LA SAINT-BARTHÉLEMY

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Message  Monique Lun 23 Nov 2009, 9:45 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

En croyant que le massacre de la Saint-Barthélémy ne fut résolu que quelques heures avant d'être exécuté, — le poison, la trahison, les morts prématurées disparaissent; le maréchal de La Vieilleville n'a plus été empoisonné, parce qu'il était contraire à cette résolution ; Ligneroles n'a pas été assassiné, parce qu'il en savait le secret; de Tende n'a pas péri par un breuvage, pour s'être refusé à son exécution, et l'abcès au côté dont mourut la reine de Navarre, mère de Henri IV, n'est plus changé en gants empoisonnés par un Milanais.

Moins on met d'intervalle entre la résolution et l'entreprise, et plus on met en garde l'humanité contre elle-même, et la royauté contre les mauvais conseils et les impulsions violentes de la passion ; on inspire quelque sorte de compassion pour ces esclaves de leur entourage; et si on n'excuse pas Charles IX, on fait voir qu'il fut, de tous tes complices, le plus malheureux et le moins coupable.

La vérité trouve aussi ses avantages à ce système, et si toutes les contradictions de l'histoire ne disparaissent pas à l'approche de la clarté qu'il y répand, il faut convenir qu'il y en a plusieurs qui s'y concilient.

Alors le mariage du roi de Navarre avec Marguerite de Valois, et les fêtes qui l'accompagnèrent, n'étaient pas un piège tendu aux princes et à la noblesse calvinistes. Alors le régiment des gardes qu'on avait fait entrer dans Paris, n'y avait été appelé que pour empêcher les entreprises respectives ou le tumulte. Alors Maurevert, ancien domestique du duc de Guise, a pu être armé par d'autres mains que celles de son maître.

Alors ce prince a pu se retirer dans son hôtel pour y chercher peut-être une sûreté dans le premier moment de l'assassinat, sans en être l'auteur. Alors les portes de Paris, fermées (à l'exception de deux) après le coup d'arquebuse, avaient pour seul et véritable objet l'intention et le moyen d'arrêter l'assassin. Alors les lettres écrites par les secrétaires d'État aux gouverneurs des provinces, pour leur apprendre la blessure de l'amiral, et les assurer que le roi se promettait d'en faire bonne, briève et rigoureuse justice, n'étaient pas une feinte et un jeu, comme le prétend d'Aubigné(1).

Alors Charles IX a pu dire à Coligny, sans jouer la comédie : « Mon père, la blessure est pour vous, et la douleur est pour moi. » Alors ce roi, qui ignorait d'où partait le coup d'arquebuse, pouvait soupçonner le duc deGuise, et, n'ayant pas encore les papiers de l'amiral, rejeter l'excès du massacre sur l'inimitié des deux maisons. Alors les cinquante hommes, commandés par le colonel du régiment des gardes et envoyés par Charles IX à l'amiral (2), étaient destinés à sa sûreté et non à son supplice. Alors ce n'est plus pour être les plus forts, comme le prétend de Thou, qu'on mit peu de Suisses du roi de Navarre auprès de l'amiral; et, en effet, il est absurde qu'il en ait fait la remarque, quand il ne dépendait que du parti huguenot de remplir la maison de Coligny de gardes affidés.

Alors Charles IX pouvait dire avec vérité à sa soeur Marguerite, que si on ne lui eût fait entendre qu'il y allait de sa vie et de ses Etats, il ne l'eut jamais fait. Alors Tavannes a pu écrire, avec la même vérité, que la fureur de la populace rendit général le massacre de Paris, au grand regret des conseillers, n'ayant été résolu que la mort des chefs et factieux.



(1) Tome II, liv. I de son hist. universelle, depuis 1550 jusqu'en 1601
(2) Cornaton les demanda, au roi de la part de Culigny.



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Message  Monique Mer 25 Nov 2009, 10:01 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Alors l'entrevue de Bayonne, le voyage du duc de Savoie en France, les audiences du nonce, et, si l'on veut, les conseils du pape, regardaient tout au plus la sûreté des catholiques, et non le massacre des huguenots.

Alors enfin, on a pu rendre grâces à Dieu, dans Rome, de la mort de ces hommes que Charles IX n'avait proscrits que pour prévenir le funeste effet d'une conspiration prête à éclater, et les reproches pleins d'injustice qu'on a faits à la religion catholique et à ses ministres retombent sur ceux qui voudraient l'en accabler.

Nous n'avons que deux lettres dont on puisse induire qu'il y eut des ordres envoyés dans les provinces pour faire massacrer les huguenots ; l'une est celle du vicomte d'Orthez, gouverneur de Bayonne, écrite à Charles IX; l'autre est celle de Catherine de Médicis à Strozzi qui rôdait autour de la Rochelle. La première n'est rapportée que par d'Aubigné, auteur protestant, peu véridique, connu, comme dit Sully, par sa langue médisante, si acharné contre les rois, que le parlement de Paris fit brûler son histoire.

On peut donc s'inscrire en faux contre un acte dont aucun contemporain n'a parlé, qui a échappé aux recherches de de Thou, que cet historien n'a pas osé adopter, malgré son penchant pour les huguenots, et ses mauvaises intentions à l'égard de Charles IX; et il est permis de présumer que s'il eût pu faire fond sur une telle pièce, on la trouverait au moins dans l'édition de Genève, de 1620. Mais supposons que cette lettre ait existé, rien ne prouve que ce soit la réponse à un ordre écrit ou signé par le roi; tout au contraire, puisqu'il était question; dans cet ordre prétendu, de faire exécuter des gens qui avaient cherché un asile dans les prisons, et échappé même à la colère du prince par le laps du temps postérieur à la Saint-Barthélemy.

Ainsi, ce commandement, communiqué aux habitants et gens de guerre de la garnison, a pu tout au plus être verbal et de la nature de ceux qui furent portés par la Mole au comte de Tende, gouverneur de Provence ; par le courrier d'un procureur du roi, à Mandelot, gouverneur de Lyon; par Mareuil, à Bourges; par un domestique de d'Entragues à ce gouverneur d'Orléans; par Montpezat à celui de Bordeaux.



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Message  Monique Jeu 26 Nov 2009, 3:15 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Or, tous ces prétendus ordres partaient du coeur de ceux qui les portaient, et non de la volonté du prince,
qui les ignorait. Ceci demande beaucoup de clarté, et par conséquent des détails.

Catherine de Médicis et ses conseillers n'ayant résolu que la mort des chefs et des plus factieux, y employèrent des gens qui, ayant des haines particulières à venger, s'en acquittèrent trop bien, au grand regret des conseillers; et voilà comme il ne fait pas bon d'acharner un peuple, dit Brantôme, car il est assez près plus qu'on ne veut.

