bras.

On peut honorer ces joies et ces douleurs de notre divine maîtresse, récitant sept Pater ou sept Ave, ou faisant sept génuflexions, s'humiliant à même temps avec un profond respect devant la divine Majesté pour la remercier de ses grâces envers la très pure Vierge.

Quand ses restes arrivent, le fidèle esclave doit être tout dans une sainte joie ; il doit s'y préparer plusieurs jours auparavant par quantité de dévotions, conformément à son état ; il doit les célébrer avec tout le respect possible ; il doit en faire l'octave avec tous les sentiments qu'une véritable piété en peut donner ; tous les samedis lui seront des jours de grande dévotion, et dans ces temps, il s'appliquera encore plus particulièrement à la pratique des bonnes œuvres.

Il aura une charité spéciale pour les âmes des trépassés, gagnant les indulgences à leur intention, et faisant tout ce qu'il pourra par le sacrifice de la messe, par la communion, jeûnes, austérités, aumônes, prières par lui et par tous ceux à qui il pourra inspirer le même soin, afin que ces âmes, étant délivrées de leurs peines, aillent dans le ciel bénir, louer et aimer celle qui en est l'aimable princesse ; se souvenant que c'est toujours à elle, comme il a été expliqué, de faire l'application de nos bonnes œuvres à qui il lui plait.


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Message  Monique Jeu 14 Jan 2021, 7:50 am

Tous les matins, il se souviendra qu'il n'est plus à lui, mais à la très sacrée Vierge, ainsi, que tout ce qu'il a à faire est de la servir avec fidélité, faisant toutes ses actions purement pour Dieu, et renonçant à tout autre dessein, et tout autre vue, et faisant une sérieuse réflexion que c'est une vérité de foi : qu'il n'y a que cette unique chose nécessaire, servir et être à Dieu. Les moyens qui y conduisent sont à la vérité bien différents : les voies des religieux ne sont pas semblables à celles des séculiers, c'est pourquoi les personnes qui sont dans le siècle n'y doivent pas vivre comme celles qui sont dans les cloitres ; mais toutes, sans réserve, et le savant aussi bien que l'ignorant, le pauvre comme le riche, le roi comme le paysan, l'homme marié comme le religieux tous doivent aller à Dieu, et tous n'ont qu'une seule chose à faire, qui est de le servir.

Il faut ici remarquer les artifices du démon, qui tâche de mettre dans la plupart des esprits que de certaines choses sont nécessaires pour aller à Dieu, qui cependant sont incompatibles à leur état, pour ensuite décourager les personnes, et leur faire voir la dévotion comme une chose impossible, à moins que d'être renfermé dans un monastère. Ainsi, il fera que quelques-uns mettront la dévotion dans les jeûnes et austérités, qui n'auront pas la force de les pratiquer ; d'autres, dans la retraite, qui sont obligés à la conversation. Ces gens ne prenant pas garde que le service de Dieu ne consiste pas précisément dans de certaines choses, quoique bonnes, mais dans l'assujettissement à la volonté le Dieu, qui conduit à lui, les uns par une voie, les autres par une autre ; tellement que le prince ne doit pas se servir des moyens qui sont propres aux religieux, ni les religieux ne doivent pas prendre ceux qui sont pour les princes ; mais tous doivent tendre à une seule fin, et celui qui est marié doit avoir Dieu pour but dans son ménage, dans ses affaires, dans ses travaux, dans ses occupations, et n'y rechercher que sa gloire, aussi bien que le religieux dans tous les exercices réguliers.

