L'INFAILLIBILITÉ
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Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXI.
Usage de la liberté.
Pour fixer l'usage et l'étendue de notre liberté, il faillait en connaître l'essence ! Le pouvoir d'accomplir soi-même la loi, ne saurait devenir celui de la violer, moins encore celui de la perdre et de la tourner contre elle-même. La liberté n'est pas pour elle, mais pour l'homme, mais pour son bien, mais pour la loi. A qui d'abord appartient-elle, sinon au bien et à la loi ? D'ici, l'on voit où elle se développe et où elle s'amoindrit ; où elle doit être illimitée, et où il lui importe d'être réglée et conservée. Créée en vue du bien, la liberté ne saurait attaquer le bien sans se détruire, sans être le contraire de la liberté. De là les conséquences, que l'histoire a tirées : liberté illimitée pour le bien, pour l'Église, par exemple, parce qu'elle est l'action de Dieu sur l'homme; liberté réglée pour l'individu, pour la presse , par exemple , parce qu'elle est l'action de l'homme sur autrui (1) !
N'oublions point ceci : la liberté, créée pour le mérite , se circonscrit au terrain du mérite. Tout ce qui le dépasse est autant de perdu pour l'homme, de détruit dans la Société. Multiplions autant que possible, devant la liberté, les occasions de mériter; réduisons celles où elle peut démériter, et dès lors s'affaiblir. C'est le principe, c'est le point éclairé, et d'où il faut discrètement mener la lumière sur le reste; c'est le nœud des difficultés contemporaines. Personne ne demande l'inquisition telle que les princes l'exercèrent en Espagne , ni la licence telle qu'elle éclate chez les peuples en révolution. On demande le bien dans la liberté possible : et cette thèse, une fois démontrée, rallierait tous les esprits honnêtes et sensés. On doit toujours poser la question de la liberté dans son rapport avec le bien.
Ne serait-elle point guidée partout où elle pourrait nuire, soit à elle-même, soit à autrui? L'homme, en effet, n'est pas seul, et sa liberté se limite encore à celle de ses semblables. Il y eut évidemment confusion ! c'est la Justice qui est sans limites , parce qu'elle est l'accomplissement de toutes les libertés. Et ici, l'homme possède un bien plus doux et plus vénéré que la liberté, parce que ce bien contient et toutes les libertés et toute l'égalité possible. Ceux qui font leur unique thèse de la liberté absolue, et l'opposent à la justice, à la famille, aux droits acquis, à la vérité, à la loi, à la Société elle-même, nous offrent une triste idée de leur jugement ! L'homme ne doit être attaqué ni dans son âme, ni dans sa famille, ni dans ses biens, ni dans ses mœurs, ni dans ses droits acquis , ni dans la Société, qui les garantit tous. Car c'est elle qui le recueille, qui l'édifie , et le respecte dans tout son être. L'État défend sa personne contre la violence , l'Église défend son âme contre l'erreur. Enclin au mal, condamné au travail , en proie à la misère et aux passions , il est ouvert de tous côtés aux entreprises du mensonge : et lui laisser la faculté de communiquer ses erreurs aux foules sans expérience, c'est attenter au plus sacré des droits de l'homme. Accorder à la presse une liberté illimitée, c'est vouloir que le peuple appartienne au premier venu.
La liberté n'est point là. Elle naît avec notre âme, elle se lie à tout homme, se développe comme lui, et c'est à quoi l'on reconnaît la véritable liberté. Elle n'est ni l'apanage ni le profit de l'écrivain, qu'on peut toujours acheter ou mettre en prison. « Esclave né, dit Boileau, de quiconque l'achète ». La liberté a pour gardien les Aristocraties. Chez les peuples chrétiens, elle s'ouvre pour l'homme avec la vie , s'assied à son foyer, l'accompagne en son champ, paraît avec lui au sein de la cité , s'épanouit dans ses vertus et dans ses mœurs. Elle veille à ce qu'il ne soit frustré de ses droits, ni comme homme, ni comme père, ni comme propriétaire, ni comme citoyen; à ce qu'on ne lui ôte point, par exemple, la faculté de tester, celle d'élever entièrement ses fils dans sa foi, de défendre les droits qui s'attachent à ses biens, à sa cité, à sa Province , sous le prétexte dérisoire de lui offrir des libertés dont les hommes de lettres sont seuls appelés à jouir.
1. Pour l'homme, pour celui qui se trompe, liberté complète d'écrire. de penser et d'agir : pour l'Église, pour celle que Dieu dirige, surveillance sévère dans tous les mouvements ! Voilà la logique du siècle : il ne saurait manquer d'en recueillir les fruits...
A suivre... XXII. La liberté de la presse annule celle de l'Église.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXII.
La liberté de la presse annule celle de l'Église.
Peut-on laisser, en conscience, la charge auguste d'enseigner les Nations à quelques hommes formés par la rhétorique, et en dehors précisément des études que réclame la politique ? Docteur en théologie, docteur en histoire, docteur en morale, docteur en économique, docteur dès lors en Politique ! Tels sont, aux yeux de tout homme sérieux, les titres à présenter pour obtenir du Souverain le privilége redoutable de parler aux nations. Vous demandez la liberté de la presse, c'est sans doute pour annoncer aux hommes des vérités nouvelles, et dont vous les croyez privés? Où sont les détenteurs de ces vérités supérieures au bon sens et à la tradition ?. . Et qui peut croire à une presse instruisant les nations?
Non, vous voulez ôter l'homme des mains maternelles de l'Église pour le livrer à des littérateurs. Égarer l'homme ou le séduire est une étrange profession. Les pasteurs des peuples peuvent-ils fermer les yeux sur cette iniquité fatale ?
Mais la science n'est pas ici la seule condition ; il en existe une seconde, et c'est sur ce point qu'on s'oublie ! Le droit d'enseigner les nations, qui appartient à l'Église, ne saurait même s'exercer par les Rois d'une manière absolue. Ce droit dont les Rois, appelés par l'Église évêques extérieurs , ne disposent auprès des âmes que dans les choses extérieures (1), telles que les Sciences, les Lettres et les Arts, dans les choses qui se lient aux besoins de l'État, telles que la justice et les lois, l'agriculture et l'industrie, la guerre, le commerce et l'administration ; ce droit de pénétrer dans l'esprit de leurs peuples, de captiver leurs cœurs, est le plus grand, le plus auguste de la Couronne. Le Prince peut seul le conférer. Le Prince qui abandonne cette charge vraiment épiscopale , ce pouvoir précieux , n'est pas digne de conserver les autres : il a fait peu de cas de l'âme de ses peuples. Quand il accorde ce droit si cher, au citoyen qu'il en a jugé digne , le Souverain lui confère une charge non moins grave que celle dont il investit le gouverneur d'une Province ou le commandant d'une armée. Et lorsqu'il la confie, il ne reconnaît point un droit, il cède un privilège (1) , un privilège de la Couronne.
Le Christianisme en s'éloignant nous laisse dans la nuit ; les hommes, comme saisis d'un rêve , répètent des mots et demandent des choses dont ils n'ont pas le sens. Dans le mouvement qui entraîne les nations catholiques depuis que l'absolutisme se substitue à l'action de l'Église ; dans le besoin qui appelle partout la liberté de la presse, se manifeste cet instinct sacré : que la loi de l'esprit doit régner chez les hommes. Cette idée, affaiblie du triomphe de l'ordre moral, nourrit en nous une image trompeuse des biens que nous avons perdus ; tant notre cœur désire la lumière et redoute la force qui menace la conscience, la liberté des enfants de Dieu !
1. Il se rapporte, directement, au bien temporel de l'État, et indirectement, à l'exécution des lois divines, dit S. Thomas.
1. Sous la Monarchie française, qui conservait le sens des nobles choses et de la dignité de l'homme, aucun livre ne se publiait qu'avec Privilège du Roi.
A suivre... XXIII. La liberté politique annule la liberté pratique.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXIII.
La liberté politique annule la liberté pratique.
Au sein des nations chrétiennes, les hommes ont toujours possédé des droits privés et des droits publics ; les uns pour l'individu, les autres, pour la Société. Les libertés véritables reposent sur la famille, sur la propriété, sur la commune , sur la Province. Quand l'État se substitue à ces grands faits, il n'y a plus de libertés chez les peuples. Ces libertés réelles se forment avec eux ; elles demandent des Aristocraties pour les produire et pour les protéger. Un peuple privé d'Aristocratie appartient au despotisme. Ces Aristocraties elles-mêmes sont fondées sur des conditions morales et politiques qu'on ne saurait ébranler sans renverser les peuples et leur propre constitution historique.
Au reste, tout le monde sait que les nations chrétiennes arrivent à une sage liberté. Mais une sage liberté est une liberté sage, facile à définir : accroître sans mesure la liberté du bien, et réduire avec soin celle de faire le mal, celle de se détruire (1). Repousser une semblable liberté , serait avouer qu'on réclame les droits de l'orgueil et non ceux de la liberté. Car, dès qu'elle prétend se donner à elle-même sa Loi, décider de l'existence qu'il faut laisser à Dieu, à l'homme, à la famille, à la propriété, aux aristocraties, à la commune, à la cité, à la Société elle-même, c'est d'une pareille liberté qu'il faut dire, elle n'a ni foi ni loi, ni feu ni lieu. On croit la France avide de cette liberté, qu'on appelle illimitée ou absolue. On la disait aussi folle d'égalité l Mais la France précisément ne reprit confiance, après 1848, que parce qu'on retirait à la Tribune, à la presse, aux associations politiques, cette liberté illimitée. Voilà qui doit tranquilliser. Car s'il fallait combler l'orgueil, chacun sait quand on y parviendrait !
En politique, l'extrême liberté est la servitude des bons. La liberté politique, telle qu'on la voulait de nos jours, détruit la liberté pratique, et, pour peu qu'on la laisse aller, nous ôte celle d'exister... Ce n'est pas d'elle que viennent au peuple la Foi, la justice et la paix, mais de la solidité de la loi. Eh bien ! ceux qui produisent ces trois choses, le prêtre, le juge et le paysan, ne songent qu'à la liberté vraie, qui est le triomphe de la loi ; ils songent au droit de l'homme qui possède la Foi, au droit de l'homme qui crée un capital, au droit de l'homme qui crée une famille, au droit de l'homme qui défend les intérêts de sa cité. Voilà des libertés pratiques, auxquelles ils songent avant tout ! Restent les beaux esprits. Faut-il exposer une Nation pour deux ou trois cents hommes de lettres? Ne puisons pas de conseils dans la foule. Les désirs du peuple sont comme les appétits du corps, on ne peut les écouter sans le détruire.
Dernièrement l'Angleterre, par la voix du journal qui exprime le mieux ses secrètes pensées , disait naïvement en parlant de la France : « C'est un pays auquel il faut imposer le rétablissement de la liberté de la presse et de la discussion parlementaire (1) ; de façon que si l'on ne peut en supprimer la force matérielle, on supprime du moins la puissance que trouve ce pays dans l'unité de ses conseils. » C'est ainsi qu'en 1815, en compensation des frontières qu'on laissait encore à la France, l'ambassadeur anglais demandait le maintien, au Code civil, de ce partage des successions qui, brisant les familles à mesure qu'elles se forment, prive à jamais les nations d'une aristocratie, arrête leur croissance, les condamne à passer alternativement de l'anarchie au despotisme. L'Angleterre, qui en doute? nous féliciterait d'une brèche nouvelle faite à l'hérédité, à ce dernier rempart de la famille et de tout capital ! Avant de repousser les inspirations de l'Église et les faits de l'histoire, que la France écoute du moins les leçons de ses ennemis...
1. La Révolution se garde bien de faire la grande distinction entre la liberté de bien faire et la liberté de mal faire! Pour découvrir laquelle des deux est chère à ceux qui demandent à si grands cris la liberté, regardons à leurs mœurs...
1. Nous parlons de la liberté de la presse, et souvent celle de la Tribune devient plus dangereuse encore par la régularité avec laquelle elle peut miner le siège d'un malheureux gouvernement. Cet esprit d'opposition que les parlementaires, encore étonnés de leur chute, appellent, pour la justifier, « LA PENTE FATAL DE NOTRE TEMPS », est la pente éternelle de l'homme, le fatal besoin de briser tous les jougs, d'envier tous les biens. Pente de notre temps? En de hors de la vérité, comme on peut se payer de mots !
A suivre... XXIV. La Révolution et notre liberté.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXIV.
La Révolution et notre liberté.
Un matin la France s'éveille et ne trouve plus ni son Église, ni ses Rois, ni sa Noblesse, ni ses ordres, ni ses corporations, ni ses Provinces, ni ses municipalités, ni ses coutumes, ni son droit public, ni ses libertés dans la famille , dans la propriété , dans la commune, dans la cité ; enfin, ni ses universités, ni ses abbayes, ni sa marine, ni ses colonies... plus rien de son histoire, plus rien de son passé. Qui détruisit en un jour toute la constitution historique d'un peuple? La Révolution l Et ce peuple dansait de joie autour de ce monceau de ruines., et les grands, les hommes d'État et les savants, fatigués de ne plus attirer l'attention de la foule, s'écrièrent aussi : Gloire à la Révolution, à qui nous devons tous nos droits, à qui nous devons tous nos biens !... Jamais l'homme de cœur ne vit un spectacle plus navrant.
La Révolution est la grande illusion , le mensonge le plus vaste qui ait paru sur la terre. Aux méchants pressés sous ses drapeaux, elle joint la multitude des cœurs qu'elle a séduits : les méchants seuls , jusqu'à ce jour, s'armaient contre le monde. L'Islamisme n'entraînait que les âmes déjà captives de leurs sens, et le Protestantisme, que celles que dominait leur moi; mais, atteignant la raison même, la Révolution voit peu à peu les âmes généreuses entrer dans ses redoutables filets. Là est l'immensité du péril... Avouer que les cœurs dans l'humilité, secourus par des traditions ou de fortes doctrines , pourront seuls désormais échapper ; c'est dire que le monde est à la veille de périr.
L'illusion ! Qui comptera les cœurs déjà tombés sous son empire, — depuis ceux qui prétendent à l'égalité absolue, au partage des biens, à l'inutilité des Trônes, à la félicité sur la terre, — jusqu'à ceux qui veulent y proclamer une liberté sans limite, y restreindre l'action des lois, prier les Souverains de partager leurs sceptres, rompre l'écluse du capital, — enfin, jusqu'aux imaginations convaincues que la vérité va par elle-même triompher de l'erreur, que la liberté suffira pour assurer le règne de l'Église, qu'elle peut aliéner son Patrimoine, se passer de l'État, et abdiquer tout pouvoir temporel?, car, telle est la progression, lorsqu'on redescend l'échelle de l'erreur. Que d'hommes aujourd'hui pensent conduire le monde à une ère nouvelle, à une ère plus grande, et le conduisent à sa fin (1) ! Oui, ce que Révolution renferme de plus terrible, c'est l'illusion. Pas une vérité dont elle n'ait tiré un mensonge, pas un mensonge qu'elle n'appuie sur une vérité ! C'est au nom de ce qu'il y a de plus divin en nous, la liberté humaine, qu'elle a détruit la Foi dans la moitié de l'Europe, brisé les droits acquis par les provinces, par les cités, par la famille, par la propriété, jeté les âmes dans l'athéisme et la Société moderne sur le bord de l'abîme.
Et l'homme moderne est si vain, il a gardé si peu du bon sens que possédaient nos pères , qu'il s'est vu dépouiller des libertés acquises par dix-huit cents ans de pratique chrétienne ! des libertés réelles , qui s'attachaient à la propriété, à la famille, à la cité, à l'individu même pour lui faire une place au milieu des nations. Il a lui-même échangé ces libertés, propres au bien, contre des libertés illusoires, propres au mal, et dans lesquelles il voit insensiblement disparaître la famille, la propriété, sa personnalité même, sa Foi, ses coutumes, ses droits !
Si une illusion, une hérésie, a suffi jusqu'ici pour ébranler l'Europe, y renverser les plus puissants États, qu'attendre de la Révolution, qu'attendre de l'illusion définitive (1) ? Les axiomes sont ébranlés ; déjà les Rois ont douté d'eux-mêmes, et sont descendus de leurs Trônes ; de grands esprits, rappelant ces mots redoutables : Les étoiles tomberont du Ciel, sont tombés du sein de la lumière ; et le sublime écrivain de l'époque a disparu dans l'abîme aux regards consternés de ses contemporains. A quoi servira le génie ? Si les chrétiens eux-mêmes mettent un pied sur les bords de l'illusion immense, tout est perdu. Laissons des insensés, laissons tous ceux qu'emportent les hérésies , le libéralisme ou le panthéisme, ces âmes privées des ailes du véritable amour, désirer pour l'Église les trois libertés mêmes qui conspirent sa ruine , liberté de conscience, de la presse et des cultes, ces libertés qu'ont proclamé ses ennemis...
1. Sur cette terre , le mensonge et la séduction seront les derniers maux... « Cette conjuration contre le Ciel revêt un caractère qu'elle n'avait point pris dans les siècles passés, celui d'une profonde et séduisante hypocrisie. On veut épurer l'œuvre de Dieu, qu'on démolit! Et telle est la sagesse avec laquelle l'esprit du mal a dressé ses embûches qu'il égare des esprits droits, qu'il les fascine au point de s'en faire des défenseurs. Il s'opère sous nos yeux ce qu'on verra au dernier jour : un grand mystère de séduction. Il semble, si cela était possible , que les élus mêmes n'y échapperaient pas. » — Mandement de Mgr l'Évêque de Digne, au clergé de son diocèse ; 1861.
1. « La Révolution, s'écrie S. S. Pie IX, dans l'Encyclique du 8 décembre 1849; la Révolution est inspirée par Satan lui-même. (Expression qui rappelle involontairement la pensée si connue du comte de Maistre !). Son but est de détruire de fond en comble l'édifice du Christianisme, et de reconstituer sur les ruines l'ordre social du Paganisme ! »
A suivre... XXV. La Révolution séduit plusieurs esprits chrétiens.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXV.
La Révolution séduit plusieurs esprits chrétiens.
Le trop malheureux écrivain qui lui-même arrêtait ce programme, et conseillait au Clergé de France de mendier son pain a travers nos campagnes, pour y trouver la liberté, réclamait de plus la rupture entre l'Église et l'État, afin de séparer la cause de l'Église de celle du Pouvoir monarchique, qu'il croyait seul en butte aux haines de la Révolution (1). Les illusions perdront ce monde... Pour un Théologien, que c'était peu connaître l'homme! Si déjà les âmes qu'agite le mal, portent une haine si grande au Pouvoir, parce qu'il surveille leurs actes extérieurs, quelle horreur n'éprouvent-elles pas contre l'Église, dont le regard les suit dans leur conscience ? Les populations déchaînées n'ont-elles pas pour suivi les prêtres avec plus de fureur que tous les agents du Pouvoir? Croire que les hommes se porteraient d'eux-mêmes vers la Foi, c'est-à-dire vers le bien, vers la justice et vers la vérité, s'ils trouvaient une liberté sans limite dans la presse, la conscience et les lois, n'est-ce point oublier et la Foi et le motif qui la fit donner à la terre ? oublier la thèse chrétienne elle-même ?
