Dimanches après la Pentecôte
4 participants
Page 2 sur 3
Page 2 sur 3 • 1, 2, 3
Re: Dimanches après la Pentecôte
Extraits de Bourdaloue a écrit:
.
Il n'y a point de passion qui n'aveugle l'homme, et qui ne lui fasse voir les choses dans un faux jour, où elles lui paraissent tout ce qu'elles ne sont pas, et ne lui paraissent rien de ce qu'elles sont.
0 ambition ! s'écriait ce Père, [Saint Bernard] par quel charme arrive-t-il, qu'étant le supplice d'un cœur où tu as pris naissance, et où tu exerces ton empire, il n’y a personne toutefois à qui tu ne plaises, et qui ne se laisse surprendre à l'attrait flatteur que tu lui présentes (…)
Je trouve la réflexion de saint Ambroise très solide et pleine d'un grand sens , quand il dit qu'un homme ambitieux, et qui agit par le mouvement de cette passion dont il est dominé, doit être nécessairement ou bien injuste , ou bien présomptueux. (…) il conclut que le grand principe sur lequel roule l'ambition de la plupart des hommes, est communément la présomption ou l'idée secrète qu'ils se forment de leur capacité (…)
(…) Qu'est-ce qu'un ambitieux ? C'est un homme, répond saint Chrysostome, rempli de lui-même, qui se flatte de pouvoir soutenir tout ce qu'il croit le pouvoir élever…
…la modestie, qui, comme l'a fort bien remarqué le philosophe, {question: le Père Bourdaloue dit-il de qui il s’agit ?} devrait être naturellement la vertu des imparfaits, est au contraire celle des parfaits.
l'ambition est aveugle dans ses recherches et présomptueuse dans ses desseins, elle est encore odieuse dans ses suites (…)
.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
ROBERT. a écrit:
…la modestie, qui, comme l'a fort bien remarqué le philosophe, {question: le Père Bourdaloue dit-il de qui il s’agit ?}
En théorie, dire "le philosophe" tout court se rapporte à Aristote, comme dans Saint Thomas.
Du moins, je crois.
Benjamin- Nombre de messages : 6869
Date d'inscription : 26/07/2011
Re: Dimanches après la Pentecôte
Benjamin a écrit:ROBERT. a écrit:
…la modestie, qui, comme l'a fort bien remarqué le philosophe, {question: le Père Bourdaloue dit-il de qui il s’agit ?}
En théorie, dire "le philosophe" tout court se rapporte à Aristote, comme dans Saint Thomas.
Du moins, je crois.
Je vous remercie cher ami. Je cherche et vous reviens.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Benjamin a écrit:ROBERT. a écrit:
…la modestie, qui, comme l'a fort bien remarqué le philosophe, {question: le Père Bourdaloue dit-il de qui il s’agit ?}
En théorie, dire "le philosophe" tout court se rapporte à Aristote, comme dans Saint Thomas.
Du moins, je crois.
.
En plein dans le mille Benjamin ! Merci.
IIa-IIæ Question 161L'humilité est-elle une vertu ?
L'HUMILITÉ
Article 1
Objections 4. La vertu, selon Aristote est " la disposition de ce qui est parfait ". Or l'humilité semble convenir aux imparfaits…
.
http://www.santorosario.net/somme/secundasecundae/161.htm
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Dix-septième dimanche après la Pentecôte
Le caractère du Chrétien.
Le caractère du Chrétien.
Les pharisiens étant assemblés?, Jésus leur fit cette question : Que pensez-vous du Christ ?
Extraits de Bourdaloue a écrit:N'examinons point aujourd'hui ce que c'est que le Christ; la foi nous l'apprend assez : mais voyons ce que c'est que le chrétien qui en doit être le fidèle imitateur.
(…)selon saint Thomas, sont essentiellement requises pour faire un chrétien : la grâce ou la vocation du côté de Dieu , et une fidèle correspondance à cette vocation ou à cette grâce du côté de l'homme. Or l'une et l'autre, bien considérées, n'ont point de caractère qui leur soit plus propre que celui de la séparation du monde. (…)
Qu'est-ce que la grâce, je dis la première de toutes les grâces, qui est la vocation au christianisme? (…) je n'en trouve point de plus exacte ni de plus solide définition que celle de saint Augustin, quand il dit en un mot que c'est une grâce de séparation (…)
Voulez-vous savoir, mes Frères, dit ce saint docteur, qui sont ces élus appelés comme l'Apôtre selon le décret, mais le décret favorable de Dieu ? ce sont ceux dont Dieu a fait le discernement, qu'il a tirés de la masse corrompue du monde, et qu'il en a séparés en vertu de la grâce de leur vocation. C'est donc en effet dans la séparation du monde que consiste l'attrait, le mouvement et l'impression particulière de cette grâce. De là vient que saint Paul, pour exprimer le don de grâce qu'il avait reçu dans cette vocation miraculeuse et pleine de prodiges dont sa conversion fut suivie, ne se servait point d'autre terme que celui-ci Tout ce que je suis, je le suis par la miséricorde de mon Dieu qui m'a appelé. Et comment m'a-t-il appelé? en me séparant dès le ventre de ma mère ; c'est-à-dire, selon l'explication de saint Ambroise, en me choisissant pour vivre séparé de la corruption du monde. De là vient que quand l'Esprit de Dieu répandait sur les premiers disciples ces grâces visibles et abondantes qui les élevaient aux plus saints ministères, ainsi qu'il est rapporté au livre des Actes, c'était toujours en ordonnant que ceux qu'il avait choisis pour cela fussent séparés du reste même des fidèles. (…)
De là vient que le Sauveur du monde, pour signifier qu'il était venu appeler les hommes à la perfection évangélique, disait hautement qu'il était venu séparer le père d'avec son fils, et la fille d'avec sa mère (…) réduisant toute la grâce de cette perfection à cet esprit de séparation. De là vient que le grand Apôtre voulant nous faire comprendre la grâce suréminente et infinie de la sainteté de Jésus-Christ, en a renfermé tout le mystère dans ce seul mot (…); c'est un pontife qui nous a été donné de Dieu, mais un pontife qui, par l'onction céleste dont il était rempli, a été parfaitement séparé des pécheurs. Or vous savez que la sainteté de Jésus-Christ est l'exemplaire de la nôtre ; et que la nôtre , pour être agréée de Dieu, doit être conforme à la sienne. Puisqu'il est donc vrai que cet Homme-Dieu a été sanctifié par une grâce qui l’a pleinement séparé du monde, il faut par proportion que la grâce qui nous sanctifie produise en nous un semblable effet(…)
(…) la vocation chrétienne, en tant qu'elle procède et qu'elle est inspirée de Dieu, est une grâce de séparation ; donc la correspondance qui lui est due, et qui fait proprement le devoir du chrétien, doit être une correspondance de séparation du côté de l'homme. Pourquoi cela ? Ah ! mes chers auditeurs, le voici : parce que la correspondance à la grâce doit nécessairement se rapporter à la fin et au terme de la grâce même. Car comme il y a diversité de grâces et d'inspirations ; aussi faut-il reconnaître qu'il y a diversité d'opérations dans l'homme et de devoirs (…)
C'est-à-dire que toutes sortes de devoirs ne répondent pas à toutes sortes de grâces. Je m'explique. Dieu me donne une grâce de résistance et de défense contre la passion qui me porte au péché : je ne puis correspondre à cette grâce qu'en résistant à ma passion et en la combattant. Au contraire, Dieu me donne une grâce d'éloignement et de fuite dans l'occasion du péché : je ne puis être fidèle à cette grâce qu'en fuyant et en m'éloignant : et ainsi des autres, parce que c'est à nous, dit saint Prosper, de suivre le mouvement de la grâce, et non pas à la grâce de suivre le mien. Comme il est donc vrai que la grâce par laquelle Dieu m'appelle au christianisme ou à la perfection du christianisme, est une grâce de séparation du monde, quoi que je fasse, je n'accomplirai jamais le devoir du christianisme, si je ne me sépare du monde, et si je ne fais avec Dieu ce que Dieu fait le premier dans moi.
(…) il suffit précisément d'être chrétien, pour être obligé de vivre dans cet esprit de séparation du monde. Qu'est-ce à dire du monde? c'est-à-dire des faux plaisirs du monde que clament les mondains, des joies profanes du monde, des vaines intrigues du monde, du luxe du monde, des amusements, des folies, des coutumes, ou plutôt des abus du monde ; en un mot, de tout ce qui entretient la corruption et la dissolution du monde ; c'est-à-dire de tout ce qu'entendait le disciple bien-aimé, quand il nous défendait de nous attacher au monde et à tout ce qui est dans le monde(…)
Il suffit, dis-je, pour être obligé par profession et par état de s'en séparer, d'être chrétien ; et il n'est point nécessaire pour cela d'être quelque chose de plus que chrétien : pourquoi ? parce que la grâce seule du christianisme nous sépare de tout cela ; et parce qu'au moment que nous avons été régénérés par cette grâce, nous nous en sommes séparés nous-mêmes.
C'est donc une erreur, non-seulement grossière, mais pernicieuse, de dire : Je suis du monde, et je ne puis me dispenser de vivre selon le monde, ni de me conformer au monde. Car c'est ce qui vous perd, et ce qui est la source de tous vos égarements. Or vous me permettrez bien de vous dire que de parler ainsi c'est une espèce de blasphème ; car le Fils de Dieu vous a déclaré expressément dans l'Evangile que vous n'êtes plus du monde, et vous supposez que vous en êtes encore; et, ce qui est bien plus étrange, vous prétendez en être encore dans le même sens qu'il a voulu lui faire entendre que vous n'en étiez plus. Il faut donc renverser la proposition, et dire : Je ne suis plus du monde, parce que je suis chrétien ; donc il ne m'est plus permis de vivre selon le monde, ni de me conformer aux lois du monde. Alors vous parlerez selon l'esprit et selon la grâce de votre vocation.
(..) plus un homme dans le christianisme a soin de se séparer du monde, plus il est chrétien ; et plus il a d'engagement et de liaison avec le monde ( je dis de liaison hors de son devoir, et d'engagement hors de la nécessité et de sa condition), moins il est chrétien(…)
(…) Qu'est-ce qu'une religion fervente et réglée (écoutez saint Bernard, et souffrez que je rende ce témoignage à la vérité connue), qu'est-ce qu'une religion fervente et réglée, telle que nous en voyons encore aujourd'hui? c'est une idée subsistante du christianisme. C'est un christianisme particulier, dit saint Bernard, qui, dans les débris du christianisme universel, s'est sauvé, pour ainsi dire, du naufrage, et que la Providence a conservé, comme au commencement de ce premier christianisme révéré par les païens mêmes; car voilà, mes chers auditeurs, ce qui me rend la religion vénérable.
(…) quand les Pères de l'Eglise ont parlé ou de ces recherches empressées du monde, ou de ces vanités et de ces plaisirs qui marquent l'attachement au monde, ils n'ont point fait difficulté de dire qu'il y avait en tout cela une apostasie secrète : pourquoi? parce que la grâce de la foi étant un principe de séparation à l'égard de toutes ces choses, ne pas renoncer à ces choses, c'était renoncer, en quelque manière, à la grâce de la foi.
(…) il est impossible à une âme chrétienne de se convertir et de retourner véritablement à Dieu, à moins qu'elle ne soit résolue de faire un certain divorce avec le monde, qu'elle n'a pas encore fait; et il y a de la contradiction à vouloir être autant du monde et aussi engagé dans le monde qu'auparavant, et néanmoins à prétendre marcher dans la voie, d'une pénitence sincère qui produise le salut, car le moyen, mon cher auditeur, de concilier ces deux choses ? Vous avouez vous-même que c'est le monde qui vous a fait perdre l'esprit de votre religion et l'Esprit de Dieu : il faut donc que pour retrouver cet esprit vous vous sépariez du monde, et qu'au lieu de persister à vous figurer en vain cet esprit où il n'est pas, vous l'alliez chercher où il est.
(…) n'y a-t-il pas une perfection pour les gens du monde comme pour les religieux? Mais quand on leur répond qu'il n'est pas question du monde en général; qu'il s'agit d'un certain monde particulier, qui n'est point l'ouvrage de Dieu ; d'un monde qui les pervertit et qui les pervertira toujours, parce que c'est un monde où règne le péché, parce que c'est un monde où le libertinage passe pour agréable et pour honnête, parce que c'est un monde dont la médisance fait tous les entretiens, parce que c'est un monde où toutes les passions se trouvent comme dans leur centre et dans leur élément, parce que c'est un monde où l'on ne peut éviter mille écueils auxquels la conscience ne manque pas d'échouer(…)
Est-il possible, dit-on, que je puisse vivre sans voir le monde ? Que ferais-je quand je me serai déclarée n'être plus du monde? Quelle ressource aurais-je contre l'ennui qui m'accablera dans cette séparation du monde? quel jugement fera-t-on de moi dans le monde? car voila les difficultés que l'esprit du monde a coutume de former dans une âme qui traite avec Dieu de sa conversion. Et moi je dis, âmes chrétiennes, que si vous aviez tant soit peu de foi ou plutôt si vous écoutiez tant soit peu votre foi, vous rougiriez de ces sentiments. Non, non, Seigneur, diriez-vous à Dieu, ce n'est point de là que doit dépendre ma résolution, et je raisonne en infidèle lorsque je parle de la sorte. Que cette séparation du monde me soit difficile ou aisée, qu'elle me cause de la tristesse ou de la joie, que le monde l'approuve ou qu'il la condamne ; puisqu'elle m'est nécessaire, c'est assez pour m'y soumettre.(…)
Le monde me condamnera : et que m'importe d'être louée ou condamnée du monde, puisque je veux sincèrement m'en séparer? Je cherche quelles seront alors mes occupations : et n'en aurai-je pas trop, pourvu que je m'attache aux devoirs de ma religion et aux devoirs de mon état ? (…) Il y a des séparations du monde fausses, et il y en a de vraies. Je suppose que celle que nous embrasserons sera telle qu'elle doit être ; qu'elle sera sincère, désintéressée, et qu'elle aura Dieu pour motif.
(…) je dis qu'il y a deux sortes de séparations du monde : l'une corporelle et extérieure, l'autre de cœur et d'esprit. Je dis que pour vivre en véritable chrétien, toutes deux sont nécessaires, parce que la séparation extérieure du monde n'est qu'un fantôme, si elle n'est soutenue et animée de celle de l'esprit ; et que celle de l'esprit ne peut se soutenir ni subsister, si elle n'est aidée de l'extérieure. C'est la maxime de saint Bernard et de tous les Pères. Il faut une séparation du cœur et de l'esprit; car, en vain suis-je séparé du monde(…), si mon esprit et mon cœur y sont attachés. C'est par le cœur qu'il faut que je commence à m'en séparer. (…)
(…) il faut que la séparation du cœur soit accompagnée, ou, pour mieux dire, soutenue de la séparation extérieure et corporelle : par quelle raison? parce que, dit saint Grégoire, pape, la contagion du siècle est telle, que les hommes les plus purs, les plus saints et les plus dégagés de l'amour du monde, ne laissent pas d'en ressentir les atteintes. (…)
(…) ne vaut-il pas bien mieux que cette séparation se fasse en nous par l'attrait de la grâce, que d'attendre qu'elle se fasse malgré nous par la violence de la mort? Séparons-nous du monde, tandis que nous pouvons devant Dieu nous rendre le témoignage que nous nous en séparons pour lui. Car, quel honneur faisons-nous à Dieu quand nous nous convertissons à lui parce que nous ne sommes plus en état de goûter le monde, ou plutôt parce que le monde commence à ne nous plus goûter? Quelle obligation Dieu, pour ainsi parler, nous peut-il avoir, quand nous lui donnons le reste du monde?
Il est de la sainteté de Dieu d'être servi par des saints(…) Dieu, en qualité de Saint des saints, se fait un honneur de recevoir le culte qui lui est du par des hommes sanctifiés, et qui portent dans eux un caractère de consécration. Tous les hommes, dit saint Grégoire, pape, sont essentiellement sujets à l'empire de Dieu ; mais tous les hommes ne sont pas pour cela consacrés à Dieu. Cette consécration est l'effet d'une grâce spéciale : et je dis que c'est la grâce propre du christianisme. (…)
Qu'est-ce que l'onction du baptême, en vertu de laquelle nous sommes chrétiens? C'est dit saint Cyprien, une consécration solennelle qui se fait de nos personnes; mais une consécration dans laquelle il semble que Dieu a pris plaisir de rassembler toutes les richesses de sa grâce pour nous la rendre plus précieuse ; car le baptême, ajoute ce Père, nous consacre en je ne sais combien de manières, qui doivent toutes nous inspirer un certain respect pour nous-mêmes. Il nous consacre comme rois, il nous consacre comme prêtres, il nous consacre comme temples de Dieu, il nous consacre comme enfants de Dieu, il nous consacre comme membres de Dieu. (…)
Je dis que le baptême nous consacre comme rois et comme prêtres; ainsi l'apôtre saint Pierre le déclare-t-il, lorsque parlant aux chrétiens dans sa première Epitre canonique, il leur donne tout à la fois ces deux qualités en les appelant sacerdoce royal (…) Et ainsi le disciple bien-aimé, dans l'Apocalypse, fait-il consister en partie le bienfait de la rédemption en ce que Jésus-Christ, qui est le souverain rédempteur, nous a établi rois et prêtres de Dieu son père (…)
En effet, comme chrétiens, nous ne sommes destinés à rien de moins qu'à régner; et ce n'est point une exagération ni une figure de dire que dans le baptême nous sommes sacrés pour un royaume, qui est le ciel ; que nous y recevons l'investiture d'une couronne, qui est la couronne du ciel; et qu'en même temps que la grâce de ce sacrement nous est conférée, nous avons un droit légitime de prétendre à l'un des trônes que le Fils de Dieu nous a préparés dans le ciel.
(…) l'onction baptismale non-seulement donne pouvoir au chrétien, mais lui impose l'obligation d'offrir à Dieu des sacrifices continuels : le sacrifice de son esprit par la foi, le sacrifice de son corps par la pénitence, le sacrifice de ses biens par l'aumône, le sacrifice de sa vengeance par la charité, le sacrifice de son ambition par l'humilité; toutes hosties, dit saint Paul, par lesquelles on se rend Dieu favorable, et sans lesquelles le christianisme n'est qu'une ombre de religion(…)
J'ajoute qu'en vertu de ce même caractère vous êtes consacrés à Dieu comme ses temples. Rien de plus commun dans la doctrine de saint Paul. Non, mes Frères, disait ce grand apôtre, ce n'est point dans des temples bâtis par les hommes que notre Dieu fait sa demeure, mais dans ceux qu'il a bâtis lui-même; c'est-à-dire dans nous-mêmes, car vous êtes vous-mêmes les temples du Dieu tout-puissant(…) cette qualité que nous possédons de temples de Dieu est, à parler dans la rigueur, uniquement attachée à la grâce du baptême ; et toute autre grâce que celle du baptême, fût-elle aussi éminente que celle des anges, ne nous communique point cette qualité.(…)
(…)C'est donc le baptême qui fait en nous comme la première consécration du temple de Dieu, ou plutôt c'est par le baptême, et par le caractère de chrétien que le baptême nous confère, que nous devenons les temples de Dieu.
