Le Sacré-Coeur.

Introduction

a) Sujet de l’Encyclique

104.

Tout récemment, comme vous le savez, Nous avons ordonné par lettre officielle que, d'après la coutume et les normes des anciens, l'Année Sainte soit prochainement célébrée dans cette ville aimée. Dans l'espoir et l'intention de rendre plus fervente la célébration de cette solennité très sainte, Nous avons projeté de vous recommander aujourd'hui une dévotion toute spéciale.

Si tous les fidèles Nous obéissent de cœur, avec une volonté unanime et joyeuse, Nous sommes fondé à en attendre, pour le nom chrétien comme aussi pour l'universelle société des hommes, des fruits merveilleux et durables.

Maintes fois Nous nous sommes fidèlement efforcé de protéger et de mettre en une plus vive lumière cette forme excellente de piété qu'est le culte du Sacré Cœur de Jésus. Nous suivions en cela l'exemple de Nos prédécesseurs, Innocent XII, Benoît XIII, Clément XIII, Pie VI, Pie VII et Pie IX. Ce but, Nous l'avons poursuivi surtout par Notre décret du 28 juin 1889, par lequel Nous avons élevé cette solennité au rite de première classe.

Mais maintenant se présente à Notre esprit une forme d'hommage plus excellente encore : elle sera comme la plénitude et le couronnement de tous les honneurs que l'on a coutume de rendre au Sacré-Cœur, et Nous avons confiance qu'elle sera très agréable à Jésus-Christ Rédempteur.

Introduction

b) Projet déjà ancien

105.

D'ailleurs, ce projet dont Nous parlons, ce n'est pas la première fois qu'il est mis en question. En effet, il y a à peu près vingt-cinq ans, à l'approche des solennités que ramenait le deuxième centenaire du jour où la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque avait reçu du Ciel le mandat de propager le culte du divin Cœur, des suppliques émanant non seulement de personnes privées, mais aussi d'évêques furent adressées de partout et en grand nombre à Pie IX, pour lui demander de bien vouloir consacrer tout  le  genre  humain au très auguste Cœur de Jésus.

On jugea opportun de différer, pour que la décision fût plus mûrie. En attendant, les cités obtinrent la permission de se consacrer séparément au Sacré-Cœur, si cela leur agréait, et une formule de consécration fut prescrite.

Aujourd'hui, de nouveaux motifs sont survenus, et Nous jugeons l'heure opportune d'accomplir ce dessein.

I.  Droits du Christ à nos hommages

a) Droit inné : Il est Roi et Maître

106

Cet universel et magnifique témoignage de soumission et d'amour convient pleinement à Jésus-Christ, car il est le Prince et le Maître suprême. Son empire, en effet, ne s'étend pas seulement sur les nations catholiques, ni seulement  sur les  hommes purifiés  dans l'eau  du baptême et qui, à s'en tenir au droit, appartiennent à l'Eglise, bien que des opinions erronées les en séparent ou que la discorde les arrache à son amour. Mais son empire embrasse aussi tous ceux qui vivent en dehors de la foi chrétienne ; c'est donc une vérité incontestable que tout le genre humain est sous la puissance de Jésus-Christ. Celui qui est le Fils unique de Dieu le Père, qui a la même substance que lui, qui est la splendeur de sa gloire et la figure de sa substance (1), celui-là, nécessairement, possède tout en commun avec le Père ; il a donc aussi le pouvoir souverain de toutes choses.

Pour cette raison, le Fils de Dieu dit de lui-même par la bouche du prophète : Pour moi, j'ai été établi roi sur Sion, sa montagne sainte... Le Seigneur m'a dit : Tu es mon Fils, c'est moi qui t’ai engendré aujourd'hui. Demande-moi, et je te donnerai les nations en héritage et je te ferai posséder jusqu'aux extrémités de la terre  (2). Par ces paroles, il déclare avoir reçu de Dieu pouvoir tant sur l'Eglise universelle représentée par la montagne de Sion que sur le reste de la terre, jusqu'à ses plus lointaines limites.
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(1) Hébr.  I, 3. — (2) Ps. II, 6-8.

I.  Droits du Christ à nos hommages

a) Droit inné : Il est Roi et Maître  (suite)

107

Quant à la base de cette souveraine puissance, ces paroles : Tu es mon Fils l'expliquent suffisamment. Car, par le fait même qu'il est Fils du Roi de tout ce qui est, il est héritier de son universelle puissance ; de là ces paroles : Je te donnerai les nations en héritage , et les paroles semblables de l'apôtre saint Paul : Il l'a établi héritier en toutes choses (3).

Il faut pourtant surtout considérer ce qu'affirme Jésus-Christ de son pouvoir, non plus par la voix de ses apôtres ou de ses prophètes, mais par sa propre bouche. Au proconsul romain qui l'interroge : Tu es donc roi ? il répond sans l'ombre d'hésitation : Tu le dis, je suis roi (4). Et il confirme la grandeur de cette puissance et l'universalité de ce pouvoir par ces paroles plus évidentes encore adressées à ses Apôtres : Toute puissance m'a été donnée au ciel et sur la terre (1).

