Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) - Par J. CALVET, Abbé. - 1926.

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Message  Roger Boivin Sam 28 Jan 2023, 6:22 pm


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Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_3_510

NIHIL OBSTAT :
Parisiis die 7a Aprilis 1926
E. BEAUPIN
Censor delegatus

IMPRIMATUR :
Parisiis die 8a Aprilis 1926
V. DUPIN
Vic. gen.


TABLE DES MATIERES

Lettre-Préface
Chapitre I. - La Douce Enfance.
Chapitre II. - L'Eclaireur de Charette.
Chapitre III. - La Formation d'un Grand Peintre.
Chapitre IV. - Le Pélerin de Terre Sainte.
Chapitre V. -  Notre-Dame des Champs.
Chapitre VI. - Notre-Dame de Besançon.
Chapitre VII. - Une Œuvre Variée.
Chapitre VIII. - Des Idées.
Chapitre IX. - L'Homme et le Chrétien.
Appendice.


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Message  Roger Boivin Dim 29 Jan 2023, 5:48 am

à Madame JOSEPH AUBERT Hommage respectueux J. C.


- Lettre-Préface -

du R. P. SERTILLANGES

MONSIEUR L'ABBÉ,

Je m'empresse, bien que tardivement, hélas ! - vous voudrez bien penser que cela ne se contredit point - de vous adresser les quelques réflexions que m'ont suggérées votre dessein et votre lettre.

J'ai connu M. Joseph Aubert à l'occasion d'un voyage en Orient. A bien des reprises nous avons souri, peut-être même ri, des particularités de cette rencontre. J'habitais alors - c'était en 1892 - notre couvent du Faubourg Saint-Honoré. Joseph Aubert vint m'y voir et voici comment il aimait à caricaturer plus tard sa première visite.

- '' Mon Père, je pense aller à Jérusalem et visiter la terre Sainte avec la caravane biblique organisée par vos confrères.

- Vous avez raison, Monsieur, un artiste chrétien ne peut se dispenser de connaître le pays de l'Evangile... Mais je suis fort pressé, je vous souhaite bon voyage et bon retour. ''

Peu après, m'étant décidé moi-même à ce pèlerinage, je le fis savoir à mes confrères lointains qui voulurent bien s'en féliciter avec exubérance. Joseph Aubert, présent à cet entretien, ne dit mot, mais esquissa, avouait-il plus tard, une grimace intérieure. J'arrivai ; nous partîmes à cheval pour un mois de caravane, et dès le premier jour nous ne nous quittions plus. Instinctivement nous allions aux mêmes spectacles, nous relevions les mêmes traits du paysage et des fabriques anciennes ; nous devisions inlassablement, ou bien tout à coup, sans avertissement préalable, nous organisions le silence.

Je fus témoin du travail d'âme qui, sans drame et sans pose aucune, s'effectua chez Aubert durant ce premier contact avec la nature orientale et les souvenirs sacrés. Je constatai aussi sa déception relative, causée par la nécessité de courir, là où il eût voulu longuement s'attarder, étudier, prier, et peindre. Sa rêverie était sans cesse interrompue, son chevalet ne prenait pas racine ; à peine installé il fallait repartir, et il n'était pas l'homme des rapides improvisations. Il exécutait promptement, mais était lent à envisager un parti, lent à se décider, lent à '' s'assoir '', ainsi que disait Corot. Ce mot, '' il faut s'assoir '', il me le répétait souvent, et certes il savait ; mais il était lent. On eût dit qu'il avait confiance dans sa main plus que dans sa pensée. Sa main, c'était le labeur, père des certitudes ; sa pensée, c'était la nature reflétée, la nature jugée, et là il hésitait, il se sentait pris de scrupules. Il eût donc voulu méditer longuement ses esquisses, s'imprégner de ses sujets, et il ne le pouvait pas. Que de fois j'intercédai pour lui ! Mais la victoire n'était pas facile ; L'Ecole Biblique, qui était déjà une école archéologique, songeait à ses pierres et à ses inscriptions ; le guide songeait aux bêtes, aux points d'eau, à la longueur de l'étape, au soleil torride. On partait.

En dépit de ces obstacles, le peintre accumula dans ses cartons bien des documents précieux, qui dans un voyage ultérieur se compléteraient et renouvelleraient entièrement sa manière. Dans cette époque date une réelle transformation du talent de Joseph Aubert, tout au moins de son œuvre. On pourrait diviser sa carrière en avant et après le voyage de Palestine. Mais ceci est d'un autre ressort.

Devisant quotidiennement et presque continûment avec un homme, on apprend à le connaître. Par la suite, la connaissance entre nous devint plus intime, du fait de long séjours que je fis à l'Ermitage, admirable installation campagnarde où Joseph Aubert se plaisait à attirer sa nombreuse famille et ses amis durant la belle saison. Il aimait ces réunions et la tranquille animation qu'elles provoquent. Etre entouré comme un patriarche et un aimable commensal, vivre d'une vie commune, organiser des parties où tous auraient leur rôle et leur part, ce lui était une joie.

Du reste, outre ce sentiment familial développé, il avait l'instinct du propriétaire. Je ne sais quelle satisfaction innocente montait en lui du sol, quand il pouvait se dire en arpentant une terre : Elle est à moi. Mais, on vient de le voir, cet instinct n'était pas égoïste ; il voulait qu'on jouisse de son bien ; il entrait sans y penser, peut-être aussi en y pensant, dans la conception chrétienne qui fait de tout possesseur un administrateur au profit de ceux qui ne possèdent point.

Sa religion et ses principes de moralité chrétienne étaient chez lui profondément ancrés. Sa foi était vive et simple, avec beaucoup de largeur. Il ne raffinait pas, il ne se perdait pas dans le détail et ne se troublait pas des contradictions ambiantes. Il avait emporté avec lui sa Bretagne, et elle le gardait. Volontiers il discutait de doctrine, mais par curiosité d'esprit, non par inquiétude, et le fond des choses n'était jamais pour lui en question.

Sa piété ressemblait à sa foi : la simplicité sérieuse en était le caractère. Il était édifiant de le voir prier, sans qu'il y apportât la moindre affectation. Il était ami du prêtre par tradition, par religion éclairée, par noblesse d'âme.

D'une honnêteté foncière et d'une loyauté absolue, il souffrait très vivement de l'injustice et ne craignait pas de se mettre en avant pour la vaincre. - Je me rappelle sa stupéfaction un peu amusée, mais surtout fort scandalisée, en me racontant un jour le trait suivant. Il avait entrepris une campagne auprès des membres de sa société artistique, pour faire cesser certaines pratiques soi-disant traditionnelles, mais qui réservaient abusivement à quelques puissants et à leurs créatures les avantages du groupe. Il prenait chacun à part et essayait de le convaincre, afin d'avoir des appuis lorsque, à la prochaine assemblée, il attacherait le grelot. Or, l'un des grands pontifes ainsi sollicité, après l'avoir écouté longuement et gravement, répondit : '' Vous avez bien raison ; nos maîtres abusent ! Aussi, moi, je ne demande qu'une chose, c'est... d'être à leur place pendant deux ou trois ans. ''

J. Aubert n'avait pas le moindre orgueil, ce qui ne l'empêchait pas de songer à sa dignité ; mais les observations autorisées ou fortuites étaient toujours accueillies par lui avec simplicité et déférence ; il les méditait sérieusement ; sans abdiquer, il pesait la part du vrai et se rendait dès que sa conviction était faite. Volontiers, il sollicitait les conseils, se réservant le dernier mot, ainsi qu'il convient. C'était une âme libre et docile, qui se soumettait à Dieu et souvent aux hommes, parce qu'elle le voulait bien.

Il n'est pas besoin de dire qu'il fut un travailleur acharné. Son Œuvre est là qui le prouve. Quand il n'avait pas de tâche obligatoire, il s'en créait. Il ne concevait la vie qu'à la façon d'une tâche, mais avec d'heureuses détentes, dont il savait jouir et faire profiter autrui. Il était gai et gardait, même dans la vieillesse, quelque chose de l'enfant. Il s'amusait aux plaisanteries les plus innocentes. Une bonne histoire l'enchantait. Et puis, tout à coup, devant sa toile ou devant la nature, on le voyait reprendre un visage grave ; l'enfantillage cédait au sacerdoce.

Nulle ambition d'ailleurs. Il espérait être quelqu'un, mais n'avait nul souci de devenir quelque chose. Ce qui importait à ses yeux, c'était la probité de l'effort, c'était le respect de l’œuvre.

J'ai gardé un bien bon souvenir de mes rapports avec ce chrétien, cet homme, cet artiste. Triple couronne sur ce front, ces vocables ont le poids d'un panégyrique bien rarement mérité au même degré. Joseph Aubert, pour en être gratifié, n'avait pas besoin de mon témoignage ; mais c'est moi qui vous remercie, Monsieur l'abbé, de m'en avoir procuré l'occasion. On aime à dire d'un disparu, d'un ami : C'était un juste.

A. D. Sertrillanges,
Membre de l'institut.


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Message  Roger Boivin Lun 30 Jan 2023, 8:54 am

Avant le premier chapitre, voici quelques œuvres, dont quelques croquis :

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_21-10

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_28-10

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_13_10

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_15_10
Triptyque de S. François d'Assise - Le Belieu, église de Saint François d'Assise.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. Le_bel10

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_17_12
Portrait du R. P. Marquet.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_25_10
Portrait du Cardinal Richard.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_23_10
Le Bon Samaritain.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_23_11
Une autre version du Bon Samaritain, (église Notre-Dame-des-Champs à Paris).

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_19_11
LA Cueillette du Gui Sacré.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_19_10
Une autre version de LA Cueillette du Gui Sacré.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. Entre_10
Noyades de Nantes (Tableau peint entre 1882 et 1889).


