LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN. (Table des Matières in fine.)
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CHAPITRE VII. TRIOMPHE DE LA CHASTETÉ.
2. A cette prière succède un sommeil extatique, pendant lequel deux anges descendent du ciel, et ceignant le jeune athlète d'un cordon miraculeux: "Nous venons, disent-ils, de la part de Dieu, te ceindre du cordon de la chasteté perpétuelle. Le Seigneur a exaucé ta prière, et ce que la fragilité humaine ne saurait mériter, Dieu te l'assure par un don irrévocable."
Ce ne fut point une simple vision, mais une réalité. Les anges serrèrent si fort, que la douleur fit revenir le jeune homme de son extase, et lui arracha un cri involontaire. Des serviteurs accoururent; mais Thomas, dissimulant la faveur qu'il venait de recevoir, les renvoya courtoisement et garda son secret jusqu'à la mort. A cet instant suprême, il le fit connaître à son confesseur et ami, Frère Réginald, lequel, pour l'honneur de Dieu et la glorification du Docteur angélique, révéla sous la foi du serment cette incomparable merveille.
Écoutons maintenant les exclamations enthousiastes que suggère au premier historien de saint Thomas ce triomphe de la chasteté:"O heureuse prison, que les plus beaux rayons de l'intelligence ont illuminée d'une si grande splendeur! O salutaires entraves, qui ont conféré la pleine liberté de l'esprit au contemplateur des choses célestes ! O épreuve qui a produit la force dans la lutte, et la suave ivresse après la victoire ! A l'heure où l'ennemi redoublait d'efforts pour écraser cette belle résistance, la divine grâce en a procuré le triomphe. Marques infaillibles des mérites acquis par la sainteté: assailli par les délices et les injures, l'invincible athlète n'a pu être ni amolli, ni terrassé ! Vaillant champion, jeune soldat déjà aguerri, il a vaincu la chair, cet ennemi domestique, et remporté dans un rude combat une signalée victoire. Aussi mérite-t-il désormais de porter à son front la couronne. Encore voyageur, et hôte du siècle qui passe, Thomas s'est élevé par son triomphe à la hauteur des cieux; le voilà digne de contempler ses immortels concitoyens, digne d'être honoré de la visite des anges, accourus pour le ceindre du cordon de la chasteté. Après ce combat immortel en l'honneur de l'angélique vertu, il n'est plus un homme, mais un Ange !... "
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CHAPITRE VII. TRIOMPHE DE LA CHASTETÉ.
3. Répondons ici à une question que n'auront pas manqué de se poser nos lecteurs.
Ce cordon apporté du ciel était-il un objet palpable, matériel ?
Aucun doute à cet égard, et l'insigne présent des anges est resté l'une des principales richesses de la famille dominicaine (1).
Le B. Jean de Verceil, qui gouvernait l'Ordre à l'époque où mourut saint Thomas, donna la miraculeuse ceinture à son couvent; elle y devint durant plusieurs siècles l'objet d'une vénération toujours croissante. Les efforts de plusieurs papes, de saint Pie V lui-même, ne purent décider les Frères Prêcheurs à s'en dessaisir. La maison de Verceil ayant été détruite en 1799 par les armées françaises, le cordon céleste fut transporté, avec d'autres reliques, au couvent de Chieri, en Piémont, dont il est sans nul doute le plus précieux joyau. Récemment, on l'a renfermé dans un reliquaire de style gothique, vrai chef-d’œuvre d'orfèvrerie, construit d'après un dessin du R. P. Mariano Pavoni, Dominicain italien.
Le cordon angélique est blanc, long de sept palmes, un mètre soixante-cinq environ, composé de fils nombreux d'une finesse telle, que les hommes les plus compétents n'en peuvent déterminer la nature. L'une des extrémités est munie de deux petites boucles dans lesquelles s'engage en glissant l'extrémité opposée, ce qui permettait à saint Thomas de porter toujours ce cordon. La partie destinée à entourer le corps est aplatie, dépassant un peu la largeur d'une paille. Le reste se sépare en deux cordonnets carrés, présentant à distance égale quinze nœuds, en l'honneur sans doute des quinze mystères du Rosaire.
Pour encourager la piété des fidèles, un fils de saint Dominique, le P. Cyprien Uberti, fit faire en 1580 de petits cordons semblables, qui ne tardèrent pas à se répandre dans toute l'Italie.
(1) Bollandistes VII, p.744.
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CHAPITRE VII. TRIOMPHE DE LA CHASTETÉ.
4. Un demi-siècle plus tard, le P. Deurwerders, Dominicain flamand, établit, à l'Université de Louvain, une confrérie sous le nom de Milice angélique. Tous les docteurs, professeurs et élèves de la Faculté de théologie s'y enrôlèrent, prenant l'engagement de porter sans cesse le cordon de saint Thomas, exemple suivi bientôt dans toutes les universités catholiques. En même temps, des personnes de tout sexe et de tout rang, évêques, prêtres, religieux, princes du sang, entraient avec bonheur dans la Milice angélique. Les Clercs réguliers et les Pères de la Compagnie de Jésus l'introduisaient dans leurs collèges.
Qui dira les innombrables fruits de chasteté dont cette dévotion fut la semence ? Le P. Camille Quadrio, Jésuite, écrivait en 1664 qu'il aurait à remplir des volumes, s'il voulait rapporter toutes les faveurs reçues par les fidèles, grâce au Cordon. Saint Louis de Gonzague, qui avait dans sa cellule l'image du Docteur angélique, portait aussi cette ceinture de pureté, au rapport du P. Masnieri, son historien, et la recommandait instamment à ses compagnons; est-il téméraire de penser qu'il lui dut en partie la conservation de son innocence ?
Par décret du 21 mars 1651, le pape Innocent X approuva la Confrérie de la Milice. Après lui, Alexandre VII, Innocent XI, Innocent XII, Pie VII, Pie IX l'enrichirent d'indulgences. Benoît XIII, pape dominicain, lui assigna pour fête patronale la Translation du corps de saint Thomas, 28 janvier. Enfin, dans son bref du 4 août 1880, notre Saint-Père le Pape, Léon XIII, mentionne le miracle du Cordon céleste et la faveur qui en fut la suite, comme un des motifs qui le déterminent à déclarer saint Thomas patron des étudiants.
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CHAPITRE VII. TRIOMPHE DE LA CHASTETÉ.
5. Que la jeunesse de nos écoles soit donc attentive aux enseignements des âges passés et à la voix des souverains pontifes. Les raisons qui engagèrent jadis les fidèles, et particulièrement les étudiants chrétiens, à vouer un culte spécial à saint Thomas d'Aquin pour s'assurer la conservation de l'aimable, vertu, subsistent, et sont même devenues plus pressantes que jamais. Les flots de la corruption montent sans cesse, et des séductions inconnues aux âges de foi assaillent de toutes parts l'âme de l'adolescent. Les secours puisés dans la Confrérie de la Milice angélique seront une armure impénétrable aux traits de l'enfer.