108

Si donc toute puissance est donnée au Christ, il s'ensuit nécessairement que son autorité est souveraine, absolue, indépendante de la volonté de personne, sans rien qui l'égale ni lui ressemble ; et comme cette puissance lui est donnée au ciel et sur la terre, il faut que le ciel et la terre lui soient soumis.

109
Et, de fait, ce droit sans pareil et propre à lui seul, Jésus-Christ l'exerça quand il commanda aux Apôtres de propager sa doctrine, de réunir les hommes en une seule Eglise par le bain du salut, d'imposer des lois que nul ne pût méconnaître sans mettre en péril son salut éternel.

(3) Hébr. I, 2. — (4) S. JEAN XVIII, 37. — (1) S. MATTH. XXVIII, 18.

I. Droits du Christ à nos hommages

b) Droit acquis :

1. Par la Rédemption

110

Ce n'est pas tout. L'autorité du Christ ne lui vient pas seulement d'un droit de naissance, comme Fils unique de Dieu, mais encore en vertu d'un droit acquis. Lui-même, en effet, nous a arrachés à la puissance des ténèbres (2). Lui-même s'est livré pour la rédemption de tous (3). Non seulement les catholiques, non seulement ceux qui ont reçu le baptême chrétien, mais tous les hommes sans exception deviennent pour lui un peuple conquis (4).

Aussi saint Augustin dit-il avec raison à ce sujet : « Vous demander ce qu'il a acheté ? Voyez le prix qu'il a donné et vous saurez ce qu'il a acheté. Le prix, c'est le sang du Christ. Qu'est-ce qui peut avoir pareille valeur ? quoi ? si ce n'est le monde entier, si ce n'est tous les peuples ? C'est pour tout l'univers qu'il a donné tout ce qu'il a donné (5). »

111

Mais pourquoi les infidèles eux-mêmes tombent-ils sous la puissance et la domination de Jésus-Christ ? Saint Thomas nous en explique parfaitement la raison. En effet, après avoir cherché si la puissance judiciaire du Christ s'étend sur tous les hommes, il affirme que cette puissance judiciaire accompagne la puissance royale, et il conclut nettement : « Tout est soumis au Christ quant à la puissance, bien que tout ne lui soit pas encore soumis, quant à l'exercice de cette puissance (1). » Ce pouvoir du Christ et cette autorité sur les hommes s'exercent par la vérité, par la justice et surtout par la charité.
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(2) Col. I, 13. — (3) I Tim. II, 6. — (4) S. PIERRE, I Epître II, 9. — (5) S. AUGUSTIN, Tract. CXX in Joan. PL 35, 1953. — (1) S. THOMAS, Somme tbêol. III, q. 59, art. 4 ad 2.

I.  Droits du Christ à nos hommages

b) Droit acquis :

2. Par notre consécration volontaire

112

Mais, à ce double fondement de sa puissance et de son empire, le Christ nous permet avec bonté d'ajouter, si nous voulons, la consécration volontaire. Or, Jésus-Christ, Dieu et Rédempteur, est riche de la possession complète et parfaite de tout ce qui est. Pour nous, au contraire, si grande est notre pauvreté et notre indigence que nous n'avons rien qui nous appartienne et que nous puissions lui offrir en présent. Et toutefois, dans sa bonté et son amour infinis, il n'oppose pas le moindre refus à ce que nous lui donnions et consacrions ce qui est son bien, comme si nous en étions les maîtres. Non seulement il ne le refuse pas, mais il le désire et le demande : « Mon fils, donne-moi ton cœur. » Il est donc vraiment en notre pouvoir de lui faire don de notre volonté et de notre affection. Car, en nous consacrant à lui, non seulement nous reconnaissons et acceptons son autorité ouvertement et avec joie, mais encore affirmons que si ce que nous lui offrons était à nous, nous lui en ferions présent de tout notre cœur ; nous le supplions ainsi de vouloir bien recevoir de nous cela même qui, en réalité, lui appartient. Telle est la portée de l'acte dont il s'agit, tel est le sens de Nos paroles.

113

Puisque le Sacré-Cœur est un symbole et une image de l'amour infini de Jésus-Christ, amour qui nous pousse à l'aimer en retour, il est donc bien naturel de se consacrer à son Cœur très auguste : agir ainsi, c'est faire don de soi, c'est se lier à Jésus-Christ, car tout honneur, tout hommage et piété envers le Sacré-Cœur s'adresse en réalité au Christ lui-même.

C'est pourquoi Nous engageons et Nous exhortons tous ceux qui connaissent et aiment le Cœur divin à accomplir avec ardeur cette consécration : et ce serait Notre vif désir que tous les fidèles l'accomplissent le même jour, afin que les prières de tant de milliers de cœurs faisant au Seigneur le même don fussent au même instant portées au temple céleste.