Le fidèle esclave entrera donc à son réveil dans ce dessein, pour le suivre fidèlement en toutes les actions de la journée, en faisant une offrande à Dieu seul en général pour toutes ses actions moins considérables, et en particulier pour celles qui font sa principale occupation ; mais ce n'est pas assez de dire de bouche que l'on ne veut que la gloire de Dieu en tout ce que l'on pense, en tout ce que l'on dit ou fait ; mais il faut en avoir une sincère volonté, et être continuellement par état dans ce dessein, et non pas pour quelques moments pendant que l'on fait ses prières ; en sorte que toutes les fois qu'on fait réflexion sur ses actions, en quelque temps que ce puisse être, à la table aussi bien que dans l'oratoire, dans la récréation aussi bien que dans l'oraison, l'on puisse voir dans le fond de son cœur que c'est Dieu que l'on cherche et que l'on veut servie ; de telle manière que, s'il n'était pas glorifié en ce que l'on fait, l'on s'en abstiendrait courageusement, quelque inclination que la nature y pût donner.


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Message  Monique Ven 15 Jan 2021, 8:20 am

Si par faiblesse l'on commet des imperfections qui soient contraires à ce dessein, il ne faut pas que ce soit avec une entière connaissance ; mais aussitôt que l'on s'en aperçoit, l'on doit y renoncer pour ce qui regarde la part que la nature y prend, protestant que, malgré les sentiments de la partie inférieure, l'on y veut chercher la gloire de Notre-Seigneur. Heureuses les âmes qui n'y chercheront pas seulement Dieu premièrement, mais qui s'attacheront à lui seul uniquement, qui n'aimeront et ne verront que lui seul en toutes choses. Il n'est pas nécessaire de longues prières ou de grandes directions d'intention, lorsque l'on a une volonté sincère de ne chercher que Dieu en toutes choses, et que ce dessein demeure dans le fond de l'âme par état ; pour lors, une seule ou deux paroles suffisent, comme : « Ô mon tout, je ne veux que vous, je suis tout à vous, Dieu seul », et choses semblables.

L'on ne peut assez recommander le fréquent usage des oraisons jaculatoires, dont chacun se servira selon le mouvement de sa grâce. En voici quelques-unes pour ceux qui n'en ont pas l'habitude : « Ô sainte Mère de Dieu, montrez-vous être ma bonne mère... Ô mon âme, quand serons-nous tout à Marie, pour être tout à Jésus... Sainte Vierge, je vous aime, et vous veux aimer... Ô mon cœur ! souvenons-nous bien que nous ne sommes plus à nous, et qu'étant à la reine du ciel, nous ne pouvons plus disposer de nos affections... Mon âme, nous sommes les esclaves de la sainte Vierge, il ne faut donc plus penser avoir aucune liberté de mettre notre joie, ou de nous attrister de ce qui plaît ou déplaît au sang et à la nature... Ô monde, il ne faut plus avoir aucune prétention sur nous, puisque nous ne sommes plus à nous... Ô quelle injustice, ô mon âme, de faire la moindre petite action pour les créatures ! En conscience, peut-on donner ce qui n'est plus à soi ? Tout est à Marie, il n'y a donc plus rien pour aucune autre créature... Ô mes yeux, non, vous ne pouvez plus regarder ; mes oreilles, rien écouter ; ma langue, rien dire ; ma mémoire, vous appliquer volontairement qu'à ce que veut notre bonne maîtresse. »

Un moment passé avec connaissance dans la recherche de nous-mêmes ou de quelque autre créature mérite de grands châtiments, puisque, dans cet instant, nous nous tirons du domaine et de l'empire de l'auguste impératrice du paradis.


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Message  Monique Sam 16 Jan 2021, 8:09 am

Puisque tout ce que l'esclave fait est acquis à son seigneur, celui qui est dans l'esclavage de la divine Marie ne doit pas être oisif, mais travailler avec ferveur pour sa sainte dame. Quels services ne mérite pas une telle maîtresse ? Il faut donc tout faire pour elle, et faire tout ce que l'on fait de bonne grâce et avec une généreuse ferveur. C'est une douce pensée, lorsque l'on est tenté de paresse, d'ennui ou de découragement, de se souvenir que l'on agit pour la digne Mère d'un Dieu. C'est une vue capable de donner une force incroyable parmi toutes les sécheresses, aridités et répugnances que l'on peut avoir dans le service de Dieu.

