LE DON DE CRAINTE (suit le sujet de l'espérance) SAINT THOMAS D'AQUIN

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Message  ROBERT. Sam 14 Mai 2011, 6:45 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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L'ESPÉRANCE

QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.


ARTICLE 2.

La présomption est-elle un péché ? (suite)


CONCLUSION : Ainsi que nous l'avons dit pour le désespoir, tout mouvement du désir, qui se produit en conformité avec une connaissance erronée, est de soi mal et péché. Or la présomption est un mouvement appétitif, car elle implique une espérance désordonnée. Par ailleurs elle s'établit en conformité avec une connaissance fausse, ainsi que le désespoir : de même, en effet, qu'il est faux que Dieu ne pardonne pas à ceux qui se repentent, ou qu'il ne convertisse pas les pécheurs à la pénitence, de même il est faux qu'il accorde son pardon à ceux qui persévèrent dans le péché, et qu'il dispense sa gloire à ceux qui cessent de faire le bien; et c'est en conformité avec cette opinion que s'opère le mouvement de présomption. C'est pourquoi la présomption est un péché; moins grave cependant que le désespoir, et ceci dans la mesure même où c'est davantage le propre de Dieu d'être miséricordieux et de pardonner que de punir, à cause de son infinie bonté. Etre miséricordieux convient à Dieu par sa nature même; être justicier lui convient à cause de nos péchés [89].





Note explicative :


[89] Qu. 21, art. 2, conclusion. — La miséricorde est la compassion que nous ressentons devant la misère d'autrui et qui nous pousse à la soulager. Analogiquement, nous trouvons en Dieu la miséricorde comme l'un de ses attributs; en face de l'indigence de notre nature et de ses faiblesses multiples et multiformes, Dieu est rempli de compassion, et il tend à combler cette misère en nous faisant participer à la richesse de son être. Dans toute œuvre de Dieu apparaît la miséricorde comme sa première racine, jusque dans la création où l'absence d'être est une misère que Dieu se hâte de combler.

L'ordre même de la justice repose sur la miséricorde, car Dieu ne réclame rien qu'il n'ait d'abord donné et surabondamment. Mais, cependant, la miséricorde divine porte surtout sur le péché, parce que la pire misère est celle de la faute, opposée qu'elle est à la félicité; c'est pourquoi, quand on parle de miséricorde, c'est surtout pour le péché, dans le pardon duquel Dieu déploie une spéciale profusion de bonté. Cette diffusion si complète de bonté est l'expression de la nature même de Dieu, tandis que sa justice dit rapport à nos péchés; Dieu est miséricordieux par nature, et justicier par force, parce que nous l'y obligeons. C'est qu'en effet l'ordre de la justice comporte les rapports de la Sagesse de Dieu avec nous, tels qu'il nous a créés et tels qu'il nous juge en bien ou en mal; tandis que la miséricorde n'est pas limitée par nous comme l'est la justice : elle ne fait que réfléchir, qu'exprimer la pure essence de Dieu. Aussi l'ordre de la miséricorde dépasse-t-il celui de la justice : on peut toujours en appeler de la justice à la miséricorde. Mais qui refuse cet ordre supérieur de la miséricorde, retombe nécessairement sous l'ordre de la justice et se trouve perdu : c'est l'irrémissible enfer; d'où la gravité extrême du désespoir. (Voir S. Thomas : Ia, qu. 21, art. 1 et 2, qu. 25, art. 3 et 5 et le Père Lacordaire, 72eConférence à Notre-Dame).

— Par ailleurs cette miséricorde divine s'allie parfaitement à la toute-puissance, car la toute-puissance de Dieu se montre surtout en pardonnant et en faisant miséricorde; remettre les péchés à son gré est la marque du suprême pouvoir, vu que celui-là ne le pourrait point qui serait lié par une loi supérieure, et parce qu'en pardonnant et en faisant miséricorde aux hommes, Dieu les amène à participer au bien infini, ce qui est le souverain effet de la puissance divine. C'est pourquoi on peut, en toute vérité, donner comme motif formel à l'espérance la toute-puissance miséricordieuse et juste de Dieu.

— Ajoutons que le terme de Dieu juste ne doit pas être pris au seul sens restrictif de Dieu justicier. Dieu est juste aussi quand il nous récompense selon nos mérites, et quand il est fidèle à sa parole et aux promesses qu'il nous a faites : Dieu rémunérateur, Dieu fidèle, est Dieu juste. Cette évocation de Dieu juste, cette invocation à Dieu juste, nous les trouvons tout au long de l'Ecriture Sainte, et dans les Actes des Martyrs. Et dans cette justice même la miséricorde demeure car Dieu, en nous, ne fait jamais que combler ses dons gratuits.






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Message  ROBERT. Dim 15 Mai 2011, 6:28 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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L'ESPÉRANCE

QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.

ARTICLE 2.

La présomption est-elle un péché ? (suite)


SOLUTIONS : 1. "Présumer" est quelquefois mis pour "espérer": c’est que la véritable espérance que nous avons en Dieu semble elle-même une présomption, mesurée à la condition de l'homme. Mais elle n'est pas présomption, si on prend garde à l'immensité de la bonté divine.


2. LA PRÉSOMPTION N'IMPLIQUE PAS UN EXCÈS D'ESPÉRANCE DU FAIT QU'ON ESPÈRE TROP DE DIEU, MAIS DU FAIT QU'ON ATTEND DE DIEU CE QUI NE CONVIENT PAS À DIEU. Et c'est là aussi trop peu espérer de lui, car c'est, dans une certaine mesure, diminuer sa puissance.


3. PÉCHER AVEC LE PROPOS DE PERSÉVÉRER DANS SA FAUTE À CAUSE DE L'ESPÉRANCE DU PARDON, C'EST FORMELLEMENT DE LA PRÉSOMPTION. ET CETTE CIRCONSTANCE NE DIMINUE PAS, MAIS AU CONTRAIRE AUGMENTE LE PÉCHÉ. Mais pécher tout en gardant l'espérance de recevoir un jour son pardon, en se proposant d'abandonner le péché et d'en faire pénitence, ce n'est pas de la présomption, et une telle circonstance diminue le péché; car c'est manifester qu'on a une volonté moins décidée à pécher [90]



Note explicative :

[90] Ibid., sol. 3. — Cette forme bénigne de la présomption se présente surtout chez les âmes faibles partagées entre le bien qu'elles aiment et le mal qui les attire. Peut-être le péché en paraît-il facilité, mais la volonté est moins ferme dans le mal, et l'homme garde son ordination intime à la miséricorde divine qui est plus grande que tous nos maux. Bien entendu, si ce sentiment ne servait qu'à excuser la persévérance dans le mal, nous aurions une présomption des plus caractérisées.




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Message  ROBERT. Lun 16 Mai 2011, 9:22 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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L'ESPÉRANCE

QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.

ARTICLE 3.

La présomption s’oppose-t-elle plus à la crainte qu’à l’espérance ?


DIFFICULTÉS : Il semble bien que la présomption s'oppose plus à la crainte qu'à l'espérance. En effet :

1. La crainte désordonnée s'oppose à la crainte rectifiée. Or la présomption semble en rapport avec un désordre de la crainte; la Sagesse déclare en effet que "la crainte favorise la présomption parce qu'une conscience qui n'est pas tranquille présume toujours le pire". La présomption s'oppose donc à la crainte plus qu'à l'espérance.


2. Sont contraires les réalités qui se trouvent à distance extrême l'une de l'autre. Or la présomption est plus distante de la crainte que de l'espérance, car la présomption implique un mouvement vers son objet, tout comme l'espérance, tandis que la crainte s'éloigne de son objet. La présomption est donc plus contraire à la crainte qu'à l'espérance.


3. La présomption supprime totalement la crainte; ce n'est pas totalement qu'elle exclut l'espérance, mais seulement sa certitude. Puisque sont opposées les réalités qui se détruisent l'une l'autre, il semble que la présomption s'oppose plus à la crainte qu'à l'espérance.


CEPENDANT, deux vices opposés l'un à l'autre sont contraires à une même vertu : ainsi la timidité et l'audace en face de la force. Mais le péché de présomption est contraire au péché de désespoir, qui s'oppose directement à l'espérance. Il semble donc que la présomption aussi s'oppose plus directement à l'espérance.





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Message  ROBERT. Mer 18 Mai 2011, 8:31 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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L'ESPÉRANCE

QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.


ARTICLE 3.

La présomption s’oppose-t-elle plus à la crainte qu’à l’espérance ? (suite)


CONCLUSION : Au dire de S. Augustin, "Toutes les vertus ont en face d'elles, non seulement les vices qui s'y opposent par une différence manifeste, comme la témérité et la prudence, mais aussi ceux qui, sous quelque aspect, leur sont voisins et leur ressemblent, non pas véritablement, mais sous une trompeuse apparence, comme l'astuce et la prudence". Et Aristote dit aussi qu'une vertu semble avoir une symétrie plus étroite avec l'un des vices qui lui sont opposés qu'avec l'autre : ainsi la tempérance avec l'insensibilité, et la force avec l'audace.

— La présomption semble bien comporter une évidente opposition avec la crainte, surtout la crainte servile qui vise la peine provoquée par la justice de Dieu et dont la présomption espère la remise. Mais une fausse ressemblance la rend davantage contraire à l'espérance, car elle implique une espérance désordonnée en Dieu. Et parce que c'est plus directement que s'opposent les réalités qui sont d'un même genre, que celles qui appartiennent à des genres divers, (les contraires étant dans un même genre) [91], c'est à l'espérance plus directement qu'à la crainte que s'oppose la présomption : l'une et l'autre regardent le même objet sur lequel elles s'appuient, mais l'espérance dans l'ordre, et la présomption dans le désordre.




Note explicative :

[91] Qu. 21, art. 3, conclusion. — Les espèces d'oppositions sont au nombre de quatre (d'après Commentaires sur les Métaphysiques d'Aristote, livre V, leçon 12), qui se placent, de la plus radicale à la moins radicale, dans l'ordre suivant :

opposition de contradiction, par négation absolue : être, non être;
opposition de contrariété : entre deux espèces;
opposition de simple privation : animé, inanimé;
opposition de relation.

Entre deux espèces d'un même genre, il y a un élément commun, le genre, et un élément positif différent, la différence spécifique, qui, ajoutée au genre, rend les espèces irréductibles, par une opposition de contrariété, qui n'existe jamais entre deux genres; il y a entre ceux-ci, soit simple altérité, s'ils ne sont pas subordonnés, soit, s'ils sont subordonnés, une simple privation, puisque l'opposition résulte de la seule négation, dans le genre inférieur, de la différence spécifique. C'est pourquoi la présomption s'oppose davantage à l'espérance (espèce contre espèce) qu'à la crainte (genre contre genre).



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Message  ROBERT. Jeu 19 Mai 2011, 8:03 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.


ARTICLE 3.

La présomption s’oppose-t-elle plus à la crainte qu’à l’espérance ? (suite)


SOLUTIONS : 1. C'est d'une manière abusive qu'on parle d'espérance à propos d'un mal, car à proprement parler il n'y a d'espérance que du bien; de même en est-il pour la présomption. Et c'est de cette façon qu'on appelle présomption le désordre de la crainte.


2. Sont contraires les réalités qui sont à distance extrême dans un même genre. Or la présomption et l'espérance comportent un mouvement d'un même genre, et qui peut être ou dans l'ordre ou désordonné. Et c'est pourquoi la présomption est plus directement contraire à l'espérance qu'à la crainte; car elle s'oppose à l'espérance en raison d'une différence propre, comme ce qui est désordonné à ce qui est ordonné, mais elle s'oppose à la crainte à cause de la différence de son genre, qui est un mouvement d'espérance.


3. Parce que la présomption s'oppose à la crainte par contrariété de genre, et à la vertu d'espérance par contrariété de différence, la présomption supprime totalement la crainte, même quant au genre; mais elle ne supprime l'espérance que dans sa différence spécifique, par exclusion de l'ordre qu'implique l'espérance [92].





Note explicative :

[92] Ibid., sol. 3. — La présomption supprime le genre même de mouvement appétitif que représente la crainte, celle-ci se caractérisant par une fuite loin de son objet, celle-là étant une tendance vers son objet. Mais elle ne supprime dans l'espérance que la différence spécifique, leur genre commun demeurant un mouvement vers Dieu, et la présomption n'étant qu'une espérance en dehors de son ordre. Il y a donc entre présomption et espérance une contrariété de différences spécifiques, opposition plus radicale que celle de genre à genre. ( Voir note précédente.)





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Message  ROBERT. Sam 21 Mai 2011, 7:46 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.


ARTICLE 4.

La cause de la présomption est-elle la vaine gloire ?

DIFFICULTES : Il semble que la présomption n'ait pas pour cause la vaine gloire. En effet :


1. La présomption paraît s'appuyer à l'extrême sur la divine miséricorde. Or la miséricorde regarde la misère, qui s'oppose à la gloire. La présomption n'a donc pas pour origine la vaine gloire.

2. La présomption s'oppose au désespoir. Or le désespoir naît de la tristesse. Comme des réalités opposées ont des causes opposées, il semble que la présomption sorte de la délectation. Et ainsi il paraît bien qu'elle a son origine dans les vices de la chair, dont les délectations sont les plus violentes.

3. Le vice de présomption consiste en ce que l'homme tend, comme s'il le pouvait vraiment, à un bien qu'il ne peut pas atteindre. Or estimer possible ce qui est impossible, cela vient de l'ignorance. La présomption a donc pour cause l'ignorance plus que la vaine gloire.


CEPENDANT, S. Grégoire déclare que la présomption des nouveautés est fille de la vaine gloire.






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Message  ROBERT. Mar 05 Juil 2011, 8:08 pm

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IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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L'ESPÉRANCE

QUESTION 21.

LA PRÉSOMPTION.


ARTICLE 4.

La cause de la présomption est-elle la vaine gloire ? (suite)



CONCLUSION : Nous avons signalé une double présomption. L'une prend appui sur la valeur personnelle du sujet et poursuit un objet imaginé possible à atteindre alors qu'il dépasse les forces propres de ce sujet. Une telle présomption vient manifestement de la vaine gloire : désirant beaucoup de gloire, il s'ensuit qu'on s'attaque à une gloire au-dessus de ses forces. Et au premier rang de ces gloires, il y a les nouveautés qui sont objets de la plus grande admiration. C'est pourquoi S. Grégoire a mis à bon droit la présomption des nouveautés comme fille de la vaine gloire.


— Il y a une autre présomption, qui s'appuie d'une façon désordonnée sur la miséricorde et la puissance divines, ce qui lui donne l'espérance d'obtenir la gloire sans mérites et le pardon sans pénitence. Pareille présomption paraît bien sortir en ligne directe de l'orgueil : l'homme a de lui-même une telle estime qu'il arrive à penser que, même pécheur, Dieu ne peut pas le punir ni l'exclure de sa gloire.


Cet exposé de la conclusion suffit pour résoudre les difficultés [93].





Note explicative :

[93] Qu. 21, art. 4, fin. — Tout ce qui peut enfler l'orgueil ou sort de lui, les plaisirs charnels comme l'ignorance coupable, est à mettre dans les origines de la présomption.





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Message  ROBERT. Dim 10 Juil 2011, 4:24 pm

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L'ESPÉRANCE

QUESTION 22.

LES PRÉCEPTES DE LA LOI RELATIFS À L'ESPÉRANCE ET À LA CRAINTE.



ARTICLE 1.

Y a-t-il lieu de donner quelque précepte relatif à l’espérance ? (suite)



CONCLUSION: Parmi les préceptes qu'on trouve dans la Sainte Ecriture, certains portent sur la substance de la loi, d'autres sont des préambules à la loi.

— Sont des préambules à la loi ceux dont la non-existence ne laisse aucune place possible à la loi. Tels sont les préceptes relatifs à l'acte de foi et à l'acte d'espérance : car c'est par l'acte de foi que l'esprit de l'homme est incliné à reconnaître que l'auteur de la loi est tel qu'on doive se soumettre à lui; c'est par l'espérance de la récompense que l'homme est porté à l'observation des préceptes.

— Sont des préceptes touchant la substance de la loi ceux qui sont imposés à l'homme déjà soumis et prêt à obéir, et dont le rôle est d'assurer la rectitude de la vie. C'est pourquoi ces préceptes sont, dans la promulgation de la loi, proposés de suite par mode de commandements.

— Or il n'y avait pas à proposer les préceptes de l'espérance et de la foi sous ce mode impératif, car, si l'homme déjà ne croit et n'espère, c'est inutilement que la loi les lui proposerait. Mais de même que le précepte de la foi a dû être proposé par mode de déclaration ou de rappel, de même aussi il a fallu, dans la première promulgation de la loi, proposer le précepte de l'espérance sous forme de promesse : celui, en effet, qui promet des récompenses à ceux qui obéissent, incite par là même à l'espérance. C'est ce qui fait que toutes les promesses contenues dans la loi ont pour but de promouvoir l'espérance.

— Toutefois, quand la loi est déjà établie, il appartient aux sages, non seulement d'amener les hommes à l'observation des préceptes, mais aussi et bien davantage de les amener a garder les fondements de la loi; c'est pourquoi, après le premier établissement de la loi, la Sainte Ecriture pousse les hommes à l'espérance de multiples façons, même par mode d'admonition ou de précepte, et non plus seulement par mode de promesse, comme dans la loi. Ainsi voit-on dans le Psaume: "Espérez en lui, tous les groupes du peuple"; et de même dans bien d'autres endroits de l'Ecriture.







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Message  ROBERT. Lun 11 Juil 2011, 3:20 pm

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L'ESPÉRANCE

QUESTION 22.

LES PRÉCEPTES DE LA LOI RELATIFS À L'ESPÉRANCE ET À LA CRAINTE.


ARTICLE 1.

Y a-t-il lieu de donner quelque précepte relatif à l’espérance ? (suite)


SOLUTIONS : 1. La nature donne l'inclination suffisante pour espérer le bien proportionné à la nature humaine. Mais pour que l'homme espère le bien surnaturel, il a fallu que le pousse l'autorité de la loi divine, en partie par des promesses, en partie par des admonitions et des préceptes. — Et cependant, même pour des réalités auxquelles la raison naturelle incline, comme sont les actes des vertus morales, il a été nécessaire que soient donnés des préceptes de la loi divine, en vue d'un affermissement plus grand, et surtout à cause de l'obscurcissement de la raison naturelle par les concupiscences du péché.


2. Les préceptes du décalogue se rattachent au premier établissement de la loi. Et c'est pourquoi, dans ces préceptes, il n'y a pas eu à donner de commandement relatif à l'espérance : mais il a suffi de pousser à l'espérance, en mettant quelques promesses, comme on le voit dans le premier précepte et dans le quatrième.


3. Pour les choses dont l'observation est exigée comme un devoir, il suffit de donner un précepte affirmatif au sujet de ce qui doit être fait : et par là même sont comprises les interdictions des actes à éviter. C'est ainsi qu'il y a le précepte d'honorer ses parents; mais il n'y a pas d'autre défense d'insulter ses parents que l'adjonction, dans la loi, d'une peine, pour les fils irrespectueux. Et parce que l'espérance est d'obligation pour son salut, l'homme y a été poussé de l'une des façons susdites, dont la forme quasi affirmative contient la défense de l'acte contraire.








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Message  ROBERT. Mar 12 Juil 2011, 5:37 pm

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L'ESPÉRANCE

QUESTION 22.

LES PRÉCEPTES DE LA LOI RELATIFS À L'ESPÉRANCE ET À LA CRAINTE.

ARTICLE 2.

Y a-t-il eu lieu de donner quelque précepte relatif à la crainte ?

DIFFICULTÉS : Il semble qu'il n'y ait pas eu lieu de donner, dans la loi, un précepte relatif à la crainte. En effet :

1. La crainte de Dieu porte sur des choses qui sont des préambules à la loi, puisqu'elle est le commencement de la sagesse. Or les préambules à la loi ne tombent pas sous le précepte de la loi. Il n'y a donc pas à donner de précepte légal concernant la crainte.


2. La cause posée, l'effet l'est aussi. Or l'amour est cause de la crainte, car toute crainte procède d'un amour, au dire de S. Augustin. Donc, posé le précepte de l'amour, il aurait été superflu d'ordonner la crainte.


3. A la crainte s'oppose, d'une certaine manière, la présomption. Or on ne trouve pas que la loi ait promulgué une prohibition concernant la présomption. Il semble donc aussi qu'il n'y ait pas eu à donner de précepte relatif à la crainte.


CEPENDANT, le Deutéronome déclare: "Maintenant, Israël, que demande de toi le Seigneur ton Dieu, si ce n'est que tu craignes le Seigneur ton Dieu ?" Or Dieu réclame de nous ce qu'il nous commande d'observer. C'est donc bien un objet de précepte qu'on craigne Dieu.





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Message  ROBERT. Ven 15 Juil 2011, 8:56 pm

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L'ESPÉRANCE

QUESTION 22.

LES PRÉCEPTES DE LA LOI RELATIFS À L'ESPÉRANCE ET À LA CRAINTE.

ARTICLE 2.

Y a-t-il eu lieu de donner quelque précepte relatif à la crainte ? (suite)


CONCLUSION : Il y a une double crainte, servile et filiale. De même que l'homme est amené à l'observation des préceptes de la loi par l'espérance des récompenses, de même aussi est-il poussé à l'observation de la loi par la crainte des peines, crainte servile. Et c'est pourquoi, comme dans l'établissement même de la loi il n'y eut pas à donner de précepte relatif à l'acte d'espérance, les hommes devant y être amenés par les promesses, ainsi, relativement à la crainte de la peine, il n'y eut pas à donner de précepte par mode impératif, les hommes devant y être conduits par la menace des châtiments. Ce qui fut fait, et dans les préceptes mêmes du décalogue, et ensuite par voie de conséquence dans les préceptes secondaires de la loi. Mais de même que, par la suite, les sages et les prophètes, en vue de stabiliser les hommes dans l'obéissance à la loi, livrèrent des enseignements relatifs à l'espérance, sous mode d'admonition et de précepte, de même firent-ils aussi pour la crainte.

— Quant à la crainte filiale, qui témoigne révérence à Dieu, elle est comme un genre relativement à l'amour de Dieu et un principe de toutes les observances accomplies en révérence de Dieu. Et c'est pourquoi, pour la crainte filiale, la loi a donné des préceptes, comme aussi pour la charité : car l'une et l'autre sont un préambule aux actes extérieurs qui sont ordonnés dans la loi, et que visent les préceptes du décalogue. Et c'est pourquoi l'autorité scripturaire invoquée ici réclame de l'homme la crainte, et pour qu'il marche dans les voies de Dieu, en lui rendant un culte, et pour qu'il l'aime.






À suivre…
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Message  ROBERT. Sam 16 Juil 2011, 8:00 pm

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LE DON DE CRAINTE (suit le sujet de l'espérance)  SAINT THOMAS D'AQUIN - Page 3 Saint_13
IIa-IIæ, qu. 21, par J. Le Tilly, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


.

L'ESPÉRANCE

QUESTION 22.

LES PRÉCEPTES DE LA LOI RELATIFS À L'ESPÉRANCE ET À LA CRAINTE.

ARTICLE 2.

Y a-t-il eu lieu de donner quelque précepte relatif à la crainte ? (suite)


SOLUTIONS : 1. La crainte filiale est un préambule à la loi, non pas comme quelque chose d'externe, mais comme le principe de la loi, de même aussi que la dilection. Et c'est pourquoi on a donné, au sujet de l'une et de l'autre, des préceptes qui sont comme des principes communs de toute la loi.


2. A l'amour fait suite la crainte filiale, comme aussi toutes les autres bonnes œuvres qui sont faites sous la poussée de la charité. Et c'est pourquoi, de même qu'à la suite du précepte de la charité sont donnés les préceptes relatifs aux autres vertus, de même aussi sont donnés en même temps les commandements concernant la crainte et l'amour de chanté. Ainsi voit-on dans les sciences démonstratives qu'il ne suffit pas de poser les principes premiers, si on ne donne aussi les conclusions qui en découlent, soit d'une façon immédiate, soit d'une façon éloignée.


3. Amener à la crainte suffît pour empêcher la présomption, comme aussi amener à l'espérance suffit pour exclure le désespoir.


FIN DU TRAITÉ DE L’ESPÉRANCE.

Les Renseignements techniques suivent.





Dernière édition par ROBERT. le Sam 16 Juil 2011, 8:02 pm, édité 1 fois (Raison : balisage)
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Message  ROBERT. Dim 17 Juil 2011, 8:35 pm

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En ce qui concerne les renseignements techniques, ils sont tous à la fin pour en faire une lecture moins aride, chacun prenant ce qu’il juge utile pour sa compréhension. Leur pagination sera d’un grand secours. Je n’ai pas voulu les intercaler dans les notes explicatives comme telles, ce qui aurait alourdi inutilement et considérablement la lecture des questions et réponses de Saint Thomas d’Aquin…



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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

NOTES DOCTRINALES THOMISTES.



A. NOTES DOCTRINALES THOMISTES.

I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 193-194 (note explicative 4)


(Question 17, art. 1).

L'étude de la vertu théologale d'espérance met à contribution toutes les analyses que S. Thomas a faites antérieurement sur la psychologie de l'espérance naturelle et qu'il applique ici analogiquement. Il n'est guère possible de comprendre un peu profondément la pensée de S. Thomas si l'on n'a pas présentes à l'esprit au moins les grandes lignes de cette psychologie naturelle.

1º La place de l'espérance dans le désir humain.

A la suite d'Aristote, S. Thomas distingue toutes les puissances par leurs objets qui sont pour elles comme des formes. Dans le désir sensible, la faculté qui a pour objet une réalité très à sa portée ou qu'elle considère en dehors de tout caractère de difficulté, est le concupiscible; celle qui a pour objet une réalité difficile à atteindre ou à repousser et qui par là réclame une énergie toute particulière, est l'irascible. Vis-à-vis de ces deux facultés, les différences des objets vont faire naître des réactions diverses, toutes contenues dans les deux expressions primordiales de l'affectivité : tendre au bien est fonction de l'amour; fuir le mal est fonction de la haine.

A l'intérieur de ces grandes catégories apparaissent de nouvelles distinctions suivant le degré de possession de l'objet par la faculté. Dans le concupiscible, la passion d'un bien possédé est la joie; la passion d'un bien non possédé est le désir; la passion d'un mal supporté effectivement est la tristesse; la passion d'un mal seulement menaçant est la fuite. L'irascible est ordonne au concupiscible, car jamais l'appétit ne se satisfait de la lutte, celle-ci étant toujours un moyen pour atteindre le repos consécutif à la tranquille possession d'un bien ou au rejet définitif d'un mal; l'irascible prend donc sa part des distinctions du concupiscible, mais, étant quelque chose de plus, il y a un principe propre de distinction, qui est ce caractère de difficulté qui affecte son objet. Ainsi avons-nous : la passion d'un bien difficile non possédé, mais qu'il est possible d'atteindre, est l'espérance ; celle d'un bien difficile non possédé et qu'on ne peut atteindre, est le désespoir: la passion d'un mal actuel, mais surmontable, est la colère; la passion d'un mal menaçant et qu'on estime possible de dominer, est l'audace; la passion d'un mal menaçant et quasi impossible à surmonter, est la crainte. Le tableau suivant montre schématiquement la place de chacune des passions.



à suivre…
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Message  ROBERT. Lun 18 Juil 2011, 5:50 pm

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A. NOTES DOCTRINALES THOMISTES.

I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 193-194 (note explicative 4)


(Question 17, art. 1).




pp. 195-196 (note explicative 4) (suite]


Le seul énoncé de ces onze passions suffit à manifester que le mot "passion" n'est pas pris chez les Scolastiques au même sens que chez les Modernes. Au Moyen-Age, comme chez Aristote, il signifie, entre autres acceptions, tout mouvement de l'appétit sensible vers un objet bon ou mauvais, abstraction faite de l'ordre moral; c'est la réaction des facultés du désir en face de leurs objets. Les Modernes appellent passions ces mêmes réactions, mais soustraites, volontairement ou non, à l'ordre de la raison. S. Thomas n'ignore pas ce sens (voir Ia-2æ, qu. 45. art. 1, ad 1), mais il réserve aux passions ainsi conçues le nom de vices. A proprement parler, seuls ont droit au nom de passion les mouvements de l'appétit sensible, à cause de l'union essentielle qu'ils comportent avec les réactions concomitantes de l'organisme. L'action de la volonté n'implique de soi ni concomitances organiques, ni même de différences spécifiques entre les diverses expressions de son activité; et pas davantage de diversité entre concupiscible et irascible : c'est une faculté simple en face d'un objet simple. Cependant, à cause de la ressemblance entre certains mouvements de la volonté et les réactions plus constatâmes du désir sensible, le langage se sert d'expressions telles que volonté-concupiscible et volonté-irascible, amour, haine, espérance, crainte, etc., sans qu'on doive se méprendre sur la valeur de ces appellations et sur la réalité qu'elles recouvrent.


L'espérance se manifeste donc comme un mouvement de l'irascible pour conquérir un objet bon, futur, difficile à saisir, et qu'il est cependant possible d'atteindre.


Puisque ce sont les objets qui sont comme les formes des facultés et des passions, la meilleure méthode pour étudier l'espérance est de voir d'abord son objet.

.


à suivre…
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Message  ROBERT. Mar 19 Juil 2011, 6:01 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

NOTES DOCTRINALES THOMISTES.


A. NOTES DOCTRINALES THOMISTES.

I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 195-196 (note explicative 4) (suite)


(Question 17, art. 1).



2º L'objet de l'espérance.

Il est double : la réalité même recherchée par l'irascible, et le secours qui rend possible cet objet convoité. Objet quod (speratur) et objet quo (speratur), disent les anciens. Objet et motif, dirions-nous plus volontiers actuellement. Ce double objet doit se manifester comme irréductible à tout autre s'il veut garder à la passion qu'il fait naître et qu'il informe, son caractère spécifique.

A. — L'objet de l'espérance est le bien, et non pas la vérité, parce que l'espérance ne recherche pas seulement la connaissance, mais la possession réelle. Par suite de cette bonté de l'objet, le mouvement d'espérance sera une tendance vers l'objet, et non, comme dans la crainte, un geste de fuite; et comme c'est au bien que tend naturellement l'appétit, tandis que c'est, par violence et contrainte qu'il s'en éloigne, voici que l'espérance se met d'emblée au rang des sentiments les plus naturels et les plus profonds de l'homme.

L'objet de l'espérance est futur, ce qui différencie ce sentiment de la joie, qui réclame la présence de son objet. C'est de maintes façons d'ailleurs que l'objet peut être futur : futur veut dire non-possédé, quel que soit le mode de cette non-possession. Tendance à un objet nécessairement futur, l'espérance ne peut pas trouver son terme en elle-même : quand elle a atteint son objet, celui-ci lui devient présent, et l'espérance disparaît pour laisser place à une passion du concupiscible, la joie, tout comme un changement de forme, dans les êtres corporels, entraîne nécessairement l'apparition d'une espèce nouvelle de réalité.

Le troisième caractère de l'objet de l'espérance est d'être ardu, ce qui le distingue de l'objet du désir qui se porte sur n'importe quel bien absent, abstraction faite des conditions particulières auxquelles est soumise sa possession. L'espérance reste bien un mouvement du désir, mais elle dit relation essentielle, formelle. à une difficulté, à ce point que la puissance qui correspond à cet objet ardu est autre que celle qui correspond à l'objet du désir. Ardu ne dit pas impossible à atteindre — ni non plus de valeur nulle — mais possible à atteindre, bien que difficile. Formellement, il ne faudrait même pas parler de réalité ardue comme objet de l'espérance, car de soi la difficulté ne peut qu'arrêter le mouvement de poursuite, puisqu'elle est un mal pour l'appétit chercheur de bien-être; il faut parler d'un bien ardu, ou mieux encore, en joignant les trois propriétés, d'un bien ardu possible. Mais alors. tel quel, cet objet est un véritable bien pour l'irascible, bien connaturel à cette puissance de lutte et auquel elle tend de toute sa constitution profonde comme le concupiscible tend au bien délectable; même vis-à-vis du concupiscible, cette difficulté, surmontable, ajoute à l'objet possédé une certaine plus value, un piquant au goût, à cause même du labeur qu'a réclamé la victoire.



pp.197-198. (note explicative 4)

Enfin l'objet de l'espérance est possible à atteindre, et c'est cette propriété qui apporte la formalité dernière à l'objet de l'espérance. Possible et impossible ne sont pas des prédicats accidentels à l'objet, car si le bien, possible, fait naître l'espérance, l'impossibilité de l'atteindre fera surgir le désespoir. C'est cette possibilité qui donne à l'objet sa bonté actuelle, et à la difficulté l'attrait spécial qui ébranle l'irascible vers la poursuite. La possibilité, caractère dernier de l'objet, le constitue formellement comme objet, explique et limite ses autres caractères, et fait de lui un objet absolument irréductible à toute autre espèce. Mais le terme même de possible indique une relation avec ce qui le rend possible, et ainsi nous amène à étudier la nature des forces qui assurent sa possibilité.

Ce qu'il importe de remarquer, c'est le caractère illimité et universel de cet objet : l'objet de l'espérance, c'est toute réalité qui, en fonction d'un sujet donné, se présente comme un bien, futur, ardu, possible à atteindre.





à suivre…
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Message  ROBERT. Mer 20 Juil 2011, 4:37 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

NOTES DOCTRINALES THOMISTES.



I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 197-198 (note explicative 4) (suite)


(Question 17, art. 1).


2º L'objet de l'espérance.



B. — Toute possibilité suppose une force capable de vaincre les difficultés qui s'opposent à la possession de l'objet. Suivant les cas, cette force peut appartenir au sujet lui-même, en propre, ou elle peut consister en un secours extérieur que le sujet prend à son compte. Il y a bien là deux façons d'atteindre l'objet, façons à ce point différentes qu'elles ont donné origine à deux mots différents (sperare et exspectare), mais qui cependant ne créent pas deux espérances. Si l'objet ne dépasse pas les forces du sujet, l'espérance s'appuie sur ses propres forces : le secours d'autrui est alors inutile et il ne peut créer quelque chose de nouveau dans un sentiment, ni comme énergie de la tendance, ni comme certitude du résultat. Si, par contre, la difficulté de l'objet convoité fait échec aux forces personnelles du sujet, l'espérance alors s'appuie sur le secours d'autrui. Mais vis-à-vis de l'objet qui, par définition, demeure à la mesure totale du sujet, le fait d'être possible par le seul sujet ou par le secours d'un autre, demeure une détermination accidentelle, qui ne change en rien l'espèce de l'objet. Et comme seul un changement essentiel de l'objet entraîne un changement formel dans les activités des facultés, il s'ensuit qu'on ne peut pas conclure à une double espèce d'espérance, mais à une seule espèce sous deux aspects différents.

On ne saurait trop insister sur le rôle du motif, qui est capital dans l'espérance; c'est lui qui donne à l'objet sa formalité, qui en fait vraiment, pour l'appétit un bien ardu possible. Pas plus que pour l'objet, il n'est possible de déterminer à priori la nature du secours requis dans l'espérance ; il suffit de dire qu'il représente tout ce qui fait estimer au sujet qu'il lui est possible d'atteindre le bien ardu convoité.



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à suivre…
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Message  ROBERT. Jeu 21 Juil 2011, 8:32 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

NOTES DOCTRINALES THOMISTES.



I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 197-198 (note explicative 4) (suite)


(Question 17, art. 1).


2º L'objet de l'espérance.


B. — Toute possibilité suppose une force capable de vaincre les difficultés qui s'opposent à la possession de l'objet. Suivant les cas, cette force peut appartenir au sujet lui-même, en propre, ou elle peut consister en un secours extérieur que le sujet prend à son compte. Il y a bien là deux façons d'atteindre l'objet, façons à ce point différentes qu'elles ont donné origine à deux mots différents (sperare et exspectare), mais qui cependant ne créent pas deux espérances. Si l'objet ne dépasse pas les forces du sujet, l'espérance s'appuie sur ses propres forces : le secours d'autrui est alors inutile et il ne peut créer quelque chose de nouveau dans un sentiment, ni comme énergie de la tendance, ni comme certitude du résultat.

Si, par contre, la difficulté de l'objet convoité fait échec aux forces personnelles du sujet, l'espérance alors s'appuie sur le secours d'autrui. Mais vis-à-vis de l'objet qui, par définition, demeure à la mesure totale du sujet, le fait d'être possible par le seul sujet ou par le secours d'un autre, demeure une détermination accidentelle, qui ne change en rien l'espèce de l'objet. Et comme seul un changement essentiel de l'objet entraîne un changement formel dans les activités des facultés, il s'ensuit qu'on ne peut pas conclure à une double espèce d'espérance, mais à une seule espèce sous deux aspects différents.

On ne saurait trop insister sur le rôle du motif, qui est capital dans l'espérance; c'est lui qui donne à l'objet sa formalité, qui en fait vraiment, pour l'appétit un bien ardu possible. Pas plus que pour l'objet, il n'est possible de déterminer à priori la nature du secours requis dans l'espérance ; il suffit de dire qu'il représente tout ce qui fait estimer au sujet qu'il lui est possible d'atteindre le bien ardu convoité.



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à suivre…
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Message  ROBERT. Ven 22 Juil 2011, 8:07 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

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I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 197-198 (note explicative 4) (suite)


(Question 17, art. 1).



3º Le sujet de l'espérance.

L'objet sensible de l'espérance demande un sujet sensible, qui est l'irascible. L'objet immatériel d'espérance, qui est le bien rationnel, réclame pour siège la volonté, que la coutume du langage nous permet d'appeler volonté-irascible.


4º Le mode de l'espérance.

Au double objet, sensible et rationnel, et au double sujet, irascible et volonté, correspond nécessairement un double mode d'espérance.

La passion d'espérance comporte essentiellement, avec une réaction psychique, des perturbations physiologiques, internes et externes, qu'il est difficile de déterminer en termes exacts, mais que l'expérience reconnaît facilement. Le sentiment d'espérance est un mouvement simple de la volonté, et ce n'est que par accident, à cause de l'unité du sujet humain, qu'il provoque, par l'intermédiaire des sens internes, certaines réactions organiques concomitantes.


Objet, sujet, mode, nous sommes désormais en possession de tout ce qui est nécessaire pour reconnaître la nature profonde de l'espérance.


5º La nature de l'espérance.


Par rapport à l'objet, l'espérance se présente comme une tendance d'amour. Par rapport au motif, l'espérance tire de lui la confiance qu'elle manifeste en son mouvement.



.


à suivre…
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Message  ROBERT. Sam 23 Juil 2011, 4:39 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

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I. L'ESPÉRANCE NATURELLE.

pp. 199-200 (note explicative 4) (suite)


(Question 17, art. 1).




A. — L'espérance, tendance d'amour.


Comme tous les sentiments qui ont pour objet la recherche du bien, l'espérance obéit à l'attraction de l'amour, consécutive à la connaturalité ressentie entre l'objet et le sujet, et qui pousse celui-ci à rechercher la possession de la réalité aimée. Bien ardu, l'objet de l'espérance double son attirance première par sa difficulté même, qui est un attrait spécial pour l'irascible et donc une nouvelle source d'amour, si toutefois le secours est suffisant pour triompher des obstacles. Nous sommes là au centre de l'espérance, qui se manifeste comme une tendance très profonde d'amour, de recherche du bien perfectif du sujet, et par suite comme une tendance spontanée, primaire, instinctive, de tout le désir humain.


B. — La confiance, élément formel de l'espérance.


La confiance met en exercice un élément affectif très spécial, une activité personnelle du sujet s'en remettant aux forces qui doivent lui permettre d'arriver au but : on met sa confiance dans autrui, on prend confiance dans ses propres forces. Il semble qu'objectivement le sujet garde toujours comme la crainte théorique d'une inadéquation possible entre les moyens et la fin; mais, passant par-dessus cette inévidence et cette inquiétude, le sujet s'abandonne à qui va l'aider, il s'en remet à lui, il se confie à sa puissance tutélaire et auxiliatrice. Il peut y avoir là beaucoup de subjectivisme, et les motifs ne semblent pas toujours en adéquation objective réelle avec la confiance qu'ils font naître. C'est pour cela que la confiance qui soutient l'espérance est différente de la certitude affective, de ce sentiment si spécial qui apaise les hésitations de l'appétit et donne à la tendance une fermeté et une tranquillité absolue. La confiance peut cependant y tendre, mais toujours elle gardera quelque inquiétude sur le résultat à venir, étant données pour le moins les défaillances possibles de la nature en face de toute œuvre difficile. Selon l'estimation plus ou moins vive que prend le sujet de la valeur des forces qu'il a à sa disposition, la confiance requise pour l'espérance ira de l'effort hésitant jusqu'à la certitude pratique d'une énergie sûre d'elle-même.



6º Les origines de l'espérance.



Si spontané qu'il soit, l'espoir a de multiples relations avec toutes les manifestations de notre personnalité, et, n'étant pas la première expression de notre vie, il se rattache à certaines origines. Celles-ci sont multiples : origines de connaissance, pour la présentation de l'objet et la manifestation de ses divers caractères, comme aussi de la qualité du secours; — origines affectives, les plus essentielles, qui se résument en un amour imparfait de concupiscence pour l'objet, amour bon mais intéressé et de soi égoïste, et en un amour pour le secours qui permet l'obtention de l'objet désiré et qui, par suite, est aimé par reconnaissance; — origines physiques et physiologiques qui ont un rôle fort important dans la naissance et l'accroissement de l'espérance. (Nous reverrons cette question plus en détail, dans les études sur la vertu théologale.)


7º Les effets de l'espérance.


Il n'est pas possible de faire un résumé, si bref soit-il, des influences si diverses et si profondes de l'espérance. Il faut se contenter d'un simple classement. Effets d'affectivité, soit intérieurs, comme la joie et l'amour, soit extérieurs, comme l'aide apportée à l'action et toute l'influence sur les passions et les sentiments de l'irascible; — effets de connaissance, indirects et directs, particulièrement par l'attention, que fixe si impérieusement l'espoir, et par l'intuition affective, d'ailleurs si mal connue; — effets physiologiques s'exprimant en sensations de vie intense et facile; — ils manifestent tous la place de premier plan que tient l'espérance dans toute l'existence de l'homme.

Il convient, pour voir d'un peu près la question, de se reporter aux études que S. Thomas suppose chaque fois qu'il traite de la vertu d'espérance et auxquelles il renvoie explicitement plusieurs fois dans ce traité de la Somme. (Voir III Sent., dist. 26, qu. 1; — Ia-IIæ qu. 23, art. 4, qu. 4; — de Spe, art. 1.)


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à suivre…
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Message  ROBERT. Dim 24 Juil 2011, 4:44 pm

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NOTES DOCTRINALES THOMISTES.


II. LA BÉATITUDE, OBJET DE L'ESPÉRANCE.

(Question 17, art. 2)

L'objet de la vertu théologale d'espérance est Dieu lui-même possédé par nous dans le ciel, et tous les autres biens ordonnés à cette béatitude.

1º La béatitude éternelle.


Au sens général, la béatitude est le bien parfait apaisant et rassasiant tout à fait le désir. On appelle béatitude objective la réalité même dont la possession apporte le repos à l'appétit; on appelle béatitude formelle la possession de la réalité : c'est ainsi que les richesses sont la béatitude objective de l'avare, et leur possession sa béatitude formelle. Il n'y a pas là deux béatitudes, mais deux formalités intégrant une seule béatitude totale: il faut toujours une réalité à posséder, et une possession, pour que cette réalité soit terme du désir.

La béatitude objective, objet de l'espérance, consiste dans le seul bien incréé et parfait, Dieu. Lui seul peut apaiser le désir de l'homme, tous les autres biens, limités, ne pouvant satisfaire la tendance de la volonté en quête de l'illimité. S. Thomas a profondément analysé ces notions dans son traité de la béatitude (Ia-2æ, qu. 1 à 5), et il faudrait citer, comme illustration de ces pensées, les belles pages de S. Augustin racontant l'entretien qu'il eut à Ostie avec Ste Monique sur l'éternelle félicité (Confessions, Livre IX, chapitre 10). La foi nous fait connaître Dieu tel qu'il est en lui-même, dans sa Trinité, et la volonté tend du même coup à Dieu dans son essence, dans sa Trinité, et il ne faut pas moins pour satisfaire le désir de l'homme. Considéré en lui-même, Dieu est la souveraine perfection: quand nous sommes mis en face de lui, il se présente à nous, non plus seulement comme l'être parfait en lui-même, comme la Bonté essentielle, mais comme celui en qui nous devons trouver notre perfection : son être de bonté devient la Bonté qui peut assurer la perfection de notre être, par notre union à lui. Nous regardons Dieu comme bon pour nous, "Deus bonus in se conveniens nobis", disent les Théologiens de Salamanque.

La béatitude formelle est l'acquisition et la possession de la béatitude objective. Cette possession ne peut s établir que dans une opération, l'opération étant le constitutif même de toute vie; la vie éternelle est un acte : non pas évidemment des puissances végétatives ou sensibles, ni essentiellement du moins, de la volonté, mais, formellement, de l'intelligence qui seule est qualifiée pour atteindre et posséder cet être spirituel et intelligible qui est Dieu. La béatitude formelle consiste en une vision claire et sans intermédiaire de l'essence divine. La compréhension, terme de l'espérance, y ajoute une certaine relation volontaire à la fin possédée, un attachement de tout l'être, et pas seulement de Y intelligence, à cette réalité divine qui comble le désir de l'homme dans son actuelle possession.

Cette béatitude formelle, à elle seule, ne suffirait pas à fonder l'objet de l'espérance, car elle est un bien créé, et l'essence de la vertu théologale est d'adhérer à Dieu lui-même. Elle n'est même pas objet de l'espérance concurremment avec la béatitude objective, elle n'est qu'un moyen pour nous d'entrer en possession de la réalité espérée. Mais comme Dieu ne peut être terme de l'espérance sans la possession qui s'établit dans la vision béatifique, il s'ensuit que la possession est intégrée à l'objet de l'espérance comme la condition nécessaire de notre union au bien qui nous béatifie : l'objet de l'espérance est la béatitude objective connotant la béatitude formelle. Les expressions plus ou moins exactes du langage courant ne doivent jamais nous induire en erreur sur ce point : c'est Dieu même que nous devons posséder, dans son essence et dans tous ses attributs.
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à suivre…
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Message  ROBERT. Ven 29 Juil 2011, 2:44 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

NOTES DOCTRINALES THOMISTES.


II. LA BÉATITUDE, OBJET DE L'ESPÉRANCE.

(Question 17, art. 2)

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2º La béatitude secondaire.

Dans la vision qu'ils prennent de sa divine essence, Dieu manifeste encore aux Bienheureux ses divins vouloirs et les événements du monde créé. Ce n'est plus Dieu lui-même, mais ce sont cependant des réalités qui ont relation avec lui, et qui ont aussi relation avec l'état de chacun des Bienheureux : ces contemplations sont peu de choses à côté de la vue de Dieu, mais elles font cependant partie de notre béatitude, parce que rien ne doit nous manquer de ce qui peut assurer notre complète perfection: c'est ce qu'il arrive à S. Augustin d'appeler la vision du soir, par opposition à la vision du matin, constituée par la vue de Dieu : vouloirs divins, mystères des faits historiques crus ici-bas. Incarnation, Rédemption, sacrements, grâce, gloire, résurrection: nature des anges, des choses créées; tout ce qui intéresse le rôle qu'a joué le Bienheureux sur la terre et dont il demeure l'acteur éminent. Si les singuliers normalement lui échappent, et les futurs contingents, et les secrets des cœurs, et les libres vouloirs, Dieu peut toujours les lui faire connaître, et il les lui manifeste quand ils ont rapport à sa personne et à son rôle. Puisque toutes ces réalités seront au ciel objet de notre vision, il est bien certain que nous pouvons espérer dès ici-bas ce que nous posséderons au ciel ; c'est tout le domaine de la béatitude accidentelle, depuis la vue du Christ jusqu'à la vie débordante de notre corps ressuscité.


La béatitude étant l'ensemble des biens qui doivent combler notre désir, il va de soi qu'à l'originalité de chaque être correspondra une béatitude personnelle. Et déjà les chrétiens peuvent envisager, dans le Paradis de tous les Saints, leur propre paradis. — Sans doute ne serait-il pas impossible de déterminer la psychologie profonde des auteurs spirituels en évoquant leur conception du paradis. Et on devrait demander aux chrétiens de penser à leur propre paradis : ce pourrait bien être pour eux une source de grande joie et un puissant réconfort dans les luttes de la vie, à condition qu'ils demeurent dans la vérité, et qu'ils n'oublient pas, dans leur évocation du Paradis, que Dieu est premier et que le ciel est d'ordre spirituel et vertueux.

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à suivre…
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Message  ROBERT. Dim 31 Juil 2011, 4:05 pm

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RENSEIGNEMENTS TECHNIQUES.

NOTES DOCTRINALES THOMISTES.


II. LA BÉATITUDE, OBJET DE L'ESPÉRANCE.

(Question 17, art. 2)


3º L'ordre terrestre à la béatitude.

Il paraît très légitime de faire un pas de plus. Si l'objet de l'espérance peut s'exprimer dans les biens du ciel à cause de leurs relations avec la béatitude essentielle, il doit pouvoir aussi « se réaliser » dans les biens de la terre qui nous ordonnent à la recherche et à la possession de cette béatitude, tout ce qui peut, d'une façon ou d'une autre, nous aider à atteindre Dieu. C'est tout le domaine de la prière, interprète de l'espérance, toute l'explicitation de la prière que Jésus nous a enseignée et qui, au dire de S. Augustin (lettre 130) et de S. Thomas, (2a-2ae, qu. 83, art. 9) renferme tout ce que nous pouvons demander à Dieu; c'est aussi tout le contenu spirituel et temporel des oraisons de l'Eglise. La condition nécessaire et suffisante pour faire de tous ces biens un objet d'espérance théologale est qu'ils soient espérés dans l'ordre à la béatitude éternelle. Pris en eux-mêmes, ils sont d'une valeur insuffisante, étant vraiment trop éloignés de Dieu et trop à la merci de l'homme pour qu'on doive à leur sujet faire appel au grand secours divin ; en se joignant à Dieu, en s'ordonnant à sa possession, en devenant intermédiaires, moyens, suites, dispositions, corollaires de la béatitude, ils participent de la dignité divine et peuvent devenir objet de l'espérance théologale, plus ou moins d'ailleurs selon leur degré de proximité avec le salut.


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à suivre…
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Message  ROBERT. Ven 23 Déc 2011, 7:29 pm

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III LE MOTIF DE L'ESPÉRANCE. (note explicative 13)

p. 204


(Question 17, art. 4.)

La béatitude, objet de l'espérance, demande, pour qu'on puisse l'atteindre, un secours qui vienne augmenter les capacités de l'homme, foncièrement inapte à saisir Dieu. Ce secours, ainsi que l'objet auquel il répond, peut se distinguer en secours essentiel et en secours intermédiaires.

1º Le secours essentiel.

Il ne peut être moins que Dieu, seul adapté à l'objet, qui est Dieu lui-même. C'est là une loi des vertus théologales que tout en elles est divin : de même que par la foi nous croyons à la Vérité Première sur le témoignage de cette même Vérité Première, de même dans l'espérance nous attendons Dieu de Dieu.


pp. 205-208 (note explicative 13]


Que ce soit dans le secours divin qu'il faille chercher le motif formel de l'espérance, l'analyse que nous avons faite de l'espérance naturelle le manifeste analogiquement; c'est qu'en effet la raison formelle de l'espérance doit spécifier l'objet au point d'en faire un objet absolument spécial à l'espérance : cette formalité ultime est la possibilité, avons-nous dit. Quand il s'agit de l'espérance théologale, c'est le secours divin qui nous rend la béatitude possible et donc objet de l’espérance. S. Thomas dit explicitement : "En tant que nous espérons un bien comme possible pour nous par le moyen du secours divin, notre espérance atteint à Dieu lui-même, sur le secours de qui elle s'appuie". (2a-2æ, qu. 17, art. 1, c.) "Le souverain Bien est la béatitude éternelle que l'homme ne peut atteindre que par le secours divin, selon la parole de l'Epître aux Romains : le don de Dieu, c'est la vie éternelle. Et c'est pourquoi l'espérance d'atteindre la vie éternelle a deux objets, à savoir la vie éternelle elle-même qu'on espère, et le secours divin par lequel on espère" (de Spe, art. 1 c). « L'objet formel de l'espérance théologale est le secours divin auquel elle adhère » (de Spe, art. 4). Voir aussi 2a-2æ, qu. 17, art. 1, ad 3; art. 4; art. 5, c. et ad 2; art. 6, c. et ad 1 et 3; art. 7, c. Psaume 30, verset 1; de Spe. art. 1, ad 4.

Nous avons ainsi Dieu comme cause finale, et comme cause efficiente, et comme cause formelle de l'espérance. Le secours divin, faisant de la béatitude l'objet de notre espérance par la possibilité qu'il lui confère, nous permet de tendre à cette béatitude.

Que représente au juste ce secours divin ? Ce n'est pas la grâce qui est un secours limité et créé, et par suite trop imparfait pour nous permettre de tendre à Dieu même. Ce ne peut donc être que Dieu lui-même, l'un des prédicats incréés, l'acte par lequel Dieu nous aide pour nous conduire au salut éternel.

Si l'on consulte la Sainte Ecriture et la prière de l’Église, comme aussi les affirmations de S. Thomas, multiples sont les attributs divins invoqués dans l'espérance : Toute-Puissance, Miséricorde, Majesté, Eminence, Libéralité, Justice, Fidélité, etc... Cependant, puisqu’on cherche une forme à l'espérance, il semble bien qu'il soit nécessaire de ramener tous ces attributs à un premier. Tous ont bien rapport à l'objet de l'espérance, mais puisqu'il s'agit de forme ultime, on peut déjà éliminer les attributs qui se rapportent plus spécialement à la bonté de l'objet, à son caractère futur, à son aspect ardu. Dès lors, il nous reste la justice, la miséricorde et la toute-puissance. Miséricorde et justice sont supposées pour que s'exerce l'espérance, elles en forment comme le fondement, comme la source, mais dans l'acte même de l'espérance, c'est à la toute-puissance que nous avons recours, car il s'agit à proprement parier d'une action à produire, d'un secours actif à nous apporter; c'est là une œuvre de la puissance exécutive divine, au commandement de la miséricorde et de la justice, mais spécifiquement œuvre de puissance. Cela ne diminue pas d'ailleurs le rôle prérequis de la miséricorde et de la justice que connote la toute-puissance, au peint que dans les vices contre l'espérance, nous voyons les péchés s'attaquer à la puissance divine, l'un par rapport à la miséricorde, l'autre par rapport à la justice. C'est ce qui fait que la prière peut s'adresser à Dieu au titre de sa justice et de sa miséricorde comme à celui de sa puissance; par delà le motif formel, on va à sa racine même, aux causes directives et impératives : c'est ce qui permet encore de faire appel à tout autre attribut divin qui, pour être moins adéquat, a cependant des rapports avec l'espérance, à cause de la simplicité de l'essence divine dans laquelle s'unifient tous les attributs de Dieu. Il n'en reste pas moins que le motif premier est la toute-puissance, mais ces nuances diverses permettent de sauvegarder à la fois la vérité des concepts philosophiques et théologiques et la richesse spirituelle des textes de la sainte Ecriture, de l'Eglise et des Pères.



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à suivre…



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Message  ROBERT. Lun 26 Déc 2011, 8:18 pm

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III LE MOTIF DE L'ESPÉRANCE. (note explicative 13)

p. 204


(Question 17, art. 4.)



2º Les intermédiaires.

Dans le courant de la vie chrétienne, nous appelons à notre secours, pour obtenir la vie éternelle, beaucoup d'autres puissances que Dieu : le Christ, la Vierge, les Saints, les suffrages des justes; et même nos propres mérites nous sont une raison d'espérer le ciel. Le cycle théologal des vertus, réclamant obligatoirement un objet qui ne soit pas moindre que Dieu et un motif qui ne soit pas autre que Dieu, interdit de donner à ces différents secours une place comparable à celle de la toute-puissance divine. Cependant le secours divin n'ayant d'autre but que de nous fournir l'aide suffisante pour arriver à la béatitude, peut ordonner à lui, comme des instruments, tous les autres secours qu'il a mis providentiellement à notre disposition pour nous offrir son appui, nous le rendre plus fraternel, et par là nous apporter un élan plus vif d'espérance; instrument animé, chacun d'eux garde son activité propre, mais leur valeur instrumentale est prise tout entière de leur rapport avec la cause principale qui agit en eux et leur transmet une puissance qu'ils ne possèdent pas par nature. C'est là un phénomène analogue à celui de la foi, dans laquelle on voit Dieu proposer sa Vérité par des intermédiaires humains.


Il y a entre tous ces secours une hiérarchie, selon l'intimité plus ou moins grande qui les unit à la toute-puissance divine. Au premier rang et à une place hors pair, le Christ, tête de l'Eglise, possède en plénitude, non seulement la grâce personnelle qui le rend devant Dieu plus agréable que toutes les créatures, mais aussi la grâce capitale qui fait de lui, dans l'ordre du salut, l'intermédiaire obligé de toutes les grâces de rédemption et de sanctification qui parviennent aux hommes. L'Ecriture déborde de cette vérité, que Jésus est le motif de notre espérance, celui sur qui nous nous appuyons pour accéder à Dieu : "Dieu le Père nous a régénérés selon sa grande miséricorde par la résurrection de Jésus-Christ d'entre les morts pour une vivante espérance" (1ière Epître de S. Pierre, I, 3). "Jésus qui nous sauve de la colère » (I aux Thessaloniciens, I, 9).


— "Le Christ Jésus, notre espérance» (I à Timothée, I, 1). Commentant les Ecritures, S. Thomas donne une place immense au Christ. Il met sur Jésus le nom divin, ainsi que l'avait fait S. Pierre dans son premier discours (Actes II, 21) : ainsi psaumes IX, 11 — XXIV, 9 — XXXIX, 4 — L, fin. C'est par lui que nous espérons atteindre les biens célestes (I à Timothée I, 1). — Sa manifestation confirme l'espérance donnée par Dieu d'une vie éternelle (à Tite, I, 2). Le Christ partage la puissance du Père, il a assuré le salut du monde et le pardon des péchés (aux Héb., I, 3). C’est par la foi au Christ que nous est donnée l'espérance du salut éternel et de l'entrée au ciel (aux Héb., X, 23).

— Les mystères de la vie du Christ sont eux-mêmes les manifestations des attributs divins et sont causes des biens que nous espérons : la miséricorde et la justice sont satisfaites par la Passion du Christ qui a libéré l'homme du péché (3a, qu. 46, art. 1, ad 3). La Résurrection du Christ est cause de notre résurrection, instrumentale sans doute, mais réelle (I aux Thess., IV, 14-18, — aux Rom., V, 2, — à Tite, II, 13). C'est bien d'ailleurs le sentiment de l'Eglise qui dans sas litanies fait appel à tous les mystères du Christ et termine toutes ses oraisons par le "per Christum". Bref c'est le Christ qui est le motif formel, secondaire et instrumental, mais très réel, de notre espérance, parce que c'est lui qui par sa vie et sa mort nous a mérité le ciel et parce que c'est lui qui distribue selon sa sagesse les biens créés laissés à sa discrétion par Dieu.


Les autres intermédiaires ont des valeurs diverses. Encore à un rang spécial, la Vierge, à cause de son rôle éminent de Mère du Christ, de Co- rédemptrice, et de Distributrice de toutes grâces : elle est la Toute-Puissance Suppliante. Puis les Saints, selon leur crédit auprès de Dieu, par suite de leur éminente sainteté, de leur rôle spécial vis-à-vis de nous, de l'exaltation particulière que Dieu entend faire de tel ou tel. Puis les âmes justes, toutes englobées dans le grand courant de la prière, interprète de l'espérance, et de la communauté des mérites. Enfin nos prières et nos propres mérites.


Tous ces secours n'ont d'autre but que d'agir sur Dieu pour qu'il nous soit propice et nous aide à parvenir jusqu'à lui. Il apparaît bien que nous demeurons dans l'ordre des moyens, des intermédiaires, des instruments, et qu'il faut prendre garde de ne pas relâcher leur intime liaison et leur ordre avec Dieu si on ne veut pas leur faire perdre leur valeur; cela n'est guère possible pour le Christ à cause de l'union hypostatique de la divinité et de l'humanité; mais plus la nature des intermédiaires s'éloigne de Dieu, et plus il faut craindre de sortir d'une espérance vraiment théologale. « Maudit soit l'homme, dit Jérémie, qui se confie dans l'homme ». Le motif formel de l'espérance, sa forme, est extrêmement sensible à tout alliage de valeur moindre, et avant de .s'appuyer sur autrui et pour bien s'appuyer sur lui, il faut d'abord s'attacher solidement à Dieu, «et jeter de l'autre côté du voile notre espérance, qui servira à notre âme comme d'une ancre ferme et assurée » (aux Héb., VI, 19).


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à suivre…


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Message  ROBERT. Mer 28 Déc 2011, 7:33 pm

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pp.209- 211 (note explicative 15)

IV. LA VERTU D'ESPÉRANCE.

(Question 17, art. 5.)

1º L'espérance a tous les éléments d'une vertu.


La vertu peut se définir comme le terme ultime d'une puissance nonne, ou l'adaptation foncière et permanente à un objet bon d'une faculté à son maximum de potentiel. Or l'espérance a un objet bon, et se manifeste comme un terme ultime pour la volonté.


A. — L'espérance atteint Dieu lui-même, dans sa nature. Elle est, psychologiquement, une tension particulière de la volonté pour atteindre Dieu, et, ontologiquement, un surcroît divin, une surélévation infusée à la volonté, qui permet à celle-ci de se fixer à la béatitude éternelle, Dieu conçu, désiré et recherché comme le bien suprême qu'il nous est possible d'atteindre. Il n'y a pas à douter que Dieu soit bon en lui-même et qu'il nous soit bon de l'atteindre; (la question du rapport entre Dieu et nous dans l'espérance sera étudiée plus loin). Or. dans toutes les choses soumises à une règle et à une mesure, le bien est pris de ce que l'homme atteint sa règle propre. Mais il y a une double mesure dans les actes humains : l'une, prochaine et homogène, la raison; l'autre, suprême et transcendante. Dieu. D'où tout acte humain qui atteint à la raison ou à Dieu lui-même est bon. Et puisque c'est le cas de l'espérance, elle est vertu à cause de son objet.

Le motif est meilleur encore, si on peut ainsi parler, non pas en lui-même, mais par rapport à nous, car il ne comporte aucune des imperfections de l'objet. L'espérance attend Dieu de Dieu même, en s'appuyant sur sa toute-puissance auxiliatrice ; c'est là un acte raisonnable par excellence que de s'appuyer, pour atteindre un but tel que la béatitude, sur le seul secours qui soit efficace, Dieu. Bien plus, on ne saurait trop s'appuyer sur ce secours qui ne peut nous manquer et dont on ne peut, de soi, faire un mauvais usage.

Si bien que, quel que soit le côté sous lequel on regarde l'objet de l'espérance, il a tout ce qu'il faut pour donner naissance à une vertu, étant la règle suprême des actes humains, et comme cause finale, et comme cause efficiente.


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à suivre…
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