114

Mais n'aurons-nous pas une pensée pour ces multitudes innombrables qui n'ont pas encore vu briller la vérité chrétienne ?

Nous tenons la place de Celui qui est venu sauver ce qui était perdu, de Celui qui a offert son sang pour le salut du genre humain tout entier.

Aussi mettons-Nous Nos soins assidus à attirer à la véritable vie les malheureux assis à l'ombre de la mort : partout Nous leur envoyons des messagers du Christ pour les instruire. Et maintenant, plein de compassion pour leur sort, Nous les recommandons d'une façon plus spéciale au Sacré Cœur de Jésus et, autant qu'il est en Nous, Nous les lui consacrons.

II.   Effets de cette consécration

a) Pour les individus

115.

Ainsi cette consécration qu'à tous Nous conseillons sera pour tous d'un grand profit. Après l'avoir accomplie, ceux qui connaissent et aiment Jésus-Christ sentiront aisément croître leur foi et leur amour. Ceux qui, tout en connaissant le Christ, négligent ses préceptes et sa loi, ceux-là pourront puiser dans ce Cœur sacré la flamme de la charité. Quant aux victimes, plus malheureuses encore, d'une superstition aveugle, nous implorerons pour elles d'un cœur unanime le secours céleste : puisse Jésus-Christ régner sur elles non seulement « par sa puissance », mais encore par « l'exercice de cette puissance » ; et cela non seulement dans un siècle à venir, quand sur tous il accomplira sa volonté par la récompense des uns et le châtiment des autres, mais encore dès cette vie mortelle, par le don qu'il leur fera de la foi et de la sainteté. Par la pratique de ces vertus, puissent ces hommes honorer Dieu comme il convient, et tendre au bonheur éternel du ciel.

II.   Effets de cette consécration

b) pour les nations et l’Église

116

Une telle consécration apporte aussi aux Etats l'espérance d'une situation meilleure. Elle peut, en effet, établir et rendre plus étroits les liens qui, dans l'ordre naturel, unissent à Dieu les affaires publiques. En ces derniers temps surtout on a pris à cœur de dresser comme un mur entre l'Eglise et la société civile. Dans la constitution et l'administration des Etats, on ne compte pour rien l'autorité du droit sacré et divin ; on a pour but d'enlever à la religion toute influence sur le cours de la vie civile.

Le résultat de cette façon d'agir, c'est la disparition presque complète de la foi du Christ dans la société : si c'était possible, on chasserait Dieu lui-même de la terre. Lorsque les esprits s'enflent d'un tel orgueil, est-il surprenant que la plus grande partie du genre humain soit livrée à des troubles politiques et ballottée par des flots qui ne laissent personne à l'abri de la crainte et du danger ? Les bases les plus solides du salut public s'écroulent nécessairement lorsqu'on méprise la religion.

Pour infliger à ses ennemis acharnés un châtiment juste et mérité, Dieu les a abandonnés à leurs propres passions, en sorte qu'ils se livrent à leurs penchants et se consument dans les excès de leur licence.

De là ces maux innombrables qui depuis longtemps nous accablent et nous forcent à demander le secours de Celui qui seul a la puissance de les écarter. Celui-là, qui est-il, sinon Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, car il n'y a nul autre nom sous le ciel donné aux hommes par lequel nous puissions être sauvés (1).

117

Il faut donc recourir à lui, qui est la voie, la vérité et la vie. On a erré, qu'on revienne dans le droit chemin ; les ténèbres ont obscurci les esprits, que la lumière de la vérité dissipe cette ombre. La mort nous a saisis, conquérons la vie. Alors nous pourrons guérir de si nombreuses blessures ; alors le droit reprendra vie dans l'espoir de recouvrer son antique autorité ; les richesses de la paix reparaîtront, les glaives tomberont et les armes s'échapperont des mains, lorsque tous recevront joyeusement l'autorité du Christ et s'y soumettront, lorsque toute langue confessera que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu son Père (2).
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(1) Act. IV, 12. —  (2) Phil. II, 11.

Conclusion

118

Quand l'Eglise, encore toute proche de ses origines, gémissait sous le joug des Césars, une croix apparut dans le ciel à un jeune empereur ; elle était le présage et la cause d'un insigne et prochain triomphe. Aujourd'hui, un autre symbole divin, présage très heureux, apparaît à nos yeux : c'est le Cœur très sacré de Jésus, surmonté de la croix et resplendissant d'un éclat incomparable au milieu des flammes. En lui nous devons placer toutes nos espérances. C'est à lui que nous devons demander et de lui qu'il faut attendre le salut de l'humanité.

Enfin, il est un autre motif, d'ordre privé, c'est vrai, mais légitime et sérieux, que Nous ne voulons pas passer sous silence et qui Nous excite à mettre Notre projet à exécution : il y a peu de temps, Dieu, auteur de tout bien, Nous a sauvé d'une maladie dangereuse.