C'est sur ces points, malheureusement, que les disciples de M. de La Mennais virent le génie du maître. On crut qu'il venait ouvrir le passage entre le monde ancien et un monde nouveau, éclos de la Révolution. Était-ce un monde moderne, ou bien un monde malade ? « La Révolution, s'écriait le maître, donne au Catholicisme une seconde naissance (1). » « La Révolution française sortit de l'Évangile, écrivait un disciple à l'écart, en tête de ses vastes publications (2). La chute du puissant esprit n'emporta point les traces faites dans l'imagination. Des âmes possédées d'un noble mais trop pressant désir de conduire à la Foi une Révolution qu'elles croyaient pleine de grands instincts, voulurent en ménager d'abord, mais en épousèrent bientôt les sympathies. Pour diriger des sentiments qu'ils pensaient mieux connaître, associer la Foi à ces progrès nouveaux , ils continuèrent de présenter la liberté de la presse, de la conscience et des cultes comme l'uni que voie de salut pour l'Église ; ils continuèrent de repousser pour elle la protection, toujours dans la pensée qu'une liberté illimitée suffit à son triomphe... C'est bien peu connaître ce monde. L'Église n'est affligée, ni dans la Chine ni dans les Indes, de la protection de l'État, et elle trouve en Amérique la pleine liberté de lutter: son triomphe y est-il plus grand?
C'est l'illusion du jour. On croit que la liberté fera tout, et qu'elle va couvrir la terre des biens que dix-huit cents ans de Foi n'ont pas su lui donner l La liberté, c'est l'homme même, et l'homme est atteint par le mal...
On a pris une circonstance passagère pour une règle de tous les temps. 1830 bannissait l'Église de l'ordre légal ; vaincue par la Révolution, et, toujours au nom de la liberté nouvelle, l'Église fut enfermée dans un réseau de lois. On crut renverser cet échafaudage en venant demander pour Elle sa part légale dans cette liberté. Ceux qui, rompant la maille du libéralisme, sur prirent alors quelques immunités pour l'Église, ont bien mérité de la Foi, ils ont acquis une gloire immortelle. Mais, cet état ne pouvait durer. Aujourd'hui que, furieux d'en avoir si longtemps attendu la ruine , les ennemis de l'Église voudraient étouffer dans la boue, faut-il leur en laisser la liberté parce que cette liberté servit un jour à les confondre? — Ce fut notre principe : nous demandions des libertés complètes, nous devons les demander encore. — Soyons fidèles à nos principes, mais d'abord recevons de l'Église les principes auxquels nous devons cette fidélité. « Ces doctrines sur la liberté de la presse et des cultes, écrit le Cardinal Pacca à M. de La Mennais, sont en opposition avec l'enseignement, avec les maximes et la pratique de l'Église.
Elles ont beaucoup étonné et affligé le S. Père. Si, en certaines circonstances, la prudence exige de les tolérer comme un moindre mal, de telles doctrines NE PEUVENT JAMAIS ÊTRE PRÉSENTÉES PAR UN CATHOLIQUE COMME UNE CHOSE DÉSIRABLE (1) . »
Penser qu'une liberté sans limite rétablira le règne de la Foi, et la fera chérir des hommes, c'est avant tout oublier ce qu'est l'homme. Pour assurer ce triomphe, certes, il ne faut point la contrainte : mais il faut l'appui de l'État, le respect de l'État, les exemples donnés par l'État, parce que le peuple est attentif à la pensée des grands ; parce que le peuple veut toujours imiter ceux qu'il admire et dont il sent le pouvoir sur lui. La contrainte extérieure est absurde et abominable, parce qu'elle prend la place de la contrainte morale, de cette noble fille de la lumière et de l'exemple. C'est pour la liberté de notre âme que l'Église combat, en réclamant les exemples et la protection de l'État !. Mais l'absence de Théologie a réduit partout les questions à des proportions littéraires.
Si déjà la justice et la paix, si désirées des hommes, demandent sur la terre ces organisations puissantes qu'on nomme Gouvernements , combien plus encore faut-il assurer une protection à la Vérité, si méconnue, et si peu désirée des cœurs (2) ? La liberté pour l'Église ; oui d'abord si vous la lui avez ôtée, et si votre société n'est plus qu'une concurrence horrible entre le bien et le mal ; mais si, avec cette liberté , vous méprisez l'Église, si vous la laissez veuve du respect, des exemples et de l'amour du Souverain , vous la verrez mourir comme au sein des États protestants. Et, pour asseoir la liberté, rêver lorsqu'on est catholique, un Souverain protestant sur le trône de France, est une idée étrange, un triste expédient...
Tout provient d'une même illusion , d'une impression qu'on se cache à soi-même : on a moins confiance en l'Église qu'aux promesses de la liberté ! De cette liberté doit sortir l'avenir des nations , et l'Église ne le voit point...
1. « L'Église, pour rester ce qu'elle doit être, sera contrainte de s'isoler de la Société politique , afin de recouvrer sa force première et divine. » « Que l'Église donc, évitant de lier sa cause à celle des gouvernements, se concentre en elle-même. » Des progrès de la Révolution cont. l'Égl., par M. l'abbé de La Mennais, chap. IX : Devoirs du Clergé dans les circonstances présentes; Paris, 1829! — « La séparation de l'Église et de l'État a l'avantage d'attaquer le gallicanisme pratique. » Affaires de Rome, 1836.
1. Affaires de Rome, par M. de La Mennais.
2. Début de l'Hist. parlement, de la Révol., par M. Bûchez.
1. Lett. de S. E. le Card. Pacca à M. de La Mennais; écrite par l'ordre de S. S. Grégoire XVI. Rome, août 1832.
2. De glace pour la vérité, l'homme est de feu pour le mensonge.
A suivre... XXVI. De la Révolution naquit le néo-christianisme.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXVI.
De la Révolution naquit le néo-christianisme.
Entre ceux qui considèrent la religion comme une infirmité, une susceptibilité maladive de l'homme, et ceux qui voient sa gloire dans cet élan du cœur vers Dieu, dans ce retour de l'âme vers sa Cause première, il y a place à bien des systèmes, dont le plus odieux est celui qui voudrait abolir chez les hommes de pareils sentiments. Écartez Dieu, l'homme n'a plus de comptes à rendre ; il n'est pas seulement libre, il est indépendant, il devient absolu, Sicut Du. En devenant fragment de la divinité, il doit être fraction de la Souveraineté : une telle conception aura ses retentissements (1) .
Du point de vue d'une complète indépendance ontologique et religieuse, se déduit aussitôt celui d'une complète indépendance politique. Le passé, ses coutumes, nos principes, la Foi, deviennent des absurdités. Telle est, en soi, la thèse du libéralisme, la thèse qui part de la liberté pour nier toute loi. Rien de plus beau que d'être libéral, de plus mauvais que de fausser et de perdre la liberté par le libéralisme...
Avec le libéralisme n'espérez pas trouver votre point de suture, la liberté ne le fournira pas. Au fond vous demandez la liberté du bien, c'est-à-dire de l'Église ; au fond il vous demande la liberté du mal, c'est-à-dire de la Révolution. S'il désirait sérieusement la liberté, il la verrait d'abord dans un passé où pendant dix-huit cents ans le christianisme s'est appliqué à la faire croître dans les âmes, dans les droits privés et dans les droits publics des peuples, dans la famille et dans l'hérédité, dans la cité, dans la propriété , dans toutes ces institutions aujourd'hui abattues ou ébranlées de la main du libéralisme. Mais il a en horreur ce passé parce que le Christianisme, la liberté du bien, y pouvait triompher.
Le libéralisme éclate en France aussitôt que le siècle dernier achève d'étouffer la Théologie. Ce fut la chute des grandes notions, la décadence de la pensée, la roule faite au despotisme. Ce sont, au reste, les enfants du libéralisme qui viendront le servir... Hommes de trop de foi, alors seulement vous les reconnaîtrez ! Mais ceux à qui vous présentez la main préféreront le despotisme à la confession.
Or ici arrivent en foule les imaginations avides, dont la sincérité alimente la thèse de la Révolution. A la suite des cœurs révoltés contre Dieu, accourt la longue série des âmes éblouies par les nouveautés et dévorées par l'illusion. Rien ne leur paraît plus sensé que cette liberté nouvelle, que l'Église semble oublier!
Croire que l'on puisse confier la justice et les droits au bon vouloir des hommes : voilà le libéralisme ; croire que l'on puisse leur confier la vérité : voilà le néo-christianisme. C'est-à-dire que la première erreur engendra la seconde chez des âmes plus élevées, mais aussi inexpérimentées. C'est encore l'oubli de la Chute, encore de la politique faite en dehors de la Théologie.
Mais oubliant la Chute, on oublie ce qui vient de la Rédemption. Aujourd'hui, on ne voit plus le Christianisme, tant il est bien assimilé à la nature humaine. Pour les uns, la confusion est complète, et de là le socialisme ; pour les autres, elle est partielle, et de là diverses écoles qui viennent expirer vers la Foi. Les philosophes attribuent à l'homme tout ce qui lui vient de la Grâce ; les libéraux, au citoyen tous les droits qui lui viennent de la Société (1) ! Eh ! comment la politique et la philosophie échapperaient-elles à l'illusion lors que, sur tant de points, des chrétiens la partagent?. Dernièrement, j'exprimais cette observation, lorsque M. l'abbé Noirot me dit : « Si la philosophie , si le monde aujourd'hui se trompe , c'est la faute du Christianisme, il a mis dans la nature humaine une puissance de liberté et de raison que l'on prend maintenant pour des faits naturels. »
L'Église n'a pu voir plus longtemps ses chers fils désunis sur ces questions graves. Elle a parlé ; il suffit de rappeler aujourd'hui des Paroles sacrées que les événements, sans doute, nous ont fait oublier.
Après avoir demandé » une régénération dans l'Église « , le grand écrivain, condensant ses erreurs, ajoutait : » Nos vues tendent à unir la cause de l'Église à la cause de la liberté, par conséquent, à rompre l'alliance entre l'Église et les vieilles Souverainetés, (1)» etc. Et l'Encyclique de Sa Sainteté Grégoire XVI répondit : « Comme il est constant , d'après les paroles du Concile de Trente, que l'Église est instruite par Jésus-Christ et enseignée par l'Esprit-Saint, il est souverainement absurde et injurieux de mettre en avant une prétendue régénération devenue nécessaire à son existence ...» Et ensuite: « De la source infecte de l'indifférentisme découle cette maxime absurde, ou plutôt ce délire, qu'il faut garantir à chacun la liberté de conscience. » On prépare la voie à cette pernicieuse erreur par la liberté d'opinions sans bornes ; et pour le malheur de la Société, religieuse et civile, on répète avec impudence qu'il en résultera un avantage pour la Foi. Mais qui peut mieux donner la mort à l'âme, s'écrie S. Augustin, que la liberté de l'erreur? Tout frein étant ôté pour retenir les hommes, leur nature inclinée succombe au mal ; nous pouvons dire avec vérité que le puits de l'abîme est ouvert »... Et enfin : « De là le fléau le plus mortel pour la Société, car, de toute antiquité, les États qui ont brillé par leur puissance « ont péri par ce seul mal : la liberté illimitée des opinions... Là se rapporte cette liberté funeste, et DONT ON NE SAURAIT AVOIR ASSEZ D'HORREUR, la liberté de la presse pour publier quelque écrit que ce soit, liberté que quelques-uns osent solliciter avec tant d'ardeur ! « Nous sommes épouvantés , Vénérables Frères , en considérant de quelles erreurs monstrueuses nous sommes accablés ! 0 douleur ! on a l'impudence de soutenir que le déluge d'erreurs qui découle de là est bien compensé par tout livre qui paraîtrait pour défendre la vérité l Quel homme en son bon sens dira : « Il faut laisser librement se vendre les poisons, les boire même, puisqu'il est un remède tel que celui qui en use parvient, quelquefois, à échapper à la mort (1) ? »
Mais, avant de poursuivre, revenons à cette thèse d'une liberté qui devrait remplacer la Protection pour l'Église.
1. Après Voltaire, d'Alembert et Dupuis, viennent Hegel, Feuerbach et Stirner, pour conclure que « Dieu est encore au néant, et qu'il ne prend conscience de lui que dans l'homme... Que l'homme doit s'adorer lui-même, car il n'a pas d'autre Dieu; et que celui qu'on imagine n'est qu'une abstraction destructrice de l'Humanité. »
1. Les anciens étaient grands par la tradition ; et l'on vit succomber les peuples à mesure qu'ils la perdaient. Les modernes ne sont grands que par le christianisme; la liberté et la raison les quittent à mesure qu'ils veulent s'en éloigner.
1. « ... Dès lors à détruire ce fait que, de part et d'autre, on croyait avoir un égal intérêt à conserver. Je viens dire à l'Église : Séparez-vous des Rois, tendez la main aux peuples, ils vous soutiendront de leurs robustes bras La liberté de l'Église sortira de la liberté des peuples... etc. » ... Introd., tome Xe des œuvres. Affaires de Rome, pag. 25.
1. Encyclique Mirari, de S. S. Grégoire XVI, à tous les Patriarches, Archevêques et Évêques; donnée à Rome le jour de l'Assomption de la B. Vierge Marie, l'an 1832, 2e de son Pontificat.
A suivre... XXVII. L'Église a droit à la protection comme à la liberté.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXVII.
L'Église a droit à la protection comme à la liberté.
Si par liberté pour l'Église, on entend qu'elle sera l'objet suprême de la sollicitude de l'État, qu'elle se verra entourée de son respect, de son amour, rien de plus juste, rien de plus sage. Si par ces mots on veut laisser au mal, à l'erreur, à la multitude de ses ennemis, les mêmes libertés qu'à l'Église, nous glissons dans l'abîme.
Eh! quoi, l'État protégera la justice, il protégera l'innocence, les arts, les sciences, la propriété, le droit, la liberté, et il ne protégera pas la vérité, cette liberté et ce droit de notre âme? Tout sera secouru, hormis la vérité? L'homme vaut moins, alors, que les choses qui sont faites pour lui. Mais il est évident qu'on n'y avait point réfléchi... Pour étendre la protection à tout, excepté à la vérité, c'est-à-dire à la base des lois, du droit et de la Société , il fallait là quelque grand préjugé.
Des chrétiens, des esprits qui, dès-lors, partent du dogme de la Chute, ne demanderont pour l'Église exactement que la liberté ? la liberté pour la vérité et l'erreur pêle-mêle?. Et le penchant au mal qui l'emporte dans notre cœur sur le désir du bien ! Il faut donc vous le dire : mettre la vérité en champ clos avec l'erreur, le bien avec le mal, la justice avec nos passions, c'est livrer la vérité à l'erreur, le bien au mal, la justice à nos passions... Je lus un jour ces mots de celui qui nous effraya par sa chute : Le malheur est qu'on n'a pas assez foi en la puissance de la vérité! Je vis tout à coup que cet esprit merveilleux ne possédait pas le premier mot de la science qui l'élevait au Sacerdoce (1). Quelle illusion chez un théologien ! Avoir la Foi et oublier les résultats de la faute d'Adam ! oublier que l'homme livré à lui-même ne saurait arriver à la vérité et s'établir dans la justice, que l'Église est là précisément pour lui rapporter l'une, et l'Autorité pour lui assurer l'autre! Ne plus voir ce qui nécessite la constante intervention des sacrements, dans l'homme, et des lois, dans la Société! Enfin, perdre de vue que la vérité et la justice, réunies, ont une peine extrême à maintenir la Civilisation, à l'empêcher de rentrer dans la barbarie, où l'entraîne éternellement la Chute! La Chute! Mais la Société entière n'est établie qu'en vue de cet immense événement... On croit la Société chrétienne un fait entièrement humain , une chose toute naturelle : après l'Église, rien en vérité n'est plus surnaturel...
Les bons, organisés pour maintenir chez les autres la justice et la paix, voilà toute la Société. Et sans l'autorité qui le protège , comment le petit nombre chez les hommes produirait-il le miracle de contenir le plus grand?... On ferme les yeux aux faits ; il n'y a pas, sur la terre, de prodige plus étonnant après celui de la Grâce, qui nous y fait opérer le bien ! L'Autorité tire les hommes du néant de l'état sauvage ; ils y retombent aussitôt qu'ils repoussent sa main. Les civilisations anciennes, dont on a tant parlé, étaient le fruit d'une tradition et de l'Autorité, elles succombaient à mesure que s'affaiblissaient ces deux faits (1). Trouvez une nation hors de l'Autorité, une Civilisation réelle hors de la Grâce et de la Vérité ! L'Autorité est le point qui excite le plus l'admiration des sages : après ces deux incomparables dons, elle est le don le plus précieux fait aux hommes.
En contenant le mal, c'est elle qui crée la liberté, qui conserve les droits et les biens acquis. Toute justice vient du Roi : c'est en ce sens qu'il faut l'entendre. Ne voyons-nous donc plus cette phalange sacrée qui , suivant les diverses fonctions , nous apporte la justice, le sacerdoce, l'enseignement, l'administration, les exemples, la bienfaisance, l'industrie et la production? Il est des hommes qui, sans le Code, ne seraient jamais dans la justice, et qui, sans la force, ne seraient jamais dans la paix ; de même, sans le droit, sans la propriété, il en est qui consommeraient tout ce que produisent les autres, et en trois pas nous mèneraient à l'état sauvage. C'est à l'Autorité qu'on doit toute la Société ; pourquoi dès lors soustraire à sa protection la Vérité, sur laquelle, chez des êtres libres, tout le reste s'appuie?.. Certes! il faut être homme de bien pour comprendre ce monde, mais pas au point de n'y voir que le bien, surtout de croire qu'il triomphera sûrement si l'on nous laisse liberté entière. Dans ma jeunesse j'entendais dire que l'humanité ne rencontrait d'autre obstacle en ce monde que les gouvernements ; que tout progrès y consistait à restreindre l'Autorité et à nous délivrer peu à peu de l'oppression des lois. Aussitôt que j'ai pu par moi-même voir l'homme , et l'étudier d'assez près, j'ai compris combien ces idées étaient vaines, et où se trouvait le bon sens.
