DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
L'on doit aussi avoir une dévotion spéciale à tous les saints et saintes qui ont excellé dans l'amour de la très sacrée Vierge, comme à saint Cyrille, patriarche d'Alexandrie, qui a défendu avec tant de courage et de constance sa maternité divine, comme nous l'avons déjà remarqué : sa fête se célèbre le 28 de janvier ; à saint Ildefonse, archidiacre, et depuis archevêque de Tolède, qui a été l'invincible défenseur de sa très pure virginité, et à qui elle a donné une très belle chasuble, que l'on garde encore avec grand respect : sa fête se fait le 23 de janvier ; à saint Jean Damascène, qui a eu la main coupée à son service, écrivant pour la défense de ses images, et à qui elle restitua la main miraculeusement ; à saint Thomas de Cantorbéry, qui honorait avec tant de vénération ses sept joies principales ; à saint Bernard, son cher nourrisson, qui a si admirablement bien parlé et écrit de ses grandeurs ; à saint Norbert, fondateur du sacré ordre de Prémontré, et qui a soutenu si saintement le mystère de son Immaculée Conception ; à saint Anselme, l'un de ses dévots chapelains, qui assure qu'il est impossible de périr, lorsque l'on a un sincère recours à ses maternelles bontés ; à saint François d'Assise, qui ne respirait que son honneur et sa gloire.
Saint Dominique doit avoir un lieu très particulier parmi les saints qui ont excellé en la dévotion de la Mère de Dieu ; et l'on peut dire que ç'a été sa grâce spéciale, et, assurer qu'en ce sujet il a été l'incomparable. Tout petit qu'il était, ses plus ordinaires entretiens avec ses compagnons n'étaient que des moyens pour la servir, et il a passé toute sa vie dans une continuelle occupation de son très pur amour. Il passait la plus grande partie des nuits à lui réciter trois rosaires, dont il y en avait un pour les âmes du purgatoire, et cela avec tant de fidélité qu'il a continué cet exercice tous les jours jusqu'à la mort, même pendant tous ses voyages, quoique quelquefois il fût accablé de fatigues et de peines, et il se donnait toujours, durant ces trois rosaires, une sanglante discipline ; et, ce qui est admirable, c'est que sa discipline était de fer à trois branches, composée d'anneaux carrés d'une épaisseur considérable. Il passait les jours, les mois et les années, à la bénir, à la louer, à la servir, à l'aimer, à l'honorer, à en imprimer l'amour et la vénération dans tous les cœurs.
Ordinairement il n'avait pas d'autre sujet de ses sermons et catéchismes ou exhortations, que les grandeurs et les bontés de cette reine du paradis ; et il ne pouvait réussir avec bénédiction pour la conversion des hérétiques et pécheurs, et pour l'avancement des bonnes âmes dans les voies de la perfection, que par la prédication du saint Rosaire ; et il disait à ses religieux, que pour avoir bénédiction dans leurs emplois, ils devaient être singulièrement dévots à Notre-Dame. Quand il allait par les chemins, sa conversation se passait dans les discours de la croix et de la sainte Vierge. En fort peu de temps il prêcha avec tant de ferveur la dévotion de son saint Rosaire, en plusieurs provinces et royaumes, que des milliers de personnes de toutes sortes d'états, de conditions et de pays s'y enrôlaient : et par ce moyen il renouvela l'esprit de dévotion pour la Mère de Dieu dans toute l'Église, et par toute la terre habitable : et nous voyons encore aujourd'hui, avec joie et consolation, que cet esprit de piété continue et s'établit de plus en plus parmi tous les Chrétiens. La Mère de Dieu qui ne se laisse jamais vaincre en amour, a eu pour ce grand saint tout ce qu'un cœur vraiment maternel peut avoir. À l'âge de huit à neuf ans elle voulut en être la maitresse, l'instruisant comme son bien-aimé disciple : elle lui donna même un chapelet miraculeux.
À l'âge de dix-huit ans elle le choisit pour son époux, elle l'assistait en tous ses besoins, elle le défendait par miracles, même contre ses ennemis, elle lui donnait des secours merveilleux dans ses maladies, elle le prenait entre ses bras, l'appliquait sur sa poitrine virginale pour lui faire reposer, lui faisait couler de son précieux lait dans la bouche, l'appelant tantôt son ami, tantôt son enfant, et quelquefois son époux. Ç'a été cette mère d'amour, qui l'a obtenu à l'Église, et c'est un don qu'elle a fait à tous les fidèles : après sa mort le siècle dernier, elle même voulut en faire le tableau miraculeux de sa divine main, et elle le donna, paraissant visiblement avec sainte Madeleine et sainte Catherine, la martyre protectrice de l'ordre, aux religieux ses enfants dans le couvent de Loriano. Il s'y est fait un grand nombre de miracles, et les copies, dont il y en a une dans le célèbre couvent les Pères réformés de Saint-Honoré de Paris, se gardent avec une singulière vénération ; non seulement les esclaves de la divine Marie, mais les ecclésiastiques séculiers aussi bien que les réguliers, et les premières dignités des diocèses, doivent avoir une dévotion envers ce saint, ayant été chanoine, archidiacre, grand vicaire, et ensuite fondateur de l'un des plus célèbres ordres de l'Église.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Saint Ignace, fondateur de la Compagnie de Jésus, et saint François Xavier, ont excellé en la dévotion de la Mère de Dieu : le vénérable Alphonse Rodriguez eut révélation que dans les desseins de Dieu, la compagnie avait été établie en partie pour soutenir l'immaculée Conception de Notre-Dame. Sainte Thérèse a toujours aimé et honoré la très pure Vierge comme sa bonne mère, et auparavant qu'elle entrât dans le couvent de Saint-Joseph, Notre-Seigneur lui donna une couronne, la remerciant du service qu'elle rendait à sa Mère : la sainte Mère de Dieu, de son côté remerciant le P. Yvagnes, Dominicain, du soin qu'il avait pris de sainte Thérèse le revêtit d'un habit blanc miraculeux, et le combla de ses plus saintes bénédictions. Tout l'ordre du Carmel est sous sa protection particulière, et elle en est la dame, la protectrice et la mère.
Saint Elie et saint Élisée les premiers Pères de cet ordre doivent être honorés avec de grands respects. Les saintes Gertrude, Mechtilde, Catherine, doivent aussi tenir rang parmi les saintes de la dévotion spéciale des esclaves, aussi bien que saint François de Sales, fondateur d'un ordre tout dédié à la gloire de cette souveraine du ciel : et enfin tous les saints et saintes qui ont une application spéciale au service de cette auguste reine : l'on ne doit pas oublier le bienheureux Herman Joseph, l'un de ses plus chers favoris.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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CHAPITRE XX
Avoir une dévotion particulière à saint Jean l'Évangéliste********
Il n'est pas possible d'aimer Notre-Seigneur et sa virginale Mère, sans avoir de l'amour pour saint Jean l'évangéliste. Il a été le bien-aimé du tout aimable Jésus, et de la non jamais assez aimée Marie. Or l'âme chrétienne qui ne doit agir que par l'esprit de Jésus-Christ, et qui doit suivre toutes ses inclinations aimant tout ce qu'il aime, et n'aimant que ce qu'il aime, doit par une suite nécessaire aimer saint Jean l'évangéliste, qui a été aimé si tendrement du débonnaire Sauveur, qui dans l'Écriture y est appelé le disciple que Jésus aimait. (Jean. XXI, 7) C'est lui-même qui porte ce témoignage dans son Évangile, et qui assure que son témoignage est vrai ; il n'a pas de peur de rien faire en cela contre la modestie, car c'était une chose si publique parmi les disciples, que pas un n'ignorait qu'il ne fut le cher favori de l'adorable Jésus. Et le Saint-Esprit qui guidait sa plume a voulu que cette glorieuse faveur fut marquée dans l'Évangile, afin que toute la postérité le sût, et fin que tous les Chrétiens, apprenant qu'il avait été si caressé de leur divin roi, lui eussent une dévotion très particulière.
Sa dévotion est donc fondée sur l'Évangile, et elle ne peut être que très juste, puisqu'elle est toute conforme aux inclinations de notre Maitre. Quelquefois il arrive et même dans les dévotions des saints, que l'on s'applique plus aux uns qu'aux autres par mouvement de nature ; mais ici il n'y a rien à craindre, puisqu'en l'aimant, et l'aimant extraordinairement, nous faisons ce que Jésus-Christ a fait.
A suivre...
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L'amour de cet adorable Théandre a paru particulièrement en le faisant succéder à sa place, lui donna pour mère sa divine Mère, et le donnant pour enfant à celle dont il a voulu être le fils bien-aimé. Pour connaitre une si rare faveur il faudrait connaitre entièrement les inconcevables grandeurs de la Mère de Dieu, mais c'est ce qui ne se peut faire, la connaissance, dit saint Bernardin de Sienne, en étant réservée à Dieu seul : pour en prendre quelque idée, l'on peut considérer que la très sacrée Vierge est plus aux yeux de Dieu elle seule que tout le reste des créatures tant angéliques que humaines : ainsi Notre-Seigneur ayant fait son testament sur le Calvaire, et lui ayant laissé comme pour son héritage, pour tous ses biens, possessions, et revenus (pour parler dans l'esprit de l'Écriture), lui a plus donné que s'il lui avait fait présent de tout le monde, et d'un million de mondes. Le substituant en sa place, dit un ancien, il devenait comme un autre Jésus.