Mais qu'est-ce que toutes ces qualités, en comparaison des titres glorieux d'enfants de Dieu et de membres de Dieu ? Car ce sont là les termes formels et les expressions de l'Ecriture. C'est de nous que saint Jean a dit que tous ceux qui ont été unis à Jésus-Christ dans le baptême et par le baptême, que tous ceux qui ont cru en lui et en son saint nom, ont dès lors acquis un droit incontestable d'être appelés enfants de Dieu, comme en effet ils le sont devenus(…)
(…)C'est aux chrétiens que saint Paul disait : Vous êtes le corps de Jésus-Christ, vous êtes ses membres(…)
(…) Enfin, tout ce que la loi chrétienne nous commande, quelque héroïque qu'il puisse être, est-il trop relevé pour des enfants de Dieu ? Ah ! Seigneur, s'écriait saint Ambroise, méritons-nous de porter ce beau nom, si, par une lâche conduite, nous venions à dégénérer, et à déchoir des hauts sentiments de l'esprit chrétien, dans les bassesses infinies de l'esprit du monde ; et ne faut-il pas que nous renoncions pour jamais à l'honneur de vous appartenir, si nous prétendions nous borner à des vertus médiocres?
Ne savez-vous pas, mes Frères, leur disait-il, que par le baptême vous êtes devenus le temple de Dieu? Or le temple de Dieu doit être saint ; et quiconque profane ce temple, Dieu le perdra.
(…) si vous n'êtes pas touchés de ce que je dis, voilà ce qui doit vous faire trembler ; car un troisième et dernier article par où je finis, c'est que les péchés des chrétiens contractent une malice particulière, qui est celle même du sacrilège, et qui les rend plus abominables devant Dieu. En effet, qu'est-ce que le sacrilège? C’est, disent les théologiens, l'abus, la profanation d'une chose consacrée à Dieu. Or tout ce qu'il y a dans moi est consacré à Dieu par le baptême ; et tous les péchés que je commets sont autant d'abus criminels que je fais de moi-même. Par conséquent tous mes péchés renferment une espèce de sacrilège dont je suis coupable. Mais encore de quelle nature est ce sacrilège? ce n'est pas seulement la profanation d'une chose consacrée à Dieu, mais unie à Dieu, mais incorporée avec Dieu, ainsi que l'est un chrétien en conséquence du baptême et selon les principes de notre foi.(…)
Quoi! j'arracherais les membres de Jésus-Christ, pour en faire les membres d'une prostituée? ce sont les propres expressions de l'Apôtre : Quoi ! je corromprais un cœur qui doit être la demeure de mon Dieu, je l'infecterais du poison le plus mortel, je le souillerais de toutes les iniquités. Ce ne sont point là des exagérations de la chair, ni ce n'en est point une d'ajouter, en déplorant la triste décadence du christianisme, que rien néanmoins n'y est plus ordinaire que le péché. Quand Dieu, dans les premiers âges du monde, vit la corruption générale où toute la terre était tombée, il se repentit, selon le langage de l'Ecriture, d'avoir créé l'homme(…)
Tertullien et de tous les Pères après lui dit, que dans la loi nouvelle, dans cette loi qui nous lie si étroitement à Dieu, qui nous dévoue si spécialement à Dieu, qui nous donne avec Dieu une communication si intime, et nous fait en quelque sorte participer à la nature même de Dieu, si nous sommes pécheurs, notre péché nous rend beaucoup plus condamnables au tribunal de Dieu, et plus redevables à sa justice?
Qu'avons-nous donc à craindre? Plaise au ciel de détourner l'effet d'une si terrible menace, et puissions-nous le prévenir ! C'est que Dieu, selon les mêmes termes de l'Ecriture, ne vienne à se repentir de ce qu'il a fait pour nous, en nous honorant d'un si saint et si glorieux caractère(…) C'est qu'il ne détruise enfin cette Eglise qu'il a rachetée de son sang et animée de son esprit(…)Que dis-je, mes chers auditeurs ! il ne la détruira jamais, et cette Eglise subsistera toujours, parce qu'elle est bâtie sur la pierre ferme. Mais Dieu, content de se réserver quelques âmes fidèles, détruira tant d'indignes sujets qui la désolent, au lieu de l'édifier. Il les retranchera de son royaume comme autant de scandales, et il le transportera à des nations étrangères. Il conservera le christianisme, mais il réprouvera des millions de chrétiens. Il permettra que le flambeau de la foi s'éteigne parmi nous : hélas! n'a-t-il pas déjà commencé à le permettre?
Dernière édition par Louis le Dim 27 Sep 2015, 7:27 am, édité 3 fois (Raison : espacement)
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Extraits de Bourdaloue a écrit:
.
N'examinons point aujourd'hui ce que c'est que le Christ; la foi nous l'apprend assez : mais voyons ce que c'est que le chrétien qui en doit être le fidèle imitateur.
(…)selon saint Thomas, sont essentiellement requises pour faire un chrétien: la grâce ou la vocation du côté de Dieu, et une fidèle correspondance à cette vocation ou à cette grâce du côté de l'homme. Or l'une et l'autre, bien considérées, n'ont point de caractère qui leur soit plus propre que celui de la séparation du monde. (…)
…quand l'Esprit de Dieu répandait sur les premiers disciples ces grâces visibles (…) c'était toujours en ordonnant que ceux qu'il avait choisis pour cela fussent séparés du reste même des fidèles. (…)
…la correspondance à la grâce doit nécessairement se rapporter à la fin et au terme de la grâce même.
…Je ne suis plus du monde, parce que je suis chrétien; donc il ne m'est plus permis de vivre selon le monde, ni de me conformer aux lois du monde. Alors vous parlerez selon l'esprit et selon la grâce de votre vocation…
(..) plus un homme dans le christianisme a soin de se séparer du monde, plus il est chrétien ; et plus il a d'engagement et de liaison avec le monde (je dis de liaison hors de son devoir, et d'engagement hors de la nécessité et de sa condition), moins il est chrétien (…)
(…) quand les Pères de l'Eglise ont parlé ou de ces recherches empressées du monde, ou de ces vanités et de ces plaisirs qui marquent l'attachement au monde, ils n'ont point fait difficulté de dire qu'il y avait en tout cela une apostasie secrète: pourquoi ? Parce que la grâce de la foi étant un principe de séparation à l'égard de toutes ces choses, ne pas renoncer à ces choses, c'était renoncer, en quelque manière, à la grâce de la foi.
Vous avouez vous-même que c'est le monde qui vous a fait perdre l'esprit de votre religion et l'Esprit de Dieu…
...cette séparation du monde (…) puisqu'elle m'est nécessaire, c'est assez pour m'y soumettre.(…)
…parce que, dit saint Grégoire, pape, la contagion du siècle est telle, que les hommes les plus purs, les plus saints et les plus dégagés de l'amour du monde, ne laissent pas d'en ressentir les atteintes. (…)
(…) ne vaut-il pas bien mieux que cette séparation se fasse en nous par l'attrait de la grâce, que d'attendre qu'elle se fasse malgré nous par la violence de la mort ?
Tous les hommes, dit saint Grégoire, pape, sont essentiellement sujets à l'empire de Dieu; mais tous les hommes ne sont pas pour cela consacrés à Dieu. Cette consécration est l'effet d'une grâce spéciale: et je dis que c'est la grâce propre du christianisme. (…)
(…) l'onction baptismale non-seulement donne pouvoir au chrétien, mais lui impose l'obligation d'offrir à Dieu des sacrifices continuels: le sacrifice de son esprit par la foi, le sacrifice de son corps par la pénitence, le sacrifice de ses biens par l'aumône, le sacrifice de sa vengeance par la charité, le sacrifice de son ambition par l'humilité; toutes hosties, dit saint Paul, par lesquelles on se rend Dieu favorable, et sans lesquelles le christianisme n'est qu'une ombre de religion (…)
(…) Enfin, tout ce que la loi chrétienne nous commande, quelque héroïque qu'il puisse être, est-il trop relevé pour des enfants de Dieu ? Ah ! Seigneur, s'écriait saint Ambroise, méritons-nous de porter ce beau nom, si, par une lâche conduite, nous venions à dégénérer, et à déchoir des hauts sentiments de l'esprit chrétien, dans les bassesses infinies de l'esprit du monde; et ne faut-il pas que nous renoncions pour jamais à l'honneur de vous appartenir, si nous prétendions nous borner à des vertus médiocres ?
Ne savez-vous pas, mes Frères, leur disait-il, que par le baptême vous êtes devenus le temple de Dieu? Or le temple de Dieu doit être saint; et quiconque profane ce temple, Dieu le perdra.
En effet, qu'est-ce que le sacrilège ? C’est, disent les théologiens, l'abus, la profanation d'une chose consacrée à Dieu....
Quoi ! J’arracherais les membres de Jésus-Christ, pour en faire les membres d'une prostituée?
Qu'avons-nous donc à craindre? Plaise au ciel de détourner l'effet d'une si terrible menace, et puissions-nous le prévenir ! C'est que Dieu, selon les mêmes termes de l'Ecriture, ne vienne à se repentir de ce qu'il a fait pour nous, en nous honorant d'un si saint et si glorieux caractère (…) C'est qu'il ne détruise enfin cette Eglise qu'il a rachetée de son sang et animée de son esprit (…) Que dis-je, mes chers auditeurs ! Il ne la détruira jamais, et cette Eglise subsistera toujours, parce qu'elle est bâtie sur la pierre ferme. Mais Dieu, content de se réserver quelques âmes fidèles, détruira tant d'indignes sujets qui la désolent, au lieu de l'édifier. Il les retranchera de son royaume comme autant de scandales, et il le transportera à des nations étrangères. Il conservera le christianisme, mais il réprouvera des millions de chrétiens. Il permettra que le flambeau de la foi s'éteigne parmi nous: hélas! N’a-t-il pas déjà commencé à le permettre ?
.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Sermon pour le dix-huitième dimanche après la Pentecôte
La paralysie spirituelle
La paralysie spirituelle
Extraits des Oeuvres du Père Louis de Grenade, vol VI a écrit:(…) la paralysie spirituelle, qui nous est indiquée par notre évangile. Saint Jean Climaque, comme nous le verrons, appelle cette maladie l'insensibilité du cœur, et il affirme qu'elle est mortelle entre toutes.
Il existe donc une paralysie des âmes qui n'est pas sans analogie avec la paralysie des corps.(…) Il faut savoir ensuite que, comme il y a dans notre âme deux parties de nature différente, l'une portant la ressemblance des brutes, l'autre celle des anges, l'homme a été créé de Dieu pour que, élevant aux choses supérieures et divines la partie la plus noble de son âme, où résident l'intelligence, la volonté et la mémoire, il reçoive la grâce et les lumières célestes qui entretiennent et perfectionnent la vie spirituelle. C'est ce qu'ont fait tous les saints qui se sont consacrés tout entiers à la pratique de la piété et des vertus, et dont Théodoret dit avec autant de raison que d'élégance qu'ils avaient une âme ailée. Les hommes charnels, au contraire, étrangers à cette occupation, appliquent les plus nobles puissances de leur âme à la recherche des plaisirs terrestres et à la satisfaction de leurs sens(…)
L'âme infortunée, étendue sur le misérable grabat des passions de la chair où elle prend son repos, plutôt morte que vivante, n'a en elle-même aucune force pour s'élever des pensées terrestres à celles du ciel; et telle est la misère de sa condition, que, tandis qu'elle se montre pleine de vigueur et de clairvoyance dans la recherche des choses terrestres, elle se trouve aveugle et sans vie pour les choses divines.(…) la paralysie des âmes, qui rend un homme comme mort et insensible aux choses spirituelles et divines.(…) quoi que vous lui mettiez sous les yeux pour le détourner du mal, la mort, le jugement, l'enfer, la gloire du ciel, la croix et la passion de notre Seigneur, les innombrables bienfaits de Dieu, les châtiments, privés ou publics, dont il punit tous les jours les crimes des hommes, rien ne le touche et ne lui fait impression.(…)
Saint Jean Climaque appelle cette maladie l'ignorance de la componction, la porte du désespoir, la mère de l'oubli et l'absence de la crainte de Dieu. (…)cette maladie est-elle tout-à-fait incurable? Il n'y en a point de telle pour le Seigneur qui, d'un mot, répare toutes les ruines, et devant qui les morts eux-mêmes sont comme vivants.
A quelles marques notre paralytique spirituel pourra-t-il donc se croire indubitablement guéri?
Premièrement, s'il se lève. C'est ce que fait l'homme qui s'applique à la recherche et à l'amour des choses du ciel. Levez-vous donc, vous qui rampiez sur la terre, qui n'aviez à l'esprit que des pensées basses, qui vous consumiez nuit et jour pour des choses terrestres. Car ne sont-ce pas là les occupations des hommes charnels? Ne sont-ce pas là leurs pensées, leurs affections, leurs désirs, leur continuel labeur? Si donc votre regard se porte peu à peu vers le ciel, si vous méditez les choses d'en haut, si vous prenez quelque souci de la vie future, si vous vous arrêtez à la pensée de la mort qui chaque jour vous menace, qui que vous soyez, vous commencez à vous lever, et c'est à vous que s'adressent les encouragements du Prophète : « Sors de la poussière, lève-toi, et prends place sur un trône, ô Jérusalem! » Levez-vous donc, vous qui êtes assis sur la poussière des choses terrestres, objet de vos affections; prenez place sur un trône, c'est-à-dire reposez-vous dans l'amour des choses divines, dont vous étiez si éloignés. Voilà la première marque de guérison.
La deuxième est de prendre le lit où vous étiez étendu, et sur lequel on vous transportait(…) dans notre âme deux parties, l'une supérieure, l'autre inférieure, l'une semblable aux anges, l'autre semblable aux brutes. La première prend pour guide la sagesse, la raison et la loi divine; la seconde se laisse aller, comme les brutes, à l'entraînement aveugle de ses appétits. Or, quoique la raison et la loi de Dieu prescrivent que la partie inférieure soit dirigée par la partie supérieure, telle est l'influence du péché dans les âmes charnelles, qu'il renverse cet ordre divin, en sorte que la partie inférieure détrône la partie supérieure et la soumet à son empire.
Alors ce qu'il y a en nous de plus sage, de plus clairvoyant, de plus noble, dirige ce qu'il y a de plus insensé, de plus aveugle, de plus vil ; le maître obéit au serviteur, et, par une indignité plus grande encore, l'homme à la bête. Car tel est l'empire que la chair impure et aveugle exerce sur l'esprit. Quoi de plus monstrueux et de plus révoltant? La terre se trouble, dit Salomon en voyant la servante, c'est-à-dire la chair, dont la condition est d'obéir, usurper le commandement.
C'est, dans un sens mystique, être étendu sur un grabat, être porté sur un grabat. Mais lorsque, par la puissance du Seigneur Jésus, l'homme est guéri de cette maladie, alors ce n'est plus son grabat qui le porte, c'est lui qui porte son grabat, c'est-à-dire, ce n'est plus la chair et ses convoitises qui le conduisent, mais lui qui conduit la chair, et soumet ses convoitises à son empire. Alors, au lieu de marcher comme courbé sous le joug d'un tyran, il s'avance la tête haute, selon l'ordre de la nature; il a recouvré son trône et le sceptre de sa domination; affranchi d'une honteuse servitude, il est arrivé à la liberté des enfants de Dieu; enfin, délivré de la tyrannie de la chair et de ses appétits, il réalise la parole du Prophète : " Ceux qui les avaient pris seront leurs captifs, et ils s'assujettiront ceux qui les avaient dominés. » C'est là, dans un sens mystique, porter son grabat, après avoir été porté par lui ; et c'est ce que font tous les enfants de Dieu qui suivent, non la chair, mais l'Esprit de Dieu.
Vous voyez, mes frères, quelle différence il y a entre les hommes spirituels et les hommes charnels : les premiers, soumettant la chair à l'esprit, se conduisent par la foi, la raison et la sagesse; les derniers, esclaves de leurs passions, s'abandonnent à ces guides aveugles, qui les égarent plutôt qu'ils ne les dirigent. Dans les uns, c'est la raison qui conduit les appétits; dans les autres, ce sont les appétits qui conduisent la raison. Ceux-là disent : « La justice de votre loi, Seigneur, me tient lieu de conseil, » et réalisent la parole de l'Apôtre : " Si nous vivons par l'esprit, conduisons-nous par l'esprit" ;ceux-ci disent : « Nous marcherons en suivant nos pensées, » ; ou bien : « Je n'ai rien refusé à mes yeux de tout ce qu'ils ont désiré, et j'ai permis à mon cœur de jouir de toutes sortes de plaisirs, » Voilà la deuxième et la meilleure marque de la guérison spirituelle.
La troisième est de marcher. Qu'est-ce que marcher dans un sens spirituel, si ce n'est s'avancer peu à peu de vertu en vertu ? Car le juste fait des progrès dans la vertu comme il en fait dans la foi, marchant de clarté en clarté. Ainsi, à l'exemple de l'Apôtre, oubliant ce qui est derrière lui, il s'avance vers ce qui est devant lui.
Tels sont, d'après saint Bernard, les trois signes auxquels nous pouvons reconnaître notre guérison. Qui pourrait, en effet, se lever, porter son lit et marcher, s'il n'était pas déchargé du poids de ses fautes, et si la grâce ne lui avait pas donné de nouvelles forces? L'homme ainsi guéri, s'avançant de vertu en vertu, arrivera enfin à un état parfait de vigueur et d'intégrité, et verra dans Sion le Dieu des dieux, à qui est la gloire aux siècles des siècles. Ainsi soit-il.
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
.
On peut considérer Berlingot et tout autre intrus étant de grands paralytiques spirituels.
.Sermon pour le dix-huitième dimanche après la Pentecôte
La paralysie spirituelle.Extraits des Œuvres du Père Louis de Grenade, vol VI a écrit:
L'âme infortunée (…) se montre pleine de vigueur et de clairvoyance dans la recherche des choses terrestres, elle se trouve aveugle et sans vie pour les choses divines.(…) la paralysie des âmes: (…) quoi que vous lui mettiez sous les yeux pour le détourner du mal, la mort, le jugement, l'enfer, la gloire du ciel, la croix et la passion de notre Seigneur, les innombrables bienfaits de Dieu, les châtiments, privés ou publics, dont il punit tous les jours les crimes des hommes, rien ne le touche et ne lui fait impression.(…)
Saint Jean Climaque appelle cette maladie l'ignorance de la componction, la porte du désespoir, la mère de l'oubli et l'absence de la crainte de Dieu. (…)
A quelles marques notre paralytique spirituel pourra-t-il donc se croire indubitablement guéri ?
1º Premièrement, s'il se lève. C'est ce que fait l'homme qui s'applique à la recherche et à l'amour des choses du ciel.
2º La deuxième est de prendre le lit où vous étiez étendu (…) telle est l'influence du péché dans les âmes charnelles, qu'il renverse cet ordre divin, en sorte que la partie inférieure détrône la partie supérieure et la soumet à son empire.