Puissions-nous voir les élèves des séminaires, collèges, pensionnats, de toutes les écoles catholiques en un mot, se ranger sous la bannière de leur angélique patron, s'inscrire dans sa Milice, ceindre son cordon, et, semblables aux soldats d'une nombreuse et vaillante armée, soutenir triomphalement les luttes si difficiles de la chasteté !
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CHAPITRE VIII. LA DÉLIVRANCE — UN DERNIER ASSAUT.
1. Après la terrible épreuve rapportée au chapitre précédent, toute opposition, semble-t-il, devait cesser. Le jour était fait sur l'inébranlable; fermeté du pieux novice; il ne restait plus qu'à lui rendre sa liberté. Il n'en fut rien. Ses liens se resserrèrent, sa prison devint plus étroite, et pour terminer la persécution, il fallut une intervention à laquelle on n'aurait jamais songé. L'empereur Frédéric, informé des vexations que les seigneurs Landolphe et Raynald continuaient d'infliger à leur frère, en témoigna un vif mécontentement, et alla, dit-on, jusqu'à les menacer de mort, s'ils ne remettaient incessamment Frère Thomas entre les mains de ses supérieurs. En les frappant de stupeur, cette menace produisit sur les deux comtes l'effet salutaire qu'aurait dû obtenir la seule crainte de Dieu. Ils avertissent promptement leur mère des volontés du souverain, et la prient d'élargir au plus tôt le prisonnier.
De son côté, Théodora n'espérait plus changer un cœur que la grâce rendait inflexible. La foi reprenant tous ses droits en son âme, elle commençait à craindre la colère divine par une résistance plus prolongée. A sa prière, le comte d'Aquin se laisse persuader, et renonce à la lutte.
Mais qu'il en coûte à l'amour-propre d'avouer une défaite !
Pour simuler une évasion, à laquelle le consentement paternel resterait en apparence étranger, on imagine de faire descendre le captif dans une corbeille par une des fenêtres. Avis en est donné à Frère Jean de Saint-Julien. Cet excellent religieux, saintement attaché à son cher et infortuné novice, avait toujours gardé une ferme confiance de le voir tôt ou tard rendu à l'Ordre.
Au jour fixé, plusieurs religieux venus de Naples se tiennent au pied de la tour témoin de tant de merveilles, et assistent dans une anxiété muette à la périlleuse descente. La corbeille glisse lentement le long de la muraille, et dépose à terre Thomas, qui se trouve dans les bras de ses véritables frères. Tous s'apitoient sur ses malheurs, le félicitent de sa constance, mêlent leurs larmes aux siennes, et bénissent en commun le Père des miséricordes d'une délivrance tant souhaitée. C'est ainsi que le Docteur angélique sortit de sa prison, comme autrefois le Docteur des nations s'échappa de Damas, où un roi barbare le tenait enfermé.
Les Frères Prêcheurs s'en retournèrent à Naples. "Ils tressaillaient dans le Seigneur, dit la chronique, ayant retrouvé leur Joseph, doué comme le fils de Jacob de l'esprit d'intelligence, et plus sage mille fois que tous les sages de l'Égypte."
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CHAPITRE VIII. LA DÉLIVRANCE — UN DERNIER ASSAUT.
2. Cette captivité, marquée par tant de luttes si vaillamment soutenues, fut jugée pour la vie religieuse une probation plus que suffisante; il n'y avait plus lieu de différer la profession. Thomas prononça ses vœux, dans l'église Saint-Dominique, entre les mains du prieur, Agni de Lentino, celui-là même qui lui avait donné le saint habit, deux années auparavant.
On conçoit sans peine avec quelle générosité notre Saint accomplit cet acte de consécration, que lui-même appelle un second Baptême: "consécration qui, en éloignant l'homme religieux des périls du siècle et du tumulte d'un monde corrompu et souvent corrupteur, le voue pour toujours au service des autels, lui fait obtenir le pardon de ses péchés, affermit sa volonté dans le bien sans diminuer sa liberté, et le mettant dans l'heureuse nécessité de tendre sans cesse à la perfection, le rend en quelque sorte semblable aux Bienheureux." Ces paroles sont du saint Docteur lui-même, dans la seconde partie de sa Somme, où il traite de l'état religieux (1).
La législation dominicaine, veut qu'après sa profession, le jeune religieux soit immédiatement appliqué aux sciences sacrées. Une nouvelle phase dans la vie de saint Thomas va donc s'ouvrir à nos regards. Mais avant de le suivre dans la carrière des études théologiques, qu'il doit parcourir avec tant d'éclat, rapportons ici, pour n'avoir pas à y revenir, le dernier assaut que subit encore cette vocation si rudement éprouvée.
Quelque temps après la délivrance de notre novice, les deux comtes Landolphe et Raynald allèrent trouver Innocent IV, moins pour se justifier des rigueurs exercées par eux sur leur frère, que pour solliciter du souverain pontife la nullité d'un engagement qu'ils ne pouvaient se décider à croire irrévocable.
(1) 2a 2ae , q. 188, a, 4.
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CHAPITRE VIII. LA DÉLIVRANCE — UN DERNIER ASSAUT.
3. Père de tous les chrétiens, le pape les écouta avec patience, et malgré le peu de solidité qu'offraient leurs raisons, il voulut bien évoquer l'affaire à son tribunal. Un bref apostolique obligea Thomas à venir dans la Ville éternelle, exposer les motifs qui l'avaient poussé à embrasser la vie dominicaine, contre la volonté de ses parents.
Le fils de saint Dominique comparut devant la cour pontificale, et répondit à toutes les questions avec cette lucidité qui lui était propre. Il n'incrimina personne, et ne parla des vexations domestiques qu'il avait subies que pour les attribuer à ses péchés, lesquels, disait-il, demandaient cette épreuve. Découvrant toute son âme, encore illuminée des clartés surnaturelles puisées dans sa prison, il fit connaître que son unique ambition était de renoncer aux avantages du siècle, pour servir, pauvre et ignoré, un Dieu qui a voulu naître dans l'indigence et mourir dans l'opprobre.
Son éloquence persuasive convainquit ses juges, et son émotion gagna tous les assistants. Dans cette illustre assemblée de cardinaux et de prélats rangés autour du trône, on ne savait qu'admirer le plus de la piété du jeune religieux, de la vivacité de son esprit, de la profondeur de son jugement ou de cette noble candeur et de cette aimable simplicité qui brillaient dans son langage, ses gestes et toute sa personne. On s'intéressait au jeune homme, on félicitait la famille et on la plaignait tour à tour; on allait presque jusqu'à excuser en secret les efforts de la mère pour retenir auprès d'elle un fils si digne de son amour.