C'est pourquoi un grand auteur, faisant parler la divine Marie sur ce sujet à l'archange saint Gabriel, l'introduit parlant de la sorte à cet esprit glorieux : « Allez, Gabriel, je n'ai plus besoin de vos soins, j'ai un autre ange à présent, qui est un ange incarné qui prend soin de tout ce qui me regarde. » Ce grand et incomparable saint représentait tous les Chrétiens sur le Calvaire, et spécialement ceux qui devaient appartenir d'une manière plus particulière à la glorieuse Vierge : c'est pourquoi il en devait posséder éminemment les grâces, selon la doctrine de ces théologiens, qui estiment que les patriarches des ordres renferment en leurs personnes d'une manière éminente, les grâces de tous leurs religieux. Cette pensée fait voir une élévation des grâces incomparables en ce cher favori de Jésus et Marie ; aussi si l'Écriture nous apprend que les divisions des grâces sont différentes, et qu'aux uns est accordé le don de prophétie, aux autres celui de la parole, à ceux-ci la grâce de faire des miracles, à ceux-là le privilège d'entendre les langues, le Saint-Esprit distribuant ses dons comme il veut, et à qui il veut ; il faut dire que notre saint est d'une manière inouïe, privilégié, puisque toutes les grâces lui sont accordées. Il est patriarche, prophète, apôtre, évangéliste, martyr, docteur, prédicateur, confesseur, anachorète, vierge : mais ce qui est grandement surprenant, c'est que non-seulement il possède toutes les grâces, mais il excelle dans chacune de ces différentes grâces.
Les autres saints ont éclaté particulièrement en la pratique de quelque vertu qui leur a été spéciale ; mais la vertu particulière de ce disciple bien-aimé est de n'avoir aucune vertu particulière, mais de les posséder toutes dans un degré très éminent ; ainsi il n'est pas seulement patriarche de toutes les Églises d'Asie, mais patriarche de tous les Chrétiens, et spécialement de tous les dévots de la souveraine du ciel.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Il est prophète, et ses prophéties sont si sublimes, que les Pères ont dit qu'elles contiennent autant de mystère que de paroles ; les prophéties de son Apocalypse sont appelées simplement la révélation par excellence. Il est apôtre, mais entre les apôtres, il est le bien-aimé. Il est évangéliste, et entre les évangélistes il en est l'aigle ; il est martyr, mais son martyre sera comme celui de la Reine des martyrs, il aura assez de peine pour mourir, ses souffrances devaient lui donner la mort sans miracle, et cependant il ne laissera pas de vivre par un coup du ciel extraordinaire ; il est docteur, mais si admirable, que les Pères l'ont appelé le théologien par excellence. Il est prédicateur, mais si puissant, qu'il en est appelé du Fils de Dieu même l'enfant de tonnerre. (Marc. III, 17) Il est confesseur, mais d'une manière toute glorieuse dans son exil, dans lequel il parut comme une solide colonne de la foi, soutenant tous les fidèles dans la confession du nom de Jésus. Il est anachorète dans sa solitude de Pathmos, où ce cœur parfaitement détaché menait une vie plus céleste que humaine. Il est vierge, mais c'est un vierge qui garde la pureté de la Vierge des vierges : ces grâces incomparables marquent assez la force de l'amour de Notre-Seigneur en son endroit, comme d'un bon père, mais les caresses d'une mère très tendre ne lui manqueront pas. Le Fils de Dieu n'a rien de caché pour lui ; il lui dit tous ses secrets, il lui fait part de tous ses desseins, il lui montre sa gloire sur le Thabor, il le mène avec lui au Jardin. Saint Pierre n'osant lui demander qui serait le malheureux qui le trahirait, il s'adressa à lui, sachant que l'adorable Jésus ne pouvait lui rien celer ; il repose sur la poitrine de son Maître et y reçoit toutes les faveurs dont une créature mortelle peut être capable. C'est le cher disciple du cœur, et il y était si attentif que c'est lui qui parle du coup de lance, l'avant remarqué particulièrement, car sa vue était toujours arrêtée sur la place du cœur amoureux du tout aimable Jésus. Notre-Seigneur paraissant après sa résurrection, et saint Pierre ne le connaissant pas, il lui dit que c'était le Seigneur ; il le reconnut aussitôt, car c'est le propre de l'amour d'appliquer fortement au sujet que l'on aime.
Ses lumières ont été admirables, et saint Jean Chrysostome enseigne que les anges ont appris plusieurs choses de ce saint, que les chérubins mêmes et les séraphins l'écoutaient avec attention. Jamais, dit saint Ambroise, homme n'a connu Dieu avec une plus sublime sagesse ; il passe les vertus des cieux, s'élève au-dessus des anges, et va trouver le Verbe uni à Dieu : aussi était-il appelé le dépositaire des trésors du Verbe incarné. Les païens mêmes ont admiré la profondeur de son style, et ont cru que ses paroles devaient être écrites en lettres d'or en tous les lieux les plus honorables. La reine du ciel le députe pour donner une règle de foi à saint Grégoire, le faiseur de miracles. Le Saint-Esprit nous découvre assez la grandeur et la sainteté de ses écrits, puisqu'il déclare (Apoc. I, 3) bien heureux celui qui les lit et les entend. Saint Paul, dit Origène, proteste qu'il a vu des choses qu'il n'est pas permis à un homme de dire, et cependant saint Jean les révèle dans le commencement de son Évangile ; donc il doit être plus qu'homme selon la pensée de cet ancien.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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L'abbé Rupert écrit qu'après l'ascension de Notre-Seigneur, la très sainte Vierge vivant des biens qui étaient aumônés en commun pour les fidèles, saint Jean l'évangéliste avait soin d'aller prendre tous les jours ce qui lui était donné, et lui apportait avec beaucoup de respect, recevant une double portion, l'une pour sa très bonne mère et l'autre pour lui. Mais il ne s'appliquait pas seulement à sa nourriture corporelle, il la nourrissait tous les jours de la communion vivifiante du précieux corps de son Fils, célébrant le très saint sacrifice de la messe en sa sainte présence. Une si bonne mère ne pouvait se séparer de ce fils aîné de tous ses enfants adoptifs. Elle le suivit jusqu'à Éphèse, comme il est rapporté dans une lettre que le concile tenu en cette ville adresse au clergé de Constantinople ; et celle à qui toutes choses obéissent, à qui Dieu même a bien voulu s'assujettir, obéit à saint Jean.
Ô aimable favori du roi et de la reine du ciel, souffrez ici ces élans d'amour en votre glorieuse présence. Ô que les faveurs que le ciel vous fait sont rares ! Et que vos grâces sont précieuses ! Vous avez en votre suite la Mère d'un Dieu. Ô bien-aimé disciple, que vous êtes heureux, et que votre suite est magnifique ! Elle est plus glorieuse que si elle était composée de toutes les têtes couronnées, elle est plus considérable que si tous les séraphins quittaient l'empirée pour vous accompagner. Mais qui pourrait dire tous les mystères, tous les secrets que cette Mère de bonté a appris à cet aimable saint, tous les dons dont elle l'a ennobli ? Si saint Jean-Baptiste a été sanctifié à une seule de ses paroles, que devons-nous penser de la sainteté à laquelle notre saint a été élevé par la conversation familière qu'il a eue avec elle durant tant d'années ! Si les plus impurs, à ses approches, se sentaient portés à la pureté, à quel comble de pureté ce saint est-il arrivé, qui a passé une partie de sa vie avec cette reine des anges ? Si le cœur de la divine Marie était une fournaise d'amour, de quels feux son âme était-elle embrasée ?
Nous lisons les vies des saints, et si l'on y rapporte que la très sainte Vierge leur ait parlé quelquefois, c'est ce qui fait le sujet de leurs éloges ; quelles louanges donc mérite cet enfant de Marie, qui a joui si longtemps, et avec des privautés si saintes, des entretiens de celle dont la seule voix réjouit tout le paradis ?
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Son pouvoir est tout rempli de prodiges, car il chassait les diables des corps des possédés et ressuscitait les morts ; mais sa charité était incomparable, comme son bénin cœur avait reposé sur le cœur tout d'amour du Sauveur des hommes, et qu'il avait tant d'entrée dans le cœur de Marie, le plus aimant et le plus miséricordieux de tous les cœurs après celui de Jésus, il ne faut pas s'étonner s'il était si plein d'un amour admirable pour le cher prochain. Il compatissait aux misères des pauvres avec des tendresses ravissantes ; ayant trouvé un pauvre misérable sur le point de se désespérer, comme il n'avait pas d'argent, vivant dans une grande pauvreté, il changea les feuilles des arbres en or et les cailloux en pierres précieuses pour l'assister dans ses besoins. Saint Jérôme rapporte qu'à toutes les assemblées des fidèles, tous ses sermons se réduisaient à ces paroles : Mes petits enfants, entr'aimez-vous les uns les autres, dont ses disciples étant enfin ennuyés, il leur fit une réponse, dit ce Père, digne de sa personne sacrée, c'est le commandement du Seigneur, et il suffit. L'on voit, dans ses Épîtres, des expressions toutes pleines de tendresses ; mais, ce qui est bien remarquable, c'est que sa divine charité souffrait tout, espérait tout, ne rebutait jamais personne ; ce qu'il fit bien voir par un exemple merveilleux qui est rapporté dans l'Histoire ecclésiastique.
Cet homme apostolique avait confié le soin d'un jeune homme à un évêque qu'il considérait, c'était une personne de grande espérance et qui promettait beaucoup ; mais, comme l'homme est inconstant dans ses voies, ce qui nous doit tous faire craindre, il se laissa tellement aller aux tentations du diable, qu'il se mit à voler dans les bois, et il ne fut pas longtemps à mener cette misérable vie, que toute la troupe malheureuse des voleurs le choisit pour leur guide et leur capitaine. Le saint apôtre passant par le lieu et la résidence de l'évêque à qui il l'avait confié, et après lui avoir demandé des nouvelles du jeune homme, ayant appris l'état dans lequel il était, et lui ayant remontré doucement qu'il ne devait pas l'abandonner, quel criminel qu'il pût être, il se met en chemin, tout vieux qu'il était et chargé d'années, et s'en va le chercher. La divine Providence, qui le conduisait, lui ayant fait trouver, le jeune homme fut tellement surpris à la rencontre du saint apôtre, qu'il prit la fuite, ayant honte de paraître en la présence de l'homme de Dieu.
