Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ VIII. — MANIÈRE DE PRIER: QUALITÉS DE LA PRIÈRE.
(suite)
Les hypocrites ne prient point non plus du fond de leur cœur, et Jésus-Christ nous met en garde contre leurs détestables habitudes. 4 « Lorsque vous priez, nous dit-il, ne soyez point comme les hypocrites, qui aiment à prier debout dans les synagogues et aux coins des places publiques, enfin d’être vus des hommes. En vérité, Je vous le dis ; ils ont reçu leur récompense. Pour vous, quand vous priez, entrez dans votre chambre, et, la porte étant fermée, priez votre Père en secret, et votre Père qui voit dans le secret vous accordera votre demande. » Le mot chambre, que Notre-Seigneur emploie dans ce passage, peut très bien s’entendre du cœur de l’homme. Et il ne suffit pas d’entrer dans son cœur, pour prier, mais de plus il faut le fermer, de peur qu’il ne s’y glisse et qu’il n’y pénètre quelque chose du dehors, qui pourrait altérer la pureté de la Prière. Si nous sommes fidèles à cette recommandation de son divin Fils, le Père céleste qui connaît parfaitement notre cœur et ses plus secrètes pensées se plaît à exaucer nos supplications.
La Prière exige également la persévérance. C’est par là surtout qu’elle est efficace. Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même a voulu nous le montrer par l’exemple de ce juge qui, ne craignant ni Dieu, ni les hommes , 1 se laissa vaincre pourtant par la persévérance et les instances de la veuve, et lui accorda sa requête. Prions donc avec assiduité. N’imitons pas ceux qui après avoir prié une ou deux fois, sans être exaucés, se fatiguent de la Prière. Un devoir que l’autorité de Notre-Seigneur et des Apôtres nous recommande si expressément ne doit point connaître la fatigue et la lassitude. Si parfois nous sentons quelque faiblesse dans notre volonté, adressons-nous à Dieu, prions-Le de nous donner la force de persévérer.
Le Fils de Dieu veut aussi que ce soit en son nom que notre Prière arrive à Dieu son Père. C’est uniquement par le mérite et le crédit d’un tel Médiateur que nous pouvons être exaucés. Ecoutons ce qu’Il dit Lui-même dans Saint Jean : 2 « En vérité, en vérité, Je vous le dis ; si vous demandez quelque chose à mon Père en mon nom, Il vous le donnera. Jusqu’ici vous n’avez rien demandé en mon nom, demandez et vous recevrez, afin que votre joie soit parfaite . » Et encore: « Tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, Je le ferai. »
Imitons le zèle et la ferveur des Saints dans la Prière. Joignons l’action de grâces à la demande, à l’exemple des Apôtres, qui conservèrent fidèlement cette pratique, comme nous le voyons dans Saint Paul 3.
Ajoutons à la Prière le Jeûne et l’Aumône. Le Jeûne va très bien avec la prière. Lorsque le corps est appesanti par la nourriture, l’esprit n’est plus libre ; il ne peut ni contempler Dieu, ni se plonger dans l’oraison. L’Aumône aussi s’allie admirablement avec la Prière. Car comment oser se dire animé d’une vraie Charité, quand on a les moyens de faire du bien aux nécessiteux, et que l’on néglige de secourir son prochain et son frère ? Ou comment celui qui manque de Charité osera-t-il réclamer l’assistance divine ? à moins qu’en demandant pardon de sa faute, il ne demande aussi très humblement à Dieu de lui accorder la Charité.
Voilà donc le triple remède, que Dieu dans sa Clémence a préparé pour sauver les hommes. Nos péchés sont toujours, ou des offenses envers Lui, ou des torts envers le prochain, ou des attentats contre nous-mêmes. Et bien ! Il nous a donné la Prière pour L’apaiser, l’Aumône pour réparer nos torts envers les autres, et le Jeûne pour effacer les souillures de nos fautes personnelles. On peut dire, il est vrai, que ces trois remèdes peuvent servir à tous les péchés, quels qu’ils soient. Mais il faut reconnaître que chacun d’eux s’applique plus spécialement à l’une des trois espèces de fautes que nous venons d’indiquer.
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(4) Matth., 6, 5. — (1) Joan., 16, 23. — (2) Joan., 14, 14. — (3) Eph., 1, 16, etc.
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Louis- Admin
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
Chapitre trente-neuvième
De l'Oraison Dominicale
Cette formule de prière chrétienne nous vient de Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même. Et elle est composée de telle sorte qu’avant de nous donner à exprimer nos désirs et nos demandes, elle nous oblige à réciter une sorte de Préface, qui a pour but d’augmenter encore notre confiance envers Dieu et notre piété, au moment où nous allons Lui parler dans la Prière. C’est donc un véritable devoir pour le Pasteur d’expliquer chacun des mots de cette Préface, avec toute la clarté et toute la précision possible, afin que les Fidèles se portent à la Prière avec joie et empressement, sachant bien qu’ils vont traiter avec un Dieu, qui est aussi un Père.
Cette Préface est très courte, si nous ne faisons attention qu’au nombre des paroles qu’elle emploie. Mais si nous allons au fond des choses qu’elle exprime, elle est extrêmement importante, et toute pleine de mystères.§ I. — NOTRE PÈRE.
Le premier mot que nous prononçons dans cette prière, par l’ordre et l’institution même de Dieu, c’est celui-ci: Pater, Père.
Notre Sauveur aurait pu commencer cette divine Oraison par une expression qui aurait eu plus de majesté, par exemple celle de Créateur et de Seigneur. Il ne l’a pas voulu, parce que de telles expressions pouvaient nous inspirer des sentiments de crainte. Il a choisi un terme qui inspire nécessairement la confiance et l’amour à ceux qui prient, et qui demandent quelque chose à Dieu. Qu’y a-t-il en effet de plus doux que ce nom de Père, qui rappelle tout ensemble l’indulgence et l’amour ? Mais comment ce nom de Père convient-il à Dieu ? C’est ce qu’il est facile d’apprendre aux Fidèles, en leur parlant des mystères de la Création, de la Providence et de la Rédemption.
Dieu a créé l’homme à son image, et II n’a point accordé cette faveur aux autres êtres animés. C’est donc avec raison que pour ce privilège unique dont il a honoré l’humanité la Sainte Eglise l’appelle le Père de tous, aussi bien des Fidèles que des infidèles.
Le gouvernement de ce monde nous fournit un argument semblable. En veillant aux intérêts des hommes, sans jamais les perdre de vue, Dieu par ces soins touchants et cette Providence assidue, ne nous donne-t-Il pas la preuve d’un Amour vraiment paternel ?
Mais pour mettre plus en lumière cette vigilance paternelle de Dieu sur tous les hommes, et pour la rendre plus sensible, il nous semble qu’il y a lieu de dire ici quelque chose des Anges Gardiens qui sont donnés à chacun de nous.
C’est qu’en effet la Providence divine a confié à des Anges la garde du genre humain. Elle les a chargés de protéger sans cesse tous les hommes pour les préserver des dangers qui pourraient les menacer. De même que les parents donnent des gardes et des défenseurs à leurs enfants, lorsqu’ils les voient entreprendre quelque voyage difficile et périlleux, ainsi dans ce voyage que nous faisons tous vers la céleste Patrie, Dieu notre Père nous a confiés à la garde d’un Ange, afin que son secours et sa vigilance nous fissent éviter les embûches secrètement préparées par nos ennemis, repousser les plus terribles attaques dirigées contre nous, marcher constamment dans le droit chemin, et empêcher que quelque piège tendu par notre perfide adversaire ne nous fît sortir de la voie qui mène au ciel.
Et ce qui prouve combien est utile aux hommes cette attention…
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ I. — NOTRE PÈRE.
(suite)
Et ce qui prouve combien est utile aux hommes cette attention, cette Providence spéciale de Dieu, dont l’exercice et l’application sont confiés aux Anges — lesquels sont de véritables intermédiaires entre Dieu et nous — c’est cette foule d’exemples que nos Saints Livres nous rapportent, et qui nous montrent clairement que la Bonté divine a permis souvent aux Anges d’opérer des prodiges sous les yeux des hommes. Or, pourquoi ces mêmes exemples ne nous convaincraient-ils pas que nos Anges Gardiens font tous les jours, pour notre utilité et pour notre salut, une multitude de choses aussi extraordinaires, bien que nous ne les voyions pas.
Ainsi l’Ange Raphaël, que Dieu donna pour compagnon et pour guide à Tobie dans son voyage, le conduisit et le ramena sans qu’il lui fût arrivé aucun mal. C’est lui qui l’empêcha d’être dévoré par un poisson énorme, et lui fit connaître les vertus secrètes du foie, du fiel et du cœur de ce monstre. C’est lui qui chassa le démon, enchaîna sa puissance et préserva Tobie de ses atteintes. C’est lui qui apprit à ce jeune homme les droits légitimes et l’usage du Mariage. C’est lui enfin qui rendit au père de Tobie la vue dont il avait été privé.
Il en est de même de cet autre Ange qui délivra le prince des Apôtres. L’histoire de ce miracle est un thème admirable, pour convaincre les pieux Fidèles des effets extraordinaires de la vigilance et de la protection de nos Anges Gardiens. Les Pasteurs ne manqueront pas de montrer l’Ange de Saint Pierre illuminant les ténèbres de sa prison, touchant son côté et le secouant en quelque sorte pour l’éveiller, puis dénouant ses chaînes, brisant ses liens, lui commandant de se lever, de prendre ses chaussures et ses vêtements et de le suivre, puis enfin le conduisant et le faisant passer sans obstacle au milieu des gardes, lui ouvrant les portes de la prison, et ne le quittant qu’après l’avoir fait sortir, et l’avoir mis en sûreté.
Nos Saints Livres, comme nous l’avons déjà remarqué, sont pleins d’exemples semblables et bien propres à nous faire comprendre la grandeur des bienfaits que nous recevons de Dieu par le ministère des Anges. Et ce n’est pas seulement pour quelque affaire particulière et déterminée que Dieu nous confie à eux, ou qu’Il les députe vers nous. non, dès notre naissance, Il les prépose à notre garde, et les établit individuellement pour veiller au salut de chacun de nous.
Cette doctrine clairement expliquée aura pour conséquence d’exciter le courage des auditeurs et de les amener à reconnaître et à vénérer avec un plus grand respect les soins paternels et la Providence de Dieu à leur égard.
Ici le Pasteur mettra en pleine lumière et exaltera de toutes ses forces l’immense Bonté de Dieu envers les hommes….