Il y a de certaines bonnes œuvres que l'on doit pratiquer plus particulièrement : comme d'accompagner le très saint Sacrement, aller souvent le visiter, faire des pèlerinages aux lieux consacrés sous le nom de la très pure Vierge, aller aux hôpitaux, aux prisons, chez les pauvres honteux, assister les misérables de tout son pouvoir, soit pour ce qui regarde les peines intérieures, soit pour les besoins extérieurs ; réconcilier les ennemis, établir la paix et la charité partout, travailler avec zèle à la destruction du vice et de l'impureté, ruinant les occasions de ce péché, ne permettant jamais des familiarités indécentes, et ne souffrant en aucune façon les paroles équivoques ou trop libres, retirant avec charité les personnes qui y sont engagées, en leur procurant les secours nécessaires, empêchant que celles qui sont dans le péril n'y tombent malheureusement, se servant pour ce sujet de tous les moyens possibles , et n'épargnant rien pour la conservation de la pureté, qui est la chère vertu de la Vierge des vierges ; et c'est un service des plus agréables que l'on puisse rendre à la reine de toute pureté ; avoir un grand soin des tabernacles et des vases sacrés, comme ciboires, calices, et des corporaux, purificatoires et tout ce qui regarde le corps de notre adorable Sauveur, et empêcher de tout son pouvoir les irrévérences qui se commettent en son adorable présence dans nos églises ; procurer, comme il a déjà été dit, avec zèle des missions pour les pauvres gens de campagnes, et faire en sorte que le catéchisme soit fait avec soin dans les paroisses ; mais surtout contribuer, autant qu'il se peut, pour les missions des pays étrangers, pour en faire une conquête glorieuse à l'empire de Jésus et Marie.


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Message  Monique Dim 17 Jan 2021, 8:14 am

Comme l'on doit tenir à gloire d'être chargé des fers de l'esclavage de la reine du ciel, il est bon, de temps en temps, de baiser avec amour et respect les petites chaînes que l'on porte, comme les douces et glorieuses marques de la servitude où l'on est si heureusement engagé ; l'on doit tenir à grand honneur de faire une haute profession d'un si illustre esclavage, se déclarant partout avec une sainte hardiesse l'esclave de la Mère de Dieu, prenant cette qualité en toutes les occasions où l'on pourra s'en servir, comme dans les lettres que l'on écrit, et en d'autres semblables rencontres.

Mais la persévérance est ce qui couronne toutes les pratiques de la vertu. Il y en a beaucoup qui commencent avec une ferveur admirable, plusieurs qui continuent pendant quelques années ; mais il y en a bien peu qui persévèrent jusqu'à la fin. L'on marche facilement dans les voies de la vertu pendant que la consolation dure ; il est aisé d'aller à Dieu lorsque les mouvements qui y portent sont sensibles, qu'on ne trouve rien qui y répugne ; ou si l'on rencontre des difficultés, la douceur que l'on trouve d'autre part les fait surmonter facilement. L'on n'a pas grand peine quand les occasions où l'on est, les compagnies que l'on fréquente ne servent pas d'obstacles ; mais la difficulté est de ne pas désister dans la privation des douceurs spirituelles, de tenir bon parmi toutes les contradictions qui arrivent, de ne point retourner en arrière lorsqu'il nous semble que le ciel s'éloigne de nous, et que la terre s'en approche de bien près ; lorsque la nature se révolte, que les lumières s'éclipsent, que l'on avait de la beauté de la vertu, des grandeurs des humiliations, des richesses de la pauvreté, du bonheur des mépris, du plaisir de la douleur ; que le rien des créatures disparaît, et qu'on ne voit plus que ce que les sens découvrent ; le monde et ses plaisirs que l'on avait eus en horreur devenant agréables, l'âme étant destituée de tout le sensible, Dieu tout bon la voulant conduire par la pure foi.