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Message  Roger Boivin Lun 30 Jan 2023, 5:26 pm



I

La Douce Enfance


Je veux raconter la vie d'un artiste chrétien de ce temps, vie toute simple, sans événements retentissants, vie indépendante et solitaire, vécue loin des cercles officiels, des chapelles de camarades et de la publicité fructueuse, vie toute parfumée d'art et de foi. Je veux la raconter pour la jeunesse qui est encore capable de candeur dans ses admirations et pour tous ceux qui aiment avec un désintéressement naïf Dieu et la Beauté. C'est la vie de Joseph Aubert.

Il naquit le 19 août 1849 au château du Tertre, près de Nantes, d'une famille bretonne de propriétaires fonciers et de soldats. La richesse et la noblesse de son atavisme armoricain se marquèrent toujours dans cette distinction de lord anglais, qui aurait paru hautaine s'il ne l'avait tempérée par l'exquise douceur de son regard et de son sourire. Son père était, comme on dit, '' un homme d'autrefois '', vivant d'un petit nombre de sentiments élevés, profondément chrétien, attaché à l'honneur, rigide et autoritaire, vénéré de ses treize enfants. Quand il mourut en 1871, un religieux qui l'avait bien connu écrivait : '' J'admire l'héritage d'honneur que le vénéré défunt laisse à ses enfants. '' Sa mère était bonne, pieuse et douce, craintive à la fois et souriante ; elle redoutait pour ses enfants les pièges du lendemain et les misères de l'avenir, mais son cœur n'en était pas troublé parce qu'elle s'abandonnait à la Providence avec cette confiance filiale qu'on rencontre chez les saints.

Protégé par tant d'autorité et tant d'amour, Joseph Aubert grandit et son enfance fut douce. Il faillit mourir à deux ans d'une grave maladie et cette circonstance mit autour de lui des tendresses tremblantes, qui au lieu de lui conseiller l’égoïsme. comme il arrive, l'inclinèrent à la reconnaissance.

Tout petit, il devinait l'art de s'occuper des autres, de les mettre en mouvement, de les amuser, de dissiper l'humeur grise et de provoquer le rire ; c'est l,art de se faire aimer ; on l'aimait et il était heureux. Il commença ses études à Nantes et dès 1860 il alla les continuer à Vannes, lorsque sa famille, quittant le Tertre, s'installa au château de Beauregard, dans un large paysage de landes et de bois, à quelques kilomètres de la ville.

Je ne sais si le Collège Saint-François-Xavier de  Vannes a gardé le souvenir de Joseph Aubert ; pour lui il n'oublia jamais ses maîtres ni ses camarades. Son affection pour les Pères Jésuites, pour le Père Marquet dont il voulut faire le portrait, avait quelque chose de candide et de touchant ; il les regardait comme les éducateurs modèles et comme les maîtres de la vie chrétienne ; et je crois bien qu'il aurait senti quelque inquiétude de conscience s'il leur avait découvert des défauts ou s'il lui était arrivé, même pour un seul instant, de leur préférer un autre corps religieux. Les dix années passées à St-François-Xavier sous leur direction avaient pour lui une fraîcheur de paradis ; il en parlait à soixante-dix ans comme d'un rêve plein de douceur. A quelques pas de la famille, le collège continuait la famille, et le cœur de l'enfant pouvait s'épanouir dans cette atmosphère sans rencontrer ces bises aigres et dures qui rétractent et conseillent la méfiance et la méchanceté. Sa séduction naturelle opérait ; tout le monde, maîtres et élèves, était conquis. Doué d'une sorte de remuement rythmique et réglé, il secouait toutes les paresses et en quelques minutes, dans une cour de récréation, il avait organisé la joie vivante du jeu. Il excellait dans les exercices du corps, par sa souplesse, son agilité et son endurance et  il n'avait pas à s'imposer pour être reconnu par tous comme un chef. Préfet de la Congrégation dans les dernières années de ses études, il ne rencontrait aucune difficulté dans l'exercice délicat d'une autorité qu'il tenait beaucoup moins de son titre, que du prestige de sa vertu souriante et d'une force de commandement qu'il portait en lui.

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Message  gabrielle Mar 31 Jan 2023, 9:50 am

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C'est ma préférée, en noire et blanc elle est plus belle.
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Message  Eric Mar 31 Jan 2023, 4:33 pm

Merci cher Roger !
Je connaissais la toile des noyades de Nantes sous la terreur mais pas son auteur .
Les artistes ayant traité le sujet furent bien rares et courageux car on ne se fait pas beaucoup d'amis en montrant les horreurs perpétrées par la république....
Beaucoup voudraient bien faire oublier à jamais le "mariage républicain", les "déportations verticales" et le "baptême patriotique" dans la "baignoire nationale" qu' était la Loire à l'époque .
Honneur, donc, au bel artiste catholique qu' est (il reste vivant par ses œuvres) Joseph Aubert !  cheers
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Message  Roger Boivin Mar 31 Jan 2023, 6:20 pm

Très belle en effet Gabrielle ! D'ailleurs c'est justement avec celle-ci que l'auteur ouvre le livre.

Eric, voici l'esquisse des Noyades de Nantes qu'au préalable le peintre a fait :

Spoiler:


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Message  Roger Boivin Mar 31 Jan 2023, 6:21 pm


Les Pères appréciaient en lui encore plus d'autres dons, précieux dans la vie de Collège. S'il s'agissait d'organiser une représentation dramatique, Joseph Aubert qui avait déjà le crayon hardi et facile était chargé de brosser les décors, de les mettre en place, de dessiner les costumes, de composer les groupes. Dans les fêtes religieuses on lui confiait un rôle analogue et il n'avait pas son pareil pour marcher avec une gravité élégante, à la tête de thuriféraires '' en longs habits de lin ''. L'histoire ancienne, la chimie et le grec en souffraient un peu quelquefois et Joseph Aubert, trop absorbé par l'art religieux ou profane, ne connut pas les gros succès des distributions de prix. Il ne les a jamais connu dans sa vie d'artiste ; et, sans les dédaigner, il s'en est toujours passé avec sérénité.

Il s'appliquait néanmoins à l'étude avec cette régularité obstinée qui a été toujours la marque de son activité ; il s'appliquait à tout ce qui était de son devoir, spontanément, comme si bien faire ne lui eût coûté. C'était la pente naturelle de son âme '' un saint Louis de Gonzague, dit un de ses maîtres, avec des saillies de bonne humeur et des éclairs de fantaisie ''. La piété était une de ses manières d'être, piété simple, sans recherche, sans fièvre, doux coulante dans le flot traditionnel. Dès 1864, enfant de quatorze ans, il commence à tenir son carnet de retraite et rien n'est émouvant comme de suivre à travers ces carnets, conservés par lui comme des souvenirs, l'essor d'une âme fervente, qui monte vers Dieu d'un rythme régulier et calme.

En 1864, l'enfant inexpérimenté se contente de résumer les sermons des prédicateurs avec  une application qui ne néglige rien ; sa personnalité se marque cependant dans le choix qu'il fait des paroles qu'il veut retenir ; il souligne d'un gros trait cette phrase : une carmélite, autrefois grande dame, disait : '' quand je trouverai les austérités du Carmel trop dures, je me rappellerai ma vie du monde et elles ne me paraîtront plus rien. '' En 1865, dans des résumés plus brefs, il s'attache uniquement aux idées et il retient celles qui l'ont frappé et qu'il veut s'appliquer, comme celle-ci : '' c'est bien certain, je ne suis pas né pour les choses présentes, mais pour les choses futures. '' En 1867, l'adolescent se dégage des tâtonnements de l'enfance et son carnet de retraite n'est qu'une longue prière. '' Mon Dieu, faites-moi connaître votre volonté sur moi... Quelle carrière dois-je embrasser ? Vous savez bien que je ferai ce que Vous voudrez. '' En 1868, le jeune homme pense et réfléchit en philosophe chrétien ; il élabore pendant la retraite les principes qui dirigeront sa vie. '' Il faut empêcher le mal et faire le bien. Je dois être en tout un homme de devoir. En face de tout, je me dirai : est-ce bien ? est-ce mal ? Si c'est bien je le ferai, si c'est mal, je le repousserai. La résolution que je prends c'est de faire toujours le plus de bien que je pourrai. '' L'année 1869, clôt le cycle de l'adolescence ; dans la retraite de fin d'études faite à Penboch, Joseph Aubert choisit sa voie après une hésitation qui se trahit dans sa résolution finale. '' Je me suis décidé à entrer dans le monde pour y faire autant que possible la gloire de mon Dieu... disposé néanmoins à en sortir dans n'importe quelle circonstance, si je vois que c'est la volonté de Dieu. '' Cette résolution est accompagnée d'une note singulièrement éloquente ; elle contient trois affirmations lumineuses, placées à l'entrée de la vie pour l'éclairer et où tous ceux qui ont connu Joseph Aubert trouveront, je crois, le secret de son âme : '' La vraie piété procède de la volonté. - Tout délai avec Dieu est une sorte de refus. - Ceux qui ont confiance en Dieu seront solides comme les montagnes ''. En 1899, en 1910, en 1913, Joseph Aubert reviendra à Penboch faire sa retraite et comme autrefois il rédigera ses cahiers d'impressions et de résolutions ; pareil en est le ton et pareil le parfum ; il avait gardé jusque dans la vieillesse son âme candide d'adolescent, grâce à cette  piété volontaire et à cette confiance en Dieu qui lui avaient donné la solidité des montagnes.