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ I. — NOTRE PÈRE.(suite)
Ici le Pasteur mettra en pleine lumière et exaltera de toutes ses forces l’immense Bonté de Dieu envers les hommes. II dira que depuis le péché de notre premier père jusqu’à ce jour, Il n’a point cessé d’être outragé par toutes sortes de désordres et de crimes, et que néanmoins Il nous conserve tout son amour, et ne dépose jamais cette sollicitude si touchante qu’Il a pour nous. Penser qu’Il nous oublie serait une folie et en même temps le plus cruel outrage. Dieu s’irrite contre Israël, parce que ce peuple L’avait blasphémé, en s’imaginant que le secours du ciel lui avait été retiré. Ecoutons ce que nous dit l’Exode à ce sujet: 1 « ils ont tenté le Seigneur en disant: Dieu est-Il avec nous, ou n’y est-Il pas ? » et dans Ezéchiel la colère divine s’enflamme de nouveau contre ce même peuple, parce qu’il avait osé dire: 2 « Le Seigneur ne nous voit point, le Seigneur nous a abandonnés ; le Seigneur a abandonné cette terre. »
L’autorité de ces exemples suffit pour détourner les Fidèles de cette pensée abominable, que Dieu puisse jamais oublier les hommes. Dans le Prophète Isaïe nous lisons les plaintes insensées du peuple d’Israël contre Dieu, et la réponse pleine de bonté que Dieu voulait bien y faire par une comparaison touchante. 1 « Sion dit: Le Seigneur m’a délaissée ; mon Dieu m’a oubliée. Mais, répond le Seigneur, une mère peut-elle oublier son enfant, et n’être pas émue par le fils de ses entrailles ? et cependant quand elle l’oublierait, Moi Je ne t’oublierai jamais. Je te porte gravée dans mes mains. »
Les textes que nous venons de citer établissent très clairement que Dieu n’oublie jamais les hommes, et que, en tout temps, Il leur prodigue les témoignages de sa tendresse paternelle.
Mais pour convaincre davantage encore le peuple fidèle de cette double vérité, les Pasteurs apporteront en preuve l’exemple si connu de nos premiers parents: ils avaient méprisé et violé les ordres formel de Dieu; ils avaient été sévèrement blâmés et condamnés, et cette sentence effrayante était tombée sur eux: 2 « La terre est maudite dans votre travail ; vous n’en tirerez chaque jour votre nourriture qu’avec un grand labeur. Elle ne produira pour vous que des épines et des chardons ; et vous vous nourrirez de l’herbe de la terre. » Ils avaient été chassés du paradis terrestre ; et pour leur ôter tout espoir d’y jamais rentrer, Dieu avait placé à l’entrée du jardin de délices un Chérubin de feu, tenant à la main un glaive flamboyant qu’il brandissait toujours ; enfin Dieu, pour se venger contre eux de leur outrage, les avait accablés de tous les maux intérieurs et extérieurs. A la vue de ces terribles châtiments, ne dirait-on pas que c’en est fait de l’homme ? ne croirait-on pas qu’il est pour toujours dénué de tout secours divin, et réservé à toutes les misères ? et cependant, au milieu de tant et de si cruelles preuves de la colère et de la vengeance divines, on vit paraître comme une lueur de la Bonté de Dieu à leur égard. « Le Seigneur Dieu, nous dit la Genèse1 , fit à Adam et à sa femme des tuniques de peau, et Il les en revêtit. » Marque évidente, entre tant d’autres, que Dieu n’abandonnera jamais les hommes.note de Louis :Ce qui est ci-Haut n'est qu'un seul paragraphe, je l'ai aéré pour une lecture plus facile. Bien à vous.
Cette pensée, si belle et si vraie, que jamais l’iniquité humaine n’épuisera la Bonté de Dieu, David l’exprimait aussi en ces termes: 2 « La colère de Dieu enchaînera-t-elle ses miséricordes ? » Habacuc l’énonçait également quand il disait en s’adressant à Dieu: 3 « Même au temps de votre colère, Vous Vous souviendrez de votre miséricorde » et Michée la rendait ainsi: 4 « Qui est semblable à Vous, ô Dieu, qui ôtez l’iniquité, et qui oubliez les péchés du reste de votre héritage ? Le Seigneur n’enverra plus désormais sa fureur, parce qu’Il veut la miséricorde. »
Oui, c’est bien ainsi que les choses se passent…
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(1) Exod. 17, 7. — (2) Ezech., 8, 12.— (1) Isa. 49, 14. — (2) Genes., 3, 17. — (1) Genes., 3, 21 — (2) Psal., 76, 10 — (3) Hab., 3, 2. — (4) Mich., 7, 18.
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Louis- Admin
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ I. — NOTRE PÈRE.(suite)
Oui, c’est bien ainsi que les choses se passent. C’est au moment où nous nous croyons perdus et absolument délaissés de Dieu, c’est alors qu’Il nous cherche avec une Bonté infinie, et qu’Il prend soin de nous. Il suspend dans sa colère le glaive de sa justice, et II ne cesse de répandre sur nous les inépuisables trésors de sa miséricorde.
La Création d’une part, et la Providence de l’autre, sont donc très propres à faire ressortir les dispositions particulières de Dieu à aimer et à protéger le genre humain. Mais sous ce rapport, l’œuvre de notre Rédemption l’emporte tellement sur les deux autres, que c’est par ce troisième bienfait que notre Dieu infiniment bon, et qui est en même temps notre Père, met vraiment le comble à tous ses bienfaits.
Le Pasteur enseignera donc aux Fidèles, qui sont ses enfants spirituels, et il leur rappellera sans cesse cet effet incomparable de la Charité divine à notre égard, afin qu’ils comprennent bien que la Rédemption a fait d’eux, d’une manière merveilleuse, de vrais enfants de Dieu. « Car le Verbe, dit Saint Jean 1, leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, et ils sont nés de Dieu. » C’est pourquoi le Baptême, qui est le premier gage et le premier effet de notre Rédemption, est appelé le Sacrement de la régénération ; car c’est par lui que nous naissons enfants de Dieu. « Ce qui est né de l’esprit, est esprit, dit Notre-Seigneur Lui-même 2. » Et encore: « Il faut que vous receviez une nouvelle naissance. » Et Saint Pierre dit aussi: 3 « Vous êtes nés de nouveau, non point d’une semence corruptible, mais d’une semence incorruptible, par la parole du Dieu vivant. »
C’est par le mérite de cette Rédemption que nous avons reçu le Saint-Esprit et que nous avons été jugés dignes de la Grâce de Dieu. C’est ce don aussi qui nous a valu l’être adoptés pour ses enfants, ainsi que l’Apôtre Saint Paul l’écrit aux Romains. « Vous n’avez point reçu, dit-il 4, l’esprit de servitude pour vous conduire encore par la crainte, mais vous avez reçu l’esprit d’adoption des enfants par lequel nous crions: Père, Père ! » et Saint Jean explique la force et l’efficacité de cette adoption, en disant 5 : « Considérez quel amour le Père a eu pour nous, de vouloir que nous soyons appelés, et que nous soyons vraiment enfants de Dieu. »
Ces explications données, il ne faut pas manquer de représenter aux Fidèles ce qu’ils doivent en retour à Dieu, le plus aimant des Pères, c’est-à-dire leur faire sentir combien ils ont à témoigner d’amour, de piété, d’obéissance, et de respect à Celui qui les a créés, qui les gouverne et qui les a rachetés, et avec quel espoir et quelle confiance ils doivent L’invoquer. Mais pour éclairer les ignorants. Et pour redresser les idées fausses de ceux qui pourraient considérer la prospérité et le cours d’une vie heureuse comme l’unique preuve que Dieu nous continue son amour, et l’adversité et les malheurs qui nous éprouvent, comme un signe qu’Il nous a complètement retiré son attachement et qu’Il a contre nous des dispositions hostiles, il sera nécessaire de démontrer que lorsque la main du Seigneur nous frappe, elle ne frappe jamais en ennemie ; qu’elle guérit en frappant, et qu’une plaie qui vient de Dieu est un véritable remède.
C’est qu’en effet…
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(1) Joan., 1, 12. — (2) Joan., 3, 6. — (3) 1 Pet., 1, 23. — (4) Rom., 8, 15. — (5) 1 Joan., 3, 1.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ I. — NOTRE PÈRE.(suite)
C’est qu’en effet, Il châtie ceux qui pèchent, afin que la punition les rende meilleurs, et que la peine présente les délivre de la peine éternelle. « Il visite, il est vrai, nos iniquités la verge à la main, et Il frappe nos péchés, mais Il ne nous retire point sa Miséricorde 1 ».
II faut donc recommander aux Fidèles de voir dans ces sortes de châtiments l’effet de la paternelle Bonté de Dieu, d’avoir par conséquent, et dans le cœur et sur les lèvres, ces paroles de Job, le plus patient des hommes 2: « Il blesse, et Il guérit ; Il frappe, et sa maint applique le remède », de se redire souvent ce que Jérémie écrivait sous le nom des enfants d’Israël 3 : « Vous m’avez frappé, et je me suis instruit, comme un jeune taureau indompté ; convertissez-moi, et je serai converti, parce que Vous êtes le Seigneur mon Dieu », de se proposer enfin l’exemple de Tobie qui, étant devenu aveugle, reconnut la main paternelle de Dieu dans ce malheur, et s’écria1 : « Je Vous bénis, Seigneur, Dieu d’Israël, parce que Vous m’avez châtié, et que Vous m’avez sauvé. »
Enfin les Fidèles doivent bien se garder de croire que, quels que soient leurs revers ou leurs malheurs, Dieu puisse les ignorer. Certes, Il a dit Lui-même 2: « Il ne tombera pas un cheveu de votre tête », à mon insu. Qu’ils se consolent donc bien plutôt par cet oracle divin que nous lisons dans l’Apocalypse 3 : « Ceux que J’aime, Je les reprends et Je les châtie. » Qu’ils se tiennent en paix, en relisant cette exhortation de Saint Paul aux hébreux 4 : « Mon fils, ne négligez point la correction du Seigneur, et ne vous laissez point abattre lorsqu’Il vous reprend. Car c’est celui qu’Il aime qu’Il châtie, et il frappe à coups de verge tous ceux qu’il reçoit parmi ses enfants. Si vous n’êtes point châtiés, vous êtes donc des enfants étrangers à Dieu et qu’Il n’a pas adoptés. Nous avons eu du respect pour les pères de nos corps, lorsqu’ils nous corrigeaient, combien ne devons-nous pas avoir plus de soumission pour Celui qui est le Père de nos âmes, afin d’avoir la vie ? »
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(1) Psal., 88, 34. — (2) Job., 5, 18. — (3) Jér., 31, 18. — (1) Tob., 11, 17. — (2) Luc., 21, 18. — (3) Ap., 3, 19. — (4) Hebr., 12, 5.