3º La troisième est de marcher. (…) Car le juste fait des progrès dans la vertu comme il en fait dans la foi, marchant de clarté en clarté.
Tels sont, d'après saint Bernard, les trois signes auxquels nous pouvons reconnaître notre guérison.
Ainsi soit-il.
.
On peut considérer Berlingot et tout autre intrus étant de grands paralytiques spirituels.
Dernière édition par ROBERT. le Dim 27 Sep 2015, 4:41 pm, édité 1 fois (Raison : mise en forme en gras)
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Dix-neuvième dimanche après la Pentecôte
L’éternité malheureuse
L’éternité malheureuse
Alors le roi dit à ses officiers : Jetez-le dans les ténèbres, pieds et mains liés : c'est là qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents.
Extraits de Bourdaloue a écrit:Ce qu'il y a de plus intolérable dans les peines de l'enfer, c'est leur éternité.
Oui l'éternité des peines que souffrent les réprouvés dans l'enfer, est un mystère dont la créance semble avoir de grandes difficultés ; mais j'ajoute que la foi, sur la vérité de cet article, doit corriger nos erreurs et perfectionner nos lumières. Or elle fait l'un et l'autre, et je vous prie de bien comprendre ma pensée. Dieu propose aux hommes une révélation aussi pleine de terreur que digne de respect : savoir, que tout péché, mortel de sa nature, mérite d'être puni par un supplice éternel. Dieu, dis-je, nous propose ce point de créance avec tout le poids de son autorité(…)
(…) et par le consentement unanime de toute l'Église, laquelle a toujours interprété l'Écriture en ce sens : et par les décisions des conciles, qui nous l'ont expressément déclaré : et par la tradition des deux lois, l'ancienne et la nouvelle, qui, sur ce dogme important, ont toujours tenu le même langage ; enfin, par toutes les maximes de la foi, qui nous annonce une peine éternelle dans sa durée, comme due à un seul péché, et même à un péché d'un moment, quand il va jusqu’à nous séparer de Dieu, et à rompre le sacré nœud qui nous doit unir à lui. Est-il donc une vérité plus solidement établie? Mais sur cette vérité néanmoins, sur cette révélation si authentiquement proposée, l'esprit de l'homme a souvent formé des difficultés, c'est-à-dire des erreurs; et lorsqu'il s'y est soumis, il a voulu chercher des raisons pour se justifier à soi-même cette étonnante proportion d'une Éternité de peine avec un moment de péché. Or, à quoi nous sert la foi, ou à quoi nous doit-elle servir? (…): à corriger ces erreurs, comme étant opposées à la vérité primitive et infaillible, et à fortifier, à perfectionner les lumières qui nous donnent quelque idée de ce mystère, si éloigné de nos vues humaines et de nos connaissances.
(…) une peine éternelle pour un péché n'est point incompatible avec la bonté divine ; et ce qui vous trompe, c'est la fausse opinion que vous avez conçue de cette bonté souveraine d'un Dieu. Car vous voulez qu'elle consiste dans une molle indulgence à tolérer le mal et à l'autoriser : mais c'est cela même qui la détruirait, puisqu'elle ne serait plus ce qu'elle est, dès qu'elle cesserait de haïr le péché autant qu'elle le déteste et qu'elle le hait. Pourquoi disons-nous que Dieu est souverainement bon (c'est la belle remarque de Tertullien), sinon parce qu'il a souverainement le mal en horreur? Et qu'est-ce à l'égard de Dieu que d'avoir une souveraine horreur pour le mal, si ce n'est de le poursuivre sans relâche, et d'en être l'implacable vengeur (…) comprenez ce que c'est qu'un Dieu bon. C'est un Dieu opposé essentiellement au péché, un Dieu toujours ennemi du péché, et, par une suite nécessaire, un Dieu persécuteur éternel du péché. Tellement qu'il ne serait plus Dieu, s'il y avait un instant où il n'agît pas contre le péché pour le condamner et pour le punir, parce que ce ne serait plus un Dieu bon, de la manière qu'il l'est et qu'il le doit être.
(…) Ah ! s'écrie saint Grégoire, l'homme est toujours subtil à tirer des conséquences de la bonté de Dieu contre Dieu même : Et moi je réponds, pourquoi donc l'Écriture nous fait-elle entendre tant de menaces et tant d'arrêts foudroyants, qui condamnent le pécheur à cette affreuse éternité de supplice, s'il y a lieu de penser qu'il ne doive pas toujours souffrir? Chose étrange! ajoute ce grand pape, nous nous mettons en peine de garantir la bonté de Dieu, et nous ne craignons pas de le faire auteur du mensonge pour sauver sa miséricorde, comme s'il était moins véritable dans ses paroles que favorable dans ses jugements (…)
En effet, la même Écriture qui m'apprend que Dieu a des entrailles de miséricorde pour les hommes, me déclare en même temps, et dans les termes les plus formels, qu'il y a des flammes éternelles allumées pour le tourment des pécheurs. Il ne m'est pas plus permis de douter de l'un que de l'autre ; mais je dois par l'un rectifier les faux préjugés dont je pourrais me laisser prévenir à l'égard de l'autre; car au lieu de dire : Dieu est la source de toute bonté, donc il ne punira pas éternellement le péché; je dois dire : Dieu punira éternellement le péché, quoiqu'il soit la source de toute limite et la bonté même, puisque la foi me l'enseigne de la sorte, et que c'est une vérité fondamentale dans la religion. Ainsi la bonté de Dieu n'exclut point l'éternité des peines, ni l'éternité des peines n'est point contraire à la bonté de Dieu.
Mais comment et par où se concilient dans le même Dieu cette bonté suprême et cette extrême sévérité, c'est ce qu'il ne m'appartient pas de pénétrer; mais c'est ce que je suis obligé de croire. Il me suffit de savoir l’un et l'autre(…)Objections
C'est qu'une peine éternelle ne peut s'accorder avec la justice de Dieu : pourquoi ? parce que le propre de la justice est de conformer le châtiment à l'offense, en sorte que ni l'offense par sa grièveté ne soit point au-dessus de la peine, ni la peine par sa rigueur au-dessus de l'offense. Or, où est cette égalité et cette proportion entre une éternité de peine et un péché de quelques jours, de quelques heures, et même d'un seul moment? Si j'avais à justifier cet article de notre foi autrement que par la foi même, je pourrais vous répondre que s'il n'y a pas entre cette éternité et ce péché une proportion de durée, il peut y avoir, et qu'il y a en effet une proportion de malice d'une part, et d'autre part de satisfaction et de punition : de malice dans le péché, et de satisfaction dans le châtiment.(…)
(…) ce qui nous trompe, c'est de vouloir mesurer la durée de la satisfaction que la justice de Dieu ordonne, par la durée de l'action criminelle dont le pécheur s'est rendu coupable. Faux principe, dit saint Augustin; et pour en voir sensiblement l'illusion, il n'y a qu'à considérer ce qui se passe tous les jours dans la justice même des hommes. Qu'est-ce que l'ignominie d'un supplice infâme, et que la tache qu'il imprime, laquelle ne s'effacera jamais ? Qu'est-ce qu'un état de servitude et qu'un esclavage perpétuel? Qu'est-ce que l'ennui d'un bannissement, d'un exil, d'une captivité aussi longue que la vie ? Tout cela, n'est-ce pas, autant qu'il le peut être, une espèce d'éternité ? Or, nous voyons néanmoins que la justice humaine emploie tout cela contre un attentat presque aussitôt commis et achevé, qu'entrepris et commencé. Et quand, pour venger cet attentat si peu médité quelquefois et si promptement exécuté, elle fait servir tout cela, nous ne trouvons rien dans la peine qui excède le crime.
(…) d'où il s'ensuit que pour mesurer la proportion de la peine et de l'offense, ce n'est donc pas une règle toujours à prendre que la durée de l'une ou de l'autre, et que, dans un supplice qui ne finit jamais, pour un péché qui finit si vite et dont le plaisir est si court, la justice divine peut être à couvert de tout reproche.
(…) j'en reviens à la foi. Que me dit-elle ? deux choses : que Dieu est juste, et que ses vengeances sont éternelles. Elle ne me peut tromper sur aucune de ces deux vérités, puisque ce sont autant d'oracles émanés de la première vérité; par conséquent ce sont pour moi deux vérités incontestables; par conséquent ces deux vérités ne se combattent point l'une l'autre, et concourent parfaitement ensemble ; par conséquent la peine des damnés subsistant dans toute son éternité, la justice de Dieu subsiste dans toute son intégrité
(…) qui refuse à Dieu le pouvoir d'exercer sur le même sujet une vengeance éternelle, et de lui faire toujours également sentir les cruelles atteintes et les vives impressions du feu qui le brûle. Erreur entre toutes les autres la plus frivole et la plus vaine pour quiconque a quelque notion d'un Dieu tout-puissant. Comme si Dieu ne pouvait pas donner au feu, qu'il a choisi pour être l'instrument de sa colère, des qualités propres, et au-dessus de l'ordre naturel ; comme si Dieu, qui de rien a tout créé, et qui d'un seul acte de sa volonté soutient tout, ainsi que la foi nous le fait connaître, manquait de force et de vertu pour soutenir toute l'activité de ce feu, sans aliment et sans matière ; comme s'il était difficile à Dieu, après avoir formé et le corps et l'âme, de rendre l'un incorruptible aussi bien que l'autre, sans le rendre, non plus que l'autre, impassible, et de les conserver dans les flammes, pour en éprouver les plus violentes ardeurs, sans en recevoir la plus légère altération ; comme si c'était là de plus grands miracles pour Dieu que tant de prodiges éclatants que la foi nous met devant les yeux, et où elle nous donne à entendre qu'il n'a même fallu que le doigt de Dieu (..) Qu'est-ce donc quand il déploie tout son bras, et qu'il l'appesantit sur de rebelles créatures frappées de sa haine ?(…)
Ah ! mes chers auditeurs, ne cherchons point, par d'inutiles questions ni des recherches dangereuses, à diminuer les salutaires frayeurs qu'excite en nous l'esprit chrétien. Croyons, et, dans un saint tremblement, rendons à la bonté de notre Dieu, à la justice de notre Dieu, à la puissance de notre Dieu, tous les hommages qui leur sont dus.
(…) ce feu éternel, ce feu de l'enfer, ou si vous voulez, ce feu de l'autre vie, doit éteindre en celle-ci un feu qui nous dévore et qui nous perd, c'est le feu de nos passions déréglées; et en allumer un autre, qui est celui d'une charité agissante, et d'un saint zèle pour le règlement et le bon ordre de toute notre conduite. Conséquence fondée sur deux principes. L'un est l’amour de nous-mêmes ; je dis cet amour raisonnable, cet amour chrétien que Dieu même nous commande, et qui nous oblige à nous préserver, autant qu'il nous est possible, et par les moyens que nous en avons, du plus grand de tous les malheurs. L'autre est, selon les maximes de notre foi, l'indispensable nécessité d'une vie sainte, c'est-à-dire d'une vie ou innocente ou pénitente, pour se garantir de ce souverain mal, et pour ne pas tomber dans l'état de cette affreuse damnation.
Et en effet, pour peu que nous nous aimions nous-mêmes, comme il nous est ordonné de nous aimer, que devons-nous craindre davantage, et que devons-nous éviter avec plus de soin que la perte entière de nous-mêmes, et une perte irréparable ?
(…) Or il n'y a, vous le savez, point d'autre voie pour cela que la fuite du péché, que le renoncement au monde, que le service de Dieu, que l'observation de la loi de Dieu, que tous ces exercices du christianisme qui nous sanctifient devant Dieu, et qui nous entretiennent dans la grâce de Dieu.(…)Perfection des motifs de l’amour de Dieu
Il est vrai, se retirer du vice, et après de longs égarements revenir à Dieu par un pur amour de Dieu ; s'adonner à la pratique de ses devoirs et les observer en vue de la récompense qui y est promise, et qui n'est autre que Dieu même, ce sont des motifs supérieurs, et beaucoup plus dignes de l'esprit chrétien. Il est à souhaiter que toutes les âmes se portent là, et l'on doit, autant qu'on le peut, les y élever. Mais il n'est pas moins vrai que tous ne sont pas également disposés à prendre ces sentiments, ni à se laisser toucher de ces vues toutes pures et toutes divines. Il y a des justes, des fervents, des parfaits, qui, comme des enfants dans la maison du Père céleste, cherchent à lui plaire, à le posséder, pour le posséder et pour l'aimer, et qui, par là même, sans cesse excités et animés, s'attachent inviolablement à ses divins préceptes, et se font une loi étroite de ses moindres volontés. Ils le servent par une affection toute filiale.
Mais aussi il y a des lâches, des mondains, des pécheurs, de ces hommes terrestres et tout matériels, dont a parlé saint Paul, qui ne sont guère susceptibles d'autre impression que de la crainte des jugements et des vengeances de Dieu. Parlez-leur des grandeurs de Dieu, des perfections de Dieu, des bienfaits de Dieu, des récompenses mêmes de Dieu, à peine vous écouteront-ils ; et s'ils vous donnent quelque attention, tout ce que vous leur ferez entendre leur frappera l'oreille sans descendre jusque dans leur cœur. Pourquoi ? parce que leur cœur, obscurci des épaisses ténèbres que les passions y ont répandues, et rempli des idées les plus grossières, est devenu tout animal, selon l'expression de l'Apôtre. Or l'homme animal, ajoute ce même docteur des Gentils, ne comprend point les mystères de Dieu, ou ne les comprend qu'autant qu'ils ont de rapport à ses sens (…)
Voulez-vous donc les remuer, les exciter, les réveiller de ce sommeil léthargique où ils demeurent profondément assoupis? Faites retentir autour d'eux les tonnerres de la colère divine, et ce foudroyant arrêt qui les doit condamner à des flammes éternelles : Allez au feu..
Enfin conjurez-les d'avoir pitié de leur âme(…)
C'est ainsi que tant de mondains et de libertins ont été retirés de leurs voies corrompues, et qu'ils sont rentrés dans la voie du salut.(…)
Et il ne faut pas penser que cette vue d'un malheur éternel ne convienne qu'aux âmes engagées dans le crime, ou à ces âmes faibles et encore toutes couvertes, si j'ose ainsi m'exprimer de la poussière du monde et des impuretés de leurs inclinations vicieuses. Je l'ai dit et je le répète, c'est une vue convenable à tous les degrés de perfection ; et quand je pourrais, avec quelque apparence, me flatter d'être aux premiers rangs des élus de Dieu, alors même ne cesserais-je point, pour me soutenir, pour me fortifier, pour m'élever, de me remettre dans l'esprit et de méditer les vengeances infinies de Dieu; car je regarderais comme une présomption de croire, ainsi que se le persuadent quelques âmes chrétiennes, que ce serait, en quelque manière, dégénérer de l'état parfait en m'arrêtant à de pareilles considérations (…)
Nous ne sommes pas plus saints que l'était saint Jérôme, qui, dans le souvenir de l'éternité, se frappait sans cesse la poitrine pour attirer sur lui les miséricordes du Seigneur, et pour détourner les coups redoutables de sa colère(…)
Voilà, encore une fois, à quoi je m'attache, et sur quoi je fixe mes regards : car je m'imagine que je vois cette éternité, que je marche dans cette éternité, et que je n'en découvre jamais le bout. Je m'imagine que j'en suis enveloppé et investi de toutes parts; que si je m'élève, si je descends, de quelque côté que je me tourne, je trouve toujours cette éternité; qu'après mille efforts pour m'y avancer, je n'y ai pas fait le moindre progrès, et que c'est toujours l'éternité. Je m'imagine qu'après les plus longues révolutions des temps je vois toujours au milieu de cette éternité une âme réprouvée, dans le même état, dans la même désolation, dans les mêmes transports ; et me substituant moi-même en esprit à la place de cette âme, je m'imagine que dans ce supplice éternel je me sens toujours dévoré de ce feu que rien n'éteint, que je répands toujours ces pleurs qui rien ne tarit, que je suis toujours rongé de ce ver qui ne meurt point, que j'exprime toujours mon désespoir par ces grincements de dents et ces cris lamentables qui ne peuvent fléchir le cœur de Dieu. Cette idée de moi-même, cette peinture me saisit et m'épouvante ; mon corps même en frémit, et j'éprouve tout ce qu'éprouvait le Prophète royal lorsqu'il disait a Dieu : Seigneur, pénétrez ma chair de votre crainte, et de la crainte de vos jugements
(..) On pense assez, et l'on ne pense même que trop, à tout ce qui pourra arriver dans le cours des années que l'on se promet de passer sur la terre. On n'est que trop attentif aux revers, aux contretemps, aux disgrâces, aux pertes qui peuvent déranger les affaires et renverser la fortune. On n'examine que trop ce que l'on deviendra dans la suite de l'âge, et l'on ne prend sur cela que trop de précautions et trop de mesures. A force même de s'en occuper et de s'en remplir l'esprit, on se forme mille chimères dont on se laisse vainement agiter ; et l'on se charge de mille soins réels et pénibles, pour prévenir des maux imaginaires qu'une timide prévoyance fait envisager. Cependant on vit dans le plus profond oubli de son sort éternel: on y demeure tranquille et sans inquiétude ; la vie coule, l'éternité s'approche ; et, comme ces victimes qui allaient les yeux bandés à l'autel où elles devaient être immolées, on va se jeter en aveugle dans le précipice(…)
Tels sont mes sentiments, et puissent-ils ne s'effacer jamais de mon esprit ! Si l'impie les traite de faiblesse et de timidité superstitieuse, je préférerai ma faiblesse à toute sa prétendue force. Il rira de ma simplicité, et moi j'aurai pitié de sa folie, lorsqu'il ne craint point ce qu'ont craint tant d'hommes mille fois plus sages et mieux instruits que lui ; de son insensibilité, lorsqu'il prend si peu de part a une affaire qui le touche de si près, et qu'il s'intéresse si peu au plus grand de tous ses intérêts; de sa témérité et de son audace, lorsqu'il s'expose si légèrement et de sang-froid à une éternelle réprobation, et qu'il n'a point de peine à en courir tout le risque. S'il s'endurcit aux avis charitables que je voudrais sur cela lui donner, et si, malgré les plus fortes remontrances, il demeure dans son obstination, à l'exemple de ces anges qui se retirèrent de Babylone, je l'abandonnerai à son sens réprouvé, et je penserai à moi-même. Je lèverai les mains vers Dieu, et je lui ferai la même prière que le Prophète …. Ne perdez pas, Seigneur, ne perdez pas mon âme avec les impies. Sauvez-la par votre miséricorde. Aidez-moi à la sauver moi-même par mes œuvres. C'est une âme immortelle, c'est mon unique (…) Le succès en dépend de Dieu et de nous. Dieu de sa part ne nous manquera pas; ne manquons pas à sa grâce, et disposons-nous par la parfaite observation de ses commandements à recevoir sa gloire dans l'éternité bienheureuse(…)
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Extraits de Bourdaloue a écrit:
Pourquoi disons-nous que Dieu est souverainement bon (c'est la belle remarque de Tertullien), sinon parce qu'il a souverainement le mal en horreur? Et qu'est-ce à l'égard de Dieu que d'avoir une souveraine horreur pour le mal, si ce n'est de le poursuivre sans relâche, et d'en être l'implacable vengeur (…) comprenez ce que c'est qu'un Dieu bon. C'est un Dieu opposé essentiellement au péché, un Dieu toujours ennemi du péché, et, par une suite nécessaire, un Dieu persécuteur éternel du péché. Tellement qu'il ne serait plus Dieu, s'il y avait un instant où il n'agît pas contre le péché pour le condamner et pour le punir, parce que ce ne serait plus un Dieu bon, de la manière qu'il l'est et qu'il le doit être.