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Message  Roger Boivin Mer 01 Fév 2023, 2:40 pm


Entrant dans le monde pour y faire la gloire de Dieu, Joseph Aubert désirait vivement procurer cette gloire par la peinture qu'il aimait. Il avait manifesté de bonne heure ce goût par des croquis d'écolier qui étaient originaux et fins. Il regardait toute chose de ses grands yeux clairs, il savait regarder et il désirait la solitude et le silence pour faire lentement pénétrer en lui les images du monde. Les jours de sortie à Beauregard, il s'échappait et s'en allait seul, pour des heures, dans la lande ou dans les bois ; on s'inquiétait autour de lui de ces goûts qui semblaient romantiques et ne l'étaient : l'artiste déjà méditatif s'imprégnait du spectacle changeant de la nature et assemblait les lignes et les couleurs de son paysage intérieur. Mais une carrière artistique qui aurait obligé le jeune homme à partir pour Paris et à entrer à l'Ecole des Beaux-Arts effrayait le père ; il pensait qu'on ne pouvait que se perdre moralement dans un milieu corrompu ; et mettant au-dessus de tout l'intégrité de l'âme de son fils qu'il voulait sauvegarder, il s'opposa à son départ. Cependant par une complaisance que lui dictait sa tendresse, il fit venir à Beauregard des tableaux de maître et le jeune homme s'attacha à les copier.

C'était une erreur et un malheur ; rien n'étouffe l'originalité d'un artiste comme la copie ; s'il prend l'habitude d'interposer entre la nature et lui la vision qu'en ont eue les maîtres, il lui sera difficile dans la suite de la voir lui-même directement et franchement et de se débarrasser de la convention.

Joseph Aubert eut un jour le sentiment qu'il faisait fausse route. Un artiste de valeur devait passer à Beauregard et on se proposait de lui demander, à propos des essais du jeune peintre, un avis qui déciderait de son avenir. Joseph Aubert, dans son atelier, avait disposé en bonne place les copies soignées dont il était très fier et il avait dissimulé de son mieux dans les coins ses essais personnels et ses croquis d,enfant. L'artiste introduit fit la grimace devant les copies étalées, parut pensif et attristé en songeant à tout le temps qu'il avait fallu perdre à ce travail déformant ; puis découvrant les pauvres essais de l'écolier, il y discerna une originalité de vision et une sûreté de main qui le rassurèrent. '' Mon ami, dit-il, tout cela ne vaut rien ; ne copiez pas, soyez vous-même ; vous pouvez peindre. '' Mais ce jugement ne désarma pas l'intransigeance du père. Joseph Aubert, s'inclinant devant ses désirs, donna une autre direction à son activité et il partit pour Nantes, où son frère, Louis Aubert, lui faisait une place dans ses bureaux d'armateur.

Déconcerté tout d'abord par la technique du commerce et par l'aridité de ses occupations, il se mit néanmoins à l’œuvre avec courage. Il savait que rien ne résiste à une volonté persévérante et il étudiait l'anglais et la comptabilité, chaque jour, à des heures marquées. Avec cela il trouvait le temps de se faire agréger à la conférence de Saint-Vincent de Paul, de visiter les pauvres et de faire la classe le jeudi aux enfants indigents. Il n,avait pas tué en lui l'artiste ; personne ne lui avait demandé ce sacrifice et il n,avait pas eu la pensée de se l'imposer à lui-même ; dans son bureau, dans ses courses d'affaires, il lui arrivait d'être distrait, de considérer un type curieux, un jeu de lumière sur les vieilles pierres, et de jeter un croquis sur le papier. Dans un de ses premiers tableaux, les Noyades de Nantes, on remarquera l'exactitude du dessinateur qui a donné aux maisons de Nantes et aux quais de la Loire leur véritable visage. Tout en présidant à l'embarquement ou au débarquement des colis, besogne mécanique et ingrate, il imprimait en lui la face vivante des choses. Il faisait sa besogne d'apprenti armateur avec conscience, mais le cœur n'y était pas ; il y a bien de la mélancolie dans une lettre du 8 février 1870 où il raconte sa vie à son père et finit sur cette phrase ponctuée d'un point d'exclamation : '' Je reviens de l'entrepôt après y avoir pesé 63.000 kilos de sucre ! ''

L'enfance joyeuse et douce s'achevait dans la tristesse sous un ciel bas sans horizon. La guerre de 1870 allait arracher Joseph Aubert à cette vie monotone et lui donner l'occasion d'employer les énergies militaires de sa race qui sommeillaient dans son âme d'artiste.

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Message  Roger Boivin Jeu 02 Fév 2023, 7:58 am

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Nos Morts pour le Droit et la Liberté.

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Chapelle des victimes de la première guerre mondiale -
Dole - Basilique Notre-Dame : https://www.patrimoine-histoire.fr/P_FrancheComte/Dole/Dole-Notre-Dame.htm

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Saint Loup Arrêtant Attila.

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Portrait du Cardinal Amette.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_48_10
Mort de Saint Claude.

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L'Agonie de Saint François Régis.


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Message  Roger Boivin Jeu 02 Fév 2023, 1:05 pm



II

L'Éclaireur de Charette



Lorsque la guerre éclata, Joseph Aubert venait de '' tirer au sort '', et n'était pas encore soldat. Il le regrettait en constatant avec simplicité qu'en temps de paix, le nom et l'idée de Patrie n'éveillent pas dans les cœurs que des sentiments assez médiocres ; mais quand la France est en danger, on se sent prêt à combattre pour elle avec une sorte de joie. Les premières défaites retentirent douloureusement dans le cœur du jeune homme ; il résolut de s'engager et il partit pour Beauregard, se demandant quel accueil fera son père à une pareille proposition. Il n'osa pas lui en parler le soir de son arrivée et lorsqu'après une nuit d'insomnie il lui dit brusquement : '' Je crois que je ferais bien de m'engager '', le vieillard répondit avec simplicité : '' J'allais te le dire ''. Et ce fut tout.

Plein de joie, Joseph Aubert sortit dans la campagne pour remplir ses yeux des paysages aimés et avec la vague pensée de recruter des compagnons. Il rencontra un jeune paysan, Tomaso, qui avec des gestes lents, ''étrépait la lande'' (''fauchait les hautes herbes''). ''Je pars'', lui dit-il brusquement, sans expliquer autrement pour quelle aventure ; le paysan se redressa lentement, s'appuya sur son ''étrèpe'', réfléchit quelques instants, les yeux au loin, et dit avec une simplicité digne de l’héroïsme calme qui l'entourait : '' Quand partons-nous, Monsieur Joseph ? ''. Ce Tomaso est un véritable héros de légende : Joseph Aubert racontait volontiers qu'il le rencontra le soir de la bataille de Patay comme il déambulait tête nue et l'air pensif. '' Tu as perdu ton képi dans l'affaire, mon pauvre Tomaso ? '' lui dit-il.

- '' Non, Monsieur Joseph, je l'ai jeté... Ne voilà-t-il pas, parce qu'il était percé de onze trous de balle, que tout le monde venait le voir comme une curiosité ; ils m'embêtaient à la fin, avec leurs questions et leurs compliments. ''

Le jeune homme s'engagea dans les éclaireurs à cheval de cette admirable légion des volontaires de L'Ouest que le général de Charette organisait et animait de son grand souffle patriotique. Le premier octobre, il était à Angers et il écrivait à ses parents : '' Nous arrivâmes à une heure du matin (au Mans) à la caserne Ste-Croix, où une superbe paillasse aussi douce qu'un édredon nous attendait. Le lendemain, à huit heures, eut lieu dans la chapelle des Jésuites une messe en armes qui me toucha vivement. Après avoir signé mon engagement, je fis connaissance avec tous mes camarades, tous joyeux comme dans le Paradis. J'allai faire visite au commandant Charette auquel je parlai de ma jument. Le résultat de l'entretient fut que je serais éclaireur pontifical ; j'en suis enchanté, c'est un métier plein de poésie. J'arrive en ce moment à Angers pour continuer sur Nantes et de là sur Couëron afin d'en ramener ma jument. Seulement vous voudrez bien m'envoyer par grande vitesse dès la réception de cette lettre, ma cartouchière de cuir, la jumelle de papa, si vous pouvez, avec son grand revolver et puis le sabre et le ceinturon soie noire d'Arthur que j'espère ne pas déshonorer. Il est d'usage que ceux qui en ont les moyens paient leur uniforme, aussi j'aurais besoin de cent francs. Ajoutez à cela mon traité d'équitation. Le train part, j'ai vu les Pères à Laval et au Mans, toujours charmants. Le Mans plein de soldats. Je suis vraiment où je dois être. ''

J'ai voulu citer cette lettre toute entière pour la juvénile ardeur et la joie naïve dont elle déborde ; Joseph Aubert est heureux de partir, bien armé, équipé de neuf, sur un cheval fringant qu'il qualifie lui-même de difficile (1), pour une aventure glorieuse. Un mois après, l'apprentissage terminé, il est au Mans au milieu de ses camarades désireux de se mettre en campagne et de taper sur les Prussiens : '' Je suis heureux de mon métier, soyez heureux pour moi. '' Le 7, les éclaireurs de Charette entrent en campagne et partent pour Châteaudun, au pas, sous la neige qui tombe, par un froid glacial. En entrant dans la ville saccagée et brûlée par l'ennemi, le jeune soldat découvre brusquement les horreurs de la guerre. '' Hélas! les journaux n'ont dit que trop vrai et sont plutôt resté au-dessous de la vérité. A part quelques rues basses, la ville n'est presque qu'un monceau de ruines. Il ne reste plus que des murs noircis par le feu et labourés par les boulets... Avant de recommencer la lutte, on devrait montrer à tous les soldats ces effroyables traces de la cruauté des ennemis qu'ils vont combattre ; tous sentiraient des larmes de rage à leurs yeux. Oh! que la guerre est un grand fléau ! Mon Dieu, donnez-nous d'y mettre un terme le plus tôt possible en relevant l'honneur de la France. ''

______


(1) Sur un reçu de 400 fr., Joseph Aubert a noté par scrupule d'honnête acheteur, je crois : '' achat d'une jument remarquable vendue à vil prix, parce qu'elle était trop difficile, avec laquelle j'ai fait la campagne 1870-1871. ''

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Message  Roger Boivin Ven 03 Fév 2023, 9:59 am


Les engagements commencent autour de Châteaudun et les éclaireurs sont obligés à des marches et contremarches de jour et de nuit qui demandent de la décision et de l'endurance. Aubert entend le canon, voit l'ennemi de près, court des risques sérieux ; mais, dans les lettres qu'il écrit à peu près tous les jours à sa famille, il ne se fait pas valoir ; il semble à l'en croire qu'il fait la guerre en amateur et en artiste et c'est avec une sorte de gaîté narquoise qu'il raconte un semblant de bataille, où il a été engagé :

'' Camps de St-Laurent-des-Bois, 28 novembre 1870.
'' Bien chers parents,

'' Aujourd'hui j'ai eu peu de temps pour vous écrire, mais la position dans laquelle je suis est fort gênante. Je suis à plat ventre, ma table est mon portefeuille, mon porte-plume un morceau de bois fendu, et fort heureusement j'ai des plumes et de l'encre emportées de Beauregard.

