Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)

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Message  Louis Lun 09 Avr 2012, 08:07

ÉTHIQUE, ÉCONOMIQUE, POLITIQUE

X. LES FORMES DE RÉGIME (suite)
Il se pourra, nous l'avons dit, que cette souveraineté s'établisse, au début, d'une manière illégitime ; — et ce sera toutes les fois qu'en s'établissant, elle dépossédera une souveraineté préexistante, sans que cette souveraineté préexistante ait démérité. Remarquons, du reste, que même la souveraineté populaire pourra être, de ce chef, une usurpation. — Mais il se pourra, au contraire, que son établissement, sous quelque forme qu'il se produise, soit parfaitement légitime. Tel le cas d'une abdication de la part de la souveraineté préexistante : qu'il s'agisse de la souveraineté populaire ou démocratique; ou de la souveraineté aristocratique ; ou de la souveraineté monarchique.

Tout souverain qui abdique cesse, par le fait même, d'être souverain; — et ne peut plus, de lui-même, si des circonstances nouvelles ne légitiment son acte, reprendre la souveraineté, en aurait-il le moyen ou la possibilité et la force brutale. S'il le fait, il usurpe.

Bien plus, quand il abdique, même en faveur d'un autre souverain, quelle qu'en soit la forme : démocratie, aristocratie, monarchie; il ne passe pas son pouvoir à un autre : son pouvoir ou plutôt le pouvoir souverain qu'il détenait ou qu'il détient n'est pas à lui. Il n'en est que le sujet ou le dépositaire. Ce pouvoir vient de plus haut : il vient de la nature; de l'auteur de la nature; de Dieu. En abdiquant, le dépositaire du pouvoir souverain ne fait que céder la place : le pouvoir qui descendait sur lui, descend sur le nouveau dépositaire qui le remplace. Dès lors, il n'a plus aucun droit de reprendre cette place, à moins qu'il n'y soit ramené par des circonstances qui légitiment son retour.

Voilà les conditions du pouvoir souverain, de son existence, de sa légitimité.

Quant à ses diverses formes, nous venons de voir qu'elles se ramènent à trois….

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Message  Louis Lun 09 Avr 2012, 12:38

ÉTHIQUE, ÉCONOMIQUE, POLITIQUE

X. LES FORMES DE RÉGIME (suite)
Quant à ses diverses formes, nous venons de voir qu'elles se ramènent à trois. Chacune d'elles, à l'état pur, est, de soi, parfaitement légitime. Elles le seraient, aussi, combinées entre elles, comme il faut qu'elles le soient de toute nécessité, dès qu'il s'agit d'une société dont les membres sont plus nombreux, plus divers, plus complexes. II est évident qu'en pareil cas, le pouvoir de faire la loi et de gouverner devra se hiérarchiser et se répartir en des sujets multiples et divers.

Une seule volonté, en effet, — qu'elle soit celle d'un monarque, ou d'une aristocratie, ou même du peuple groupé en démocratie, — ne saurait, par elle seule, tout ordonner dans une société tant soit peu étendue. Il faut que sous la volonté souveraine et participant son autorité, des volontés subalternes aient une certaine autorité de gouvernement et qu'elles concourent, par mode de régime, à promouvoir le bien commun, trop complexe et trop vaste, pour que la volonté du souverain y suffise.

Ce régime mixte, qui sera nécessairement celui de toute cité formant un État indépendant de quelque importance, ou plus encore, de ces groupements de cités et de provinces qui constituent les Etats à forme de nations, pourra et devra même être appelé, de son vrai nom, une république : entendant, par ce mot, le régime où plusieurs et même un peu tous, bien qu'à des degrés et selon des modes très divers, sont appelés à participer à la gestion du bien public.

Et sous ce nom, commun à tous, on pourra comprendre, en les distinguant par la note spécifique de l'une des trois formes de souveraineté à l'état pur, les divers régimes qui se partageront les goûts des divers peuples.

On pourra avoir, en effet, la république monarchique, où le pouvoir souverain résidera en la personne d'un seul; la république aristocratique, où le pouvoir souverain résidera en la personne morale d'une élite; la république démocratique, où le pouvoir souverain résidera en la personne morale que constituent réunies et groupées, sous forme de corps délibérant, toutes les unités civiques de la cité. Il est aisé de voir que la démocratie à l'état pur, ou même la république démocratique n'est possible que dans une société peu étendue, peu complexe, formant un état de minime importance, à tout le moins un État dont les unités civiques, devant se grouper en corps délibérant pour constituer le souverain, demeurent en nombre très limité.

Ce qu'on est convenu d'appeler le régime parlementaire, tel qu'il s'est pratiqué ou se pratique dans la plupart des États modernes, est, à vrai dire, un régime de république aristocratique : le véritable souverain, en effet, celui qui fait la loi et gouverne n'est pas autre que le Parlement, composé d'un groupe d'unités civiques, qui sont censées représenter ou présenter ce qu'il y a de meilleur dans le corps social auquel ces unités appartiennent.

Le système d'élection qui préside à la détermination de ces unités, surtout quand il est à base de suffrage universel, donne lieu à la fiction ou à l'illusion d'un gouvernement ou d'un régime démocratique, où le peuple est censé souverain et se gouverner lui-même. Il fallait cette fiction pour sauver le dogme de la volonté générale ou du peuple souverain, tel que le droit public moderne l'a emprunté à Rousseau.

Nous avons dit, expliqué et légitimé la première des conditions, la condition indispensable au bien de la cité…

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Message  Louis Mar 10 Avr 2012, 05:52

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X. LES FORMES DE RÉGIME (suite)
Nous avons dit, expliqué et légitimé la première des conditions, la condition indispensable au bien de la cité : celle d'une autorité, d'un pouvoir souverain, d'un pouvoir de commandement, qui assure l'existence même de la cité ; et nous avons vu sous quelles formes cette autorité, ce pouvoir pouvait se présenter.