A suivre : § II. — POURQUOI CHACUN DIT-IL NOTRE PÈRE ?
Dernière édition par Louis le Lun 06 Juil 2015, 6:48 pm, édité 1 fois (Raison : La dernière citation (S. Paul aux hébreux) avait été omise.)
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ II. — POURQUOI CHACUN DIT-IL NOTRE PÈRE ?
Lorsque nous prions Dieu le Père, chacun en notre particulier, nous L’appelons néanmoins notre Père, nous sommes donc bien avertis par là que le privilège et les droits de l’adoption divine font que tous les Fidèles sont frères, et qu’ils doivent s’aimer en frères. « Vous êtes tous frères, dit Jésus-Christ 1, et vous n’avez qu’un seul Père dans les cieux. » C’est pourquoi, dans leurs Epîtres, les Apôtres donnent aux Fidèles le nom de frères.
Une autre conséquence nécessaire de cette adoption, c’est que non seulement tous les Fidèles sont unis entre eux par les liens de la fraternité, mais que le Fils de Dieu étant homme, ils sont encore appelés des frères, et le sont en effet. Dans son épître aux Hébreux, l’Apôtre Saint Paul, parlant de Notre-Seigneur Jésus-Christ, écrit ces paroles remarquables 2 : « Il n’a point rougi d’appeler les hommes ses frères, en disant: J’annoncerai votre nom à mes frères. » Et bien longtemps auparavant David avait mis ces mêmes paroles dans sa bouche 3. Mais du reste, ne savons-nous pas en quels termes Jésus-Christ Lui-même s’adresse aux saintes Femmes 4: « Allez, annoncez à mes frères de se rendre en Galilée ; c’est là qu’ils Me verront. »
Or, chacun sait que Notre-Seigneur prononça ces paroles après sa Résurrection, lorsque déjà il était devenu immortel. Ainsi personne n’aurait le droit de croire que les liens de fraternité qui nous unissaient à Lui avaient été brisés par sa Résurrection et par son Ascension. Et non seulement ces liens n’ont pas été rompus, non seulement notre union avec Lui et la Charité fraternelle qu’Il a pour nous n’ont pas été détruites, mais nous savons qu’un jour, lorsque du haut de son trône de gloire et de majesté Il jugera tous les hommes rassemblés devant Lui, ce jour-là, Il donnera ce doux nom de frères aux moindres d’entre les Fidèles.
Au surplus, comment pourrait-il se faire que nous ne fussions pas les frères de Jésus-Christ, nous dont il est dit 1 que nous sommes ses cohéritiers ? Sans doute, Il est 2 le premier né, l’héritier constitué de tout ; mais nous avons été engendrés après Lui, pour être ses cohéritiers, dans la mesure des dons de Dieu, et selon l’étendue de la Charité avec laquelle nous aurons coopéré à la vertu du Saint Esprit et à l’action de la grâce. Car, [ne l’oublions pas] c’est le Saint Esprit qui nous porte à la vertu, qui nous pousse aux bonnes œuvres, qui enflamme notre ardeur, qui nous fortifie par sa Grâce et nous donne le courage de descendre dans l’arène pour les combats du salut. C’est Lui qui nous aide à les soutenir jusqu’au bout avec constance et habileté. C’est Lui enfin qui, après cette vie, nous fait obtenir du Père céleste la juste récompense de la couronne promise à tous ceux qui auront fourni la même carrière. « Car, dit l’Apôtre 3, Dieu n’est pas injuste pour oublier nos bonnes œuvres et notre amour pour Lui. »
Saint Jean Chrysostome nous dit en fort bons termes avec quels sentiments du cœur nous devons prononcer le mot notre. « Dieu, dit-il 4 , écoute volontiers le Chrétien qui ne prie pas seulement pour lui-même, mais encore pour les autres. Prier pour soi, c’est l’inspiration de la nature, prier pour les autres, c’est l’inspiration de la grâce. En priant pour soi, on obéit d la nécessité, en priant pour les autres, on cède aux exhortations de la Charité fraternelle. » Or, ajoute-t-il « La Prière qui vient de la Charité fraternelle est plus agréable à Dieu que celle qui procède de la nécessité. »
En traitant une si importante matière…
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(1) Matth., 23, 8. — (2) Heb 2, 11. — (3) Psal., 21, 23. — (4) Matth., 28, 10. — (1) Rom., 8, 17. — (2) Hebr., 1, 2. — (3) Hebr., 6, 10. — (4) Hom., 14.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ II. — POURQUOI CHACUN DIT-IL NOTRE PÈRE ?(suite)
En traitant une si importante matière, le Pasteur ne manquera pas d’engager et même d’exhorter fortement tous les Fidèles, sans distinction d’âge, de rang et de condition, à ne jamais oublier qu’ils sont unis entre eux par les liens d’une fraternité universelle, et que, par conséquent, ils doivent se traiter mutuellement comme des amis et des frères, et ne pas chercher à s’élever orgueilleusement les uns au-dessus des autres. Et en effet, bien qu’il y ait dans l’Eglise de Dieu des fonctions de différents degrés, cependant cette diversité de dignités et d’emplois ne détruit en aucune façon les rapports d’union fraternelle qui existent entre nous. Ainsi, dans le corps humain, la variété des fonctions et des destinations de chaque membre, n’empêche nullement que toutes les parties du corps n’en soient de véritables membres. Prenons un homme revêtu de l’autorité royale. S’il est Chrétien, n’est-il pas le frère de tous ceux qui comme lui font partie de la Communion chrétienne ? Oui, sans aucun doute, et pourquoi ? parce qu’il n’y a pas un Dieu pour les pauvres, et un Dieu pour les riches et les rois, un Dieu qui a fait les pauvres, et un Dieu qui a créé les rois et leur a donné la puissance. Non, il n’y a qu’un seul Dieu, un seul Père, un seul Seigneur de tous les hommes.
De là pour tous sans exception, dans l’ordre spirituel, même noblesse d’origine, même dignité, même splendeur de race, puisque tous nous avons été régénérés par le même esprit, puisque tous nous sommes devenus enfants de Dieu par le même sacrement de la Foi, et cohéritiers du même héritage avec Jésus-Christ. Il n’y a pas un Christ Rédempteur pour les riches et les puissants, et un autre pour les pauvres et les petits. tous participent aux mêmes Sacrements, tous attendent le même héritage, c’est-à-dire le Royaume céleste. Nous sommes tous frères, et comme le dit l’Apôtre Saint Paul aux Ephésiens 1: « Nous sommes les membres du corps de Jésus-Christ, formés de sa chair et de ses os. » Vérité que le même Apôtre exprime encore en ces termes, dans son Epître aux Galates : 2 « Vous êtes tous enfants de Dieu par la Foi en Jésus-Christ ; car vous tous qui avez été baptisés en Jésus-Christ, vous êtes revêtus de Jésus-Christ. Il n’y a plus ni Juif, ni Grec, ni esclave, ni homme libre, ni homme, ni femme ; vous n’êtes tous qu’un en Jésus-Christ. »
Ce point veut être traité et établi avec le plus grand soin. C’est pourquoi les Pasteurs devront y revenir souvent, comme sur une vérité bien propre à relever et à encourager les pauvres et les malheureux, et en même temps capable de réprimer et d’abattre l’arrogance des riches et des puissants. C’est précisément pour remédier à ce mal que l’Apôtre Saint Paul revenait si souvent et avec tant de force et d’instance sur cette Charité fraternelle, qu’il voulait faire pénétrer dans le cœur des Fidèles.
Souvenez-vous donc, ô Chrétien, au moment d’adresser cette Prière au Seigneur, que vous devez parler à Dieu comme un enfant à son père. Dès lors, en la commençant, et en prononçant ces mots: Notre Père, pensez à quelle dignité Dieu dans sa Bonté infinie a voulu vous élever ! Il vous ordonne de vous présenter devant Lui, non par contrainte et en tremblant, comme un esclave devant son maître, mais de vous réfugier auprès de Lui en toute liberté et en parfaite confiance comme un enfant auprès de son père. Que ce souvenir et cette pensée vous fassent comprendre avec quelle ferveur et quelle piété vous devez prier. Efforcez-vous d’être tel qu’il convient à un enfant de Dieu, c’est-à-dire que vos Prières et vos actions ne soient jamais indignes de la divine origine qu’il a plu à sa Bonté de vous donner. C’est là en effet ce que nous recommande l’Apôtre, quand il dit: 1 « Soyez donc les imitateurs de Dieu, comme des enfants bien aimés. » Alors on pourra dire de nous avec vérité ce que le même Apôtre écrivait aux Thessaloniciens: 2 « Vous êtes tous les enfants de la lumière, et les fils du jour. »
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(1) Eph., 5, 30. — (2) Gal., 3, 26. — (1) Eph., 5, 1. — (2) 1 Thess., 5, 5.
A suivre : § III. — QUI ÊTES DANS LES CIEUX.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
§ III. — QUI ÊTES DANS LES CIEUX.
Tous ceux qui ont de Dieu l’idée qu’il en faut avoir sont d’accord pour reconnaître qu’Il est partout et en tous lieux. Ce n’est pas à dire pour cela qu’Il soit dans tous les lieux d’une manière partielle, comme si sa substance était partagée et distribuée en quelque sorte entre toutes les parties de l’espace, pour las occuper et les protéger. non, Dieu est un esprit, et Il ne souffre peint de division. Qui oserait Lui assigner une place particulière et Le circonscrire dans certaines limites, lorsqu’Il dit de Lui-même: 3 « Est-ce que Je ne remplis pas le ciel et la terre ? » Paroles qui, à leur tour, doivent s’entendre en ce sens que Dieu, par sa Puissance et son Immensité, embrasse le ciel et la terre, et tout ce que le ciel et la terre renferment, mais sans être Lui-même contenu dans aucun lieu. Il est présent à tout, soit pour créer, soit pour conserver ; mais Il n’est ni circonscrit, ni borné dans telle ou telle contrée ou dans telles ou telles limites ; Il est présent partout par sa substance et par son pouvoir. C’est ce que le Saint roi David exprimait en ces termes: 1 « Si je monte au ciel, Vous y êtes. »
Mais si Dieu est présent partout, en tout lieu et en toutes choses, sans être borné, comme nous l’avons dit, par aucune limite, cependant nos Saints Livres nous répètent souvent qu’Il a son séjour dans le ciel. La raison en est que les cieux que nous voyons au-dessus de nos têtes sont la plus noble partie du monde, qu’ils demeurent incorruptibles, qu’ils surpassent tous les autres corps en force, en grandeur, en beauté, et qu’ils sont doués de certains mouvements réguliers et constants. C’est donc pour exciter les hommes à contempler sa Puissance infinie et sa Majesté, qui brillent surtout dans l’œuvre des cieux, qu’Il nous atteste dans la Sainte Ecriture que le ciel est son séjour. Toutefois, Il déclare souvent aussi qu’il n’y a réellement aucune partie du monde, où Il ne soit présent par sa nature et par sa Puissance.