Les meurtres étant donc poussés beaucoup plus loin qu'on n'eût voulu : « Le roi, vers le soir du dimanche, fit faire défense à son de trompe que ceux de la garde et des officiers de la ville ne prissent les armes ni prisonnier sur la vie, mais que tous fussent misez entre les mains de la justice, et qu'ils se retirassent en leurs maisons closes, ce qui devait apaiser la fureur du peuple, et donner loisir à plusieurs de se retirer hors delà ( 1 ) . »

Mais cette précaution, à peine bonne pour Paris, fut inutile pour les provinces. « Ces ordres, dit un auteur italien, n'arrivèrent pas à temps en beaucoup d'endroits, parce que le bruit qui se répandit partout le royaume de ce qui s'était passé à Paris, excita les catholiques de beaucoup de villes à agir de même. »

Cependant, le roi qui l'avait prévu, fit partir des courriers porteurs de lettres datées du 24, adressées aux gouverneurs, pour les avertir de ce qui s'était passé à Paris, le rejetant sur l'inimitié des maisons de Guise et de Châtillon ; exhortant les commandants à prendre des mesures pour prévenir de pareils accidents dans leurs départements.



(1) La Popelinière, livre XXIX, p. 67.


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Message  Monique Ven 27 Nov 2009, 9:27 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Charles IX craignant d'abord, qu'à la première nouvelle de la blessure de l'amiral, les huguenots ne vengeassent sur les catholiques le tort fait à la personne de leur chef,avait eu soin de faire écrire aux mêmes gouverneurs qu'il se proposait d'en tirer bonne, briève et rigoureuse justice. Ainsi la crainte de voir égorger les catholiques là où ils ne seraient pas les plus forts, ou les calvinistes là où ils se trouveraient les plus faibles, l'engagea à écrire une lettre circulaire le dimanche au soir, jour du massacre, pour mettre les deux partis en sûreté et sauver les catholiques de la rage des huguenots, ou ceux-ci, de la licence des autres.

Le Marlyrographe des protestants (I) nous fournil la preuve de cette conjecture : « A Orléans arriva mandement nouveau (c'est-à-dire autre que celui par lequel on avait appris la blessure de l'amiral), à ceux de la justice, maires et échevins de la ville, par lequel leur était enjoint de prendre les armes, et de faire en sorte qu'ils demeurassent les plus forts dedans la ville.»

Pareil ordre, expédié le dimanche, arriva le mercredi à Lyon : il avertissait les habitants de prendre des mesures pour être les plus forts, et on peut juger, par la conduite du gouverneur de celle ville, que le seul objet de la dépêche était le même que celui du mandement adressé au gou verneur d'Orléans.

Le martyrographe dit, qu'après avoir fermé les portes de Lyon, et posé des sentinelles dans les principaux endroits, on sema le bruit que c'était pour la propre sûreté des huguenots ; et, en effet, quoi qu'en dise cet auteur, il prouve lui-même que le gouvernement n'avait reçu aucun ordre contraire, et qu'il ne leur serait rien arrivé, par les sages précautions qu'il avait prises, — sans la haine d'un procureur du roi.

Voici le fait en quelques mois.
Les catholiques ayant à se plaindre des huguenots, sans doute depuis le dernier édit de pacification, avaient envoyé des députés (2) à la cour; ils furent témoins du massacre et crurent que l'heure était venue d'en faire autant partout. Ils demandèrent à la reine la permission d'expédier un courrier à Lyon ; cette princesse leur répondit qu'il fallait auparavant que ceux du roi fussent expédiés ; et, en effet, celui des députés n'arriva que le vendredi, deux jours après que Mandelot avait reçu le sien.

Le procureur du roi, l'un des députés, écrivait que Catherine de Médicis leur avait dit : « Vous voyez ce qui est arrivé, » d'où il induisait que son intention était qu'on en fit autant à Lyon, et cette lettre devint un ordre ou un prétexte pour commettre beaucoup de vols et de meurtres, que Mandelot arrêta dès qu'il le put. Mais il est évident que ce procureur du roi avait dans son coeur ce qu'il croyait voir dans les paroles de Catherine.

En effet, si l'intention de cette reine était qu'on fit à Lyon ce qu'on avait fait à Paris, elle en trouvait un beau moyen dans la bonne volonté de ces députés; il n'y avait qu'à les laisser agir. Pourquoi y mettre des obstacles, en leur refusant la permission de faire partir un courrier? Pourquoi répondre qu'il fallait que ceux de son fils fussent dépêchés les premiers ? Pourquoi en expédier un au gouverneur Mandelot, le dimanche, avec des ordres celui de Rubis que deux jours après, comme si elle eût voulu donner le temps au gouverneur de tout disposer pour la sûreté des calvinistes?



(1)Page 720, fol., verso.
(2) Ces députés étaient de Rubis, procureur du roi, Scarron, échevin,
de Masso, receveur.



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Message  Monique Mar 01 Déc 2009, 9:18 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Les mêmes Actes dés prétendus martyrs protestants nous fournissent d'autres moyens d'argumenter contre les suppositions des ordres, soit antérieurs, soit subséquents à la Saint-Barthélemy. On y trouve que les meurtriers « d'Orléans résolurent de mettre la main à la besogne, sans que Lapierre, domestique de M. d'Entragues, gouverneur, eût porté lettres ni mémoires de créance. » On y voit (1) que ceux de Bourges « envoyèrent Marueil en poste à la cour, qu'il en revint sans ordre.

» On y lit (2) « que le roi avait fait entendre par plusieurs lettres» écrites à Bordeaux,« qu'il n'entendait pas que cette exécution passât outre, et s'étendît plus avant que Paris. » On peut encore tirer une preuve très forte contre la supposition des ordres, du seul silence de ces mêmes Actes si intéressés à en parler.

Or, il n'en est question ni pour Meaux, ni pour La Charité, ni pour Romans, Saumuret Angers, et si le Martyrographe a avancé que le gouverneur de Rouen en avait reçu des ordres d'exterminer tous ceux de la religion, cette annotation est manifestement contredite par la seule inaction de
M. de Carouge, et par la malheureuse date des meurtres, qui commencèrent dans cette ville près d'un mois après ceux de Paris (3).

Tous ces extraits d'un registre, que les calvinistes ne sauraient récuser, puisque c'est leurs Acta Sanctorum, ni les critiques le rejeter, attendu que c'est l'écrit le plus contemporain, forment un corps de preuves négatives contrôles prétendus ordres du roi, et ne laissent nullement douter que la lettre du vicomte d'Orte est faite à plaisir, à peu près comme celle de Charles IX au comte de Tende (4).



(1) Fol. recto 724.
(2) Fol. recto 730.
(3)Le 17 septembre.
(4) Voyez les Mémoires de Michel de Castelnau, dans les additions qu'y a faites Jean le Laboureur.



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Message  Monique Jeu 03 Déc 2009, 10:04 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Le savant Peiresc, curieux de collections, et riche en pièces controuvées ou suspectes, nous a conservé la substance
de celle-ci, dont la fausseté paraît à la seule inspection : c'était un ordre défaire main-basse sur les huguenots, au bas duquel il prétend que Charles IX avait mis une apostille toute contraire. Il ne faut pas s'épuiser en raisonnements pour montrer le vice de cette pièce.

Eh ! pourquoi en prendre le soin? Toute absurde qu'elle est, elle est favorable à notre système, puisque Charles IX en devient moins coupable, et que le plus odieux du massacre retombe nécessairement sur la reine et son conseil.