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Message  Monique Lun 18 Jan 2021, 8:12 am

Oh ! Qu'il y a peu d'âmes qui soient fidèles dans ces états, qui pratiquent exactement tous leurs exercices dans la privation de tout goût et sentiment, de même qu'elles faisaient dans le temps de la consolation ! Que c'est une chose rare de persévérer dans le dégagement des créatures, lorsque l'on se trouve obligé de converser souvent avec elles, et d'avoir toujours l'esprit mortifié par des gens immortifiés. Où trouvera-t-on des personnes dont la pureté des maximes ne se corrompe pas par les maximes du monde ; qui n'aient que ces mépris pour les richesses, les honneurs et les plaisirs de la vie présente, conversant souvent avec des gens qui n'ont que de l'estime pour ces choses, et qui n'en parlent jamais qu'avec goût et plaisir ? Oh ! Combien ai-je vu d'âmes qui, après avoir mené une vie céleste, se sont toutes plongées dans la vie des sens ! Combien en ai-je connues qui, marchant à grands pas dans les voies des saints, se sont engagées dans les routes fâcheuses des pécheurs ! Ô mon âme !

Que ces expériences nous doivent être terribles ! Mais qu'il est vrai que l'on ne peut jamais assez dire que la fidélité est ce qui est de plus rare au monde ! Je ne puis n'empêcher ici de déplorer l'aveuglement de quelques âmes qui ne voient pas leurs chutes ni leurs infidélités, parce qu'il leur reste quelque désir d'être à Dieu ; qui ne connaissent pas le ciel des voies de la perfection d'où elles sont tombées, parce qu'elles tâchent de se préserver de grands péchés. Oh mon Dieu ! Que de sujets de toutes parts de nous humilier jusque dans le plus profond des abimes en la présence de notre Dieu ! Pour être un véritable esclave, il faut être tellement engagé au service de son maître, que l'on ne puisse pas s'en tirer ; il y faut vivre et il y faut mourir. Cette pensée me donne une estime incroyable et un amour indicible pour la qualité d'esclave de la souveraine du paradis, puisque, nous liant pour toute la vie au service d'une si aimable maîtresse, et nous mettant ensuite sous sa continuelle protection, il n'y a rien à craindre, mais tout à espérer. Être à Marie, c'est être délivré de l'enfer ; mais être toujours à Marie (ce qui est le propre de ses esclaves), c'est être toujours assuré de son bonheur éternel ; mais être tellement à Marie, que l'on ne puisse pas se dégager raisonnablement de son service, c'est ne pouvoir pas être malheureux. Oh mon âme !

Écoutons donc encore une fois un sage conseil, et ne cessons jamais d'en faire état. Mettons-nous ses fers aux pieds et son collier au cou, et n'ayons point de difficultés de porter ses chaînes ; ses liens nous serviront de force et de protection, et son carcan sera pour nous une école de gloire, puisque l'on y trouve le plus grand honneur de la vie, et que ces chaines ne nous attachent que pour nous sauver. C'est donc la fidélité qui est le principal devoir de l'esclave, et les moindres fautes que l'on commet à ce sujet sont dignes de châtiment.

Saint Edmond avait une sainte coutume de réciter tous les jours une prière en l'honneur de la sacrée Vierge et de son cher favori saint Jean l'Évangéliste ; mais y ayant manqué quelques jours, ce grand saint lui parut comme irrité, et donnant quelques signes comme s'il eût voulu le punir. La bonté de cet incomparable saint et son incroyable douceur ne lui permirent pas de le châtier ; il se contenta de lui faire connaître sa faute, et la peine qu'elle méritait. Ce qui doit apprendre à tous les dévots de la très pure Vierge à persévérer constamment dans leurs exercices de piété, et à ne les quitter jamais que dans l'ordre de Dieu.


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