Au reste en méditant ces choses, les Fidèles chercheront à se représenter Dieu non seulement comme le Père commun de tous les hommes, mais encore comme Celui qui règne dans les cieux. Dès lors, à l’heure de la Prière, ils se souviendront qu’ils doivent porter vers le ciel leur esprit et leur cœur ; et plus le nom de Père leur inspirera d’espoir et de confiance, plus les sentiments de l’humilité et du respect croîtront en eux à la vue de l’Etre souverainement parfait, et de la Majesté infinie de Notre Père qui est dans les cieux.
Ces mêmes paroles déterminent encore ce que nous devons demander à Dieu dans la Prière. Toute demande qui porterait sur les besoins et les nécessités de la vie, sans avoir aucun rapport aux besoins spirituels et aux biens du ciel, serait vaine et indigne d’un Chrétien. C’est pourquoi les Pasteurs se feront un devoir d’enseigner à leurs pieux auditeurs cette manière de prier, et ils pourront s’appuyer en cela sur l’autorité de l’Apôtre Saint Paul, qui disait: 2 « Si vous êtes ressuscités avec Jésus-Christ, cherchez les choses d’en haut où Jésus-Christ est assis à la droite de Dieu ; n’ayez de goût que pour les choses du ciel, et non pour celles de la terre. »
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(3) Jer., 23, 24. — (1) Psal., 138, 8. — (2) Colos., 3, 1.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
Chapitre quarantième
Première demande de l'Oraison Dominicale
QUE VOTRE NOM SOIT SANCTIFIÉ.§ I. — POURQUOI CETTE DEMANDE EST LA PREMIÈRE ?
Notre-Seigneur Jésus-Christ, Maître et Seigneur universel, a voulu nous enseigner et nous prescrire Lui-même ce que nous devons demander à Dieu, et l’ordre dans lequel nous devons le demander. La Prière, en effet, n’est que l’expression de nos vœux et la manifestation de nos désirs. Dès lors, pour qu’elle soit bien faite, d’une manière convenable et raisonnable, nos demandes, c’est-à-dire nos vœux et nos désirs, doivent suivre l’ordre même dans lequel les choses sont désirables.
Or, la vraie Charité nous fait un devoir de rapporter tout notre cœur et toutes nos affections à Dieu. Dieu en effet n’est-Il pas en Lui-même le seul et souverain Bien ? et à ce titre, ne mérite-t-Il pas d’être aimé d’un amour supérieur et tout particulier ?
D’autre part, il nous est impossible de L’aimer de tout notre cœur et plus que toutes choses, si nous ne préférons son honneur et sa gloire à tout ce qui existe. Car tous les biens, quels qu’ils soient, les nôtres, ceux du prochain, enfin tout ce que nous appelons de ce nom de biens, tout vient de Lui, et est infiniment au-dessous de Lui, le souverain Bien. Aussi, pour mettre de l’ordre dans nos Prières, le Sauveur a fait de la demande du souverain Bien la première et la principale de nos requêtes. Il a voulu nous apprendre qu’avant de demander ce qui nous est nécessaire, à nous ou à notre prochain, nous devons demander ce qui se rapporte à la Gloire de Dieu, et présenter à Dieu Lui-même nos affections et nos désirs à cet égard. De cette manière nous resterons dans les règles de la Charité, qui nous ordonne d’aimer Dieu plus que nous-mêmes, et de demander d’abord ce que nous désirons pour Lui, avant ce que nous souhaitons pour nous.
A suivre : § II. — QU’EST-CE QUE LA GLOIRE DE DIEU ?
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE NOM SOIT SANCTIFIÉ.
§ II. — QU’EST-CE QUE LA GLOIRE DE DIEU ?
On ne désire et on ne demande que ce qu’on n’a pas. Mais à Dieu rien ne manque ; Il ne peut recevoir ni accroissement, ni augmentation, puisqu’Il est infini et parfait sous tous les rapports. Et par conséquent ce que nous demandons à Dieu pour Lui-même n’intéresse ni ses perfections, ni sa nature, mais uniquement sa Gloire extérieure. Nous désirons et nous demandons que son Nom soit connu davantage dans le monde ; que son Règne s’étende ; et que chaque jour de nouveaux serviteurs obéissent à sa sainte Volonté. Or ces trois choses, le Nom, le Règne, l’Obéissance, ne font point partie du bien intérieur même de Dieu: ce sont au contraire des choses qui lui sont tout-à-fait extérieures.
Mais pour mieux faire comprendre la force et la valeur de cette demande, le Pasteur aura grand soin de montrer aux Fidèles que ces mots: sur la terre comme au ciel peuvent s’appliquer et s’étendre à chacune des trois premières parties de l’Oraison Dominicale, et signifier: que votre Nom soit sanctifié sur la terre comme au ciel ; que votre Royaume arrive sur la terre comme au ciel ; que votre Volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Ainsi donc, lorsque nous disons: que votre Nom soit sanctifié, nous désirons de voir augmenter la sainteté et la gloire du Nom divin. Ici le Pasteur n’oubliera pas d’enseigner à ses pieux auditeurs que Notre-Seigneur Jésus-Christ, en employant ces expressions, n’a pas entendu dire que ce nom devait être sanctifié sur la terre comme Il l’est au ciel, c’est-à-dire que la sanctification terrestre devait égaler en intensité, la sanctification céleste — ce qui est radicalement impossible — mais seulement qu'elle devait procéder de la Charité et des plus profonds sentiments de l’âme. Sans doute il est très vrai de dire, car la chose est réelle, que ce nom adorable n’a pas besoin en Lui-même de sanctification, puisqu’Il est Saint et terrible, comme Dieu Lui-même est Saint par sa nature, qu’Il ne peut recevoir du dehors aucune sainteté qu’Il ne possède déjà de toute éternité. Mais, il faut bien le dire, sur la terre Il est loin d’être honoré comme Il mérite de l’être ; quelquefois même, hélas ! II est outragé par des malédictions et des blasphèmes. Et voilà pourquoi nous désirons et demandons qu’Il soit ici-bas loué, honoré, glorifié, comme Il est honoré, loué et glorifié dans le ciel. En un mot, nous voulons que l’honneur et le culte que nous Lui rendons soit tout à la fois dans notre cœur et sur nos lèvres, afin que nous puissions Lui offrir les hommages de notre vénération intérieure et extérieure, célébrer de toutes nos forces, à l’exemple des Saints et des Anges, la grandeur, la sainteté et la gloire de son Nom.
A suivre : § III. — OBJET DE LA PREMIÈRE DEMANDE.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE NOM SOIT SANCTIFIÉ.
§ III. — OBJET DE LA PREMIÈRE DEMANDE.
De même que les habitants du ciel exaltent la Gloire et les louanges de Dieu dans un concert parfait, de même nous demandons que toute la terre ait le même bonheur, que toutes les nations connaissent, honorent et servent Dieu, qu’il ne se rencontre nulle part un seul homme qui ne soit Chrétien, que tous se consacrent entièrement à Dieu, qu’ils soient convaincus que toute sainteté vient de Lui comme de sa source, et qu’il n’y a de pur et de saint que ce qui procède de la sainteté du Nom divin. En effet, au témoignage de l’Apôtre Saint Paul:1 « L’Eglise a été purifiée par l’eau dans la Parole de vie ; or la Parole de vie, c’est le Nom du Père, du Fils, et du Saint-Esprit, » dans lequel nous sommes baptisés et sanctifiés.
Ainsi, puisqu’il n’y a ni expiation, ni pureté, ni sainteté en celui sur qui le Nom adorable de Dieu n’a pas été invoqué, nous souhaitons et nous demandons que le genre humain tout entier abandonne les ténèbres impures de l’infidélité, qu’il soit éclairé des splendeurs de la Lumière divine, et qu’il reconnaisse si bien la vertu de ce Nom, qu’il cherche en Lui la véritable sainteté, et enfin qu’après avoir reçu le Baptême au Nom de la Sainte et indivisible Trinité, il parvienne avec l’aide de Dieu à la plénitude de cette sainteté, qui doit être l’objet de tous ses vœux.
Nos désirs et nos supplications s’étendent également ceux qui sont souillés de désordres et de crimes, qui ont perdu la pureté du Baptême et la robe d’innocence, et qui ont été assez malheureux pour tomber de nouveau sous la puissance du démon. nous souhaitons — et demandons à Dieu — que son Nom soit sanctifié en eux, c’est-à-dire qu’ils rentrent en eux-mêmes, qu’ils reviennent à de meilleurs sentiments, qu’ils recouvrent par la Pénitence leur ancienne innocence, et qu’ils redeviennent enfin de vrais temples saints, de dignes habitations de Dieu, sans tache et sans souillures.
Nous demandons en outre que Dieu veuille bien éclairer tous les esprits de sa Lumière, afin qu’ils puissent voir et constater, que « tout bien excellent et tout don parfait, descendant du Père des lumières, vient de Lui , » et arrive jusqu’à nous par sa divine Volonté, que c’est à Lui qu’ils sont redevables de la tempérance, de la justice, de la vie, du salut, enfin en général de tous les biens du corps et de l’âme, biens extérieurs et biens intérieurs. Et tout ce qu’ils ont ainsi reçu, ils ne doivent pas oublier de le rapporter « à Celui de qui tout procède , » comme le proclame l’Eglise. Car si le soleil avec sa lumière, si les autres astres avec leur mouvement et leur cours régulier nous sont d’une utilité admirable ; si l’air qui nous environne sert à nous nourrir ; si la terre, avec l’abondance de ses moissons et de ses fruits fournit à la subsistance de tous les hommes ; si les magistrats avec leur vigilance nous permettent de jouir du repos et de la tranquillité, c’est à l’infinie Bonté de Dieu que nous devons tous ces avantages, et une foule innombrable d’autres du même genre. Et même les causes secondes, ainsi que les philosophes les appellent, ne doivent être à nos yeux que comme autant de mains admirablement façonnées et préparées en vue de nos besoins, par lesquelles Dieu nous distribue ses bienfaits, et les répand à profusion dans toutes les parties de l’univers.