(…) Ah ! s'écrie saint Grégoire, l'homme est toujours subtil à tirer des conséquences de la bonté de Dieu contre Dieu même : Et moi je réponds, pourquoi donc l'Écriture nous fait-elle entendre tant de menaces et tant d'arrêts foudroyants, qui condamnent le pécheur à cette affreuse éternité de supplice, s'il y a lieu de penser qu'il ne doive pas toujours souffrir? Chose étrange! Ajoute ce grand pape, nous nous mettons en peine de garantir la bonté de Dieu, et nous ne craignons pas de le faire auteur du mensonge pour sauver sa miséricorde, comme s'il était moins véritable dans ses paroles que favorable dans ses jugements (…)
…la peine des damnés subsistant dans toute son éternité, la justice de Dieu subsiste dans toute son intégrité.
Croyons, et, dans un saint tremblement, rendons à la bonté de notre Dieu, à la justice de notre Dieu, à la puissance de notre Dieu, tous les hommages qui leur sont dus.
…Que devons-nous craindre davantage, et que devons-nous éviter avec plus de soin que la perte entière de nous-mêmes, et une perte irréparable ?
Il y a des justes, des fervents, des parfaits, qui, comme des enfants dans la maison du Père céleste, cherchent à lui plaire, à le posséder, pour le posséder et pour l'aimer, et qui, par là même, sans cesse excités et animés, s'attachent inviolablement à ses divins préceptes, et se font une loi étroite de ses moindres volontés. Ils le servent par une affection toute filiale.
Mais aussi il y a des lâches, des mondains, des pécheurs, de ces hommes terrestres et tout matériels, dont a parlé saint Paul, qui ne sont guère susceptibles d'autre impression que de la crainte des jugements et des vengeances de Dieu. Parlez-leur des grandeurs de Dieu, des perfections de Dieu, des bienfaits de Dieu, des récompenses mêmes de Dieu, à peine vous écouteront-ils; et s'ils vous donnent quelque attention, tout ce que vous leur ferez entendre leur frappera l'oreille sans descendre jusque dans leur cœur. Pourquoi ? Parce que leur cœur, obscurci des épaisses ténèbres que les passions y ont répandues, et rempli des idées les plus grossières, est devenu tout animal, selon l'expression de l'Apôtre. Or l'homme animal, ajoute ce même docteur des Gentils, ne comprend point les mystères de Dieu, ou ne les comprend qu'autant qu'ils ont de rapport à ses sens (…)
…Nous ne sommes pas plus saints que l'était saint Jérôme, qui, dans le souvenir de l'éternité, se frappait sans cesse la poitrine pour attirer sur lui les miséricordes du Seigneur, et pour détourner les coups redoutables de sa colère (…)
….Ne perdez pas, Seigneur, ne perdez pas mon âme avec les impies. Sauvez-la par votre miséricorde. Aidez-moi à la sauver moi-même par mes œuvres. C'est une âme immortelle, c'est mon unique (…) Le succès en dépend de Dieu et de nous. Dieu de sa part ne nous manquera pas; ne manquons pas à sa grâce, et disposons-nous par la parfaite observation de ses commandements à recevoir sa gloire dans l'éternité bienheureuse (…)
.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Sermon pour le 21e Dimanche.
Le pardon des injures.
Le pardon des injures.
Alors son maître le fit appeler, et lui dit : Méchant serviteur, je vous ai remis tout ce que vous me deviez, parce que vous m'en avez prié. Ne fallait-il donc pas avoir pitié de votre compagnon, comme j'ai eu pitié de vous? Sur cela, le maître indigné le livra aux exécuteurs de la justice.
Extraits de Bourdaloue a écrit:e l'avoue, Chrétiens : le pardon des injures est difficile, et il n'y a rien dans le cœur de l'homme qui n'y répugne. C'est ce que le christianisme a de plus sublime, de plus héroïque, de plus parfait. Pardonner sincèrement et de bonne foi, pardonner pleinement et sans réserve, voilà, dis-je, à en juger par les sentiments naturels, la plus rude épreuve de la charité et l'un des plus grands efforts de la religion. Mais après tout, je soutiens que Dieu a droit de l'exiger de nous, et je dis qu'il l'exige en effet: comment cela? comme maître, comme père, comme modèle, comme juge. Comme maître, par la loi qu'il nous impose; comme père, par les biens dont il nous comble; comme modèle, par les exemples qu'il nous donne; et comme juge, par le pardon qu'il nous promet. (…)
Pardonner les injures et aimer ses ennemis, c'est un précepte, mes chers auditeurs, fondé sur toutes les lois divines, et aussi ancien que la vraie religion. Dans la loi de nature, dans la loi écrite, dans la loi de grâce, cet amour des ennemis a été d'une obligation indispensable ; et quand on disait aux Juifs : Vous aimerez votre prochain et vous haïrez votre ennemi, ce n'était pas Dieu qui le disait, remarque saint Augustin, mais ceux qui interprétaient mal la loi de Dieu. Ce n'était pas une tradition de Moïse, mais une tradition des pharisiens(…)
(…)Jésus-Christ n'a donc point établi une loi nouvelle, lorsque, usant de toute sa puissance de législateur, il nous a dit : Aimez vos ennemis, et pardonnez-leur ; mais il a seulement renouvelé cette loi, qui était comme effacée du souvenir des hommes; il a seulement expliqué cette loi, qui était comme obscurcie par l'ignorance et les grossières erreurs des hommes ; il a seulement autorisé cette loi, qui était comme abolie par la corruption où vivaient la plupart des hommes. Car, si vous n'aimez que ceux qui vous aiment, poursuivait le Sauveur du monde, que faites-vous en cela plus que les publicains? et si vous n'avez de la charité que pour vos frères, qu'y a-t-il là qui vous relève au-dessus des païens? Toute votre charité alors ne peut être digne de Dieu, ni telle que Dieu la demande, puisque ce n'est point une charité surnaturelle mais une charité purement humaine. Et voilà pourquoi, concluait le Fils de Dieu, il vous est ordonné d'aimer jusques à vos ennemis, de remettre à vos ennemis les offenses que vous pensez en avoir reçues, de conserver la paix avec vos ennemis, et même de la rechercher.(…)
(…)Dieu a un droit incontestable de nous y assujettir, parce qu'il est le maître, et par conséquent, que nous sommes indispensablement obligés de nous y soumettre et d'y obéir, pour reconnaître là-dessus , aussi bien que sur tout le reste, notre dépendance, et pour rendre à son souverain pouvoir l’hommage que nous lui devons. Précepte appuyé sur les raisons les plus solides et les plus sensibles ; mais quand il s'agit de l'autorité de Dieu, et de l'absolue soumission qu'il attend de nous en qualité de souverain être, ce serait en quelque sorte lui faire outrage que de vouloir traiter avec lui par raison. Il commande, c'est assez(…)
(…)Dieu veut que vous pardonniez, et que vous pardonniez de cœur ; c'est-à-dire que vous ne vous contentiez pas de garder certains dehors et de ne vous porter à nul éclat, mais que vous bannissiez de votre cœur toute animosité volontaire et tout ressentiment.(…)
(…)Mais c'est un effort au-dessus de la nature, aussi n'est-ce pas selon la nature qu'on l'exige de vous, mais selon la grâce, qui ne vous manquera pas, et qui est assez puissante pour vous soutenir. (…)
Mais ce n'est point, après tout, par une obéissance pure et par une soumission forcée qu'il prétend nous engager à l'observation de sa loi. Il veut que la reconnaissance y ait part; et le pardon qu'il sollicite pour le prochain, c'est encore plus comme bienfaiteur et comme père qu'il s'y intéresse, que comme législateur et comme maître. S'il nous commandait d'aimer nos ennemis et de leur pardonner pour eux-mêmes, son précepte pourrait nous paraître dur et rigoureux. Car, il est vrai qu'à considérer précisément la personne d'un ennemi qui s'élève contre nous, nous n'y trouvons rien que de choquant, rien qui ne nous pique et qui ne soit capable d'exciter le fiel le plus amer. Mais que fait Dieu? il se présente à vous, mon cher auditeur; et détournant vos yeux d'un objet qui les blesse, il vous ordonne de l'envisager lui-même. Il ne vous dit pas : C'est pour celui-ci, c'est pour celle-là que je vous enjoins de leur pardonner ; mais il vous dit : C'est pour moi. Il ne vous dit pas : Pardonnez-leur, parce qu'ils le méritent; mais il vous dit : Pardonnez-leur, parce que je l'ai bien mérité moi-même. Il ne vous dit pas : Ayez égard à ce que vous leur devez; mais il vous dit : Ayez égard à ce qui m'est dû et à ce que je leur ai cédé. (…)
Or, Chrétiens, ce n'est point au nom d'un père temporel, ni au nom d'un homme comme vous, c'est au nom du Père céleste, au nom d'un Dieu créateur, d'un Dieu rédempteur, que je m'adresse à vous. Combien de fois peut-être, vous retraçant l'idée de ses bienfaits, vous êtes-vous écriés comme David, dans un renouvellement de piété et de zèle : Que vous donnerai-je, ô mon Dieu, pour tout ce que vous m'avez donné; et que ferai-je pour vous, Seigneur, après tout ce que vous avez fait pour moi? Combien de fois avez-vous désiré l'occasion où vous pussiez, par une marque solide, lui témoigner votre amour? N'en cherchez point d'autre que celle-ci; et dès que vous pardonnerez pour Dieu, comptez avec assurance que vous aimez Dieu. (…)
(…)La plus grande consolation que je puisse avoir sur la terre est de pouvoir croire, avec toute la certitude possible en cette vie, que j'aime Dieu, et que je l'aime, non d'un amour suspect et apparent, mais d'un amour réel et véritable : car autant que je suis certain de mon amour pour lui, autant suis-je certain de son amour pour moi et de sa grâce. Or, de tous les témoignages que je puis là-dessus souhaiter, il n'en est point de plus sur que de donner à un ennemi : pourquoi? parce qu'il n'y a que l'amour de Dieu, et le plus pur amour, qui puisse me déterminer à ce pardon. Ce n'est point la nature qui m'y porte, puisqu'il la combat directement ; ce n'est point le monde, puisque le monde a des maximes toutes contraires.
D'où il s'ensuit que Dieu seul en est le motif, que le seul amour de Dieu en est le principe; et qu'en disant à Dieu : Je vous aime, Seigneur, et pour preuve que je vous aime, je remets de bonne foi telle injure qui m'a été faite ; je suis, en parlant de la sorte, à couvert de toute illusion.(…)
(…) le mal est que, sans regarder jamais Dieu dans l'homme, nous ne regardons que l'homme même ; et de là ces longues et vaines déclamations sur l'indignité du traitement qu'on a reçu, sur l'audace de l'un, sur la perfidie de l'autre, sur mille sujets qu'on défigure souvent, qu'on exagère, qu'on représente avec les traits les plus noirs. (…)
Allons plus avant ; et si, pour nous exciter encore et nous régler, il nous faut un grand exemple: Dieu lui-même, comme modèle, nous en servira, et nous convaincra par la vue de ses miséricordes envers nous et par la douceur de sa conduite ; car, nous avons beau nous plaindre et relever nos droits, il n'y a jamais eu, ni jamais il n'y aura de réplique à l'argument que Dieu nous fait aujourd'hui sous la figure de ce maître de l'Evangile : J'aime mes ennemis, et je leur pardonne : je vous ai vous-même aimé ; et combien de fois vous ai-je pardonné? ne devez-vous donc pas m'imiter en cela, et pardonner comme moi? Raison qui nous ferme la bouche, et qui nous accable du poids de son autorité(…)
(…)nous sommes piqués d'une injure, et quelquefois nous nous en prenons à Dieu même : mais combien lui-même en souffre-t-il tous les jours et en a-t-il souffert? Nous ne pouvons supporter qu'un homme se soit attaqué à nous et qu'il nous ait outragés ; mais Dieu nous fait voir des millions d'hommes, ou plutôt tous les hommes ensemble, qui se soulèvent contre lui et qui le déshonorent. Nous avons peine à digérer que tel et tel depuis si longtemps nous rendent de mauvais offices ; mais Dieu nous répond, que depuis qu'il a créé le monde, le monde n'a pas un moment cessé de l'insulter. Il nous est fâcheux d'avoir un ennemi dans cette famille, dans cette compagnie ; mais Dieu en a par toute la terre.(…)
(…)Mais , dit saint Chrysostome, à regarder les inimitiés des hommes dans leur principe, qu'elles sont frivoles ! et qu'y a-t-il de comparable à tout ce qui s'est fait et à tout ce qui se fait contre notre Dieu, aux impiétés, aux sacrilèges, aux imprécations et aux blasphèmes ; aux profanations de ses autels, de son nom, de ses plus sacrés mystères; aux révoltes perpétuelles et les plus formelles contre sa loi? Mais encore qu'est-ce que ce souverain Maître, créateur de l'univers; et qu'est-ce que de faibles créatures, qu'il a formées de sa main et tirées du néant ? Si donc, vils esclaves, nous nous récrions si hautement en toutes rencontres et sur les moindres blessures, n'a-t-il pas droit de nous confondre par son exemple, et de nous dire : Moi, la grandeur même, moi digne de tous les hommages, mais exposé à toute l'insolence des pécheurs, et à tous les excès de leurs passions les plus brutales, j'oublie en quelque sorte pour eux, et la supériorité de mon être, et l'innombrable multitude, la grièveté, l'énormité de leurs offenses. Moi-même je leur tends les bras pour les rappeler, moi-même je leur ouvre le sein de ma miséricorde pour les y recueillir, moi-même je les préviens de ma grâce, et leur communique mes plus riches dons. C'est ainsi que j'en use, tout Dieu que je suis. Mais vous, ennemis irréconciliables, Vous n'écoutez que la vengeance qui vous anime et la colère qui vous transporte !
Malheur à nous, mes Frères, si nous ne nous conformons pas à ce divin exemplaire! Le péché originel de l'homme a été de vouloir être semblable à Dieu ; mais ici Dieu non-seulement nous permet, mais nous conseille, mais nous exhorte, mais nous ordonne d'être parfaits comme lui. Comment accorder ensemble l'un et l'autre? Rien de plus aisé, répond saint Augustin expliquant cette apparente contradiction. Le premier péché de l'homme a été de vouloir être semblable à Dieu en ce qui regarde la prééminence de cet Etre suprême, c'est-à-dire qu'il a souhaité d'être grand comme Dieu, éclairé comme Dieu, indépendant comme Dieu. Or, c'était là un orgueil insupportable et une criminelle présomption. Mais la perfection est de ressembler à Dieu par l'imitation de sa sainteté et de ses vertus ; je veux dire d'être charitable comme Dieu, miséricordieux comme Dieu, patient comme Dieu (…)
Mais peut-être, Chrétiens, doutez-vous de ce pardon de la part de Dieu, et par rapport à vous. Car, qui sait s'il est digne d'amour ou de haine, et qui peut être certain de la rémission de ses péchés ? Eh bien ! si vous craignez de ne l'avoir pas encore obtenue, je viens vous enseigner le moyen infaillible de l'obtenir, en vous faisant considérer Dieu comme juge; et s'il y a une vérité qui doive faire impression sur vos cœurs, n'est-ce pas celle-ci, par où je conclus cette (…) Il est vrai, telle est en cette vie notre triste sort, et l'affreuse incertitude où nous nous trouvons : nous savons que nous avons péché, et nous ne savons si Dieu nous a pardonné.(…)
(..) Ah ! mon Frère, disait Saint Jean Climaque, pensez-vous et puis-je penser que mes péchés devant Dieu soient effacés ? Si des saints étaient pénétrés de ce sentiment, quel doit être celui de tant de pécheurs? Or dans le sujet que je traite, j'ai de quoi les tirer de cette incertitude qui les trouble ; j'ai de quoi leur donner l'assurance la plus solide et la plus ferme, puisqu'elle est fondée sur la parole même de Dieu, sur l'oracle de la vérité éternelle. Car c'est Dieu qui nous l'a dit; et s'il nous ordonne de pardonner, c'est en ajoutant à son précepte cette promesse irrévocable et si engageante : Je vous pardonnerai moi-même (…) En deux mots, quel fonds d'espérance et quel motif pour animer notre charité! Il n'y a là ni ambiguïté ni équivoque, il n'y a point de restriction ni d'exception : tout y est intelligible, tout y est précis et formel. Remarquez-le bien : Dieu par la bouche de son Fils, ne nous dit pas : Pardonnez, et je vous pardonnerai certains péchés; mais de quelque nature qu'ils puissent être, vos péchés vous seront remis(…)
Non, Chrétiens, tant que vous serez inflexibles pour vos frères, n'espérez pas que Dieu jamais se laisse fléchir en votre faveur. Vous vous prosternerez à ses pieds, vous gémirez devant lui, vous vous frapperez la poitrine et vous éclaterez en soupirs pour le toucher : mais la même dureté que vous avez à l'égard d'un homme comme vous, il l'aura envers vous ; et malgré vos gémissements et vos soupirs, n'attendez de lui d'autre réponse que ce foudroyant anathème : Point de miséricorde à celui qui n'a pas fait miséricorde (…)
Chose étrange, mes chers auditeurs ! Nous sommes chrétiens , ou nous prétendons l'être. En vertu de la profession que nous en faisons, nous n'avons pas une fois recours à Dieu pour implorer sa grâce, que ce ne soit au nom de Jésus-Christ, comme frères de Jésus-Christ, comme membres de Jésus-Christ. Et cependant nous prenons des sentiments tout opposés à ceux de Jésus-Christ, nous tenons une conduite toute contraire à la sienne, nous le désavouons et nous le déshonorons , en désavouant son Evangile et déshonorant le christianisme, où par une vocation particulière il nous a spécialement appelés.