Mais, revenons à la lettre du vicomte d'Orthez, que nous regardons comme une fable de d'Aubigné, et, s'il fallait encore en combattre la chimère, nous ne voudrions nous servir que d'une simple conjecture.

Montluc, gouverneur de Guyenne, était le plus proche voisin de d'Orthez, commandant de Bayonne ; il était plus avant que lui dans la confidence de Catherine de Médicis, et aussi attaché que personne à la cour et au parti catholique.

Or, si l'un avait reçu l'ordre de faire massacrer les huguenots d'Aix, est-il croyable que l'autre n'en eût reçu aucun pour faire le même traitement à ceux de plusieurs villes rebelles de la Guyenne? Nous ne disons pas que Montluc eût exécuté ces ordres, mais sa franchise ne les aurait pas dissimulés, et nous en trouverions quelques vestiges dans ses Commentaires, où il parle assez librement de cette malheureuse affaire, pour avoir pu y placer un commandement du roi ou de la reine, et un refus d'y obéir qui l'honorait. Il ne faut pas croire qu'il ait voulu biaiser là-dessus ; ces sortes de réticences n'étaient ni dans son caractère, ni dans sa manière de penser ; on le voit, au contraire, approuver en quelque façon la résolution extrême de la cour, lorsque après avoir blâmé l'amiral, «qui fut si mal avisé de s'aller enfourner, pour montrer qu'il gouvernait tout, » il ajoute : il « le paya bien cher, car il lui coûta la vie et à plusieurs autres ; aussi il avait mis le royaume en grand trouble (1). »

Et s'il eût eu des ordres de faire massacrer les huguenots, aurait-il manqué d'en faire mention, pour sa propre gloire, quand il dit : « Tout le monde fut fort étonné d'entendre ce qui était arrivé à Paris, et les huguenots encore plus, qui ne trouvaient assez de terre pour fuir, gagnant la plus part le pays de Béarn...

Je ne leur fis point de mal de mon côté, mais partout on les accoutrait fort mal (2). »



(1) Page 617, édit. in-12.
(2) Ibidem.



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Message  Monique Lun 07 Déc 2009, 10:01 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Nous ajouterons ici une petite réflexion critique : Si les gouverneurs des provinces ont eu des ordres, Montluc a dû en recevoir; s'ils y ont résisté, il a mieux fait son devoir qu'eux. S'ils ont été loués pour cette résistance, pourquoi ne voyons-nous pas le nom de Montluc parmi les leurs? La raison en est simple, c'est parce que nos historiens sont les copistes serviles de de Thou, et que ce grand apologiste des actes humains, quand ils tournaient à l'avantage des calvinistes, en voulait à Montluc, pour la représaille du Mont-de-Marsan, lorsqu'il n'aurait dû en vouloir qu'à la reine Jeanne d'Albrel et à Montgommery; mais, le brave Montluc en est assez dédommagé par tout le bien que dit de lui un historien calviniste (3).

La lettre de Catherine de Médicis à Strozzi est bien moins vraie que celle de d'Orthez à Charles IX : celle-ci pouvait être une réponse à un commandement verbal, porté par quelqu'un, comme La Mole, Marueil ou Perat; au lieu que l'autre n'a pas même pour elle la vraisemblance.

Il ne faut pas oublier qu'on a voulu en tirer la preuve de la préméditation du massacre, établir qu'il était résolu depuis longtemps, et qu'il devait être exécuté le même jour dans tout le royaume.

Strozzi rôdait autour de La Rochelle pour tâcher de la surprendre ; cette ville était une des quatre accordées aux calvinistes (1),et celle de toutes qui donnait le plus d'inquiétude à cause des secours étrangers qu'elle pouvait recevoir par mer ; mais, plus elle était suspecte à la cour, plus elle suspectait ses intentions et ses démarches : ainsi les Rochellois se gardaient par eux-mêmes, de façon à ne laisser a Strozzi que des espérances fort incertaines de les surprendre.

Dans cette situation des choses, que Catherine de Médicis n'ignorait pas, on veut qu'elle ait écrit à cet officier la lettre suivante :

« Strozzi, je vous avertis que aujourd'hui, 24 août, l'amiral et tous les huguenots qui étaient ici ont été tués, partant avisez diligemment à vous rendre maître de La Rochelle, et faites aux huguenots qui vous tomberont entre les mains le même que nous avons fait à ceux-ci ; gardez-vous bien d'y faire faute, autant que craignez de déplaire au Roi, Monsieur mon fils, et à moi.
Signé : CATHERINE. »



(3) La Popelinière, livre XXIX, p. 67.
(1) Les autres étaient Nimes, Montauban et La Charité.



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Message  Monique Mar 08 Déc 2009, 8:35 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Beaucoup de raisons combattent la réalité de cette lettre; aucun historien français n'en a parlé; Brantôme même, qui était alors à Brouage avec Strozzi, l'a ignorée. Un seul écrivain suspect la rapporte sans preuve, et l'auteur des Hommes illustres, qui s'en sert, semble être honteux de l'avoir puisée dans cette source, puisqu'il n'ose pas la citer. Il s'aperçoit sans doute qu'il a pris confiance dans une pièce que tous les écrivains qui l'avaient précédé, soit calvinistes ou catholiques, ont rejetée, ayant pu la tirer comme lui d'un ouvrage imprimé dès 1576 (1).

Mais ces considérations sont les moindres motifs capables de faire regarder cette pièce comme apocryphe; elle est bien plus suspecte aux critiques par l'époque de son envoi que par sa propre existence.

En effet, il serait possible que Catherine de Médicis eût écrit cette lettre à Strozzi dans le moment qu'on massacrait les huguenots
à Paris; mais, il est inconcevable qu'elle l'ait écrite plusieurs mois auparavant, comme si elle voyait de si loin le succès d'une entreprise que mille circonstances pouvaient déranger.

Pour écrire avec ce ton de confiance, et six mois d'avance, que le 24 du mois d'août l'amiral et tous les huguenots qui étaient à Paris avaient été tués, il fallait qu'elle fût assurée — que la reine Jeanne d'Albret consentirait au mariage de son fils (Henri de Navarre) avec Marguerite de Valois, — qu'elle viendrait aux noces malgré sa répugnance pour une ville dont les habitants aimaient les Guises et détestaient les huguenots, — que le pape Pie V, qui ne voulut jamais accorder la dispense, mourrait, — que Grégoire XIII se prêterait mieux que son prédécesseur aux bonnes vues de Charles IX, — que Coligny et tous les huguenots seraient assez fous pour prendre confiance dans les belles démonstrations d'amitié du roi, — que l'amiral mépriserait tous les avis qui lui venaient de La Rochelle et des autres parties du royaume, — qu'un assassin maladroit et trop pressé ne viendrait pas déranger toutes les mesures en devançant de lui-même l'heure marquée pour mettre à mort ce chef de parti, — que le coup d'arquebuse, non prévu dans ce système par la reine, et tiré par Maurevert, n'aurait pas fait prendre les armes ou la fuite aux huguenots, — que les sages conseils du vidame de Chartres et ses funestes pressentiments seraient rejetés avec mépris par Teligni, et qu'il supposerait à ce qu'on transportât son beau-père au moins dans le faubourg Saint-Germain, d'où il aurait pu échapper au meurtre, — que la reine elle-même, en écrivant plusieurs mois avant le jour marqué pour le massacre, était sûre que sa lettre ne tomberait pas dans les mains des huguenots, soit par infidélité, imprudence, cas fortuit, ou même par la mort de Strozzi.