Mais ce que nous demandons plus particulièrement par cette première partie de l’Oraison Dominicale, c’est que tous reconnaissent et révèrent la très Sainte Epouse de Jésus-Christ, l’Eglise notre Mère. Car seule elle possède cette source surabondante et intarissable de Grâce divine capable de purifier et de laver toutes les souillures d péché, cette source surnaturelle d’où jaillissent tous le Sacrements de la sanctification et du salut, lesquels, coin me autant de canaux sacrés, font couler dans nos âme la céleste rosée, l’eau vivifiante de la sainteté. Seule enfin avec les enfants qu’elle tient réunis dans ses bras et su son sein, elle a le droit d’invoquer ce nom adorable qui « est le seul sous le ciel par Lequel il soif donné aux hommes d’opérer leur salut. » 2
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(1) Eph., 5, 25. — (2) Act., 4, 12.
A suivre : § IV. — UN VRAI CHRÉTIEN DOIT HONORER CE SAINT NOM PAR SES ACTIONS.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE NOM SOIT SANCTIFIÉ.
§ IV. — UN VRAI CHRÉTIEN DOIT HONORER CE SAINT NOM PAR SES ACTIONS.
Les Pasteurs auront soin d’insister très spécialement sur ce point qu’il est d’un bon fils de ne pas prier Dieu son Père, uniquement en paroles, mais de faire en sorte, par sa conduite et ses actes, que la sanctification du Nom divin brille dans toute sa personne.
Et plut à Dieu qu’il ne se trouvât point de Chrétiens qui, tout en demandant dans leur Prière la sanctification de ce nom béni, Le déshonorent par leurs actions, autant qu’il est en eux, et quelquefois même sont cause des malédictions qu’on prononce contre Lui ! C’est d’eux que l’Apôtre a dit: 1 « on blasphème le nom de Dieu à cause de vous, parmi les nations », et auparavant Ezéchiel avait écrit 2 : « ils se sont mêlés avec les nations, et ils ont habité avec elles, et ils ont rendu mon Nom méprisable ; ce qui a fait dire d’eux à ces nations: ce peuple est le peuple du Seigneur et il est sorti de la terre qui lui appartenait. » En effet, telles la vie et les mœurs de ceux qui professent une religion, tels aussi, pour l’ordinaire, et cette religion, et son auteur, au jugement de la multitude ignorante.
Aussi bien ceux qui vivent selon la Religion chrétienne qu’ils ont embrassée, et qui règlent leurs Prières et leurs actions sur ses préceptes, fournissent-ils aux autres un des plus grands moyens de louer, d’honorer et de glorifier le Nom du Père céleste. C’est un devoir que Notre-Seigneur Lui-même nous a imposé ; Il a voulu que par des actes éclatants de vertu nous portions tous les hommes à louer t à glorifier le Nom adorable de Dieu. ne dit-II pas en effet dans l’Evangile: 3 « Que votre Lumière brille devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres, et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les cieux ; » et Saint Pierre après Lui 4 : « conduisez-vous parmi les Gentils d’une manière pure, afin que, vous jugeant d’après vos œuvres saintes, ils glorifient Dieu ».
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(1) Rom., 2, 24. — (2) Ezech., 36, 20. — (3) Matth., 5, 16. — (4) 1 Pet., 1, 12.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
Chapitre quarante-et-unième
Seconde demande de l'Oraison DominicaleQUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ I. — DU ROYAUME DE DIEU.
Le royaume de Dieu, qui fait l’objet de cette seconde demande, est le but et la fin de toute la Prédication évangélique. C’est par là que Saint Jean Baptiste commença à prêcher la Pénitence. « Faites pénitence, disait-il 1, parce que le Royaume des cieux est proche. » Ce fut aussi le commencement de la Prédication du Sauveur du monde. Et lorsque, dans cet admirable Sermon sur la Montagne, Il montre à ses disciples les voies de la béatitude, II leur parle d’abord du Royaume des cieux comme du sujet fondamental de son discours. « Bienheureux les pauvres en esprit, dit-Il 2, parce que le Royaume des cieux leur appartient. » Bien plus, un jour que la foule voulait Le retenir, voici la raison qu’Il donne de la nécessité de son départ: 3 « il faut que J’annonce aussi le Royaume de Dieu aux autres villes, car Je suis envoyé pour cela. » Plus tard, c’est encore ce même Royaume qu’Il ordonne à se Apôtres de prêcher ; et à celui qui voulait aller enseveli son père4: « allez, dit-Il, et annoncez le Royaume de Dieu ». Et après sa Résurrection, pendant ces quarante jours où II apparaît à ses Apôtres, c’est du Royaume d Dieu qu’Il leur parle.
Les Pasteurs voudront donc expliquer cette seconde demande avec tout le soin possible, afin que les Fidèle en comprennent bien l’importance et la nécessité.
Et pour atteindre ce but, ils pourront se servir avec habileté et profit de cette considération si frappante, à savoir que Notre-Seigneur Jésus-Christ a voulu et ordonné formellement que cette demande, quoique liée avec les autres, en fût séparée et distincte dans son expression, et cela afin de nous faire désirer et rechercher plus ardemment ce que nous demandons. Il nous dit en effet: 1 « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par surcroît. »
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(1) Matth., 3, 2. — (2) Matth., 5, 3. — (3) Luc., 4, 43. — (4) Matth., 10, 7. — (1) Matth., 6, 33.
A suivre : § II. — CE QUI EST COMPRIS DANS CETTE DEMANDE.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ II. — CE QUI EST COMPRIS DANS CETTE DEMANDE.
Les dons célestes compris dans cette demande sont si précieux et si abondants qu’ils embrassent même tout ce qui est nécessaire pour soutenir la vie du corps aussi bien que celle de l’âme. Trouverions-nous digne du nom de roi, celui qui n’aurait aucun souci du bien et du salut de l’Etat ? Mais si les hommes ont tant de sollicitude pour garder un royaume terrestre, avec quelle vigilance, quelle paternelle Providence ne devons-nous pas croire que le Roi des rois s’occupe de la vie et du salut de ses créatures ?
En demandant le Royaume de Dieu, nous réclamons donc par le fait tout ce dont nous avons besoin dans notre pèlerinage, ou plutôt dans notre exil. Et notre Prière s’appuie sur cette promesse si consolante et si positive du Seigneur: « et tout le reste vous sera donné par surcroît. »
De telles paroles prouvent bien que Dieu est vraiment le Roi du genre humain, et qu’Il répand sur lui tous ses biens en abondance et avec libéralité. Et c’est précisément la pensée de cette infinie Bonté de Dieu qui mettait sur les lèvres de David ce chant de reconnaissance: 1 « Le Seigneur est mon Roi, et rient ne me manquera. »
Mais, (ne l’oublions pas), ce n’est pas assez de demander instamment le Royaume de Dieu, il faut encore joindre à cette demande tous les moyens nécessaires pour le chercher et pour le trouver. Hélas ! les cinq vierges folles, elles aussi, le demandaient avec instance: 2 « Seigneur, Seigneur, ouvrez-nous ! » et cependant, parce qu’elles n’avaient pas tout ce qu’il fallait, pour accompagner leur Prière, et être exaucées, elles ne furent point admises. Et ce ne fut point une injustice. Car c’est Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même qui a prononcé cette sentence: 3 « Tous ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur, n’entreront point dans le Royaume des cieux. »
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(1) Psal., 22, 1. — (2). Matth., 25, 11. — (3) Matth., 7, 21.
A suivre : § III. — DES MISÈRES DE CETTE VIE.
Dernière édition par Louis le Dim 05 Juil 2015, 5:10 pm, édité 1 fois (Raison : Présentation.)
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QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ III. — DES MISÈRES DE CETTE VIE.
Les Prêtres chargés du soin des âmes, (les Curés), ne manqueront pas de puiser en abondance aux sources fécondes de nos Saints Livres, les vérités les plus propres à exciter dans le cœur des Fidèles le désir et le goût du Ciel. En même temps ils auront soin de mettre sous leurs yeux les accablantes misères de notre vie mortelle, et ils feront en sorte de les toucher assez pour qu’ils se recueillent, qu’ils rentrent en eux-mêmes et qu’ils se souviennent que le ciel, la maison de Dieu, la maison de leur Père est le séjour du bonheur suprême, et la possession des biens infinis.
Ici-bas, en effet, nous ne sommes que des exilés. Nous habitons la même terre que les démons, animés contre nous d’une haine que rien ne peut apaiser, nos implacables et éternels ennemis.
Et que dire de ces combats domestiques, de ces luttes intérieures que se livrent sans cesse en nous le corps et l’âme, la chair et l’esprit ? Combats terribles où nous avons toujours à craindre de succomber, où nous succomberions même sur le champ, si la main du Seigneur n’était pas là pour nous défendre. Ah ! certes, l’Apôtre Saint Paul sentait bien tout le poids de ces misères, quand il s’écriait: 1 « Malheureux homme que je suis ! qui me délivrera de ce corps de mort ? »
Ces misères de notre race, déjà si sensibles par elles-mêmes, ressortent bien plus vivement encore de la comparaison de notre état avec celui des autres créatures. Que ces créatures en effet soient privées de raison ou même de sentiment, il est bien rare que quelques-unes d’entre elles s’éloignent assez des actions, des sentiments et des mouvements qui leur sont propres, pour manquer la fin qui leur a été assignée. La chose est si évidente dans les animaux terrestres, dans les poissons et dans les oiseaux, qu’elle n’a besoin d’aucune explication. Que si nous portons nos regards vers le ciel, ne sentons-nous pas aussitôt la vérité de ce Cantique de David: 2 « Votre Parole, Seigneur, demeure à jamais dans le ciel. » Le ciel, en effet, est emporté par un mouvement qui ne s’arrête jamais ; mais ce mouvement est si constant et si réglé, qu’il ne sort jamais de la ligne que Dieu lui a tracée. Si nous regardons la terre et tout le reste de l’univers, nous reconnaîtrons aisément qu’ils n’éprouvent point d’altération dans leur état.
Mais que la misère de l’homme est grande ! que ses chutes sont profondes et fréquentes ! s’il conçoit de bons projets, rarement il les exécute. Souvent il abandonne et méprise le bien qu’il vient de commencer. Ce qui lui plaisait tout à l’heure et lui semblait excellent, lui déplait tout à coup. Il le rejette, et se laisse entraîner aux résolutions honteuses et nuisibles.
Quelle est donc la cause de cette inconstance et de cette misère ? Evidemment c’est le mépris de l’inspiration divine. Nous fermons l’oreille aux avertissements que Dieu nous donne ; nous refusons d’ouvrir les yeux aux lumières surnaturelles qu’Il nous offre, et nous n’écoutons point les préceptes salutaires de notre Père du ciel.