Le bon vieillard commença à doubler le pas, l'amour donnant des forces à son corps il le poursuivit amoureusement, et enfin la douceur de ses paroles l'ayant obligé de s'arrêter, bien loin de crier ou de lui faire des reproches, il le consola par ses paroles toutes de charité, et comme il remarquait qu'il cachait sa main qui avait fait tant de meurtres, et qui avait rougi tant de fois dans le sang innocent de ceux qu'il avait tués, il la lui prit avec beaucoup d'amour et la baisa avec des tendresses capables de toucher les cœurs les plus insensibles ; aussi le jeune fut-il touché, et, quittant sa malheureuse vie, il suivit le saint et fit une conversion admirable ; et, à quelque temps de là, il entra dans l'état ecclésiastique, ayant reçu des grâces très extraordinaires par les intercessions du charitable saint.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Sa charité est si admirable qu'après sa mort même tout glorieux qu'il est dans le ciel, il veut bien encore se charger de la conduite particulière des âmes comme il l'a fait voir en sainte Élisabeth de Hongrie, qui l'a eu pour son directeur par une grâce spéciale. Comme il a été le disciple de la croix, il lui en procura de bien grandes, et en bon nombre, et en des sujets très sensibles, c'est ce qu'il lui avait promis, lorsque lui apparaissant visiblement, il lui dit : Élisabeth ma chère fille, les croix ne vous manqueront pas.
Il prend des soins merveilleux de la perfection de ses dévots. À Paris, un jeune homme qui portait son nom et qui lui avait une dévotion particulière, entendit une voix la nuit, qui l'animait à persévérer dans le dessein qu'il avait pris de quitter le monde. Huit jours après, entendant la même voix, et demandant qui c'était qui lui parlait ? C'est saint Jean l'évangéliste, répond le charitable apôtre, et huit jours encore après, le saint revenant, lui mit en main un papier, dans lequel était écrit le nom de la Compagnie de Jésus, ce qui l'obligea d'entrer dans cette Compagnie.
Il assiste à la mort de ses dévots, il leur obtient des grâces de la Mère de Dieu. Ferdinand, prince de Portugal, un peu avant que de mourir, fut visité par sa chère maîtresse, la très digne Mère de Dieu, accompagnée d'un grand nombre d'esprits bienheureux, dont saint Michel qui était l'un de ces esprits célestes, s'étant prosterné devant cette reine du ciel, la pria de tirer des misères de cette vie le prince Ferdinand, et de le mettre en leur compagnie. Saint Jean l'évangéliste en qui ce grand prince avait une confiance toute particulière, lui fit aussi la même demande, mais il ajouta qu'il méritait les couronnes dues aux âmes chastes, ayant gardé son innocence baptismale, qu'il perdrait s'il tardait davantage avec les hommes. Souvent les personnes innocentes sont enlevées par une mort qui paraît précipitée ; mais c'est par une douce disposition de l'amoureuse providence de Dieu, qui les ôte du monde, de peur qu'y restant davantage ils n'en prennent la corruption.
Mais il n'a pas seulement des bontés toutes particulières pour ses dévots, il en a encore pour les amis de ses dévots ; c'est assez que l'on appartienne en quelque manière aux personnes qui l'honorent pour en recevoir des assistances admirables. Saint Édouard, roi d'Angleterre, une dévotion singulière à ce glorieux apôtre, et il ne refusait jamais rien de tout ce que l'on lui demandait en son nom, et pour l'amour de lui : une dévotion si rare mérita que saint Jean l'Évangéliste lui parût déguisé en pèlerin, lui demandant l'aumône en son nom, et comme c'était dans un temps où le roi (son aumônier étant absent) n'avait rien sur soi qu'un anneau de très grand prix, le saint le voulut éprouver : mais l'amour du prince pour ce grand apôtre, surpassant toutes les inclinations qu'il pouvait avoir pour les choses du monde qui lui étaient les plus chères, fit que sans autre considération il tira l'anneau de son doigt pour le donner à ce pèlerin déguisé.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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À quelque temps de là deux pèlerins anglais étant allés aux lieux saints de Jérusalem, et s'étant trouvés surpris de la nuit, ils découvrirent enfin une maison, où ils trouvèrent un vénérable vieillard qui les reçut avec une grande douceur et leur donna à manger : mais le lendemain ils furent bien étonnés de voir disparaître cette maison et d'apprendre de la propre bouche de leur hôte qu'il était saint Jean l'évangéliste, et qu'il aimait uniquement leur roi pour sa rare chasteté ; il leur donna l'anneau qu'il avait reçu de sa main, et les chargea d'avertir le roi que dans six mois il mourrait, qu'il ne manquerait pas d'assister à son trépas, et de le visiter à ce moment qui fait la décision de tout notre bonheur.
Le pieux Ribadeneïra conseille de prendre ce saint apôtre pour avocat auprès de la Mère de Dieu ; sa qualité d'enfant de Marie, tous les soins qu'il en a pris pendant sa vie toute sainte, l'amour du cœur de ce saint pour Marie, sont des motifs tout puissants pour nous engager à l'honorer en cette qualité, et nous servir de lui dans toutes les requêtes que nous aurons à présenter à notre bonne Mère. Les contemplatifs et les personnes d'oraison doivent y avoir recours, ce saint ayant été élevé dans les plus hauts degrés de l'oraison et union avec Notre-Seigneur, les personnes peinées tant intérieurement qu'extérieurement doivent se mettre sous sa protection, car il est le disciple de la croix, et il a eu pour partage le calice de son Maître, avec la très sacrée Vierge.
Les prédicateurs, missionnaires, docteurs, confesseurs, doivent avoir pour lui une vénération singulière, ayant possédé toutes ces qualités d'une manière très éminente. Ceux qui sont dans la vie active, ceux qui sont dans la retraite et la solitude, doivent lui être bien dévots, ayant mené toutes ces deux vies et les ayant consommées dans une très haute perfection. Mais surtout il doit être le grand patron des vierges, et des âmes chastes, celles qui ont dessein de garder la chasteté doivent lui recommander sur toutes choses, lui mettre entre les mains, et sous sa bienheureuse protection ; Jésus-Christ, ayant confié à ses soins, la virginité de la Vierge des vierges, sa très pure et immaculée Mère, on ne peut pas la mettre en meilleure main. Enfin, comme il a reçu toutes sortes de grâces, toutes sortes de personnes de tous états et conditions ont droit de le prendre pour patron et protecteur. Comme son cœur a été rempli d'une charité si universelle, même pour les plus grands pécheurs, les plus misérables peuvent avec confiance s'approcher de ce saint aussi bien que les plus parfaits ; son charitable cœur n'est fermé à personne, il est ouvert à tous ; l'on célèbre sa fête deux fois l'année, le vingt-septième de décembre et le sixième de mai, où l'on fait mémoire de ses cruelles souffrances devant la Porte-Latine.
On peut s'y préparer comme aux fêtes de grande dévotion, par jeûnes ou abstinence, par des mortifications intérieures, par des aumônes, par des prières, par la visite de quelque chapelle ou autel consacré à Dieu en son honneur, assister le jour aux sermons qui s'en font, ne manquer pas de s'y communier, lire quelque chose de sa vie ou de ses grandeurs, tâcher de gagner quelques personnes pour leur en inspirer le culte et la dévotion, donner de ses images ou des livres qui parlent de ce saint. Il y en a qui récitent tous les jours le commencement de son Évangile : In principio ; les premiers Chrétiens le portaient sur eux, et à présent, par l'ordre de l'Église, les prêtres le lisent à la fin de la sainte messe. Dieu a donné souvent des secours miraculeux à ceux qui le lisent, ou même qui le portent par pure dévotion, sans y mêler rien de superstitieux, comme quelques-uns font par les mouvements du démon, qui tâche de la sorte de profaner les choses les plus saintes ; et l'expérience fait voir que c'est un singulier remède contre les maléfices, les vérités d'un Dieu incarné qu'il renferme mettant eu fuite les diables, et détruisant tous les maléfices des sorciers et magiciens ses suppôts.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Quand l'Église, dans le verset qu'elle chante en son office, le jour de sa fête, parle de l'honneur qui lui est dû, elle dit qu'il le faut beaucoup honorer ; et l'expression qu'elle en fait est très remarquable.
Saint Thomas et le vénérable Bède estiment qu'il est au ciel en corps et en âme, Notre-Seigneur et sa sainte Mère n'ayant pas voulu différer la résurrection de son corps au temps de la résurrection générale, voulant avoir auprès d'eux leur cher favori. Il est vrai qu'il y en a qui tiennent qu'il n'est pas mort, et qu'il est réservé pour combattre l'Antéchrist dans les derniers temps ; mais saint Jérôme écrit qu'il est mort à Éphèse.
La tradition de sa mort est merveilleuse, car l'on rapporte qu'avant fait assembler les fidèles à son ordinaire, comme ses disciples le portaient entre leurs bras (son extrême vieillesse l'empêchant de marcher), après leur avoir donné la paix de Jésus-Christ et pris congé d'eux, il se fit descendre dans une fosse où il fut à même temps environné d'une grande lumière, qui ayant produit dans l'esprit de tous les fidèles beaucoup d'admiration et de profonds respects, cette lumière étant disparue, comme ils voulurent s'approcher de ce sacré tombeau, ils n'y trouvèrent plus rien, mais seulement une liqueur précieuse et toute pleine d'effets admirables.