De ne vouloir pas pardonner, c'est se rendre coupable envers Dieu, coupable envers Jésus-Christ Fils de Dieu, et je dis encore coupable envers le prochain substitué en la place de Dieu : troisième raison qui engage Dieu à nous juger nous-mêmes selon toute la sévérité de sa justice et sans indulgence. Car, quel que puisse être cet homme contre qui vous vous tournez et pour qui vous vous montrez si intraitable, il est revêtu de tous les droits de Dieu, et c'est de lui que Dieu vous a dit ce que l'apôtre saint Paul disait à son disciple Philémon au sujet d'Onésime : Recevez-le comme moi-même, et usez-en avec lui comme vous en devez user avec moi-même(…)
Allez à la face de ce Dieu de majesté vous démentir vous-mêmes, vous condamner vous-mêmes, et vous rendre enfin coupables envers vous-mêmes. C'est la dernière preuve par où je finis, et dont vous devez être touchés. Nous disons tous les jours à Dieu : Seigneur, pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés (..) Nous le disons; mais si nous comprenons le sens de cette prière, et que nous ayons l'âme ulcérée d'un ressentiment qui la pique, et qu'elle n'ait pas encore guéri, cette prière de sanctification devient pour nous une prière d'abomination ; et je soutiens que nous ne la devons proférer qu'en tremblant; que nous la devons regarder comme une sentence de mort, et comme l'anathème le plus terrible qui puisse tomber sur nos têtes.
Et en effet, n'est-ce pas ou nous démentir nous-mêmes, ou nous condamner nous-mêmes? Nous démentir nous-mêmes, si nous pensons d'une façon et que nous parlions de l'autre; si, ne voulant pas sincèrement et de bonne foi que Dieu mette cette égalité parfaite entre son jugement et le nôtre, nous osons néanmoins lui tenir un langage tout opposé. Nous condamner nous-mêmes, si, consentant à ce que Dieu ne nous pardonne qu'autant que nous pardonnerons, nous ne pardonnons pas ; et si, pour rentrer en grâce auprès de lui, nous ne remplissons pas une condition sans laquelle nous semblons conséquemment lui demander qu'il nous réprouve.
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Extraits de Bourdaloue a écrit:
.
Je l'avoue, Chrétiens: le pardon des injures est difficile, et il n'y a rien dans le cœur de l'homme qui n'y répugne. C'est ce que le christianisme a de plus sublime, de plus héroïque, de plus parfait (…)
(…) quand on disait aux Juifs: Vous aimerez votre prochain et vous haïrez votre ennemi, ce n'était pas Dieu qui le disait, remarque saint Augustin, mais ceux qui interprétaient mal la loi de Dieu. Ce n'était pas une tradition de Moïse, mais une tradition des pharisiens(…)
(…)Dieu veut que vous pardonniez, et que vous pardonniez de cœur (…) que vous bannissiez de votre cœur toute animosité volontaire et tout ressentiment. (…)
(…) La plus grande consolation que je puisse avoir sur la terre est de pouvoir croire, avec toute la certitude possible en cette vie, que j'aime Dieu, et que je l'aime, non d'un amour suspect et apparent, mais d'un amour réel et véritable: car autant que je suis certain de mon amour pour lui, autant suis-je certain de son amour pour moi et de sa grâce. Or, de tous les témoignages que je puis là-dessus souhaiter, il n'en est point de plus sûr que de donner à un ennemi : pourquoi ? Parce qu'il n'y a que l'amour de Dieu, et le plus pur amour, qui puisse me déterminer à ce pardon.
(…) il n'y a jamais eu, ni jamais il n'y aura de réplique à l'argument que Dieu nous fait aujourd'hui sous la figure de ce maître de l'Évangile: J'aime mes ennemis, et je leur pardonne : je vous ai vous-même aimé; et combien de fois vous ai-je pardonné ? Ne devez-vous donc pas m'imiter en cela, et pardonner comme moi ? Raison qui nous ferme la bouche, et qui nous accable du poids de son autorité (…)
…Dieu nous fait voir des millions d'hommes, ou plutôt tous les hommes ensemble, qui se soulèvent contre lui et qui le déshonorent. (…) Il nous est fâcheux d'avoir un ennemi dans cette famille, dans cette compagnie; mais Dieu en a par toute la terre.(…)
(…) saint Chrysostome: qu'y a-t-il de comparable à tout ce qui s'est fait et à tout ce qui se fait contre notre Dieu, aux impiétés, aux sacrilèges, aux imprécations et aux blasphèmes; aux profanations de ses autels, de son nom, de ses plus sacrés mystères; aux révoltes perpétuelles et les plus formelles contre sa loi ?
… Moi-même je leur tends les bras pour les rappeler, moi-même je leur ouvre le sein de ma miséricorde pour les y recueillir, moi-même je les préviens de ma grâce, et leur communique mes plus riches dons. C'est ainsi que j'en use, tout Dieu que je suis.
…Saint Augustin: (…) Le premier péché de l'homme a été de vouloir être semblable à Dieu en ce qui regarde la prééminence de cet Être suprême, c'est-à-dire qu'il a souhaité d'être grand comme Dieu, éclairé comme Dieu, indépendant comme Dieu. Or, c'était là un orgueil insupportable et une criminelle présomption. Mais la perfection est de ressembler à Dieu par l'imitation de sa sainteté et de ses vertus; je veux dire d'être charitable comme Dieu, miséricordieux comme Dieu, patient comme Dieu (…)
.
Dernière édition par ROBERT. le Dim 01 Nov 2015, 12:17 pm, édité 2 fois (Raison : ajout de gras + mise en forme)
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
FÊTE DE TOUS LES SAINTS.
Dieu est admirable dans ses Saints.
Dieu est admirable dans ses Saints.
Extraits de Bourdaloue a écrit:Dieu, dans tous ses ouvrages, est admirable; mais il l’est particulièrement dans ses Saints, puisque de tous les ouvrages de Dieu, un des plus merveilleux et des plus grands, ce sont les Saints. Il est admirable dans leur prédestination, il est admirable dans leur vocation, il est admirable dans toute l'économie de leur salut, il est admirable dans leur béatitude et dans leur gloire. Je dis admirable de les avoir prédestinés à son royaume éternel, admirable de les avoir appelés à la foi, admirable de les avoir sanctifiés par la grâce, admirable de les avoir éprouvés et purifiés par les souffrances; enfin, admirable d'en avoir fait des Saints et des bienheureux(…)
Il n'appartient qu'aux Saints de bien comprendre ce qu'opère en eux celui qui est l'auteur de la sainteté, et je serais téméraire, si je voulais, dans un sujet tel que celui-ci, m'en tenir à mes propres pensées, pour vous donner l'intelligence de ce qui fait le mystère de ce jour, c'est-à-dire de ce qui rend Dieu si admirable dans la personne de ses élus. Ainsi, renonçant à mes vues particulières, et profitant de celles qu'ont eues les saints, je m'attache à cette réflexion de saint Léon, pape, que je vous prie de bien comprendre, parce qu'elle renferme tout mon dessein. Ce Père explique les paroles de David que j'ai choisie pour mon texte :Dieu est admirable dans ses saints; et considérant, par rapport à nous, l'excellence de cet état de gloire où les bienheureux sont élevés, il dit que deux choses y doivent être comme les deux principaux objets de notre admiration : l'une de ce que Dieu nous a donné dans les Saints de si puissants protecteurs ; et l'autre de ce qu'il nous a proposé dans ces mêmes Saints un si parfait modèle de sainteté(…)
Non, Chrétiens, rien n'est plus digne de nos admirations que ce que la foi nous révèle dans la solennité de ce jour, quand elle nous apprend que les Saints sont devant le trône de Dieu nos protecteurs et nos intercesseurs; et l'Ange de l'école, saint Thomas, en donne trois excellentes raisons : la première regarde Dieu même, la seconde est prise des Saints bienheureux, et la troisième se rapporte à nous. Celle qui regarde Dieu même est qu'en ceci il nous découvre visiblement les trésors de sa sagesse et de sa providence; l'autre, qui se tire des Saints bienheureux, est que la gloire dont ils jouissent en est infiniment relevée ; et la dernière qui se rapporte à nous, est que nous y trouvons de très-grands avantages pour l'intérêt de notre salut. (…)
Dieu fait éclater sa providence en nous donnant les Saints pour protecteurs et pour intercesseurs. Comment cela? parce qu'il établit par là le plus bel ordre et la subordination la plus parfaite qu'il puisse y avoir entre les hommes. Je m'explique : sur la terre, les hommes dépendent les uns des autres; et cette dépendance mutuelle les tient dans la subordination(…)quoique Dieu en soit l'auteur, ces ordres sont sujets à être troublés par la malice des hommes; ceux qui y tiennent les premiers rangs ne sont pas toujours les plus dignes de les occuper ; ceux qui y commandent devraient souvent y obéir : on y voit des grands et des petits, des pauvres et des riches, des heureux et des misérables, et cela est de la providence de Dieu ; mais les petits y sont opprimés par les grands, et les grands enviés par les petits ; et c'est comme une suite infaillible de la corruption de l'homme. Il n'y a qu'un seul ordre exempt de ces imperfections, c'est celui que Dieu a formé, par sa providence, entre nous et les Saints : car outre que la grâce est le fondement de cet ordre, outre que le mérite en est la mesure, et que toute prééminence n'y est accordée qu'à la sainteté(…)
Nous n'envions point la condition des Saints qui sont au-dessus de nous, parce que nous savons qu'ils travaillent auprès de Dieu pour nous procurer le même bonheur; l'élévation de leur état n'a rien qui nous choque, parce que nous n'ignorons pas qu'ils ne souhaitent rien plus ardemment que de nous rendre aussi grands et aussi puissants qu'eux; enfin, la gloire qui fait naître communément l'orgueil dans ceux qui la possèdent, et la jalousie dans ceux qui y prétendent, a ici deux effets tout contraires ; car elle donne aux Saints des inclinations bienfaisantes pour nous, et elle nous inspire une reconnaissance affectueuse pour eux(…)
Dieu, dit ce savant prélat, ( Pierre de Cluny) avait un important dessein ; il voulait qu'entre les membres de son Eglise, qui sont les fidèles, quelque éloignés qu'ils pussent être les uns des autres, il y eût jusqu'à la fin du monde un lien de communication ; et qu'étant tous, comme ils sont, les membres vivants du même corps, unis au même chef, qui est Jésus-Christ, et animés du même esprit, qui est l'Esprit-Saint, ils eussent entre eux une correspondance qui ne put jamais être interrompue. La difficulté était de choisir un moyen pour cela : car l'Eglise se trouvant partagée en trois différents états, c'est-à-dire glorieuse et triomphante dans le ciel, militante sur la terre, et souffrante dans le purgatoire, comment pouvait-elle entretenir une si parfaite société? Ce ne pouvait être par la foi, parce que la foi, avec ses obscurités et ses nuages, n'est plus d'usage dans le ciel ; ni par l'espérance, parce que les Saints, possédant tout dans Dieu, n'espèrent plus rien. Qu'a fait Dieu? afin que ces trois Eglises eussent entre elles le commerce qu'elles devaient avoir, il les a unies par la charité, qui est une vertu commune. Et comment s'en est-il servi ? Ah ! Chrétiens, c'est ici la merveille : il a ordonné que les Saints qui sont dans le ciel prieraient pour les fidèles qui sont sur la terre, et que les fidèles qui sont sur la terre intercéderaient pour ceux qui souffrent dans le purgatoire.(…)
(…)Ainsi l'Eglise triomphante s'intéressant pour la militante, et la militante compatissant aux peines de l'Eglise souffrante, de là résulte cette harmonie divine du corps mystique de l'Eglise, je veux dire la communion des Saints, qui est un des principaux articles de notre religion(…)
(…) venons à la gloire des bienheureux mêmes. Car je prétends, en second lieu, que c'est pour en rehausser l'éclat que Dieu les a établis nos patrons et nos protecteurs. Le Prophète royal estimait qu'il était nécessaire de publier par toute la terre l'honneur que Dieu fait à ses Saints; et il était persuadé qu'il n'y avait point de motif plus efficace pour exciter dans nos cœurs le zèle de sa sainteté (…)
Sachez qu'il y a d'autres biens à rechercher que les biens du monde ; sachez que le monde n'a rien que de vil et de méprisable, en comparaison de ces biens célestes où vous devez aspirer ; et pour vous en convaincre, envisagez la gloire dont Dieu se plaît à combler ses prédestinés. Cette vue seule vous détachera et vous détrompera de tout le reste.(…)
(…)Dieu a voulu que les Saints fussent après Jésus-Christ (ne vous offensez pas de ce terme) comme nos médiateurs ; c'est qu'il a choisi les Saints pour être comme les canaux par où ses grâces découlent sur nous; c'est qu'il leur a donné un plein pouvoir pour nous protéger ; c'est qu'il accorde tout à leur intercession ; c'est qu'il ne peut, ce semble, leur résister quand ils lui parlent en notre faveur; c'est qu'il se laisse fléchir par eux, jusqu'à suspendre, et même, selon le langage du texte sacré, jusqu'à révoquer les arrêts de sa justice. (…) c'est là une des plus illustres prérogatives de la gloire des Saints.
Au reste, Chrétiens, c'est en cela même que Dieu nous doit toujours paraître admirable. Car prenez garde, s'il vous plaît, à la belle réflexion de Guillaume de Paris : Il était, dit ce Père, de la justice que les Saints fussent honorés sur la terre ; il ne suffisait pas que leur béatitude nous fût connue, si nous ne rendions à leur sainteté un culte de religion ; c'était le tribut qu'ils avaient droit d'exiger de nous : mais parce que nous sommes intéressés, et que, nous recherchant en tout, nous aurions peu pensé aux Saints, si nous n'avions su que les Saints pensaient à nous, Dieu s'est servi de notre intérêt pour leur gloire (…)
C'est pour cela qu'il a donné à chaque Saint un pouvoir spécial que les autres n'ont pas, afin de nous engager à les invoquer tous ; c'est pour cela qu'il nous inspire quelquefois plus de dévotion pour un Saint moins glorieux dans le ciel, et qu'il nous accorde par lui ce que nous n'obtiendrions pas par un autre ; c'est pour cela qu'aujourd'hui l'Eglise leur rend à tous un honneur commun.(…)
(ce) pouvoir si ample que Dieu a donné aux Saints n'est point aussi honorable pour eux qu'il est avantageux pour nous ; et quand nous célébrons leur fête, c'est plus pour nous-mêmes que pour la gloire qui leur en revient(…) : Les Saints prient pour nous : c'est un des dogmes de notre foi(…)
(…)Or cela présupposé , qui doute que les prières des Saints pour nous ne contribuent à notre salut plus que nos propres prières? Car, hélas ! Chrétiens, quelles prières faisons-nous, et ne sont-elles pas presque toujours le sujet de notre condamnation devant Dieu? pourquoi? parce que nous prions selon les désirs de notre cœur, qui sont injustes et déréglés; nous ne savons ce que nous demandons, ou plutôt nous demandons ce que nous savons nous être pernicieux, et nous ne demandons pas ce qui doit nous procurer le souverain bien. Mais les Saints, qui voient dans Dieu nos véritables besoins, ne demandent pour nous que ce qui nous est salutaire, et ce qui sert à nous sanctifier et à nous sauver; leurs prières sont efficaces, parce qu'il n'y en a pas une qui ne soit dans l'ordre des décrets de Dieu, et conforme à ses desseins. (…)
Combien de fois se sont-ils présentés pour nous devant le trône de Dieu, et combien de fois ont-ils détourné les foudres du ciel prêts à tomber sur nos têtes? Voilà ce qui les occupe : au milieu de leurs triomphes, ils pensent à nos misères; ils ne sont pas comme ces bienheureux du siècle que la fortune a élevés, et qui ne connaissent plus ceux qu'ils ont laissés derrière eux : leur gloire les unit à Dieu , mais elle ne les détache pas de nous; au contraire, elle ne les rend encore que plus charitables envers nous, que plus vigilants et que plus ardents(…)
La fête d'un martyr, disait saint Bernard, est devenue, par la corruption de nos mœurs, une fête toute mondaine. On honore le précurseur de Jésus-Christ, c'est-à-dire le plus austère et le plus abstinent des hommes, par des intempérances et des excès.( Voilà ce qu’est la Saint Jean au Québec)
(…)nous ne rougissions pas de leur demander ce qui va à la destruction et à l'anéantissement de toutes les vertus. Je serais infini, si je voulais m'étendre sur ce point; ne parlons pas même de ces prières mondaines et intéressées qu'on fait aux Saints pour des biens tout profanes, tels que sont les richesses et les honneurs du siècle, sans leur demander jamais d'autres biens qui regardent notre avancement dans les vertus chrétiennes, et la sanctification de nos âmes. (…)
Mais s'agit-il du salut et de tout ce qui y peut contribuer; s'agit-il de détruire une habitude vicieuse, et de renoncer à un engagement criminel ; s'agit-il de se préserver des pièges du monde et de sa corruption ; s'agit-il de vaincre une passion qui nous domine, de dompter la chair qui se révolte, de surmonter une tentation à laquelle nous n'avons que trop de fois succombé? c'est alors que le crédit des Saints nous est absolument inconnu, ou que nous agissons au moins comme s'il nous était absolument inconnu, parce que nous craignons qu'il ne fut trop efficace.(…)
Le grand abus de l'invocation des Saints, dans les prières même en apparence les plus religieuses, c'est que nous voulons qu'ils demandent à Dieu pour nous ce que Dieu, en conséquence de ses décrets éternels, qu'il ne changera jamais, ne peut nous accorder; ce que Dieu, suivant les règles de sa sagesse, ne veut pas nous accorder, et ce qu'en effet il n'est pas à propos qu'il nous accorde. Nous invoquons les Saints; et abusant de l'avantage que nous avons d'être, pour ainsi dire, sous leur sauvegarde, nous prétendons vivre sans soin, sans vigilance, sans attention sur nous-mêmes. Nous invoquons les Saints; et par une fausse confiance en leur secours, nous prétendons que, pour l'accomplissement de nos vœux et pour le succès de notre prière, il suffise de les avoir invoqués.(…)
Nous invoquons les Saints, et en leur demandant l'esprit de pénitence, nous prétendons qu'il ne nous porte à rien qui nous gène, à rien qui nous coûte, à rien qui nous mortifie. Nous invoquons les Saints ; et en leur demandant la grâce de notre conversion, nous prétendons que cette conversion chimérique ne nous engage à nulle avance de notre part, ni à nulle violence; que nos liens se rompent d'eux-mêmes comme saint Augustin, avant qu'il se fut détaché de ses profanes engagements, demandait la continence, et souhaitait secrètement et au fond de l'âme de n'être pas exaucé ?