Pour manifester publiquement Notre reconnaissance et rappeler le souvenir d'un si grand bienfait, Nous voulons multiplier les hommages rendus au Sacré-Cœur.

En conséquence, nous ordonnons que les 9, 10 et 11 du mois de juin prochain, des prières déterminées se disent dans l'église de chaque localité, dans l'église principale de chaque ville. Pendant ces trois jours, on ajoutera aux autres invocations les litanies du Sacré-Cœur approuvées par Notre autorité ; le dernier jour, on récitera la formule de consécration que Nous vous envoyons, Vénérables Frères, en même temps que cette Lettre.

Comme gage des bienfaits divins et en témoignage de Notre bienveillance, Nous accordons très affectueusement dans le Seigneur, à vous, à votre clergé et au peuple que vous dirigez, la Bénédiction Apostolique.

Donné à Rome, près St-Pierre, le 25 mai de l'an 1899, de Notre pontificat le vingt-deuxième.

LÉON XIII, PAPE.

Conclusion

119

Formule de consécration au Sacré Cœur de Jésus

Très doux Jésus, Rédempteur du genre humain, jetez un regard sur nous, qui sommes humblement prosternés devant votre autel. Nous sommes à vous, nous voulons être à vous ; et, afin de pouvoir vous être plus fermement unis, voici que, en ce jour, chacun de nous se consacre spontanément à votre Sacré-Cœur.

Beaucoup ne vous ont jamais connu ; beaucoup ont méprisé vos commandements et vous ont renié. Miséricordieux Jésus, ayez pitié des uns et des autres, et ramenez-les tous à votre Sacré-Cœur.

Seigneur, soyez le Roi non seulement des fidèles qui ne se sont jamais éloignés de vous, mais aussi des enfants prodigues qui vous ont abandonné ; faites qu'ils rentrent bientôt dans la maison paternelle pour qu'ils ne périssent pas de misère et de faim.

Soyez le Roi de ceux que des opinions erronées ont trompés et de ceux que la discorde a désunis ; ramenez-les au port de la vérité et à l'unité de la foi, afin que bientôt il n'y ait plus qu'un troupeau et qu'un pasteur.

Soyez enfin le Roi de tous ceux qui sont encore attachés aux antiques superstitions païennes, et ne refusez pas de les arracher aux ténèbres pour les conduire à la lumière et au royaume de Dieu.

Accordez, Seigneur, à votre Eglise une liberté sûre et sans entraves ; accordez à tous les peuples l'ordre et la paix ; faites que d'un pôle du monde à l'autre une seule voix retentisse :

« Loué soit le divin Cœur qui nous a acquis le salut ; à lui gloire et honneur dans tous les siècles. » Ainsi soit-il. (Voir note  suivante : )

Formule de consécration au Sacré Cœur de Jésus

Très doux Jésus, Rédempteur du genre humain, jetez un regard sur nous, qui sommes humblement prosternés devant votre autel. Nous sommes à vous, nous voulons être à vous ; et, afin de pouvoir vous être plus fermement unis, voici qu’en ce jour, chacun de nous se consacre spontanément à votre Sacré-Cœur.

Beaucoup ne vous ont jamais connu ; beaucoup ont méprisé vos commandements et vous ont renié. Miséricordieux Jésus, ayez pitié des uns et des autres, et ramenez-les tous à votre Sacré-Cœur.

Seigneur, soyez le Roi non seulement des fidèles qui ne se sont jamais éloignés de vous, mais aussi des enfants prodigues qui vous ont abandonné ; faites qu'ils rentrent bientôt dans la maison paternelle pour qu'ils ne périssent pas de misère et de faim.

Soyez le Roi de ceux qui vivent dans l’erreur ou que la discorde a séparé de vous; ramenez-les au port de la vérité et à l'unité de la foi, afin que bientôt il n'y ait plus qu'un troupeau et qu'un pasteur.

Soyez enfin le Roi de tous ceux qui sont encore égarés dans les ténèbres de l’idolâtrie ou de l’Islamisme, et ne refusez pas de les attirer tous  à la lumière de votre royaume.

Regardez enfin avec miséricorde les enfants de ce peuple qui fut jadis votre préféré ; que sur eux aussi descende, mais aujourd’hui en baptême de vie et de rédemption, le Sang qu’ils appelaient sur leurs têtes.

Accordez, Seigneur, à votre Eglise une liberté sûre et sans entraves ; accordez à tous les peuples l'ordre et la paix ; faites que d'un pôle du monde à l'autre une seule voix retentisse :

« Loué soit le divin Cœur qui nous a acquis le salut ; à lui gloire et honneur dans tous les siècles. » Ainsi soit-il.