(1) Cet ouvrage est intitulé : Mémoires de l'Etat de la France sous Charles IX, cités plus haut.



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Message  ROBERT. Jeu 10 Déc 2009, 6:35 pm

.

Le dernier paragraphe de votre dernier "post" est éloquent: il démantèle assez bien le mythe de la Saint-Barthélémy, avec la douzaine de "que"... Comme on dit, çà fait beaucoup de "si" et avec "si" on peut bâtir Paris en bouteille...
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Message  Monique Lun 14 Déc 2009, 8:24 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Eh ! combien d'autres accidents eussent pu déranger l'exécution d'une entreprise dont on avait pu, sans doute, souhaiter le moment, mais non pas le préparer et le fixer à la minute, de façon que le succès en fût infaillible.

Il est donc absurde de dire que Catherine de Médicis envoya à Strozzi, plusieurs mois avant celui d'août, un paquet contenant deux lettres, dont l'une, cachetée, ne devait être ouverte que le 24, jour du massacre. Et comme les faits sont aussi indivisibles en histoire que les aveux en justice, dès lors qu'on affirme que la lettre de la reine a été envoyée à Strozzi quelques mois avant la Saint-Barthélemy, et qu'elle contenait des choses dont l'événement ne pouvait être assuré, disposé ni prévu définitivement par aucune puissance humaine, il faut se déterminer à rejeter cet acte comme faux et controuvé.

Si, après ce qu'on vient de lire, il restait encore des personnes attachées à l'opinion de ceux qui ont regardé la journée de la Saint-Barthélemy comme une trame ourdie de longue main, et comme une mine qui devait jouer partout au même instant, une réflexion très-simple achèvera de les désabuser.

Cette sanglante tragédie, résolue depuis longtemps, ainsi que quelques-uns le veulent, supposait de la part de Catherine de Médicis et de son conseil, des dispositions certaines et uniformes, qui auraient réussi au moins dans quelques villes.

Or, il n'y en a pas une où l'action se soit passée le même jour qu'à Paris. Le massacre eut lieu à Meaux le lundi 25 août, à La Charité le 26, à Orléans le 27, à Saumur et Angers le 29, à Lyon le 30; à Troyes le 2 septembre, à Bourges le 11, à Rouen le 17, à Romans le 20, à Toulouse le 23, à Bordeaux le 3 octobre.

A la vue de ces différentes dates, on ne saurait s'empêcher de convenir que ce n'était pas la peine de prendre des mesures de si bonne heure et de risquer d'éventer la mine, ou d'en tourner l'effet contre soi-même, en la chargeant plusieurs mois avant qu'elle dût jouer.

Eh ! comment croire que les ordres ont été donnés partout le même jour, dès qu'ils n'ont été exécutés, en aucun lieu, dans le temps fixé pour cette catastrophe.




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Message  Monique Mer 16 Déc 2009, 8:24 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Il n'y avait pas pour s'y opposer un comte de Tende à Orléans, un comte de Charny à Saumur, Angers et Troyes, un Saint-Herem à Bourges, un Tannegui-le-Veneur à Rouen, un Gardes à La Charité, un Mandelot à Toulouse, un d'Orthez à Bordeaux. Il faut donc s'aveugler pour ne pas voir dans ces différentes époques du massacre, la ruine du système d'une préméditation concertée, et dans l'acharnement des meurtriers, le seul effet de la licence effrénée, au lieu de l'exécution d'un ordre antérieur et général dont on ne trouve aucune preuve.

Qu'on jette les yeux, une seconde fois, sur les dates de ces tristes événements, qu'on fasse en même temps attention aux différentes distances qu'il y a, de la capitale, aux lieux où ils se sont passés, et l'on verra que, semblables aux flots d'un torrent qui déborde, ils se sont étendus successivement de proche en proche, et ont inondé de sang les pays où celui des catholiques criait le plus vengeance (1) ; sans qu'il fût besoin pour cela d'ordre supérieur ou d'impulsion étrangère.

La haine qui séparait les deux partis, le tort que les calvinistes avaient fait aux catholiques, les inimitiés particulières, la cupidité générale, une sorte de fureur que le démon des guerres civiles avait soufflé sur les Français, en changeant les moeurs de la nation la plus humaine, suffisaient pour produire ces funestes effets, et Charles IX devait moins s'occuper des moyens d'assurer un grand carnage, que de ceux de le prévenir. Aussi le vit-on écrire aux gouverneurs des provinces, dès que l'amiral fut blessé, qu'il ferait bonne, briève et rigoureuse justice de cet acte pernicieux (2), parce qu'il craignait que les huguenots ne se la fissent.

Aussi, dès le jour même de la Saint-Barthélémy, prévint-il ses gouverneurs de ce qui s'était passé à Paris, le rejetant sur l'inimitié des deux maisons, et recommandant à ces officiers de donner ordre à la sûreté respective, parce qu'il avait sujet d'appréhender que ce malheur ne s'étendit et passât plus avant que Paris; soit par le mauvais effet de l'exemple qui aurait entraîné les catholiques, soit par l'impression du ressentiment qui pouvait les animer contre les huguenots, soit par le droit cruel des représailles qui eût pu faire fondre ceux-ci sur les autres.



(1)On doit remarquer, qu'à l'exception de Nîmes, presque toutes les villes où les huguenots avaient commis des meurtres sont celles où ils ont été les plus maltraités a la
Saint-Barthélémy.
(2) D'Aubigné, t. II, livre I.



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Message  Monique Lun 21 Déc 2009, 9:29 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY




La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Les temps nous ont conservé si peu de ces monuments, que nous avons cru devoir placer ici une lettre de Charles IX à un gouverneur (1); on ne pourra guère la lire, sans se détacher du préjugé dans lequel tout le monde semble s'être fortifié pour accuser ce roi et son conseil, d'avoir eu le dessein, d'avoir formé le plan de faire périr en un jour tous les huguenots.

« M. de Joyeuse, vous avez entendu ce que je vous écrivis avant-hier de la blessure de l'Amiral, et que j'étais après à faire tout ce qui m'était possible, pour la vérification du fait et châtiment des coupables, à quoi il ne s'est rien oublié. Depuis, il est advenu que ceux de la maison de Guise, et les autres seigneurs et gentilshommes qui leur adhèrent, et n'ont pas petite part en cette ville, comme chacun sait, ayant su certainement que les amis dudit Amiral voulaient poursuivre sur eux la vengeance de cette blessure pour les soupçonner, à cette cause et occasion, se sont si fort émus cette nuit passée, qu'entre les uns et les autres, a été passée une grande et lamentable sédition, ayant été forcé le corps de garde, qui avait été ordonné à l'entour de la maison dudit Amiral, lui tué avec quelques gentilshommes : comme qu'il a été aussi massacré d'autres en plusieurs endroits de la ville.