'' Vendredi dernier, de grand matin, vers quatre ou cinq heures, nous avons quitté Marboué avec toutes les troupes campées à ses environs. Nous nous sommes dirigés dans une grande plaine où nous avons vu arriver de toutes parts de la cavalerie grosse et légère, de l'infanterie de toute sorte et une vingtaine de pièces d'artillerie. Nous étions de trente à quarante mille hommes sous les ordres du général de Sonis ; le colonel Sautereau commandait en second. Nous nous sommes avancés en bataille du côté de Brou, où les Prussiens étaient signalés. Le général réclama les éclaireurs qu'il envoya, en avant et de chaque côté de l'armée, explorer les bois. Nous allions isolés, quand un homme accourut à moi me disant qu'il venait du camp des  Prussiens, lesquels se trouvaient au nombre de quelque mille hommes avec six pièces d'artillerie en avant de Brou, près d'un bourg nommé Yèvres. J'ai fait mon rapport au capitaine qui le dit au général.

'' On fit une halte pour laisser manger ceux qui avaient du pain. heureusement je pus m'en procurer. On continua de marcher, vers midi, les marins et les zouaves en tête comme c'est d'habitude. Les autres corps nous suivaient à d'assez grandes distances. A deux heures un coup de feu, puis deux, cinq, dix, vingt, etc., se firent entendre à notre gauche où étaient les marins placés en tirailleurs. Nous avancions toujours sur une hauteur qui dominait Yèvres, situé dans un vallon, le canon commençait à gronder sur les marins toujours. Dès qu'on nous aperçut au sommet de la colline, une décharge continuelle de boulets creux vint sur nous, plusieurs zouaves furent atteints. La Sainte Vierge me protégea ainsi que mes camarades, les boulets éclataient au milieu de nous et ne nous frappaient pas. L'un d'eux éclata devant moi, je baissai la tête le plus bas possible, je ne le cache pas, et je fis bien, un éclat me l'érafla. Les zouaves se mirent aussitôt à plat ventre ; notre capitaine nous fit disperser et descendre un peu en arrière de la colline. Je fus alors envoyé avec deux autres éclaireurs, dont un ancien Trappiste, plus brave que son sabre, pour voir si les Prussiens ne nous tournaient pas. Pendant toute la lutte, ma seule arme fut ma lorgnette. Je fis descendre ma jument dans un fossé, comme mes deux compagnons. Nous étions à cent mètres environ des canons prussiens, mais abrités derrière une petite élévation de terre, qui nous cachait presque. Tous les boulets passaient au-dessus de nos têtes en sifflant effrayamment. Les marins avançaient toujours, les zouaves conservaient leurs positions. J'attendais avec anxiété notre artillerie qui arrivait avec peine dans les terres labourées.

'' Enfin nos canons tonnèrent, ils occupaient la position des zouaves qui n'eurent plus qu'à s'abriter. Ce fut alors presque uniquement une lutte d'artillerie qui dura fort peu de temps. Les Prussiens s'empressèrent de déguerpir en bon ordre emmenant un grand convoi de vivres protégé par leur artillerie qui au bout d'une heure et demie battit retraite...''

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Message  Roger Boivin Sam 04 Fév 2023, 10:04 am


La narration est alerte ; le jeune soldat est très fier, on le sent, d'avoir reçu le baptême du feu ; il n'a pas tremblé dans son cœur, il s'est contenté de baisser la tête sous les boulets creux. Le voici maintenant qui raconte avec beaucoup de verve une reconnaissance dangereuse dont il a été le héros, lui tout seul, non loin du château du marquis de Prunelet. Il décrit d'abord le château en observateur, que les choses d'art arrêtent toujours et aussi en homme qui n'est pas pressé et qui veut faire durer le plaisir qu'il cause à ses parents ; puis il ajoute :

'' A la nuit tombante, au moment où je croyais retourner à Marboué, le commandant d'infanterie de Marine vient nous charger d'aller demander si des compagnies de mobiles, francs-tireurs et soldats de la marine, étaient revenus d'une expédition d'éclaireurs qu'ils avaient commencée le matin. Près du village de Coni, nous devions trouver des mobiles qui peut-être nous donneraient des renseignements, sinon nous devions aller dans les bois de Nottonville, à cinq ou six kilomètres de là, pour prendre les informations ; enfin, si on ne savait rien à cet endroit, il fallait aller à six kilomètres plus loin, à une ancienne abbaye où logeaient des francs-tireurs qui pourraient certainement répondre à nos questions. Les chevaux de mes compagnons étant déjà fatigués, je dus partir seul, pendant la nuit, au milieu des bois, dans un pays que que je ne connaissais pas, couvert de sentinelles, en garde contre les espions qui passent fréquemment. Je n'étais cependant pas mécontent de ma mission ; je craignais seulement de m'égarer et de ne pouvoir en rendre compte. Je fus arrêté au moins vingt fois par des ''Qui-vive'' et des baïonnettes croisées devant moi. On ne se contenta pas toujours du mot de ralliement pour me laisser passer. Il y avait à craindre que le trot de mon cheval ne m'empêchât d'entendre le qui-vive ; si j'étais passé outre, une balle aussitôt m'eût attrapé. Mais, comme vous le voyez, la chose n'est pas arrivée. A Coni, pas plus qu'à Nottonville, je n'obtins de renseignements. Je me fis conduire sur le chemin de l'abbaye par un paysan qui me quitta bientôt. Comme cela devait arriver, je me perdis. J'allai à une ferme et me fis remettre dans mon chemin. Plus loin, ne reconnaissant plus ma route, je m'approchai d'une maison et je me mis à appeler ; des femmes me répondirent en tremblant, me demandant si j'étais Français. Médiocrement rassurée, l'une d'elles me conduisit quelques pas plus loin et s'en alla bien vite.

'' Enfin j'arrivai à une sorte de caserne délabrée, devant laquelle était un grand portail brisé qui avait été autrefois un pont-levis. Je reconnu l'abbaye. Deux francs-tireurs, qui ressemblaient à des brigands, m'introduisirent dans une chambre basse, sale et éclairée seulement par un grand feu où se chauffaient quatre ou cinq hommes. Je leur fis part de mon message, ils me donnèrent les renseignements désirés et revins en toute hâte à Moléans, après m'être perdu une fois et avoir été arrêté cinq ou six fois. Le commandant m'attendait avec une impatience fiévreuse, il me congédia vers minuit. Pour moi, qui aime les aventures, rien n'est intéressant comme ce métier-là ; je vis dans les contrastes. ''

Aux reconnaissances dangereuses, devaient succéder les batailles sanglantes. Après avoir essuyé le feu de l'ennemi à St-Laurent-des-Bois, Aubert est à Patay le 2 décembre. '' On se bat tout autour de moi, écrit-il ; mais n'ayez pas d'inquiétudes, elles ne peuvent faire que du mal ; le Bon Dieu est bon. '' Le 6, il raconte la désastreuse bataille qui lui a révélé la désorganisation de notre armée et lui a ouvert les yeux sur une réalité qu'il ignorait.

'' De mardi à dimanche, c'est à peine si la nuit a fait taire le canon pour quelques heures. Les trois premiers jours de la semaine, où quelques divisions seulement avaient été engagées, nous ont été assez favorables et nous avons fait reculer les Prussiens. Vendredi matin. deux corps d'armée de la Loire reprirent la lutte ; vers onze heure, nos soldats pliaient, à midi la déroute commençait. Le 17e corps, dont les zouaves font partie, accourut rétablir le combat. Dans la soirée, pour déterminer la victoire de notre côté, il fallait s'emparer d'une position importante, occupée par l'ennemi. Le général de Sonis envoie plusieurs régiments d'infanterie qui sont mis en déroute. Les zouaves n'avaient pas encore donné. Le général Sonis s'approche d'eux et leur crie : '' Je compte sur vous, mes amis, réparez la faute de ces (idiots).'' Vive Sonis! répondent les zouaves ; et Charette à la tête du premier bataillon s'avance jusqu'à un petit bois où étaient embusqués six cent Prussiens. Ceux-ci levaient la crosse et se couchaient à plat ventre ; les zouaves répondaient par des coups de fusils ; pas un prisonnier. Mais le bois traversé, le grand danger commence : il fallait, sous le feu de la mitraille et de la mousqueterie, dans une plaine découverte, aller déloger les Prussiens de leurs positions. Beaucoup tombèrent avant d'arriver ; cependant nos baïonnettes firent reculer l'ennemi qui abandonna une mitrailleuse. Mais les zouaves ne furent pas soutenus par l'infanterie qui se tenait à distance en arrière. Les Prussiens revinrent par milliers et firent un horrible carnage. Charette, blessé grièvement à la cuisse, criait aux zouaves qui voulaient l'emporter : '' Laissez-moi, mes enfants, sauvez la France ! '' Le lendemain matin je me rendis au camp des zouaves, la plupart des tentes étaient vides, les deux tiers du bataillon avaient succombé. ''

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Message  Roger Boivin Dim 05 Fév 2023, 7:39 am