(…) si nous considérons bien l'exemple des Saints, il n'est presque pas possible qu'il n'opère en nous trois merveilleux effets ; je veux dire qu'il ne nous persuade la sainteté, qu'il ne nous adoucisse la pratique de la sainteté, et qu'il ne nous ôte tout prétexte pour nous défendre d'embrasser la sainteté. D'où je conclus qu'il nous réduit à une heureuse nécessité d'être Saints par imitation, comme les Saints l'ont été par devoir et par esprit de religion. Et voilà en quoi je dis que Dieu est admirable de nous avoir donné les Saints pour modèles (…)
(…)Comment donc la vie d'un Saint nous persuade-t-elle? En nous faisant comprendre, d'une simple vue, toute la perfection et tout le mérite de la sainteté. Qu'est-ce qu'un Saint? Un Saint, répond Guillaume de Paris, c'est une idée réelle, visible, palpable et substantielle de toute la perfection évangélique. Et quand Dieu nous met un Saint devant les yeux, que nous dit-il? (…) Regarde, Chrétien, ce portrait vivant et animé : voilà ce que tu dois être, et sur quoi je veux que tu te formes; c'est dans l'exemple de ce prédestiné et de ce Saint que tu apprendras à observer ma loi, à accomplir la justice, à garder la charité, à satisfaire aux devoirs de la religion, à régler toute la conduite de ta vie (…) Cet exemple t'instruira de ce que tu dois à ton Dieu, et de ce que tu dois à ton prochain ; comment il faut user des biens de la terre, et comment il faut s'en abstenir(…)
(…)leur vie nous parle, et nous explique toute la loi de Dieu : comment? par les vertus dont elle a été ornée; et ce que nous aurions peine à concevoir dans la loi même, ce qui nous paraîtrait obscur dans les livres, ce que toutes les paroles des hommes ne nous développeraient qu'imparfaitement, nous est mis sous les yeux, et clairement exprimé dans l'exemple de ces élus de Dieu ; de sorte que les plus grossiers en sont instruits(…)Or il n'est pas possible de voir la sainteté, je dis la vraie sainteté telle qu'elle a été dans les Saints, sans en reconnaître d'abord tout le mérite, et sans lui donner notre estime. Ces excellents caractères qui lui sont propres, et en quoi consiste sa perfection, cette piété, cette humilité, ce désintéressement, ce détachement de soi-même, cet esprit de justice et de charité, cette droiture et cette bonne foi, cette règle et cette sagesse, cette constance et cette force héroïque, tout cela nous convainc malgré nous qu'il n'y a rien de plus respectable, rien de plus aimable, et par conséquent rien de plus désirable : or, nous remplir de ces sentiments à l'égard de la sainteté, n'est-ce pas nous la persuader?
Tout ce que nous pourrions lui opposer, ce serait d'être, ce semble, trop parfaite, et d'exiger trop de nous, puisque, pour nous faire saints, elle nous engage à être ennemis de nous-mêmes, jusqu'à faire à Dieu le sacrifice de notre vie.(…)
Car leur exemple, tout admirable qu'il est, nous apprend qu'ils n'ont rien fait pour Dieu que ce que font tous les jours des sujets fidèles pour le service de leur prince, et que ce devoir si éminent de sainteté n'est, après tout, qu'un devoir commun, fondé sur la première loi de la nature, qui oblige l'homme à mourir, plutôt que de trahir son Dieu et sa religion.
(Dieu) nous a donné des hommes comme nous, et de même nature que nous, qui se sont sanctifiés par toutes ces vertus ; en nous les mettant devant les yeux(…)
(…)Au lieu de ces vertus mondaines que vous affectez, et qui n'ont ni vérité ni solidité; au lieu de cette prudence de la chair qui vous aveugle, et qui est ennemie de Dieu ; au lieu de cette politique dont vous vous faites une conscience, et qui vous jette dans un abîme de péchés ; au lieu de cette science du monde que vous vantez tant, et dont tout le fruit est de vous bâtir sur la terre des fortunes périssables que la mort détruira bientôt; au lieu de tout cela, attachez-vous aux vertus chrétiennes, qui font les élus et les prédestinés. Il n'y a pas un saint dans le ciel, dont l'exemple ne soit pour vous une leçon : étudiez-les tous, et si vous voulez sanctifier votre ambition jusqu'à en faire une vertu, tâchez même à l'emporter sur eux (…)
Nous mettons la sainteté au rang des choses impossibles ; c'est par où notre libertinage voudrait se maintenir. Mais Dieu nous empêche bien aujourd'hui de nous prévaloir de cette pensée. Il est vrai que pour être saint il faut faire effort, prendre sur soi, renoncer aux sentiments naturels, fuir les plaisirs, dompter ses passions, mortifier ses sens; et le moyen, dit-on, d'en venir là, et de s'y soutenir? Ah! Chrétiens, autre merveille de la sagesse de Dieu. Car je conviens que cela surpasse les forces de la nature , je conviens qu'il n'y a rien là que de grand; mais Dieu n'est-il pas admirable de nous avoir facilité tout cela, de nous l'avoir adouci jusqu'à pouvoir dire que si sa loi est un joug, c'est un joug léger et un fardeau aisé à porter ? Or il l'a fait, en nous donnant les Saints pour exemple. Avant cet exemple des Saints , nous pouvions trembler , et notre crainte semblait raisonnable ; mais maintenant qu'on nous montre tant de martyrs, tant de vierges, tant de glorieux confesseurs, tant de pénitents qui ont marché devant nous, et qui nous ont tracé le chemin , que pouvons-nous trouver d'impossible?(…) rien n'est difficile à ceux qui aiment Dieu comme les Saints.(…)
Si nous ne sommes pas encore saints, et si même nous ne sommes rien moins que saints, souhaitons de l'être, demandons de l'être, prenons toutes les mesures nécessaires pour l'être. Car, dit le Fils de Dieu, bienheureux ceux qui sont affamés et altérés de la sainteté et de la justice(…) Pourquoi ? parce que cette faim et cette soif, parce que ce désir sincère, ardent, efficace, les fera travailler fortement et solidement à acquérir le bien qu'ils souhaitent, et qui, sans contestation, est le plus précieux de tous les biens.
JOYEUSE FÊTE DE LA TOUSSAINT A TOUS MES FRÈRES DANS LA FOI
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
FÊTE DE TOUS LES SAINTS.
Dieu est admirable dans ses Saints.Extraits de Bourdaloue a écrit:
…cette réflexion de saint Léon, pape: (…) Dieu nous a donné dans les Saints de si puissants protecteurs ; et l'autre de ce qu'il nous a proposé dans ces mêmes Saints un si parfait modèle de sainteté (…)
…l'élévation de leur état [aux Saints] n'a rien qui nous choque, parce que nous n'ignorons pas qu'ils ne souhaitent rien plus ardemment que de nous rendre aussi grands et aussi puissants qu'eux…
… [Dieu]a ordonné que les Saints qui sont dans le ciel prieraient pour les fidèles qui sont sur la terre, et que les fidèles qui sont sur la terre intercéderaient pour ceux qui souffrent dans le purgatoire.(…) la communion des Saints (…)
…Les Saints prient pour nous : c'est un des dogmes de notre foi (…)
…La fête d'un martyr, disait saint Bernard, est devenue, par la corruption de nos mœurs, une fête toute mondaine. On honore le précurseur de Jésus-Christ, c'est-à-dire le plus austère et le plus abstinent des hommes, par des intempérances et des excès.( Voilà ce qu’est la Saint Jean au Québec)
Mais s'agit-il du salut et de tout ce qui y peut contribuer (…) alors (…) le crédit des Saints nous est absolument inconnu, ou que nous agissons au moins comme s'il nous était absolument inconnu, parce que nous craignons qu'il ne fut trop efficace.(…)
…[la sainteté] nous engage à être ennemis de nous-mêmes, jusqu'à faire à Dieu le sacrifice de notre vie.(…)
… attachez-vous aux vertus chrétiennes, qui font les élus et les prédestinés. Il n'y a pas un saint dans le ciel, dont l'exemple ne soit pour vous une leçon : étudiez-les tous, et si vous voulez sanctifier votre ambition jusqu'à en faire une vertu, tâchez même à l'emporter sur eux (…)
… maintenant qu'on nous montre tant de martyrs, tant de vierges, tant de glorieux confesseurs, tant de pénitents qui ont marché devant nous, et qui nous ont tracé le chemin, que pouvons-nous trouver d'impossible ?(…) rien n'est difficile à ceux qui aiment Dieu comme les Saints.(…)JOYEUSE FÊTE DE LA TOUSSAINT A TOUS MES FRÈRES DANS LA FOI
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Sermon sur l’ivraie et le bon grain
XXIV après la Pentecôte
( Vème après l’Épiphanie, dimanche transféré )
XXIV après la Pentecôte
( Vème après l’Épiphanie, dimanche transféré )
Extraits de Bourdaloue a écrit:A entendre parler l'Écriture, on dirait, Chrétiens, que Dieu, par une espèce de contradiction est tout à la fois avec les impies, et qu'il n'y est pas; qu'il s'éloigne d'eux, et qu'il ne s'en éloigne pas; qu'il les prive de sa présence, et qu'il ne les en prive pas. Car voyez comment il s'exprime différemment, selon la différence des caractères qu'il prend, et qu'il veut soutenir à leur égard. C'est moi, dit-il, qui remplis le ciel et la terre : et quoi que fasse le pécheur, il ne peut m'éviter, ni se dérober à mes yeux. Voilà Dieu présent aux pécheurs, pour l'observer et pour l'éclairer. Mais il dit ailleurs: Je me repens d'avoir créé l'homme, et je fais pour toujours divorce avec lui, parce qu'il est tout charnel. Voilà Dieu séparé du pécheur, pour se venger et pour le punir. (…)
Dieu donc, conclut saint Jérôme, habite même avec les réprouvés. Mais j'entends Saül au contraire invoquant Samuel, et lui témoignant sa douleur, ou, pour mieux dire, son désespoir, de ce que Dieu s'est retiré de lui ; il ne faut donc plus chercher Dieu dans la compagnie d'un réprouvé. Comment accorder tout cela? En voici le secret, qui consiste, répond le docteur angélique saint Thomas, en ce que Dieu, qui est le Saint des saints, n'est avec les pécheurs et les impies que par la nécessité de son être, et qu'il n'y est point par un choix d'affection et d'inclination. (…)
Il est avec les pécheurs par la nécessité de son être, parce que toutes ses perfections divines l'y engagent; sa sagesse, par laquelle il gouverne et maintient dans l'ordre toutes les créatures, jusqu'aux plus révoltés pécheurs; sa bonté, dont il répand les effets sur toutes les créatures, sans en excepter les pécheurs; sa toute-puissance, qui fait agir toutes les créatures, et conséquemment les pécheurs. Tous ces devoirs du Créateur, qui lient Dieu, pour ainsi dire, à la créature, sont des devoirs généraux, auxquels tous les hommes ont part, les méchants aussi bien que les bons; et c'est par la raison de ces devoirs que Dieu est inséparable des impies. Mais, comme j'ai dit, ce sont des devoirs de nécessité, dont Dieu, supposé le bienfait de la création, ne peut pas se dispenser lui-même.(…)
(…)A peine l'homme est-il tombé dans le désordre du péché, que Dieu rompt avec lui toutes les alliances, et par conséquent tous les commerces dont sa grâce avait été le lien. De sorte qu'il n'est plus avec le pécheur, en aucune de ces manières qui marquent le penchant et le discernement de son amour; c'est-à-dire qu'il n'est plus avec le pécheur, ni par l'effet d'une protection spéciale, comme il était avec son peuple dans le désert; ni par la communication de ses dons, comme il est avec tous les justes(…)
(…). A l'égard du pécheur, tout cela cesse; et c'est ce qui fait dire au Saint-Esprit que Dieu n'est plus avec les pécheurs ; et qui fait ajouter aux théologiens que si, par une supposition impossible, Dieu pouvait se dépouiller de son immensité, il demeurerait encore présent à un grand nombre de sujets à qui sa grâce l'attache ; mais qu'il cesserait d'être avec les pécheurs, parce qu'il n'aurait plus cette nécessité d'être partout et d'agir partout. D'où saint Chrysostome conclut (et la pensée de ce Père mérite d'être remarquée), que l'immensité, qui est un des plus nobles attributs de Dieu, ne laisse pas, dans un sens, d'être à Dieu comme un tribut onéreux, puisqu'elle l'assujettit à ne pouvoir entièrement se séparer de ce qui est l'objet de son aversion et de son indignation.(…)
(…)Qu'est-ce que Dieu exige de nous? que nous en usions avec eux comme il en use lui-même. Pouvons-nous nous proposer un plus saint modèle ? Il veut donc, premièrement, que nous les supportions à son exemple ; et il le veut avec raison, dit saint Augustin, puisqu'on nous a bien supportés quand nous étions nous-mêmes dans l'égarement et la corruption du vice. Voilà pourquoi, reprend ce saint docteur, nous ne devons jamais oublier ce que nous avons été, afin de conserver toujours pour les autres une compassion tendre et charitable dans l'état où ils sont (…) Mais prenez garde, s'il vous plaît, à ce terme :tolérance ; car saint Augustin ne dit pas que la société des méchants nous doit être un sujet de complaisance, mais un exercice de patience ; c'est-à-dire que nous devons la souffrir, et non pas l'aimer, parce que c'est ainsi que nous nous conformons à notre règle, qui est Dieu.
Oui, je l'avoue, il y a des liaisons et des engagements avec les impies, que la loi divine, non-seulement ne nous commande pas, mais qu'elle ne nous permet pas de rompre, puisqu'elle nous en fait même des devoirs ; et c'est ce que j'appelle la nécessité de notre état, qui répond à la nécessité de l'être et de la Providence de Dieu. Autrement, dit saint Paul, il faudrait sortir hors du monde, si tout commerce avec les pécheurs y était généralement interdit(…) :
Par exemple, un père doit-il se séparer de ses enfants, parce qu'il les voit dans le désordre(…) ; un inférieur, de son supérieur, parce que c'est un homme scandaleux? Non, sans doute ; la loi du devoir, de la dépendance et de la sujétion le défend ; et on peut dire alors que le mélange des méchants avec les bons est autorisé de Dieu, puisque Dieu est l'auteur de ces conditions qui engagent nécessairement à cette société. Tout cela est vrai ; mais hors de là, je veux dire hors des termes de la nécessité et de la justice, quand les choses sont dans la liberté de notre choix, chercher les impies et entretenir avec eux des habitudes volontaires, des amitiés mondaines et profanes, des familiarités dont le prétexte est le seul plaisir, et que nulle raison ne justifie, je dis que c'est aller directement contre les ordres de Dieu, et je le dis après le grand Apôtre ; car voilà comment il le déclarait aux chrétiens de Thessalonique : Nous vous ordonnons, leur disait-il, au nom du Seigneur, de vous retirer de tous ceux d'entre vos frères qui tiennent une conduite déréglée, et de garder ce précepte comme l'un des plus importants et des plus essentiels de la loi de Dieu. (…)
(…) Ma maxime a toujours été de n'avoir point d'union avec les partisans du vice, et de ne me point mêler avec ceux qui font gloire de commettre l'iniquité ; d'aimer leurs personnes, parce que la charité me le commande ; mais de haïr leurs assemblées, de fuir leurs intrigues, d'abhorrer leurs conversations, parce qu'une charité plus haute, qui est celle que je dois à Dieu et que je me dois à moi-même, m'empêche d'y avoir part.
Voilà, dis-je, mes chers auditeurs, ce que nous dicte la prudence chrétienne, et à quoi elle nous oblige indispensablement : d'éviter, autant que notre condition le peut permettre, les sociétés mauvaises et corrompues. Et voyez aussi comme Dieu nous en a inspiré l'horreur, soit par rapport aux païens et aux idolâtres, soit par rapport aux hérétiques et aux schismatiques, soit à l'égard même des catholiques libertins et prévaricateurs. (…)
(…) Donnez-vous bien de garde, non-seulement d'entretenir des intelligences dans le parti de l'erreur, non-seulement d'en épouser les intérêts, mais d'y avoir même de simples liaisons, hors celles que la piété chrétienne et le devoir de votre condition peuvent justifier. Et si ce sont des orthodoxes (catholiques) qui, malgré leurs mœurs dissolues, ne laissent pas de vivre avec nous dans la communion d'une même créance, Dieu nous en a-t-il interdit la société? Écoutez encore l'Apôtre. Je vous en ai déjà avertis, écrivait aux Corinthiens ce Maître des nations, et je vous ai marqué, dans une de mes lettres, de n'avoir jamais nul engagement, ni avec les impudiques et les voluptueux, ni avec les médisants et les calomniateurs, ni avec quelque autre que ce soit de ceux qui peuvent vous corrompre et être pour vous un scandale. Quand ce serait votre frère par inclination et par liaison d'amitié, si c'est un homme de mauvaise vie, je ne veux pas que vous ayez ensemble la moindre communication, ni que vous puissiez manger avec lui(…)
Dieu veut, dit excellemment Guillaume de Paris, et cette pensée est belle, Dieu veut qu'en nous séparant des impies, nous fassions dès à présent ce qu'il fera un jour lui-même, et que nous prévenions ainsi la résurrection générale et le jugement dernier. Quand le Fils de Dieu viendra juger le monde, les réprouvés, il est vrai, ressusciteront en même temps que les justes; mais ils ne ressusciteront pas néanmoins avec les justes, parce qu'au moment même de la résurrection, les justes seront séparés des réprouvés, par ce discernement terrible (…) Quel est donc le dessein de Dieu? poursuit Guillaume de Paris : c'est que les bons vivent en ce monde, à l'égard des méchants, dans le même ordre où ils doivent ressusciter et être jugés; c'est-à-dire qu'ils se discernent eux-mêmes, pour ainsi parler, d'avec les pécheurs, et que dès cette vie ils commencent à prendre leur rang, afin que Dieu ne soit presque pas obligé d'y employer ses anges, ni de faire d'autre choix de ses élus.
Vous diriez, Chrétiens, que la séparation des méchants est comme un sacrement d'expiation pour les bons. En effet, il ne faudrait rien davantage pour sanctifier des familles, des communautés, des ordres tout entiers.(…)
Or, ce retranchement ne serait pas impossible, si les intérêts de Dieu étaient aussi respectés que ceux des hommes. N'avez-vous jamais pris garde, Chrétiens, à une chose assez particulière que nous marque l'évangéliste saint Jean, en parlant de la dernière scène que Jésus-Christ fit avec ses apôtres la veille de sa mort? Au même temps que Judas sortit pour aller exécuter, son détestable dessein, le Sauveur du monde entra dans une espèce d'extase, et s'écria : C'est maintenant que le Fils de l'Homme est glorifié. D'où lui venait cette gloire? demande saint Augustin ; ce n'était pas de la vision bienheureuse de Dieu, car il la posséda dès l'instant même de sa conception ; ce n'était pas de la résurrection de son corps, car il n'était pas encore ressuscité : mais elle lui vint de la sortie de ce traître qui avait été jusque-là présent avec les autres disciples, et c'est la raison qu'en apporte le texte sacré(…) Tandis que Judas était dans sa compagnie, c'était, en quelque sorte, comme une tache pour lui; mais quand il s'en vit séparé, quoique cette séparation dût être bientôt suivie de tous les opprobres de la croix, il ne laissa pas de s'en faire une gloire (…) Or, si la gloire du Fils de Dieu ne pouvait être complète tandis qu'il souffrait un réprouvé auprès de lui, jugez, mes chers auditeurs, si vous pouvez être saints et justes devant Dieu, lorsque vous vivez avec les pécheurs, et que vous vous tenez volontairement au milieu d'eux.