Ici donc les Pasteurs devront s’appliquer à mettre sous les yeux des Fidèles ce tableau des misères humaines. Ils tâcheront d’en expliquer les causes et d’en indiquer les remèdes. Ce qui leur sera facile, s’ils ont soin d’aller puiser dans les œuvres des grands docteurs Saint Jean Chrysostome et Saint Augustin, et surtout dans ce que nous avons dit nous-mêmes en parlant du symbole des Apôtres. Car ces vérités une fois connues, quel est l’homme si coupable et si pervers qui ne voudrait s’efforcer avec la Grâce prévenante de Dieu, et l’exemple de l’enfant prodigue, de se lever et de revenir avec confiance se jeter entre les bras de son Roi, de son Père céleste ?
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(1) Rom., 7, 24.— (2) Psal., 118, 89.
A suivre : § IV. — QUEL EST L’OBJET DE LA DEUXIÈME DEMANDE.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ IV. — QUEL EST L’OBJET DE LA DEUXIÈME DEMANDE.
Après avoir montré par ces explications tous les avantages que renferme cette Prière des Fidèles, les Pasteurs feront voir ensuite ce que nous demandons par ces paroles ; que votre Royaume arrive. Elles ont plusieurs significations différentes, dont la détermination sera très utile pour comprendre les autres passages de la Sainte Ecriture, et nécessaire spécialement pour celui qui nous occupe. Or, la première signification du Royaume de Dieu — signification ordinaire et fréquente dans nos Saints Livres — c’est d’exprimer non seulement ce pouvoir que Dieu exerce sur tous les hommes et sur tout l’univers, mais encore cette Providence spéciale par laquelle Il dirige et gouverne toutes choses. « Il tient dans ses mains , dit le Prophète, 1 la terre avec ses extrémités les plus reculées. » Ce qu’il faut entendre même des choses cachées dans les profondeurs de la terre et dans toutes les parties du monde les plus secrètes. C’est d’après cette idée que Mardochée disait: 2 « Seigneur Dieu, roi très puissant, toutes choses sont en votre Puissance, et il n’est personne qui puisse résister à votre Volonté. Vous êtes maître de tous, et rien ne résiste à votre Majesté. »
En second lieu ces mots de Royaume de Dieu signifient cette Providence particulière et très spéciale, par laquelle Dieu prend soin des hommes pieux et fidèles, et les couvre de sa protection: Providence admirable et unique, qui faisait dire à David: 3 « Le Seigneur prend soin de moi et rien ne me manquera ; » et au Prophète Isaïe: 4 « Le Seigneur est notre roi, il nous sauvera. »
Or, quoique Dieu exerce son pouvoir en ce monde sur les saints et les gens de bien, cependant Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même avertit Pilate que5 son Royaume n’est pas de ce monde , c’est-à-dire qu’Il ne tire nullement son origine de ce monde qui a été créé et qui est périssable, et qu’Il ne domine point à la façon des empereurs, des rois, des républiques, des présidents et de tous ceux que le vœu général ou l’élection appelle à gouverner les états et les provinces, ou qui s’emparent du pouvoir par la force et par la violence. Non, Notre-Seigneur Jésus-Christ, c’est Dieu qui l’a établi Roi , dit le Prophète, et au témoignage de l’Apôtre, son Royaume est la justice, car il dit: 1 « Le Royaume de Dieu, c’est la justice, la paix et la joie dans le Saint Esprit. »
Or, Jésus-Christ règne en nous par les Vertus intérieures de la Foi, de l’Espérance et de la Charité. C’est par ces Vertus que nous devenons en quelque sorte partie de ce Royaume, et en même temps, les sujets privilégiés de Dieu. Elles nous consacrent à son culte et à son service, de telle sorte que si l’Apôtre Saint Paul a pu dire: 2 « Je vis, ou plutôt ce n’est plus moi qui vis, c’est Jésus-Christ qui vit en moi , » chacun de nous peut dire aussi: « Je règne, ou plutôt, ce n’est pas moi qui règne, c’est Jésus-Christ qui règne en moi. »
Ce Royaume est appelé la justice, parce qu’il est fondé sur la justice de Jésus-Christ. C’est de lui que le Sauveur parle dans Saint Luc, quand Il dit: 3 « Le Royaume de Dieu est au dedans de vous. »
Quoique Notre-Seigneur Jésus-Christ règne par la Foi en tous ceux que l’Eglise, notre très sainte Mère, regarde comme ses enfants, cependant II est plus spécialement le Roi de ceux qui, remplis des dons de la Foi, de l’Espérance et de la Charité, sont devenus en quelque sorte comme des membres vivants et sanctifiés de Dieu Lui-même. C’est dans ces parfaits Chrétiens que règne vraiment la Grâce de Dieu.
Le Royaume de Dieu est encore…
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(1) Psal., 94, 4.— (2) Esth., 13, 9. — (3) Psal., 22, 1. — (4) Isa. 33, 22. — (5) Joan., 18, 36. — (1) Rom., 14, 17. — (2) Gal., 2, 20. — (3) Luc., 17, 21.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ IV. — QUEL EST L’OBJET DE LA DEUXIÈME DEMANDE.(suite)
Le Royaume de Dieu est encore le royaume de la Gloire. C’est de lui que Notre-Seigneur parle dans Saint Matthieu, lorsqu’Il dit: 1 « Venez, les bénis de mon Père, possédez le Royaume qui vous a été préparé dés le commencement du monde. » C’est ce Royaume aussi que le larron pénitent demandait à Jésus sur la croix, en disant 2 « Souvenez-vous de moi quand Vous serez dans votre Royaume. » Et les paroles suivantes de Saint Jean se rapportent au même objet: 3 « Si quelqu’un ne renaît de l’eau et de l’Esprit, il ne saurait entrer dans le royaume de Dieu. »
C’est également la pensée de Saint Paul dans ce passage de son Epître aux Ephésiens: 4 « Ni les impudiques, ni les avares (qui sont des idolâtres) n’ont point d’héritage dans le Royaume de Jésus-Christ et de Dieu. » Il faut encore entendre dans le même sens quelques-unes des paraboles de Notre-Seigneur Jésus-Christ, lorsqu’Il parlait du Royaume des cieux.
Mais il est nécessaire que le Règne de la Grâce soit d’abord établi dans nos âmes. Car il est impossible de régner un jour dans la Gloire, si l’on n’a eu soin, tout d’abord de faire régner la Grâce en soi-même. Or, la Grâce, au témoignage de Notre-Seigneur Lui-même 5, « est une source d’eau vive qui jaillit jusqu’à la Vie Eternelle. »
La Gloire, elle, n’est autre chose que la Grâce consommée, et portée à sa perfection.
Tant que nous sommes revêtus de ce corps fragile et mortel, tant que nous vivons dans les ténèbres d’ici-bas, pèlerins, exilés, errants, sans forces et loin de Dieu, on nous voit souvent, hélas ! faillir et tomber, parce que nous repoussons le secours de la Grâce d’en haut, qui nous soutenait. Mais lorsque la lumière du royaume de la Gloire, qui est le Royaume parfait, aura brillé à nos yeux, nous serons à jamais fermes et invariables dans le bien et la perfection. Tous les vices et toutes les incommodités auront cessé. Notre faiblesse sera changée en une force inaltérable. Dieu, enfin, Dieu Lui-même régnera dans notre âme et dans notre corps, comme nous l’avons expliqué avec les développements convenables dans le symbole des Apôtres, en parlant de la Résurrection de la chair.
Telles sont les différentes significations de ces mots Royaume de Dieu. Voyons maintenant à quoi tend particulièrement cette demande.
Premièrement nous demandons à Dieu que…
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(1) Matth., 25, 34. — (2) Luc., 23, 42. — (3) Joan., 3, 5. — (4) Eph., 5, 5. — (5) Joan., 4, 14.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
A suivre : § V. — DANS QUELS SENTIMENTS IL FAUT FAIRE CETTE DEMANDE.QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ IV. — QUEL EST L’OBJET DE LA DEUXIÈME DEMANDE.(suite)
Premièrement nous demandons à Dieu que le Royaume de Jésus-Christ, qui est l’Eglise, s’étende au loin ; que les infidèles et les Juifs se convertissent à la Foi chrétienne et à la connaissance du vrai Dieu ; que les schismatiques et les hérétiques rentrent en eux-mêmes et reviennent à la Communion de l’Eglise dont ils se sont séparés, afin que soit accomplie et réalisée cette parole du Seigneur dans le Prophète Isaïe: 1 « Elargis l’enceinte de ton pavillon, et développe les voiles de tes tentes ; allonge tes cordages ; affermis tes pieux ; tu pénétreras à droite et à gauche, parce que Celui qui t’a créé sera ton Seigneur »: et celle-ci: « Les nations marcheront à ta lumière, et les rois d l’éclat de ta splendeur. Lève les yeux autour de toi, et vois: tous ces peuples s’avancent vers toi ; tes fils viendront de loin ; tes filles s’élèveront à tes côtés. »
Mais il y a dans l’Eglise des Chrétiens qui confessent Dieu de bouche, et qui Le renient par leurs œuvres, des Chrétiens, dont la Foi est défigurée et morte, en qui le démon habite, par suite de leurs péchés, et règne dans sa propre maison. Nous demandons que le Royaume de Dieu leur arrive aussi, afin que, s’arrachant aux ténèbres du mal, et éclairés par la Lumière divine, ils soient rétablis dans leur première dignité d’enfants de Dieu ; nous demandons que le Père céleste, en chassant de son Royaume les hérésies, les schismes, le péché et toutes les causes du péché, nettoie l’aire de son Eglise, et lui permette de jouir d’une paix douce et tranquille, en servant Dieu dans la piété et l’innocence.
Nous demandons, enfin, que Dieu vive et règne seul en nous, afin que la mort n’ait plus sur nous aucun droit, qu’elle soit observée par la victoire de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et qu’ainsi, après avoir renversé et anéanti l’autorité, la domination et la puissance de ses ennemis, II demeure le seul et unique Souverain de toutes choses.
Les Pasteurs ne manqueront pas d’apprendre aux Fidèles quel est l’esprit et le sens de cette demande, et par suite avec quelles pensées et quelles dispositions ils doivent adresser à Dieu cette Prière. Ils les exhorteront d’abord à bien peser toute la force et la portée de cette parabole du Sauveur: 2 « Le Royaume des cieux est semblable à un trésor caché dans un champ. Un homme vient-il à le trouver, il le cache de nouveau, et dans sa joie, il s’en va, vend tout ce qu’il possède et achète ce champ. » Ainsi celui qui connaîtra les richesses de Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour elles, méprisera tout le reste. Biens, fortune, puissance, tout sera vil à ses yeux. Rien ne saurait être comparé à ce souverain Bien, ou plutôt rien ne saurait tenir devant Lui.