Alors, ne voulez-vous aucune liberté? — C'est-à-dire que nous les voulons toutes, et d'abord celle qui les produit. Aucune liberté ! Nous voulons la plus grande, celle que Dieu a faite pour l'homme, la liberté elle-même, la faculté d'accomplir de soi-même sa loi, le pouvoir de bien faire : ce que nous repoussons, c'est la facilité avouée de violer de soi-même sa loi, le pouvoir de mal faire, l'orgueil, plaçant l'homme au-dessus de Dieu ! C'est parce que nous méprisons une liberté puérile, qui n'est venue au monde que sur les ruines des libertés positives, acquises par les peuples chrétiens; c'est parce que des insensés nous enferment dans une révolution qui aboutit de toute part au despotisme, et qu'il faut pourtant échapper à une servitude ou à une barbarie sans bornes, que nous réclamons la liberté réelle, cette liberté des enfants de Dieu qui fit naître les droits privés et les droits publics des peuples, ces droits que, par illusion et par égarement, vous avez renversés ! Avec le bon sens, avec l'histoire nous demandons la liberté de ceux qui accroissent la Foi, les droits, la justice, la paix, la vertu, la charité et le pain chez les hommes ; avec le bon sens, avec l'histoire nous repoussons la violence de ceux qui diminuent la Foi , les droits, la justice, la paix, la vertu, la charité, le pain ! Il est aisé d'être logique et franc lorsqu'on part d'un principe, contrairement à une époque qui ne fait que répéter un mot ; lorsque l'on sait que notre liberté est le pouvoir angélique du bien, l'instrument du mérite, et que, hors du mérite, elle expire ! car, de là, se déduit la Société tout entière.... El vous, montrez-nous vos principes jusque dans la racine ; nous attendons vos métaphysiciens! De tant d'éclat dans le talent est-il sorti une lumière ? Déjà vous subissez le sort des esprits littéraires. Pour résister à une époque, il faut être enraciné plus profond...
Les idées pures aujourd'hui nous abusent ; on persiste à les interroger comme on l'eût fait avant la Chute. L'Homme est tombé ; en vain Rousseau voudrait en invoquer la nature première, en rétablir les droits innés, retrouver les prérogatives d'un état d'innocence : ses à priori ne sont plus. Les idées philosophiques nous trompent; la Doctrine complète ne peut sortir que de l'Église, les idées politiques, que de l'expérience. Voilà pourquoi si peu d'hommes sont aptes à gouverner, et pourquoi la Providence nous procure, par l'Hérédité, des Rois préparés de sa main.... Croire à la liberté illimitée de la presse, de la conscience et des cultes, croire que l'on puisse confier la vérité, la justice au bon vouloir des peuples, n'est pas une ignorance légère, ou une illusion éphémère , mais l'erreur capitale, l'illusion qui déracinera la Chrétienté. C'est sur le principe opposé que la Civilisation s'est assise. Si au moment le plus alarmant , si lorsqu'elle a de la Protection un plus pressant besoin, ses premiers défenseurs déclarent qu'elle doit s'en passer, tout est perdu...
Il n'y a plus de traditions, plus de métaphysique, et l'on veut faire de la Politique ! Dans la Foi, il existe un trésor de lumière, mais on ne l'ouvre pas. On ne rencontre que des esprits littéraires. En France effectivement les phrases sont très-claires ; c'est la pensée qui est obscure, qui est toujours dans le néant. Aussi, que la moindre idée s'avance et se découvre entièrement, on crie à l'exagération. Mais tirez la vôtre des limbes, que nous la connaissions enfin (1). Ne croyez pas défendre les principes parce que vous en présentez quelques-uns. Les principes sont les branches d'un arbre : vous leur ôtez la vie si vous les détachez du tronc, et vous faites périr le tronc si vous offensez la racine. Montrez une doctrine sous tant de thèses empruntées à ces temps ! Si l'on est à la fois privé de doctrines et d'obéissance, vous le sentez, il ne reste plus rien... Honneur aux personnes, à toute pensée magnanime, à toute noble intention ; mais que les idées particulières s'effacent dans le danger commun ! Le monde est à cette heure dans la crise fatale, l'avenir se décide de main. Le libéralisme et le gallicanisme vont cette fois périr, ou la Civilisation ne s'en relève pas...
Justement alarmée de l'invasion de ces erreurs chez les peuples chrétiens, l'Église, répétons-le, a élevé la voix. Dans l'Encyclique de 1832, S. S. Grégoire XVI, continuant, s'écrie : « Ces faits condamnent l'insolence de ceux qui, enflammés de l'ardeur d'une liberté immodérée, travaillent à ébranler les Droits des puissances , lorsqu'ils n'apportent aux peuples que la servitude sous le masque de la liberté. Et nous n'avons rien de plus heureux à attendre, ni pour la Religion ni pour les Gouvernements, en écoutant les vœux de ceux qui désirent voir l'Église séparée de l'État , la concorde se rompre entre le Sacerdoce et l'Empire. Il est certain que cette union, qui FUT TOUJOURS SI SALUTAIRE AUX INTÉRÊTS DE LA SOCIÉTÉ RELIGIEUSE ET DE LA SOCIÉTÉ CIVILE, est redoutée de tous les partisans d'une liberté sans frein. (1) » A coup sûr, on ne saurait nier que, parmi les prérogatives sacrées de l'Église, l'une des principales ne soit celle de discerner ce qui est nécessaire à sa défense, utile à sa conservation. Eh bien! puisqu'elle a prononcé, sera-t-il bien, sera-t-il sage d'ouvrir un avis opposé? Entendons-nous mieux que l'Église elle-même les premiers intérêts dé l'Église ? Hélas ! ceux qui prétendent la conseiller restent si convaincus de s'être mis au bon chemin, qu'ils croient voir l'Église elle-même s'en écarter , s'écarter des voies de l'avenir ! Elle aurait égaré sa boussole ; 89 l'aurait trouvée, et le libéralisme se hâte d'en avertir la sainte Église... Il ne sent point qu'il dérive, il pense que c'est l'Église qui s'éloigne du bord : ainsi l'homme emporté par un fleuve rapide, voit le rivage fuir....
Non, quelles que soient ces menaces d'un schisme qui envelopperait les nations, l'Église, pour les flatter, ne les laissera point tomber dans un mensonge, dans un abîme qui les engloutirait. Et comme entre ceux qui chérissent l'Église, la bonne foi est profonde, la bonne foi est sans bornes, nous entrerons dans le sens des grandes paroles qui suivent le texte déjà cité : « Que les Princes, nos très-chers fils, considèrent que ce n'est pas seulement pour le Gouvernement de la Société temporelle , mais surtout pour la PROTECTION de l'Église, que le Pouvoir leur a été donné ; que d'ailleurs tout ce qui se fait pour l'avantage de l'Église, se fait dans l'intérêt de leur puissance, dans l'intérêt de leur repos. »
1. Cette illusion est à ce point le centre de nos erreurs contemporaines, qu'on la retrouve aussi naïve, trente ans après, sur les lèvres du libéralisme officiel. « On pensait donc qu'en laissant la vérité et le mensonge aux prises, la vérité finirait par l'emporter. On avait dans notre liberté, ajoute M. Thiers, une confiance, hélas! bien altérée aujourd'hui. » (Hist. du Cons. et de l'Emp., t. XVIII, p. 270.) La vérité aurait cette puissance si l'homme était innocent...
1. Diminuez l'Autorité, et le bien diminue ; renversez-la, le bien s'arrête, la révolution commence, la foule cesse de travailler, s'abandonne à l'ivresse et entre dans le crime en raison de la durée de la révolution. Voilà, l'homme rendu à la liberté, redevenu ce qu'il est! Et ne pas voir le fait, se laisser éblouir par les mots que trouve notre orgueil, c'est reprendre la route ouverte par les Girondins.
1. Entrer dans toutes les questions sans Doctrines ni obéissance, comme le fait notre époque, est une grande frivolité. L'esprit, en France, dépouillé des principes par le siècle dernier, puis de la pensée, par le nôtre, se nourrit d'un pain doré, mais bien léger.
Détrompé sur la vérité, étourdi de l'éternel retour d'un langage vulgaire, empesé, mais brillant, le public ne peut plus distinguer le produit de la rhétorique du fruit de la pensée. Il abandonne la doctrine pour le discours. Notre esprit est tombé dans la servilité : la place du despotisme est faite. Après avoir frappé nos aristocraties politiques, la frivolité atteint la fragile tige de l'aristocratie de l'esprit. La vérité que ferat-elle? la rhétorique nous inonde, et couvre tout d'un émail emprunté à la langue. Idée vieille, idée fausse, idée nulle, sans ombre de réalité, tout revient et prend vie sous ce vernis banal.
Et c'est ce qu'on nomme talent... On ne vit que pour l'apparence. Nos thèses et nos livres, par le titre, la nature et la forme, semblent écrits par des marchands : tout dans la devanture, et rien dans la maison... La rhétorique achèvera d'énerver les notions de la Foi après avoir éteint, chez nous, jusqu'à la dernière idée philosophique. Elle a remplacé l'âme, elle a tué l'esprit , annulé la vérité même , elle porte le dernier coup à la Société française. La littérature est le linceul de la pensée. A cette heure elle descend dans la lâcheté, et nous pousse comme un troupeau aux portes de la barbarie.
1. L'Encyclique, Mirari; idem. 1832.
A suivre... XXVIII. La tolérance dans l'État, et non l'indifférence.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXVIII.
La tolérance dans l'État, et non l'indifférence.
En parlant du devoir qu'a l'État de protéger la vérité, nous raisonnons comme on doit raisonner en Europe, dans cette portion du monde supérieure aux autres par la vérité, et qui n'est telle que par la vérité.
— Si l'État doit protéger un culte, la Prusse main tiendra donc le Luthéranisme et l'Angleterre l'Anglicanisme? — Oui, sans doute, tant qu'elles ne reprendront pas la vraie Foi ! car leur civilisation précisément se rattache à ce qui leur reste de vérité. Aussi , se gardent-elles de l'attaquer officiellement en proclamant l'indifférence. (Au reste, des publicistes sérieux ont récemment fait justice d'une civilisation trop vantée; mais il en resterait moins encore sans cet attachement si noble des États protestants et de leurs aristocraties au culte officiel. Tous les cœurs bien placés leur rendent, sur ce point , un hommage empreint de respect). Certes, la Prusse et l'Angleterre ont dégénéré de la vérité, puisque l'une s'en rapporte à un homme plutôt qu'à Dieu, l'autre à une religion locale plutôt qu'à l'Universelle; mais la Prusse se garde bien de descendre au-dessous du Luthéranisme, et l'Angleterre, au-dessous de l'Anglicanisme : tout en usant de tolérance, ces deux États font leurs efforts pour écarter l'athéisme pratique et soutenir le niveau de leur foi. C'est en se rattachant à ce qu'elles croient le plus vrai, que ces Puissances se maintiendront plus près du Catholicisme, et non en proclamant une licence qui ferait écrouler le reste de leurs dogmes. D'ailleurs, c'est des classes supérieures, des têtes les plus éclairées, non des sectes obscures, que part tout retour vers la Foi. — Mais qu'ai-je dit ? les États dissidents protègeront leur culte ! Pour eux, d'abord, parlant tous du libre examen, ils ne sauraient, sans rompre la logique et sans ruiner leur thèse, parler de protéger leur culte : ce qu'ils font ce pendant! Pour nous, ensuite, nous n'avons prétendu parler que de la vérité (1)...
La liberté de conscience et des cultes , avec laquelle on a détruit et la conscience et le culte, ne rétablira pas la Foi. A coup sûr, il faut tolérer, mais tolérer les personnes, et non pas toutes leurs doctrines! à coup sûr, il faut supporter des erreurs, mais aussi, confesser une vérité! Oui, il faut tolérer, mais non encourager, engendrer soi-même le faux par un officiel aveu de scepticisme. C'est la Révolution, elle, qui réclame une tolérance illimitée pour les doctrines : quant à sa tolérance pour les personnes, elle en donna trop la mesure en 93, pour qu'il soit nécessaire d'en attendre les nouveaux effets.
L'État évidemment ne saurait lui-même enseigner : mais, si le père de famille n'enseigne ni les humanités ni la philosophie à ses fils, il veille du moins à ce qu'elles leur soient enseignées. L'État, enfin, ne saurait se montrer plus exigeant, plus impatient que Dieu, qui tolère, qui attend les personnes. Mais tolérance ne fut jamais indifférence; l'une existe pour la personne, et la seconde tue les âmes. On confond tout ; on prétend fixer des principes, on n'a pas même des idées. Avant de tolérer le mal, commençons par proclamer le bien, par avouer le vrai, et par le protéger dans ceux qui nous l'apportent. Un État ne peut être sans foi; sinon la gendarmerie sera le fond de ses principes, fera seule exécuter ses lois.
Nous admettons la liberté de la conscience : mais nous voulons le droit de la vérité ! Certes , la liberté est dans la conscience, mais c'est le don de Dieu; et elle y est pour que la conscience puisse d'elle-même obéir à sa loi, et non pour qu'elle puisse la repousser. Aurait-on l'infamie de jouer sur le mot ? et, de ce que Dieu fait la conscience libre pour accomplir sa loi, prétendre qu'elle l'est pour la méconnaître et pour la rejeter (1) ? La liberté, encore une fois, donnée à l'homme pour le mérite, ne vit et ne s'accroît que sur le terrain du mérite. Hors de là, elle se soulève contre l'homme, au lieu de se lever pour lui. Que dis-je? à un pas de là s'ouvre l'abîme où elle disparaîtrait (1).
Définissons ici la nature de la Protection que l'État doit à la morale et au Dogme... Bien qu'en ce point la pratique soit tout, mettons en saillie le principe qui doit la diriger.
Prise dans ses limites, la lutte entre l'erreur et la vérité est nécessaire à la liberté même comme l'effort l'est à la vertu, utile aux bons comme les hérésies furent utiles à l'Église. La lutte contre l'erreur écarte l'indolence , entretient la ferveur , conserve l'énergie dans les âmes, en fait jaillir souvent la lumière et le zèle comme l'éclair de la nue. Enfin la Providence nous avoue qu'elle laisse quelque ivraie au milieu de son grain, et les Rois doivent gouverner la Société un peu comme la Providence nous gouverne elle-même. Or si la lutte de la vérité contre l'erreur est utile, la destruction de la vérité par l'erreur est non-seulement nuisible, mais le point que tout le monde veut éviter. Quand cette lutte empoisonne les âmes qu'elle doit ranimer, quand elle arrive à étouffer au sein des peuples la vérité sous le mensonge, elle sort des vues de Dieu, renverse la Civilisation. La licence est antisociale, et détruit la liberté même.
Une Civilisation ne peut abdiquer, devant l'individu, le droit d'éclairer la conscience publique. Toute Société ne reposant que sur des principes, ne se fonde que sur ce droit, et ne saurait y renoncer sans abdiquer elle-même. Voilà le principe, il est clair : mais il est absolu comme tous les principes, et la pratique est relative aux temps, aux mœurs, aux hommes. Reste donc la question de savoir de quelle manière la Société exercera ce droit. Or la réponse est simple, c'est celle qui se présente toutes les fois que l'on veut préciser l'usage d'une jouissance ou d'un droit, autrement dit : l'État exercera ce droit en bon père de famille. Un véritable père n'est jamais fanatique en son droit. De fait, les peuples se sont toujours montrés d'autant plus fanatiques qu'ils offraient un culte plus pauvre. La proportion demeure exacte : des puritains et des mormons, on passe aux Turcs, et des Turcs aux Indous. La tolérance fut révélée par le Catholicisme, qui nous apprit celle que l'on doit, non aux erreurs, mais aux personnes.
Nos lois civiles mêmes ont quelque chose d'absolu ; partout la Société demande que l'État la traite en bon père de famille : summum jus, summa injuria. C'est pourquoi, en dépit des légistes, le bon sens et les peuples se montrent toujours plus ardemment préoccupés de la question des Princes , que de celle des Constitutions par écrit. C'est la pratique qui nous importe. Enfin, c'est ici-bas que naît la liberté humaine, et au Ciel seulement qu'elle doit s'accomplir. L'homme n'est point si grand que la Révolution veut le dire, quand elle vient l'écraser d'une liberté absolue. L'homme a cette liberté qui commence, qui mérite, qui grandit avec la vertu , et non cette liberté angélique , cette liberté pleine qui, le constituant parfait, rendrait les gouvernements inutiles. Comme nous l'avons fait remarquer, ici-bas notre liberté est positivement dans l'état de l'enfance ; elle en demande et la surveillance et les soins. Nos lois , la Société, ont-elles une autre signification ? et font-elles autre chose que d'affaiblir ou d'écarter le mal pour mieux laisser passer le bien? Or le Pouvoir, par ses nobles exemples , étend et complète cette action, réduisant d'autant plus les dures nécessités du Code, accroissant d'autant plus notre vraie liberté qu'il l'affranchit tout à la fois de l'étreinte du mal et du respect humain.
Ainsi, la raison pure veut que la vérité triomphe, mais la raison pratique, qu'on en prenne la voie, qu'on écarte la pure contrainte, la force extérieure, pour faire place à la conviction, à la force intérieure, et que l'État enfin travaille à fonder celle-ci pour mieux éloigner l'autre. Le bien avec la liberté possible, et non la liberté sans le bien, telle est la mesure de la Protection que l'on doit assurer à la morale, et à son fondement, le Dogme. En tout, procédons des principes, puis, entrons dans le bon sens et dans les faits, où gît l'application des principes. La liberté et la vérité sont nées évidemment l'une pour l'autre, mais avec cette distinction radicale : qu'on ne saurait aller de la liberté à la vérité, comme le veut la thèse protestante, mais de la vérité à la liberté , qui est la gloire des enfants de Dieu.
M. de La Mennais conseillait lâchement à l'Église de séparer sa cause de celle du Pouvoir, pour n'en point partager l'impopularité auprès des hommes de l'époque : des courtisans conseilleraient au Pouvoir de séparer sa cause de celle de la Foi, pour ne point non plus hériter des haines qu'elle rencontre dans le vulgaire. C'est, d'un côté, sacrifier la souveraineté, de l'autre, sacrifier la vérité, abandonner l'Église ; de part et d'autre , commettre une stupidité , diviser ce que les siècles ont lié , séparer ce que Dieu a uni (1)!
Pour achever d'éclairer la question, il suffit de poser celle de la distinction des deux Puissances, question dans laquelle nos écrivains, nos légistes, courent droit au despotisme...
1. Vérité, dont la noblesse est garantie par dix-huit siècles, et par les sacrifices toujours nouveaux de ses martyrs! En sa présence, faut-il que l'erreur, qui allume l'orgueil et souille les passions, soit offerte à un être si faible que les leçons de l'éducation, sa propre conscience, ne peuvent dérober aux plus honteux penchants ? Un père chrétien tolère-t-il chez lui l'homélie du sectaire ou le roman du jour? Ne ferme-t-il pas sa porte à tous les genres de poisons? Eh bien! n'est-ce pas le devoir du Souverain, du père de ses peuples?