A partir de ce moment, Joseph Aubert voit clair dans la guerre et il sent que la partie est définitivement perdue. Il s'irrite contre l'optimisme officiel qui suscite des espérances folles et provoquera ainsi de terribles désespoirs quand la vérité sera connue ; il tourne en ridicule les communiqués du gouvernement de Tours qui entretiennent dans le pays des illusions puériles. Et avec ce sens clair et droit qui le caractérise, il met le doigt sur la plaie véritable :

'' Cette levée en masse de Gambetta, si jeune que je sois, me fait hausser les épaules. Il y a deux fois plus d'hommes sous les armes qu'il en faut. L'armée de la Loire, comme nombre, est colossale ; elle composée de vingt corps d'armée et le 17e, à lui seul, comptait près de quarante mille hommes à Patay. Mais son organisation est pitoyable ; les hommes manquent de pain et les chevaux de fourrage, pendant que d'autres en regorgent ailleurs. Pourquoi M. Gambetta, qui fait et défait les généraux, s'il a besoin de tant d'hommes, ne se sert-il pas de tous ceux qu'il a ? Au lieu de nous faire écraser presque corps par corps toute la semaine dernière, n'aurait-on pas dû tenter une attaque d'ensemble ?... Pour moi, je ne communique pas ces pensées aux soldats, loin de là ; il ne faut pas augmenter la démoralisation. ''

Envoyé au repos à Poitiers, pour une quinzaine de jours, Joseph Aubert, brigadier fourrier, y reste ensuite bien malgré lui, comme chef de dépôt d'éclaireurs, '' position très piteuse pour un soldat en temps de guerre ''. Il en repartait après l'armistice, pour se rendre à Rennes, puis à Mayenne,  où les zouaves se réorganisaient en vue de la reprise des hostilités. '' Même si la paix doit se signer bientôt, il faut que ce qui reste encore de forces à la France puisse paraître capable de résistance. '' Enfin la paix est signée et le corps de Charette est conservé sous les armes pour opérer la démolition des mobiles. Joseph Aubert, si heureux de faire en campagne son métier d'éclaireur, se morfond à Fougère dans la vie de garnison et il se plaint de glisser dans l'oisiveté, lui qui trouvait partout occasion de travailler. Enfin, on lui rend la liberté et il rentre à Beauregard, la tête basse, comme s'il était honteux du désastre national dont il venait d'être le témoin.

La honte et la tristesse qu'il en éprouvait s'effacèrent peu à peu, et, dans son âme, il ne resta que le souvenir ému de la vaillance des éclaireurs et des zouaves de Charette. Il oublia les hontes d'une armée désorganisée, démoralisée et en débâcle ; l'armée c'était pour lui l'armée chevaleresque et fière dont il avait fait partie. C'est ainsi qu'il l'aima toute sa vie. Quelque chose de cette ferveur militaire et patriotique est passé dans les tableaux qu'une autre guerre plus sanglante et plus glorieuse lui a inspirés ; le Musée de l'Armée aux Invalides conserve ces toiles où on lui avait demandé de fixer les souvenirs attristés de 1870 et les exaltations d'une revanche qui venge les morts et répare les hontes. Ces pages ont de la grandeur ; mais combien est plus émouvante cette scène que la piété et le patriotisme pénètrent et soulèvent, les brancardiers qui ensevelissent à la nuit tombante le corps d'un camarade et l'aumônier grave et attendri qui bénit '' le martyr du droit et de la liberté '', digne frère de ceux que Joseph Aubert vit tomber si fièrement et si inutilement à Patay.

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Message  Roger Boivin Dim 05 Fév 2023, 12:43 pm

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Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. Aubert10
Les Saints Patrons de la France.

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Portrait de Mère Couderc, Fondatrice des Religieuses de N.-D. du Cénacle.
https://archive.org/details/lasocitdenot00long/page/n9/mode/2up?ref=ol&view=theater

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Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_65_10
Marie Saluée par l'Ange Gabriel.

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. Nozol-10
Les adieux de saint Claude aux Bisontins- 1889.
Spoiler:

_____


L'Église Notre-Dame des Champs :

p. 1 : https://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Paris/Paris-Notre-Dame-des-Champs.htm

p. 2 : https://www.patrimoine-histoire.fr/Patrimoine/Paris/Paris-Notre-Dame-des-Champs2.htm


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Message  Roger Boivin Lun 06 Fév 2023, 8:44 am



III

La Formation d'un Grand Peintre


Les choses coutent ce qu'elles valent et d'ordinaire plus qu'elles ne valent. On ne connaît pas de chef-d’œuvre qui ait été improvisé. Et l'inspiration n'atteint que les hommes qui se sont préparés à en recevoir le souffle et qui sont devenus capables par le travail d'en interpréter les suggestions. Joseph Aubert subit cette loi du talent, et, pendant vingt ans, avec sa ténacité de Breton, il dressa son œil et sa main à voir juste et à dessiner juste.

Son père était mort aussitôt après la guerre et, s'il avait vécu, il ne se serait plus opposé à la vocation artistique de son fils, qui n'était plus un enfant et qui avait mûri ses résolutions pendant la guerre. A la fin de l'année 1871, il partait pour Paris et il se heurtait pour ses débuts à des difficultés assez rudes. Son rêve longtemps caressé était d'entrer dans l'atelier de Gérôme ; mais les manières débraillées de ses élèves le rebutèrent et il comprit brusquement pourquoi son père s'était obstiné à lui épargner certains contacts. Un de ses camarades, Louis Guédy, le présenta à Yvon, le célèbre peintre militaire, l'auteur du Marechal Ney à la retraite de Russie, alors dans le plein éclat d'une gloire déjà ancienne, qui consentait à ouvrir un atelier pour un petit nombre de jeunes artistes désireux d'éviter des promiscuités bruyantes et de travailler dans le calme. Yvon accueillit Aubert avec bonté et promit de diriger son travail. Il fut comme tous les grands maîtres rude pour ses premiers essais et Aubert n'était qu'à moitié rassuré quand il se présenta chez le maître avec quelques études et un portrait. '' Yvon posa le tableau sur un chevalet, l'examina longuement, puis tournant légèrement la tête vers l'aspirant qui, derrière lui, attendait anxieux : Je pense, Monsieur, que vous vous doutez comme cela est mauvais. La figure, le nez, la bouche, les yeux, les mains, le vêtement, tout fut critiqué, et, pince-sans-rire, il termina : Le reste est bien... avec du travail vous arriverez (1). ''

La route allait être longue qui mènerait au succès, surtout pour Aubert qui travaillait lentement et qui était d'ailleurs bien décidé à réserver une bonne partie de son temps pour sa famille, pour ce cher Beauregard où il vivait constamment en pensée, pour le foyer qu'il songeait à fonder. Louis Guédy faillit le décourager pour toujours en lui déclarant que le véritable artiste ne se partage pas et qu'il doit tout sacrifier à son art.

'' Un jeune homme pâle, maigre, chétif et plein d'entrain entre dans sa chambre et s,assied près de mon lit : sur ma demande, il m'initie à la vie artistique. Pour devenir peintre, me dit-il, il faut abandonner tout ce qui peut vous distraire de votre art. Je ne connais que mon atelier, le Louvre et ma chambre. Après quatre ans de séjour ici, j'ignore tous les plaisirs de Paris. De cinq heures à huit heures du matin, je repasse mes études d'anatomie et de perspective ; de huit heures et demie à onze heures et demie, je copie la nature à l'atelier ; je déjeune, et me rends au Louvre où j'étudie mes tableaux de prédilection dans chaque école ; de quatre heures à six heures, je suis le cours général de dessin aux Beaux-Arts, ...Je lui répondis que je ne pouvais pas tout sacrifier à la peinture et que je voulais d'abord en quelques mois prendre une notion générale de la science du peintre... Cet exemple, loin de m'entraîner, je l'avoue à ma honte, m'a confondu et m'a montré trop de distance entre le but que je poursuis et le point où je me trouve. Je peindrai, mais je ne serai jamais un peintre. Il faudrait trop faire abnégation de tout ce qui m'est cher. ''

Aubert se met à l’œuvre pour atteindre le but limité qu'il se propose maintenant. Les difficultés qu'il doit vaincre, il les raconte doucement à sa mère, pour qu'elle s'y intéresse de loin et l'aide par sa tendresse à les vaincre. '' Je suis complètement en déroute ; je dois passer pour un croûton, je ne fais rien de bon, tant la nouvelle méthode de dessiner que l'on m'enseigne, m'était inconnue. Néanmoins, je la trouve bien meilleure. Elle consiste à dessiner de loin, sans chevalet, ni aucun appui, sur un carton que l'on tient debout entre les jambes avec la main gauche. Il faut tenir le fusain comme un bâton et non comme une plume. De cette façon on ne peut s'arrêter à faire de jolies lignes ondoyantes ; seul est en jeu le coup d’œil qui saisit les proportions que l'on indique par les lignes dures, droites et énergiques. Le modèle que je copie cette semaine est un homme nommé Gélon, une vraie statue antique. Je passe mes après-midi au Louvre à copier le Déluge de Nicolas Poussin. Le soir, je suis les cours d'archéologie de l'école des Beaux-Arts. ''

Comme il l'avait dit à Guédy, Joseph Aubert ne consentait pas à sacrifier à l'art la vie de famille, et, à vingt-deux ans, il songeait à fonder un foyer. Au mois d'avril 1872, il épousa la fille du mathématicien Bouquet, le futur membre de l'Académie des Sciences. Ils se rencontraient sur les hauteurs où ils  avaient pris de bonne heure l'habitude de fréquenter et ils se comprirent pleinement. L'artiste se sentit toujours soutenu par une pensée claire et ferme, digne de ses aspirations et qui les complétait. Ils alimentaient leur vie spirituelle à la même source chrétienne et les sentiments qu'ils apportaient dans le mariage, ces mots d'une lettre que Joseph Aubert écrivait à sa mère le 20 juillet 1872 l'indiquent assez : '' Ce soir, Mlle Pauline et moi entrons en retraite sous la direction du Père Du Lac. Cette retraite durera trois jours. ''

______

(1) F. Guyot. '' Notice sur Joseph Aubert .., dans le Bulletin de N. D. de Consolation. Besançon 1925.


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Message  Roger Boivin Mar 07 Fév 2023, 9:27 am


Au mois de janvier 1873, Joseph Aubert reprenait ses travaux un moment interrompus, soutenu maintenant par une affection présente et active. Yvon qui avait confiance dans son avenir l'envoya à Cabanel.

Aubert répétait volontiers : '' Il ne faut pas avoir peur de ses peines '' ; il travailla avec acharnement sous la direction de Cabanel qui le prit en affection, et s,attacha à lui comme à un élève de choix. Cabanel, âgé alors de cinquante ans, était dans la pleine force d'un talent qui s'était imposé à l'admiration de ses ennemis eux-mêmes. Au moment où le réalisme et l'impressionnisme renouvelaient la peinture en la bouleversant, Cabanel, avec Bouguereau, Baudry, Lenepveu, Delaunay, défendait les traditions de cette école classique française, qu'il sera toujours facile de railler que d'imiter et d'égaler. Les fantaisies modernes ont habitué notre œil aux indécisions de l'ébauche et aux folies de l'outrance, si bien que la sagesse de Cabanel nous étonne ; et il est possible qu'il efface la réalité de la vie à force de lécher et de polir son œuvre. mais sa peinture est soutenue par l'armature d'un dessin impeccable. Par là, il se rattache à la grande tradition d'Ingres et de tous les peintres consciencieux qui ont vu dans la perfection du dessin la marque de la probité de l'artiste.

Cette conception de l'art répondait trop aux intimes aspirations d'Aubert pour qu'il ne s'y attachât pas avec passion. A l'école de Cabanel, il apprit à dessiner et plus il avançait dans la science du dessin, plus il devenait scrupuleux sur l'exactitude des mouvements et des lignes ; la correction du dessin était une forme de son honnêteté morale. Les dessins d'Aubert, dispersés de tous côtés, sont trop ignorés ; ils méritent d'être étudiés et de rester comme les témoins de son labeur, et surtout pour cette perfection technique qui enchante les connaisseurs.

L'école des Beaux-Arts lui fit d'abord une impression assez fâcheuse et il en garda des souvenirs mêlés. L'atmosphère lui déplaisait et choquait sa délicatesse ; la grossièreté des brimades qu'il fallait subir révoltait ses instincts d'élégance aristocratique. Je donnerai d'humbles détails, ils précisent une physionomie morale. Il écrit à mère : '' Tu sais que je suis aux Beaux-Arts ; il m'a fallu endurer bien des misères pour y rester. L'autre jour cependant je n,ai pu tout supporter et j'ai prié le plus méchant de la bande de venir se frotter à moi hors de l'atelier. L'affaire allait mal tourner quand on fit généralement observer à mon individu qu'il aurait peut-être tort pour ses côtes de sortir. On me pria alors de prendre avec deux doigts, en le pinçant simplement, un poids de quarante livres qui se trouvait là par terre et de le porter sur une table. Je le fis et, depuis, on me laisse parfaitement tranquille. '' L'éclaireur de Charette était un doux ; mais c'était aussi un fort qui aurait été capable d'opposer à la méchanceté stupide la violence nécessaire et de la plier sous son genou. De pareils éclairs sont rares dans sa vie, mais on ignorerait son caractère si on négligeait de les voir.

Les difficultés du métier étaient plus malaisées à vaincre que les brimades de l'atelier. Aubert travaille, et sa première œuvre est le portrait de sa femme ; mais il se dépite, parce que tout le monde lui dit qu'il l'a enlaidie. Le lendemain il reprend courage : '' Cabanel me transporte de joie, il me dit que je fais quelques progrès. '' Quel est l'artiste qui n'a pas connu de ces abattements et ces exaltations ? Il s'attache à Delacroix qu'il étudie à la loupe ; il copie sa Descente aux Enfers ; il prépare les concours de l'Ecole et obtient une médaille en 1874. Il songe au prix de Rome et il entre en loge pour concourir ; cette fois il se heurte non plus aux difficultés du métier mais à la sottise des règlements : il se fait expulser parce qu'il est marié et que le concours n'est ouvert qu'aux célibataires. Il sent peu à peu sa personnalité s'affermir et les instincts artistiques de son enfance qu'une formation maladroite avait endormis se réveillent. Il regarde les manifestations de l'art contemporain et il les juge. '' L'exposition annuelle de peinture est ouverte (3 mai 1875). J'y ai déjà passé ma journée de dimanche à peu près complète. Plusieurs œuvres de valeur, parmi lesquelles passe en première ligne, à mon avis, un tableau de Cabanel, qui n'aura pas le succès qu'il mérite. Le goût prend une direction toute opposée à la peinture idéaliste, c'est-à-dire élevée ; on devient hélas! en cela comme en bien d'autres choses fort matérialiste. La postérité jugera les injustes préférences. ''

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Message  Roger Boivin Mer 08 Fév 2023, 7:51 am


Aubert, on le voit, a pris position ; il sera un peintre ''idéaliste'' et ''élevé''. A cet art, il se donne maintenant tout entier. Il écrit à sa mère le 22 juin 1877 : '' Ma peinture qui par le fait des circonstances s'est changée  d'occupation d'amateur en étude sérieuse, puis enfin en carrière nécessaire, veut tout de moi en échange de promesses bien aléatoires... Après avoir essayé bien des sujets de tableaux, je me suis définitivement arrêté à celui-ci : Tobie craignant Dieu plus que le roi enlevait les corps de ceux qui avaient été tués... et les ensevelissait au milieu des nuits. L'esquisse est terminées et a été trouvé bien par Yvon et Cabanel. Je vais prendre des modèles pour faire des études serrées de dessin et dans trois semaines je te demanderai l'hospitalité pour Pauline, moi.. et mon tableau auquel je pourrai continuer à travailler à l'aide des éléments que je vais réunir d'ici là. ''

L'hospitalité de Beauregard ! c'est là, dans la terre maternelle, au bord de la lande bretonne, qu'il se sentait vraiment dans la patrie de son âme. Sa correspondance de cette époque montre avec quelle prédilection, à Paris, au milieu des soucis de sa formation, il s'occupe de Beauregard ; ses lettres ressemblent tantôt à celles d'un architecte, tantôt à celle d'un chef de culture. Il donne des conseils précis, des ordres brefs ; il dessine le travail qu'il commande, avec la double préoccupation de l'artiste et de l'homme pratique. Il n'y a pas lutte chez lui entre l'artiste et l'homme d'affaire ; il s'entendent parfaitement et quand il leur arrive de se trouver en conflit, ils se font assez de concessions mutuelles pour ne pas rompre l'accord. L'artiste avait choisi de beaux sapins et il avait tracé la ligne courbe suivant laquelle on devait les planter par groupes de trois, de manière à former un ensemble décoratif agréable à l’œil. Mais les vaches du fermier qui paissent la lande dévorent les jeunes pousses ; il faut proposer au fermier de créer une zone neutre entre la lande et les plantations, et comme le fermier refuse ou réclame une indemnité qui mettait à trop haut prix le plaisir des yeux, l'homme d'affaire recule ; mais l'artiste ne se tient pas pour battu : plutôt que de renoncer à son ensemble décoratif, il renonce à sa plantation de sapin pour le moment, et il attend pour la réaliser un fermier qui soit plus sensible aux considérations d'art pur.

Les premiers envois de Joseph Aubert aux salons de 1878 et de 1879 furent remarqués pour la science de la composition et la solidité de la facture ; mais la mode ne l'adopta point parce qu'au lieu de courir à l'avant-garde et en marge, il restait dans la ligne de la tradition. Et il fallait maintenant se faire une place dans cette foire à l'art où chacun s'efforçait de crier plus haut que les autres pour attirer l'attention. Joseph Aubert avait de l'honneur professionnel, qu'il confondait avec l'honneur tout court, une conception fière et rigide ; les démarches rampantes, les concessions opportunes, le coup de pouce hypocrite, la publicité tapageuse, étaient loin de sa manière et de sa pensée. Il avait cette idée presque paradoxale dans le monde moderne que l'artiste devra tout à son talent et à son travail ; on s'expliquera sans que j'y insiste que l'ascension de ce solitaire qui allait à l'encontre des goûts et de la mode, ait été lente.

D'ailleurs il jouait la difficulté. Né apôtre, il n'aurait pas compris une conviction qu'on garderait pour soi et  qu'on ne chercherait pas à répandre, la croyant bienfaisante. Il croyait que l'impressionnisme, le tachisme et les fantaisies de cette nature faisaient courir à l'art et en particulier à l'art religieux, qui a besoin encore plus que l'autre de probité, un très grave danger. Et il partit en guerre contre l'art nouveau ; incapable de faire pour lui-même des démarches intéressées, il se multiplia pour cette cause sacrée. Ce fut la source de ses grands déboires. Les partisans de la tradition eux-mêmes, découragés ou indifférents, ne se trouvaient plus à son diapason et ne le comprenaient pas ; ses amis se gardaient bien de le suivre, sentant son action vouée à l'échec ; ses ennemis feignaient de croire qu'il voulait défendre son art en défendant l'Art ; sans compter que les classiques le combattaient pour son réalisme, tandis que les impressionnistes le traitaient de retardataire. Il restait isolé. Il accepta l'isolement. Et il entra dans ce rythme du travail régulier, obstiné, soutenu et soulevé par une grande foi, qui a été le rythme même de sa vie. Professeur de dessin au collège Rollin, aux cours du soir à la Villette, obligé de s'occuper des affaires d'une nombreuse famille dont il était en fait devenu chef, il avait le secret de réserver de longues heures pour sa peinture.

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Message  Roger Boivin Jeu 09 Fév 2023, 8:44 am


Ses tableaux de cette époque, les tableaux de la première manière, avant le voyage de Terre Sainte, sont très variés de sujet et de couleur. Ils reproduisent les formes multiples de la vie, saisies  au hasard de l'observation, paysages, portraits, scènes historiques, scènes religieuses. L’œil qui a regardé la réalité représentée sur la toile est naïf et frais ; le métier est sûr mais la facture est moins étudiée qu'elle ne le sera plus tard ; la couleur est uniquement française et n'a pas encore de ces ors que la peinture décorative l'amènera plus tard à prodiguer, ni de ces fulgurances rousses qu'il rapportera d'Orient. Ce sont des œuvres jeunes, fraîches et franches dans la tonalité générale de la tradition classique.

Comment fut-il amené à la peinture religieuse décorative qui a fait sa gloire ? M. l'abbé Saunier, curé de Vesoul, son grand ami, veut bien m'écrire à ce sujet : '' En 1887, lorsqu'il était installé pour ses vacances au Pré-Cassard près du Bélieu (Département du Doubs), je lui fus présenté par le curé de la paroisse M. l'abbé Rougeot. Dès la première entrevue, conquis par sa franchise et sas riche nature, je l'invitai à venir, un des dimanches suivants, me voir dans le village voisin de Noël-Cerneux où je passais mes vacances. Il y vint, et au sortir de la messe, après m,avoir félicité des peintures que des prêtres, mes amis, étaient venus récemment faire en notre modeste église de village, il m'avoua avoir longuement regardé le fond du chœur qui restait garni d'un misérable tableau. Oserais-je dire que je n'avais pas quelque peu espéré qu'il me ferait cette remarque ? Toujours est-il que je me hasardai à lui dire quelle serait ma joie s'il consentait à doter la paroisse d'une de ses compositions. Quelques jours après, il me faisait savoir que St-Claude allait être l'objet de ses études. Et de fait, à l'exposition de 1889, il exposait son grand tableau des Adieux de St-Claude. Le sujet avait heureusement inspiré son beau talent et son grand cœur. ''

Voilà comment Joseph Aubert devint décorateur d'église, ce qui est bien la fonction la plus haute que puisse souhaiter un artiste chrétien, puisqu'elle consiste à embellir le temple du Dieu vivant et à faire naître la prière dans l'âme du peuple fidèle. L'année d'après, il était charger de raconter la vie de la Sainte-Vierge sur les murs de l'église Notre-Dame des Champs, à Paris. Mais, pour une pareille œuvre, Aubert sentait qu'il lui manquait la vision directe de la terre que Jésus et  marie ont touchée de leurs pieds et qui garde encore dans la couleur de son ciel et dans ses paysages le prestige de leur passage. Et pour achever son apprentissage de peintre chrétien, il descendit de ses échafaudages déjà dressés, il laissa là ses tableaux commencés et il partit en pèlerin pour la terre du Christ.

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Message  Roger Boivin Jeu 09 Fév 2023, 3:04 pm


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Le Cortège de la Vierge - Les Vierges.

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Scène de la vie de saint François Régis.
Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. Annona10


Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_7910
Notre-Dame des Champs.
Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. Aubert11

Un Artiste Chrétien, Joseph AUBERT (1849-1924) -  Par J. CALVET, Abbé. - 1926. _p_87_10
La Visitation.


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Message  Roger Boivin Ven 10 Fév 2023, 8:04 am



IV

Le Pèlerin de Terre Sainte



Joseph Aubert est allé trois fois en Terre Sainte ; et s'il préparait méticuleusement ses voyages, comme il faisait toute chose, il ne s'excitait pas d'avance à être ému par des souvenirs touchants et il ne prévoyait pas la pose qu'il prendrait devant les spectacles célèbres. Il allait naïvement vers l'Orient, en chrétien dévot qui fait un pèlerinage et en peintre curieux qui cherche pour ses tableaux des lignes, des couleurs, des détails pittoresques, des lointains vrais. D'autres l'avaient précédé sur ces routes millénaires ; il le savait, mais il y allait pour son compte, non pour répéter un geste rituel.

Au moins une fois il a écrit son carnet de route. Il l'écrivait pour lui, pour fixer ses souvenirs, et pour les siens à qui il se promettait de dire un jour ses impressions. Aussi, il serait vain d'y chercher des morceaux brillants, des descriptions poussées qui ajoutent au paysage le trait littéraire destiné à faire sensation dans un livre ; les choses sont notées, à mesure qu'elles se présentent, par un homme qui est de sang-froid et qui a l'habitude de ne pas se monter la tête. Il ne pose pas devant la nature orientale ; il cherche à la voir telle qu'elle est et en dessine nettement en lui les contours pour en garder le visage exact.

Les émotions religieuses qu'il éprouve, il les garde pour lui avec une sorte de pudeur ; mais à un mot jeté ça et là, à un frémissement de l'écriture d'ordinaire si placide, on sent combien elles furent vives, à Bethléem, au Chemin de la Croix, à Nazareth, aux bords du lac de Tibériade. Elles firent jaillir dans son cœur une source nouvelle, qui attendait le coup de baguette de Moïse. Le fils de la Bretagne croyait avec une simplicité d'enfant ; l'élève de St-François-Xavier avait pris pour toute sa vie les habitudes régulières d'une piété solide et de bon aloi. La Terre Sainte lui révéla autre chose, qu'il savait bien certes, mais qu'il ne sentait pas avec l'intensité qui maintenant gonflait son cœur. Il voyait Dieu au milieu des hommes, marchant dans nos chemins, et attachant pour toujours son souvenir matériel au figuier de la route, à l'épi de blé que le passant peut encore fouler dans sa main, aux eaux du lac, aux oliviers qui ont peut-être été témoins de son agonie, à la colline qui a bu son sang. Il voyait marie dans ces femmes de Bethléem et de Nazareth, qui lui ressemblent peut-être, et dans ces femmes de Ramalla qui portent encore après des siècles le costume qu'elle portait. Dans ces spectacles et dans les réflexions qu'ils provoquèrent, Joseph Aubert trouva un sentiment vif et personnel de la présence de Dieu sur la terre, au milieu de nous, qui conserva la fraîche jeunesse de son cœur de chrétien et de sa piété. Ce renouvellement se fit lentement, simplement, sans drame, pour ainsi dire à son insu. Il en fut de même d'ailleurs du renouvellement de sa vision artistique des choses et de son talent pictural. Au retour de Jérusalem, il était le même et pourtant il était autre ; il avait eu besoin de cette excitation pour faire éveiller à la vie des puissances cachées qui dormaient en lui.

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Message  Roger Boivin Sam 11 Fév 2023, 7:58 am


Parcourons un moment son carnet de route. Le 17 mars 1892 il quitte Marseille et tant qu'il fait clair jour,  le voilà installé sur le pont pour regarder non pas tant la mer qu'il connait familièrement depuis longtemps, que l'aspect mouvant des terres qu'il voit pour la première fois, la Corse, la Sardaigne, l'Italie, la Sicile. Il arrive à Alexandrie et note que '' Le Nil roule des eaux boueuses entre des rives de limon noir ''. Il court aux pyramides et s'arrête longuement devant le sphinx que le temps a défiguré. '' Ce monstre impassible à l'entrée du désert paraît en être le gardien effrayant. '' Obligé de passer vite à côté de merveilles qui ne livrent leur  secret qu'à la longue, le voyageur se lamente : '' Il faudrait passer ici de longs mois '' ; Aubert a besoin d'être acclimaté pour sentir la beauté des choses ; le regard de l'artiste est une question ; à quoi bon questionner si on n'attend pas la réponse de la nature ? Au musée d'art égyptien, devant ses statues immobiles, il est plus à son aise ; il reste frappé d'une admiration étonnée pour cet art si ancien où s'affirme déjà une grande sûreté d'exécution. Il visite Héliopolis où la tradition veut que la Vierge se soit arrêtée dans la fuite en Egypte ; après avoir longuement regardé ce cadre où il placera plus tard son Repos au Désert, le pèlerin ferme les yeux pour une méditation pieuse et il sent monter vers lui '' cette poésie que l'homme efface chaque fois qu'il veut toucher à la nature. ''

Le 2 avril, Aubert est à Jérusalem. Il s'accuse de ne pas éprouver les grandes émotions qui devraient ici assaillir tout chrétien ; c'est qu'il a été choqué au saint-Sépulcre par l'entassement et par le mauvais goût des ornements et des ex-voto, en même temps qu'il était scandalisé par les luttes mesquines des sectes rivales, qui ne sauraient vivre en paix dans ce lieu, si la police turque n'intervenait pas pour maintenir l'ordre.

A Bethléem, au contraire, il retrouve les joies d'enfant qu'il ressentait tout petit devant la crèche... Il veut croire que Bethléem a gardé son aspect des temps messianiques. '' Nulle part en Palestine les traditions et les costumes ne se sont mieux conservés qu'à Bethléem. Cette petite ville semble avoir échappé à la malédiction divine à cause des bergers qui accoururent si promptement à la crèche. Les Bethlémitaines ne  dissimulent pas leur figure, souvent d'aspect virginal, avec leur grand voile blanc, leur robe bleu foncé à larges manches, brodée sur la poitrine, et leur ceinture aux riches couleurs plusieurs fois enroulée autour de la taille. '' Ceci est déjà une esquisse de peintre et nous en retrouverons maintes fois les détails dans le costume de la Vierge et des femmes palestiniennes sur les murs de Notre-Dame des Champs. C'est encore l'artiste qui a guidé le pèlerin par un escalier branlant vers la chapelle basse aux murailles délabrées, nous les retrouverons à Notre-dame des Champs éclairées de la lumière blanche du Dieu nouveau-né.

La vallée de Josaphat, le mont des Oliviers qu'il trouve trop ratissé et trop soigné, la Voie Douloureuse qu'il suit pieusement le Vendredi Saint, retiennent Joseph Aubert ; mais il semble s'être arrêté avec une particulière curiosité au mur des lamentations ; il observe longuement ce type juif qui paraît s'être conservé intact à travers les âges et, ces hommes qui passent l'émeuvent comme s'ils avaient été des contemporains et des témoins du Christ ; en même temps, il est frappé de la sincérité de leurs attitudes, de leurs prières et de leurs larmes et il découvre cette grandeur de la piété juive qu'il saura retrouver désormais à travers les pages de l'Ancien Testament.

Après un séjour de quelques semaines dans la ville sainte, Joseph Aubert partait pour une excursion aux rives du Jourdain et aux confins du désert avec une caravane organisée par les Dominicains de l'Ecole Biblique.  Ici son carnet de route est bref : il voit ce qu'il voit avec précision ; il note l'aspect des choses d'un mot pour en garder la ligne essentielle, mais il n'a pas le temps de s'arrêter aux détails. On dirait un photographe qui prend des clichés, se réservant de les développer plus tard. Ils se développèrent en lui-même avec une étonnante richesse. En réalité ce voyage aux confins du désert, dans les régions désolées que traversent les bédouins nomades, lui avait fait une forte impression. Il en parlait volontiers comme du plus grand enchantement de sa vie ; sa parole, bien plus nuancée que sa plume, s'attachait aux détails pittoresques, mettait en valeur les circonstances curieuses ou amusantes, ressuscitant les scènes avec leurs décors comme l'aurait fait le pinceau ; Aubert était peintre aussi dans sa conversation.

Pour cette excursion dans la vallée du Jourdain, il eut la bonne fortune de compter parmi ses compagnons de voyage des hommes de haute culture qui interprétaient pour lui les leçons du paysage biblique, et parmi eux, des amis, le Père Séjourné et le Père Sertillanges. On a lu en tête de ce livre la lettre-préface de l'éminent écrivain qui fait revivre avec une si saisissante vérité la physionomie de son compagnon de route.

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Message  Roger Boivin Dim 12 Fév 2023, 7:38 am


Le Père Sertillanges affirme, pour l'avoir vu, que Joseph Aubert rapportait de Terre Sainte une foule de documents précieux ; il suffit d'avoir visité les galeries du château de l'Ermitage pour savoir la richesse des esquisses qui sont sorties de ce voyage ; et il n'est que de regarder l’œuvre décorative qui suivit pour comprendre que le peintre puisait à tout instant et à pleines mains dans ses souvenirs. Eut-il à subir la tentation du réalisme, si naturelle chez un artiste habitué à peindre d'après nature et qui est porté à voir le Christ dans ce beau juif qui s,appuie au mur des lamentations, et la Vierge dans cette jeune Nazaréenne qui vient de chercher de l'eau à la fontaine voisine ? Contre cette tentation, s'il l'éprouva, Aubert fut défendu par ses tendances, par son bon sens et par sa culture religieuse : le sauveur fut un homme comme les Juifs que l'on coudoie à Jérusalem, mais il était aussi un Dieu, et le peintre qui ne sait pas mettre sur son front le rayon de la divinité, tombe dans la caricature ; Marie et les saints personnages qui l'entourent évoluent dans le plan surnaturel, et les peindre sous les traits des Galiléens d'aujourd'hui, c'est ravaler et fausser leur image. D'ailleurs, le Christ, sa mère, ses apôtres, ont vécu d'une vie mystérieuse dans l'âme et dans l'imagination des hommes qui les ont aimés ; leur physionomie s'y est fixée sous des traits qui ont duré, qui ont ainsi en quelque sorte le caractère sacré de la tradition et qu'il serait de mauvais goût de heurter directement.  Le réalisme servira à donner aux scènes évangéliques un cadre vrai et une couleur exacte, aux personnages des allures et des costume vraisemblables ; mais l'esquisse faite sur place à Jérusalem, à Nazareth ou à Bethléem devra être transformée par l'idéalisation chrétienne ; si elle passait sans modification dans le tableau, nous aurions un spectacle d'aujourd'hui en Palestine, ce qui est en somme assez banal ; nous n'aurions pas la représentation de la vie terrestre d'un Dieu, nous n'aurions pas un motif de la décoration du temple, destiné à faire partie de l'édifice du culte et à entrer dans la liturgie. Il y a là un équilibre difficile à trouver, un dosage délicat de réalisme et d'idéalisation ; il y faut un goût sûr et une foi exigeante. J'estime que Joseph Aubert est arrivé à une formule qui satisfait la piété de la foule croyante et ses besoins artistiques. D'autres avec plus d'audace, avec plus de puissance créatrice, frappant davantage l'imagination, étonnent et arrêtent le regard, obligent à penser et à discuter ; il fait prier.

De Jérusalem, il rentra en France par Constantinople et par Athènes. Le regard encore plein des spectacles sacrés de la Terre du Christ, il semble avoir donné peu d'attention à la richesse de l'art byzantin et à l'élégante justesse de l'art grec : son carnet de route est bref et note seulement les étapes du voyage, les noms évocateurs se pressent sous sa plume, mais ils ne paraissent pas avoir pour lui d'autre importance que celle d'un gîte d'étape ; on dirait qu'il ne veut pas mêler d'autres visions aux visions évangéliques. Il avait dû cependant s'attarder en curieux à Athènes, bien que son œuvre ne semble pas avoir utiliser ce contact avec la ville de Périclès. Mais quand il parlait du Parthénon et des statuettes du Musée hellénique, on sentait qu'il ne les avait pas regardés en passant distrait et pressé ; ici, comme au Caire, il avait admiré la perfection de la facture ; de Jérusalem il apportait des documents bibliques, des couleurs et des émotions ; à Athènes il prenait des leçons de métier. Car c'est bien sa manière d'avoir mis au service de son idéal chrétien et de sa piété une science technique très informée et très sûre.

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Message  Roger Boivin Dim 12 Fév 2023, 1:00 pm

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Le Cortège de la Vierge - Les Patriarches.

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Le retour de l'enfant prodigue.

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Marie Cherche un Gîte à Bethléem.

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La Circoncision

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La Purification.


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Message  Roger Boivin Lun 13 Fév 2023, 8:01 am


V

Notre-Dame des Champs


C'est en 1889 que la fabrique de Notre-Dame des Champs décida de compléter par une décoration monumentale l'église construite par Léon Ginain sous le second empire. L'art du peintre n'était pas inutile pour la faire vivre et vibrer ; d'un style correct et froid, elle avait de l'ampleur et une certaine majesté nue qui attendaient et réclamaient la fresque éclatante. La poésie qui n'était pas dans ses pierres résidait dans ses souvenirs ; sur l'emplacement qu'elle occupe, était bâti à l'époque gallo-romaine un temple dédié à Mercure ; '' au temps de Denys, le temple transformé des Parisii se serait appelé Notre-Dame des Vignes. On y voyait un portrait de la Mère de Dieu émaillé d'azur et d'or, où Marie était représentée tenant son fils sur ses genoux, et qui portait cette inscription : Arrête, voyageur, et salue avec révérence Marie ; car l'image que tu vois est ici la première d'elle et d'elle aussi cette basilique tient son nom ! (1) '' Mercure, qui cède la place à Marie, Notre-Dame des Vignes, Notre-Dame des Champs, voilà qui établit sur cette colline appelée d,ailleurs Mont-Parnasse, une tradition de piété et de poésie rustique et fraîche ; Joseph Aubert, par la grâce de son dessin et de son coloris, est bien entré dans l'esprit de ce lieu.

La fabrique arrêta avec lui le programme général de la décoration : pour la voûte de l'abside une grande scène représentant le triomphe de Notre-Dame des Champs ; des deux côtés de la nef, la vie de la Sainte Vierge dans ses moments essentiels, plus de vingt panneaux ; dans les bras du transept six tableaux religieux dont deux de dimension considérable. C'était une œuvre immense ; elle demanda à l'artiste dix-huit ans d'efforts ; mais il la commença, la continua et l'acheva avec cette belle régularité d'un travail qui n'a jamais connu la fièvre ni la lassitude.

Il ne fallait pas songer à la fresque proprement dite ; nos peintres en ont perdu le secret ou le goût et peut-être qu'elle est impossible dans nos climats, voué par l'humidité des murs à noircir et à disparaître. Aubert employa le procédé dont on s'était servi pour le Panthéon, la peinture sur toile marouflée, qui permet d'exécuter le tableau avec tout le soin que l'on apporte à une œuvre de chevalet et de fixer au mur l'illusion de la fresque.

Une autre difficulté surgissait : la toile de l'abside serait de dimension colossale ; où trouver un atelier assez grand pour en planter le cadre ? Des amis du clergé franc-comtois lui offrirent pendant les vacances du Séminaire la vaste chapelle de Notre-Dame de Consolation. Il accepta avec joie. C'était bien le cadre rêvé pour peindre le triomphe de l'Immaculée : une gorge sauvage mais riante ; des montagnes où des pins séculaires dressent leurs troncs pareils à des fûts de colonne ; des cascades d'eau limpide qui tombent du rocher ; une chapelle intime et douce à la source de la rivière ; et Notre-Dame invoquée en ce lieu sous un vocable qui incline le cœur à la tendresse. On ne relèverait pas ces détails accidentels si on ne savait pas que Joseph Aubert y attachait un grand prix ; sa piété s'en nourrissait et la piété était une des sources de son inspiration artistique. On a dit qu'il priait en travaillant ; la formule est exacte si on veut faire entendre qu'il mêlait à son travail des prières articulées ; mais son travail était une prière au sens le plus élevé du mot, un acte de foi et un acte de piété.

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(1) R. P. Sertillanges. La vie de la sainte Vierge, Lethielleux édit.

Roger Boivin
Roger Boivin

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