C’est pourquoi ceux qui auront le bonheur de connaître ces richesses du Royaume de Dieu, s’écrieront avec l’Apôtre: 3 « Je me suis dépouillé de tout, je fais cas de toutes choses comme de la boue, pour gagner Jésus-Christ. » C’est la perle précieuse de l’Evangile. Celui qui aura dépensé pour l’acheter tout l’argent qu’il avait retiré de la vente de tous ses biens jouira d’un bonheur éternel. Heureux serions-nous, si Notre-Seigneur Jésus-Christ daignait nous éclairer assez pour faire voir cette perle de la Grâce divine, par laquelle Il règne en tous ceux qui Lui appartiennent ! nous serions prêts à tout vendre et à tout donner, jusqu’à nous-mêmes, pour l’acquérir et pour la conserver. C’est alors que nous pourrions dire, sans la moindre crainte: 4 « Qui pourra nous séparer de la Charité de Jésus-Christ ? » Que si nous voulons savoir quelle est l’excellence de la gloire du Royaume céleste, et combien elle l’emporte sur tout le reste, écoutons ce que dit le Prophète Isaïe, et après lui l’Apôtre Saint Paul: 5 « L’œil n’a point vu, l’oreille n’a point entendu, le cœur de l’homme n’a jamais conçu ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment. »
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(1) Is., 54, 2. — (2) Matth., 13, 44. — (3) Philipp., 3, 8. — (4) Rom., 8, 35. — (5) Is., 64, 4. - 1 Cor., 2, 9.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE ROYAUME ARRIVE.§ V. — DANS QUELS SENTIMENTS IL FAUT FAIRE CETTE DEMANDE.
Mais pour obtenir plus sûrement l’effet de notre demande, il sera très utile de nous redire à nous-mêmes qui nous sommes, c’est-à-dire les enfants d’Adam, trop justement chassés du paradis, condamnés à l’exil, et dignes par nos misères et nos péchés, de toute la haine de Dieu et des éternels supplices. Alors nous nous tiendrons dans l’abaissement et l’abjection. Notre Prière sera pleine d’humilité. Nous nous défierons de nous-mêmes, pour nous jeter, comme le Publicain de l’Evangile, dans le sein de la Miséricorde de Dieu. nous rapporterons tout à sa Bonté, et nous lui rendrons d’immortelles actions de grâces, d’avoir bien voulu « nous donner son esprit 1 dans lequel nous avons la confiance de crier: Père, Père ! »
Nous chercherons ensuite à bien connaître ce qu’il faut faire et ce qu’il faut éviter pour parvenir au Royaume céleste. Car Dieu ne nous a pas appelés à l’oisiveté et à la paresse ; Il nous dit au contraire: 2 « Le Royaume des cieux souffre violence, et ce sont les violents qui l’emportent. » Et ailleurs: 3 « Si vous voulez entrer dans la vie, gardez les Commandements. »
Ce n’est donc point assez de demander le Royaume de Dieu, si en même temps on ne travaille avec soin et avec zèle à le mériter. Il faut aider la grâce, et devenir les coopérateurs de Dieu dans la route à suivre pour arriver au ciel. Dieu ne nous abandonne jamais. Il nous a promis d’être toujours avec nous. A nous de prendre garde de ne point quitter Dieu et de ne point nous abandonner nous-mêmes. Dieu a mis dans son Eglise, qui est son Royaume ici-bas, tout ce qui est nécessaire pour protéger notre vie mortelle et assurer notre Salut éternel: et ces légions d’Anges invisibles, et ce trésor visible des Sacrements, si riches en grâces célestes. Avec de tels secours, que la bonté de Dieu nous a ménagés, non seulement nous n’avons rien à craindre de la puissance de nos ennemis acharnés, mais même nous pouvons terrasser le tyran des enfers et le fouler aux pieds avec ses cruels satellites.
Demandons donc très instamment au Saint Esprit qu’Il nous enseigne à faire toutes choses selon sa volonté ; qu’Il détruise l’empire de Satan, afin qu’au dernier jour il n’ait aucun pouvoir sur nous. Demandons que Jésus-Christ soit vainqueur, et qu’Il triomphe ; que ses lois soient en vigueur par toute la terre, que ses décrets soient partout exécutés, qu’il n’y ait ni traître ni déserteur parmi les siens, et que tous se montrent tels qu’ils puissent se présenter avec confiance devant Dieu leur Souverain, et entrer ensuite en possession du Royaume céleste qui leur a été préparé de toute éternité, et où ils jouiront avec Jésus-Christ d’un bonheur qui n’aura point de fin.
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(1) Rom., 8, 15. — (2) Matth., 11, 12. — (3) Matth., 19, 17.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
Chapitre quarante-deuxièmeTroisième demande de l'Oraison DominicaleQUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.
Puisque Notre-Seigneur Jésus-Christ nous assure que 1 « tous ceux qui lui disent: Seigneur, Seigneur, n’entreront point dans le Royaume des cieux ; mais que celui-là seul y entrera qui fait la Volonté de son Père qui est dans le ciel », il est donc de toute nécessité que tous ceux qui désirent parvenir à ce Royaume céleste, demandent à Dieu que sa Volonté soit faite. Voilà pourquoi cette demande vient immédiatement après celle du Royaume des cieux.
Mais pour mieux faire comprendre aux Fidèles combien ce que nous demandons par cette Prière nous est indispensable, et quelle abondance de salutaires faveurs elle nous obtient, les Pasteurs auront soin de bien montrer toutes les misères et toutes les calamités qui ont accablé le genre humain, depuis le péché de nos premiers parents.§ I. — MISÈRES DU GENRE HUMAIN, LEUR CAUSE.
Dès le commencement, Dieu donna à chaque créature le désir du bien qui lui est propre ; de sorte que par une inclination naturelle, toute créature désire et cherche sa fin, dont, au reste, on ne la voit jamais s’écarter, à moins qu’un obstacle étranger ne vienne l’en détourner. Pour l’homme sortant des mains de son Créateur, cette inclination qui le poussait vers Dieu, le Principe et l’Auteur de sa félicité, était d’autant plus noble et plus ardente, qu’il était doué de raison et de jugement.
Mais tandis que les autres créatures qui ne jouissaient pas de la raison, conservaient cette disposition de la nature et cette bonté première que Dieu leur avait données en les créant, et qu’elles possèdent encore maintenant, l’infortuné genre humain sortit de sa voie. Et non seulement il perdit les biens de la justice originelle dont Dieu l’avait orné et enrichi par un privilège qui dépassait sa nature, mais il affaiblit encore ce goût de la vertu qui avait été gravé dans son mur. « Tous se sont éloignés , dit le Prophète 1, ils se sont corrompus ; ils n’y en a plus qui fassent le bien, il n’y en a plus un seul. »
En effet, « l’esprit et le cœur de l’homme 1 sont inclinés vers le mal dès sa jeunesse. » D’où il est facile de voir que nul, par lui-même, ne saurait avoir le goût des choses du salut, mais au contraire que tons les hommes sont portés au mal ; que leurs passions déréglées sont innombrables et les entraînent, et les précipitent avec une force incroyable dans la colère, dans la haine, dans l’orgueil, dans l’ambition, en un mot dans toutes sortes de vices.
Toutes ces misères ne sont que trop réelles, nous les sentons sans cesse en nous. Et pourtant notre plus grande misère c’est qu’un bon nombre de ces maux sont loin de nous paraître de véritables maux. Témoignage effrayant de notre malheureuse condition ! Aveuglés par nos passions et nos excès, nous ne voyons pas que ce qui nous paraît bon et salutaire est trop souvent détestable. Bien plus, nous courons avec empressement après ces biens funestes comme s’ils étaient vraiment désirables et parfaits ; et nous n’éprouvons que de l’éloignement et de l’aversion pour ce qui constitue le vrai Bien et la Vertu même, comme s’ils étaient contraires à notre bonheur. Mais Dieu ne peut souffrir ces pensées fausses, ces jugements corrompus. Il les condamne et les maudit par la bouche d’Isaïe: 1 « Malheur à vous qui appelez le mal un bien, et le bien un mal ; qui prenez la lumière pour les ténèbres, et les ténèbres pour la lumière ; qui choisissez l’amer pour le doux et le doux pour l’amer ! »
Aussi, pour nous faire mieux comprendre l’énormité de nos misères…
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(1) Matth., 7, 21. — (1) Psal., 52, 4. — (2) Genes., 8, 21. — (1) Is., 5, 20.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.§ I. — MISÈRES DU GENRE HUMAIN, LEUR CAUSE.(suite)
Aussi, pour nous faire mieux comprendre l’énormité de nos misères, nos Saints Livres ne craignent pas de nous comparer à ceux qui ont perdu le sens du goût, et qui repoussent la nourriture saine et fortifiante, pour lui préférer des mets pernicieux. Ils nous comparent également à des malades, lesquels, tant que dure leur maladie, sont incapables d’accomplir les devoirs et de remplir les fonctions des personnes qui jouissent de leurs forces et de leur santé. Ainsi nous-mêmes, sans le secours de la Grâce de Dieu, nous ne pouvons rien faire qui lui soit agréable.
Que si dans cet état nous entreprenons ou faisons quelque bien, ce bien sera sans importance, et nous servira à peine pour le ciel. Mais aimer Dieu et Le servir comme il convient, c’est quelque chose de trop noble et de trop sublime pour que, dans l’état de faiblesse et d’abaissement où nous sommes, nous puissions le faire de nous-mêmes. Pour atteindre à cette hauteur, il faut que nous soyons soulevés en quelque sorte par la Grâce de Dieu.
Voici encore une comparaison bien propre à faire ressortir la misère de notre condition. Un peut dire que nous ressemblons à des enfants qui, abandonnés à eux-mêmes, se portent sans réflexion sur toute sorte d’objets. Oui, nous sommes de vrais enfants, des êtres inconsidérés, tout entiers aux entretiens frivoles et aux actions futiles, si le secours de Dieu nous abandonne. De là ce reproche que nous adresse la Sagesse: 1 « Jusques à quand aimerez-vous la vanité comme des enfants ? Jusques à quand les insensés désireront-ils ce qui leur est pernicieux ? » et cette recommandation de l’Apôtre: 2 « Ne vous faites pas enfants, sans prudence et sans discernement. »
Au surplus, notre vanité et notre aveuglement surpassent de beaucoup les illusions des enfants. Car ils ne manquent, eux, que de la sagesse humaine qu’ils peuvent acquérir avec le temps. nous, au contraire, sans le secours et la grâce de Dieu, nous ne pouvons pas même aspirer à cette prudence divine qui pourtant est nécessaire au salut. Et si ce secours cesse de nous soutenir un seul instant, nous repoussons aussitôt les biens véritables, et nous nous précipitons de nous-mêmes dans la mort.