1. On n'y a pas manqué. La feuille qu'on distribue en France au plus grand nombre d'exemplaires , publiait l'an dernier : « Quand il serait prouvé que Dieu a donné mission à un Clergé de le représenter sur la terre , resterait la question de savoir si , AU NOM DE LA CONSCIENCE , chacun n'a pas le droit d'accepter ou de méconnaître ce mandat ! Et pour fixer l'application de cette pensée merveilleuse, tout récemment la même feuille ajoute : Nous ne devons compte de notre parole qu'à Dieu ! s'écrie Mgr. de Bonald. Oui, mais Dieu parle ici-bas par la voix des peuples, et non par la voix des prêtres. » Et qui nous traduira la voix des peuples? Sans doute ces Messieurs.
Il est douloureux d'entendre parler publiquement des hommes qui ignorent les premières notions, et compliquent de folie l'ignorance du peuple.
1. La moralité seule a engendré les droits au sein des Sociétés modernes. Les Civilisations élevées reposent sur des vertus. La vertu est l'hymen sacré du libre arbitre avec sa loi.
1. « C'est bien le moins, s'écriait Calvin lui-même, que ceux à qui Dieu a donné le glaive et l'autorité, ne permettent point qu'on blasphème la foi en laquelle ils sont enseignés! » Lettres franc, de Calvin, éd. B., t. II, p. 20.
A suivre... XXIX. La distinction des puissances.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXIX.
La distinction des puissances.
Les mots, dans un siècle de littérature, exercent sur l'opinion une plus grande influence que les idées. Ils s'enfoncent dans les esprits, et sans en faire jaillir de lumière. Ce terme de séparation des deux Puissances nous abuse profondément. Et d'abord, la distinction des deux Puissances n'en est point la séparation absolue. Que l'une offre les Dogmes pour asseoir la vertu, les mœurs, toute la Société; que l'autre les reçoive avec indifférence, ou les laisse officiellement en butte à l'erreur, et voilà, non pas une séparation, mais une dissolution qui atteint la Civilisation même. La philosophie démontre la distinction de lame et du corps, elle n'en proclame point la séparation, qui est la mort. Le corps protège l'âme, protège l'homme même; leur parfaite union est la vie. Mais ici, comme ailleurs, la vérité nous abandonne et fait place à la confusion.
Séparation entre les deux Puissances? oui, dans l'ordre politique, dans l'ordre des Puissances. Mais dans l'ordre moral, et même dans l'ordre civil, le fait change de caractère! Comment les mœurs pourraient-elles être séparées des croyances, ou les lois être séparées des mœurs sans ramener les Sociétés sous un despotisme semblable à celui de la Rome païenne? La liberté moderne, la liberté de l'homme, est toute dans cet ordre social fondé par le Christianisme, où les lois découlent des mœurs et les mœurs des croyances. Et c'est ainsi que notre âme a l'empire, que le pouvoir, au fond, appartient à la conscience. Séparez ici le spirituel du temporel, c'est-à-dire les croyances des mœurs et des lois, vous renversez de fond en comble la Société moderne. Au lieu de reposer sur la conscience, la voilà de nouveau assise sur le pouvoir absolu (1). Dans l'ordre politique, au contraire, cette séparation des deux Puissances est le Catholicisme même, est tout notre triomphe; ici leur réunion serait la confusion, confusion qui devient un schisme lorsqu'elle est partielle, et un retour au paganisme lorsqu'elle est absolue.
La séparation du Spirituel et du Temporel dans l'ordre politique, leur union dans l'ordre moral, sont pour le même but, concourent à la même fin. Une semblable séparation n'est au fond qu'un admirable accord dans l'intérêt de notre âme !
Or, la séparation des deux Puissances fut opérée de droit il y a dix-huit cents ans, et, de fait, même avant que Constantin eût abandonné Rome. C'est sur ce droit, c'est sur ce fait que repose la liberté de conscience : laquelle ainsi fut soustraite à César. Mais Jésus-Christ l'a opérée pour délivrer la conscience et non pour qu'elle soit abandonnée. Cette précieuse séparation, par Jésus-Christ, ne saurait s'étendre à l'ordre moral et civil sans nous séparer nous-mêmes de Dieu. Jésus n'est point venu dépouiller l'âme de sa loi. Séparez-moi de la force, ne me séparez pas de la vie ! Dieu a voulu nous délivrer, enlever notre conscience à César, à qui elle était liée : « Rendez à César ce qui est à César, mais A DIEU CE QUI EST A DIEU... » Et la séparation opérée, la conscience rendue à Dieu, la scission ne peut se poursuivre au sein de la Société humaine ; la conscience a besoin d'y retrouver sa loi en pleine vie ; sinon la Société même se verrait séquestrée de Dieu !... Sans s'élever dans la Théologie , sans découvrir tout notre but, comment le siècle peut-il débrouiller une question de cette importance?
Les deux Pouvoirs se séparent, en ce sens que le temporel ne saurait imposer la loi spirituelle comme ses propres lois : ce serait annuler la séparation et ressaisir la conscience. Mais s'il ne peut imposer cette loi, il peut la protéger. Il peut en défendre la vie, en soutenir l'honneur, et l'asseoir dans tout son empire. Et, comme il ne saurait subsister lui-même si cette loi ne s'accomplit, il veut lui-même en être le noble défenseur : le bras fut placé si haut pour protéger la tête. Mais demander que la séparation soit totale, c'est déclarer que la puissance spirituelle est exclue de la Société, c'est tomber dans l'abîme qu'on voulait éviter. La puissance spirituelle écartée, on passe sous celle de César. Avec la proscription du droit chrétien, l'ère du césarisme commence : c'est à la fois ici l'histoire ancienne et l'histoire moderne. Les hommes répètent, sans le comprendre, que cette grande séparation a été le salut de l'Europe moderne : ils devraient dire, l'origine! Mais, en la façon dont on l'entend, il faudrait dire qu'elle en sera la rupture et la mort...
Pas de théocratie, c'est-à-dire de Pouvoir politique qui soit le prolongement du Pouvoir spirituel : et pas d'absolutisme, c'est-à dire de Pouvoir spirituel qui soit un prolongement du Pouvoir politique ! Et c'est ce qu'a fait Jésus-Christ. C'est ce qu'il a voulu, ce que demande l'Église, et au fond tous les hommes. En écartant le premier des deux faits , le Sauveur écarta le second; il détruisit deux puissantes erreurs. La religion de Mahomet est une théocratie, l'autorité du Czar est un absolutisme, et tout gallicanisme pratiqué par l'État oscille entre ces deux termes du despotisme (1). Mais si Jésus-Christ ne voulut pas la théocratie, il voulut moins encore l'absolutisme, puisqu'il sépara les Pouvoirs, rendit à la conscience la liberté des enfants de Dieu ; et ici se dévoile un des sens de cette admirable expression.
Celui qui tient le corps ne doit pas tenir l'âme : car il ne tient le corps que pour protéger l'âme et la servir. Sinon, quelle serait la mission du Pouvoir dans une Société où les âmes sont libres et sous la conduite de Dieu?.. L'État qui ne défend pas la vérité, défend l'erreur, ou du moins paraît la défendre aux yeux des foules, ce qui produit un effet tout aussi désastreux.
1. Cette séparation des deux Pouvoirs n'a lieu que chez les peuples et dans les pays catholiques. Partout ailleurs , en Allemagne, en Angleterre, en Russie, en Chine, et dans le reste, la même main tient le sceptre et fixe le dogme. Et l'homme cède à l'homme, c'est-à-dire qu'il n'obéit plus...
1. « Qu'est-ce donc que l'ordre social, s'écrie l'éloquent, l'admirable Évêque d'Orléans, et comment l'entendez-vous? Est-ce que la Société humaine n'est pas aussi de droit divin? Et quelle est cette incompatibilité nouvelle, qu'après dix-huit siècles de christianisme, vous venez proclamer entre le Christianisme et l'ordre social? »
A suivre... XXX. Les Encycliques, et la liberté de conscience, de la presse, et des cultes.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXX.
Les Encycliques, et la liberté de conscience, de la presse, et des cultes.
Avançons à la lueur de ce principe tout divin que la métaphysique donne, le seul que la raison puisse avouer, savoir : que la liberté est le pouvoir du bien, alors qu'on a la possibilité du mal ; le pouvoir en un mot d'accomplir de soi-même la loi, pouvoir qui est l'attribut de Dieu, et qui lui rend l'homme semblable. Car, cette possibilité du mal n'est ni un complément ni un attribut de notre liberté, mais une imperfection, une débilité, une absence. L'homme, avons-nous dit, commence sur cette terre ; il n'y est qu'un enfant ; il en demande et la surveillance et les soins : et la Société est pour lui une mère.
Il y a un fait qu'on ne veut plus comprendre, c'est celui de la Société. On ne voit que l'homme, l'homme avec sa liberté, la raison et la grâce, et l'on croit que cela suffit : les gouvernements n'apportent qu'une entrave, l'Autorité ne produit rien... C'est une négation de la Société. La liberté aveugle des esprits trop faibles, et le reste disparaît pour eux. Enfin, nous ne pensons qu'au moi ! Quand la philosophie et l'amour à la fois se retirent, notre horizon se rétrécit. Avec ces idées littéraires on a brisé les doctrines, on a ruiné les principes, on a épuisé la raison.
Ceux qui manquent la question de la Société , qui croient que la liberté suffit à tout et suffirait à l'Église, devaient naturellement réclamer la liberté de conscience, de la presse et des cultes. Les trois points s'engendrent en effet : toute illusion d'ailleurs ne peut subsister que complète. Cependant il était très-aisé de voir qu'on tombait pleinement d'accord avec la Révolution, que l'on demandait après elle l'indifférence de l'État... Dieu nous garde effectivement de son intolérance ! mais que reprocherait à cette thèse l'auteur des mots : la loi doit être athée, qu'un politique du dernier règne et un légiste de celui-ci nous ont complétés de la sorte: l'État, renseignement doivent être laïques? au fait, toutes les idées de l'époque ?... Un État ne peut pas être sans religion ; il tomberait au-dessous de l'État antique, toujours appuyé sur ses Dieux. Heureusement pour nous, ces quatre points : liberté de conscience , liberté de la presse, liberté publique des cultes, et liberté toute pareille pour l'Église, ce qui veut dire abandon par l'État, ont été frappés par les condamnations réitérées du Saint-Siège.
Dans ses Brefs ultérieurs, S. S. Grégoire XVI ne fait exactement que rappeler la gravité des censures infligées par l'Encyclique Mirari. Et d'abord, voyez le Bref du 5 octobre 1833, adressé à l'Évêque de Rennes. M. de La Mennais demande en quels termes il peut le mieux exprimer son obéissance au Saint-Siège : « A cela, Nous ne répondons qu'une chose : qu'il s'engage à suivre uniquement, absolument, la Doctrine exposée dans notre Encyclique ; à ne rien écrire, à ne rien approuver qui ne soit conforme à cette Doctrine, suivant en ceci l'exemple d'hommes remplis de sainteté qui recoururent , selon l'expression de S. Damien, à l' enseignement de Pierre. » Et plus loin , à lui- même (Lettre de S. S. Grégoire XVI du 28 décembre 1833 ) : « Employez les dons du talent que vous possédez si éminemment pour que les autres pensent et parlent tous suivant la Doctrine tracée dans notre Encyclique. » Et, dans l'Encyclique nouvelle, de 1834, où, s'adressant encore aux Évêques du monde, le S. Père s'écrie : « Accueillez notre Encyclique du 15 août 1832, où nous annoncions à l'universalité des Brebis catholiques la saine Doctrine, la seule qu'il soit permis de suivre sur CHACUN DES POINTS QUI Y SONT TRAITÉS. Or, l'on connaît ces points ! Et enfin : « Nous avons été vraiment saisi d'horreur, et avons compris à quel excès emporte la science qui est selon l'esprit du monde. Quoi ! au mépris de la foi jurée, l'auteur a entrepris d'ébranler la Doctrine que nous avons définie, soit sur la soumission due aux Puissances, soit sur l'obligation de réfréner la liberté illimitée de la presse, soit enfin sur la liberté de conscience, liberté si condamnable (1). De plus, il représente l'Autorité des Princes comme contraire à la loi divine, et il flétrit ceux qui président aux choses divines comme s'ils avaient conclu avec eux une alliance contre les droits des peuples! Non satisfait d'une pareille audace, il veut qu'on impose par la violence cette liberté absolue d'opinions, de discours et de conscience... Dissimuler, par notre silence, un si funeste coup porté à la sainte Doctrine, nous est défendu par Celui, etc.; c'est pourquoi, après avoir entendu nos Vénérables Frères les Cardinaux, de notre propre mouvement, de notre science certaine, de TOUTE LA PLÉNITUDE DE NOTRE PUISSANCE APOSTOLIQUE, « nous réprouvons, condamnons et voulons qu'à perpétuité on tienne pour réprouvé et condamné, etc. (2) »
Franchement, tous ceux qui parmi nous renouvellent ces thèses, n'écrivent-ils rien, et n'approuvent-ils rien qui ne soit conforme à la sainte Encyclique? Consciencieusement, entrent-ils dans la seule Doctrine qu'il soit permis de suivre sur chacun des points qui y sont traités ? Emploient-ils leur savoir à ce que les autres pensent et parlent suivant la Doctrine tracée, appliquant leur talent à en développer tous les points définis, soit sur la soumission due aux Princes , soit sur la liberté sans borne de la presse , la liberté de conscience et des cultes?.. Je crains, s'il faut livrer une inquiétude, que, rêvant des alliances impossibles, on n'ait encore en ce moment, moins de confiance dans la doctrine du Saint-Père qu'en celle de la Révolution (1)...
Pour l'époque, c'est la pierre d'achoppement ! Où aller? les idées sont interrompues, on ne voit plus de doctrines? Les esprits se fatiguent à quitter des erreurs pour les reprendre encore, à s'écarter de la Révolution pour se remettre dans son chemin. Le scepticisme gagne les âmes, elles perdent confiance en la vérité. Oui, c'est la pierre d'achoppement! D'abord, le nombre déjà si faible de ceux qui ont conservé les principes, est encore divisé par ces opinions ; ensuite, elles offensent une Doctrine qui semblerait accueillir des idées qu'elle aurait jusqu'ici méconnues. Enfin, et c'est le pire, elles justifient les tendances de la Révolution chez cette masse honnête , mais impersonnelle , qui sert alternativement d'appoint à l'ordre et aux révolutions (1). Où vont tous ces démembrements? il serait navrant de calculer ce qui reste de vie au monde, de forces à la Civilisation.... Mais remontons dans l'espérance, auprès d'un Dieu que nous verrons intervenir, s'il veut encore conserver un monde qui, de lui-même, ne pourrait se continuer. Ailleurs nous avons signalé le péril de la situation économique , indiqué la pente fatale sur laquelle on lance les peuples ; ne pensons aujourd'hui qu'au péril de la situation morale! Que ceux qui ont reçu la Foi, s'ils n'en ont le génie, aient du moins le bon sens d'en embrasser les conséquences ! La Foi n'est pas un vêtement, une façon d'écrire, mais une âme nouvelle ajoutée à notre âme ; elle nous revêt de l'homme nouveau.
Liberté complète des cultes, quelle confiance en l'homme !... Mais ce sont les questions de l'époque, ce sont celles qu'il faut vider.
1. De la distinction de l'Église et de l'État n'en découle point, nous l'avons vu, la séparation. Encore une fois, on démontre en philosophie la distinction de l'âme et du corps, et leur séparation serait tout autre chose... Mais notre époque est plus savante que cela!
2. Encyclique Singulari; du 7 juillet 1834.
1. Le Pape, nous assure-t-on, n'est point infaillible en politique. Bien: mais en morale, d'où découle la politique? Et prenez-vous pour de la politique la position qui sera faite à l'âme au sein des Sociétés chrétiennes, ou ce qui fait la substance, la constitution même de ces Sociétés? Et le Pape lui-même violerait l'Infaillibilité, en étendant ses jugements sur les matières qui lui échappent ? Le Jansénisme aussi avait ses fines réparties. « Le Pape, disait-il, n'est point l'Église ; ou, son infaillibilité n'est point là. » Non, la racine n'est pas l'Église, ni la cause l'effet ! Mon Dieu ! que de témérité à croire que le Pape soit éclairé sur son droit et sur ce qui convient à la défense de l'Église ?....
1. La Révolution ne tarda pas à s'enorgueillir des premiers pas que fit vers elle M. de La Mennais. Ceux qui la mènent à cette heure n'oublièrent point, dernièrement, de réclamer pour eux les disciples, e n, que nous a laissés l'écrivain.
A suivre... XXXI. L'homme a droit à la vérité dans les États chrétiens.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXI.
L'homme a droit à la vérité dans les États chrétiens.
Après avoir replacé sous nos yeux des Paroles qu'il importe, à cette heure, de ne plus oublier, faisons une dernière observation sur cette liberté des cultes, dans l'espoir où nous sommes que le lecteur sincère a partagé précédemment nos sentiments, d'abord sur la liberté de notre âme, ensuite sur celle de la presse, enfin sur la pensée qui prétend que la liberté doit suffire à l'Église. Les trois thèses sortirent de ce fleuve d'illusions et d'erreurs qui grossissait de jour en jour pendant le dernier règne. Celle de l'athéisme de la loi, de la séparation complète entre l'Église et l'État, ou de la liberté des cultes, a la même origine. Évidemment nous voulons tous la liberté de la conscience , mais aussi le droit de la vérité !
La liberté des cultes! n'est-ce point là trop de candeur? Si l'homme pouvait si bien choisir son culte, il n'en aurait pas tant besoin. Et l'attrait naturel du vice, et l'effort surnaturel qu'exige la vertu? Toujours la même ignorance de la nature humaine , de sa situation réelle ici-bas. Cette inadvertance est un fléau sur notre époque. En proie à l'orgueil, à l'ignorance, à toutes les misères, à toutes les passions, l'homme est une créature trop fragile et trop précieuse, son âme a trop de droit à la protection, trop de droit à la vérité au sein des Sociétés chrétiennes, pour y rester abandonnée aux entreprises du mensonge, à celles de la méchanceté. S'il faut protéger son esprit contre la presse, il ne faut pas moins protéger sa raison contre l'hérésie, enfin, pouvoir sauver son âme. Avec le droit de choisir tous les cultes, on choisira toujours le plus bas... Voyez-vous l'homme possédé du désir de la justice et de l'amour de la perfection? Alors, pourquoi la religion? pourquoi vos lois, votre police, pourquoi votre Société? On ne peut sortir du dilemme...
L'État offrira la liberté à tous les cultes , et tous les honnêtes gens prendront cette liberté politique pour une liberté théologique, et comme si l'on pouvait être indifféremment, devant Dieu, catholique, déiste ou athée. Prouvez à la foule qu'elle doit faire mieux que l'État! De cette liberté des cultes, elle déduira qu'il ne faut aucun culte. Nous perdons le bon sens chrétien, c'est-à-dire le bon sens moderne. De grâce, évitons au peuple les suites de toutes ces démences, dépouillons-nous enfin d'un vil libéralisme. Et si l'État se persuade qu'il n'a aucune charge d'âmes, aucun droit d'enseigner, qu'il comprenne aussi qu'il n'en a aucun pour détruire tout enseignement. Entre Dieu et l'homme, il y a des rapports immuables, qui précèdent en quelque sorte les temps et qui suivront les temps , rapports indépendants des mesures que la politique peut prendre à l'égard de la Religion, qui est l'expression de ces rapports. Et si l'État prétend faire abstraction de cela seul qui ait en l'homme une valeur éternelle, qui soit d'ailleurs le but de cet être étonnant, le but de la Civilisation, il témoigne d'une sinistre ignorance, il entre lui-même dans la voie qui mène à sa destruction. D'où sort l'anarchie politique, sinon de l'anarchie des croyances?
En elle-même, la vérité est intolérante comme les mathématiques; elle ne peut déclarer qu'une ligne droite soit courbe, ni que deux et deux fassent cinq. La loi divine étant donnée, la Foi ne saurait faire qu'elle ne soit point la Loi ; que la justice ne soit pas la justice; que le bien ne soit pas le bien, et que l'homme se puisse sauver en ne le pratiquant point. Ce n'est pas tout, elle ne peut se dispenser de le déclarer hautement, et de proscrire une absurde, une lâche liberté de conscience. Vouloir qu'en présence du vrai , la Foi laisse la pensée libre de ne le point croire, qu'en présence du bien , elle laisse le cœur libre de ne le point aimer! vous n'y aviez point réfléchi... Et si tel est le devoir de la vérité , croyez-vous qu'il n'y en ait aucun pour l'Autorité?
Oui, l'homme a le droit d'adhérer de lui-même à la vérité, afin d'en avoir le mérite, mais il n'a pas le droit de s'en écarter sciemment pour pratiquer l'erreur et préférer le culte qui déprave son âme ou la prive de biens qui seront éternels : et l'État a moins encore le droit de prêter les mains à une pareille iniquité, à une pareille destruction de la liberté de nos âmes. Or, en proclamant l'indifférence politique , n'est-ce pas ce qu'il pratique officiellement? Indifférence, conséquemment scepticisme, conséquemment anarchie., et l'État saura bientôt lui-même s'il peut séparer à ce point l'ordre naturel, sur lequel il prétend s'établir, de l'ordre surnaturel , d'où découlent ce devoir et cette obéissance sur lesquels il est en définitive établi ! L'État n'est pas une brute, l'État doit reconnaître une vérité ! la moralité du peuple le veut. L'homme en Société a droit à la vérité de la part de l'État. On ne demande, il est évident, ni l'inquisition ni la licence, mais la profession de cette vérité. Quand un pays est sain, on l'environne avec soin d'un cordon sanitaire. Mais quand l'épidémie, mais quand l'erreur l'a envahi, on cherche par l'exemple, par le zèle et la charité, à ranimer une vérité expirante. Au reste, comment recourir à l'inquisition quand on a vu la manière dont en abusaient les pouvoirs politiques (1) ?
La liberté des cultes peut-elle réellement descendre jusqu'à la faculté d'admettre tous les cultes? Non, évidemment.. Eh bien! que le Pouvoir s'élève jusqu'à la mission de reconnaître le vrai culte ; qu'il s'élève à l'honneur de le pratiquer ! A cette incomparable Église qui place elle-même les cœurs dans la justice , dans l'obéissance et la paix, à cette Église qui lui fournit la Société à peu près faite, qu'il accorde du moins le secours de sa loi et de son amour avéré ! Puisque la liberté des cultes ne saurait s'entendre comme la faculté de n'en avoir aucun, qu'il se fasse une gloire de posséder le véritable! On ne lui demande pas d'imposer la vérité, mais de l'honorer pour que les hommes se l'imposent. Ce n'est point pour nous abaisser au scepticisme, mais pour nous élever à la foi de Celui qu'on adore en vérité, que LA LIBERTÉ fut donnée à l'homme, L'AUTORITÉ à ceux qui viennent le gouverner. L'État doit protection à la morale , il la doit donc au dogme... c'est la logique qui lui parle ! Or cette protection de sa part, c'est l'aveu de la vérité; et l'aveu de la vérité, l'exclusion d'une profanation, d'une prostitution des cultes publiquement avouée. « Que le souverain se souvienne, dit l'Encyclique, dans sa langue élevée, que c'est surtout pour la protection et la défense de l'Église que le Pouvoir lui a été donné! »
1. « Beaucoup en ont parlé, mais peu l'ont bien connue », a-t-on dit de l'inquisition. Ici ce sont les faits que surtout on ignore. Les Papes ont eu constamment à se plaindre de la manière dont les Princes la pratiquaient. En Espagne d'abord. elle fut à tout instant soustraite à l'autorité du Saint-Siège , c'est pourquoi les Papes en ont déploré les excès et allèrent jusqu'à invoquer la piété de cette nation pour modérer ses rigueurs. « Dès l'origine, dit le R. P. Franco, citant Liorente, Sixte IV fit au roi Ferdinand des observations si vives sur la manière dont on exerçait l'inquisition en Espagne, que les deux cours en vinrent à l'inimitié et suspendirent mutuellement leurs relations diplomatiques. Ce Pape obligea les inquisiteurs de Séville à introduire les évêques dans leur tribunal , et s'opposa à l'établissement de tout tribunal d'inquisition dans les autres provinces. Enfin il nomma un Juge papal d'appel pour recevoir les réclamations de ceux qui auraient été injustement ou trop vivement persécutés. Il voulut même que. des sentences d'appel on eût recours directement à lui; il supprima des procès, mitigea des peines et conjura le Roi et la Reine, « per riscera Christi », de se montrer plus miséricordieux envers leurs sujets. Léon X, à son tour, excommunia plusieurs inquisiteurs qui avaient agi avec trop de sévérité, et entre autres ceux de Tolède en dépit de Charles-Quint. Ce prince voulait empêcher tout recours à Rome, et étudiait les moyens d'éluder les effets des trois Brefs du souverain Pontife. Plus tard, Paul III et Pie IV continuèrent les mêmes efforts pour maintenir la mansuétude en Espagne. Les Papes veillèrent en tous temps à ce qu'on rendit l'honneur civil et les biens temporels à ceux qui avaient été condamnés, et surtout à ce que leurs enfants ne fussent point lésés; fréquemment ils recommandèrent aux inquisiteurs d'absoudre secrètement les inculpés disposés à la pénitence pour les soustraire aux peines civiles. En février i486, rapporte Liorente, le souverain Pontife en fit absoudre un grand nombre »...., etc. (Obiezioni cotil. la Relig., del R. P. S. Franco. D. C. D. Gesù.)
A suivre... XXXII. Idée de l'État; son devoir.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXII.
Idée de l'État; son devoir.
L'État doit avant tout l'exemple : et c'est uniquement lorsque les hommes franchissent la loi morale au point d'entamer la loi civile ou la loi politique, qu'il doit la répression.
Car pour lui cette répression est le second devoir, et, qu'on l'observe bien, le côté le moins noble de ses hautes fonctions. Mais, il ne saurait diminuer la répression qu'en étendant, par ses exemples, le pouvoir de la vérité. C'est ici qu'il révèle un véritable libéralisme. Il agira en même temps dans l'intérêt de la vérité, sans laquelle il n'y a plus de liberté, et dans celui de la liberté, sans laquelle il n'est pas de mérite en l'homme. Voilà pourquoi l'État ouvre d'abord la source de conviction dont il dispose : l'exemple et l'aveu de la vérité.
Les peuples eux-mêmes honorent les gouvernements qui remplissent ce grand devoir, car ces gouvernements sont les amis du peuple, les bienfaiteurs des nations. Il est clair que l'État qui accueillera toutes les erreurs aura d'abord pour lui la foule, où elles règnent dès qu'on les lui fait voir; qu'il soulèvera moins d'embarras, rencontrera moins de difficultés, si sa lâcheté le désire ; et qu'au contraire, l'État qui défendra toutes les vérités, multipliera les difficultés et sera, non pas d'autant plus faible, mais, au début, d'autant plus attaqué. Il ne sera plus faible que s'il le fait sans l'avouer. . . La vérité dissimulée , offerte avec timidité est une preuve ineffaçable de faiblesse. Quand on possède le noble droit de la défendre, il faut d'abord l'exercer, mais ensuite le déclarer ouvertement, pour que les hommes en soient bien avertis , et qu'ils apprennent en même temps à s'y soumettre et A VOUS ESTIMER. C'est sur ces points , les plus élevés et les plus délicats , que les peuples prendront surtout l'idée de votre force.
Pour agir en père de famille, l'État éloignera donc à la fois, comme nous l'avons vu, la licence absolue et ce qu'on pourrait appeler la protection absolue. Si la première est un principe désastreux , la seconde est une voie dangereuse. Mais si la théorie pure, privée d'expérience, amène le fanatisme, l'indifférence pure, née de la lâcheté, amène l'athéisme brutal et la destruction des États. La Sagesse seule est complète, et devient la reine du monde aussitôt qu'elle y apparaît! Elle y réunit la loi pure à l'expérience, la vérité à la bonté et à la fermeté. Les Livres Saints et les nations l'ont appelée le plus précieux don du Ciel, et la plus grande chose de la terre.
Telle est la thèse qui découle de l'expérience et de la notion métaphysique de notre liberté , la thèse qui réunira tous les esprits pratiques, honnêtes et sensés. Personne, encore une fois, ne demande ni la licence ni l'inquisition ; mais, toute la liberté que comporte le bien, et non la liberté sans le bien. Dans cet emploi des soins qui feront triompher la vérité sur la contrainte, ou la force morale sur la force brutale, nous trouvons l'idée de l'État et de son devoir : car là est l'idée de la Civilisation elle-même.
L'État, avons-nous dit, doit avant tout l'exemple ; la répression est le second devoir, et le moindre côté de ses nobles fonctions. Les hommes ne lui ont point été confiés pour qu'il les abandonne, et attende leurs fautes afin de réprimer. Triste conception de l'État, si c'est la nôtre ! qu'elle suppose peu de fierté!... Avoir une morale pour ceux qui gouvernent, et une pour ceux qui sont gouvernés, est un crime de haute politique, une source profonde de démoralisation. Quoi! pour l'individu, rien de plus cher que la vérité, et pour l'État, rien qui lui soit plus indifférent? Que les gouvernements se relèvent; qu'ils sortent de l'humiliante situation où veulent les jeter les idées trop faibles des hommes ! Ne possédant sur les consciences d'autre pouvoir direct que celui de la vertu, et la volonté hautement exprimée d'en protéger partout l'empire, que l'État exerce du moins ce pouvoir dans son étendue, qu'il prenne en main son propre sacerdoce! Qu'il soit le ministre de Dieu, qu'il reste à la hauteur de ces États chrétiens qui firent la grandeur et la prospérité des nations modernes ! Et que l'époque, qui déjà définissait la liberté, le pouvoir de faire le bien et le mal, n'aille point prétendre que la liberté de conscience soit celle de n'avoir point de conscience, ni définir l'État, le pouvoir de laisser tout faire.
Ceux qui précipitent les choses sur cette pente malheureuse, qui prétendent que les États doivent être désintéressés dans la question de la vérité , se borner à la répression, ne comprennent donc point qu'ils les vouent au mépris?.. Les États resteront-ils victimes de l'étroitesse de nos vues, de l'affaiblissement des esprits? De vastes études nous manquent; on sent partout la nécessité de la Théologie, et pour soutenir les empires , et pour relever l'esprit humain. Ce qui perd les intelligences , c'est que loin de se fier aux grandes lois, elles se jettent sur des détails d'où elles veulent juger de l'ensemble. L'homme est trop faible, son esprit a trop peu d'étendue, pour partir de ses impressions , pour se former hors de l'histoire, et croître de son propre fond comme une fleur dans un vase. L'érudition insuffisante l'a bientôt aveuglé. Comment avertir le ciron qu'il monte contre un tertre et non contre les flancs du monde ?
En politique, comme dans le reste, nous n'avons plus que de la littérature. La philosophie, fruit d'une raison devenue tout humaine, a écarté la Théologie , et une littérature issue d'une raison retombée dans l'enfance, a banni la philosophie. Comme des plantes arrachées du sol, les esprits restent privés de sèves et frappés de stérilité. Ne pouvant plus produire, ils continuent d'opérer dans le vide de leurs impressions personnelles, et de là la littérature. Sans mission, sans Principes, sans instruction sérieuse, quelquefois pour gagner sa vie, on s'empare de toutes les questions, on s'adresse aux caprices, à l'opinion, aux sens, aux derniers appétits. La littérature a pris la place de la pensée, de la tradition , de l'honneur et de l'indépendance ; elle a détourné le sentiment du vrai, perverti peu à peu les plus nobles instincts. Tout le mal qui s'est fait est sorti de l'erreur ; celui qui se fera viendra de la littérature : nées l'une et l'autre de l'individu (1). Toute parole estimée chez les hommes procède d'une noble science ou de la tradition : un homme procède de son sens propre, un homme ose de lui-même parler, c'est le Littérateur... Aussi quel siècle a produit plus de pages, et quel siècle en versera plus dans l'oubli?
Plus de principes, plus de génie ; on ne sent plus dès lors la nécessité de retrouver l'ensemble, de vivre dans une doctrine. C'est trop le répéter, et ce n'est pas assez le dire... La liberté, la raison et la loi, l'âme, la grâce, l'Infini, toutes les notions philosophiques sont des chiffres dont on a perdu la valeur. C'est-à-dire que les idées s'en vont ; la rhétorique les a remplacées. Nous entrons en plein Bas-Empire. Le sensualisme est dans les âmes, le servilisme dans la pensée. Ce n'est plus la doctrine que l'on admire, c'est le talent. Nos pères cherchaient la vérité, c'est la dextérité que recherchent leurs fils ! La thèse plate, avec la phrase ornée, captive entièrement leur âme. Il faut dérouler pour leur plaire des surfaces brillantes, des tapis d'Aubusson où la plante n'a pas de racine, où les êtres sont des couleurs...
Les hommes n'ont plus de doctrine ; à peine conservent-ils des idées , c'est-à-dire des débris détachés de l'édifice des doctrines. Brisant la vérité dans les esprits qu'elle n'a pu envahir , la Révolution a partout amené l'absence de doctrines ! châtiment d'une époque qui vient condamner le passé, dès lors condamner Dieu ; d'une époque qui veut marcher seule, et sans donner la main à Celle qui la nourrit dans la Doctrine. Le monde n'a plus de doctrine , et ses droits les plus chers demandent leur raison d'être. Les principes disparaissent avec les croyances, les caractères avec les principes , et le despotisme s'avance. Les esprits sont vaincus; sciences, histoire, politique, philosophie, religion même, tous les canaux de la vérité restent interrompus, et l'homme ne peut suivre aujourd'hui sa pensée sans aboutir dans le mensonge. Les Rois, eux-mêmes n'ont plus de doctrine , et c'est le dernier coup porté au monde par la Révolution. Les éléments des nations, les aristocraties, la famille, la propriété, les ordres, les cités, tout succombe, plus rien n'a sa raison d'exister. Les lois s'en vont, les pères ne se croient plus maîtres chez eux , les armées hésitent, et les Rois tombent de leurs Trônes, parce que ceux qui les approchent sont privés de doctrines...
1. La Grèce eut les rhéteurs, la France a les littérateurs. Les premiers n'occupaient que le sol de la philosophie; mais ceux-ci ont pénétré partout , et changé par la rhétorique en un instrument de vanité et de mensonge, l'instrument et le gage de la vérité. Le Christianisme a triomphé du paganisme chez ces nations antiques où brillait le bon sens, où, sous le nom vénéré de coutume, régnait encore la tradition; il a triomphé du judaïsme, et de tout ce qui présentait quelque corps de doctrine. Je ne vois plus comment il pourra triompher chez nous de cette littérature, de cette pourriture de la pensée.
A suivre... XXXIII. Les Rois.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXIII.
Les Rois.
Les Rois tourneront les yeux vers le passé, ils considéreront la marche de l'histoire, et ils reprendront confiance en leur droit. Après S. Pierre, ce sont les Rois que la Providence a chargés de ses affaires en ce monde. Dans cet universel bouleversement, dans ce tremblement de la terre, l'Église, avec plus de vaillance, plus de vertus, plus de patience, plus d'ardeur, d'enthousiasme que jamais, combat à son poste sacré : les Rois quitteront-ils le leur? Si les colonnes chancellent, l'édifice s'écroulera; si elles sont immobiles, l'édifice se maintiendra. Plus que jamais le monde a besoin de compter sur ses Rois : et j'espère (1) ! Que ceux qui leur conseillent de descendre du trône, songent à Celui qui les y fait monter...
Que les Rois se soumettent eux-mêmes au droit de Dieu, et qu'ils ne craignent plus de soumettre leurs peuples à leur droit ! à ce droit dans lequel grandissent les nôtres et qui introduit les nations modernes dans une civilisation supérieure.
Ministre de Dieu, suivant la noble expression de l'Écriture, le Roi accomplit sa mission en ministre de Dieu, et « non en ministre du peuple. » S'il est le ministre du bien, il devient le soutien du peuple, et s'il se fait l'homme du peuple, il laissera périr le bien. S'il devait émaner du peuple, comment le peuple en aurait-il besoin ? L'effet ne saurait dépasser la cause, ni la foule arriver à un degré plus élevé par celui qui sortit de son sein. Le Roi n'est point un produit de la foule, mais le don que Dieu fait à la foule, pour l'amener plus près de lui. « Donne-leur un Roi », dit l'Écriture...
Ministre de Dieu, le Roi ne vient point suivre le peuple, il vient le relever et le conduire. La Religion vénérée, le règne et le respect du bien; l'honnêteté, le droit partout; la famille, la commune, la Province et leurs besoins sincèrement représentés; la propriété, la liberté individuelle et religieuse inviolables, sacrées ; l'administration paternellement établie, sagement décentralisée ; dans toutes les classes, le libre accès aux honneurs, aux avantages sociaux, pour la vertu, le mérite et la loyauté, tels sont, aux yeux du Roi, les garanties de bonheur et de paix.
Ministres de Dieu, les Rois lui doivent être soumis, et demeurer pour nous des pères. Le principe du gouvernement est la paternité ; paternité au reste rendue visible dans les faits. Ce sont les dynasties qui ont fondé les nations. Les nations se sont déployées dans le champ de l'histoire , en proportion de la grandeur des Familles qui les ont dirigées (1). C'est pourquoi il leur importe de conserver ces Familles, sous peine de passer dans les mains de celui qui est mercenaire et qui n'est point Pasteur.
Ministres de Dieu pour le bien, les Rois sont appelés à le défendre et à l'accroître chez les hommes. Ce n'est point à une époque de débordement du moi, de révolte universelle de l'orgueil, qu'ils peuvent restreindre l'action sacrée de leur pouvoir. Ils redoublent alors de surveillance et de soin, de justice et de bons exemples, à la manière d'un père, devenu d'autant plus irréprochable et ferme aux yeux de ses enfants qu'ils en ont plus besoin. Les révolutions suscitent des pouvoirs plus sévères, la paix et la beauté des mœurs leur rendent les douceurs de la paternité : telle est l'heureuse loi des choses.
En 1848, il fallut bien le dire : on n'a pas le gouvernement qu'on veut, on a celui qu'on mérite. En ce moment, nous devons ajouter : plus que jamais la mission des gouvernements est sacrée; le sort de la Civilisation est entièrement dans leurs mains. Ils le voient, la Société entière est à la merci de l'erreur. Quand les grands esprits ont cédé, comment se défendraient les autres? Par leur contenance, par la Grâce d'état qu'ils reçoivent de Dieu, les Rois peuvent encore sauver le monde.
Une mission, sinon une Couronne semblable à celle de Charlemagne, appelle aujourd'hui une tête dans cette Europe envahie et déjà barbare par la pensée. Peu d'hommes d'État se sont formés au sein de ce chaos, dans ce labyrinthe de faits que reniera l'expérience. Les Souverains restent seuls pour s'élever à la hauteur de leur position difficile. Mais ce n'est pas en vain qu'ils ont été placés entre Dieu et les hommes! Le flot du scepticisme de ce temps avili ne peut monter jusqu'à leurs lèvres ; le chant de la sirène, de la perfide popularité, ne peut arriver à l'oreille de ceux qui entendent la voix d'en-Haut et voient le nombre des âmes à sauver. Il me semble, lorsque mon âme est dans la vérité, qu'un peuple ne l'en chasserait pas!
« Un phénomène étrange de l'époque , dit un éminent écrivain, c'est la force de l'esprit d'agression contre les Trônes, et le peu de résistance qu'y opposent les souverains. Ce n'est pas le courage personnel qui manque aux Rois; ils s'effraient de leur responsabilité, ils doutent de leurs droits (1). Dès lors, pour que les Rois puissent défendre la Société, il faut qu'ils sachent où et comment ils peuvent la défendre. C'est pourquoi, dans ces pages, je me suis efforcé de signaler l'erreur qui produit la Révolution, conséquemment, la vérité qui parviendrait à la détruire. Ces notions , que le bon sens découvre aux premières lueurs de la Foi, sont les prolégomènes d'une Politique réelle : bien que les beaux esprits aient toujours espéré découvrir quelque chose de mieux que la Foi. Sans doute, pour l'homme d'État, l'art consiste à connaître son temps, à discerner ce que l'on doit accorder ou refuser aux hommes, à mesurer ses moyens d'action d'après les faits ; mais la science, pour lui, doit être prise du point de vue qui nous occupe, du point de vue théologique de la Chute. S'il le perd, ne sachant ni pourquoi il conduit les hommes, ni pourquoi ils lui obéissent; ignorant la direction autant que l'éminence du but, l'homme d'État ne sait point la mesure suivant laquelle il faut agir ; il s'embarque dans les systèmes, au sein de la nuit de plus en plus obscure des faits, sans pouvoir distinguer l'obstination de la persévérance. Si l'historien doit être loin des événements mais près des causes, l'homme d'État trop loin des causes ne saurait arriver près des faits.
Qu'ici la Politique, en comprenant son ministère, en découvre à la fois les limites et la sublimité ! Née pour secourir la justice et la vérité, pour remédier à la Société impuissante , y établir de force ou de gré le droit, l'équité et la paix, elle accourt où s'arrête l'action de l'Église, elle nous aborde au sortir de la conscience, resserre de plus en plus sur l'homme l'espace qu'il veut lui dérober (1), porte un étai où les mœurs plient, fait éclater l'esprit d'honneur, appuie les nobles sentiments, maintient tous les niveaux : elle est le ministre de Dieu pour le bien, et, pour atteindre le bien, elle se met elle-même dans le chemin du vrai ! Hors de ce plan sublime, la Politique abuse d'elle-même , rentre dans le pouvoir païen, et aboutit au despotisme.
Ou bien encore, si l'Église mène les cœurs à Dieu, et si la Politique les ramène à ce monde, par les sentiers de la chair ou du moi , les deux forces se neutralisent et la Société s'abat. Quand l'Église est absente, le Pouvoir le comprend , la tâche retombe sur lui : tâche impossible , insurmontable, que les efforts du despotisme ne sauraient accomplir , que l'or des États ne pourrait payer, et à laquelle l'âme libre de l'homme échappe nécessairement. Il faut assurer la vie à la loi , en la puisant dans la vérité , car l'homme veut garder la conviction profonde de n'obéir qu'à la vérité : il veut trouver à la même source sa croyance et sa certitude. «Il est aisé de faire des lois, dit Démosthènes, c'est le faire vouloir qui est tout.»
Ou bien enfin , si le Pouvoir lui-même affaiblit l'action de l'Église et, par indifférence, permet à toutes nos erreurs de s'établir pour la neutraliser, le mal arrive au comble. Depuis un siècle Dieu ne soutenait plus les Rois , parce que , depuis longtemps , les Rois ne soutenaient plus Dieu. Une lettre de Mgr l'évêque de Poitiers à Mgr l'archevêque de Turin, que l'illustre exilé a daigné me communiquer, fait ressortir ce point si grave, si plein pour nous d'enseignements. « .... Depuis soixante-dix ans que les Gouvernements mettent toutes les croyances dans une même catégorie, dit cette voix qui rappelle à la France l'accent de Bossuet, Dieu a paru faire un même cas de tous les Gouvernements. La peine du talion étant la grande loi de l'histoire, Dieu a appliqué aux Pouvoirs, la règle que les Pouvoirs appliquaient à la Religion, et il leur a rendu l'indifférence qu'ils professaient envers lui. C'est ainsi qu'en ce pays où, depuis treize siècles et plus , le fond de la constitution nationale n'avait pas varié, où une Dynastie qui s'était soudée sans révolution aux précédentes , avait compté huit-cents ans d'existence, nous avons vu, en deux tiers de siècle, quinze ou vingt Constitutions et révolutions, et pas un Pouvoir n'a pu atteindre un règne de vingt ans. Après s'être servi de chacun d'eux comme d'un instrument, la Providence les a tous successivement brisés; et, si quelqu'un d'eux a duré plus que les autres, il a été rejeté ensuite avec plus de dédain et d'ignominie. On écrirait l'histoire de cette période sous ce titre de chapitre : « De l'égale protection de Dieu envers tous les gouvernements, depuis que la politique « proclame le droit de tous les cultes à l'égale protection » . Après une expérience déjà si longue, le moment n'est-il pas venu de conclure? N'y a-t-il pas lieu de dire avec David : Et nunc, Reges, intelligite; erudimini qui judicatis terram ! C'est cet enseignement que M*** a merveilleusement entrepris de faire ressortir. Je ne doute point que son livre n'avance considérablement la question. Et ce nouvel écrit par lequel il établit qu'il n'y a de Politique réelle que celle qui s'appuie sur la Théologie, ne saurait se produire dans un moment plus opportun. Les Sociétés se meurent, l'Europe se dissout , ses tentatives en Orient avortent , parce que la sève théologique a cessé de vivifier la Politique. L'avenir, et l'avenir prochain de l'Italie (1) comme de la France , de l'Orient comme de l'Europe , dépend de la direction que sauront prendre les gouvernements à qui Dieu accordera , encore une fois , de triompher des ennemis forcenés de la Société... Espérons que le lendemain d'une révolution , qui est plus menaçante que jamais à cette heure , la Politique saura enfin demander à la Théologie les principes opposés à la Révolution. »
Trois choses, la vérité, la croyance et l'obéissance, doivent être placées en quelque sorte perpendiculairement. Sinon la loi elle-même est renversée, la conscience sacrifiée on retourne à la barbarie , l'homme cède au lieu d'obéir, et ses efforts pour échapper à la loi arbitraire, redoublant ceux des Pouvoirs pour l'y soumettre , font renaître le despotisme , lequel remplacera toujours les consciences qui ne sont plus. Il ne saurait, d'ailleurs, être réduit que par le bien. La base de la liberté, c'est la conscience, et celle-ci ne vit que par le principe religieux.
Les nations, encore une fois, retournent à la barbarie quand l'Autorité politique est la seule ; car la puissance de cette autorité aboutit en définitive à garantir le bien, et non à le faire germer de l'âme; à empêcher les hommes de démolir la Société, et non à la produire intrinsèquement elle-même. Le comte de Maistre, qui possédait l'instinct de toutes les vérités que ne déploya pas son génie, disait : « Le pouvoir humain ne s'étend peut-être qu'à ôter ou à combattre le mal pour en dégager le bien et lui rendre le pouvoir de germer suivant sa nature » . Toutes les lois du monde ne réussiront qu'à empêcher de faire extérieurement le mal. Sans l'ordre politique , l'Église disparaîtrait (1) ; mais, sans l'Église, la politique succomberait.
Je ne répète pas, je conclus :
On parle de la Société ; mais l'Église en fait les trois quarts , l'Autorité et les lois font le reste. On ne saurait restreindre l'Église sans accroître la force pour la remplacer. On ne veut donc pas se rappeler que l'homme est un être libre, que tous ses actes résultent de sa volonté, sa volonté de sa conscience , sa conscience de la vérité! Diminuer les croyances, c'est diminuer l'homme et le remplacer par la Loi... Cette substitution constitue à proprement parler le despotisme ; c'est ce dont nous menacent les temps où nous voulons entrer.
1. En publiant l'héroïque défense du Fils de la sainte, la grande feuille catholique s'écrie : « En écoutant les paroles qui viennent de Gaëte, on se rassure sur l'avenir de la Royauté. François II s'est révélé à l'Europe, étonnée de retrouver un Roi... Les hommes qui gardent dans leur cœur le sentiment du bien, répéteront avec lui: « L'œuvre de l'iniquité n'a « jamais duré longtemps, et les usurpations ne sont pas éternelles. »
1. Les Rois sont moralement pères du peuple, mais, suivant la nature historique, ils sont les pères de la nation. On le verra dès qu'on lira l'histoire , non par l'orgueil, mais par les yeux.
1. « Un fait si général et si nouveau atteste une doctrine nouvelle. Le Catholicisme posait sur la notion du devoir les fonctions des Souverains. Investis d'une charge, ils ne pouvaient en décliner les obligations ; et l'abdication était interdite. La doctrine du droit royal, née de l'enseignement juridique, a grandi avec le Protestantisme. Elle porte en elle-même un germe d'antagonisme et de mort; elle suppose, ne fût-ce que comme limite, un droit populaire ou individuel... Enfin, le droit étant un avantage, on renonce à un droit; et le devoir n'admet aucune transaction. En transformant leurs devoirs en droits, sous l'impulsion des idées modernes, les souverains ont perdu la plus solide assise de leur puissance. » Coquille; 8 août 1860.
1. Lettre que la date rend prophétique (26 décembre 1858 !).
1. L'Église règne sur ceux que la conscience gouverne. Ceux qui lui échappent iraient loin, si les Codes ne resserraient l'enceinte ouverte devant eux.
1. L'Église est immortelle, mais elle peut toujours nous quitter... Voyez la foi en Angleterre , en France à partir de 1789, dans les Indes, en Chine, où on l'avait portée.
A suivre... XXXIV. La Politique réelle et les hommes d'État.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXIV.
La Politique réelle et les hommes d'État.
Le problème semble maintenant rétabli. Je ne saurais être clair , dit Rousseau , pour qui ne veut être attentif; nous ne saurions, non plus, convaincre qui ne veut suivre la raison.
Les conclusions sont là. Telle métaphysique, telle politique; telle la notion de l'homme, tel l'état de la Société. La raison et la conscience disposeront toujours de l'homme. Que la Vérité théologique, seule conforme aux faits comme à la plus puissante philosophie , vienne d'abord chasser des âmes l'illusion de Rousseau sur un état de Nature, d'où naît la thèse des Droits de l'homme ; dissiper ensuite l'illusion métaphysique correspondante , qui le pose aujourd'hui souverain dans les sphères de la Substance ; ruiner enfin , la thèse abrutissante de Hobbes , qui en est la conséquence certaine , si l'on tient à maintenir la paix dans les États autrement que par une armée sur le pied de guerre, à résister à la Révolution autrement que par les baïonnettes , à conserver la Société autrement que par le despotisme l Reprenez position dans la pensée ; vous serez sur le terrain réel, sur celui qui maintient la victoire à la Révolution. Ici les choses seront décisives ; ce sera du gouvernement véritable. Pour rétablir l'Autorité dans sa source, et arrêter le despotisme dans la sienne, rétablissez dans les esprits la haute thèse de la Grâce , le dogme de la Création et celui de la Chute. Cela semble bien élevé, bien idéal, cependant la pratique est là... Il ne faut qu'une idée pour changer tout dans la raison ; l'histoire d'un siècle n'est que le développement d'un point de vue. C'est par la haute philosophie, c'est par les premières questions que tout mouvement se propage (1).
La raison de la Politique est dans la chute de l'homme ; son but, comme celui de l'Église, est de le diriger vers le bien ; mais l'homme agissant d'après ses pensées , c'est là qu'elle doit prendre son siège. La Politique ne peut changer ni de point de départ, ni de but, ni de siège, sans sortir de la pratique et se perdre.
De l'homme innocent et bon , naît le socialisme ; de l'homme coupable, enclin au mal, est née la Politique, telle que l'ont pratiquée les âges. Un dogme, en disparaissant, laisse écrouler le monde... On nous oppose la théorie des droits innés ; on l'oppose à la thèse des droits acquis, qui est la thèse de l'histoire.
La psychologie pure démolit la Société : le fait la rétablit tout entière. Pour sortir de la Révolution , il faut revenir dans le Dogme, éloigner le rationalisme.
— Le fait ici devient palpable. Mais nous épousons la logique dès que notre intérêt s'y trouve ; nous la répudions dès que nos passions la refusent.
Un seul point de vue faux désoriente la Politique, un seul argument la ramène. L'argument est bien simple : si la raison pure était pure, l'homme ne se tromperait pas, et si la volonté était droite, la loi ne se violerait pas, et surtout cette volonté ne la détruirait pas. Quoi ! l'homme est parfait quand je le vois par l'œil de la philosophie, imparfait et méchant quand je l'observe par celui de l'expérience !
La preuve, hélas! que nous avons péché en Adam, c'est qu'à l'instant où nous le pouvons nous péchons comme Adam (1) ! Le rationalisme n'est qu'une théorie, il ne peut donner lieu à une pratique réelle. Il nous parlait d'une Méthode , mais le chemin est sans issue.
Le doigt est maintenant sur la plaie...
Mon humble tâche est accomplie. Convaincu que les principes générateurs de l'ordre social sont au moment de disparaître, je me suis efforcé d'en ramener l'intelligence et l'amour. Je suis remonté à la première question , celle de la vérité , de l'Infaillibilité. Les notions qui précèdent découlent de la plus profonde métaphysique : je les crois fondées en Dieu et fondées dans les faits. Mais de nos jours, les thèses offertes par la rhétorique l'emportent sur les autres. L'art attire les esprits plus que la profondeur : la pensée est chez nous vaincue par les paroles. Si la philosophie mit ses efforts à bannir la Théologie , qui lui assurait l'existence, la littérature est venue à son tour étouffer la philosophie, comme nous l'observions tout à l'heure. Cet affaiblissement de la pensée coïncidant avec celui de l'Aristocratie (1) , accroît malheureusement encore la prédominance du Pouvoir politique, et le porte à une hauteur plus dangereuse aussi pour lui. L'époque me semble bien compromise... Mais qu'attendre , quand ceux qui ont la Foi hésitent sur la Politique, et quand ceux qui ont la Politique hésitent à fonder sur la Foi ; quand les meilleurs ont besoin d'être gouvernés ? Tout est scindé, tout est rompu; la moindre vérité provoque un scepticisme jusque chez les plus sages. Les esprits complets sont si rares qu'ils restent broyés dans les autres. Siècle débile, où les hommes peuvent se passer de logique , surseoir aux plus grandes questions ! Se dire philosophe , entrer dans la pensée, et ne faire qu'un morceau du chemin... Vivre dans l'incomplet, est-ce d'un homme? La plupart ne se sauvent que par l'inconséquence.
C'est la logique qui manque aux hommes. Tout panthéisme ne tombe-t-il pas devant l'idée de cause, et tout rationalisme devant l'idée du mal ? Tout panthéisme ! car si l'esprit humain entend par cause ce qui produit et non ce qui est produit, pas de Cause si elle n'est définitive et dès lors absolue : et nous voilà dans l'Infini, dont le Christianisme n'est qu'une merveilleuse application sur la terre... Tout rationalisme! car du moment où la liberté n'est pas définitivement et en tous lieux victorieuse , en plein accord avec sa loi , il faut bien avouer que le mal a pénétré dans notre essence : et nous voilà devant la Chute, dont les effets ont de tout temps nécessité la Politique... De la logique, et vous êtes chrétiens, vous arrivez à la hauteur de Pascal et de Bossuet, vous êtes à côté des saints!
On ne saurait se méprendre sur les signes du temps. Déjà les hommes n'entendent plus la vérité ; ils se détournent, et les méchants cachent leur tête dans le pli du mensonge. Ému à la vue du péril, j'ai voulu, par une sainte liberté , désigner d'un côté l'erreur qui compromet le monde , de l'autre la lumière qui pourrait le sauver. « Notre Foi catholique, s'écrie avec angoisse le « Saint-Père, peut seule guérir une société malade, et « la relever lorsqu'elle est prête à tomber... » Mais qui protégera la lumière ? qui permettra de la mettre sur le flambeau, et qui le portera dans ses vaillantes mains?
1. La question politique ne peut être résolue sans la question dogmatique, sans la question métaphysique elle-même. L'erreur est totale : il faut tout prouver d'un seul coup.
1. In peccatis sumus nati, in Adamo vulnerati, et ad malum incli-nati. Prose de l'Off. de l'Imm. Conception.
1. Il s'agit de l'absence d'Aristocratie en politique et dans les mœurscar le Clergé, qui en est la tête, et la magistrature, le membre le plus urgent, seront la gloire de notre époque.
A suivre... XXXV. La pratique actuelle et les hommes d'États.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXV.
La pratique actuelle et les hommes d'États.
Sans franchir l'enceinte de ces Principes, car je ne suis chargé par personne d'entrer dans la politique, j'oserai néanmoins y déposer une indication.