Introduction :

La promesse du Christ d’assister son Église

120

Notre Rédempteur très miséricordieux venait d'opérer, sur le bois de la Croix, le salut du genre humain ; sur le point de remonter de ce monde vers son Père, il dit à ses Apôtres et à ses disciples pour les consoler : Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde (1). Cette parole, outre qu'elle est très agréable à entendre, est génératrice d'espérance et de sécurité ; c'est elle, Vénérables Frères, qui Nous réconforte toutes les fois que du haut de ce Siège, comme d'un observatoire élevé, Nous parcourons du regard soit l'ensemble de la société humaine entière, accablée de maux et de misères si nombreuses, soit l'Eglise elle-même, livrée à des attaques et à des embûches incessantes.

C'est cette divine promesse qui, à l'origine, releva le courage des Apôtres abattus, les enflamma d'un zèle ardent pour répandre à travers le monde entier la semence de la doctrine évangélique ; c'est elle encore qui, dans la suite, a soutenu l'Eglise dans sa lutte victorieuse contre les portes de l'enfer. L'assistance de Notre-Seigneur Jésus-Christ, il est vrai, n'a jamais fait défaut à son Eglise. Toutefois, son secours et son appui furent d'autant plus présents qu'elle était assaillie de dangers ou de calamités plus graves ; les remèdes les mieux en rapport avec les conditions des temps et des circonstances lui étant alors fournis par cette divine Sagesse qui atteint avec force d'une extrémité du monde à l'autre et dispose tout avec douceur (2).
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(1)S. MATTH. XXVIII, 20. — (2) Sagesse VIII, 1.

Introduction :

Objet de l’Encyclique

Son opportunité

121

Même en ces derniers temps on ne peut vraiment dire que la main du Seigneur se soit raccourcie (1), et plus spécialement lorsqu'une erreur s'insinua et se propagea si loin que l'on pût craindre que, les âmes détournées de l'amour de Dieu et de la familiarité avec lui, les sources mêmes de la vie chrétienne vinssent, en quelque sorte, à se dessécher. Les plaintes que le Christ très aimant fit entendre dans ses apparitions à Marguerite-Marie Alacoque, les désirs aussi et les volontés qu'il signifia à l'adresse des hommes et pour leur bien, certains peut-être les ignorent encore, d'autres les négligent. C'est pour cette raison, Vénérables Frères, que Nous voulons vous entretenir quelques instants du devoir qui nous incombe de faire amende honorable au Cœur sacré de Jésus, pour Nous servir de l'expression courante. Nous avons la conviction que vous déploierez votre zèle pour instruire chacun de vos fidèles de toute la doctrine que Nous allons vous transmettre et que vous les encouragerez à la mettre en pratique.
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(1) ISAIE  LIX,  1.

I. Le cœur de Jésus

a) Symbole de charité et de paix

122

Parmi les nombreuses preuves de l'infinie bonté de notre Sauveur, il en est une qui brille d'un éclat tout particulier. Alors que la charité des fidèles allait se refroidissant, ce fut la charité même de Dieu qui se proposa pour être honorée d'un culte spécial, et les trésors de sa bonté se répandirent largement, grâce à la forme du culte rendu au Cœur sacré de Jésus, dans lequel sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science (2) .

Jadis, à la sortie de l'arche de Noé, Dieu notifia par un signe son pacte d'amitié avec le genre humain, en faisant briller un arc resplendissant dans les nuées (3). De même, à l'époque si troublée où se répandait l'hérésie, perfide entre toutes, du jansénisme qui étouffait l'amour et la piété dus à Dieu, en le présentant moins comme un Père digne d'amour que comme un juge à craindre pour sa sévérité implacable, Jésus vint, dans sa bonté infinie, nous montrer son Cœur sacré tel un symbole de paix et de charité offert aux regards des peuples ; c'était un gage assuré de victoire dans les combats. Aussi Notre prédécesseur d'heureuse mémoire, Léon XIII, considérant justement, dans sa Lettre encyclique Annum sacrum, l'admirable opportunité du culte envers le Cœur sacré de Jésus, n'hésitait pas à dire : « Quand l'Eglise, encore toute proche de ses origines, gémissait sous le joug des Césars, une croix apparut dans le ciel à un jeune empereur ; elle était le présage et la cause d'un insigne et prochain triomphe. Aujourd'hui, un autre symbole divin d'heureux augure apparaît à nos yeux : c'est le Cœur très sacré de Jésus, surmonté de la croix et resplendissant d'un éclat incomparable au milieu des flammes. Nous devons placer en lui toutes nos espérances ; c'est à lui que nous devons demander le salut des hommes, et c'est de lui qu'il faut l'attendre (1). »
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(1) Col. II, 3. — (2) Genèse IX,  14. — (1) LÉON  XIII,  Lettre encyclique Annum Sacrum,  25  mai  1899. ASS xxxi (1899) 650-651. Cf. SVS n. 118.