Mais que, grâce à la Lumière divine qui dissipe les ténèbres de l’esprit, un Chrétien aperçoive nos misères trop réelles ; que, secouant son insensibilité, il se rende compte de l’opposition de nos passions et de la loi des membres contre la loi de l’esprit ; qu’il considère enfin la violence de notre entraînement naturel vers le mal, comment pourra-t-il ne pas chercher avec le plus vif empressement le remède à ces maux si grands dont la nature nous accable, et ne pas désirer ardemment de trouver enfin une règle salutaire pour y conformer sa conduite et sa vie ?
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(1) Prov., 1, 22. — (2) I Cor.14, 20.
A suivre : § II. — NOUS DEMANDONS LE REMÈDE A NOS MISÈRES PAR CES MOTS : QUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE, ETC...
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.§ II. — NOUS DEMANDONS LE REMÈDE A NOS MISÈRES PAR CES MOTS : QUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE, ETC..
Or, voilà précisément ce que nous demandons à Dieu, quand nous lui disons: Que votre volonté soit faite ! C’est en désobéissant à Dieu et en méprisant sa volonté, que nous sommes tombés dans toutes ces misères ; dés lors l’unique, le véritable remède à tous nos maux, celui que Dieu Lui-même nous a donné, sera de vivre enfin selon cette Volonté divine que nous avons foulée aux pieds en nous livrant au péché, et de régler désormais toutes nos pensées et toutes nos actions sur ce qu’elle prescrit. C’est pour arriver à ce but que nous disons humblement à Dieu dans notre prière : Que votre Volonté soit faite !
Et les justes eux-mêmes, ceux en qui Dieu règne déjà, et qui ont été éclairés des rayons de la divine Lumière, doivent demander avec ardeur la grâce dont ils ont besoin pour demeurer soumis à sa sainte Volonté. Car, malgré leurs bonnes dispositions actuelles, ils n’en ont pas moins à lutter contre leurs propres passions, à cause de l’inclination au mal que nous portons tous en dedans de nous-même. Et cela est si vrai que, fussions-nous réellement justes, nous serions encore pour nous-mêmes un très grand danger ici-bas. Oui, nous devrions craindre 1 « qu’entraînés et séduits par les convoitises qui combattent dans nos membres » nous n’abandonnions le chemin du salut. C’est pour nous prémunir contre ce danger que Notre-Seigneur Jésus-Christ nous dit2: « Veillez et priez, afin de ne pas entrer en tentation ; car l’esprit est prompt, mais la chair est faible. »
C’est qu’en effet il n’est pas donné à l’homme, même à celui qui a été justifié par la Grâce de Dieu, et qui la possède, de dompter les appétits de la chair au point qu’ils ne se révoltent plus jamais. La Grâce de Dieu, à la vérité, guérit l’âme de ceux qui ont été justifiés par elle, mais elle ne guérit point la chair. Et c’est ce qui a fait dire à l’Apôtre Saint Paul3: « Je sais que le bien n’habite point en moi, c’est-à-dire dans ma chair. » Dés le moment même où le premier homme eut perdu la justice originelle, qui, comme un frein, retenait toutes ses passions dans l’ordre, la raison est devenue radicalement impuissante à les contenir dans le devoir, et à les empêcher de désirer ce qu’elle-même repousse. C’est pourquoi l’Apôtre nous dit que le péché, c’est-à-dire, un foyer de péché, habite dans la chair de l’homme, afin de nous faire bien comprendre qu’il n’est pas en nous pour un temps et comme un hôte qui passe, mais que, tant que nous vivons, il demeure en nous comme dans sa propre et perpétuelle habitation.
Ainsi donc, puisque nous sommes sans cesse aux prises avec des ennemis domestiques et intérieurs, il nous est facile de comprendre que nous devons chercher et trouver en Dieu notre secours, en Lui demandant que sa Volonté se fasse en nous.
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(1) Jac., 4, 1. — (2) Matth., 26, 41. — (3) Rom., 7, 18.
A suivre : § III. — CE QUE C’EST QUE LA VOLONTÉ DE DIEU.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.§ III. — CE QUE C’EST QUE LA VOLONTÉ DE DIEU.
Il ne faut pas laisser ignorer aux Fidèles quelle est la portée de cette demande. Sans entrer dans toutes les explications que les Docteurs scolastiques ont données sur cette question avec autant d’utilité que d’abondance, disons que la Volonté de Dieu dont il s’agit ici, est celle que l’on appelle communément la volonté de signe, c’est-à-dire ce que Dieu nous a ordonné ou conseillé de faire ou d’éviter.
Ainsi, sous le nom de volonté, nous comprenons tout ce qui a été établi, soit dans l’ordre de la Foi, soit dans l’ordre des mœurs, pour nous procurer le bonheur céleste ; enfin tout ce que Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a ordonné ou défendu soit par Lui-même, soit par son Eglise. C’est de cette volonté que l’Apôtre nous dit1: « Ne soyez point impudents, mais comprenez quelle est la Volonté de Dieu. »
Lors donc que dans notre Prière nous disons à Dieu que votre Volonté soit faite, nous demandons avant tout à notre Père céleste de nous donner la force d’obéir à ses Commandements et de le servir dans la sainteté et la justice tous les jours de notre vie.
De faire tout selon sa volonté et son bon plaisir. De nous acquitter de tous les devoirs qui nous sont prescrits dans nos Saints Livres.
D’accomplir sous sa conduite et par son impulsion tout ce qui convient à ceux qui sont nés non de la chair, mais de Dieu 1, suivant l’exemple de Jésus-Christ, qui s’est fait obéissant jusqu’à la mort et la mort de la Croix. 2. Enfin d’être prêts à tout souffrir plutôt que de nous écarter en rien de sa Volonté.
Mais nul ne saurait réciter cette demande avec un amour plus intense et une ardeur plus vive que celui à qui il a été donné de comprendre la dignité sublime du Chrétien qui obéit à Dieu. Celui-là sent toute la vérité de cette parole: servir Dieu et Lui obéir, c’est régner ; et de celle-ci de Notre-Seigneur3: « Quiconque fera la Volonté de mon Père qui est dans les cieux, sera mon frère, ma sœur, et ma mère, c’est-à-dire. Je lui demeurerai attaché par les liens les plus étroits de la bienveillance et de l’amour. »
Parmi les saints, il n’en est presque point qui n’aient fait de la précieuse faveur renfermée dans cette demande, l’objet de leurs prières les plus instantes. très souvent même ils se sont servis pour cela de paroles aussi belles que variées. Mais l’un des plus admirables et des plus touchants dans cette diversité de prières, c’est David. tantôt il dit 4: « Faites que mes voies se dirigent vers l’observation de vos Commandements ; tantôt: conduisez-moi dans la voie de vos Commandements ; d’autres fois: dirigez mes pas selon votre parole et ne permettez pas que l’injustice domine en moi ; ou bien: donnez-moi l’intelligence, pour que je connaisse vos préceptes. Enseignez-moi vos jugements, et donnez-moi l’intelligence pour que j’entende vos témoignages. » Il répète et retourne la même pensée dans une multitude d’autres endroits, qu’il sera bon de signaler et d’expliquer avec soin aux fidèles, afin qu’ils comprennent parfaitement la grandeur et l’abondance de tous les biens renfermés dans cette demande.
En second lieu…
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(1) Eph., 5, 17. — (1) Joan., 1,13. — (2) Philipp., 2, 8.— (3) Matth., 12, 50. — (4) Psal., 118, 5, etc.
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Re: Notre Père : explication du Saint Concile de Trente
QUE VOTRE VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.§ III. — CE QUE C’EST QUE LA VOLONTÉ DE DIEU.(suite)
En second lieu, lorsque nous disons: que votre Volonté soit faite, nous détestons les œuvres de la chair, dont l’Apôtre a dit: les œuvres de la chair, c’est-à-dire toutes sortes d’impuretés sont manifestes, etc. Et: si vous vivez selon la chair, vous mourrez. Dès lors nous demandons à Dieu de ne pas nous laisser accomplir ce que les sens, les passions et notre faiblesse pourraient nous conseiller, mais de régler notre volonté sur la sienne.
Les voluptueux, dont les pensées et les affections sont absorbées tout entières par l’amour du plaisir, sont bien éloignés de cette sainte Volonté de Dieu. Emportés par leurs passions, ils se précipitent à la conquête de ce qu’ils ont désiré, et placent le bonheur dans la satisfaction de leurs criminelles convoitises. Et ils en viennent à cet excès, de regarder comme heureux quiconque possède tout ce qu’il désire. nous, au contraire, nous demandons à Dieu, comme dit l’Apôtre 1, « de ne point noue laisser aller à contenter la chair dans ses convoitises ; mais de faire la Volonté de Dieu. »
Cependant, il faut convenir que c’est une chose difficile pour nous de demander à Dieu qu’Il ne contente pas nos passions. Sous ce rapport, notre esprit est difficile à persuader. D’une part, en faisant cette demande, nous paraissons avoir de la haine contre nous-mêmes ; et, de l’autre, ceux qui sont entièrement attachés à leurs corps, nous en font un crime et une folie. Mais subissons volontiers ce reproche de folie pour l’amour de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous dit clairement 1: « Si quelqu’un veut venir après Moi, qu’il se renonce lui-même. »
Ne savons-nous pas, d’ailleurs, qu’il vaut infiniment mieux désirer ce qui est juste et raisonnable que d’atteindre et posséder ce qui est contraire à la raison, à la vertu et à la Loi de Dieu ? Et celui-là n’est-il pas bien plus à plaindre, qui a obtenu ce qu’il recherchait inconsidérément et sous l’impulsion de la passion, que celui qui demeure privé même des choses légitimes qu’il souhaitait ? Au reste, non seulement nous demandons à Dieu de nous refuser l’objet de nos désirs naturels, puisqu’il est constant que nos désirs sont déréglés, mais encore de ne pas nous accorder ce que parfois nous demandons comme une chose qui nous paraît bonne, sous l’inspiration et la suggestion du démon, qui se transforme alors en ange de lumière.
Certes, le Prince des Apôtres…
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(1) Rom., 13, 14. — (1) Matth., 16, 24.
Dernière édition par Louis le Lun 06 Juil 2015, 6:53 pm, édité 1 fois (Raison : Présentation.)
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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