Autrefois, l'histoire et les hautes sciences étaient cultivées dans l'asile du silence et de la piété ; la main qui touchait aux consciences, pénétrant dans le champ de l'érudition, y recueillait la plante délicate des faits. Foyer de la prière, du savoir et de la vertu; pépinière de savants, d'historiens, d'hommes d'État, de saints et à peu près de tout ce qui a illustré , enseigné et dirigé l'Europe au temps de sa grandeur , telles furent nos Abbayes (1). Alors les hommes d'État trouvaient la science toute faite, et approchaient des sources sûres. Après avoir ôté l'enseignement au clergé, la Révolution incendia les Abbayes; la science venue du point de vue divin fut interrompue dans son cours; celle du siècle passa et se mit à sa place... On avait eu jusque-là une histoire du point de vue divin, une politique, une économique du point de vue divin, c'est-à-dire réel : on y substitua une histoire du point de vue humain, une politique, une morale, une économique du point de vue humain, c'est-à-dire conforme à l'état de nature , ou à ce qui n'existe point... Que de douleurs pour soutenir la Civilisation, depuis quatre-vingts ans, sur ces bases artificielles !
Les temps ont baissé comme les esprits, les esprits comme les études. Nos pères se préoccupaient avant tout de Théologie, c'est-a-dire des destinées véritables de l'homme (1) . De là nous sommes descendus dans la philosophie, c'est-à-dire dans un point de vue tout humain. Puis, nous sommes encore descendus dans les sciences naturelles, c'est-à-dire dans l'impasse de la matière et du temps. Autrefois, on s'occupait de Dieu d'abord, de l'homme ensuite, de la nature enfin; la marche était rationnelle. Mais on l'a renversée. En repoussant la Théologie, les sciences morales n'ont pas tardé à re tourner dans le chaos ; et les sciences physiques, qui repoussent à leur tour la philosophie , ne tarderont pas à y rentrer, comme on l'a vu dans l'antique Orient. Les filles aînées de la Théologie, les sciences politiques, ont déjà succombé (1). Si l'on veut relever toutes les sciences, tous les cordages de l'immense navire, il faut replacer le grand mât.
Or, si le Christianisme est perdu dans la Société, dans les idées , dans les lois , dans les mœurs , c'est qu'il n'y a plus de théologiens. Plus de Théologiens dans une civilisation qui repose sur la Théologie ! . Il faut constamment répandre dans la Société un courant d'idées vraies , si l'on veut arrêter le courant d'idées fausses, c'est-à-dire naturelles, que l'inexpérience humaine y verse constamment. Il faut avoir une base certaine sous les mœurs, sous les idées et sous les lois, surtout sous la Politique. Ce n'est pas dans le monde, où tout vacille, où tout se perd, où tout obéit au caprice, que l'on peut fixer cette pierre ; et ce n'est point au monde que l'on peut confier la culture des premiers Principes.
Les grands principes, unique base des États, les vertus élevées, source unique des mœurs, sont les plantes des sanctuaires. Mais indépendamment des grands principes et des vertus premières, il y a une raison capitale de relever les Abbayes. Dans le monde, on ne trouve jamais l'arbre entier de la vérité, ni même une de ses principales branches. Il existe une raison de ce fait. Pour posséder la vérité (secret que le monde ne peut connaître), il ne faut point cultiver son sens propre, il faut chercher celui de Dieu , ou , tout au moins être saint par l'esprit. Les religieux ont seuls découvert, dans l'obéissance, tout le secret de l'âme, c'est-à-dire le secret de l'éducation et celui de l'esprit humain. La vérité sortit toujours d'un homme que son éducation habitua à obéir, à quitter son sens propre pour chercher le bon sens. Au ton que lui donne sa modestie, on reconnaît l'homme bien élevé. Toutes les erreurs soutenues dans le monde, proviennent d'un orgueil intérieur. A la vérité philosophique , à la vérité historique, morale, politique, ajoutons donc l'éducation , et nous aurons les raisons d'État pour lesquelles il importe, non-seulement de tolérer, mais de favoriser ces précieuses institutions. Détruire les Abbayes , est, de la part d'un État, un véritable suicide.
Après avoir servi les caprices de la Révolution, puis ceux des littérateurs, en empêchant les esprits sérieux et pieux de se réunir, les Universités et la science monastique de renaître, les Gouvernements comprendront ils assez leurs plus chers intérêts pour ramener ici l'opinion (1), au lieu de la subir? — Que faire?— Deux choses toujours simples : d'abord, favoriser les legs religieux qui ont pour but de rétablir ces asiles de la pensée et du recueillement , où se reconstituerait la science réelle ; ensuite , leur demander des hommes supérieurs pour professer dans les chaires de premier ordre. Les Gouvernements ne peuvent tout faire, mais ils peuvent tout encourager.
Qu'ils garantissent leurs propres bases ! Qu'ils ne permettent plus au point de vue humain de remplacer la Foi dans leurs États , car ils reposent eux-mêmes sur le point de vue divin. La Théologie, voilà la force à entretenir. La plus puissante armée est celle qui combat pour vous dans les esprits!
Les maux qui ont détruit le Monde ancien fondent à la fois sur nous. Laissera-t-on au Christianisme les moyens d'en triompher, de sauver une fois encore la Civilisation qui se meurt? Le fléau est là : le paganisme et un rationalisme qui, partout, se verse dans le panthéisme, la double végétation de la chair et du moi. Déjà la chair prétend remplacer la vertu; la loi, remplacer notre conscience ; l'orgueil, abolir tous les droits acquis. Les grandes idées succombent comme les nations ; la raison s'affaiblit (1), les caractères disparaissent, l'opinion qui naissait des croyances n'existe plus, l'erreur est glorifiée, instituée, victorieuse; le mal a osé se nommer le bien, il s'avance, et personne ne lui oppose plus de barrières. C'est aux hommes d'État, c'est aux Rois d'y songer! Sur eux pèse la responsabilité du monde.
Il est temps! Que les hommes d'État portent leur attention, d'une part, sur ce que l'on nomme les principes nouveaux : liberté de conscience , de la presse, des cultes, et par suite liberté absolue en morale et en politique ; d'autre part , sur ce que l'on nomme les principes anciens : rétablissement de la Théologie au centre de la pensée humaine, des ordres religieux au sein de nos populations, et par suite protection avérée, intelligente de l'Église. Pour passer des principes anciens à ce qu'on appelle des principes nouveaux , l'homme est-il donc nouveau? Pour rejeter l'expérience, et pour qualifier tout le passé d'ancien régime, l'homme a-t-il plus de sagesse que les anciens, ou plus de vertus que ses pères?...
1. « Des entreprises littéraires qui devaient durer des siècles, disait M. de Chateaubriand, demandaient une société d'hommes consacrés à la solitude, dégagés des embarras de l'existence , nourrissant parmi eux les jeunes héritiers de leur savoir. Si j'avais le droit de proposer quelque chose, je solliciterais le rétablissement d'Ordres qui ont si bien mérité des Lettres. »
Dernièrement on a pu remarquer , dans le Concordat qui vient d'être ratifié entre le Saint-Siège et le Sénat d'Haïti, qu'après les articles fondamentaux, où il est dit par exemple : « Que la religion catholique sera SPÉCIALEMENT PROTÉGÉE ainsi que ses ministres, » et « Que les ecclésiastiques nommés aux Évêchés ne pourront exercer « avant de recevoir l'Institution canonique » ; qu'après , disons-nous, ces points de première importance , vient cet Article significatif : « Dans l'intérêt, et l'avantage spirituel du pays, on pourra y instituer « des ordres religieux approuvés par l'Église, etc. »
1. Autrefois on adorait Dieu ; notre peu de poésie, aujourd'hui, se tourne tout vers la nature. Dans cette altération du sens de l'âme, on a cru voir un grand progrès, sur le XVIIe siècle surtout; nous possèderions mieux, dit-on, le vrai sens de la nature! !
1. Il y a eu dégradation successive dans les études. Au XIVe siècle, l'ordre divin, dont le Christianisme n'est que la formule, en formait la base. De la Théologie on passait à la morale , ou à ce qu'on appelle aujourd'hui la philosophie; de la morale on passait à la politique et à l'économique, qui n'étaient qu'un résultat des notions précédentes. Vers le XVIe siècle, au lieu de débuter par la Théologie, on s'est immédiatement placé à l'étude de la raison humaine. Toutes les lumières qui résultent de la science qui précède étaient déjà perdues ; les sciences prirent la place des idées primitives. Au XVIIIe siècle, au lieu de débuter par la morale, on s'est immédiatement placé à l'étude de la matière. Le point de vue de l'esprit humain fut abaissé encore ; la pensée fut bornée à l'ordre du visible, la pratique à la sphère des sens. Les hommes d'État ne peuvent avoir qu'une science limitée aux études qui les ont formés. II devait y avoir, dans le développement de leur intelligence, une dégradation analogue à celle que nous venons de remarquer...— Voir le livre de la Restauration française, liv. I, chap. XLI. Chez I. Hervé, 1851. (Note des Éditeurs.)
1. Porter envie à l'Aristocratie se concevrait d'une sottise qui désespère d'y parvenir; mais, porter envie à la vérité, à la vertu, c'est aussi trop montrer sa propre turpitude...
1. Que la raison se soit affaiblie, que le sens métaphysique ait baissé, je n'en veux que cette preuve commune : l'homme se montre attendri d'un service ou d'un don, il ne l'est pas de celui de son existence ! Il ne dit pas à tout instant à Dieu : Quel bien ! et comment vous remercier? Il ne voit point la chose qui le touche le plus, il la croit naturelle ou issue de lui-même, tant il est nul, et tant il est atteint du néant de l'orgueil... L'ingratitude lui ôte la raison !
A suivre... XXXVI. Espoir du monde dans les nouvelles générations.
Monique- Nombre de messages : 13758
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Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXVI.
Espoir du monde dans les nouvelles générations.
En voilà peu sur la grande question, mais bien assez pour réfléchir. Pour une CONCLUSION les prémisses sont suffisamment établies; les applications seraient nombreuses, on les peut déduire aisément... Que le bien nous devient nécessaire! Que le bon sens serait utile! Que d'esprits aveuglés par le point de vue humain , entraînés par le naturalisme, s'égarent au sein d'une éternelle nuit. Philosophie, économie, morale, littérature , que de canaux versent sur nous les eaux de la Révolution! Combien peu de législateurs travaillent à en fermer le cours ; combien peu d'historiens nous ramènent à l'expérience, et paraissent sentir le mérite incomparable du passé, la légitimité profonde de la Société chrétienne l La Foi, abandonnée, ne peut suffire en ce moment à la sauver ; il faut que la pensée entière vienne au secours du monde , et la pensée elle-même est brisée , est en proie, je le crains, à la dernière , à la fatale Confusion...
Nous assistons à un cataclysme intellectuel! les vérités les plus éclatantes semblent maintenant des erreurs : et des erreurs jusqu'ici inouïes semblent des vérités. Comment nier la confusion ! et comment la prendre pour l'ignorance : celle-ci se montre à l'origine, celle-là présage la fin. Si l'ignorance est ce qui précède la vérité, la confusion est ce qui lui succède, alors que les principes se décomposent, que l'homme avale cet affreux mélange où il a fait dissoudre la vérité dans ses passions! La Confusion est l'ignorance des derniers temps... Que pourra faire Dieu? on retourne ses dons contre lui ! S'il envoie un poète pour célébrer , sur un mode oublié des hommes , les merveilles et la Gloire de l'Infini, le poètes lui-même change les cordes de sa lyre, et tout à coup se mêlant à la foule , nous fait entendre le chant du doute et de l'orgueil. Et s'il envoie un homme tenant la verge du prophète pour nous montrer notre avenir , cet homme est lui-même enivré des fumées du mensonge qu'il venait d'immoler, et son âme, emportée par la danse fatale, fuit enlacée dans les bras de l'erreur.
Pour comble de disgrace, chez nous , la philosophie chargée d'éclairer les hautes pensées, les jette dans son incertitude et son impasse , les conduit hors du dogme, hors des chemins de la pratique (1) ! Certes , on ne peut regretter que ce siècle ait commencé à réagir par un effort vers le spiritualisme ; mais cet élan a surpris des hommes encore pleins de la vieille erreur. Ils donnèrent un premier coup d'aile , mais ils comptaient conserver leur moi. . . Où est notre trésor, là se tient notre cœur, et là s'arrêteront nos pas. Mais j'en juge à la marche des choses , à la force de la logique , qui est toute pour nous, si ces hommes arrivaient aujourd'hui dans l'arène, ils marcheraient à côté de nous, ils marcheraient à notre tête! Qu'ils nous permettent du moins de regretter les personnes , si nous fûmes contraints d'écarter les doctrines! Dans cet horrible accès, où la France vit tomber de sa tête ses plus belles couronnes, où elle a laissé tant de sang, livré tant d'âmes, perdu quelquefois jusqu'au sentiment d'elle-même , ce n'est point sans regret qu'elle a vu descendre de son front plusieurs rayons de son génie. Il serait beau , cependant , de se lever et de combattre pour la plus grande idée du monde Allez au fond de la politique , allez au fond de la science, ou au sommet de la pensée, la logique est pour nous...
Et vous qui êtes armés de la Foi, une place est réservée, parmi ses Confesseurs, à ceux qui combattront dans ce siècle suprême... Combattez tous , par la vertu, par la patience , la pauvreté et la richesse , la parole et la charité, chacun au point où Dieu vous met , car il a ses desseins sur chacun de vous ! Jeunes générations, venez, combattez la Révolution. Ne vous effrayez pas du nombre de ses branches ; au fond , elle n'a qu'une racine.. Un orgueil , une erreur ! ! Il faut que l'erreur tombe, s'il y a du courage! Venez armées contre elle du glaive de la vertu.
L'erreur n'a fait que s'accomplir. Elle commence au protestantisme , marche par divers corps de système , arrive au panthéisme , se réalise et se consomme dans le socialisme.
L'erreur ne saurait aller plus avant ; dans sa pensée elle a renversé la nature divine, elle a mis l'homme à la place de Dieu ; de là, elle a renversé la morale , la Politique , la Société. Et, cette fois, l'homme a dit dans son cœur : mais, c'est moi qui suis Dieu! Jamais l'erreur n'était montée si haut. Est-ce hardiesse ? est-ce génie? Hélas! c'est l'œuvre du maçon qui peu à peu élève un mur. Philosophies, histoires, droits naturels, théories sur l'origine de la Société, travail incessant des légistes, tout concourt à former la base longtemps inaperçue. L'homme prenait dans le silence la place qu'on ravissait à Dieu. Puis, tout à coup, des publicistes armés d'une éloquence tout humaine , des économistes avec l'appât grossier qu'on présente à la foule, servis par une nuée de romanciers, superposèrent l'un après l'autre tous les degrés de l'erreur. Une classe entière monte aujourd'hui cet escalier funeste, et le plus sot se trouve en haut... Parce qu'il voit l'abîme sous lui , il croit avoir dépassé les nues ; il croit entrer dans sa propre lumière, faire lui-même partie de l'éternelle vérité ; il répète la conclusion des derniers impies , le cri affreux poussé par Hégel , par Feuerbach , par Stirner, par Proudhon : mais, c'est moi qui suis Dieu!!. Venez, venez voir l'homme! il a pris sa chair pour de la vertu, son esprit pour la vérité même ; il a pris son néant pour Dieu (1).
Qui brisera l'œuvre insensée? Jeunes générations, venez, détournez les malheurs qui menacent l'impie et mettent en danger le monde ; écartez , renversez à son tour cette Révolution ! Suivez ces Chefs incomparables dans la doctrine, si grands parla sainteté, si nobles par la charité, par la bonté , par le génie , ces Évêques que Dieu, dans les profondeurs de ses trésors et de ses dons, semble avoir tenus en réserve pour sauver aujourd'hui la France !
1. Les hommes éclairés sentent, en ce moment, dans quel impasse nous laissent les idées du siècle : ils voient qu'on ne peut faire un pas de plus sans disparaître dans la Révolution. D'où nous viendra la vérité? et où trouver une Doctrine? Après tant de mécomptes, il y a autre chose à faire que de chercher des systèmes nouveaux ! Pour les hommes d'esprit, la cause de la Foi est gagnée. Mais, la foule ? et sans ramener la foule, comment tirer le monde d'une pareille situation ?
1. Voir : Comment les dogmes finissent; — La Religion naturelle, etc., etc. Fatalistes en histoire, rationalistes en philosophie, tous s'acharnent sur le grand édifice. Quand le monde périra, Dieu fera voir aux hommes que ce sont eux qui l'ont détruit...
A suivre... XXXVII. La Révolution détruit la Société humaine.
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXVII.
« J'ai peur du danger que court le monde. »
S. HILAIRE.
Qui me donnera une parole égale en moi à l'évidence? qui me donnera une force égale à mon désir? Dans le danger qui nous presse , trois faits sont à considérer : la Révolution détruit la Société humaine ; la Révolution vient d'une erreur sur l'homme ; et l'Église est la vérité... Comment celui qui possède à peine une voix dira-t-il ces trois choses aux hommes?
La Révolution détruit la Société humaine.
Si les hommes veulent conserver, je ne dis pas une La Révolution religion qui les a aimés, comme du reste les aima son divin Fondateur, mais une Civilisation qui abrite un sol encore tout émaillé de vertus, de mérites et d'héroïsmes privés, une Société qui leur est chère, qui fait leur bonheur et leur gloire, je les conjure de combattre la Révolution... Qu'ils combattent une invasion plus redoutable, pour eux plus dangereuse que l'Islamisme: invasion dans leur âme, dans leur propre génie, et qui étouffera l'homme au cœur même de l'homme. L'Islamisme ne l'attaquait qu'avec les sens, la Révolution l'attaque avec sa raison même, renverse sa conscience, y replace l'orgueil, y tue les deux éternels gardiens de l'homme , le droit et la vérité. Que sera l'homme, quand après avoir quitté les voies de la raison, perdu ses véritables droits, il se croira en possession de tous les droits, dans le sein de toute raison ? L'erreur dernière sera la pire, parce que l'homme ébranlé, avili, s'écriera : Voilà la vérité ! 0 mensonge, erreur dernière, erreur fatale à l'homme ! La Révolution lui dit : Viens à la liberté, à la richesse, au progrès, à la vie ; et elle le mène à la servitude, à la ruine, à la barbarie, à la mort. Mais elle a des secrets inconnus de la vérité.
Celle-ci le conduit à la liberté par l'obéissance , à la fortune par l'épargne , à la grandeur par la vertu ; celle-là le convie à la vertu par ses faiblesses, à la fortune par le luxe, au bonheur par ses appétits ; elle s'adresse à tous ses instincts ! Le Tentateur mettait cette thèse en un mot : EN DÉSOBÉISSANT TU SERAS COMME UN DIEU!.. Lâcheté de la Révolution ! il est aisé d'égorger l'homme avec le poignard du mensonge, difficile de l'en garantir. Voilà pourquoi l'Autorité fut commise à sa garde , et pourquoi elle lui est ravie, aussi, par la Révolution. Mais elle régnera! l'homme lui-même veut être esclave , « il veut jouir ! » Elle seule a connu l'homme, elle seule a trouvé sa nature. Il abandonnera ses droits , sa dignité, ses foyers, ses autels ; il veut jouir, la Révolution a parlé! Multitudes que ses erreurs ont plongées dans le paupérisme, villes qu'elle a ouvertes aux maux d'une industrie sans frein , foules abandonnées, et vous, nations que ne conduisent plus leurs Rois, accourez, et chantez les bienfaits et la gloire de la Révolution ! Vieille nature humaine , célébrée par Homère, reconnue des prophètes, sacrée par Jésus-Christ , amenée jusqu'à nous par l'histoire, tu emporteras le vieux droit, le vieil honneur, la vieille Europe avec toi Mensonge, erreur fatale à l'homme ! lui-même il court à la servitude, il croit entrer dans le cercle d'un Droit immense , au moment où disparaissent à la fois ses libertés les plus chères, pour lui, pour sa famille, ses biens, sa cité, et leurs droits acquis. Pas une erreur que la Révolution apporte, qui , par une voie perfide , ne descende d'une vérité et n'en prenne le nom! Sous le prétexte de libertés plus vastes, elle a ravi aux peuples leurs libertés publiques, à l'homme ses libertés privées, ses libertés véritables ; elle a aboli les provinces, les cités, les corporations, tous les intérêts collectifs ; elle a touché à l'antique constitution de la famille, de la propriété, restreint les droits de la vérité, dispersé les abris séculaires de la science, de la prière et de la charité, démoli l'homme sur tous les points ! Le mérite est la loi de l'homme : mais, sous le nom d'égalité dans un seul Dieu, elle brise la loi sacrée du mérite, et détruit de la sorte le droit jusque dans son germe. Sous le nom cher de liberté, elle viole en lui la conscience, elle assujettit l'homme jusque dans sa famille, dans l'instruction de ses enfants. Sous le nom vénéré de justice, elle est entrée dans sa maison, y partage elle-même ses biens à ses fils, ruine son autorité paternelle, dérobe l'avenir à son sang, et le grand citoyen n'est plus maître chez lui ! Enfin, sous le nom respecté de l'État, elle s'est substituée à l'homme, à la famille , à la commune, à la cité, à la Province ; elle se substituera à la charité , elle se substituera à la Foi (1) !
Que les nations cherchent, aujourd'hui, ce qu'elles ont construit avec le travail de l'histoire, et que l'homme cherche sa place au milieu des nations ! De son mérite, de son droit, de sa conscience, de sa pensée , de sa grandeur, de toute son autonomie, la Révolution ne lui laissera rien. C'est le droit que la Révolution a renversé, le droit dans l'homme, le droit dans les nations ! Par une logique fatale, et qui l'emporte elle-même, elle oppose le droit de corrompre les âmes au droit de les sanctifier, la prééminence d'un luxe qui nous ruine à celle du capital qui nous nourrit, la loi de la Nature à celle de Jésus-Christ, le socialisme à la Société ! elle oppose une liberté fausse à la liberté vraie , un droit faux aux droits réels , une richesse fausse à la richesse vraie, une morale fausse, une société fausse, à la morale vraie , à la Société véritable ! Elle veut une famille, une propriété, une commune, une justice, un pouvoir, une Foi, qui ne sont pas la véritable famille, la véritable commune, la véritable hérédité, la véritable justice, le véritable pouvoir, la véritable Foi. Progrès de la Révolution contre l'Église, progrès de la Révolution contre la Société, progrès vers une abolition de l'homme aux yeux de la droite raison, comme aux yeux de la politique, la Révolution n'est pas uniquement la destruction de la Société, mais la destruction même de l'homme; destruction si violente et si savante à la fois de son esprit, de son honneur, de ses droits, de ses mœurs, de ses vertus, de son passé, de ses nobles instincts, de ses puissances , de toutes ses énergies , de toutes ses libertés radicales, qu'elle a réveillé, chez les hommes, la pensée de ce Temps redoutable dont il est dit : qu'il sera abrégé en faveur des élus ! Qui combattra aujourd'hui la Révolution ? Qui la méprisera ainsi vêtue par le mensonge, les mains pleines de ses présents ? Qui ? et je l'espère encore, les Rois et les nations qu'elle a trompés, les cœurs dont elle soulève la colère, dont elle a provoqué le mépris, et auxquels elle apporte autant de pitié que d'effroi. Si les hommes ne veulent tomber dans une servitude incalculable, dans un état tel que jamais des êtres formés par le Christianisme n'ont connu le pareil, s'ils désirent sauver cette Civilisation sacrée, qui fait leur honneur et leur gloire, ah ! s'ils désirent sauver le monde, je les conjure de combattre la Révolution !
1. A l'homme, en lui ôtant les droits privés; à la famille, en lui ôtant dans sa liberté de tester, son éternelle constitution, et l'autorité paternelle ; elle se substituera à la charité, par l'assistance publique ; à la Foi , par une religion , par une impiété nationale. — Et qu'est-ce que la Révolution prétend substituer à la famille, à la propriété et à la Foi ? Lisez les Oeuvres de Fourier, et de Considerant...
A suivre... La Révolution vient d'une erreur sur l'homme.
Dernière édition par Monique le Sam 17 Déc 2016, 5:19 pm, édité 1 fois (Raison : Rajout d'une citation.)
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXVII. (suite)
La Révolution vient d'une erreur sur l'homme.
Mais pour que les Rois puissent défendre la Société, il faut qu'ils sachent où et comment ils peuvent la défendre ; les armées ne protègent qu'un jour. Ce sont les âmes qu'il faut armer, les citoyens qu'il faut mettre en mesure de s'unir à la Société et d'en consolider eux-mêmes le vivant édifice ! Que les Rois, donc , atteignent la Révolution dans son germe, la fausse idée sur l'homme laissée par le siècle dernier! Qu'ils replacent au centre des Universités cette lumière de la Théologie qui portera le jour sur les sommets de la philosophie, sur la base des lois, et dans la nature de l'homme. Que des éléments de cette science des sciences, ils fassent la condition des grades civils , des premiers emplois de l'État, restituant à la vérité son sceptre sur la pensée humaine (1), pendant que de justes lois protègeront la croissance de ces Ordres bénis qui multiplient, au sein d'un peuple malheureux, le doux pain de l'exemple, de l'instruction et de la charité. Vérité et charité, axe et ciment de l'édifice...
On ne déchargera la Politique, quoi de plus évident! on ne soulagera l'État, et l'on n'augmentera la liberté qu'en multipliant les hommes qui pensent comme le Souverain, et réalisent par eux-mêmes la Civilisation. Le catéchisme dans les masses, la Théologie dans les classes instruites : la guérison réelle ne viendra que de là. La pensée seule gouverne l'homme ! Qu'on s'attache à déployer surtout dans les jeunes intelligences l'idée de cause et l'idée de la Grâce : avec l'idée de loi et celle de liberté en l'homme, ce sont les plus importantes idées de l'âme, et celles malheureusement que les esprits ont laissé perdre. Il faut maintenir la raison dans toute sa force pour en obtenir plus aisément la Foi. Car les sciences ont laissé tomber la raison , et depuis quarante-ans la philosophie est impuissante à la relever. Qu'un peu de Théologie et, pour un temps, s'il le faut, un peu moins de mathématiques dans l'enseignement supérieur, nous seraient d'un puissant secours.
C'est l'homme d'abord qui entre dans la Société ! c'est d'après l'homme , l'homme réel, et tel qu'il est dans le fait, que la Société s'édifie : la notion doit en être toujours présente. Et dès l'instant que sur ce point capital, les esprits ne sont plus dirigés par la Croyance, il est urgent qu'ils le soient par la connaissance ; il faut croire ou il faut savoir ! Sinon la Politique vient opérer le fait, l'État se mettre à notre place, et les hommes perdent la liberté. Ils la perdent, parce qu'ils n'ont plus en eux la lumière, la source des déterminations. Lorsqu'ils ne marchent pas d'eux-mêmes au but, la loi, bon gré mal gré, les y amène. Ou les lumières de la Théologie, ou pas de liberté chez les hommes — Quoi! les laïques feront de la Théologie? — Ne font-ils pas à tout instant de la Politique, à tout instant de la morale et de la Religion? On ne l'a point remarqué : dès qu'on franchit l'enceinte de la Théologie, qu'on sort de ses affirmations sur l'homme , on passe dans le Socialisme. Il n'existe pas de milieu : né bon, l'homme a droit évidemment à une égalité absolue, et à tout ce que l'utopie demande ! Naturellement l'homme n'ira pas croire que sa nature pervertie préfère le mal au bien ; que, de là résulte la nécessité de lois morales préventives, de lois civiles restrictives, de lois pénales répressives, la nécessité de confier aux meilleurs ces moyens qui protègent les autres, enfin l'État surveillant tous les hommes, l'intervention de Dieu dans le Pouvoir , notre état social en un mot! Naturellement, l'homme se croira partout le maître ; il voudra posséder tout ce qu'il voit, et le réclamera! c'est la Révolution...
Le même danger existera tant que subsistera illusion. Ou la Théologie chez les hommes, ou le socialisme : il n'y a rien entre deux. Thèse naïve de l'ignorance, thèse éternelle de notre orgueil toujours vivant, le socialisme exige qu'on lui oppose sans cesse la thèse de la Théologie, comme sans cesse on oppose une digue au fleuve qui ne cessera de couler... Ce n'est pas tout; comme en sortant du point de vue pratique, où la Théologie avait placé la civilisation en Europe, on entre dans le point de vue théorique, dans le point de vue socialiste d'une égalité absolue; et comme, placé en dehors de notre nature réelle, le socialisme est impossible, on aboutit au despotisme, ainsi qu'y ont abouti sur la terre la plupart des nations (1). Et là sera le résultat de la Révolution...
Le despotisme règne partout où le christianisme n'éclaire pas l'esprit humain. Dès que la conscience a perdu sa règle, le pouvoir se met à sa place. Hors de la répression par soi-même, de la répression intérieure, vient la répression politique. Ou la liberté morale, c'est-à-dire le catholicisme, ou la contrainte politique ; ou la Théologie ou le despotisme ! aucun homme d'État ne pourra sortir du dilemme, d'ailleurs l'expérience est là. La Société étant construite au point de vue de la Théologie, c'est-à-dire de l'homme réel , ou tel que l'a laissé la Chute , quand cette Société succombe parce que ce point de vue s'éloigne, vous sentez ce qui reste à faire ! Reprenons donc tout le problème , et dans les termes où il fut posé au début : — La Société moderne repose sur la Théologie ; elle en a reçu son idée de Dieu , son idée du Pouvoir, son idée de la justice, son idée du droit, son idée du bien et du mal, son idée de l'homme, de son but, de sa loi, de sa liberté, de sa responsabilité, de son inviolabilité, de son obéissance sur la terre. D'une pareille Société retirer la Théologie, c'est comme si l'on retirait l'affinité d'un corps, il retombe en dissolution. Les théories ne conduisent pas loin. Ou la Société moderne succombera, soutenue encore quelques jours par un douloureux despotisme, ou on la rétablira sur la vérité : la vérité conforme au fait et conforme à notre nature , conforme à l'homme et à l'histoire, conforme au droit, conforme au bien, à notre liberté, à notre dignité, et, pour preuve dernière qu'elle est la vérité, déposée au milieu de ce monde, dans cette miraculeuse Église, surnaturellement établie, et surnaturellement conservée... Ah! que demandons-nous de plus à la Vérité ?
1. On oublie trop que. jusqu'au milieu du XVIIIe siècle, tous les hommes instruits possédaient leur Théologie.
1. Si le christianisme disparaissait, les écrivains se mettraient tous à lui rendre justice : il ne serait plus temps... L'orgueil, sous le nom de Révolution, amène en ce moment sur le monde moderne le même état de choses qui asservit, puis détruisit le monde ancien.
A suivre... Et l'Église est la vérité...
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
POLITIQUE RÉELLE.
XXXVII. (suite et fin)
Et l'Église est la vérité...L'ÉGLISE , c'est la vérité. Qu'est-ce que le monde sans la vérité? Voilà six mille ans qu'il existe, et l'on cherche la vérité : et cela s'appelle philosophie? L'Église, dis-je, c'est la vérité , et la vérité, la connaissance de l'homme , sa position au sein de l'être , ses rapports avec celui qui le crée, la Société, ses fins, l'explication sublime de la vie ! Pourquoi créé, quel est le but? la Foi est l'axe de tout le système. Les autres questions, la pensée, la morale, le droit, la Politique, fixent le leur sur celui-là. L'Église, c'est la vérité Les grands esprits voient l'unité ; la Création est une , c'est l'ensemble qu'il faut posséder. Hors de là , le bien , ce monde, Dieu, la justice, tout disparaît de la pensée. On peut donner la preuve d'une intelligence vive, d'une imagination enchantée, d'un inimitable talent; mais on n'est qu'une cymbale retentissante si l'on n'a pas l'unité. D'où viendraient les hommes pratiques? C'est le tout qui subsiste , c'est le tout qu'il faut embrasser. L'Église, c'est la vérité Et parce qu'ils l'ont perdue, leur esprit qui croyait contenir la lumière, est tombé dans une sorte d'enfance ; ils oublient les idées éternelles pour le brin d'herbe ou de sable qui se trouve à leurs pieds. La science a détruit la pensée. L'esprit de l'homme ne résistera point à une analyse qui le dissout. Déjà cette science, cette poussière de la pensée, s'évanouit dans le panthéisme, où disparurent et les sciences et la sagesse de l'Orient ! Les catholiques sont les seuls qui aient sauvé la raison du naufrage. Les catholiques disent aux hommes : Où serait la vérité depuis six mille ans que le monde subsiste ? Et personne n'a pu leur répondre.. L'Église, c'est la vérité….
On ne découvrira point les choses du côté opposé à Dieu. Le bien nous dit sur quel point est la lumière. Mais l'homme ne réfléchit pas que l'Infini à tout instant lui donne l'être , comment songerait-il qu'il en reçoit la vérité? Comme l'enfant, l'humanité ne sait pas qui la tient. De toutes parts on lui tend les bras : ici, la famille, l'éducation, les exemples, la charité; ici, l'Autorité, la protection, la justice, la paix; et là, la vérité. L'Église , c'est la vérité….
Et c'est en rapportant la vérité parmi les hommes , en y rétablissant la conscience , la liberté et la raison , toutes trois cruellement affaiblies par la chute; en leur restituant la Grâce et la charité, ces richesses surnaturelles qui viennent non pas détruire la nature mais l'accomplir, que l'Église, comme il devait arriver, a fondé des Civilisations vraies , basées sur le développement réel de la nature humaine. C'est la raison métaphysique de la durée et de la résistance de la Civilisation parmi nous. Et comme les nations chrétiennes sont nées successivement de l'Église , elles s'en iront à mesure qu'elles s'en sépareront. Ainsi peut successivement périr toute la chrétienté... L'Église vivra jusqu'à la fin. Dans l'agonie, nos membres, les uns après les autres, se paralysent, quand le cœur agit encore. Tout est mort dès que le cœur cesse de battre.... Et l'homme disparaîtra de la terre avec la vérité….
Mais vous , ne craignez-vous pas Dieu? Hier vous désiriez que la loi fût athée , aujourd'hui vous voulez que l'Église succombe. Si vous frappez l'Église, Dieu frappera le monde ; il enveloppera les hommes dans ses châtiments. Si vous frappez l'Église, craignez pour votre Civilisation ! Craignons pour nous, pour notre propre génération, si nous chassons de sa demeure Celle qui nous a élevés. Si l'Europe veut étouffer de sa main Celle qui lui a donné le jour, son infamie dépassera celle des Juifs, et ce peuple cette fois révolté, se lèvera pour Dieu. Craignons de le payer de notre âme, de faire éclater sur nous la voix du dernier jugement, de précipiter l'heure d'un monde qui ne subsiste que pour les Saints!....
Les hommes ne sentent-ils pas que, lorsqu'ils auront immolé son Église, Dieu ne les épargnera plus? Ils ont crucifié son Fils, bien que par son amour pour eux, par son cœur sans orgueil, il se soit montré Dieu. Et cependant ils ont pu dire , malgré l'avertissement des prophètes , qu'ils ne l'avaient pas connu. Mais l'Église, qui les a inondés de ses biens, diront-ils qu'ils ne l'ont point connue? Que peuvent-ils lui comparer sur la terre?. Le Verbe crucifié pardonne aux hommes, parce qu'ils ne savent ce qu' ils font: mais pour l'Église , une voix ne vous crie-t-elle pas qu'il ne leur pardonnera point , PARCE QU'ILS SAVENT CE QU'ILS FONT?....
Le Monde, « qui veut dominer et jouir » porte une haine d'orgueil à Celle qui lui demande de se soumettre et de souffrir. Voilà pourquoi l'Église est un objet d'horreur au monde qui triomphe. Mais le monde sera détruit lorsqu'il voudra porter le dernier coup à l'Église. Le monde périra quand sa haine fatale ne pourra plus la tolérer, parce que l'Église ne pourra plus le sauver. Le jour où les Rois et les peuples, les sages comme les insensés, où le monde entier, dont les attaques ont été jusqu'ici partielles, se lèvera pour consommer cette mort odieuse . ce jour là sera le dernier... L'homme ne peut subsister sans l'Église : l'Église, c'est la vérité.
« Seigneur du Ciel et de la terre, considérez notre humiliation ! montrez que vous n'abandonnez pas ceux qui espèrent en vous, mais que vous humiliez ceux qui se glorifient dans leurs forces. » N'entrez pas en jugement avec ce peuple , on l'a jeté depuis trop longtemps dans l'erreur, et il n'y a que votre bras qui le puisse sauver. A nous la confusion, mais à vous la miséricorde! Faites, Seigneur, que la terre soit de nouveau remplie par votre puissance, et tous comprendront votre gloire.
FIN
Monique- Nombre de messages : 13758
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
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En effet Arthur. J'allais dire la même chose: Merci Monique.
En effet Arthur. J'allais dire la même chose: Merci Monique.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
L'INFAILLIBILITÉ - Par Antoine Blanc de Saint Bonnet - 1861 :
https://archive.org/stream/linfaillibilit00saingoog?ref=ol#page/n11/mode/2up
Roger Boivin- Nombre de messages : 13221
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: L'INFAILLIBILITÉ
LA VRAIE ET LA FAUSSE INFAILLIBILITÉ DES PAPES - 1875 - PAR Mgr Joseph FESSLER :
http://liberius.net/livres/La_vraie_et_la_fausse_infaillibilite_des_papes_000000207.pdf
En anglais : https://archive.org/stream/TheTrueAndFalse?ref=ol#page/n3/mode/2up
Roger Boivin- Nombre de messages : 13221
Date d'inscription : 15/02/2009
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