Ce qui a été mené avec une telle furie, qu'il n'a été possible d"y mettrele remède tel qu'on eût pu désirer, ayant eu assez à faire à employer mes gardes et autres forces pour me tenir le plus fort en ce château du Louvre, pour après faire donner ordre par toute a ville à l'apaisement de la sédition, qui est à cette heure amortie, grâces à Dieu : étant advenue par la querelle particulière qui est, de longtemps y a, entre ces deux maisons : de laquelle ayant toujours prévu qu'il succéderait quelque mauvais effet, j'avais fait ci-devant tout ce qui m'était possible pour l'appaiser, ainsi que chacun sait, n'y ayant en ceci rien de la rompure (rupture) de l'édit de pacification, lequel je veux être entretenu autant que jamais.

Et d'autant qu'il est grandement à craindre que telle exécution, ne soulève mes sujets les uns contre les autres, et ne se fassent de grands massacres par les villes de mon royaume, en quoi j'aurais un merveilleux regret, — je vous prie faire publier et entendre par tous les lieux et endroits de votre gouvernement, que chacun ait à demeurer en repos, et se contenir en sa maison, ne (ni) prendre les armes, ni s'offenser les uns contre les autres, sur peine de la vie; et faisant garder et soigneusement observer mon édit de pacification : à ces fins et pour faire punir les contrevenants, et courir sur ceux qui se voudraient émouvoir et contrevenir à ma volonté, vous pourrez tant de vos amis de mes ordonnances, qu'autres, qui avertissant les capitaines et gouverneurs des villes et châteaux de voire gouvernement, prendre garde à la conservation et sûreté de leurs places, de telle sorte qu'il n'en advienne faute, m'averlissant au plus tôt de l'ordre que vous y aurez donné, et comme toutes choses se passeront en l'étendue de votre gouvernement, Priant le Créateur vous avoir, M. de Joyeuse, en sa sainte et digne garde. Escript à Paris le 24 août 1572.

Signé,
Charles, et au-dessous, Fizier.



(1) Cette lettre est extraite des Registres du Présidial de Nimes.



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Message  Monique Lun 28 Déc 2009, 7:39 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

On voit, par cette lettre, que le roi en avait écrit une au même gouverneur, le 22 août, à l'occasion de la blessure de l'Amiral; cette attention, qui fut commune pour tous les commandants des provinces, a peut-être induit en erreur les historiens contemporains. Trompés par la multitude de courriers dépêchés de tous côtés, la plupart ont cru qu'ils étaient porteurs de mandements pour exterminer les huguenots, quand ils ne couraient que pour empêcher qu'on ne massacrât les catholiques; et voilà le fondement le plus apparent sur lequel a pu se former l'opinion commune des ordres de faire périr les huguenots; mais, une conjecture n'est pas une preuve, surtout lorsqu'elle est détruite par les faits.

Si la reine n'a pas pu, sans une révélation écrire à Strozzi, quelques mois avant le massacre : « Je vous avertis que aujourd'hui 24 août, l'Amiral et tous les huguenots qui étaient ici, ont été tués, » et que cette lettre ne soit pas une pièce fabriquée: elle n'a élé écrite que le jour même du massacre, et alors il n'y a plus d'arrangement antérieur; elle est l'ouvrage du moment.

Catherine de Médicis regardant les Rochellois comme les sujets les plus insolents à cause de leur force, les plus dangereux à cause, de leur position ; il est possible qu'au moment où tout respirait le meurtre dans Paris, la fureur qui était partie du cabinet de la reine, y fût encore et excitât son conseil contre les Rochellois. Si le gouverneur d'Orléans envoya son domestique à la cour pour en connaître les intentions, il n'en avait donc pas encore reçu l'ordre de faire main-basse sur les huguenots; si les habitants de Bourges envoyèrent Marueil, qui revint sans ordre,il est évident qu'on ne leur en avait jamais envoyé à cet égard.

Si La Mole en porta un verbal au comte de Tende, et peut-être même fabriqué par ce méchant homme, il était postérieur à des lettres toutes contraires écrites directement par le roi à ce gouverneur, ce qui détruit l'idée d'un commandement antérieur. Si à l'arrivée de Dauxerre, porteur d'ordre,et sur ses instances, Mandelot se lavant les mains des meurtres, lui dit : « Mon ami, ce que tu lies, soit lié; » c'est une preuve que ce gouverneur n'en avait reçu jusques-là, que pour mettre les huguenots en sûreté, et non à mort.




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Message  Monique Mar 05 Jan 2010, 7:26 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Nous ajouterons contre l'opinion presque reçue, ou plutôt contre la supposition des ordres, que si Charles IX en eût donné, on ne se serait pas avisé de faire le semblant de les désavouer par des lettres, puisque ce roi n'avait pas rougi de convenir de ceux de Paris en plein parlement et dans les cours étrangères ; que si les meurtres commis dans les provinces étaient émaués de la volonté du monarque, on n'en aurait pas confié le soin à quelques écoliers batteurs de pavé et autres garnements, à Toulouse ; on n'en aurait pas recherché les auteurs à Lyon et à Rouen.

Concluons donc que la proscription ne regardait que l'Amiral et ceux qui pouvaient le venger, ou perpétuer les troubles; n'ayant été résolu que la mort des chefs ou factieux.

Que les horreurs ne devaient pas sortir de l'enceinte de Paris, le roi ayant fait entendre par plusieurs
lettres, qu'il n'entendait que cette exécution passât outre et s'étendît plus avant, et que si, malgré ces précautions, les meurtres se répandirent de la capitale dans plusieurs villes, ce fut parce que le brait qui se répandit par tout le royaume de ce qui s'était passé à Paris, excita les catholiques de beaucoup de villes à agir de même.

Enfin, il a péri beaucoup moins de monde qu'on ne croit, à la Saint-Barthélemy.

Il n'est pas aisé de déterminer le nombre des personnes qui ont péri le jour de la Saint-Barthélemy, ou à la suite de cette catastrophe; mais, il est facile de s'apercevoir qu'aucun historien n'a dit vrai, puisqu'il n'y a pas deux récits sur ce fait qui se ressemblent.

On doit même remarquer, qu'à mesure que ces auteurs ont écrit dans des temps plus éloignés de cet événement, ils en ont grossi les effets, comme s'il n'était pas assez terrible par lui-même. Ainsi, Péréfixe a écrit qu'il périt cent mille personnes ; Sully, soixante-dix mille ; de Thou, trente mille, ou même un peu moins; La Popelinière, plus de vingt mille; le Martyrologe des calvinistes, quinze mille; Papyre Masson, près de dix mille.




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Message  Monique Mer 06 Jan 2010, 7:18 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

De ces différentes opinions, la moindre nous paraît la plus vraisemblable, parce qu'elle part d'un auteur qui ne cherchait pas à pallier l'action; il eût voulu, au contraire, qu'elle se fût étendue sur toutes les provinces.

Nous ne rapportons pas ses paroles, elles répugnent trop à nos moeurs; mais, nous nous en servons, pour juger de la façon de penser de celui qui les a écrites, et en conclure que si cet auteur contemporain avait été persuadé qu'il eût péri plus de dix mille personnes, il ne l'aurait pas dissimulé ; et c'est ce qui nous détermine, en partie, à préférer son témoignage à celui des autres historiens, qui avaient tous un vif intérêt à grossir le mal. Papire Masson eût voulu qu'il eût élé plus grand ; il ne craignait donc pas de le faire passer à la postérité tel qu'il était.

Le Martyrographe des protestants, La Popelinière, auteur calviniste; de Thou, l'apologiste des huguenots; Sully, attaché à leurs erreurs; Péréfixe, précepteur d'un roi auquel il s'efforçait d'inspirer des sentiments humains, voulaient faire détester les acteurs de cette tragédie; ils devaient donc en exagérer les effets, et c'est une raison pour faire suspecter leur récit.

A cette conjecture, nous joindrons des preuves littérales qui, si elles ne sont pas décisives, pourront au moins faire douter même de ce qu'a écrit là-dessus celui qui avait le plus de moyens d'être bien instruit, le plus grand intérêt de ne rien omettre, et la plus violente propension à exagérer. Nous voulons parler du martyrographe des calvinistes, en qui nous observons plusieurs contradictions. S'il recherche, en général, le nombre des personnes qui périrent à la Saint-Barthélémy, il en suppose trente mille; s'il entre dans le plus grand détail, il n'en trouve que quinze mille cent trente-huit; s'il les désigne, il n'en nomme que sept cent quatre-vingt-six.

Conclure de ce petit nombre de dénommés, qu'il n'a péri en tout que huit cents personnes, serait une conséquence hasardée : dire qu'il en a péri beaucoup moins de quinze mille cent trente-huit (puisque tous les soins du martyrographe n'ont pu aboutir qu'à recouvrer les noms de sept cent quatre-vingt-six martyrs), c'est une conjecture qui équivaut à une démonstration.




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Message  Monique Sam 09 Jan 2010, 7:57 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

En effet, quel était l'objet de ce compilateur d'extraits mortuaires? — C'était de conserver la mémoire de ceux qui avaient péri pour leur religion : le seul titre de son volume in-folio annonce cette intention. Il faut donc supposer que l'auteur a recherché et conservé avec soin ces noms précieux à la secte, et les moyens ne durent pas lui manquer ; le zèle des uns, la vanité des autres, l'intérêt particulier et commun devaient faire arriver jusqu'à lui des pièces justificatives sans nombre, surtout dans les premiers moments de l'action, temps auquel l'impression était plus vive et les idées plus fraîches ; et c'est alors qu'il a écrit. Cependant il n'a pu conserver que sept cent quatre-vingt-six noms, parmi lesquels on le voit en recueillir de si petite conséquence, tels que celui de maître Poêlon, chaudronnier à Bourges, qu'il semble permis d'en induire qu'on n'oubliait rien, qu'on ramassait tout pour grossir le nombre des martyrs et le volume du martyrologe.

Les moindres choses sont intéressantes dans une discussion critique, soit pour fortifier les conjectures, soit pour en faire naître d'autres dans l'esprit du lecteur, d'après lesquelles, si on ne peut arriver à la vérité, on en approche.

C'est par ces considérations, que nous avons cru devoir mettre ici le tableau des martyrs de la secte; nous y joindrons quelques réflexions.

Nombre des Calvinistes qui ont péri à la Sainl-Barthélemy. (Extrait du Martyrologe des calvinistes, imprimé en 1582).

NOM
des villes où ils ont été tués.

A Paris, en bloc.......
A Meaux.............
A Troyes............
A Orléans...........
A Saumur et Angers...
A Romans............
A Rouen..............
A Toulouse..........
A Bordeaux..........

-----------------------------------------------------------

NOMBRE
de ceux qui ne sont que désignés.

1000, en détail 468
225
37
1850
23
20
1800
26
7
600
306
274

Total... 15,138 786
-----------------------------------------------------------

NOMBRE
de ceux qui sont nommés.

152
30
37
156
23
10
144
8
7
212
000
7

Total... 786
-----------------------------------------------------------

Si après avoir jeté les yeux sur ce tableau de proscription, on lit l'ouvrage d'où il est extrait, on y apercevra des contradictions qui vont jusqu'à l'absurdité.

L'auteur suppose en gros dix mille de ces martyrs à Paris; puis, entrant dans le détail, il n'en compte que quatre cent soixante-huit, encore faut-il que pour trouver ce nombre, il dise qu'il en périt vingt-cinq ou trente dans le quartier de la Croix du Trahoir, trente dans la rue Bétizy, seize.aux prisons, vingt dans deux maisons entières, tous ceux qui étaient logés sur le pont Notre-Dame, et ainsi du reste; et de tous ces morts, il n'en nomme que cent cinquante-deux : il faudrait donc croire qu'il y a erreur d'un zéro dans son total, et réduire le nombre des morts dans Paris à mille.

C'est l'opinion de La Popelinière ; elle est d'autant plus probable, qu'on peut l'appuyer d'un compte de l'Hôtel-de-Ville de Paris, par lequel on voit que les prévôts des marchands et échevins avaient fait enterrer les cadavres aux environs de Saint-Cloud, Auteuil et Chaillot, au nombre de onze cents! (1).



(1) Extrait d'un livre des comptes de l'Hôtel de Ville de Paris. — « Aux fossoyeurs des Saints-Innocents, vingt livres à eux ordonnées par les prévôt des marchands et échevins, par leur mandement du 13 septembre 1572, pour avoir enterré depuis huit jours onze cents corps morts aux environs de Saint-Cloud, Auteuil et Challuan. » — Il y avait eu pareil mandement du 9 septembre, pour quinze livres données à compte aux mêmes fossoyeurs.



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Message  ROBERT. Dim 10 Jan 2010, 8:37 pm

.


Ce mythe, chère Monique, me fait penser à un autre: H1N1
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Message  Monique Mar 12 Jan 2010, 8:08 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Il est constant, qu'à l'exception de l'Amiral, qui fut exposé aux fourches patibulaires de Montfaucon, et d'Oudin Petit, libraire, qu'on enterra dans sa cave, tous les cadavres furent jetés dans la Seine. Les charrettes chargées de corps morts de demoiselles, femmes, filles, hommes et enfants (dit le martyrographe) (2), étaient menées et déchargées à la rivière.

Les cadavres s'arrêtèrent partie à une petite île qui était alors vis-à-vis du Louvre, partie à celle dite l'île des Cygnes : il fallut donc pourvoir à leur enterrement, de peur qu'ils n'infectassent l'air, et l'eau, et on y commit huit fossoyeurs pendant huit jours, qui, autant qu'on peut s'en rapporter à ces hommes, enterrèrent onze cents cadavres.

S'il était bien essentiel de débattre ce compte, on trouverait de fortes présomptions contre sa fidélité. Il n'est presque pas possible que-huit fossoyeurs aient pu enterrer dans huit jours onze cents cadavres. Il fallait les tirer de l'eau, ou du moins du bas de la rivière ; il fallait creuser des fosses un peu profondes, pour éviter la corruption; le terrain où elles furent faites est très ferme, souvent pierreux ; comment chacun de ces huit hommes aurait-il donc pu enterrer pour sa part cent trente-sept corps morts, en huit jours? chose difficile à faire et à croire. On doit même présumer que ces hommes, peu délicats par état et par nature, ne se sont pas fait scrupule de grossir le nombre des enterrés, pour grossir leur salaire, et vraisemblablement ils n'avaient personne pour les contrôler.