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4. La cause était gagnée; toutefois, par surcroît de condescendance pour l'illustre famille d'Aquin, et dans la haute opinion qu'il concevait de la vertu de Frère Thomas, le pape lui offrit la dignité d'abbé du Mont-Cassin, en ce moment vacante, sans exiger qu'il quittât son Ordre et cessât d'en porter l'habit. C'était lui faire un honneur considérable, car, de toutes les abbayes bénédictines, celle du Mont-Cassin était la plus renommée, et pourvue des plus riches bénéfices: sept évêchés en dépendaient ; sans avoir le caractère épiscopal, l'abbé marchait de pair avec les évêques, et officiait avec tous les insignes pontificaux. Mais Thomas, inaccessible à l'attrait des honneurs, fidèle à ce sentiment d'humilité qui lui fit mettre toute sa vie parmi les objets principaux de ses prières celui de n'être élevé jamais à aucun emploi honorifique, sortit victorieux de cette dernière épreuve. Avec une grâce exquise il remercia le souverain pontife de sa bienveillance, et le supplia de lui accorder faveur entière, en lui laissant la liberté de demeurer simple religieux.
Grandement édifié d'un si rare désintéressement, Innocent IV encouragea le vertueux jeune homme à persévérer, et après lui avoir donné la bénédiction apostolique, le congédia, défendant qu'on l'inquiétât à l'avenir sur sa vocation. Thomas d'Aquin était acquis pour jamais à l'Ordre de Saint-Dominique.
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CHAPITRE IX. LE MAÎTRE DU DOCTEUR ANGÉLIQUE.Disputavit a cedro usque ad hyssopum...
et veniebant de cunctis populis ad audiendam sapientiam Salomonis.
III Rois IV, 33-34.
Il discourut sur toutes choses à partir du cèdre jusqu'à l'hysope,
et on accourait de tous les pays pour recueillir la sagesse de
Salomon.
1. La paix avait succédé à la lutte, le calme à la tempête; le nouveau profès, jouissant enfin d'un repos si chèrement acheté, allait poursuivre sa formation religieuse et achever son instruction de Frère Prêcheur, dans une maison où les observances et les études atteignaient leur complet épanouissement.
A cette intelligence d'élite, en possession déjà de connaissances prodigieuses, il fallait une école de premier ordre, et, s'il se pouvait, un maître en tous points accompli. Les supérieurs crurent avoir trouvé cette école au couvent de Cologne, et ce maître dans un professeur regardé alors comme l'oracle du monde et le Salomon de son temps. Il se nommait en religion Frère Albert, mais on ne l'appelait communément que le Philosophe. La postérité lui a décerné le titre de Grand, et l'Eglise l'a placé sur les autels, en fixant sa fête au 15 novembre, jour de sa naissance au ciel.
Né à Lavingen, en Souabe, de l'illustre famille de Bollstadt, Albert le Grand, après une première éducation libérale et chrétienne, était allé terminer ses études dans les universités de Padoue et de Bologne. Dès sa plus tendre enfance, il avait ressenti une dévotion singulière pour la très sainte Vierge; aussi, quand vint pour lui le moment de choisir une carrière, pria-t-il cette divine Mère de lui servir d'étoile et de guider ses pas. Marie daigna lui apparaître, et lui dit d'entrer dans l'Ordre des Frères Prêcheurs, récemment fondé. Docile à cette voix, fortifié d'ailleurs par les prédications du bienheureux Jourdain de Saxe, successeur de saint Dominique dans le gouvernement général de l'Ordre, le jeune étudiant échangea les vêtements du siècle pour ceux de la Religion, en 1223.
Dieu permit qu'Albert rencontrât tout d'abord des épines sur sa route.
Bien que doué d’intelligence, Albert ne laissait pas d’avoir la conception lente, le travail pénible et dans ce fameux couvent de Bologne, où maître Jourdain avait rassemblé, des diverses maisons de son Ordre, la fleur de la jeunesse savante, le novice allemand, se voyait bientôt devancé par ses condisciples, italiens pour la plupart, à l’esprit vif et pétillant.
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CHAPITRE IX. LE MAÎTRE DU DOCTEUR ANGÉLIQUE.
2. L'ennemi de tout bien profita de ces débuts malheureux pour le porter au découragement, et lui suggérer même la pensée d'abandonner la vie religieuse.
Sous le poids d'une tentation si violente, Albert eut recours à la divine consolatrice des affligés. Il conjura avec larmes l'auguste Mère de Dieu de lui accorder la clef des connaissances humaines, mais en même temps de fortifier sa foi, afin qu'au milieu des subtilités de la scolastique, il ne fût jamais ébranlé dans ses croyances. Marie lui apparaît resplendissante de lumière et ayant à ses côtés deux vierges martyres: "Mon, fils, lui dit-elle, tes demandes sont exaucées. Persévère dans les travaux de l'étude. Dieu protègera ta science et la conservera parfaitement pure pour le bien de son Eglise. Mais afin que tu saches que tu es redevable à ma bonté, et non à tes efforts personnels, de ton immense savoir, il te sera enlevé quelques années avant ta mort.
A partir de cette vision, les progrès du jeune religieux ne connurent plus d'arrêt.
Les supérieurs se rappelant qu'on ne place pas la lumière sous le boisseau, mais sur le chandelier, afin qu'elle brille aux regards de tous; chargèrent Albert d'enseigner la philosophie et la théologie, d'abord à Cologne, puis en diverses autres villes de l'Allemagne. Plus tard, il vint à Paris, précédé d'une réputation telle que les écoles se trouvèrent trop petites pour contenir la foule des auditeurs. Il lui fallut tenir son cours sur une place publique, que les écoliers appelèrent place de Maître Albert. Par corruption de langage, elle est devenue la place Maubert, nom qu'elle porte encore aujourd'hui.
L'importance de ses leçons, qui durèrent, presque sans interruption, jusqu'au terme d'une très longue carrière, n'empêcha pas Albert le Grand de composer des ouvrages d'une érudition surprenante. On en publia au XVIIe siècle vingt et un volumes in-folio. Ce sont des traités ou des commentaires sur la philosophie, la théologie, l'Ecriture sainte; de nombreux sermons, véritable mine d'or pour les prédicateurs; deux cent trente questions en l'honneur de la sainte Vierge, connues sous le titre de Mariale. Très versé dans les mathématiques, la physique et la mécanique, Albert contribua par ses écrits à l'avancement de ces sciences. Un passage de ses œuvres rend probable l'opinion qu'il inventa divers automates parlants. D'après certains auteurs, l'une de ces machines, de forme humaine et de grandeur naturelle, disait par trois fois à qui la touchait: Salut !
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CHAPITRE IX. LE MAÎTRE DU DOCTEUR ANGÉLIQUE.
3. De récentes découvertes permettent de revendiquer pour notre Bienheureux, une part considérable d'influence sur les arts en Allemagne, spécialement sur l'architecture ogivale, que d'anciens livres désignent même par le nom de science Albertine. A Cologne, il réédifia le chœur de l'église des Dominicains, "monument, écrit un auteur, digne, par la parfaite application des lois géométriques, de servir de modèle à tous les architectes".
Nos jeunes élèves, que les exigences des programmes modernes obligent à une étude plus étendue qu'autrefois des sciences naturelles, veulent-ils savoir quel jugement porte d'Albert, comme zoologue et botaniste, un savant d'autant moins suspect de partialité qu'il n'eut pas le bonheur de partager notre foi ? Qu'ils lisent attentivement les appréciations suivantes du docteur Pouchet, de Rouen (1): "Il est incontestable qu'au moyen âge les sciences acquirent le plus magnifique développement. J'ai pris Albert le Grand comme type; c'est évidemment le plus beau génie de l'époque, et celui qui lui imprime son plus indélébile cachet (2).
Aucun homme n'a peut-être joui d'une plus vaste intelligence qu'Albert, être privilégié, créature d'élite, pouvant à la fois embrasser les incommensurables conceptions de la métaphysique et les moindres observations des sens.
La plupart des anatomistes ont commencé leur traité d'ostéologie en décrivant le crâne: direction vicieuse, qui ne fut généralement réformée que par nos modernes zootomistes. Cependant, dès le XIIIe siècle, notre Dominicain avait tracé la marche philosophique que notre époque elle-même ne devait adopter qu'après beaucoup d'oscillations.
En effet, il commence l'histoire du système osseux en décrivant la colonne vertébrale, qui en constitue rationnellement la base.
De l'espèce humaine il passe à toutes les autres formes qu'offrent les séries zoologiques à mesure que les appareils vitaux se simplifient et s'effacent. En suivant cette voie, le Dominicain de Cologne descend graduellement du mammifère jusqu'à l'éponge, qui, pour lui comme, pour les modernes, représente le dernier terme de l'animalité. Là, pour la première fois, se trouvent posées les bases de la série animale, idée vraiment gigantesque pour une époque où l'observation présentait d'insurmontables difficultés.
« Les travaux botaniques d'Albert ont été jugés avec une implacable sévérité par Haller et Sprengel (1). Un profond érudit, Mayer (2), confesse qu'en lisant l'ouvrage du Dominicain sous l'impression de ces jugements, il ne pouvait en croire ses sens; car, au lieu de cette ignorance, de cette superstition qui lui étaient signalées, il n'y trouvait que de vastes connaissances, une méthode rigoureuse et un jugement éprouvé. Mayer s'exprime ainsi: Nous ne trouvons pas un seul botaniste qu'on puisse lui comparer, hormis Théophraste qu'il ne connaissait pas.
Parmi cette multitude d'organes qui concourent a la formation du végétal, la graine est un des plus complexes et des plus difficiles à anatomiser. Véritable plante microscopique; on n'en pénètre la structure qu'avec le secours des instruments grossissants. Cependant Albert, à une époque où nos moyens d'investigation manquaient absolument, parvint à reconnaître la partie la plus essentielle de cet organe, l'embryon; il expose avec exactitude sa situation et ses formes.
En fait de physiologie végétale, on ne sait ce qui doit le plus étonner, ou du savoir de l'auteur, ou de l'audace avec laquelle il traite les plus délicates questions. On le voit tenter d'élucider, au XIIIe siècle, des phénomènes dont les botanistes de nos jours n'abordent qu'avec crainte l'explication (1).
(1) 1800-1872.
(2) On voit assez que l'auteur ne connaissait pas saint Thomas.
(1) Haller, savant de Berne, 1708-1777. Sprengel, botaniste allemand, 1766-1833.
(2) Médecin français, né à Belfort en 1814.
(1) Histoire des sciences naturelles au moyen-âge.
SAINT THOMAS D’AQUIN.
Patron des Écoles Catholiques — Ouvrage dédié aux étudiants chrétiens
Nouvelle édition illustrée. R. P. Charles-Anatole JOYAU, O. P. Librairie Générale Catholique et Classique.
EMMANUEL VITTE, DIRECTEUR Imprimeur — Libraire de l'Archevêché et des Facultés catholiques Lyon,
Emmanuel VITTE, Éditeur 3, Place Bellecour, 5. 1895, pp. 34-190.
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.LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN.
CHAPITRE IX. LE MAÎTRE DU DOCTEUR ANGÉLIQUE.
4. Dans Albert le Grand, l'humilité du saint brillait à l'égal de l'érudition du savant. Le Bienheureux se regardait comme le dernier de ses Frères, cherchant partout des occasions d'être méprisé. Assidu aux exercices de la règle, il trouvait encore, en dehors de ses occupations prodigieuses, le temps nécessaire à la récitation journalière du Psautier et à de longues oraisons. Il remplit avec une rare prudence et un très grand succès plusieurs charges importantes de son Ordre, et diverses missions que lui confièrent les souverains pontifes. Mandé à Rome par le pape Alexandre IV, et institué Maître du Sacré-Palais, il reçut l'ordre de répondre aux écrits de Guillaume de Saint-Amour, adversaire acharné des Religieux mendiants. Les Pères du concile général de Lyon n'admirèrent pas moins son éloquence et son énergie à combattre les erreurs. Élevé à la dignité épiscopale, malgré les résistances de son humilité, notre Bienheureux fit briller sur le siège de Ratisbonne un zèle éminemment apostolique, une inépuisable charité pour les pauvres, et une remarquable sagesse dans l'ordonnance de Sa maison. Mais au bout de deux ans, ayant déposé le bâton pastoral entre les mains du pape Urbain IV, il rentra dans son cloître, pour y vivre en simple religieux et reprendre son enseignement.
Les derniers écrits du Maître furent l'admirable livre sur le Sacrement de l'Eucharistie, et l'opuscule Comment on doit s’attacher à Dieu, charmante fleur mystique au suave parfum de laquelle il voulait se fortifier à l'approche du trépas.
Albert avait atteint sa quatre-vingt-troisième année; quand un jour, au milieu d'une leçon publique, la mémoire lui fit tout à coup défaut. C’était l’avertissement prédit par la Reine du ciel… Le saint vieillard en prit occasion de s’humilier devant son auditoire et d’annoncer sa fin prochaine et adressa un touchant adieu à son auditoire, et descendit, pour n'y plus remonter, de cette chaire où sa parole avait jeté tant d'éclat. Dès lors il ne vécut plus que dans la pensée de la mort: chaque jour il visitait l'endroit fixé pour sa sépulture, et récitait l'office des défunts pour lui-même, comme pour un trépassé. Enfin, le 15 novembre 1280, à l'âge de 86 ans, Albert le Grand cessa de vivre sur la terre pour commencer à vivre éternellement au ciel. Longtemps après, son tombeau ayant été ouvert, on trouva le corps entier, exhalant une agréable odeur et retourné la face contre terre, position habituelle du Bienheureux quand il priait. De nombreux miracles attestèrent sa sainteté (1).
Tel est l'homme que Dieu avait prédestiné à être le maître du Docteur angélique. Nos jeunes lecteurs, que nous ne perdons pas de vue en écrivant ces pages, voudront bien nous pardonner les proportions faites ici au portrait d'Albert le Grand. Ils apprendront de ce chapitre comment l'intervention de la Mère de Dieu, invoquée avec amour, dissipe les obscurités de l'étude et montre à chacun sa voie.
(1) Rodolphe, Vie du B. Albert le Grand.
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Re: LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN. (Table des Matières in fine.)
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.LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN.
CHAPITRE IX. LE MAÎTRE DU DOCTEUR ANGÉLIQUE.
5. Ils apprendront aussi de quel prix inestimable est pour l'adolescent la rencontre de maîtres chrétiens, au front desquels resplendit la double auréole de la science et de la vertu.
Les deux noms de Thomas d'Aquin et d'Albert le Grand se renvoient les mutuels rayons d'une lumière éclatante la célébrité du maître ajoute à la gloire du disciple, et plus encore la gloire du disciple, grandit l'honneur du maître.
Albert éclaira la jeunesse de Thomas par sa réputation justement acquise, et Thomas illumina la vieillesse d'Albert par la splendeur de sa renommée. Le philosophe servit d'introducteur au théologien, et se vit sans amertume dépassé par lui dans la voie qu'il avait frayée. Après avoir prédit le succès de saint Thomas, il fut le premier à y applaudir. Il eut révélation de sa mort, et lui garda dans son coeur un impérissable souvenir. Plus qu'octogénaire, il n'hésita pas à quitter Cologne et à entreprendre un long voyage pour venger la mémoire de son cher disciple, attaquée, disait-on, dans les Écoles de Paris.
Tous les deux enfin, les plus vastes génies peut-être du XIIIe siècle et des âges suivants, comblés d'éloges par leurs contemporains et la postérité, ont pu être comparés à ces deux grands luminaires dont, il est parlé au premier chapitre de la Genèse, plaidés par Dieu au firmament pour éclairer le monde. Le premier, le plus brillant, est saint Thomas d'Aquin, docteur de l'Eglise; le second est le bienheureux Albert le Grand.
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CHAPITRE X. LA MANIFESTATION DU GÉNIE.Erumpet quasi mane lumen tuum. Isaïe LVIII, 8.
Votre lumière éclatera comme l’aube du matin.
1. Frère Thomas, dit un biographe, se rendit à Cologne avec l'ardeur d'un cerf altéré qui court vers l'eau pure des fontaines. Dès son arrivée, il adopta la ligne de conduite dont il ne devait plus se départir jamais: joindre, dans une mesure pour le moins égale, la culture du cœur à celle de l'esprit.
Afin de progresser dans la perfection religieuse, obligation capitale de l'état qu'il avait embrassé, il s'adonna particulièrement à trois choses: l'oraison, le recueillement, l'humilité.
A l'oraison il consacrait un temps considérable, c'était le meilleur de la journée ; gardant à la pensée le souvenir de Dieu, au dehors plein d'une retenue angélique, il se maintenait dans un recueillement tant intérieur qu'extérieur; enfin, soigneux de pratiquer la plus profonde humilité, il s'effaçait volontiers, écoutait ses Frères avec déférence, parlait peu, et fuyait tout ce qui pouvait ressentir la vanité.
D'autre part, il se livra aux études avec une ardeur sans pareille, persuadé que dans un ministre des autels le défaut de science n'est pas moins funeste que le défaut de piété, et l'expose à cette terrible menace fulminée par Dieu lui-même, dans le prophète Osée (1) : Parce que vous avez rejeté la science, je vous rejetterai moi aussi de mon sacerdoce, afin que vous n'en remplissiez plus les fonctions... Car, dit un autre prophète (2), les lèvres du prêtre seront les dépositaires de la science, et c'est de sa bouche que l'on recherchera les connaissances de la Loi, parce qu'il est l'Ange du Seigneur des armées.
Notre novice savait apprécier l'avantage d'avoir pour guide dans les sciences sacrées un maître tel que le bienheureux Albert. Il trouvait de plus, dans cette maison d'études, la sainte émulation du bon exemple, entouré qu'il était de jeunes religieux déjà d'une éminente vertu, et dont plusieurs ont mérité, comme lui, d'être placés sur les autels.
(1) Ch. IV, 6.
(2) Malachie, II, 7.
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CHAPITRE X. LA MANIFESTATION DU GÉNIE.
2. Silencieux et réservé par nature, Thomas demeura longtemps sans prendre part aux discussions scolastiques, sans proposer aucun argument, ni répéter une seule leçon; mais attentif aux explications, laissant parler les autres, il réfléchissait en son esprit, et, la classe terminée, se hâtait de regagner sa cellule; où il notait avec soin ce qu'il avait appris.
Cette taciturnité extraordinaire fut remarquée, et avec cette pointe de malice qui de tout temps, paraît-il, a caractérisé les écoliers, plusieurs de ses rivaux, faisant allusion à sa stature, le surnommèrent, le grand Bœuf muet de Sicile.
Albert, à la perspicacité duquel n'avait pas échappé, sans doute, l'attitude singulière de son nouveau disciple, suspendait son jugement. Thomas lui avait été confié par le Général de l'Ordre, Jean le Teutonique. Ce vénérable vieillard l'avait amené de Rome à Cologne, et, en le remettant aux mains de Maître Albert, avait fait l'éloge de sa haute intelligence, attestée par des succès éclatants à l'Université de Naples. Quelle déception pour l'illustre professeur de ne rien rencontrer dans le jeune étudiant qui fit écho à ce que la renommée avait publié ! Une circonstance inattendue fit jaillir l'étincelle qui manifesta le génie.
On était arrivé à l'interprétation du livre de saint Denys l'Aréopagite sur les Noms divins. La leçon était difficile, les écoliers avaient peine à la suivre, et Thomas se montra d'une attention exceptionnelle. Un condisciple charitable, assis à ses côtés, pleinement convaincu que le pauvre Sicilien n'avait rien compris à une doctrine si relevée, s'offrit, au sortir de la classe, pour lui répéter la leçon. Notre novice accepta par complaisance, et se prêta très assidûment aux procédés obligeants de son compagnon. Mais voici qu'un jour l'officieux répétiteur s'embrouille dans une question qu'il ne saisissait qu'à demi, et, malgré ses efforts, ne peut achever sa démonstration. En ce moment, une lutte s'engage dans l'âme de notre Saint. L'humilité veut que Thomas pousse jusqu'au bout le rôle modeste d'un disciple qui apprend; la charité réclame qu'il vienne en aide à un Frère animé des intentions les plus droites. Dans ce conflit d'un genre nouveau, la charité finit par triompher, et Thomas demande à son interlocuteur la permission de lui dire ce qu'il croit avoir compris. Il le fait d'une façon magistrale, éclaircit le passage obscur, en tire des déductions, et montre dans son raisonnement une lucidité si parfaite, que l'étudiant, saisi d'admiration, demande à son tour que Frère Thomas veuille dorénavant lui servir à lui-même de répétiteur.
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CHAPITRE X. LA MANIFESTATION DU GÉNIE.
3. Le Saint, confus de cette prière qui choquait sa modestie, s'en défend de son mieux; il finit par consentir, mais à la condition expresse que personne n'en saura rien.
Le secret fut gardé par le trop consciencieux novice, bien qu'à certains moments il eût scrupule de tenir cachée aux supérieurs sa précieuse découverte. Un jour néanmoins il s'en ouvrît au maître des étudiants, lequel s'étant placé, sans être vu, près du lieu où se donnait la répétition, put se convaincre par lui-même de la réalité. Mais Dieu, qui se plaît à exalter les humbles, ménageait une manifestation plus éclatante de ce génie avide d'obscurité.
Une feuille de papier, recueillie par un condisciple devant la cellule de Frère Thomas, fut lue avec surprise et portée au régent des études. Sur cette feuille était résumée une des questions les plus ardues des Noms divins, avec une série d'arguments relatifs à l'interprétation donnée en classe, et enfin la solution complète des objections proposées. Le tout était présenté d'une manière si relevée et si savante, qu'on eût dit que saint Denys lui-même y avait expliqué sa pensée.
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CHAPITRE X. LA MANIFESTATION DU GÉNIE.
4. Albert demeura stupéfait de la science profonde que révélait cet écrit. Voulant par une épreuve décisive arriver à une certitude absolue, il enjoignit au maître des étudiants d'avertir le jeune religieux qu'il aurait le lendemain, en séance publique, à soutenir une thèse dont le sujet était d'une difficulté majeure. Sincèrement convaincu de son incapacité, Thomas eût volontiers paré le coup; mais contraint de céder en vertu de la sainte obéissance, il recourut à l'oraison.
Le Père des lumières, qui découvre ses plus hauts secrets aux petits et aux humbles, exauça notre Saint au-delà de sa demande. Le moment solennel arrive; après avoir réfuté, l'un après l'autre, divers arguments non moins subtils que pressants, Thomas se mit à reprendre tout ce qui avait été dit, et expliqua le point en litige au moyen d'une distinction lumineuse qui ravit toute l'assistance. "Frère Thomas, dit gravement Albert, vous ne parlez pas à la façon d'un répondant, mais comme un docteur qui conclut. — Maître, reprit sur le ton de l'excuse l’humble disciple, s'il est une autre manière de répondre, je ne la vois point.
— Eh bien! poursuivit Albert le Grand, voyons si vous résoudrez mes objections avec la même assurance." Et il lui en proposa quatre, telles qu'on pouvait les attendre de la part d'un si grand maître, décidé à presser son adversaire jusqu'à lui faire rendre les armes. Saint Thomas répéta les quatre arguments, les réfuta l'un après l'autre, et finit par poser un principe qui ne laissait plus de place à la moindre objection.
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CHAPITRE X. LA MANIFESTATION DU GÉNIE.
5. Aussi franc et généreux qu'il était modeste, le bienheureux Albert, en voyant se lever comme un soleil qui allait éclipser la renommée de tous les autres docteurs, ne put contenir sa joie. Il félicita son jeune disciple, et tourné vers les étudiants, dit avec un accent prophétique:
Ah ! Vous appelez Frère Thomas un Bœuf muet ! Eh bien, moi, je vous le dis, les mugissements de ce Bœuf retentiront si loin qu'on les entendra d'une extrémité de la terre à l'autre."
Un pareil témoignage échappé d'une bouche si autorisée ne put enfler le cœur du jeune homme. Thomas s'empressa de rapporter à Dieu le mérite de son succès et ne changea rien de sa simplicité habituelle. Mais sa réputation était désormais fondée. Maître Albert recourait à lui pour reprendre le développement des questions les plus relevées de la scolastique. Ses propositions étaient sans réplique, ses explications sans obscurité; on l'écoutait comme un oracle, on le proclamait la merveille du siècle. Après le livre de saint Denys l'Aréopagite, le bienheureux Albert ayant expliqué la Morale d'Aristote, saint Thomas l'étudia fort avidement et en écrivit des commentaires, qu'il donna, par modestie, comme le résumé des leçons de son maître. Il sut, en élevant les sentences du Stagyrite jusqu'aux maximes évangéliques, faire, en quelque sorte du philosophe païen un philosophe chrétien.
Il n'y eut bientôt qu'une voix parmi les professeurs et les écoliers pour proclamer Frère Thomas digne d'aller étudier dans la première université du monde. Sur ces entrefaites, le Chapitre général de l'Ordre assigna Maître Albert à Paris, pour y recevoir le doctorat et occuper une des deux chaires réservées aux Frères Prêcheurs; il fut décidé en même temps que saint Thomas l'accompagnerait dans la métropole des lettres. C'était en en 1245.
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CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.Ista sapientia quam sine fictione didici et sine invidia communico. SAGESSE VII, 13.
Cette sagesse que j'ai apprise sans détour, je la communique sans envie.
1. Nos deux voyageurs se mirent en route, se conformant aux usages des pauvres, disons mieux, aux coutumes inaugurées par saint Dominique et ses premiers disciples. Le bâton à la main; les épaules chargées du bréviaire et de la Bible, — saint Thomas y ajoutait le livre des Sentences, — ils marchaient depuis l'aube jusqu'au milieu du jour. S'arrêtant alors au bord d'une fontaine, ils mangeaient le pain quêté en chemin, et après un court repos, reprenaient joyeusement leur route. Le soir, ils s'efforçaient de trouver un gîte, en quelque monastère, ou allaient frapper à la porte d'une maison charitable, laissant en échange de l'hospitalité reçue des paroles de bénédiction, parfois même des grâces de salut corporel ou de réconciliation avec Dieu.
En arrivant dans la capitale de la France, Albert et son jeune compagnon se dirigèrent vers le couvent de Saint-Jacques, situé au sommet de la montagne Sainte-Geneviève, rive gauche de la Seine.
C'était en 1217, que s'étaient établis à Paris les premiers Prêcheurs, sous la conduite du bienheureux Mannès, frère de saint Dominique. Après dix mois d'une vie inconnue dans un logement provisoire, ils s'étaient vus transportés à leur résidence définitive par un concours de circonstances providentielles.
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CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.
2. "En ce temps-là, écrit le P. Lacordaire (1), Jean de Barastre, doyen de Saint-Quentin, chapelain du roi et professeur à l'Université de Paris, avait fondé à l'une des portes de la ville, appelée la porte de Narbonne ou d'Orléans, un hospice pour les pauvres étrangers. La chapelle de l'hospice était dédiée à l'apôtre saint Jacques, si célèbre en Espagne, et dont le tombeau est l'un des plus grands pèlerinages du monde chrétien. Soit que les Frères espagnols s'y fussent présentés par dévotion ou de toute autre manière, Jean de Barastre vint à savoir qu'il y avait dans Paris des religieux nouveaux qui prêchaient l'Évangile à la façon des apôtres.
Il les connut, les admira, les aima, et sans doute comprit l'importance de leur institut, puisque, le 6 août 1218, il les mit en possession de cette maison de Saint-Jacques, qu'il avait préparée à Jésus-Christ dans la personne des étrangers. Jésus-Christ reconnaissant lui envoya de plus illustres hôtes que ceux sur lesquels il comptait, et le modeste asile de la porte d'Orléans, devint un séjour d'apôtres, une école de savants, et le tombeau des rois.
"Le 3 mai 1221, Jean de Barastre confirma par un acte, authentique la donation qu'il avait faite aux Frères, et l'Université de Paris, à la prière d'Honorius III, abandonna les droits qu'elle avait sur ce lieu, en stipulant toutefois que ses docteurs, à leur mort, y seraient honorés des mêmes suffrages spirituels que les membres de l'Ordre, à titre de confraternité."
(1) Vie de saint Dominique, chap. XIII.
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CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.
3. Le premier prieur de Saint-Jacques fut Matthieu de France, homme docte, tout préparé à l'instruction des peuples, dit Etienne de Salanhac, et qui avait passé sa jeunesse dans les écoles de la capitale.
Dire combien d'étoiles dominicaines brillèrent en ce lieu par la science et la sainteté ne serait pas chose facile. "De la maison de Saint-Jacques, écrit Touron, on vit sortir de célèbres écrivains, des prédicateurs zélés, plusieurs confesseurs de nos rois pendant trois ou quatre siècles, un grand nombre de prélats et de cardinaux, et le premier religieux du même Ordre qui soit monté sur la chaire de Saint-Pierre, sous le nom d'Innocent V."
La renommée du couvent de Saint-Jacques rejaillit sur les autres couvents du royaume, et le peuple désignait tous les Dominicains de France sous le terme de Jacobins, formé du nom latin de l'apôtre saint Jacques. Il en fut ainsi jusqu'aux jours néfastes où des hommes sanguinaires, transformant en club le séjour de la prière et de l'étude, marquèrent d'une flétrissure imméritée ce nom qu'avait entouré d'honneur, pendant près de six siècles, la vénération publique.
A peine installé dans sa nouvelle résidence, Frère Thomas commença par suivre les cours préparatoires au baccalauréat qu'il avait ordre de recevoir. Ce ne fut point sous le fameux docteur franciscain Alexandre de Halès qu'il étudia, mais bien au collège même de Saint-Jacques. Les Pères de Réchac, Touron, et autres biographes français, réfutent longuement l'opinion contraire. Albert le Grand continua donc sa fonction de maître du Docteur angélique, et Thomas d'Aquin, à Paris comme à Cologne, toujours l'élève studieux, le religieux modèle, disposait en son esprit aussi bien qu'en son cœur des ascensions rapides vers les sommets de la science et de la sainteté.
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CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.
4. Après le temps régulier des études, Frère Thomas prit le grade de bachelier en théologie. Il dut passer alors du rang modeste de disciple à la chaire de maître et consacrer aux jeunes religieux de l'Ordre les prémices de son enseignement. Rien n'était plus juste.
"Le fils de Jacob, observe Guillaume de Tocco, distribua gratuitement à ses frères le froment de l'Égypte; ainsi notre nouveau Joseph commença-t-il par nourrir ses frères en Religion du pain de la parole divine, afin de pourvoir ensuite avec libéralité l'Eglise entière des aliments de la céleste sagesse."
Cependant ce ne fut point Paris, mais Cologne qui eut l’honneur de ses débuts. Citons l’Année Dominicaine:
"En 1248, les supérieurs de l'Ordre avaient pris une décision fort importante touchant le développement des sciences théologiques. Jusqu'alors, il n'y avait eu dans la famille de saint Dominique qu'une seule maison d'Étude générale, celle de Paris, et chaque province dominicaine y envoyait ses sujets les plus distingués. De ce centre unique repartaient également les nombreux professeurs qui dans chaque couvent offraient au clergé un cours public de théologie.
"Or, quoique très vastes, les bâtiments du grand collège de Saint-Jacques étaient devenus insuffisants pour contenir une agglomération de religieux dépassant alors le nombre de cinq cents.
"L'assemblée de 1248 vota donc la création de quatre nouvelles Études générales: Bologne pour les provinces d'Italie, Montpellier pour la province dite de Provence, Oxford pour la province d'Angleterre, et Cologne pour la province d'Allemagne. En même temps, elle désigna les religieux qui devaient inaugurer l'enseignement dans chacune de ces maisons. Maître Albert fut tout naturellement choisi pour diriger la nouvelle Étude générale de Cologne, et, sur sa demande, on lui adjoignit comme bachelier son disciple de prédilection, Frère Thomas d'Aquin."
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CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.
5. Notre Saint repartit donc pour l'Allemagne, vers la fin de l'année scolaire 1248, afin d'ouvrir les cours au mois de novembre suivant.
Il fut chargé d'abord de lire, selon le terme d'alors, c'est-à-dire d'expliquer le Maître des sentences. Ainsi désignait-on Pierre Lombard, évêque de Paris en 1159, auteur d’un cours de théologie intitulé Les quatre livres des sentences. Cet ouvrage, composé d'après les écrits des Pères, eut dès son apparition une très grande vogue, et, faute d'un meilleur recueil, devint pour les professeurs de théologie le thème en quelque sorte obligé de leurs leçons. A notre grand docteur était réservé de fixer pour jamais l'enseignement théologique dans sa Somme immortelle. Mais n'anticipons pas.
Saint Thomas dut, en outre, expliquer à ses élèves l'Ecriture sainte et quelques traités d'Aristote. En même temps il composait l'opuscule Des principes de la nature et celui De l'être et de l'essence. Ce dernier a été de la part de l'éminentissime cardinal Joseph Pecci l'objet d'un commentaire, qui résume en des pages lumineuses toute la philosophie, pour ainsi dire, du Docteur angélique, et révèle dans le frère de S. S. Léon XIII le métaphysicien consommé.
C'est vers cette époque que Thomas fut promu aux ordres sacrés, et bientôt au sacerdoce. Il célébra sa première messe avec les ardeurs d'un séraphin, et dès lors, remarquent tous ses biographes, son union avec Dieu devint plus intime.
Il y avait environ quatre ans que le jeune professeur enseignait à Cologne avec une réputation chaque jour croissante, lorsque le Chapitre général le désigna pour se rendre à Paris, afin de parcourir la carrière qui devait le conduire au doctorat. Trois grands personnages de l'Ordre prirent l'initiative de cette décision : Jean le Teutonique, Maître général, Albert le Grand et Hugues de Saint-Cher, premier Dominicain honoré de la pourpre romaine.
SAINT THOMAS D’AQUIN.
Patron des Écoles Catholiques — Ouvrage dédié aux étudiants chrétiens
Nouvelle édition illustrée. R. P. Charles-Anatole JOYAU, O. P. Librairie Générale Catholique et Classique.
EMMANUEL VITTE, DIRECTEUR Imprimeur — Libraire de l'Archevêché et des Facultés catholiques Lyon,
Emmanuel VITTE, Éditeur 3, Place Bellecour, 5. 1895, pp. 34-190.
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Re: LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN. (Table des Matières in fine.)
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.LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN.
CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.
6. Le commandement des supérieurs fut un coup terrible pour l'humilité de notre Saint; mais, fils d'obéissance avant tout, il courba la tête, et quitta l'Allemagne au mois de septembre 1252. En traversant la Belgique, il s'arrêta chez Adélaïde de Bourgogne, épouse de Henri III, duc de Brabant. La vertueuse princesse fut si charmée de la conversation du jeune religieux et des conseils qu'il lui donna, qu'elle voulut les avoir par écrit. Saint Thomas ne put s'y refuser, et lui envoya peu après un petit ouvrage qui est rangé dans ses Opuscules sous ce titre: du Gouvernement des Juifs.
Cette question des Juifs, si vivement agitée de nos jours, se posait déjà au moyen âge. La duchesse de Brabant, qui avait dans ses États quantité de Juifs usuriers, demandait quelle conduite tenir à leur égard, et à quels usages employer l’argent arraché de leurs mains perfides. Le saint Docteur, tout en reconnaissant que le Juif, par suite de son crime affreux, le déicide, ne peut, d'après le droit du temps, jouir de la liberté commune et doit être traité en esclave, incapable par conséquent de posséder, recommande d'user de modération pour qu'on lui laisse largement les choses nécessaires à la vie. Quant à l'argent, qu'il soit rendu aux pauvres victimes de son exploitation, ou qu'il passe en bonnes œuvres.
En suivant la trace de saint Thomas, nous le trouvons ensuite chez les Frères Prêcheurs de Louvain, remplissant la fonction de diacre à une grand'messe célébrée par le bienheureux Albert. Le pupitre dont il se servit pour chanter l'Evangile a été soigneusement gardé, et pendant la tenue du Chapitre général de 1885, dans le nouveau couvent de Louvain, on le voyait placé au milieu du chœur. Les Mémoires de l'ancien couvent ajoutent que le Docteur angélique fit aux religieux quelques leçons. Ce renseignement n'a rien qui étonne: telle était déjà la réputation du jeune professeur que, dans les monastères où il passait, on désirait l'entendre parler sur l'Ecriture sainte ou la théologie.
SAINT THOMAS D’AQUIN.
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Re: LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN. (Table des Matières in fine.)
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.LIVRE PREMIER — VIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN.
CHAPITRE XI. COUVENT DE SAINT-JACQUES. — LE PROFESSEUR.
7. L'année suivante, il revenait dans le Brabant pour affaires concernant les chanoines de Tirlemont. Les archives du Chapitre conservaient l'acte de cette visite, signé du serviteur de Dieu, à la date du vendredi 31 octobre 1253.
A Paris, Thomas entra comme assistant de maître Elie Bruneti, dans l'école des religieux étrangers à la France — Schola externa — où lui-même avait jadis étudié. Dès les premières leçons, le succès dépassa toute attente; les vastes salles de Saint-Jacques devinrent insuffisantes, tant les auditeurs se présentaient nombreux, pour écouter un professeur si distingué.
Guillaume de Tocco trace ainsi le caractère de son enseignement:
"Chargé d'un cours, au titre de bachelier, Frère Thomas se mit à répandre à flots pressés les secrets de ses méditations. Dieu lui versa d'en haut une science si vaste, et mit sur ses lèvres une doctrine si ample, qu'il semblait surpasser tous les maîtres, et provoquer plus qu'aucun autre les écoliers à l'amour de l'étude, par la clarté de son exposition. Il savait, en effet, découvrir de nouveaux aperçus, trouver une matière neuve et lucide de définir, et amener des raisonnements inattendus. En l'écoutant, personne ne doutait que Dieu n'eût éclairé son esprit des rayons d'une lumière nouvelle, et donné assez de fermeté à son jugement pour que, sans hésiter, il proposât et écrivît les solutions heureuses qui lui avaient été inspirées du ciel.
Au commencement de son professorat, il composa sur les Sentences un ouvrage élégant de style, profond de pensée, remarquable de clarté, dans lequel, pour appuyer ses raisons, il va chercher les sciences humaines, les conduit comme des servantes devant le trône de la divine Sagesse, les oblige à rendre hommage à leur reine, et les met en parfait accord avec les oracles sacrés. "Que personne, ajoute l'auteur, ne trouve absurde cette méthode de recourir aux sciences du siècle pour soutenir les maximes de la Sagesse éternelle, puisque de la même intelligence divine émanent les objets de toutes les connaissances, tant les vérités de l'ordre révélé que les principes du raisonnement humain."
L'Université félicita les Prêcheurs d'avoir en Frère Thomas un si savant religieux, et le chancelier de Paris, Emeric, accorda au jeune professeur la Licence dans les premiers mois de 1256. En même temps il insistait pour qu'on l'obligeât à prendre au plus tôt le grade supérieur. Honoré du Doctorat, Thomas d'Aquin enseignerait dès lors avec la plénitude de l'autorité, et servirait plus avantageusement l'Eglise.
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