Mais pour qu'en effet il procure le bien de la cité, il ne suffît pas qu'il soit, ou même qu'il soit légitime, quelle que soit d'ailleurs sa forme : monarchique, aristocratique, ou populaire. Il faut encore, il faut surtout qu'il s'exerce comme il convient, et que ses fruits de paix soient assurés. — Nous verrons, dans notre prochaine étude, à quelles conditions il peut en être ainsi.

A suivre : XI. LES GOUVERNÉS

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Message  Louis Mar 10 Avr 2012, 11:31

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XI. LES GOUVERNÉS
Dans nos trois dernières considérations, poursuivant notre étude philosophique de l'agir moral humain et de ses conditions essentielles, nous avons parlé de cette condition excellente entre toutes, où l'individu humain doit trouver le moyen normalement le plus parfait que la nature elle-même a voulu lui donner, pour atteindre, à son plus haut degré, la perfection pure et simple qui constitue sa fin dernière. Cette condition n'est pas autre que la vie commune appelée du nom de cité.

Nous avons vu ce qu'elle est, de quels éléments elle se compose, ce qu'il faut, de toute nécessité, pour qu'elle dure et qu'elle réalise la fin sublime qui est la sienne, sous quelle forme peut ou doit exister ou s'exercer l'autorité qui constitue cette condition essentielle de salut pour la cité.

Or, à chacun de nos pas, dans notre étude, nous avons rencontré, sur notre chemin, les théories et les formules du sophiste d'autant plus néfaste qu'il est plus séduisant, qui est le père du droit social moderne : J.-J. Rousseau.

Quand il s'est agi de la formation de la cité, nous l'avons entendu en appeler au pacte ou contrat social.

Quand il s'est agi de fixer la condition essentielle de salut pour la cité, il nous a parlé de la volonté générale .

Et quand nous avons voulu préciser la forme d'exercice pour cette condition de salut, il nous a parlé du seul souverain qui est le peuple .

Le côté néfaste de ces trois formules est dans l'équivoque impliquée ou suggérée par elles. Car…

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Message  Louis Mer 11 Avr 2012, 06:56

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
Le côté néfaste de ces trois formules est dans l'équivoque impliquée ou suggérée par elles. Car, s'il est vrai qu'elles pourraient avoir un sens légitime, si leur auteur lui-même semble ne les prendre ou ne les utiliser parfois que dans ce sens légitime; d'autres fois et à quelques lignes d'intervalle il paraît les entendre dans un autre sens, qui semble s'imposer d'autant plus qu'en dehors de ce sens, elles ne servent à rien dans le dessein poursuivi par l'auteur et qu'en effet il a été, on peut dire, unanimement et uniquement, perçu et entendu par tous les disciples du sophiste et par tous les tenants du droit social moderne qui se recommandent de son nom.

Dire, en effet, que la cité n'existe que parce que, en vertu d'un pacte, ou d'un contrat, tous les membres qui la composent se sont engagés à renoncer à leur volonté propre, ou à la gestion indépendante de leur propre vie, pour ne plus avoir qu'une volonté commune ou générale, qui est la volonté du bien de tous ou de l'ensemble, dans laquelle chacun retrouve d'une façon plus excellente la volonté de son bien propre totalement aliénée dans la volonté du bien général;

— que, par suite, et en vertu de ce contrat ou de ce pacte, il n'y a plus, dans la cité, de place légitime que pour la volonté générale, laquelle, seule, doit tout diriger, et dirige tout, par définition ou par essence, dans le sens de l'équité ou de la justice la plus parfaite, sans possibilité d'injustice ou d'erreur;

— que, dès lors, nul, dans la cité, n'abdique en faveur d'un autre, mais que tous sont au même titre, et dans le sens de la plus absolue et de la plus parfaite liberté, les arbitres de leur propre destin : se commandant tous à eux-mêmes; et nul ne commandant aux autres : mais tous et chacun, souverains, de la souveraineté la plus parfaite et qui se justifie par elle-même, qui est toujours nécessairement tout ce qu'elle doit être par le seul fait qu'elle est, puisque c'est le corps même de tous les particuliers ou individus qui en sont les membres, dont tous et chacun n'ont et ne peuvent avoir d'autre volonté que la volonté générale, seule reine de la cité :

— n'est-ce pas dire chose souverainement vraie, souverainement excellente, et qui fait battre de bonheur et d'aise, à son seul énoncé, tout cœur et tout esprit susceptibles de vérité et de bien?

Oui, si l'on entend tout cela dans le sens de…

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Message  Louis Mer 11 Avr 2012, 12:11

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
Oui, si l'on entend tout cela dans le sens de ce qui doit être, de ce que la cité, dans sa définition idéale, doit réaliser, de la perfection de vertu qui doit être en chacun de ses membres.

Oui, il est vrai que le fait de la cité ou du groupement de tous les êtres humains qui la composent, demande, en chacun d'eux, une disposition d'âme qui fera qu'ils devront se considérer comme si, par un don spontané et tout à fait libre d'eux-mêmes, ils avaient renoncé à jamais vouloir ou rechercher autre chose que le bien commun et l'intérêt général de la cité dont ils font partie; — que, par suite, tous et chacun devront n'avoir de volonté et d'action que sous la direction ou le règne absolu et toujours souverainement juste, de la volonté générale; — que nul ne devra ni ne pourra se considérer, sous sa raison particulière de tel individu ou de tel membre distinct et séparé du corps social auquel il appartient, comme supérieur aux autres, comme ayant autorité sur eux, comme ayant une raison quelconque de souveraineté, mais que tous, au même titre, ou comme membres du corps social qui seul est souverain, et souverain nécessairement parfait ou juste, puisque par définition, il est celui qui veut le bien de tous comme son bien, ne pouvant jamais vouloir le mal d'un particulier, — ont la raison de souverain, étant tous des membres du seul souverain.

Mais, si on l'entend dans le sens de la réalité existante…

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Message  Louis Jeu 12 Avr 2012, 09:00

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
Mais, si on l'entend dans le sens de la réalité existante : en ce sens que la cité n'existe de fait que parce que les individus qui la composent ont passé ou conclu entre eux un pacte ou un contrat ayant les conditions idéales que nous avons dites; — que, en fait, n'existe, dans la cité, que la direction ou le règne de la volonté générale au sens indiqué ; et que toutes les volontés particulières lui sont soumises, comme ayant, de fait, abdiqué en sa faveur ;— que nul membre n'y exerce le pouvoir souverain ; mais que le pouvoir souverain de faire la loi n'y appartient qu'au seul corps social, qui l'exerce, en effet, et dans le sens de parfaite justice ou équité dont nous avons parlé, au point que toutes les lois qui existent dans une cité y sont nécessairement l'expression de la justice, étant nécessairement l'expression de la volonté générale; — qui ne voit l'effroyable équivoque et l'absolu renversement de tout l'édifice idéal admiré tout à l'heure?

En fait, et dans la réalité, les membres d'une cité, familles ou individus, s'y trouvent, — sans que leur volonté ait eu à se prononcer à ce sujet. Il s'y trouvent par un concours de circonstances qui ne dépendent point d'eux; mais qui les lient, en droit, comme si la volonté était intervenue : parce que la saine raison demande que la volonté accepte ainsi les choses; — mais, en fait, leur volonté, par elle-même et d'elle-même ou naturellement, ne traduit pas, dans la pratique, cette acceptation, de façon à n'agir jamais que dans le sens de la volonté générale. C'est même le contraire qui, naturellement, tend à se produire ; et il y faut la discipline légale pour amener ce règne de la vertu suprême qui est la justice générale.

Or, cette discipline légale n'est pas, en fait, existante de soi, dans la cité…


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Message  Louis Jeu 12 Avr 2012, 12:46

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
Or, cette discipline légale n'est pas, en fait, existante de soi, dans la cité, et par une sorte de génération spontanée. Il faut la créer. La créer, comme loi édictée. La créer, plus encore, ou comme conséquence nécessaire, comme loi qui oblige. Il faut un pouvoir concret, que tous puissent voir et dont tous puissent subir ou recevoir l'action directive et contraignante.

Ce pouvoir devra se trouver en des êtres humains qui en seront l'organe : ou tous; ou quelques-uns; ou un. C'est lui qui sera le souverain concret : nullement infaillible en soi— mais qui devra tendre à réaliser l'idéal du pouvoir souverain abstrait, qui est celui de la volonté générale, ne voulant que dans le sens de la justice générale. — Il y tendra par la pratique d'une double vertu : la justice générale, dans sa volonté; et, dans sa raison, la prudence législative ou royale.— Plus une forme de pouvoir souverain — ou tous, ou quelques-uns, ou un seul — assurera ou sera apte à assurer ce règne de la volonté générale ou cette promotion du bien commun par sa prudence et par sa justice et par sa force — prudence législative, justice générale, autorité ou pouvoir coercitif— : plus cette forme de pouvoir souverain sera parfaite, plus elle se rapprochera de l'idéal. Au contraire, et en sens inverse, plus une forme de pouvoir souverain, quelle qu'elle soit, monarchie, aristocratie, démocratie, soit à l'état pur, soit à forme de république, — manquerait de prudence législative ou royale, de justice générale, ou de force et d'autorité : plus on s'acheminerait vers le mal souverain, qui est le désordre ou la tyrannie.

Encore est-il que pour le bien parfait de la cité…

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Message  Louis Ven 13 Avr 2012, 07:10

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
Encore est-il que pour le bien parfait de la cité, et sa réalisation idéale, il ne suffît pas des vertus du pouvoir souverain que nous venons de dire. Il y faut, dans les subordonnés ou les gouvernés, des conditions ou des vertus correspondantes aux vertus de ceux qui commandent.

Une première vertu devra se trouver en eux qui sera la même que celle des gouvernants. C'est la vertu de justice générale. Elle a pour effet de perfectionner la volonté et de l'amener à ne rien vouloir que dans la ligne du bien commun ou de l'intérêt général. Cette vertu doit se trouver en tous ceux qui font partie de la cité, à quelque titre qu'ils en fassent partie, comme gouvernants, ou comme gouvernés, comme supérieurs ou comme inférieurs. Tous doivent vouloir, par-dessus tout, le bien commun, au point de ne jamais hésiter à sacrifier leur bien particulier, sous quelque forme qu'il se présente, bien de l'individu, de la famille, du groupe, quand l'intérêt général le demande.

Cette disposition de la volonté, cette vertu de justice générale est la vertu souveraine dans l'ordre moral humain : elle est, dans cet ordre, ce qu'est la vertu de charité, dans l'ordre moral surnaturel et divin. Et, de même qu'aucun être humain ne peut mener une vie morale parfaite au sens pur et simple, dans l'ordre de sa destinée divine et surnaturelle, s'il n'a la vertu de charité; de même, dans l'ordre moral humain, il n'est personne, faisant partie de la patrie terrestre qu'est la cité ou la nation, qui puisse être vraiment parfait, être vraiment ce qu'il doit être, s'il n'a dans sa volonté, réglant et harmonisant toute l'économie de son agir moral, la vertu de justice légale.

Par contre, s'il a cette vertu et dans la mesure où il a aussi, en harmonie avec elle, les autres vertus subordonnées, exigées par elle, qui doivent régler tous les aspects de son agir moral, dans cette mesure-là, il est vraiment parfait. Et si tous les êtres humains qui font partie de la cité possédaient en eux-mêmes, dans les principes de leur agir moral, cette perfection idéale de vertu, la cité, la nation, le genre humain serait le paradis sur terre.

Parmi ces autres vertus, il en est deux qui sont requises à un titre plus spécial et plus immédiat pour le bien de la cité…

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Message  Louis Ven 13 Avr 2012, 13:26

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Parmi ces autres vertus, il en est deux qui sont requises à un titre plus spécial et plus immédiat pour le bien de la cité. Elles vont correspondre aux deux vertus que nous avons déjà signalées comme étant requises, en même temps que la justice générale, dans la personne de ceux qui gouvernent. En ces derniers les deux vertus dont nous parlons s'appelaient la prudence législative ou royale et la force appuyant l'autorité.

La prudence législative ou royale est destinée à perfectionner la raison pratique de celui ou de ceux qui commandent, afin que cette raison pratique sache, non seulement découvrir et trouver et formuler ou édicter les meilleures règles d'agir pour tous, qui s'appelleront du nom de lois ; — mais encore appliquer ces lois comme il convient en chacun des cas particuliers qui pourront se présenter et demander, si l'on peut ainsi s'exprimer, un doigté spécial dans le mode d'appliquer la loi pour que le bien commun qu'elle est destinée à promouvoir ne s'en trouve pas compromis, mais, au contraire, promu.

C'est, proprement, la vertu de celui qui gouverne, et qui, nécessairement, doit être la même : car la prudence législative ou royale, qui régît, ne suppose pas un double sujet ni ne se distingue spécifiquement, étant une seule et même espèce de prudence. — Il a fallu, ici encore, la chimère de Rousseau pour imaginer un souverain qui n'est que pour faire la loi, ou légiférer en général, et qui se désintéresse ensuite de tous les cas particuliers, laissant cela à celui ou à ceux qui gouvernent. — De là, cette distinction radicale et cette séparation des trois pouvoirs législatif, exécutif, judiciaire — qui est l'article organique du droit social moderne. — Non, vraiment. Celui qui gouverne et qui est vraiment souverain doit faire la loi, veiller à son application, juger, en dernier ressort, des infractions, et être l'arbitre suprême de la sanction pénale exigée par l'infraction. À ce dernier titre, il faudra qu'à la vertu de prudence royale corresponde la vertu de force et la vertu de mansuétude ou de clémence, selon que la diversité des cas pourra le demander.

Dans les subordonnés, deux vertus, nous l'avons dit, doivent correspondre à celles que nous venons de préciser pour la personne des gouvernants….

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Message  Louis Sam 14 Avr 2012, 06:33

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
Dans les subordonnés, deux vertus, nous l'avons dit, doivent correspondre à celles que nous venons de préciser pour la personne des gouvernants.

La première, d'une importance souveraine, et qui est si peu connue, s'appelle du beau nom de prudence politique. Elle consiste dans la perfection de la raison pratique des subordonnés, les faisant se commander à eux-mêmes pour que leurs actions, comme subordonnés, s'harmonisent excellemment avec l'action de la prudence législative ou royale, qui perfectionne la raison pratique de ceux qui gouvernent, afin que leur commandement ou leur loi soit toujours, dans son énoncé et dans son application, ce que le bien de la cité demande.

Quand ces deux prudences se correspondent et sont en harmonie, alors vraiment, du côté de la lumière et de la lumière pratique, devant présider au parfait épanouissement du bien de la cité, rien ne manque. Et l'on a, de ce chef, la réalisation de l'idéal.

Pourtant, cela ne suffît pas, du côté des subordonnés, pour que leur action totale concoure idéalement au bien do la cité; — ou plutôt, car la formule sera ainsi plus exacte, — la prudence idéale dont nous venons de parler ne pourra exister réellement que si, du côté de la volonté, se trouve une autre vertu, celle qui spécifie proprement le subordonné ou l'inférieur, comme tel.

C'est la vertu d'obéissance…

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Message  Louis Sam 14 Avr 2012, 12:48

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XI. LES GOUVERNÉS (suite)
C'est la vertu d'obéissance.

Elle est cette disposition de la volonté qui fait qu'elle se soumet, purement et simplement, à la volonté du supérieur, de telle sorte qu'au seul fait de cette volonté connue, immédiatement, totalement, joyeusement, elle s'emploie et emploie tout ce qui dépend d'elle à l'accomplir. Et qu'on veuille bien remarquer que l'obéissance — il n'y a d'obéissance qu'à ce prix — fait que la volonté de l inférieur se soumet à la volonté du supérieur, uniquement pour cette raison, qu'elle est la volonté d'un supérieur : pourvu que le supérieur soit légitime, c'est-à-dire qu'il ait vraiment autorité pour commander, dès là qu'il commande, — à moins qu'il fût manifeste qu'il commande une chose injuste, car toujours, à moins d'évidence contraire, il est supposé que son commandement est ce qu'il doit être —, l'inférieur se soumet à son ordre, avec la certitude qu'en se soumettant ainsi, non seulement il ne déchoit pas, mais il se hausse au plus haut degré de perfection, la perfection consistant, pour tout être qui n'a pas ou qui a moins, dans le fait de se soumettre à celui qui a ou qui a plus et qui a pour mission de lui donner. Dieu seul n'a pas à recevoir! Tout ce qui n'est pas Lui se perfectionne d'autant plus qu'il reçoit davantage. Et, dans l'ordre de ce qu'il y a de plus excellent au plus intime et au plus profond de l'être humain, dans l'ordre du volontaire, dans l'ordre de l'agir moral, — l'être humain se perfectionne d'autant plus qu'il se soumet, par sa volonté, s'il est inférieur, et à quelque degré de la hiérarchie qu'il se trouve, à la volonté de son supérieur. Il se perfectionne d'autant plus qu'il obéit plus excellemment.

Que serait la société, si les esprits, dans le monde, étaient formés à la lumière et aux clartés des principes que nous venons de rappeler, — si la cité était réglée par de tels principes...

Mais, hélas !

II n'importe!

Ce sera un grand bien de les avoir entrevus. Et nous saurons, du moins, qu'ils existent, que la philosophie thomiste en est la dépositaire!
A suivre : XII. LES NATIONS

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Message  Louis Dim 15 Avr 2012, 06:44

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XII. LES NATIONS
Toute la science morale est commandée par la nature de l'être humain. La fin dernière, ou plutôt la perfection pure et simple de l'individu humain, et la condition qui peut être la sienne eu égard à cette perfection, tels sont les deux points qui devront tout régler.

La perfection pure et simple consiste dans tout le bien qui peut être celui d'un être humain, à considérer sa nature en elle-même et dans ses facultés d'agir : corps et âme unis selon qu'ils sont faits l'un pour l'autre; possession, dans l'intelligence, de toute vérité d'ordre humain, sans possibilité d'erreur ou d'ignorance; épanouissement de toutes les facultés d'agir, en harmonie avec cette possession de la vérité, — voilà bien la perfection de l'être humain, telle que sa nature le demande.

S'il l'avait dès le premier instant de son être, tout individu humain serait à son terme définitif; et il n'y aurait aucunement à parler d'ordre moral à établir pour lui. Si, au contraire, il ne l'a pas, — comme la nature tend, de soi, à la perfection de tous les êtres, il faudra, pour obéir à la nature, qu'il tende à acquérir sa perfection pure et simple, telle que nous venons de la définir. Et parce qu'il est un agent libre, pouvant utiliser la perfection qu'il a déjà à l'effet d'acquérir celle qu'il n'a pas encore, ou, au contraire, abuser de la perfection qu'il a déjà et ne pas ordonner son action à l'acquisition de la perfection définitive qui doit être la sienne, de là l'importance souveraine pour lui de veiller à son agir et de l'ordonner comme il convient ; car s'il ne l'ordonne pas comme il convient, au lieu du bonheur, c'est le châtiment, comme terme définitif.

D'autre part, l'individu humain…

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Message  Louis Dim 15 Avr 2012, 11:45

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XII. LES NATIONS (suite)
D'autre part, l'individu humain venant à l'être dans les conditions où. il y vient, c'est-à-dire à l'état d'enfant, il faudra, pour qu'il atteigne la perfection qui doit être la sienne, qu'il trouve, autour de lui, préparés par la nature, les secours sans lesquels il serait dans l'impossibilité de l'atteindre. Ces secours lui sont fournis par la famille. Outre que la famille l'entourera de tous les soins nécessaires au maintien et au développement de la vie physique qu'il a reçue par elle, elle lui donnera aussi, dans la mesure où elle sera pleinement ce qu'elle doit être, les secours d'ordre moral et d'ordre intellectuel qui lui permettront de se développer dans sa vie proprement humaine.

Toutefois, en raison même de l'excellence de cette vie et de la perfection très haute qu'elle comporte, le secours de la famille demeurera insuffisant. Pour que l'individu humain puisse atteindre sa perfection physique, intellectuelle et morale, ou, plutôt, pour que sa triple vie d'ordre physique, intellectuel et moral, puisse s'épanouir dans toute sa plénitude, comme sa nature le demande, il faut qu'un ordre nouveau de secours lui ait été préparé par la nature. Cet ordre nouveau est celui de la cité.

La cité, milieu idéal, où l'individu humain devra trouver et trouvera, en effet, dans la mesure où ce nouveau milieu sera ce qu'il doit être, les moyens les plus adaptés, les plus faciles, les plus parfaits, pour réaliser déjà et préparer, par voie de mérite ou de vie morale parfaite, sa fin dernière ou sa perfection pure et simple.

Pour que la cité soit ce milieu idéal…


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Message  Louis Lun 16 Avr 2012, 07:05

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XII. LES NATIONS (suite)
Pour que la cité soit ce milieu idéal, il lui faut une condition première, essentielle entre toutes : un pouvoir qui maintiendra unis les éléments très divers qui la composent, et les ordonnera à réaliser la fin sublime qui doit être celle de la cité.

Ce pouvoir devra nécessairement s'incarner en des sujets humains, qui auront pour mission de l'exercer. Sous quelle forme qu'il se présente, le pouvoir, selon qu'il est parfait dans la personne du souverain, et, proportionnellement, en tous ceux qui y participeront, requerra, comme vertus essentielles, d'abord, la vertu de justice légale ou générale, perfectionnant la volonté de ceux qui commandent, pour qu'ils ne se proposent, en tout, que le bien commun ou l'intérêt général; — mais, aussi, et, plus spécialement, surtout dans la personne du souverain, la prudence législative ou royale, perfectionnant la raison pratique du législateur, pour qu'il sache trouver, formuler, édicter, et commander dans tout le domaine de la loi ; — et, enfin, les vertus d'exécution qui lui feront user de la force matérielle, indispensable au pouvoir souverain, avec l'énergie, et, aussi, avec la mansuétude et la clémence que le bien do la communauté exige.

A côté de ces vertus existant dans la personne du souverain et de ceux qui commandent, devront se trouver, dans la personne des sujets ou des gouvernés, des vertus correspondantes : — vertu de justice légale ou générale; — puis, très spécialement, vertu de prudence politique; — et, pardessus tout, vertu d'obéissance.

Une cité dans laquelle régneraient, d'une façon idéale, les vertus que nous venons de dire, serait une cité de paradis.

Mais suffirait-elle pour que l'individu humain possède enfin tout ce dont il a besoin en vue de l'acquisition de sa perfection pure et simple?...

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Message  Louis Lun 16 Avr 2012, 13:49

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Mais suffirait-elle pour que l'individu humain possède enfin tout ce dont il a besoin en vue de l'acquisition de sa perfection pure et simple?

Oui et non. — Oui ; car la cité constitue la société parfaite, dont la famille n'était que la cellule initiale. — Non, car la société humaine n'est pas renfermée tout entière dans la société que constitue la cité.

Le propre de l'être humain est de pouvoir se multiplier et se développer d'une telle manière que son groupement déborde nécessairement le cadre même de la cité. De même que les familles, en se multipliant, amènent la cité: — de même, les cités amènent ce que nous appelons la nation, les nations, dont les rapports entre elles motiveront un nouvel ordre d'agir moral parmi les hommes.

Pour bien entendre cet ordre nouveau et les règles morales qui y présideront, il importe, par-dessus tout, de bien saisir ce que nous devons entendre, au sens où nous en parlerons maintenant, par la nation, par les nations et par la société humaine qu'elles constituent.

Une différence essentielle existera entre cette société nouvelle ou cet ordre nouveau de société parmi les hommes, — et la société que constituait la famille ou la cité.

Dans la famille, tous les membres vivent sous l'autorité naturelle du chef qu'est le père ; — et la discipline qui y préside est la discipline paternelle.

Dans la cité, les familles ou les individus qui la composent vivent sous l'autorité d'un pouvoir souverain : démocratie, aristocratie, monarchie; et la discipline qui y préside est la discipline légale.

Dans la société plus ample que constituent les cités ou les nations, il n'y a plus, dans l'ordre naturel, de pouvoir et de discipline qui y préside. Par définition, toute cité, ou toute nation une, est une société indépendante et souveraine, une société parfaite, qui a sa vie propre, dans laquelle nul autre n'a le droit d'intervenir. Comme, d'autre part, ces cités ou ces nations ainsi indépendantes vivent toutes sur la surface du globe, elles ont des points de contact; elles ont des rapports entre elles.

De ces points de contact ou de ces rapports qu'elles ont entre elles pourront naître, dès lors qu'il s'agit de groupements humains, ayant, chacun, ses intérêts, ses aspirations, ses passions aussi, des heurts, des conflits.

Tant que les intérêts ne s'opposeront pas ou pourront facilement s'harmoniser, tant que les aspirations seront communes, tant que les passions n'interviendront pas trop violentes, le voisinage des cités et des nations pourra avoir, lui-même, les plus grands avantages, pour le perfectionnement commun de chaque cité, de chaque nation, et, par suite, de l'individu humain en chacun de ces milieux.

Mais si les heurts se produisent, si les conflits éclatent, qu'arrivera-t-il ?...

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Message  Louis Mar 17 Avr 2012, 07:00

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Mais si les heurts se produisent, si les conflits éclatent, qu'arrivera-t-il ?

Il faudra que les pouvoirs souverains des cités ou des nations en litige travaillent à s'entendre, à supprimer le conflit. Pour cela, les vertus les plus hautes devront se trouver en la personne des souverains.

La vertu par excellence, ici, sera la vertu de justice.

Encore est-il qu'une distinction de la plus grande importance va s'imposer à nous quand nous parlerons de justice dans les rapports des nations entre elles ou des souverains et des peuples entre eux.

Cette justice, quelle sera-t-elle? Nous avons parlé de justice, aussi, quand il s'est agi de l'organisation de la cité. Nous avons signalé, avec Aristote et saint Thomas, une certaine espèce de justice par excellence, la vertu qui, dans l'ordre naturel humain, doit être considérée par nous comme la vertu la plus haute, la plus parfaite, celle qui, dans l'ordre naturel humain, tient la place de la charité dans l'ordre surnaturel divin.

Elle porte un nom qui nous a permis de reconnaître, en elle, ce que pourrait avoir de vrai et de bon cette doctrine de Rousseau qu'il a exposée lui-même d'une façon équivoque et dont le sens mauvais a prévalu dans la constitution du droit politique moderne, préparant et amenant toutes les iniquités et les ruines au milieu desquelles se débat le genre humain.

C'était la justice générale ou légale….

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Message  Louis Mar 17 Avr 2012, 12:55

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C'était la justice générale ou légale.

Par cette vertu, qui doit régner au cœur de tous les membres de la cité, gouvernants et gouvernés, chaque membre conspire, selon le mode qui lui revient en propre, à faire prévaloir, en tout, l'intérêt général ou le bien commun. C'est la vertu spécifique du corps social organisé. Et de même que dans le corps physique tous les membres conspirent naturellement au bien de l'ensemble, n'hésitant pas â se sacrifier, au besoin, pour que soit conservé ou promu le bien de l'ensemble ; de même, par la vertu de justice générale ou légale, et dans la mesure où elle règne, tous les membres conscients, toutes les unités civiques qui composent le corps social de la cité, de la nation, doivent conspirer, sans faiblesse et sans défaillance, au bien de l'ensemble, sachant, au besoin, sacrifier leur bien propre, individuel ou familial, ou de groupe particulier, pour la conservation et la promotion du bien commun, objet propre ou fin spécifique du corps social qu'est la cité ou la nation.

Quand il s'agit des rapports des nations entre elles ou des souverains des peuples entre eux, il n'y aura plus à parler de justice au sens que nous venons de rappeler….

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Message  Louis Mer 18 Avr 2012, 07:58

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Quand il s'agit des rapports des nations entre elles ou des souverains des peuples entre eux, il n'y aura plus à parler de justice au sens que nous venons de rappeler. La justice qui devra présider à leurs rapports sera tout autre. C'est la justice particulière, la justice proprement commutative, celle qui préside aux rapports des particuliers entre eux. Entre cette justice commutative, présidant aux rapports des peuples ou des souverains, et la justice commutative présidant aux rapports des particuliers, la seule différence consistera dans la nature des sujets de cette justice. Dans un cas, ce seront des individus humains, comme tels; dans l'autre, ce seront des chefs d'État ou des nations et des peuples. Mais la nature et les règles de la vertu seront les mêmes.

Tandis que la vertu de justice générale ou légale demande que les sujets en qui elle règne conspirent au bien de l'ensemble et sacrifient, au besoin, leur bien particulier à ce qui est le bien de tous, la justice particulière commutative ne comporte, de soi, aucun sacrifice. Elle a pour objet ce qui est dû, et dû en stricte justice, avec possibilité de s'acquitter purement et simplement, de telle sorte que, chacun ayant son dû, l'un ne doit plus rien à l'autre, et inversement. C'est la vertu qui préside aux rapports, non pas d'inférieur à supérieur ou de supérieur à inférieur, mais d'égal à égal. Que l'une des parties soit un peuple, une nation, un souverain, un État qui exerce son empire sur la moitié du genre humain, ou qu'elle soit une simple cité, mais souveraine, constituant un État indépendant, les droits sont absolument les mêmes de part et d'autre. Leurs rapports doivent être réglés selon les exigences de la justice la plus stricte. Aucune des deux parties n'a le droit d'exiger de l'autre un sacrifice quelconque en dehors de ce que demande la justice stricte commutative.

L'on peut voir tout de suite les conséquences.

Si la vertu de justice règne parmi ces peuples, ou ces nations, ou ces États, ou ces souverains; à supposer que des heurts ou des causes de conflits se produisent — et il s'en produira fatalement, selon que les intérêts pourront se trouver en contact, — il est permis d'espérer qu'on pourra s'entendre et régler pacifiquement le heurt ou le conflit.

Mais, si l'on ne s'entend pas, si, par malice, ou même de bonne foi, le conflit s'envenime; alors, quelle perspective atrocement douloureuse ! II ne restera plus, en effet, que la force pour trancher le différend.

On s'est demandé, il est vrai, et l'on se demande, en ce moment, plus que jamais, s'il n'y aurait pas quelque moyen humain de prévenir une telle nécessité…


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Message  Louis Mer 18 Avr 2012, 12:15

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On s'est demandé, il est vrai, et l'on se demande, en ce moment, plus que jamais, s'il n'y aurait pas quelque moyen humain de prévenir une telle nécessité.

Autrefois, Dante avait songé, dans ce but, à l'établissement d'un Empire universel, où tous les peuples, toutes les nations obéiraient politiquement à un seul chef, à une seule autorité souveraine. La conception était grandiose et noble. Mais, pratiquement, elle est chimérique. Elle ne répond pas aux conditions qui sont celles du genre humain. Et, même en supposant qu'un tel Empire pût s'établir, il y a lieu de se demander s'il supprimerait le mal. N'y verrait-on pas, comme ce fut le cas de l'Empire romain devenu trop vaste, les guerres étrangères remplacées par un mal plus grand encore, qui est celui des guerres civiles ?

De nos jours, une double tentative a été essayée, pour prévenir ce mal terrible entre tous, qui s'appelle la guerre. L'une de ces tentatives, celle de la conférence de la Haye, a été interrompue par la plus effroyable de toutes les guerres que l'histoire ait connue.

L'autre a été suggérée par cette guerre elle-même. Elle a été proposée et décrétée pour y mettre fin et pour en prévenir à tout jamais, s'il était possible, le renouvellement.

Il s'agit de la Société des Nations.

Les résultats obtenus jusqu'ici ne permettent guère de se prononcer sur l'efficacité du remède…

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Message  Louis Jeu 19 Avr 2012, 07:54

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… la Société des Nations.

Les résultats obtenus jusqu'ici ne permettent guère de se prononcer sur l'efficacité du remède.

A l'étudier dans sa nature et tel qu'il a été promulgué ou que nous le voyons appliqué sous nos yeux, des questions délicates et importantes se posent devant le regard de l'esprit impartial.

Cette Société des Nations doit-elle s'entendre au sens d'une société proprement dite, politiquement organisée?

Mais alors, il s'y trouvera une autorité, un pouvoir souverain, ayant le droit de légiférer, avec une armée à lui et des sanctions efficaces.

Et ce sera un sur-État. Ce sera la destruction des nations comme Étals indépendants.

Il en est qui acceptent ces conséquences. D'autres s'en défendent.

Disons, simplement, que les peuples et les nations ne paraissent guère orientés dans ce sens : jamais, peut-être, le sentiment des nationalités rivales n'a été plus aigu.

Du reste, la réalisation de ce sur-État paraît devoir être impossible et inefficace. Comment administrer tout l'univers, au sens d'une administration politique et civile? Et le pourrait-on, il arriverait fatalement, nous le disions tout à l'heure au souvenir de l'Empire romain, que les guerres civiles remplaceraient, par un mal plus grand, le mal de la guerre étrangère.

On peut concevoir la Société des Nations comme une société de coassociés égaux en droit, sans pouvoir souverain.

Mais, que deviendront les petits États en face des plus grands, à supposer que tous les souverains ou tous les peuples ne soient pas animés par les sentiments de la plus parfaite, de la plus idéale justice?

Et s'il est des États qui n'en fassent point partie…


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Message  Louis Jeu 19 Avr 2012, 15:44

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Et s'il est des États qui n'en fassent point partie, ou qui résistent aux décisions prises dans ce qu'on appellera le Conseil des Nations, comment les traiter? Ira-t-on jusqu'à les combattre? Ce sera de nouveau la guerre et, cette fois, la guerre en quelque sorte universelle, où toutes les nations risqueront de se trouver engagées.

Une autre question, plus grave encore, se pose au sujet de cette Société des Nations.

Quel en sera l'esprit?

Son premier acte n'a-t-il pas été de choisir, pour centre, Genève, où d'aucuns ont voulu voir un geste peu sympathique à l'endroit de la Rome catholique? Et l'un de ses premiers représentants, qui comptait parmi les plus en vue dans certain milieu politique français, n'a-t-il pas proposé de décréter l'acceptation pour toutes les nations des lois dites de laïcité ?

Toujours est-il que le fait de son inauguration parmi les peuples n'a pas suffi pour supprimer tous les conflits armés.

Même avec la Société des Nations, les guerres continuent.

Sans se flatter de parvenir à les supprimer, il y a lieu de se demander si d'autres moyens, des moyens d'un ordre supérieur et qui dépasseraient l'ordre purement politique humain, ne seraient pas d'une efficacité plus grande, pour assurer le moins imparfaitement possible ce bien précieux entre tous, qu'est la paix régnant parmi les nations.

Mais ceci ouvre devant nous des perspectives qui ne seront plus celles de la seule raison humaine.

Nous aurons à nous en occuper dans les études qui vont suivre.
A suivre : PROPÉDEUTIQUE— I. RAISON ET FOI

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Message  Louis Ven 20 Avr 2012, 07:04

PROPÉDEUTIQUE

I. RAISON ET FOI
Le titre que nous venons d'énoncer nous fait entrevoir ce qui va être le sujet de nos nouvelles études.

Jusqu'ici nous avons vécu dans le domaine de la raison. Nous avons parcouru, exploré ce domaine dans son ensemble.

Dès le premier jour où nous l'abordâmes, nous eûmes soin d'en tracer les lignes essentielles. Nous n'avions plus à en sortir au cours de notre étude. Sous la conduite des deux plus grands génies de la pensée humaine, Aristote et saint Thomas, nous prîmes comme fil conducteur et comme phare éclairant notre marche, cette idée d'ordre, qui semble résumer à elle seule tout l'office et tout le domaine de la raison, s'identifiant à elle, en quelque sorte; car le propre de la raison, c'est l'ordre : rationis est ordinare.

Il fallait d'abord s'appliquer à fixer l'ordre de la raison elle-même, dans ses propres actes.

Ce fut l'objet de nos considérations sur la Logique. Nous étudiâmes successivement chacune des trois opérations de l'esprit, qui sont : la perception des idées ou des notions universelles; le jugement, qui rapproche ou éloigne ces idées ou ces notions comparées entre elles ; le raisonnement, qui éclaire par des notions plus immédiates le rapport demeuré obscur de notions distantes les unes des autres.

C'est tout le procédé de notre raison, toute la vie de notre pensée sur cette terre, que nous assurions par là, nous ouvrant le chemin du vrai et nous prémunissant contre la possibilité de l'erreur.

Mais il fallait ensuite…

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Message  Louis Ven 20 Avr 2012, 12:43

PROPÉDEUTIQUE

I. RAISON ET FOI (suite)
Mais il fallait ensuite nous mettre à la recherche du vrai, du vrai essentiel et vital, sans lequel il ne saurait être question de vraie vie humaine parmi nous et en chacun de nous.

Notre étude, dans cette recherche du vrai essentiel et vital, devait se porter tout de suite ou en premier lieu sur les êtres matériels et physiques au milieu desquels nous vivons et dont nous faisons partie nous-mêmes.

Non pas que notre étude dût se porter sur chacun de ces êtres en particulier ou sur le détail de leurs modalités extérieures et sensibles. Ceci relève plutôt de l'observation des sens et de l'organisation de notre vie matérielle.

Notre étude ne devait pas être celle de l'observateur purement sensible ou du simple savant qui expérimente en fonction du seul monde matériel à connaître et à utiliser. C'était l'étude du philosophe, du sage, qui veut aller au fond des choses, et saisir, dans ce fond dernier, les rapports essentiels qui commandent ou expliquent tout selon les dernières exigences de la raison.

Et, aussitôt, dès notre premier pas dans cette étude, nous étions mis en présence du problème foncier, qui porte tous les autres, celui de la nature des corps, des êtres corporels. Là, nous apparaissait, dans toute sa radieuse clarté intellectuelle, cette admirable doctrine d'Aristote et de saint Thomas, nous montrant, au dernier fond de tout être corporel, un double principe qui constitue sa nature ou son essence : l'un, principe d'étendue, que nous appelions la matière; l'autre, principe d'unité et d'action, que nous appelions la forme. Et c'était l'union de ces deux principes, leur gradation proportionnée dans les divers êtres corporels, qui allait nous expliquer toutes les merveilles du monde de la nature, dans la hiérarchie de ses divers règnes : …


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Message  Louis Sam 21 Avr 2012, 07:39

PROPÉDEUTIQUE

I. RAISON ET FOI (suite)
...Et c'était l'union de ces deux principes, leur gradation proportionnée dans les divers êtres corporels, qui allait nous expliquer toutes les merveilles du monde de la nature, dans la hiérarchie de ses divers règnes :

Règne minéral, avec toutes les possibilités de mutation el de transformation substantielle;

Règne végétal, où apparaissait, pour la première fois, la vie, avec sa triple fonction, en vertu de laquelle le vivant se nourrit, grandit et se reproduit;

Règne animal ou de vie sensible, qui nous faisait pénétrer plus excellemment dans ce monde mystérieux de la vie où la perfection se gradue à l'intimité du mouvement qui la distingue ;

Règne humain, qui s'épanouissait en vie de pensée, d'amour, de liberté, d'agir moral ; mais qui laissait entrevoir un monde supérieur dans lequel devait se trouver et ne pouvait se trouver que la vie de la pensée, de l'amour, de la liberté ; sans aucune des misères ou des pauvretés de notre vie sensible ou animale et végétative, pouvant amener la dissolution des vivants par la mort ;

Plus encore, nous entrevoyions, au sommet de l'échelle des êtres, ce Vivant parfait, tout de lumière, d'amour, de liberté, d'indépendance, qui ne pouvait se définir, mais que nous appelions, ne pouvant mieux faire, l'Être même, l'Acte pur, l'Absolu, le Dieu vivant, qui seul s'explique par Lui-même et de qui tout dépend en dehors et au-dessous de Lui.

Parvenus à ce sommet, nous n'avions pas à rechercher plus haut. Nous avions la clé dernière de l'ordre des choses, vu à la lumière de la raison.

Mais, sur cet ordre des choses perçu par notre raison…

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