Ainsi, c'est tout au plus que nous supposons mille personnes massacrées dans Paris, conformément à ce que La Popelinière a écrit. D'autres raisons nous persuadent qu'il y a erreur dans le nombre des morts d'Orléans; celui qui les a recueillis n'en désigne que 156, ne trouvant pas sans doute que ce fût assez, ni qu'il lui fût aisé d'en établir davantage.

Il dit que les meurtriers se sont vantés d'en avoir fait mourir jusqu'au nombre de 1800 ; voilà une preuve peu juridique, elle nous rappelle la tournure de de Thou, qui ne pouvant pas avec pudeur faire monter le nombre des morts à Paris, au delà du double de ce que La Popelinière avait écrit, trente ans avant lui, et voulant induire la postérité à suppléer, par l'effet de l'imagination , ce qu'il retranche à regret de sa narration, nous rapporte l'anecdote d'un certain Crucé qu'il dit avoir vu bien des fois se vanter, et montrant insolemment son bras nue, que ce bras avait égorgé ce jour-là plus de quatre cents personnes, et pour rendre la chose plus croyable, cet historien a soin de donner à ce fanfaron sauvage, une physionomie vraiment patibulaire.

Mais, comment n'a-t-il pas fait réflexion que, malgré ce bras nue et cette figure affreuse, ce Crucé n'a pas pu en tuer quatre cents pour sa part, quand, de l'aveu de de Thou, il n'en a péri que 2,000; il n'aurait rien laissé à faire aux autres. La vérité se rencontre rarement là où la vraisemblance ne saurait se trouver; telle est la faute que le Martyrographe fait, quand il exagère le nombre des personnes massacrées à Lyon.

Il dit d'abord, qu'on en tua environ 350, puisqu'il en périt de 15 à 1800, et sur le refus des bourreaux et soldats, il n'emploie que 6 personnes à ce grand massacre. Telle est encore son inconséquence, à l'occasion des personnes qui périrent à Toulouse : il en fait tuer 306, dont il n'en nomme pas une seule, et ces meurtres, ordonnés par la cour, sont commis par sept ou huit écoliers batteurs de pavés et autres garnements (1).



(2)Page 713, fol. verso.
(1) Expressions du Martyrologe des Calvinistes, p. 730, fol. verso.




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Message  ROBERT. Mar 12 Jan 2010, 10:46 pm

Monique a écrit:
La vérité se rencontre rarement là où la vraisemblance ne saurait se trouver;

Très belle observation !
ROBERT.
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Message  gabrielle Mer 13 Jan 2010, 8:11 am

La Vérité ne supportant pas la variation ou les changements, le "martyrologe" calviniste perd vite toute vraisemblance.
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Message  Monique Mer 13 Jan 2010, 8:50 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

On peut, d'après ce qu'on vient de lire, se former une idée du nombre de ceux qui ont péri à la Saint-Barthélemy, et le réduire beaucoup au-dessous de ce que les historiens les plus modérés ont écrit sur cette matière.

Nous laissons ce soin au lecteur. Chacun formera son jugement selon qu'il aura été plus ou moins affecté de ce que nous avons mis sous ses yeux. Mais, si l'on veut une règle qui puisse servir à faire un compte à peu près, qu'on se souvienne que le martyrographe n'a pas pu, dans le détail, porter au delà de 468 le nombre des morts à Paris, au lieu de dix mille qu'il a hasardé en bloc; qu'il n'en désigne que 156 à Orléans, au lieu de 1830; qu'il n'en a supposé d'abord que 350 à Lyon, au lieu de 15 à 1800 ; qu'il en compte 600 à Rouen, quoiqu'il n'eu nommé que 212 ; qu'il en suppose 306 à Toulouse, quoiqu'il n'en nomme pas un seul, et 271 à Bordeaux, dont il n'en nomme que 7.

Alors, retranchant de ce catalogue, 9,000 pour Paris, 1694 pour Orléans, 1450 pour Lyon et 250 à Rouen (qui en aura encore près du double de ceux qu'il a nommés); plus de 200 pour Toulouse, et 200 au moins à Bordeaux, dont le massacre n'a commencé que longtemps après que tout fut apaisé dans le royaume ; il ne restera pas deux mille personnes, et c'est tout au plus ce qui a péri dans ces jours de deuil.

Qu'on examine, qu'on suppose, qu'on exagère tant qu'on voudra s'il n'a péri que mille personnes à Paris, comme l'a écrit La Popelinière, historien calviniste et le plus contemporain de l'événement, il est bien difficile de se persuader que les autres villes en aient vu massacrer, en tout, un pareil nombre.

A plus forte raison, si le massacre de la capitale fut moindre,comme nous l'avons prouvé par le témoignage de celui qui avait le plus d'intérêt et de moyens d'en savoir jusqu'aux plus petites circonstances.

Eh ! quel fonds peut-on faire sur tout ce qui a été écrit là-dessus, quand on voit des contradictions manifestes dans les historiens, sur les faits les plus simples?



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Message  Monique Lun 18 Jan 2010, 7:27 pm

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La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Que croirons-nous de la carabine de Charles IX, dont Brantôme est le seul qui ait parlé? D'Aubigné en a dit un mot, mais avec tant de discrétion, contre son ordinaire, qu'il semble craindre de rapporter cette fable.

De Thou n'en a pas parlé, et certainement ce n'est pas pour ménager Charles IX, qu'il appelle un enragé. Brantôme même a soin de dire, que la carabine ne pouvait pas porter si loin. Mais, nous demandons où Brantôme a pu prendre ce fait? Il était alors à plus de cent lieues de Paris. « Alors j'étais, dit-il, à notre embarquement de Brouage (1). » Ce n'est donc qu'un ouï-dire, que personne n'a osé répéter dans le temps; que le duc d'Anjou n'aurait pas omis dans son récit à Miron, puisqu'il parle de cette même fenêtre, d'où l'on prétend que Charles IX tirais sur ses sujets.

Le roi, la reine ma mère et moi, dit le duc d'Anjou, allâmes au portail du Louvre joignant le jeu de paulme, en une chambre qui regarde sur la place de la basse-cour, pour voir le commencement de l'exécution.

Si Charles IX eût tiré sur ses sujets, c'était bien une circonstance à ne pas omettre, c'était même la seule qui pût faire tomber presque tout l'odieux du massacre sur ce roi, et il est vraisemblable que le duc d'Anjou n'en aurait pas laissé échapper l'occasion.

C'est donc une allégation d'autant plus dépourvue d'apparence, que la rivière était moins couverte de fuyards, que de Suisses qui passaient l'eau pour aller achever le massacre dans le faubourg Saint-Germain : Charles IX aurait donc tiré sur ses troupes, et non sur ses sujets.

Ehl comment accorder cette inhumanité réfléchieeût tiré sur ses sujets, c'était bien une circonstance à ne pas omettre, c'était même la seule qui pût faire tomber presque tout l'odieux du massacre sur ce roi, et il est vraisemblable que le duc d'Anjou n'en aurait pas laissé échapper l'occasion. C'est donc une allégation d'autant plus dépourvue d'apparence, que la rivière était moins couverte de fuyards, que de Suisses qui passaient l'eau pour aller achever le massacre dans le faubourg Saint-Germain : Charles IX aurait donc tiré sur ses troupes, et non sur ses sujets.


(1) L. e. sup.


M. CH. BARTHÉLÉMY
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Message  Monique Mer 20 Jan 2010, 9:34 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Ehl comment accorder cette inhumanité réfléchie avec ce mouvement d'horreur qui le saisit, ainsi que sa mère et son frère, au premier coup de pistolet qu'ils entendirent.

Laissons parler le duc d'Anjou lui-même :
« Nous entendîmes à l'instant tirer un coup de pistolet, et je ne saurais dire en quel endroit, ni s'il offensa quelqu'un; bien sais-je que le son seulement nous blessa tous trois si ayant dans l'esprit, qu'il offensa nos sens et notre jugement. » Cet aveu, dénué d'artifice, fera sans doute plus d'impression sur les esprits, que l'assertion de Voltaire, qui, pour avoir l'air de tout savoir et ajouter une espèce de témoin oculaire à un ouï-dire de Brantôme, a prétendu qu'un maréchal de France lui avait dit tenir le fait de la carabine, du page même qui la chargeait.

Mais, c'est assez parler de cette triste et à jamais regrettable journée de la Saint-Barthélemy.

Excidat illa dies aevo, nec postera credant.
Saecula, nos certè taceamus.


Dirons-nous avec le premier président de Thou, qui ne cessait de répéter ces vers de Stace, que Voltaire (1) a mis sans fondement dans la bouche du chancelier de l'Hôpital : c'est une restitution de plus à faire.

En 184...le congrès scientifique d'Angers proposa, dans la vingt-troisième question de son programme, ce sujet :
Quelle fut la part de la politique dans la Saint-Barthélemy? M. de Falloux y répondit, en établissant par des textes, que ce déplorable événement appartient exclusivement à la politique, et que l'imprévu y joua un bien plus grand rôle qu'on ne le suppose généralement. Le mémoire de M. de Falloux a paru in extenso dans le Correspondant en 1843 (1).



(1) Essai sur les moeurs, t. IV, p. 75. (Tome XVIII des Oeuvres de Voltaire, édit, Bouchot, 1829.)
(1)La Saint-Barthélemy et le XVIIIe Siècle (p. 145-170).



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Message  Monique Ven 22 Jan 2010, 6:35 pm

Monique a écrit:
LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Eh! comment accorder cette inhumanité réfléchie avec ce mouvement d'horreur qui le saisit, ainsi que sa mère et son frère, au premier coup de pistolet qu'ils entendirent.

Laissons parler le duc d'Anjou lui-même :
« Nous entendîmes à l'instant tirer un coup de pistolet, et je ne saurais dire en quel endroit, ni s'il offensa quelqu'un; bien sais-je que le son seulement nous blessa tous trois si ayant dans l'esprit, qu'il offensa nos sens et notre jugement. » Cet aveu, dénué d'artifice, fera sans doute plus d'impression sur les esprits, que l'assertion de Voltaire, qui, pour avoir l'air de tout savoir et ajouter une espèce de témoin oculaire à un ouï-dire de Brantôme, a prétendu qu'un maréchal de France lui avait dit tenir le fait de la carabine, du page même qui la chargeait.

Mais, c'est assez parler de cette triste et à jamais regrettable journée de la Saint-Barthélemy.

Excidat illa dies aevo, nec postera credant.
Saecula, nos certè taceamus.


Dirons-nous avec le premier président de Thou, qui ne cessait de répéter ces vers de Stace, que Voltaire (1) a mis sans fondement dans la bouche du chancelier de l'Hôpital : c'est une restitution de plus à faire.

En 184...le congrès scientifique d'Angers proposa, dans la vingt-troisième question de son programme, ce sujet :
Quelle fut la part de la politique dans la Saint-Barthélemy? M. de Falloux y répondit, en établissant par des textes, que ce déplorable événement appartient exclusivement à la politique, et que l'imprévu y joua un bien plus grand rôle qu'on ne le suppose généralement. Le mémoire de M. de Falloux a paru in extenso dans le Correspondant en 1843 (1).



(1) Essai sur les moeurs, t. IV, p. 75. (Tome XVIII des Oeuvres de Voltaire, édit, Bouchot, 1829.)
(1)La Saint-Barthélemy et le XVIIIe Siècle (p. 145-170).



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Message  Monique Ven 22 Jan 2010, 6:48 pm

LA SAINT-BARTHÉLEMY



La proscription n'a jamais regardé que Paris.

Au XVIIIe siècle, l'historien anglais et anglican, Hume, avait démontré, dans divers passages, que la Saint-Barthélemy
n'avait nullement été préméditée: A notre époque, M. Gapefigue a écrit, dans le même sens, ces lignes que nous devons rapporter : « Le projet de se délivrer des huguenots par un massacre pouvait bien confusément se présenter à la pensée ; mais, s'il avait été arrêté, si la paix n'avait été conclue que dans cet objet, il est impossible que le pape et le roi d'Espagne, ces deux puissances de l'unité catholique, n'en fussent pas prévenus, ou qu'ils n'eussent pas l'instinct du but secret de la paix (2).

Et plus loin, M. Capefigue ajoute: « Si l'on avait résolu de longue main, et par un conseil réfléchi, le massacre des huguenots, il en eût été question dans la correspondance secrète de Charles IX et de Philippe II, lequel poussait, conjointement avec le duc d'Albe, au triomphe complet du parti catholique.

Quand on lira les dépêches, les instructions du roi d'Espagne et son joyeux étonnement sur la Saint-Barthélemy, il sera impossible de ne pas rester convaincu qu'il n'y avait dans cet événement rien de préparé ; qu'une force de choses spontanée, invincible, l'opinion du peuple, obligea Charles IX à sanctionner plutôt qu'à méditer ces sanglantes journées.

Dans les récits de cette catastrophe, on n'a pas assez distingué l'approbation donnée à un fait accompli et la volonté qui le prépare (1). » Enfin, nous citerons encore ces paroles dignes d'être méditées : « Mais, quand on a écrit l'histoire de cette époque, on a parlé d'ordres secrets, de nobles réponses de quelques gouverneurs, et particulièrement du vicomte d'Orthès. Il y eut sans doute des gouverneurs qui empêchèrent les émotions populaires, qui sauvèrent les victimes de la réaction ; ils firent alors ce que les âmes fermes et élevées font toujours en révolution; ils s'opposèrent aux excès des masses. Mais, en tout ceci il n'y eut rien d'écrit, rien de répondu, parce qu'il n'y eut rien de commandé (2). » Rien de commandé, pour le massacre, mais pour le salut des calvinistes, M. Capefigue n'a pu l'ignorer. Seulement, à ces assertions formelles, il a négligé de joindre ses preuves : on a lu les nôtres, et elles sont concluantes.



(2) La Réforme et la ligue (1844), p. 311.
(1) lbid., p. 361.
(2) Page 394.



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