I. Le cœur de Jésus

b) Synthèse de la religion

c) Règle de vie parfaite

123

Et c'est à juste titre, Vénérables Frères. Car ce signe éminemment propice et la forme de dévotion qui en découle ne renferment-ils point la synthèse de la religion et la norme d'une vie d'autant plus parfaite qu'elle achemine les âmes à connaître plus profondément et plus rapidement le Christ Seigneur, à l'aimer plus ardemment et à l'imiter avec plus d'application et plus d'efficacité ? Qu'on ne s'étonne point dès lors que Nos prédécesseurs aient constamment défendu cette forme si excellente de dévotion contre les accusations de ses détracteurs, qu'ils l'aient couverte de louanges et qu'ils aient mis tout leur zèle à la propager, suivant les exigences des temps et des lieux. Sous le souffle de Dieu, la piété des fidèles envers le Cœur sacré de Jésus n'a point cessé de croître ; d'où l'éclosion de toutes parts des confréries vouées à la diffusion du culte du Sacré-Cœur ; de là encore l'usage de la communion du premier vendredi du mois, conforme aux désirs du Christ-Jésus lui-même, et maintenant répandu à peu près partout.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

1. La consécration

124

Parmi toutes ces pratiques de la dévotion au Sacré-Cœur, il en est une remarquable qui mérite d'être signalée : c'est la pieuse consécration par laquelle, offrant à Dieu nos personnes et tous les biens que nous tenons de son éternelle bonté, nous les vouons au divin Cœur de Jésus. Ce devoir de piété que Notre-Seigneur voudrait voir tous les hommes lui rendre et qu'il réclame moins en raison de ses droits qu'en vertu de son immense amour pour nous, il l'enseigna lui-même à Marguerite-Marie, la très fidèle servante de son Cœur. Elle et son directeur spirituel, Claude de la Colombière, furent les premiers à le lui offrir ; avec le temps, d'autres ont suivi : des hommes isolés d'abord, puis des familles, des associations, enfin même des magistrats, des villes et des nations.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

1. La consécration

a)  Pratique et diffusion

125

Au siècle dernier et jusqu'au nôtre, des impies en sont venus, par leurs machinations, à faire repousser l'empire du Christ et à provoquer une guerre ouverte contre l'Eglise ; on promulgue des lois et des décrets contraires au droit divin aussi bien qu'au droit naturel ; bien plus, on clame dans des assemblées : Nous ne voulons pas qu'il règne sur nous (1). Mais, en revanche, par la consécration dont Nous venons de parler, une voix unanime éclate, celle des fidèles du Sacré-Cœur, s'opposant vaillamment à celle de ses ennemis, pour venger sa gloire et affirmer ses droits : Il faut que le Christ règne (2) ; — Que votre règne arrive (3). Voilà pourquoi, fort heureusement, le genre humain tout entier — que le Christ, en qui seul tout peut être restauré(4) , possède par droit de nature — fut, au début de ce siècle, consacré au Sacré-Cœur par Léon XIII, Notre prédécesseur de glorieuse mémoire, aux applaudissements de l'univers chrétien (5).
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(1) S. Luc XIX, 14.  —  (2)I Cor. XV, 25. — (3) S. MATTH. VI, 10. — (4) Cf. Eph. I, 10. — (5) LÉON  XIII,  Lettre encyclique Annum Sacrum,  25  mai  1899. ASS XXXI (1899) 651. Cf. SVS n. 119.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

1. La consécration

b)  Consécration et fête du Sacré-Cœur

126.

Ces débuts si heureux et si réconfortants, ainsi que Nous le disions dans Notre Lettre encyclique Quas primas — en donnant suite aux vœux persévérants et nombreux des évêques et des fidèles —, Nous avons pu, avec la grâce de Dieu, les compléter et les parachever quand, à l'issue de l'Année Sainte, Nous avons institué la fête du Christ Roi de l'univers et prescrit de la célébrer solennellement dans toute la chrétienté. Ce faisant, Nous n'avons pas seulement mis en lumière l'empire souverain du Christ sur toutes choses, sur la société tant civile que domestique et sur chaque homme en particulier, mais Nous avons encore fait entrevoir les joies de ce jour, heureux entre tous, où le genre humain, de son plein gré, se soumettra à la souveraineté infiniment douce du Christ-Roi. Pour cette raison, Nous avons ordonné que dès lors chaque année, au jour fixé pour cette fête, on renouvelât cette consécration, pour en obtenir des grâces plus certaines et plus abondantes, au profit de l'union de tous les peuples par les liens de la charité chrétienne et de la paix dans le Cœur du Roi des rois et du Seigneur des seigneurs.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation


127.