Il y a deux choses dans l'excommunication : une peine pour le coupable, et une loi pour l'innocent. L'Église condamne le pécheur à n'avoir plus de communication avec les fidèles, voilà la peine; et, en même temps, elle ordonne aux fidèles de n'avoir plus de commerce avec le pécheur, voilà la loi. S'ensuit-il de la qu'il n'y ait que ces pécheurs frappés des anathèmes de l'Église, dont la compagnie nous soit défendue? non, Chrétiens : tout ce qui n'est pas formellement défendu par l'Église n'est pas pour cela permis. Il y a des lois supérieures et plus générales, auxquelles nous devons obéir. L'Église, en vertu de ses censures, ne nous interdit que la société des scandaleux, qui lui sont rebelles; mais, sans lui être rebelles, c'est assez qu'ils soient scandaleux, pour nous faire conclure, indépendamment des défenses de l'Église, que nous sommes dans l'étroite obligation de les éviter. Ce ne serait pas même bien raisonner, parce que l'Église a révoqué les peines portées contre ceux qui fréquentent les impies excommuniés, de prétendre dès lors qu'elle approuve une telle fréquentation et de telles habitudes.
Je m'explique, et observez ceci, s'il vous plaît; il est bon que vous en soyez instruits. Dans la rigueur du droit ancien, les fidèles ne pouvaient jamais traiter avec un homme retranché de la communion de l'Église, sans encourir la même censure. C'était la loi universelle; mais, par des raisons importantes, vérifiées dans les conciles, l'Église a relâché de cette sévérité, et ne nous défend plus que le commerce de ceux qu'elle a publiquement et nommément excommuniés. Est-ce à dire que nous pouvons donc converser indifféremment avec toutes sortes d'hérétiques, avec toutes sortes de gens corrompus et dangereux, sous prétexte que l'Église ne les a point encore notés et flétris? Abus, mon cher auditeur. L'Église peut bien révoquer ses lois, elle peut bien changer ses coutumes; mais sans préjudice de la loi de Dieu, qui est irrévocable et invariable. Or, la loi de Dieu est que, hors les engagements nécessaires de ma condition, je m'éloigne de toutes les compagnies des pécheurs et surtout de ceux dits public (…)Si je les cherche de moi-même et par un choix libre, il est vrai, les foudres de l'Église ne tomberont pas pour cela sur moi, parce que l'Église veut bien user à mon égard de cette indulgence; mais toute son indulgence ne peut faire que par là je ne devienne coupable d'un mépris formel de Dieu, que par là je ne devienne le scandale de mes frères(…)
(…) Oui, mon cher auditeur, se lier avec des libertins et des impies, que vous connaissez pour impies et pour libertins, c'est mépriser Dieu. Et qu'appelez-vous en effet mépris de Dieu, si ce n'est pas de s'unir avec ses ennemis ? et qui sont les ennemis de Dieu, si ce ne sont pas les pécheurs, surtout certains pécheurs déclarés? Que penserait-on d'un fils lié d'affection et de cœur avec les persécuteurs de son père, avec ceux qui attenteraient aux droits et à l'honneur de son père, avec ceux qui feraient une guerre ouverte à son père? N'en auriez-vous pas horreur, comme d'un monstre dans la nature? Or voilà ce que vous faites en vivant avec les impies. Tant qu'ils sont dans le désordre de leur péché, il y a entre Dieu et eux une haine irréconciliable.(…)
(…)Peut-on raisonnablement espérer que dans un air tout corrompu, vous ne vous ressentiez jamais de sa corruption? Et ne serait-ce pas au moins pour vous la présomption la plus aveugle et la plus criminelle, de vous y croire exempt d'un danger qui souvent vous, est, selon Dieu, aussi défendu que le mal même?
Qui doute que la piété de l'âme la plus religieuse ne s'altère par les exemples d'un ami qui vit dans le dérèglement, et qu'on a sans cesse devant les yeux? On est dépositaire de ses sentiments, on l'entend parler, on le voit agir; et insensiblement on s'accoutume à penser comme lui, à parler comme lui, à agir comme lui. Ce n'est pas d'abord sans quelques répugnances et quelques combats; mais enfin ce qui faisait horreur commence à ne plus déplaire, et ensuite plaît tout à fait et entraîne(…)
Le Fils de Dieu ne vous a-t-il pas expressément enseigné que quiconque n'aurait pas en haine ses propres parents, son frère et sa sœur, son père même et sa mère, ne serait pas digne de lui : c'est-à-dire que quiconque ne serait pas disposé à se séparer de ses proches, fût-ce un frère ou une sœur, fût-ce un père ou une mère, dès qu'il en pourrait craindre quelque scandale se rendrait dès lors coupable aux yeux de Dieu, et n'entrerait jamais dans son royaume?(…)
C'est une vérité certaine, Chrétiens: quoique le péché, dans le fond de son être, soit essentiellement une injure faite à la majesté de Dieu, il ne laisse pas néanmoins de servir à sa grandeur. Dieu ne le souffrirait pas, remarque saint Chrysostome, s'il n'était capable d'y contribuer par sa malice même; et il anéantirait plutôt tous les pécheurs du monde, que d'en voir un seul dont il ne pût tirer quelque tribut de gloire. (…)
De ce que l'homme pèche, dit excellemment saint Augustin, il se nuit à soi-même; mais il n'arrête pas l'effet de la bonté divine (…) Car Dieu, qui est un admirable ouvrier, se sert avantageusement des défauts de son ouvrage, et il ne les permet que parce qu'il sait bien s'en prévaloir(…):c'est en cela, qu'éclate la sagesse du Créateur, et qu'elle paraît même l'emporter sur la toute-puissance; l'effet de la toute-puissance est de créer les biens, et celui de la sagesse de trouver le bien dans les maux, en les rapportant à Dieu. Or, ce rapport du mal au souverain bien est quelque chose en Dieu de plus merveilleux que la production des êtres créés, qui lui est comme naturelle.(…)
Ne se sert-il pas des infidèles pour opérer les merveilles de sa grâce, et pour les faire connaître? un monde converti par douze pécheurs, qu'y a-t-il de plus grand et de plus fort pour établir la vérité de notre religion? Ne se sert-il pas des hérétiques pour l'éclaircissement de sa doctrine, et pour nous confirmer dans la vraie créance? Jamais la foi n'a été mieux développée, que lorsqu'elle a été combattue; et rien n'a plus donné lieu à découvrir la vérité, que l'erreur. Ne se sert-il pas des schismatiques comme d'une preuve sensible de la perpétuité et de l'inébranlable fermeté de son Église ? malgré la division de ses membres, elle se maintient toujours dans l'intégrité d'un corps parfait, tandis que nous voyons périr et se consumer les factions qui se sont élevées contre notre chef. Et les Juifs, ces restes déplorables du peuple de Dieu, malheureuse postérité d'une nation bien-aimée, ne semblent-ils pas demeurer sur la terre pour servir de témoins à Jésus-Christ, autorisant sa personne par leurs Écritures, vérifiant ses mystères par leurs prophéties, et relevant son Évangile par la comparaison de la loi? C'est un mauvais grain semé dans le champ de Dieu ; mais admirez en combien de manières il est utile a la gloire de Dieu.(…)
Il est donc vrai que Dieu profite ainsi des pécheurs pour l'augmentation de sa gloire et pour notre salut. (…) Or, voilà encore le modèle que nous devons suivre, si la nécessité de notre état nous engage dans le commerce des impies : du moins, à l'exemple de Dieu, devons-nous en tirer avantage pour nous-mêmes. Nous le pourrons toujours, quand nous ne les aurons pas recherchés, et que nous n'aurons pas pu les éviter. Car de même, dit saint Ambroise, que Dieu trouve dans les pécheurs de quoi rehausser l'éclat de ses infinies perfections, nous y trouverons de quoi acquérir et pratiquer les plus éminentes vertus.
Le comble de l'iniquité, pour l'impie, selon le témoignage du Prophète, c'est d'être pécheur parmi les justes (…)
Tandis que les autres m'ont abandonné, qu'ils ont trahi ma cause, qu'ils ont outragé mon nom, qu'ils ont violé ma loi, c’est vous, fidèles serviteurs, que j'ai trouvés constants à me suivre. De demeurer avec moi quand il n'y a rien à souffrir pour moi, quand rien ne porte à s'éloigner de moi, quand tout conspire à m'attacher les cœurs et à les attirer a moi, c'est l'effet d'une vertu commune: mais de demeurer avec moi dans la tentation, d'y demeurer lorsqu'il faut remporter pour cela des victoires, et de fréquentes victoires ; d'y demeurer malgré les scandales publics, malgré les contradictions et les traverses , malgré la coutume et tous les respects humains, c'est là que je reconnais une foi vive, un attachement solide, un amour pur , une persévérance héroïque(..)
( Deux volontés de Dieu ) l'une, qui oblige les justes à fuir la compagnie des pécheurs,(…) et l'autre, qui ordonne aux justes de coopérer au salut des pécheurs, lorsqu'ils se trouvent parmi eux et que quelque engagement raisonnable les y arrête (…) voilà la grande règle que nous devons suivre. Dieu ne veut pas que sa présence ni la nôtre soient inutiles aux impies ; mais il prétend que nous travaillions à leur conversion. (…)
On ne peut douter qu'il n'y donne ses soins ; et comme il ne peut cesser d'être avec les pécheurs, il ne cesse aussi jamais de s'employer à la réformation de leur vie. Il les y invite par ses promesses, il les y engage par ses bienfaits, il les y pousse par ses menaces, il les y force par ses châtiments ; sa sagesse, sa bonté, sa justice, toutes ses perfections divines(…)
Car, comme nous devons profiter des pécheurs pour nous-mêmes, nous devons aussi nous-mêmes, selon qu'il dépend de nous et autant qu'il dépend de nous, profiter aux pécheurs. Devoir général, et devoir particulier. Prenez garde : devoir général, qui regarde sans distinction tous les hommes, et que nous impose la loi de la charité. Il n'y a point d'homme, dit le Saint-Esprit, que Dieu n'ait chargé du salut de son prochain(…)si la charité nous oblige de compatir aux misères temporelles du pauvre, combien doit-elle nous engager encore plus fortement à compatir aux misères spirituelles du pécheur ? Si, dans des besoins où il ne s'agit que du corps et d'une vie mortelle, nous ne pouvons néanmoins manquer à notre frère et l'abandonner, sans perdre la charité de Dieu en perdant la charité du prochain, pouvons-nous conserver l'une et l'autre, et satisfaire à l'une et à l'autre, en laissant par notre faute périr des âmes rachetées du sang de Jésus-Christ; en leur refusant des secours qu'il ne tient qu'à nous de leur procurer, et qui pourraient les garantir d'une mort et d'une damnation éternelle ; en négligeant de leur donner des conseils , des avis, des avertissements et des instructions , des exemples, qui les retireraient de leurs égarements, et les remettraient dans les voies d'une bienheureuse immortalité ?(…)
Suis-je le gardien de mon frère? est-ce à moi de veiller sur celui-ci ou sur celle-là? de quelle autorité suis-je revêtu, et qu'ai-je autre chose à faire, que de bien vivre, et de ne point examiner du reste comment chacun vit? Il est vrai qu'il y a des règles de prudence à observer, et qu'il n'est pas toujours à propos de vouloir, comme les serviteurs de ce maître de l'Évangile, arracher l'ivraie dès qu'on l'aperçoit et de suivre les mouvements impétueux d'un zèle précipité, qui n'a égard ni aux temps, ni aux conjonctures : mais cette prudence, louable lorsqu'elle est bien employée, ne dégénère que trop souvent dans une fausse sagesse, dans une timidité lâche, dans un respect tout humain, dans une indifférence paresseuse, dans une criminelle prévarication.
(…)J'ai, par mes exemples, entraîné mon frère dans le plus grand de tous les malheurs, qui est le péché; je lui ai fait perdre le plus précieux de tous les biens, qui était l'innocence de son âme et la pureté de sa conscience : que ne dois-je donc pas mettre en œuvre pour le retirer de l'abîme où je l'ai conduit, et pour guérir les plaies de son cœur? Que si mes soins ne peuvent plus être utiles à tels et tels que j'ai égarés, et s'ils ne sont plus en état d'en profiter, quel motif pour compenser au moins la perte de ceux-là par la conquête d'autant d'autres que l'occasion m'en peut présenter?(…)
Je ne vous ai pas seulement déshonoré par moi-même, ô mon Dieu! mais par tous ceux que mon exemple a engagés ou confirmés dans leur iniquité. Ce ne sera donc point seulement par moi-même, mais par leur instruction, mais par leur correction, mais par leur conversion, que je travaillerai à vous glorifier. Pour cela, Seigneur, il y aura des précautions à prendre, des moments à étudier, des obstacles à vaincre; mais de tout ce qu'il pourra y avoir de difficultés, rien ne me rebutera, ni rien ne ralentira mon ardeur, parce que je sais que c'est une réparation que je vous dois, et pour la gloire que je vous ai ravie, et pour tant d'âmes que j'ai perverties(…)
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
gabrielle a écrit:Sermon sur l’ivraie et le bon grain
XXIV après la Pentecôte
( Vème après l’Épiphanie, dimanche transféré ).Extraits de Bourdaloue a écrit:
En voici le secret, qui consiste, répond le docteur angélique saint Thomas, en ce que Dieu, qui est le Saint des saints, n'est avec les pécheurs et les impies que par la nécessité de son être, et qu'il n'y est point par un choix d'affection et d'inclination. (…)
…saint Chrysostome conclut (et la pensée de ce Père mérite d'être remarquée), que l'immensité, qui est un des plus nobles attributs de Dieu, ne laisse pas, dans un sens, d'être à Dieu comme un tribut onéreux, puisqu'elle l'assujettit à ne pouvoir entièrement se séparer de ce qui est l'objet de son aversion et de son indignation.(…)
(…) Mais prenez garde, s'il vous plaît, à ce terme: tolérance; car saint Augustin ne dit pas que la société des méchants nous doit être un sujet de complaisance, mais un exercice de patience; c'est-à-dire que nous devons la souffrir, et non pas l'aimer, parce que c'est ainsi que nous nous conformons à notre règle, qui est Dieu.
Dieu veut, dit excellemment Guillaume de Paris, et cette pensée est belle, Dieu veut qu'en nous séparant des impies, nous fassions dès à présent ce qu'il fera un jour lui-même, et que nous prévenions ainsi la résurrection générale et le jugement dernier.
Il y a deux choses dans l'excommunication: une peine pour le coupable, et une loi pour l'innocent. L'Église condamne le pécheur à n'avoir plus de communication avec les fidèles, voilà la peine; et, en même temps, elle ordonne aux fidèles de n'avoir plus de commerce avec le pécheur, voilà la loi.
…tout ce qui n'est pas formellement défendu par l'Église n'est pas pour cela permis.
(…) Oui, mon cher auditeur, se lier avec des libertins et des impies, que vous connaissez pour impies et pour libertins, c'est mépriser Dieu.
Qui doute que la piété de l'âme la plus religieuse ne s'altère par les exemples d'un ami qui vit dans le dérèglement, et qu'on a sans cesse devant les yeux? On est dépositaire de ses sentiments, on l'entend parler, on le voit agir; et insensiblement on s'accoutume à penser comme lui, à parler comme lui, à agir comme lui. Ce n'est pas d'abord sans quelques répugnances et quelques combats; mais enfin ce qui faisait horreur commence à ne plus déplaire, et ensuite plaît tout à fait et entraîne(…)
De ce que l'homme pèche, dit excellemment saint Augustin, il se nuit à soi-même; mais il n'arrête pas l'effet de la bonté divine (…)
…Un monde converti par douze pécheurs, qu'y a-t-il de plus grand et de plus fort pour établir la vérité de notre religion ?
…Car de même, dit saint Ambroise, que Dieu trouve dans les pécheurs de quoi rehausser l'éclat de ses infinies perfections, nous y trouverons de quoi acquérir et pratiquer les plus éminentes vertus.
Le comble de l'iniquité, pour l'impie, selon le témoignage du Prophète, c'est d'être pécheur parmi les justes (…)
(Deux volontés de Dieu) l'une, qui oblige les justes à fuir la compagnie des pécheurs, (…) et l'autre, qui ordonne aux justes de coopérer au salut des pécheurs, lorsqu'ils se trouvent parmi eux et que quelque engagement raisonnable les y arrête (…)
.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
En cet Octave de la Toussaint, voici un texte consolant pour tous mes frères dans la Foi :
«Nous sommes attendus au ciel par un grand nombre d'amis, dit S. Cyprien, nous y sommes désirés par la foule considérable et pressée de nos pères et de nos mères, de nos frères, de nos enfants, qui, assurés de leur immortalité bienheureuse, ne sont plus en peine que de notre salut. Quelle joie, et pour eux et pour nous tout ensemble, quand il nous sera permis enfin de les voir et de les embrasser dans ce céleste royaume, sans craindre de mourir, assuré qu'on sera de vivre à jamais! Quelle souveraine et perpétuelle félicité !»
_________________
Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
Louis- Admin
- Nombre de messages : 17607
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Louis a écrit:En cet Octave de la Toussaint, voici un texte consolant pour tous mes frères dans la Foi :«Nous sommes attendus au ciel par un grand nombre d'amis, dit S. Cyprien, nous y sommes désirés par la foule considérable et pressée de nos pères et de nos mères, de nos frères, de nos enfants, qui, assurés de leur immortalité bienheureuse, ne sont plus en peine que de notre salut. Quelle joie, et pour eux et pour nous tout ensemble, quand il nous sera permis enfin de les voir et de les embrasser dans ce céleste royaume, sans craindre de mourir, assuré qu'on sera de vivre à jamais! Quelle souveraine et perpétuelle félicité !»
Merci Louis pour ces consolations de Saint Cyprien.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
VI eme Dimanche après l'Épiphanie
(dimanche transféré)
(dimanche transféré)
Homélie de saint Jérôme, prêtre.
Le Royaume des Cieux, c’est la prédication de l’Évangile et la connaissance des Écritures qui conduit à la vie et dont le Seigneur dit aux Juifs : « Le Royaume de Dieu vous sera enlevé et il sera donné à une nation qui en produira les fruits. » Ce Royaume est donc comparable au grain de sénevé qu’un homme prend et sème dans son champ. » Cet homme qui ensemence son champ, beaucoup ont compris que c’était le Sauveur parce qu’il ensemence l’âme des croyants ; selon d’autres, c’est l’homme lui-même qui ensemence son champ, c’est-à-dire soi-même, et son cœur.
Qui donc ensemence, sinon notre intelligence et notre âme ? Elle accueille le grain de la prédication, prend soin de la semence, la fait germer par l’humidité de la foi, dans le champ de son cœur. La prédication de l’Évangile est le plus humble de tous les enseignements. C’est vrai, pour son premier exposé, la prédication de l’Homme-Dieu, du Christ mort, du scandale de la croix, elle n’a pas la vraisemblance de la vérité. Compare donc un tel enseignement aux principes des philosophes, à leurs livres, à la splendeur de leur éloquence et à l’ordonnance de leurs discours, et tu verras : la semence de l’Évangile est de loin la plus petite de toutes les semences.
Mais lorsque celles-là ont grandi, elles ne présentent rien de pénétrant, rien de vigoureux, rien de vivace, mais tout est frêle, et flétri, et languissant et produit en abondance des herbes et des plantes qui bien vite, dessèchent et tombent. Quant à la prédication qui paraissait petite en son début, à peine semée, soit dans l’âme du croyant, soit dans le monde entier, elle ne se développe pas comme une herbe, mais grandit comme un arbre, si bien que les oiseaux du ciel, – en qui nous devons voir ou les âmes des croyants, ou les forces consacrées au service de Dieu – viennent habiter dans ses branches. Les branches de l’arbre évangélique qui s’est développé à partir du grain de sénevé sont, je pense, les différents dogmes dans lesquels se repose chacun des oiseaux mentionnés plus haut.