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
CHAPITRE XXI
Avoir un respect singulier pour les neuf chœurs des anges
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Nous ne pouvons ici oublier les saints anges, aussi ce sont ces esprits bienheureux qui, tous les premiers, ont commencé d'honorer notre glorieuse princesse, qui leur fut montrée selon la doctrine de plusieurs grands théologiens (ensuite de Notre-Seigneur), dont elle devait être la très digne Mère. Sainte Brigitte, dans ses Révélations, nous apprend que ces purs esprits aussitôt qu'ils furent créés, dans la vue qu'ils en eurent, furent tellement embrasés de l'amour de cette aimable princesse, que, s'il avait été nécessaire de n'être pas afin qu'elle fût, ils auraient avec joie préféré son être à celui qu'ils avaient reçu. Ce qui est de très particulier à ces esprits tout d'amour, c'est que leur amour est le premier d'entre tous les amours des pures créatures. Il est aussi le plus fidèle. S'ils ont été les premiers à honorer et aimer la très pure Vierge, ils ont été les plus fidèles dans son amour et son service, n'y ayant jamais commis la moindre petite imperfection, ni ne s'étant jamais relâché de leur admirable ferveur, étant le propre de ces esprits immortels de persévérer constamment en ce qu'ils ont une fois entrepris. Ils en ont manifesté les grandeurs qui leur avaient été révélées dès le commencement du monde, aux saints prophètes de l'ancienne loi, n'oubliant rien de tout ce qui se pouvait faire pour en imprimer la vénération et l'amour dans les siècles même qui ont précédé sa sainte naissance.
Sainte Brigitte a appris du ciel qu'ils furent remplis d'une joie extraordinaire le jour heureux qu'elle parut en notre terre ; jour fortuné pour eux et pour nous, qui doit être gravé dans la mémoire de tous les hommes avec des caractères ineffaçables. Ces gardes de l'empirée tenaient à grand honneur de lui tenir compagnie dans sa retraite au temple, et ce fut l'un des premiers de leur cour glorieuse, l'archange saint Gabriel, qui fut envoyé du ciel vers cette auguste princesse, en qualité d'ambassadeur, pour lui annoncer qu'elle serait Mère de Dieu. Quelques-uns tiennent que ce saint archange lui a servi d'ange gardien ; mais il y a de grands docteurs qui soutiennent qu'elle n'a jamais eu d'anges gardiens, mais bien des anges servants, qui se rendaient auprès de leur reine et dame à grosses troupes, pour lui rendre leurs respects et leurs services. Saint Bonaventure enseigne que saint Michel, qui est député de Dieu pour assister les âmes à la mort, et leur servir d'avocat au jour de leur jugement, attend les ordres de la Mère de Dieu pour défendre plus particulièrement celles qui lui ont eu une dévotion particulière.
Notre-Seigneur a aussi révélé que les anges s'appliquaient avec soin plus spécial à garder les personnes qui se préparaient auparavant les fêtes de la sainte Vierge à les bien célébrer par des jeûnes, oraisons, aumônes, pèlerinages et autres bonnes œuvres. Ces esprits bienheureux en ont quelquefois fait des images admirables, que Dieu a honorées de grand nombre de miracles, pour enflammer les cœurs de plus en plus en l'amour de cette non jamais assez aimée Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Il y a tant de raisons qui se présentent en foule de toutes parts, et qui nous obligent d'aimer les anges, qu'il faut être tout à fait insensible si l'on est touché de leur amour. Pour moi, je ne vois pas qu'un esprit raisonnable s'en puisse défendre, s'il lui reste encore un cœur capable d'aimer.
Mais entre un si grand nombre de motifs que l'on peut avoir de les honorer, ceux-là sont des plus pressants à un cœur qui aime la Mère de Dieu, que l'on prend des respects extraordinaires, qu'ils ont pour cette Souveraine du firmament. Dans celte vue ses esclaves se souviendront de faire une haute profession de la dévotion des anges, les honorant et les faisant honorer en toutes les manières possibles, soit en procurant qu'il s'établisse des confréries ou associations en leur honneur, soit en distribuant les livres qui traitent de ces esprits d'amour, et ayant soin qu'on en fasse des sermons qui apprennent aux peuples leurs grandeurs et leurs bontés, et les moyens de leur avoir une sincère dévotion, soit en donnant des images aux églises et particulièrement aux pauvres gens de la campagne, les instruisant de ce qu'ils doivent savoirs de leurs anges gardiens, car ordinairement ils ne savent pas qu'ils en ont, et même ignorent entièrement ce que c'est que les anges, travaillant à ce que les pasteurs et les missionnaires leur en fassent des catéchismes, et leur apprenant quelques prières pour les honorer tous les jours ; soit enfin exhortant, si on ne le peut pas soi-même, à bâtir quelques chapelles sous leur invocation.
L'on doit aussi se souvenir combien il est juste de converser d'esprit familièrement avec eux, se retirant quelquefois un quart d'heure ou une demi-heure pour les entretenir, pour leur parler à l'aise, pour leur découvrir son cœur, pour leur exposer ses besoins, pour les remercier de leurs charitables bontés. C'est une pratique excellente de les voir intérieurement dans la rencontre des personnes, puisqu'il est certain que tous les hommes ont chacun un ange, et s'accoutumer à les regarder de l'esprit pendant que les yeux de notre corps s'arrêtent aux personnes qu'ils voient extérieurement.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Il y a de leurs dévots qui dans les villes font quelque tour de rues, dans le dessein de faire la cour à tous les anges des personnes que l'on y rencontre, et il est encore bon de les regarder dans les églises et les assemblées où il y a beaucoup de monde ; mais particulièrement l'on y doit penser passant par les villages où ces glorieux esprits sont presque dans un oubli universel. Il y en a qui font un pacte sacré avec eux, qu'autant de fois qu'ils salueront quelqu'un, ils sont dessein de les saluer, renouvelant de temps en temps ce dessein : il y en a qui, parlant aux personnes qui leur sont familières, disent en les saluant, qu'ils saluent leurs saints anges, et l'on a vu quelquefois une si pieuse pratique s'établir en peu de temps à l'imitation les uns des autres. Il s'en rencontre qui, écrivant des lettres, n'oublient jamais de saluer les anges de ceux à qui ils écrivent, comme aussi les anges des pays où ils demeurent.
Quelques-uns prennent intention, en célébrant les fêtes des saints, de faire en même temps celles des anges qui les ont gardés, rapportant à leur bonheur tout ce qui se fait en l'honneur des saints dont on célèbre la mémoire, comme les jeûnes, communions et autres dévotions. Il est encore bien juste, lorsqu'on est seul, de les saluer par les exercices des génuflexions, en faisant neuf, par exemple, en l'honneur des neuf chœurs des anges, demandant quelquefois la bénédiction à son saint ange gardien à genoux, en lui demandant pardon du peu d'usage que l'on a fait de toutes ses bontés. Il faut prendre garde de ne se pas contenter de la dévotion aux anges gardiens, mais il faut de plus honorer tous les neuf chœurs des anges, ce qui est une dévotion assez rare ; car comme les hommes sont fort matériels, ils ont de la peine à s'élever aux choses purement spirituelles, à moins qu'il n'y ait quelques rapports sensibles d'intérêt comme aux anges gardiens.
Il faut donc avoir de la dévotion pour les Séraphins, ce sont ceux qui obtiennent le pur amour ; les Chérubins, qui ont la grâce de la lumière pour éclairer les esprits ; les Trônes, ils ont le don de la paix pour les âmes qui leur demandent ; les Dominations, qui sont comme les secrétaires d'État du grand roi Jésus et de sa divine Mère, afin que ces esprits glorieux nous expédient nos affaires en la cour du paradis ; les Puissances, pour triompher des diables et résister à leurs tentations ; les Principautés, pour avoir l'empire sur ses passions ; les Vertus, pour obtenir le don de courage et de constance dans les voies de Dieu ; les Archanges, pour mépriser les choses temporelles et ne s'attacher plus qu'au Dieu de l'éternité ; les Anges, pour la pureté, l'humilité, la charité du prochain, la pratique de l'oraison et de toutes les autres vertus. Il est bon de se préparer aux fêtes de la très sacrée Vierge neuf jours auparavant, prenant tous les jours l'un des neuf chœurs à honorer entendant la messe, donnant quelques aumônes faisant quelque mortification, pendant quelque temps du jour au chœur que l'on honore, afin qu'il supplée à nos manquements envers la Mère de Dieu, et qu'il nous obtienne de Dieu tout bon le don d'une véritable et sincère dévotion. L'on peut quelquefois donner neuf aumônes en leur honneur, pratiquer neuf actes de mortification, réciter neuf psaumes, visiter neuf autels et autres choses semblables.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Le mardi est un jour consacré particulièrement en l'honneur de tous les anges : le vingt-neuvième jour de septembre, le septième de mai, l'on en fait encore la fête, quoique particulièrement de saint Gabriel. En la province de Normandie, le seizième d'octobre leur est dédié. Le premier jour d'octobre, qui n'est pas empêché par une fête de neuf leçons, se fait la fête des anges gardiens, et le premier jour de mars en quelques églises. L'on fait la fête de saint Gabriel archange, à qui l'on doit avoir une dévotion spéciale, à raison de ce qu'il a été à la très sainte Vierge, le dix-huitième de mars en quelques lieux, et le vingt-quatrième en d'autres. La fête de saint Raphaël se célèbre le vingtième de novembre en quelques endroits, et en quelques autres en l'un des dimanches qui se rencontrent entre Pâques et la Pentecôte : tous ces jours doivent être de grandes solennités pour les esclaves de Notre-Dame, et l'on doit s'y préparer comme aux fêtes de la pus grande dévotion.
C'est une pratique assez solide, faisant des pèlerinages, de prendre pour compagnon quelqu'un de ces esprits glorieux et tâcher de converser avec lui pendant le chemin, le priant de saluer la très digne Mère de Dieu de notre part. L'on doit aussi prendre garde à saluer les anges qui prennent le soin des lieux et des églises consacrés à Notre-Dame, les anges des saints qui ont excellé en sa dévotion, afin que nous puissions les imiter.
Quand il se rencontre quelque chapelle sous l'invocation des saints anges, il en faut prendre tous les soins possibles, tant pour ce qui regarde l'extérieur que pour l'intérieur, y faisant adorer Dieu en esprit et en vérité. Il y a des villes où plusieurs personnes de piété s'assemblent et prennent un jour tous les mois pour les visiter et y faire leurs dévotions, et l'on tâche d'y faire prêcher de la dévotion à ces esprits si aimables, si aimants et, hélas ! si peu aimés.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
CHAPITRE XXII
Les illustres esclaves de l'auguste Mère de Dieu
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Ce chapitre est tiré d'un petit livre De la dévotion du saint esclavage de la Mère de Dieu, imprimé, il y a quelques années à Paris, dans lequel, comme nous y avons remarqué avec une consolation singulière, que plusieurs personnes d'une haute sainteté, d'un rare mérite et d'une éminente condition, avaient tenu à honneur de porter les glorieuses chaînes de la reine du ciel ; nous avons cru que Dieu tout bon serait glorifié si nous rapportions dans ce petit ouvrage ce que nous y avons lu, y ajoutant quelques choses extraites des Fondations de sainte Thérèse et des livres de l'Histoire générale des Pères Carmes déchaussés.
Saint Odilon, abbé de Cluny, de l'ordre de Saint-Benoît, est un des premiers qui s'est donné à Notre-Dame en qualité d'esclave par une cérémonie solennelle ; nous disons par une cérémonie solennelle, car il est bien croyable que plusieurs autres, dans les siècles précédents, s'étaient attachés au service de notre honorable maîtresse par la même dévotion, quoique ce ne fût pas avec les mêmes marques extérieures. Il mourut le 1er janvier.
Le bienheureux Marin, frère du bienheureux Pierre Damien, cardinal, qui reçut à sa mort la récompense du tribut qu'il avait payé fidèlement à sa bienheureuse maîtresse pendant sa vie. Il mourut le 9 juin.
Le bienheureux Vautier de Birback, à qui Notre-Dame, ensuite de cette généreuse action, fit connaître qu'elle voulait qu'il achevât de lui consacrer sa vie dans l'ordre de Cîteaux, l'ayant honoré d'un grand nombre de merveilles. Il mourut le 22 janvier.
La vénérable Catherine de Cardonne, du sang royal d'Aragon, faisait une haute profession d'être entièrement à Notre-Dame ; elle portait au cou la marque de son esclavage, qui était un petit carcan de fer. Elle a été un prodige de grâces dans ces derniers siècles, et elle sera l'étonnement de ceux qui nous suivront, ayant fait des progrès si merveilleux dans les voies de la perfection sous la conduite de celle qui en est la mère et la reine de toutes les vertus, sa bonne dame et maitresse , qu'il n'est pas possible de les apprendre sans les admirer et sans entrer dans de grands sentiments de louange, d'amour et d'actions de grâces pour tant de merveilles qu'il a plu à la divine bonté d'opérer dans cette grande âme : les actions admirables de sa sainte vie sont dignement rapportées dans l'histoire de la réforme des révérends Pères Carmes déchaussés, dans laquelle il y en a un livre tout entier, qui fait une partie de ces grandes choses que Dieu tout bon a voulu faire dans ces derniers temps en la réforme de l'ordre de Notre-Dame du mont Carmel, dans lequel on a vu en nos jours pratiquer tout ce qui se lit de plus saint et de plus étonnant dans les Vies des anciens Pères du désert. Le seul convent d'Altomire, dit de Notre-Dame du Secours, en petit donner d'illustres témoignages. Ce couvent était situé dans un pays de neiges et de glaces, où les vents soufflaient avec tant d'impétuosité que les religieux qui y demeuraient ne pouvaient presque pas s'entendre lorsqu'ils récitaient leur office, leur maison était si chétive que la neige y tombait de tous côtés, en sorte que les religieux s'en trouvaient tout couverts dans le peu de temps qu'ils donnaient par pure nécessité au sommeil, aussi n'avaient-ils que deux couvertures pour toute la communauté. Ils marchaient nu-pieds sans sandales sur les pointes des rochers, qui étaient tout glacés et quelquefois ils se trouvaient ensevelis dans les neiges et dans le danger d'y mourir.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Le froid y est si âpre, qu'un frère revenant de la fontaine où il allait prendre de l'eau qui leur était nécessaire, fut obligé de s'approcher du feu pour déprendre ses mains qui étaient gelées à la cruche qu'il portait, et parmi les rigueurs d'un pays si fâcheux, ces bons religieux paraissaient immobiles comme des statues dans l'exercice de la sainte oraison, qui leur était presque continuelle ; les mets les plus délicats de leur pauvre table n'était que des pois, encore le frère cuisinier (si l'on l'appeler de la sorte, car hélas ! quelle cuisine !) proposa aux Pères, qu'il semblait qu'il suffisait d'en faire cuire une seul jour pour tout le reste de la semaine, et que ce serait le moyen de trouver plus de temps pour la sainte oraison. Cette proposition fut reçue avec joie du supérieur et de la communauté, et l'on trouva que c'était trop donner au corps que de lui faire cuire tous les jours ce qui lui était nécessaire pour le soutenir faiblement, et que d'autre part, ce soin ne donnait pas assez de temps au bon frère pour l'exercice de la contemplation.
Dans un autre de leurs couvents un colombier leur servait de maison, là ces colombes mystiques et sacrées retirées aussi bien que celles des Cantiques dans le trou de la pierre, et dans la caverne de la masure méditant le jour et la nuit en la loi du Seigneur, faisaient entendre leurs voix aux oreilles du divin époux, et étaient vues avec plaisir de celui qui connaît toutes choses, menant une vie cachée au monde et ne désirant d'être connues que de Dieu seul. Leurs cellules ou plutôt les petits trous de ce colombier étaient de véritables tombeaux, où ces illustres morts étaient ensevelis. Il n'y avait pas un seul siège pour s'asseoir dans tout le couvent, et l'un des Pères ayant proposé d'avoir un petit banc quand on serait en communauté, tous les autres rejetèrent cette proposition, et témoignèrent être dans une grande crainte que cette pensée ne fût un commencement de quelque relâche de leur sainte rigueur. Ils avaient des maisons où ils ne mangeaient que des herbes qu'ils allaient cueillir dans les champs, et telles que la terre les produisait, sans être cultivées, et ils n'y mêlaient de l'huile ou du sel qu'aux grandes fêtes, comme celle de Pâques, de la Pentecôte, ou de l'Assomption de Notre-Dame.
C'était dans les jours de bénédiction et de grâce, que la vénérable Catherine de Cardonne vivait dans un affreux désert. Elle avait vécu plusieurs années dans la cour d'Espagne, ayant toujours eu un grand soin de sa conscience, comme le remarque sainte Thérèse, pendant qu'elle a demeuré parmi les grands du monde, s'exerçant aussi dans les pénitences, dont le désir crût en elle de telle sorte, qu'elle résolut de se retirer en quelque lieu solitaire, où seule elle pût jouir de Dieu, et s'adonner entièrement à la pénitence sans être divertie ou empêchée de personne. Elle s'enfuit donc de la cour, s'étant travestie, ayant pris l'habit d'homme par un mouvement extraordinaire de l'esprit de Dieu, qu'elle garda même depuis qu'elle fut découverte : et ce qui est surprenant, c'est que l'habit de la réforme de Notre-Dame du mont Carmel, qui lui fut montré plusieurs fois miraculeusement dans son désert, par Notre-Seigneur, et saint Elie, et qu'elle devait porter dans la suite du temps, était l'habit des religieux de cet Ordre, et non pas des religieuses : elle prit cet habit de Notre Dame des Carmes, dit sainte Thérèse, en présence de tous les religieux du couvent de Patrane en l'église de Saint-Pierre, quoique sans désir d'être religieuse, à quoi jamais elle n'eut d'inclination, parce que, comme assure cette séraphique sainte, Notre-Seigneur la conduisant par un autre chemin elle avait crainte que l'obéissance ne lui retranchât ses pénitences et ne la privât de sa chère solitude. Nous rapporterons ici ce que sainte Thérèse, dont nous venons de parler, écrit dans ses Fondations, de la vie de cette âme admirable.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Considérant la pénitence de cette sainte (c'est comme elle parle de la vénérable Catherine de Cardonne, qu'elle venait de nommer un peu auparavant), vous voyez, mes sœurs, de combien elle nous devance, animez-vous par un tel exemple à servir Notre-Seigneur avec une nouvelle ferveur, puisque nous n'avons pas sujet de faire moins qu'elle, vu que nous ne venons point de personnes si nobles et si délicates. Car bien que cela n'importe pas, je le dis néanmoins, parce qu'elle avait été élevée et nourrie avec beaucoup de délicatesse, conformément à son extraction, étant de la maison des ducs de Cardonne. Depuis sa retraite, m'écrivant quelquefois, elle signait seulement la pécheresse. Ceux qui mettront par écrit sa vie diront les grandes choses qu'il y a à remarquer. Ayant résolu de se retirer en quelque lieu solitaire, elle communiquait ce dessein à ses confesseurs qui ne pouvaient y consentir, parce que le monde est maintenant si plongé dans la discrétion, que je ne m'étonne pas qu'ils tiennent cela pour folie. Le P. François de Torrez que je connais très bien, et que je tiens pour un saint, qui vit dans une grande ferveur de pénitence et d'oraison accompagnée d'un bon nombre de persécutions, lui dit qu'elle ne différât pas davantage à suivre la vocation de Dieu.
Cette dame découvrit son dessein à un ermite qui était à Alcale, et le pria de l'accompagner, lui chargeant de n'en dire jamais rien à personne. Ils partirent donc ensemble, et arrivèrent au lieu où est bâti à présent ce monastère (elle parle du couvent de Notre-Dame du Secours) où elle trouva une petite caverne dans laquelle à peine elle se pouvait tenir ; et l'ermite la laissant en ce lieu s'en retourna. Mais de grâce quel amour la conduisait, puisqu'elle n'avait aucun soin de ce qu'elle devait manger, ni des dangers qui lui pouvaient arriver, ni de l'infamie qu'elle pouvait encourir lorsqu'on ignorerait ce qu'elle serait devenue ! Ah ! Que cette sainte âme devait être pure !
J'ai ouï beaucoup de choses de la grande austérité de sa vie, et je crois que ce qu'on m'en a dit était le moins de ce qu'elle pratiquait. Je rapporterai ce que quelques personnes ont ouï d'elle-même, parce que sa franchise et sa candeur étaient grandes, ce qui provenait d'une profonde et singulière humilité : et comme elle connaissait si clairement qu'elle n'avait aucun bien de soi, mais que tout lui venait de la main libérale de son Dieu, elle était fort éloignée de la vaine gloire, et se réjouissait de dire les grâces que Dieu lui faisait. Chose qui est à la vérité dangereuse pour ceux qui ne sont pas parvenus à cet état, parce que pour le moins cela leur serait imputé à une propre louange. Elle dit aux personnes dont j'ai parlé qu'elle avait demeuré huit ans dans cette grotte, qu'elle y avait été plusieurs jours ne mangeant que des herbes et des racines des champs, parce que les trois pains que l'ermite lui avait laissés étant finis, elle demeura destituée de toute sorte de provision, jusqu'à ce qu'un petit berger vint en ce lieu qui apportait du pain et de la farine, dont elle faisait cuire de petits tourteaux desquels elle mangeait de trois jours en trois jours, sans prendre autre chose.
Mais ce qu'elle souffrait de la part des diables (suivant ce qu'elle a dit elle-même), était plus étrange et plus terrible. Car quelquefois ils lui paraissaient comme de grands dogues, et lui montaient sur les épaules ; d'autres fois ils se présentaient devant elle en forme de couleuvres, dont néanmoins elle n'avait aucune peur.
Devant que le monastère se fît, elle allait entendre la messe en un monastère de religieux de la Mercy, distant d'un quart de lieue de sa retraite, et quelquefois elle s'y en allait à genoux : son habit était de bureau, et sa tunique de gros drap : et il était fait de telle sorte qu'on l'eût pris pour celui d'un homme.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Quelques années après qu'elle eut demeuré ainsi seule, Notre-Seigneur voulut que sa vertu fût divulguée, et on commença à lui porter tant de dévotion, qu'elle ne pouvait se sauver de la multitude des gens qui accouraient pour la voir. Depuis le temps que nos religieux y furent, ils n'avaient point d'autre remède pour ce grand abord de gens, que de la faire monter sur un lieu éminent, afin que de là elle donnât sa bénédiction, et par ce moyen ils se garantissaient de cette foule de peuple.
La sainte Cardonne s'en alla en cour, ce qui ne lui fut pas une petite croix, et elle n'y manqua point de murmures, ni aussi de travaux ! Nos religieuses m'ont assuré qu'il sortait d'elle une suave odeur, que même sa ceinture et son habit retenaient encore cette agréable senteur, quoique ces vêtements fussent si grossiers, qu'avec la chaleur qui était très grande, ils devaient plutôt jeter quelque puanteur, qu'exhaler une si douce odeur. Son corps est enterré dans une chapelle de Notre-Dame, de qui elle était extrêmement dévote, jusqu'à ce qu'on fasse une plus grande église pour l'inhumer avec plus grand honneur, comme il est raisonnable.
Le seul désir de l'imiter (si j'eusse pu) me donnait de la consolation, mais peu néanmoins, parce que je vois que toute ma vie s'est écoulée en désirs, et pour les œuvres je n'en fais point. Ah ! Que la miséricorde de Dieu me soit propice ! En qui j'ai eu toujours confiance ; je le demande à Sa Majesté par son sacré Fils et par la Vierge Notre-Dame, de laquelle par la bonté de Notre-Seigneur je porte l'habit. Un jour achevant de communier en cette sainte église, j'eus un très grand recueillement, avec une suspension qui m'aliéna. Lors cette sainte femme se représenta à moi par une vision intellectuelle comme un corps glorieux, étant en la compagnie de quelques anges, et elle me dit que je ne me lassasse point, mais que je tâchasse de tirer en avant ces fondations. J'entendis par là, quoiqu'elle ne me le déclarât pas, qu'elle m'aidait auprès de Dieu : elle me dit aussi quelques autres choses qu'il n'est pas nécessaire d'écrire. Je demeurai fort consolée, et espère en la bonté de Notre-Seigneur qu'avec un si bon aide comme est celui de ses prières, je pourrai servir sa majesté en quelque chose. Or vous voyez, mes sœurs, que tous ses travaux ont pris fin avec celle de sa vie, et que la gloire qu'elle a sera d'une éternelle durée : efforçons-nous pour l'amour de Notre-Seigneur à suivre notre sœur (nous ayant en horreur nous-mêmes) comme elle a fait en ce monde. Nous achèverons enfin notre pèlerinage, puisque tout passe si promptement, et que toutes choses prennent fin.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
C'est de la sorte qu'en parle cette séraphique sainte, et elle avait raison de dire que ce qu'on lui en avait dit était le moins de ce qu'elle pratiquait, car les actions que Notre-Seigneur et sa sainte Mère ont opérées en elle sont si grandes, qu'il serait bien difficile de les déclarer. Sainte Thérèse comme nous venons de le dire assure, qu'on lui avait rapporté qu'elle avait demeuré huit ans dans une grotte en un lieu désert, et qu'elle y avait été plusieurs jours n'y mangeant que des herbes, les trois pains que l'ermite lui avait laissés étant finis, jusqu'à ce qu'un berger vint en ce lieu qui lui apporta du pain. Mais non-seulement cette femme forte et vertueuse vierge fut plusieurs jours ne mangeant que des herbes mais encore plusieurs années ; car s'étant retirée en l'année 1562, elle fut trois ans entiers sans être reconnue de personne : car quoiqu'elle allât en une église qui était éloignée de son désert d'un quart de lieu ou d'une demi-lieue, pour y entendre la messe, et pour s'y confesser, elle ne se découvrait jamais à son confesseur, et afin de se mieux déguiser, elle avait coutume de grossir sa voix pour cacher son sexe ; et lorsqu'elle se retirait en sa grotte, elle faisait tant de tours et détours, que ceux qui avaient envie de l'observer, étaient enfin contraints de cesser leur curieuse poursuite. Mais enfin elle fut découverte par un berger nommé Benitez, qui trouva le lieu de sa grotte, et ensuite par des prêtres qui reconnurent son sexe, ayant entré dans sa caverne lorsqu'elle n'y était pas, et y ayant trouvé des lettres de dom Jean d'Autriche qui firent connaitre que c'était une femme.
Or durant les trois années qu'elle demeura inconnue dans sa caverne qui n'était fermée que par une claie de genêts, couchant à plate terre, elle avait pour oreiller une pierre, et pour nourriture les herbes toutes crues de la campagne, et se condamna à paitre ordinairement sur la terre comme une brebis, sans se vouloir servir de ses mains, encore qu'elle n'en mangeait qu'une certaine quantité, et sans aucun choix, et en la même manière que les ânes qui paissent en ces lieux-là. Ayant rencontré une fois deux asperges en ses mains, et les ayant mangées pressée de faim, elle en fit une étrange pénitence. Nous avons dit qu'ayant été découverte, elle ne quitta pas l'habit d'homme, ce qui obligea le nonce apostolique de lui faire une sévère correction, et lui ayant répondu qu'elle n'était pas la première femme qui en avait usé de la sorte, il est bien vrai, lui dit le nonce, que quelques saintes l'ont porté, mais elles n'étaient pas reconnues pour femmes : et lui ayant commandé de quitter le capuce, il se trouva tellement changé par une disposition divine, qu'il entra dans les sentiments de la vénérable de Cardonne, et lui permit de porter l'habit de Carme déchaussé.
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Il fit ensuite tant d'état de ses mérites, qu'il lui ordonna de prier pour la victoire des Chrétiens sur les Turcs, ce qu'elle fit s'étant mise en retraite, dans le temps que les deux armées étaient aux approches pour le combat. Pour lors, elle eut une vision d'un procès agité devant le tribunal de Dieu entre les diables et les anges ; les diables demandaient le châtiment des péchés énormes des catholiques par les Turcs, et les anges criaient miséricorde pour les Chrétiens. Je ne puis passer ceci sans remarquer qu'une des plus grandes punitions que Dieu exerce sur les fidèles, est de les abandonner aux infidèles : c'est pourquoi nous lisons au IIe Livre des Machabées (X, 4) que les fidèles du peuple de Dieu prosternés en terre, priaient le Seigneur qu'il ne permit plus qu'ils tombassent dans les premiers malheurs, mais que si par leurs péchés ils venaient à mériter sa juste colère, il les punit sans les livrer aux barbares et aux blasphémateurs de son saint nom. Hélas ! nous avons tous sujet de craindre, nous voyons que la plus florissante partie de l'empire chrétien est possédé par les Turcs, qui dans la suite des siècles font toujours ce nouveaux progrès sur les Chrétiens, parce que les Chrétiens continuent et augmentent leurs péchés.
Je reviens à la vénérable de Cardonne qui vit en esprit la bataille de Lépante, et durant ce temps elle faisait de grands cris, tantôt disant : Seigneur, le vent est contraire, si vous ne commandez qu'il change, nous sommes perdus. D'autres fois : Mon Seigneur, vous avez fait changer le vent, achevez, mon Dieu, ce que vous avez commencé. Elle invoquait la très sainte Vierge, et ensuite elle se mit à faire des cris d'allégresse pour la victoire gagnée, et déclara que dom Jean d'Autriche l'avait remportée, ce qui fut trouvé véritable par l'événement.
Cela n'empêcha pas que le monde parla diversement de sa vertu et elle fut mise à l'inquisition, mais le P. Gaspard de Salazar de la Compagnie de Jésus ayant été député pour l'examiner, trouva tant de solidité en sa vertu qu'il l'approuva hautement, et en disait mille louanges ; ainsi elle sortit avec honneur du saint tribunal de l'inquisition.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Clémence de la Sainte-Trinité de l'illustre maison de Manriquez, religieuse réformée de la Mercy, fut si jalouse de ses glorieux liens, qu'elle ne signait jamais ses lettres qu'en ces termes : L'indigne esclave de la Mère de Dieu. Elle voulait même avec un fer chaud s'en imprimer les stigmates sur le visage ; mais Notre-Dame l'en empêcha, elle mourut le 26 avril l'an 1612.
Le P. Sauveur Théatin établit cette dévotion par toute la Sicile, et en fit ériger une belle chapelle à Palerme. Notre-Darne envoya par saint Joseph le tableau qui est à l'autel, et qui a fait plusieurs miracles, au frère Vincent Scarpatus, le compagnon fidèle de ses travaux et de sa dévotion. Il mourut l'an 1613, le 15 octobre.
Le P. Jean de Lavalle, illustre martyr de la Compagnie de Jésus au Mexique, avança soigneusement l'esclavage en ce nouveau monde, et fut couronné glu martyre, travaillant à dresser un autel à Notre-Dame. L'on trouva après sa mort sur son cœur la cédulle de l'engagement, qu'il avait contracté avec sa bonne maîtresse en se faisant son esclave. Il mourut le 18 novembre en l'année 1616.
Le P. Paul Joseph Dariage de la Compagnie de Jésus, qui se nommait toujours l'esclave de Marie, et portait sur son cœur l'écrit par lequel il s'était consacré à elle, et s'était obligé à lui payer son tribut tous les ans, tous les mois, toutes les semaines, tous les jours et toutes les heures. C'était un homme fort fervent et fort zélé, qui mourut embrassant son crucifix sans aucune maladie, le 6 de septembre, l'an 1622.
Le P. Simon de Roias, de l'ordre de la Sainte-Trinité, prédicateur du roi catholique Philippe III, et confesseur de la reine Marguerite, sa femme, pour rendre cette dévotion universelle en érigea des associations dans toute l'Espagne. Il mourut le 29 de septembre 1624 et fut honoré comme un saint de tout le clergé d'Espagne. Nous en avons parlé ci-dessus, et sa rare dévotion, et le zèle incroyable qu'il a fait paraître pour la gloire de la très sainte Mère de Dieu, méritent que toute la postérité en parle avec respect, et que sa mémoire soit en bénédiction ès siècles des siècles.
Catherine de Herrera, dame de haute qualité, qui s'étant rangée au tiers ordre de saint Dominique, établit l'esclavage parmi toutes les personnes de condition, et leur fit choisir la fête de l'Annonciation pour payer solennellement leur tribut par un dîner magnifique, qu'elles donnaient aux pauvres. Elle mourut le 25 décembre, environ l'an 1630.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
La mère Agnès de Jésus, de l'ordre du glorieux patriarche saint Dominique, décéda à Langeac, le 19 d'octobre 1634, admirable en la conversation familière qu'elle a eue avec Notre-Seigneur, la très sacrée Vierge, les bons anges et particulièrement son saint ange gardien, et avec plusieurs saints et saintes du ciel ; et dans la soif insatiable qu'elle a toujours portée des souffrances, n'étant jamais rassasiée de croix, quoiqu'elle en souffrît des plus rudes, ayant été un prodige de sainteté en notre siècle, et l'une des plus illustres esclaves de la reine du ciel, environ l'âge de sept ans, elle se donna en qualité d'esclave à cette auguste souveraine, en ayant reçu un commandement exprès par une voix du ciel qui lui dit : « Rends-toi esclave de la sainte Vierge, et elle te protégera de tes ennemis, » et ce qui est bien remarquable, c'est qu'alors la dévotion de l'esclavage n'était pas connue dans le lieu où elle demeurait. Aussitôt qu'elle fut retournée à la maison de son père, elle chercha une chaîne de fer, que la Providence lui fit rencontrer incontinent selon son souhait, et elle se la mit sur la chair au tour des reins pour témoignage de sa servitude. Plusieurs bonnes âmes, dit l'histoire de sa Vie, ont été émues par son exemple à vouloir être au nombre des esclaves de la Mère de Dieu, dans la confrérie qui en est établie en la célèbre église de Notre-Dame du Puy. L'une des plus chères pratiques de cette grande chère âme a été de renouveler souvent jusqu'à la mort cette heureuse donation de soi-même à la Mère de Dieu. Dans cette vue en la charge de supérieure de son couvent, elle ne s'y regardait que comme la vicaire de la sainte Vierge. Cette souveraine du ciel, pour marque de l'agrément qu'elle a pour cette dévotion, lui mit un jour une chaîne d'or au cou, lui disant : « Je te reçois encore pour mon esclave : » et comme un jour de l'Assomption elle renouvelait encore cette offrande, la très sacrée Vierge se fit voir à elle avec sainte Cécile, et lui dit : « Je te reçois encore une fois pour mon esclave » puis sainte Cécile prenant la parole : « Toutes les personnes, lui dit-elle, qui se rendront ainsi esclaves de la très sainte Vierge, jouiront dans le ciel d'une grande liberté. »
Il est bon de dire ici en l'honneur de saint Joseph, époux de la Vierge des vierges, et nous écrivons ceci le jour de sa fête ; que cette sainte âme assurait que Notre-Seigneur accordait ce qu'on lui demandait, lorsqu'on le priait par ce saint, et qu'on lui représentait les services qu'il lui avait rendus.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Le P. Vincent Caraffe, septième général de la Compagnie de Jésus, qui, pour marque de sa sainte servitude, portait au pied un cercle de fer, et disait que sa douleur était de n'en pouvoir traîner publiquement la chaîne. Il mourut en haute opinion de sainteté le 8 juin 1643. Il était si ennemi du monde et de ce que le monde estime, qu'il aima mieux s'exposer à coucher dans une solitude où il n'y avait aucune maison, que de rester une seule nuit chez une princesse, sa parente. Il avait coutume de dire, lorsqu'il avait été obligé de se trouver dans le palais des grands : Chassons le mauvais air ; et il se mettait en prières pour en être délivré.
Étant de l'illustre maison des Caraffe, il prenait plaisir à dire qu'il était le fils d'un pauvre homme, entendant son père nourricier. Il avait un amour admirable pour le mépris, ce qui l'incitait à aller dans les grandes places de Naples, monté sur un âne, pour se rendre ridicule ; ce qui aigrit une fois si fortement un seigneur de sa famille, qu'il descendit de sa chambre avec un bâton pour le frapper, s'imaginant qu'il y allait de son honneur de ne pas souffrir que ce saint homme, qui était son proche parent, s'exposât de la sorte à la raillerie de toute une populace, et aux mépris des personnes de condition. Il était si simple en sa manière d'habit, que, tout général qu'il était, il portait sa soutane fort courte, comme les frères coadjuteurs de la Compagnie. Je sais une princesse qui, l'ayant vu plusieurs fois à Rome, avait remarqué cette particularité avec étonnement. Il avait un zèle indicible pour la pauvreté ; et même, étant général, il ne pouvait souffrir aucun tableau considérable en sa chambre : son inclination pour la sainte abjection le portait à aller laver les plats, et faire les fonctions les plus basses et les plus viles de la maison.
Sa seule vue marquait sa sainteté ; et un homme s'est trouvé guéri miraculeusement, ayant été pressé intérieurement de demander sa santé à Dieu par les mérites du P. Vincent Caraffe, qui vivait encore ; la seule vue qu'il en avait eue une fois dans une église lui ayant laissé une telle estime, qu'il était persuadé que c'était un saint. Enfin sa charité l'a fait mourir, ayant gagné la maladie dont il mourut dans le service des pauvres. C'est ainsi que la souveraine du ciel prend soin de ses fidèles esclaves, lorsqu'ils se laissent conduire par les mouvements de la grâce, qu'elle leur impètre de son Fils bien-aimé.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
Il serait bien difficile de rapporter ici toutes les personnes illustres qui ont mis le haut point de leur gloire dans l'esclavage de cette grande reine du ciel. Il suffira de dire qu'elle a été reçue avec respect, pratiquée avec zèle par de très grands saints, et par les premières personnes de l'Église et de l'état séculier. Plusieurs cardinaux, archevêques, évêques, abbés, abbesses, et quantité de monastères tout entiers ont tenu à grand honneur de porter les chaines qui les attachaient à une si auguste princesse. Plusieurs rois, reines, princes, princesses, ducs, marquis, comtes, barons, et autres seigneurs se sont engagés heureusement dans ses fers, et se sont attachés à ses chaines, se rendant esclaves de celle qui est la Mère de celui en qui seul on trouve une véritable liberté.
Le roi catholique Philippe III, se rangeant au nombre des esclaves de Notre-Dame avec toute sa cour, en fit faire une fête publique durant huit jours. Philippe IV embrassa la même dévotion, avec quantité de princes et de princesses. Ladislas, roi de Pologne, voulut que la dévotion de l'esclavage fut établie dans son royaume, et en prit lui-même le premier les glorieuses chaines à Bruxelles.
En 1626, le jour de l'Assomption de la reine du ciel et de la terre, un grand nombre de prélats et princes, seigneurs, et dames se mirent au nombre de ses esclaves, dont les principaux furent Marie reine-mère du roi Louis XIII. L'infante Isabelle, Marguerite de Lorraine, duchesse d'Orléans ; le cardinal Infant, le cardinal de la Cueva, le prince Thomas et le duc de Bavière. Ils voulurent même donner à la postérité des marques extérieures de leur dévotion par leurs signes que l'on voit en la manière que nous allons rapporter dans le livre qui en fut dressé.
La sérénissime infante des Pays-Bas, étant dans ses États, signa la première comme il est écrit ci-dessous.
A Isabel Clara Eugenia esclava della Virgen Maria.
Ensuite on remarque le signe de Marie, reine-mère du roi très chrétien Louis XIII. Marie reine de France et de Navarre, mère du roi, esclave de la très glorieuse Vierge Marie, Mère de Dieu, Notre-Dame.
En une autre page : Marguerite de Lorraine, duchesse d'Orléans, femme de Monsieur le frère unique du roi de France, esclave de la Vierge Marie, Notre-Dame.
Dans le catalogue des hommes : El cardenal Infante esclavo della Virgen Maria.
Les autres princes et princesses donnèrent leurs noms avec la même piété, se déclarant hautement les esclaves de celle dont les fers sont plus glorieux que toutes les couronnes et diadèmes.
Charles Emmanuel, duc de Savoie, avec tous ses enfants, et le cardinal Maurice, se sont engagés dans le même esclavage.
Mais le saint cardinal de Bérulle, instituteur des prêtres de l'Oratoire de France, et l'un des premiers supérieurs des religieuses Carmélites de ce royaume selon la réforme de sainte Thérèse, a fait triompher son zèle au sujet de cette dévotion. Il n'oublia rien et fit toutes choses pour acquérir des esclaves à la Mère de Dieu. Son zèle à l'ordinaire ne manqua pas de contradiction, il y eut plusieurs personnes qui y trouvèrent bien à redire ; mais le tout ayant été examiné par les plus grands prélats de France, ils y donnèrent les justes approbations que sa rare et solide dévotion méritait.
A suivre...
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Re: DIEU SEUL ou Le saint esclavage de l'admirable Mère de Dieu - M. Henri-Marie Boudon
ORAISON
POUR S'OFFRIR À LA TRÈS SAINTE VIERGE,
EN QUALITÉ D'ESCLAVE
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Très-sainte et suradorable Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, Dieu d'infinie majesté, devant qui les cieux et la terre, tous les anges et les hommes, et la très sacrée Vierge même ne sont qu'un pur néant, abîmé devant vos divines grandeurs, je reconnais que je ne suis rien et que je ne puis rien, non pas même dire une seule parole chrétiennement, ni avoir la moindre bonne pensée pour l'éternité. Pénétré de cette vérité, je mets toute ma confiance en votre seule vertu, et je n'espère qu'en vos amoureuses bontés.
Je confesse que je suis un serviteur inutile, un pauvre pécheur, qui ne suis digne que de l'enfer, qui ne mérite que votre colère, et à qui rien autre chose n'appartient que la damnation éternelle. Je confesse que mes péchés me rendent indigne entièrement de vos miséricordes, que j'implore, ô Père éternel, avec les secours de votre grâce, par les mérites des souffrances et de la mort adorable de Jésus-Christ Notre-Seigneur, votre Fils bien-aimé, mon très débonnaire sauveur et toute mon espérance. Appuyé sur sa divine grâce je déteste et ai en horreur, en général et en particulier, tons les péchés que j'ai commis depuis l'usage de raison jusqu'à présent, parce qu'ils vous déplaisent et parce qu'ils vous offensent ; ni la crainte de l'enfer, ô mon Dieu ! ni la peur de perdre le paradis ne sont pas les motifs de ma douleur ; ce n'est pas aussi seulement à raison de tant de bontés que vous avez eues pour moi, de tant de miséricordes et de grâces, et tant de dons que vous nous avez communiqués si libéralement, que je regrette mes péchés : je les ai en horreur, mon Dieu, à raison de ce que vous êtes ; je désire que mon âme en ait toute la douleur possible, parce qu'ils sont contre vous. Je veux, selon vos ordres, m'en confesser de tous au prêtre votre ministre, comme vous l'avez commandé, et à l'avenir, avec le secours de votre grâce, j'aimerais mieux mourir que de vous offenser, faisant une ferme résolution non-seulement d'éviter le péché, mais toutes les occasions prochaines du péché, et désirant sérieusement satisfaire pour tous les péchés que j'ai commis contre la justice en la manière que vos serviteurs l'ordonneront.
Ensuite, ô mon Seigneur, mon cœur dit en votre divine présence, et sous la protection de votre puissante main, qu'il veut dès à présent commencer une nouvelle vie, ne vivant plus, ô adorable Jésus, mon Sauveur, qu'en vous, de vous, par vous et pour vous. Tout ce qui me reste donc à faire durant toute ma vie est de vous plaire, d'exécuter vos ordres et suivre fidèlement vos divines volontés. Je vois bien que c'est là la grande affaire, l'affaire des affaires, et l'unique affaire que nous ayons au monde.
Mais parce que votre bon plaisir a été de vous donner à nous par la très sainte Vierge, et que vous voulez que nous nous donnions à vous par cette glorieuse Princesse, et que, dans cette vue, vous l'avez choisie pour votre très sainte mère, et avez bien voulu vous assujettir à elle et lui obéir par une humilité infiniment étonnante, en l'honneur de cette admirable dépendance, aujourd'hui, en présence de toute la cour céleste, je la prends et choisis pour ma très bonne et très chère mère, pour ma très sainte patronne, pour ma fidèle avocate, pour ma chère maîtresse, pour ma souveraine et ma reine, m'engageant à être le reste de ma vie son vassal et son esclave.
Grande reine, prosterné donc à vos pieds, avec tous les respects et tous les sentiments les plus tendres dont mon cur est capable, je vous consacre ma liberté et vous cède tout le droit que j'ai sur moi-même et sur toutes mes actions, vous en laissant la disposition entière, au moins autant que je le puis selon les ordres de votre Fils bien-aimé, et conformément à mon état et vocation, pour l'appliquer à qui bon vous semblera, me l'ôtant quand il vous plaira, selon votre bon plaisir et durant ma vie et après ma mort.
Ô mon âme ! Que nous sommes heureux d'être entièrement de la sorte à la divine Marie ! Ne nous regardons donc plus jamais que comme une chose qui lui est entièrement dévouée et consacrée, comme une chose qui lui appartient et qui est entièrement à elle. Non, nous ne sommes plus à nous, nous ne sommes plus à aucune créature du monde ; il ne faut donc plus vivre que pour son service et n'entreprendre jamais rien qu'avec sa dépendance.
Ô mon saint ange ! Assistez-moi dans une si sainte résolution ! Esprits célestes de tous les neuf churs des anges ! Esprits si aimants et si aimables ! Aidez-moi à aimer ma divine Princesse, offrez-lui le don que je lui fais de ce que je suis et de tout ce qui m'appartient. Glorieux saints et saintes, et particulièrement mes patrons et patronnes, bienheureux saint Joseph, aimable saint Jean l'évangéliste, vous tous qui avez excellé spécialement dans l'amour et la dévotion de ma grande reine, obtenez-moi quelque part au zèle fervent et à la fidélité inviolable que vous lui avez gardée, pour l'honneur et la gloire de Jésus-Christ, notre Seigneur, qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit dans les siècles des siècles.------------
Note : Il faut prendre garde à dire plus de cœur que de bouche cette oraison, tâchant d'en bien concevoir le sens, et, l'ayant pris une bonne fois, en faire une ferme résolution pour le reste de sa vie. C'est pourquoi il est à propos de la méditer auparavant que de la réciter, et il faut prier Notre-Seigneur qu'il nous fasse la grâce de nous bien pénétrer de cette vérité : que nous ne sommes au monde que pour lui, que nous n'y avons autre chose à faire ; et ensuite, avec l'aide de sa grâce, entrer très fortement dans le dessein de ne vivre plus que pour sa gloire, portant cette disposition au fond de notre âme et par état, en sorte que, lorsque nous réfléchirons sur nos actions, nous puissions voir que dans le fond de notre cœur c'est Dieu que nous cherchons, et qu'au moins, si nous faisons quelque chose de contraire, que ce ne soit pas par une entière advertance, de telle manière que notre âme demeure toujours invariable quant à son fond. Une âme pénétrée de la sorte renouvellera facilement tous les matins ce qui est contenu en cette oraison, qui consiste au renoncement de tout ce qui n'est pas Dieu, dans le regret de ses fautes et dans le dessein à l'avenir de ne chercher que lui seul et ses divins intérêts, dans une dépendance entière en qualité d'esclave de sa très sainte Mère. Un mot ou deux suffiront aux âmes heureusement engagées dans le divin amour.
FIN
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