A tous ces hommages, et principalement à cette consécration si féconde, que vient sceller en quelque sorte la fête solennelle du Christ-Roi, il faut ajouter encore autre chose. C'est le sujet, Vénérables Frères, dont il Nous plaît de vous entretenir plus longuement dans cette Lettre : à savoir l'amende honorable ou la réparation selon l'expression courante à offrir au Cœur sacré de Jésus. Si, dans la consécration, le but premier et principal pour la créature est de rendre à son Créateur amour pour amour, il s'ensuit naturellement qu'elle doit offrir à l'égard de l'amour incréé une compensation pour l'indifférence, l'oubli, les offenses, les outrages, les injures qu'il subit: c'est ce qu'on appelle couramment le devoir de la réparation.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation

a)  Motifs de justice  :

128

Si les mêmes raisons nous obligent à ce double devoir, cependant le devoir de réparation et d'expiation s'impose en vertu d'un motif encore plus impérieux de justice et d'amour : de justice d'abord, car l'offense faite à Dieu par nos crimes doit être expiée, et l'ordre violé doit être rétabli par la pénitence ; mais d'amour aussi, car nous devons « compatir au Christ souffrant et saturé d'opprobres », et lui offrir, selon notre petitesse, quelque consolation. Tous nous sommes des pécheurs ; de nombreuses fautes nous chargent ; nous avons donc l'obligation d'honorer Dieu non seulement par notre culte, par une adoration qui rend à sa Majesté suprême de légitimes hommages, par des prières qui reconnaissent son souverain domaine, par des louanges et des actions de grâces pour son infinie bonté ; mais à ce Dieu juste vengeur nous avons encore le devoir d'offrir satisfaction pour nos innombrables péchés, offenses et négligences. Ainsi à la consécration, par laquelle nous nous donnons à Dieu et qui nous mérite d'être voués à Dieu, avec la sainteté et la stabilité qui, suivant l'enseignement du Docteur angélique (1), sont le propre de la consécration, il faut donc ajouter l'expiation qui répare entièrement les péchés ; de peur que, dans sa sainteté, la Souveraine Justice ne nous repousse pour notre impudente indignité et, loin d'agréer notre offrande, ne la rejette.
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(1)  Cf.  S.  THOMAS, Somme théol. II-II, q. 81, art. 8.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation

a)  Motifs de justice  :

α) Sa nécessité

129

En fait, ce devoir d'expiation incombe au genre humain tout entier. Comme nous l'enseigne la foi chrétienne, après la déplorable chute d'Adam, l'homme, infecté de la souillure originelle, esclave de la concupiscence et des plus lamentables dépravations, se trouva ainsi voué à la perte éternelle. De nos jours, des savants orgueilleux nient ces vérités et, s'inspirant de la vieille erreur de Pélage, vantent des vertus innées de la nature humaine qui la conduiraient, par ses seules forces, jusqu'aux cimes les plus élevées. Ces fausses théories de l'orgueil humain, l'Apôtre les réfute en nous rappelant que, par nature, nous étions enfants de colère (2). Dès les débuts, en réalité, la nécessité de cette expiation commune a été reconnue, puisque, cédant à un instinct naturel, les hommes se sont efforcés d'apaiser Dieu par des sacrifices même publics.
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(2)   Eph. II, 3.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation

a)  Motifs de justice  :

β) Subordination au Sacrifice du Christ

130.

Mais aucune puissance créée n'aurait jamais suffi à expier les crimes du genre humain si le Fils de Dieu n'avait assumé la nature humaine pour la relever. Le Sauveur des hommes l'a lui-même annoncé par la bouche du Psalmiste : Vous n'avez voulu ni sacrifice ni ablation, mais vous m'avez formé un corps ; vous n'avez pas agréé les holocaustes pour le péché. Alors j'ai dit : Me voici, je viens (3). Et de fait il s'est vraiment chargé de nos infirmités, il a porté lui-même nos douleurs ; il a été broyé à cause de nos iniquités (4) ; il a porté lui-même nos péchés en son corps sur le bois (5), détruisant l'acte qui était écrit contre nous et nous était contraire avec ses ordonnances ; et il l'a fait disparaître en le clouant à la croix... (1) afin que, morts au péché, nous vivions pour la justice (2).
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(3)  Hébr. X, 5-7. — (4)  ISAIE LIII, 4-5. — (5) S. PIERRE, I Epître II, 24. — (1) Col. II, 14 — (2) S. PIERRE, I Epître II, 24.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation

a)  Motifs de justice  :

γ) Notre participation,

131  

La surabondante Rédemption du Christ nous a fait  remise de toutes nos fautes (3). Cependant, par une admirable disposition de la Sagesse divine, nous devons compléter dans notre chair ce qui manque aux souffrances du Christ pour son corps qui est l'Eglise (4). En conséquence, aux louanges et aux réparations « dont le Christ s'est acquitté envers Dieu au nom des pécheurs » pouvons-nous, et même devons-nous ajouter encore nos louanges et nos expiations.

Mais nous ne devons jamais l'oublier, toute la vertu d'expiation découle uniquement du sacrifice sanglant du Christ, qui se renouvelle sans interruption d'une manière non sanglante sur nos autels, car « c'est toujours une seule et même victime, c'est le même qui s'offre maintenant par le ministère du prêtre et qui s'offrit jadis sur la croix ; seule la manière d'offrir diffère (5). »

C'est pour cette raison qu'au très auguste Sacrifice eucharistique les ministres et le reste des fidèles doivent joindre leur propre immolation, de sorte qu'ils s'offrent eux aussi comme des hosties vivantes, saintes, agréables à Dieu (6) . Bien plus, saint Cyprien ne craint pas d'affirmer que « le sacrifice du Seigneur n'est pas célébré avec la sainteté requise si notre propre oblation et notre propre sacrifice ne correspondent pas à sa Passion (7) ».

Pour cette raison encore, l'Apôtre nous exhorte à « porter dans notre corps la mort de Jésus ( 8 ), » à nous ensevelir avec Jésus et à nous greffer sur lui par la ressemblance de sa mort (9) non seulement en crucifiant notre chair avec ses vices et ses convoitises (10), en fuyant la corruption de la concupiscence qui règne dans le monde (1), mais encore en manifestant la vie de Jésus dans nos corps (2) et, unis à son éternel sacerdoce, à offrir ainsi des dons et des sacrifices pour nos péchés (3).
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 (3) Cf. Col. II, 13. —  (4)  Cf. Col. I, 24. —  (5) Concile de Trente, sess. XXII, ch. 2. Denzinger n. 940. —  (6)  Rom. XII 1. —  (7) S. CYPRIEN, Epist, LXIII, IX. CV 3, 2, p. 708, 8-11. PL 4, 381. —  ( 8 )  II Cor. IV, 10. —  (9) Cf.Rom. VI, 4-5. —  (10) Cf. Gal. v, 24. —  (1) S. PIERRE, II Epître I, 4. —  (2) II Cor. IV, 10. —  (3) Hébr. V, 1.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation

a)  Motifs de justice  :

γ) Notre participation (suite)

132

A ce sacerdoce mystérieux et à cette mission de satisfaire et de sacrifier ne participent pas seulement les ministres choisis par notre Pontife, le Christ Jésus, pour l'oblation immaculée qui se doit faire en son nom divin depuis l'Orient jusqu'à l'Occident (4), mais encore le peuple chrétien tout entier, appelé à bon droit par le Prince des Apôtres race élue, sacerdoce royal (5) ; car soit pour eux-mêmes, soit pour le genre humain tout entier, les fidèles doivent concourir à cette oblation pour les péchés (6), à peu près de la même manière que le Pontife choisi parmi les hommes est établi pour les hommes en ce qui concerne les choses de Dieu (7).

133

Plus notre oblation et notre sacrifice ressembleront au sacrifice du Christ, autrement dit plus parfaite sera l'immolation de notre amour-propre et de nos convoitises, plus la crucifixion de notre chair se rapprochera de cette crucifixion mystique dont parle l'Apôtre, plus abondants seront les fruits de propitiation et d'expiation que nous recueillerons pour nous et pour les autres. Car entre les fidèles et le Christ il existe une admirable relation, semblable à celle qui relie la tête aux divers membres du corps ; mais de plus, par cette mystérieuse communion des saints que professe notre foi catholique, les hommes et les peuples non seulement sont unis entre eux, mais encore avec Celui-là même qui est la tête, le Christ, C'est de lui que tout le corps, coordonné et uni par le lien des membres qui se prêtent un mutuel secours et dont chacun opère selon sa mesure d'activité, grandit et se perfectionne dans la charité ( 8 ). C'est la prière qu'avant de mourir le Christ Jésus, médiateur entre Dieu et les hommes, adressait lui-même à son Père : Que je sois en eux et vous en moi, afin qu'ils soient parfaitement un (9).
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(4) Cf. MALACHIE I, 11. —  (5) S. PIERRE, I Epître II, 9. —  (6) Hébr. V, 2. —  (7) Hébr. V, 1. —  ( 8 ) Eph. IV,15-16. —  (9) S. JEAN XVII, 23.

II. Formes du culte au Sacré-Cœur

2. La réparation

a)  Motifs de justice  :

δ) Union des fidèles entre eux et dans le Christ

134.

Par conséquent, de même que l'union avec le Christ trouve son expression et sa confirmation dans l'acte de consécration, de même l'expiation sert de prélude à cette union en effaçant les péchés ; elle nous perfectionne en nous associant aux souffrances du Christ, elle la parachève enfin en offrant des victimes pour le prochain. Ce fut là bien certainement la miséricordieuse intention de Jésus quand il nous présenta son Cœur portant les insignes de la Passion et d'où s'échappaient des flammes d'amour ; en nous découvrant ainsi la malice infinie du péché, d'une part, et en nous faisant admirer, d'autre part, l'infinie charité du Rédempteur, il voulait nous inspirer une haine encore plus vive du péché et plus d'ardeur à répondre à son amour.