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Sermon sur le jugement dernier
Première partie
Dernier dimanche après la Pentecôte
Première partie
Dernier dimanche après la Pentecôte
Extraits de Bourdaloue a écrit:Alors ils verront le Fils de l'Homme venir sur une nuée avec une grande puissance et une grande majesté.
Tertullien, admirant autrefois le zèle que les païens faisaient paraître pour leur fausse religion, et le comparant avec la froideur et l'indifférence des chrétiens dans le service et le culte du vrai Dieu, a fait une remarque bien solide, et dont nous n'éprouverons que trop la vérité au jugement dernier. Voyez, disait ce grand homme, le caractère du démon. Il n'y a point de marque de divinité qu'il n'affecte. On lui rend dans le monde les mêmes honneurs que l'on rend à Dieu; on lui fait des sacrifices comme à Dieu ; il a ses martyrs aussi bien que Dieu; ses lois sont reçues et observées plus exactement que celles de Dieu : et il s'est mis en possession de tout cela pour nous confondre un jour devant Dieu, quand il nous opposera la conduite de ces malheureux, qui, aveuglés des erreurs du monde, s'assujettissent à lui, et lui obéissent comme au Dieu du siècle(…)
c'est ainsi que la foi des païens doit entrer dans le jugement que Dieu fera des chrétiens, et que les vrais fidèles se verront alors condamnés par l'infidélité même.
(…) Dieu nous jugera par notre religion, soit que nous l'ayons conservée, soit que dans le cœur nous l'ayons renoncée et abandonnée ; soit que nous ayons cru constamment et sincèrement les vérités qu'elle nous proposait, soit que nous ayons cessé de les croire. Il semble qu'il y ait en ceci de la contradiction ; car si nous ne croyons plus les vérités que la foi nous propose, comment peut-on dire que c'est notre foi? et si ce n'est plus notre foi, comment Dieu nous jugera-t-il par elle?
(…)
Nous faisons tous profession d'être chrétiens ; et puisque nous portons cette qualité, mon devoir même m'oblige à supposer que nous avons dans le cœur la foi, dont nous donnons extérieurement des témoignages, et que nous confessons au dehors. Or, supposant que nous l'avons, je dis que Dieu se servira d'elle pour nous juger. Aurons-nous droit de refuser cette condition? Mais comment Dieu y procédera-t-il? c'est, mes chers auditeurs, ce qui demande une réflexion particulière. Dieu nous jugera par notre foi, parce que c'est notre foi qui nous accusera devant lui ; parce que c'est notre foi qui servira de témoin contre nous; parce que c'est notre foi, si jamais nous avons le malheur d'être réprouvés, qui dictera elle-même l'arrêt de notre réprobation. Peut-on contribuer en des manières plus différentes et plus directes à un jugement?
(…)Or, ces pensées qui s'entr'accuseront, qui s'entrechoqueront, selon le terme et dans le sentiment même de l'Apôtre, ce sont celles qui partageront alors un réprouvé entre sa conscience et sa foi ; car sa foi lui dira : Tu as cru ceci; et sa conscience lui dira: Tu as fait cela. Ces deux pensées : Tu as cru ceci, et : Tu as fait cela, se trouvant opposées l'une à l'autre, formeront contre lui la plus juridique de toutes les accusations. La foi se déclarera contre la conscience criminelle, et la conscience criminelle tâchera à se défendre contre la foi, jusqu'à ce qu'enfin la foi, triomphant des vains efforts de la conscience, la convaincra, la consternera, l'accablera
(…) De là, Chrétiens, j'ai dit que le premier témoin qui parlera contre nous dans notre jugement, c'est notre foi, et je l'ai dit après saint Augustin, qui, pour donner plus de jour à sa pensée, met là-dessus une différence bien remarquable entre les pécheurs et les Justes. Car la foi, dit cet incomparable docteur, rendra aux Justes témoignage pour témoignage, et aux pécheurs témoignage contre témoignage. Appliquez-vous, s'il vous plaît : il dit que la foi rendra aux Justes témoignage pour témoignage, parce qu'il est certain que les Justes recevront devant Dieu un témoignage honorable de leur foi, et ce sera la récompense de celui qu'ils auront eux-mêmes rendu à la foi devant les hommes. Comme ils auront glorifié leur foi devant les hommes par leur bonne vie et par leurs vertus, leur foi à son tour les glorifiera devant Dieu, par la justification de leurs personnes et de leurs œuvres.
Au contraire, poursuit saint Augustin, cette même foi rendra aux pécheurs témoignage contre témoignage, parce qu'au lieu que les pécheurs auront démenti leur foi par une vie déréglée et corrompue, leur foi, se faisant malgré eux reconnaître à eux, les confondra d'une manière sensible : et cela comment? Tertullien l'explique dans l'excellent traité qu'il a composé du témoignage de l'âme, où il représente une âme réprouvée aux prises, si j'ose me servir de cette expression, avec Dieu et avec elle-même; car au même temps que Dieu, d'une partie, pressera le réprouvé, sa foi, comme un témoin incorruptible, lui dira de l'autre : Il est vrai, tu croyais un Dieu, mais tu ne t'es pas mis en peine de le chercher et de lui plaire ; tu avais renoncé au monde en qualité de chrétien, et tu n'as pas laissé d'en être esclave; tu détestais les idoles de la gentilité, qui n'étaient que des idoles de bois et de pierre, mais tu t'es fait dans le christianisme des idoles de chair.
Mais s'en tiendra-t-elle là ? non ; car, après avoir porté contre eux ce témoignage, elle prononcera elle-même l'arrêt de leur réprobation; et en quels termes? Observez ceci : dans les mêmes termes qu'il est déjà conçu en tant d'endroits de l'Evangile. En effet, qu'y a-t-il dans l'Evangile de plus souvent répété que ces malédictions et ces anathèmes fulminés par Jésus-Christ contre les mauvais chrétiens? Et qu'est-ce que ces anathèmes, sinon autant d'arrêts de la réprobation future des pécheurs, dressés par avance, et qu'il ne reste plus qu'à leur signifier? (…)
Et voilà, mes chers auditeurs, l'éclaircissement, et même le sens littéral de cette proposition de saint Jean si étonnante, et qui semble d'abord si paradoxe, quand il dit que celui qui croit ne sera pas jugé (…) Car il ne prétend pas que celui qui croit ait une exemption et un privilège pour ne point comparaître au dernier jour devant le tribunal de Jésus-Christ; ce n'est point de cette manière qu'il l'entend ; mais il dit que celui qui croit, en conséquence de ce qu'il aura cru, ne sera point jugé; parce que dès là qu'il aura cru, il se jugera lui-même, sans qu'il soit nécessaire qu'un autre le juge. Car, ou il aura vécu conformément à sa créance et à sa religion, et alors sa religion seule le justifiera ; ou sa vie n'aura eu nul rapport à sa foi, et alors sa foi seule le condamnera. Tellement que Jésus-Christ, s'il m'est permis de parler de la sorte, n'aura plus à le juger, parce qu'il le trouvera déjà tout jugé, et que toute la juridiction qu'il exercera, comme souverain juge, sera de confirmer, par une ratification authentique , le jugement secret que notre foi aura fait de nous, et de le rendre, de particulier qu'il était, commun et public.
C'est ma religion qui me jugera, cette religion si sainte, si pure, si irrépréhensible, cette religion si ennemie de mon amour-propre, si contraire à mes inclinations, si opposée à l'esprit du monde dont je suis rempli; cette religion aussi exacte et aussi sévère dans ses maximes que Dieu l'est dans ses jugements, ou plutôt dont les maximes ne sont rien autre chose que le jugement de Dieu même ; c'est par elle que Dieu décidera de mon sort éternel ; c'est sur elle que roulera tout l'examen de ma vie : et il ne sera point en mon pouvoir de la récuser ; et je n'aurai point droit de demander que mes actions soient pesées dans une autre balance que la sienne ; et je ne serai point reçu à me justifier sur d'autres principes que les siens. Quelque excuse que j'allègue à Dieu, il me rappellera toujours à cette foi, et il m'obligera à répondre sur autant d'articles qu'elle m'aura enseigné de vérités. Il n'y en aura pas une qui ne soit pour moi la matière d'une discussion rigoureuse. Et parce que la croix de Jésus-Christ aura été l'abrégé de toutes les vérités de la foi, cette croix, ce signe auguste et vénérable du Fils de l'Homme, paraîtra tout éclatant de lumière, pour être la règle de mon jugement et de celui du monde entier, comme il commença à l'être quand il fut élevé sur le Calvaire (…)
(…) Cette croix me sera présentée ; et tout ce qui n'en portera pas dans moi le caractère et le sceau sera réprouvé de Dieu. Ah ! mon Dieu, est-il donc vrai que vous emploierez pour ma perte jusqu'à l'instrument de mon salut, et que ce qu'il y a en moi de plus saint, je veux dire ma religion, prendra parti contre moi-même?
Maintenant cette foi est comme languissante, ou presque morte dans nos cœurs ; et quand le Fils de l'Homme paraîtra à la fin des siècles, il doute, ce semble, s'il en trouvera encore quelques restes sur la terre. Oui, Chrétiens, il en trouvera; oui, il en trouvera du moins autant qu'il lui en faudra pour nous juger et pour nous condamner. Car cette foi, qui était presque morte et comme ensevelie dans nous, ressuscitera avec nous ; et un des miracles que doit opérer Jésus-Christ, lui qui est notre résurrection et notre vie, sera de faire revivre intérieurement la foi dans nos âmes, au même temps qu'il fera revivre nos corps. Or cette foi (écoutez un beau sentiment de saint Augustin), cette foi ainsi ranimée, ainsi ressuscitée par la présence de Jésus-Christ, lui demandera justice ; et contre qui ? non pas contre les tyrans qui l'auront persécutée, elle se fera honneur de leurs persécutions ; non pas contre les païens qui l'auront méconnue, leur infidélité les rendra en quelque sorte moins criminels ; mais contre nous ; et de quoi ? de tous les outrages que nous lui aurons faits : justice de l'avoir laissé languir dans l'inutilité et l'oisiveté d'une vie mondaine, sans la mettre en œuvre et sans jamais la faire agir pour Dieu ; justice de l'avoir retenue captive dans l'état du péché où notre endurcissement nous aura fait passer sans trouble des années entières ; justice de l'avoir déshonorée par des actions indignes du nom que nous portions et du caractère dont nous étions revêtus; justice de l'avoir décriée et scandalisée devant les hérétiques, ses mortels ennemis, qui n'auront pas manqué de s'en prévaloir contre elle et contre nous ; enfin justice de ce qu'étant capable par elle-même de nous faire des saints, elle n'aura pas été, par notre faute, assez puissante pour nous empêcher d'être des impies et des réprouvés. C'est de quoi elle demandera justice à Dieu, et c'est à nos dépens que cette justice lui sera accordée.
(…) il faut bien établir dans nos esprits une vérité, à quoi peut-être nous n'avons jamais fait toute la réflexion nécessaire : que dans le jugement de Dieu il y aura une différence infinie entre un païen qui n'aura pas connu la loi chrétienne, et un chrétien qui, l'ayant connue, y aura intérieurement renoncé ; et que Dieu, suivant les ordres mêmes de sa justice, traitera l'un bien autrement que l'autre. On sait assez qu'un païen à qui la loi de Jésus-Christ n'aura point été annoncée ne sera pas jugé par cette loi, et que Dieu, tout absolu qu'il est, gardera avec lui cette équité naturelle de ne le pas condamner par une loi qu'il ne lui aura pas fait connaître (…)
Mais je prétends qu'il n'en est pas de même d'un chrétien qui a professé la foi de Jésus-Christ, et qui, après l'avoir embrassée, en a dans la suite secoué le joug. Je prétends qu'ayant péché après avoir reçu cette foi, il doit périr par cette foi, et que sa désertion est justement le premier chef que Dieu produira contre lui. Car il ne lui était pas permis, dit saint Chrysostome, de s'émanciper de l'obéissance due à cette foi, après s'être engagé à elle par le baptême. Il ne pouvait plus sans apostasie, après avoir ratifié cet engagement par divers exercices du christianisme, y renoncer de ce renoncement même intérieur dont je parle.
(Dieu) n'aura qu'à nous demander si c'est en effet par raison que nous nous serons départis de notre première soumission à la foi ; si, pour nous engager dans un pas aussi dangereux et aussi hardi que celui-là, nous avons bien consulté, bien examiné, bien cherché à nous instruire, et, supposé que nous l'ayons cherché, que nous ayons examiné, consulté, si nous l'avons fait avec humilité, si nous l'avons fait avec docilité, si nous l'avons fait sans préjugé, si nous l'avons fait par un désir sincère de découvrir la vérité; surtout si nous l'avons fait avec cette pureté de vie qui devait servir de disposition aux lumières de la grâce ; car, dans une affaire de cette conséquence, il ne fallait rien omettre, ni rien négliger.
Mais ce qui mettra le comble à notre confusion, c'est lorsque , remontant à la source, et nous y faisant remonter avec lui, il nous forcera à reconnaître les deux vraies causes de notre infidélité, savoir : le libertinage de notre esprit et le libertinage de notre cœur ; libertinage de notre esprit, qui se sera fait juge de tout, pour ne s'assujettir à rien; qui se sera détaché de la foi, non pas pour suivre un meilleur parti, mais pour ne savoir plus lui-même ni ce qu'il suivait, ni ce qu'il ne suivait pas; pour abandonner toutes choses au hasard, pour se réduire à une malheureuse indifférence en matière de religion, disons mieux, pour n'avoir plus absolument de religion ; libertinage de notre cœur, qui, se trouvant gêné par la foi, nous aura peu à peu sollicités, et enfin déterminés à sortir de cette contrainte, et à nous affranchir de la servitude : ce que Dieu n'aura pas de peine à justifier, et ce qu'il justifiera par une comparaison sensible et convaincante, en nous montrant que, tandis que nos mœurs ont été réglées, notre foi a été saine, et que notre foi n'a commencé à se démentir, que quand nos mœurs ont commencé à se corrompre.
(…) si notre foi nous condamne, ce sera du consentement et de l'aveu de notre raison.
Suite Dimanche prochain
gabrielle- Nombre de messages : 19796
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: Dimanches après la Pentecôte
Sermon sur le jugement dernier
Première partie
Dernier dimanche après la Pentecôte.Extraits de Bourdaloue a écrit:
Alors ils verront le Fils de l'Homme venir sur une nuée avec une grande puissance et une grande majesté.
Voyez, disait ce grand homme (Tertullien), le caractère du démon. Il n'y a point de marque de divinité qu'il n'affecte. On lui rend dans le monde les mêmes honneurs que l'on rend à Dieu; on lui fait des sacrifices comme à Dieu ; il a ses martyrs aussi bien que Dieu; ses lois sont reçues et observées plus exactement que celles de Dieu : et il s'est mis en possession de tout cela pour nous confondre un jour devant Dieu, quand il nous opposera la conduite de ces malheureux, qui, aveuglés des erreurs du monde, s'assujettissent à lui, et lui obéissent comme au Dieu du siècle(…)
c'est ainsi que la foi des païens doit entrer dans le jugement que Dieu fera des chrétiens, et que les vrais fidèles se verront alors condamnés par l'infidélité même.
(…) Dieu nous jugera par notre religion (…) Dieu nous jugera par notre foi (…) parce que c'est notre foi qui nous accusera devant lui ; parce que c'est notre foi qui servira de témoin contre nous; parce que c'est notre foi, si jamais nous avons le malheur d'être réprouvés, qui dictera elle-même l'arrêt de notre réprobation.
… le premier témoin qui parlera contre nous dans notre jugement, c'est notre foi, et je l'ai dit après saint Augustin, qui, pour donner plus de jour à sa pensée, met là-dessus une différence bien remarquable entre les pécheurs et les Justes. Car la foi, dit cet incomparable docteur, rendra aux Justes témoignage pour témoignage, et aux pécheurs témoignage contre témoignage..
…Il est vrai, tu croyais un Dieu, mais tu ne t'es pas mis en peine de le chercher et de lui plaire (…) mais tu t'es fait dans le christianisme des idoles de chair.
…la croix de Jésus-Christ aura été l'abrégé de toutes les vérités de la foi, cette croix, ce signe auguste et vénérable du Fils de l'Homme, paraîtra tout éclatant de lumière, pour être la règle de mon jugement et de celui du monde entier, comme il commença à l'être quand il fut élevé sur le Calvaire (…)
(…) Cette croix me sera présentée ; et tout ce qui n'en portera pas dans moi le caractère et le sceau sera réprouvé de Dieu. Ah ! mon Dieu, est-il donc vrai que vous emploierez pour ma perte jusqu'à l'instrument de mon salut, et que ce qu'il y a en moi de plus saint, je veux dire ma religion, prendra parti contre moi-même?
…quand le Fils de l'Homme paraîtra à la fin des siècles, il doute, ce semble, s'il en trouvera encore quelques restes sur la terre. Oui, Chrétiens, il en trouvera; oui, il en trouvera du moins autant qu'il lui en faudra pour nous juger et pour nous condamner. (…) Or cette foi (écoutez un beau sentiment de saint Augustin), cette foi ainsi ranimée, ainsi ressuscitée par la présence de Jésus-Christ, lui demandera justice; et contre qui ? (…) contre nous; et de quoi ? De tous les outrages que nous lui aurons faits : justice de l'avoir laissé languir dans l'inutilité et l'oisiveté d'une vie mondaine, sans la mettre en œuvre et sans jamais la faire agir pour Dieu; justice de l'avoir retenue captive dans l'état du péché où notre endurcissement nous aura fait passer sans trouble des années entières; justice de l'avoir déshonorée par des actions indignes du nom que nous portions et du caractère dont nous étions revêtus; justice de l'avoir décriée et scandalisée devant les hérétiques, ses mortels ennemis, qui n'auront pas manqué de s'en prévaloir contre elle et contre nous; enfin justice de ce qu'étant capable par elle-même de nous faire des saints, elle n'aura pas été, par notre faute, assez puissante pour nous empêcher d'être des impies et des réprouvés. C'est de quoi elle demandera justice à Dieu, et c'est à nos dépens que cette justice lui sera accordée.
…dans le jugement de Dieu il y aura une différence infinie entre un païen qui n'aura pas connu la loi chrétienne, et un chrétien qui, l'ayant connue, y aura intérieurement renoncé…
…il ne lui était pas permis, dit saint Chrysostome, de s'émanciper de l'obéissance due à cette foi, après s'être engagé à elle par le baptême. Il ne pouvait plus sans apostasie, après avoir ratifié cet engagement par divers exercices du christianisme, y renoncer de ce renoncement même intérieur dont je parle.
Suite Dimanche prochain
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Page 2 sur 3 • 1, 2, 3
Page 2 sur 3
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum