LES MÈRES DES SAINTS

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Message  Monique Jeu 09 Mar 2023, 7:49 am

LIVRE II

Les Grandes Chroniques de la Maternité sainte du
IVe au XVIIIe siècle
.


******


CHAPITRE PREMIER

DE LA DÉCADENCE DE L ’EMPIRE A LA RENAISSANCE
CATHOLIQUE (lVe-XIe SIÈCLE).


§ I. — La mère de saint Athanase (296-3734) (1). — Nous commençons cette série d’esquisses par des mots qui reviendront souvent dans notre pensée, sinon dans nos lignes : Nous ne savons presque rien sur la famille, l’enfance et l’éducation de saint Athanase. Son intrépidité invincible, son ardente éloquence, l’éclat de ses quarante-six années d’épiscopat dont il passa vingt en exil, la grandeur des services qu’il rendit à l’Église ont rejeté dans l’ombre tout ce qui ne concerne pas sa lutte contre l’arianisme.

Sa première biographie fut écrite quelques siècles après sa mort. L’auteur nous dit seulement qu’il est né à Alexandrie, que ses parents étaient nobles et très pieux.

1. Les dates données à la suite du titre indiquent toujours la naissance et la mort des saints.

Athanase, lui, nous donne deux renseignements.

Il nous parle d’une tante qui fut persécutée à cause de lui par l' évêque arien Grégoire; la haine de celui-ci poursuivit même le cadavre de la courageuse femme et l’arien défendit qu’on lui donnât la sépulture.

D’une lettre qu’il écrivit à un évêque de Gaghari en 358, au plus fort de la persécution on peut inférer que sa mère vivait encore à cette époque. Il raconte en effet, qu’elle était alors à Alexandrie et qu'il voulait aller la voir. Mais les ariens faisaient aux portes de la ville une si bonne garde qu il ne fut pas possible d’y entrer.

Les leçons qu il reçut de sa mère, nous pouvons les deviner dans le fait suivant, qui nous est raconté par l’historien Rufin.


A suivre...
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Message  Monique Ven 10 Mar 2023, 4:40 am

Les Alexandrins avaient l ’habitude de célébrer avec beaucoup de solennité la fête de saint Pierre, l'un de leurs archevêques, martyrisé pendant la persécution de Dioclétien. Les cérémonies étaient longues et l’usage voulait que l'archevêque, après la célébration des saints mystères reçût à sa table quelques-uns des plus notables assistants.

Saint Alexandre, qui gouvernait l'Eglise alexandrine au temps de l'enfance d’Athanase, avait l’habitude de se retirer dans sa chambre pour y passer, dans la méditation, le temps qui séparait la fin de la cérémonie de l'heure du dîner. Cette chambre avait vue sur la mer. Un jour que ses regards se portèrent sur le rivage il vit une bande de jeunes enfants qui imitaient les cérémonies de l’Eglise, et l’un d’eux paraissait remplir l ’office d’un évêque avec tant de soin et des gestes si bien appropriés à la fonction, que le prélat en fut étonné, presque inquiet. Il envoya chercher ces enfants et leur demanda ce qu’ils faisaient là. Ceux-ci intimidés restèrent muets. Il les rassura et apprit que l’un d’eux — qu’ils lui montrèrent et qui était Athanase, — remplissait, en effet, les fonctions épiscopales, telles qu’ils avaient pu les observer en mainte circonstance.

Ce jour-là, il avait décidé qu’il baptiserait quelques-uns d’entre eux qui n ’avaient pas encore reçu le baptême. Le saint poussa plus loin son interrogatoire. Il leur demanda quelles questions l’évêque enfant avait posées, quelles réponses il avait exigées, quelles cérémonies il avait faites. Il acquit la certitude que tout ce qui est requis pour l’administration du baptême avait été observé très exactement. L ’archevêque, après avoir pris l’avis des prêtres que cette scène avait appelés auprès de lui, conclut que le baptême était valable; qu’il n ’y avait pas lieu de rebaptiser ces catéchumènes et qu’il fallait seulement ajouter celles des cérémonies que les prêtres seuls ont pouvoir de faire.

Par là donc nous pouvons deviner l’éducation qu’Athanase reçut au foyer domestique, les leçons et les encouragements de sa mère. Elle dut aussi lui inspirer l’amour des saintes lettres.

Nous le voyons, en effet, quitter bien jeune l’étude des auteurs païens, non qu’il les ignorât car nous trouvons dans ses œuvres des citations de l' Odyssée d’Homère, par exemple, mais saint Grégoire de Nazianze nous dit qu’il ne voulut pas que la noblesse et la générosité de son âme fussent anéanties par les vaines connaissances, de crainte qu’il ne lui arrivât la même chose qu’aux athlètes qui frappent l’air plutôt que les membres de leurs adversaires.


A suivre... § II.
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Message  Monique Sam 11 Mar 2023, 5:43 am

§ II. — La mère de saint Jean Chrysostome (344-407). — Les Mères des Saints ne furent pas toutes des héroïnes de la foi. La plus ferme piété ne détruisait pas nécessairement en elles les doux égoïsmes et les touchantes faiblesses de l ’amour maternel. Le cher Seigneur, toujours et toujours caressant pour les âmes pures, même lorsqu’elles ont peine à s’élever jusqu’aux sublimités de la générosité, nous apprend qu’il y a plusieurs demeures dans la maison du Père céleste. Sans doute, les mères angéliques comme Félicité, ayant tout oublié pour la gloire de Dieu, paraissent appelées à resplendir dans les demeures les plus rapprochées du palais de l’amour divin. (Hélas! nous n’avons que des images grossières pour essayer de traduire tout ce qui est du Ciel). Mais le paradis a des places au-dessous de ce que je voudrais pouvoir appeler la table d’honneur de la félicité éternelle.

Dieu utilisa, d’ailleurs, la sensibilité extrême de la mère de saint Jean. Ce fut l’instrument qu' il employa pour garder au milieu de la bataille l’un des plus grands, des plus éloquents, des plus vaillants généraux de la milice chrétienne. C’est son tendre égoïsme qui empêcha son fils de s’enfermer dans la solitude avec son ami Basile.

Nous ne devons pas oublier, en outre, qu’elle a une situation historique; c’est à propos d’elle que le grand rhéteur païen Libanius, l’un des hommes les plus éloquents et les plus renommés de ce glorieux IVe siècle, s’écria : «Quelles merveilleuses femmes se trouvent parmi ces chrétiens!»

Ainsi le christianisme avait élevé la femme à une hauteur si stupéfiante pour les païens, que celle-là même que nous jugeons faible, était, pour les plus sages d’entre eux, une merveille. Elle se nommait Anthusa.


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Message  Monique Dim 12 Mar 2023, 8:09 am

Anthusa était femme de Secundus, grand maître de la cavalerie de l’empire en Orient. Elle resta veuve à vingt ans et ne voulut pas se remarier, pour se livrer à l’éducation d’une fille dont nous ignorons le nom, pour soigner tout particulièrement l’âme de son fils Jean. Celui-ci avait grand besoin de sa vigilance.

Malgré ses efforts, ses prières, malgré ce saisissant ensemble de qualités intellectuelles et morales qui arrachait ce cri d’admiration à l’illustre païen, elle n’avait pu faire de ce fils ni un chrétien ni un catéchumène. La société chrétienne sortait lentement, malgré le sang des martyrs, du substratum, dès longtemps durci, de la société païenne.

C’est le paganisme qui distribuait la gloire mondaine , lui qui était brillant, bruyant, attrayant, qui satisfaisait l’orgueil comme l’ambition, et qui donnait les hautes dignités avec la fortune et les plaisirs.

Jean avait vingt-cinq ans. Déjà éblouissant et ébloui par sa renommée, illustre dans l’éloquence, dans les belles-lettres, dans la philosophie et cherchant dans le barreau l’entrée des plus hautes fonctions, il oubliait aisément les leçons d ’humilité, d’abnégation, de pauvreté, de martyre peut-être qu’il avait reçues de sa mère et entrevues comme dernières et logiques conséquences de ces leçons. Le Seigneur Jésus s’empara enfin de cette grande âme.


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Message  Monique Lun 13 Mar 2023, 8:27 am

C’est à lui-même qu’il faut demander l’ardent récit de sa conversion. Nous, nous ne devons penser qu’à sa mère. Mais nous pouvons l’interroger sur l’effort qu’elle fit et qui dirigea tout l’avenir de son fils.

On peut deviner sa joie à l’annonce de cette conversion. Cette joie fut aussi grande que le dépit des païens, dépit dont nous avons recueilli une bien curieuse preuve : Le grand Libanius est à la mort. Ses disciples l’entourent et ils lui demandent quel serait son successeur. L ’illustre rhéteur réfléchit un instant et il répondit un mot indiquant, avec les espérances que les docteurs du paganisme avaient fondées sur Jean, la déception amère qui avait suivi la ruine de ces espérances : « Je vous proposerais Jean, si les chrétiens ne nous l’avaient ravi. »

C’est à lui, à Jean, que nous allons donner la parole, et les quelques lignes qui vont suivre, rendront mieux que toute analyse l’esprit et le cœur d’Anthusa. Elles donneront aussi quelque idée de ce style caressant en sa simplicité, aussi remarquable en son naturel que les éclats de cet autre style où flamboient l’indignation et la logique de la Bouche d'or.

Anthusa avait offert son fils au Seigneur, elle ne voulait pas le lui donner tout entier. Elle en voulait garder une part minime, sans doute; elle consentait à le voir devenir prêtre, mais moine, mais solitaire, mais pour toujours éloigné d ’elle, cette pensée lui déchirait le cœur!


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Message  Monique Mer 15 Mar 2023, 7:59 am

Basile, le principal instrument de sa conversion, l’ami bien-aimé de son âme et de son intelligence, l’avait décidé à quitter la maison paternelle pour s’enfermer dans la solitude. « Notre projet allait aboutir ; mais les touchantes instances de ma mère m’empêchèrent de donner cette joie à mon ami ou plutôt me privèrent du bonheur qu’il voulait me procurer. Ma mère avait soupçonné quelque chose de notre résolution. Elle me prit par la main, me conduisit dans son appartement, et m’ayant fait asseoir près du lit où elle m ’avait donné le jour, elle se mit à pleurer. Puis, en sanglotant, elle me dit des choses plus attendrissantes encore que ses larmes, « — Mon fils, disait-elle, je n’ai joui que bien peu de temps de l’appui que me donnait votre père. Dieu me l’a enlevé au moment où je vous mettais au monde. Sa mort prématurée vous laissait orphelin et moi veuve. J ’avais à peine vingt ans.

Ce qu’une jeune femme de cet âge, sans expérience des affaires, sans appui dans le monde, livrée à elle-même et à la faiblesse de son sexe, doit affronter de tempêtes et dévorer de chagrins, celles-là seules peuvent le comprendre qui en ont fait la triste expérience. Ma seule consolation parmi ces misères inexprimables était, ô mon fils, de vous voir sans cesse et de contempler dans vos traits l’image de votre père qui n’est plus. J ’ai pris peine à conserver le bien qu ’il m’a laissé, je l’ai même augmenté de beaucoup pour vous élever dans l’état où je vous vois aujourd’hui par la grâce de Dieu. Ce que je vous dis, mon fils, non point pour vous reprocher les
obligations que vous avez envers moi, mais seulement pour vous persuader de ne pas me laisser veuve une seconde fois ; c'est la seule grâce que je vous demande; ne ranimez pas une douleur assoupie, attendez au moins le jour de ma mort. Peut-être ne tardera-t-il guère! Ceux qui sont jeunes peuvent espérer vieillir, mais à mon âge on n’attend que la mort.

Quand vous m ’aurez fermé les yeux, quand vous m ’aurez rendu les devoirs d’un bon fils, vous pourrez choisir alors telle façon de vivre qu’il vous plaira, personne ne vous en empêchera. Mais pendant que je respire encore, supportez ma présence et ne vous ennuyez pas de vivre avec moi; ne causez pas une douleur si sensible à votre mère, à une mère qui ne l’a pas mérité et qui ne vous a jamais donné le moindre déplaisir.

Jean céda aux larmes de sa mère. Il alla se présenter à Méléce, évêque d’Antioche, qui l’attacha à son église en lui donnant l’ordre de lecteur. Sa mère, tout en le conservant auprès d ’elle, eut le bonheur de lui voir pratiquer toutes les austérités de la vie des anachorètes.


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Message  Monique Jeu 16 Mar 2023, 7:35 am

Si les exemples héroïques donnés par les mères chrétiennes pendant l’âge du martyre nous ont rendus sévères pour celle que les biographes contemporains du saint nomment la pieuse Anthuse, la Providence, du moins, montra, comme nous le disions plus haut, que son égoïsme maternel avait vu clair.

Après la mort de sa mère, Jean, cherchant à éviter la charge de l’épiscopat que la communauté chrétienne voulait lui imposer, s’enfuit. Il réalisa le projet de sa jeunesse et se rendit dans un des monastères du Liban. Il y resta deux ans, enfermé dans une des grottes du mont Cassin.

Au bout de ce temps, les cénobites, le voyant près de succomber à l’excès des austérités, lui persuadèrent qu’il n’avait pas le droit de se condamner ainsi à une mort évidente. Il fut donc contraint de rentrer à Antioche.

Là il commença cette vie admirable de sainteté et d’énergie, d’amour de Dieu et d’amour du peuple. Il laissa jaillir les premiers rayons de cette éloquence qui ravit plusieurs saints et fit dire de lui, si j ’ai bon souvenir, au pape Célestin, qu’il fut à la fois « le sage interprète des secrets de Dieu et le flambeau de la vertu ».


A suivre... § III.
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Message  Monique Ven 17 Mar 2023, 5:57 am

§ III. — Aglaïs, mère de saint A lexis(milieu du IVe siècle).— La Vie des saints est comme le musée de la force morale. Le catholicisme nous offre le s spécimens de toutes les nuances de la vigueur de l’âme humaine.

Quelques-uns de ces spécimens ébranlent la raison, l’étourdissent, tant ils sont supérieurs au développement normal de la volonté de l’homme. Saint Alexis de Rome est le frère en sainteté de saint Jean Calibyle de Constantinople. Ils donnent l’exemple d’une abnégation, qui par sa singularité, par la longueur de sa persévérance, par la patience d’un martyre cherché et recherché, goûté et savouré pendant de longues années, peut être appelé inimitable.

Le martyre d’Alexis torture non seulement celui qu"il a désiré, il le torture à chaque instant du jour, avec la possibilité de le faire cesser, à l’heure même, à la volonté du patient, sans blesser la conscience la plus timorée. Il fait plus, le martyr jouit, comme d’un mystérieux supplément de la souffrance bénie, il jouit d’englober dans son martyre tous ceux qu’il aime, dont il est aimé.

Par nous ne savons quel arrangement de la politique divine, la mère du saint, loin d ’être récompensée de la sainteté du fils qu’elle a élevé pour l’amour de Dieu, semble, à ne voir que l’aspect humain, être punie de cette sainteté. On est tenté de se dire qu’elle expie la vertu héroïque de son enfant.

Une vue plus haute, que nous donne la foi chrétienne, nous apprend qu’il y a là une bénédiction céleste et que la mère n’est pas punie, mais admise, par la souffrance commune, au partage des mérites de son fils.


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Message  Monique Ven 24 Mar 2023, 7:04 am

Le récit même de la vie de notre saint porte le caractère de cette vue plus haute et de cette foi qui illumine les profondeurs des actes providentiels. Cette vie en soi est lugubre; pourtant ce récit est clair, plein de poésie, de vivacité dramatique et d’une couleur locale très saisissante.

Il commence par nous donner une vive idée de ce qu’était la famille chrétienne peu après Constantin et pendant le règne même de Julien. Nous voyons comment les vieilles habitudes de la vie romaine avaient été, pour ainsi dire, baptisées et ce que la clientèle, qui donnait un caractère particulier aux grandes familles de Rome, était devenue en passant par la charité catholique.

Le client c’était le pauvre ; la protection était devenue la fraternité, et le religieux, le pèlerin entraient, momentanément mais complètement, dans la famille.

Du temps de l’empereur Julien, il y avait à Rome une famille sénatoriale riche et chrétienne. On ne nous donne pas le nom de la gens à la quelle elle appartenait, nous avons seulement le nom du mari, Euphemius et de la femme, Aglaïs ou Aglaë.


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Message  Monique Sam 25 Mar 2023, 7:18 am


Le narrateur admire naïvement la fortune de ces illustres : ils avaient trois mille esclaves, dont beaucoup étaient vêtus de robes de soie et ornés de ceintures d’or. On dressait chaque jour dans leur palais, à Rome, trois tables où étaient admis tous ceux qui se présentaient, pauvres, malades, pèlerins, voyageurs ou voisins. Les religieux étaient introduits auprès d’Euphemius et d’Aglaïs qui les admettaient à leur table.

La charité de ces patriciens était si grande qu’ils avaient consenti à retarder le dîner jusqu ’à l’heure de none (trois heures de l’après-midi) parce que c’était l’heure où les religieux avaient le droit de rompre le jeûne. Aglaïs était si pieuse que quand parfois le sang orgueilleux de la matrone se révoltait et que les exigences des pauvres l’irritaient, elle s’agenouillait immédiatement en murmurant : « Mon Dieu, je ne suis pas digne d’être portée sur la terre que vous avez créée. »

Elle essayait de se consoler aussi de sa stérilité, mais elle ne cessait pas de prier Notre-Seigneur de la faire cesser pour son honneur à elle, pour la consolation de son époux et pour l’appui et le bonheur de leur vieillesse. Ses prières et sa charité touchèrent enfin Dieu. Elle eut un fils qu’on nomma Alexis. On. lui donna l’éducation des patriciens chrétiens ; à partir de six ans on lui apprit la grammaire, la rhétorique, l’histoire, l’histoire de l’Église du Christ.  Il annonçait qu’il deviendrait un savant et un excellent orateur ; surtout il profitait des conseils et des exemples maternels en développant en lui l’amour de la vertu et du Seigneur Jésus.

Il devint un jeune homme accompli. On lui promettait les premières charges de l’empire pour lui il voulait surtout être un saint.


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Message  Monique Dim 26 Mar 2023, 6:00 am

Lorsqu’il fut en âge d ’être marié, le père dit : « Donnons une épouse à notre cher enfant. » Aglaïs s’inclina profondément devant son mari. « Que le Seigneur vous entende! Célébrons les noces de notre fils, et, afin que Dieu le bénisse, j ’augmenterai mes aumônes! »

On choisit pour épouse une jeune fille vertueuse et belle, qui était de la famille impériale. Alexis n’osa pas se refuser aux désirs de sa mère. Le mariage se fit à l’église de Saint-Boniface, qui était située près du palais du sénateur.

Quand le soir fut venu, le nouveau mari reçut la bénédiction de son père et de sa mère, et il se rendit dans la chambre nuptiale. Sa femme l’attendait, assise sur un siège élevé. Il s’approcha d’elle, prit un anneau et une boucle de ceinture, les enveloppa dans un voile de pourpre, les lui remit et lui dit : « Je vous prie de conserver ces objets et Dieu sera entre vous et moi jusqu’à ce que sa volonté s’accomplisse. »

Il la laissa stupéfaite, se rendit à sa chambre, y prit l’argent et les bijoux qui lui appartenaient, quitta le palais et arrêta son passage sur un navire qui se rendait à Edesse. Il y vendit tout ce qu’il avait emporté, et le distribua aux pauvres. Il alla s’installer au porche d ’une église où se trouvait une statue miraculeuse de Notre-Seigneur et il y vécut d’aumônes.


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Message  Monique Lun 27 Mar 2023, 8:28 am

On devine la douleur de la pauvre mère, les recherches qu’elle fit faire et qui furent vaines. On nous la montre renfermée dans sa chambre où elle laisse à peine pénétrer un rayon de soleil, couchant sur la cendre, pleurant et soupirant :

« S ’il était mort, Seigneur, peut-être pourrais-je me consoler parce que j ’aurais l’espérance qu’il est heureux auprès de vous. »

Nous n’avons pas à raconter la vie du saint pendant les sept années qui suivent sa fuite, ni les causes miraculeuses qui le ramenèrent à Rome.

Un jour qu’Euphemius revenait du palais de l’empereur, il vit venir à lui un mendiant déguenillé, hâve, la barbe hirsute, les cheveux emmêlés. Le charitable sénateur le laissa approcher.

« Serviteur de Dieu, dit le mendiant qui n’était autre qu’Alexis, exercez, je vous en prie, votre charité envers un misérable. Permettez qu'il vive des miettes qui tombent de votre table, Dieu vous bénira et si quelques-uns des vôtres sont en voyage, le Seigneur permettra qu’ils reviennent sains et saufs. » Cette parole rappela plus vivement à la pensée du père et de la mère le souvenir du fils absent.

Ils ne pouvaient le reconnaître dans le misérable en qui rien ne restait plus de ce qui avait caractérisé la physionomie de leur Alexis. Ils se laissèrent toucher néanmoins. Ils permirent au mendiant de loger dans le vestibule du palais. Aglaïs voulut avoir sous les yeux le pauvre envoyé par le Seigneur, et elle ordonna qu’on lui servît les mets qui venaient de la table où elle recevait les pèlerins et les religieux.


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Message  Monique Mar 28 Mar 2023, 6:12 am

Bien des années, se passèrent encore. Jamais rien ne put l’amener à supposer qu’elle avait là l’enfant qu’elle continuait de faire chercher par le monde entier.

Il faut lire dans la vie du saint ces scènes vivantes où nous voyons le pape Innocent, l’empereur Honorius et le sénateur Euphemius avertis par des voix miraculeuses de la présence à Rome de l’homme de Dieu.

Pendant ce temps, Alexis, averti, lui aussi, que le jour de sa mort était arrivé, écrivit, comme il en avait reçu l’ordre d’en haut, le récit de sa fuite et de ses aventures, puis il se coucha sur son pauvre grabat et il rendit à Dieu son âme.

Les Anges la portèrent immédiatement au Paradis, afin de le récompenser des grandes souffrances que son cœur avaient éprouvées volontairement pour être tout entier à Jésus. Le pape, l’empereur, le sénateur, suivis d ’une foule immense soulevée par les voix miraculeuses, arrivent au palais, de là à la logette du mendiant. On ouvre la porte et on le trouve couché, la tête recouverte de son sac. On l’appelle, il ne bouge pas. On retire le sac, Alexis était mort, mais son visage était tout éclatant d ’une lumière surnaturelle. Il tenait à la main un papier, qu’on prit et qui dévoila toute l’histoire de ce héros de la patience et de l’humilité.

Mais voici la mère. Elle accourt, elle a été avertie. Elle a grand’peine à fendre les flots du peuple assemblé. Celui-ci est si désireux de toucher les vêtements, le lit, les membres du martyr que même une pluie de pièces d’or jetées par les ordres d’Euphemius, ne put décider personne à s’éloigner pour les ramasser. Aglaïs se précipita sur le grabat, déchira ses vêtements. « Ah ! laissez-moi arroser de mes larmes celui que je pleure depuis tant d’an nées! » Puis, mettant son visage contre celui du cadavre, elle reste là sans pouvoir s’en détacher. « Tu nous voyais pleurer tous les jours ton absence, et tu t ’es toujours tu! » répétait-elle.

On put enfin éloigner le peuple et porter le corps à l’église Saint-Boniface. Pendant sept jours, ni la mère ni l’épouse ne voulurent quitter le cercueil, mais il fallut pourtant le mettre au tombeau.
La maison d’Euphemius était située sur le mont Aventin, près de l’endroit où s’élevait jadis le temple d'Hercule Vainqueur, mille fois moins énergique, malgré sa force et ses victoires, que ce mendiant. Cette maison fut changée en une église, sous le vocable de saint Alexis. On raconte la grande quantité des miracles qui se firent près de son tombeau et on montre encore une partie de l’escalier sous lequel le saint se couchait dans le vestibule du palais paternel.

A suivre... § IV.
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Message  Monique Mer 29 Mar 2023, 6:01 am

§ IV. — La Mère de sainte Euphrasie (commencement du Ve siècle). — Jamais nulle mère ne prépara mieux sa fille à la sainteté et ne triompha plus vaillamment de l’égoïsme maternel. Elle était l’épouse d’un sénateur de Constantinople, homme illustre par les grandes charges qu’il occupait et surtout par sa piété.

Euphrasie — car elle portait le même nom que la sainte sa fille — voulut, dès la naissance de son enfant, la recommander par la charité à la protection spéciale du Seigneur. Elle engagea son mari à vendre une partie notable de leurs biens et à la distribuer aux pauvres, afin, disait-elle, que la charité portât leur fortune dans les terres du Ciel où elle produirait le centuple. Le mari mourut peu de temps après avoir rempli les désirs de sa femme. Celle-ci se trouvant jeune, belle et riche, alla se jeter aux pieds de l’empereur Théodose, son parent, en implorant sa protection afin qu’on ne lui imposât pas un nouvel époux.

Néanmoins, demandée en mariage par un puissant personnage qui avait intéressé à sa demande l’impératrice elle-même, Euphrasie quitta Constantinople. Elle se réfugia en Égypte où il lui restait de grands biens. Pour fuir les sollicitations de son prétendant, et surtout par amour delà charité, elle commença le pèlerinage aumônier qui donne à son existence un caractère personnel. Elle ne se contentait pas de secourir les pauvres qui venaient à elle, pas même de les visiter dans la ville où elle s’était retirée, elle entreprit un voyage, non pas à la recherche des choses belles ou curieuses, mais à la recherche de l’infortune. Elle allait, accompagnée de sa fille
qu’elle formait ainsi à un grand amour pour Jésus et pour les enfants chéris du Seigneur compatissant, elle allait de ville en ville, s’inquiétant des bonnes œuvres à faire, des souffrances à soulager.

Elle parcourut notamment le désert de la Thébaïde, qui formait comme une immense ville composée de milliers d’ermitages et ayant pour uniques habitants des milliers d ’anachorètes. Puis elle vint avec sa fille visiter un monastère qui renfermait cent trente religieuses très austères, dont la plupart ne mangeaient que de
deux ou trois jours l’un. Elle voulut répandre parmi elles ses aumônes, comme elle l’avait accoutumé. L ’abbesse n’accepta que de la cire, de l’huile et de l’encens pour la célébration des Saints Mystères.


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Message  Monique Jeu 30 Mar 2023, 7:08 am

Euphrasie se décida à demeurer quelque temps auprès de ces saintes religieuses, qu’elle se mit à visiter fréquemment. Elle amenait souvent sa fille avec elle. L ’enfant avait alors sept ans. La mère ne tarda pas à remarquer avec quelle attention ingénue la fillette écoutait les conversations avec l’abbesse. Mainte fois elles roulaient sur le bonheur de pouvoir se consacrer tout entier à Dieu en méprisant les préoccupations habituelles du monde, et l’enfant redoublait alors d’attention.

Un jour, que la conversation se prolongea si tard que le soir était venu quand Euphrasie se leva pour partir. Sa fille ne se leva pas. On lui demanda pourquoi. Elle répondit qu’elle ne voulait pas sortir du monastère. L ’abbesse lui démontra qu’on n y pouvait demeurer la nuit, à moins d’y être attachée par des vœux perpétuels. Alors la petite Euphrasie, prenant un crucifix qui était là, le baisa avec une grande tendresse et elle dit :

« Mais c’est ce que je désire, je veux me donner au Seigneur et être religieuse ici. » L ’abbesse résista d’abord et représenta à l’enfant l ’austérité de la règle. Celle-ci assura qu’elle la connaissait; qu’elle avait bien réfléchi, et, avec son doux et serein sourire, elle assura qu’elle était décidée à faire des vœux perpétuels.


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Message  Monique Ven 31 Mar 2023, 6:00 am

La mère assistait à ce débat, tenait son regard fixé sur la fillette comme si elle eût voulu pénétrer jusqu’au fond de son âme. Elle y pénétrait en effet. Elle entrevit le saint avenir qui attendait sa fille. Elle l’embrassa, lui dit qu’elle ne voulait pas la disputer à Dieu, car bien qu'elle n’eût plus en ce monde d’autre félicité humaine que sa présence, elle préférait le bonheur de son enfant à l’égoïsme de son cœur, « Je ne veux faire qu’une prière à Notre-Seigneur, c’est qu’il te donne la persévérance. »

Son cœur, tout vaillant qu’il fût, ne put triompher complètement du souvenir qui lui revenait des gentillesses et des tendresses de la petite Euphrasie. Elle dut se retirer en hâte pour cacher ses larmes. Elle reprit, désormais seule, ses voyages à la recherche des misérables, mais elle revenait toujours au monastère. Et quand elle eut dépensé à peu près toutes ses richesses en aumônes, n’ayant plus rien à faire en ce monde, puisqu’après que Dieu lui eut repris son mari, elle Lui avait donné son unique enfant, elle Lui demanda de la rappeler à Lui.

Six ou sept ans se passèrent, pourtant ; puis l'abbesse annonça à dame Euphrasie que ses vœux étaient exaucés et que dans trois jours elle quitterait la terre.

Toute joyeuse, elle se rendit une dernière fois après de sa fille, lui dit que pour l’encourager à la persévérance, — car après le bonheur du Ciel, rien ne valait le bonheur du cloître,— elle demanderait à être enterrée dans le monastère. Elle demeurerait ainsi à côté d’elle. Elle lui laissa ce qui restait de sa fortune, en lui indiquant les bonnes œuvres qu’elle aurait à faire. Puis, rentrant chez elle, elle s’endormit dans la paix du Seigneur, portée dans le Ciel par la reconnaissance des milliers de pauvres qu’elle avait soulagés et accueillie par le sourire de l’Amant Divin auquel elle avait offert son unique enfant.

La vierge Euphrasie, après une vie angélique, mourut à l’âge de trente ans. Elle voulut rejoindre dans la tombe cette mère qu’elle espérait bien rejoindre dans le Ciel, et elle demanda à être enterrée dans le tombeau maternel.


A suivre... § V.
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Message  Monique Sam 01 Avr 2023, 5:37 am

§ V. — La Mère de saint Jean Calybile (426-450). — Cette biographie présente le même caractère que la vie de saint Alexis. C’est, contrairement aux règles habituelles, l’amour filial qui est au premier plan, l’amour maternel reste dans la pénombre. L ’amour du fils parait plus grand que celui de la mère, et cet amour a un caractère si original et si touchant !

Saint Jean est entouré d’une poésie austère, mais on se prend d’une pitié si attendrie et si respectueuse pour ce type exquis de doux héroïsme, pour cette âme sincère et chrétiennement vaillante, que la lumière, jaillissant de tout l’être du fils, entoure la mère.

Elle vivait à Constantinople sous le règne de Valentinien III, elle se nommait Théodora. Son mari, Eutrope, commandait une des armées de l’empereur. Elle eut trois fils. Les deux premiers occupèrent, comme leur père, les premières charges de l’empire.

Le troisième était si doux et si charmant que Théodora prit un soin plus particulier encore de son éducation. Elle développa en lui un grand goût pour les lettres et pour la piété. Dès l’âge de douze ans il avait, à force d’instances, obtenu la permission d’accompagner sa mère aux offices du jour et de la nuit.


A suivre...
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Message  Monique Dim 02 Avr 2023, 5:45 am

La renommée charitable d’Eutrope et de Théodora était aussi grande que leur fortune. C’était chez eux que les moines voyageurs venaient demander l’hospitalité. Jean leur faisait fête et avait soin que le palais leur fût, en effet, hospitalier. Un jour, l’un d ’entre eux le frappa par sa physionomie recueillie. Il lui demanda qui il était, d’où il venait. Le moine répondit que son monastère était assez près de Constantinople, et q u ’il appartenait à l’ordre des Sans Sommeil, religieux chez qui l’Office divin était célébré sans interruption du jour ou de la nuit. Jean l’interrogea plus à fond. Ce qu’il apprit des usages de cet ordre et de la dévotion des moines le saisit. Il demanda au religieux où il allait. Celui-ci lui ayant dit qu’il allait en pèlerinage à Jérusalem, Jean ne le voulut pas laisser partir avant qu’il lui eût promis sous serinent qu’il repasserait par Constantinople, au retour et qu’il l’emmènerait avec lui.

Puis il alla demander à sa mère de lui donner» le livre des Evangiles. Théodora, de plus en plus
heureuse de voir des goûts si sages en un si jeune âge, lui acheta un beau livre fort bien écrit
et parfaitement relié.

Le religieux revint. Jean lui rappela son serment, et, sans prendre autre chose que son livre, il monta sur le navire qui emmenait le moine et l’accompagna jusqu’à son monastère.

Nous n’avons pas à dire les difficultés que fit l'abbé de ce monastère pour recevoir le jeune seigneur, les vaines recherches des parents, les six années que Jean passa dans le couvent, dans une telle perfection de vertus qu’il était le modèle de tous les religieux.


A suivre...
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Message  Monique Lun 03 Avr 2023, 6:00 am


Au bout de ce temps, Jean dépérit. On ne lui trouvait aucune maladie, il ne se plaignait pas. Il assurait qu’il ne souffrait pas. Pourtant il s’affaiblissait tellement qu’il en vint à l’extrémité.

L’abbé, le voyant sur le point de mourir, lui ordonna, au nom de l’obéissance, de révéler ce qu’il pouvait savoir sur la cause de cette étonnante maladie.

Jean répondit alors que, malgré toutes les prières, toutes les pénitences, tous les efforts, il ne pouvait chasser le désir de revoir sa mère. L ’abbé attristé car Jean par sa douceur, sa bonté, sa piété, sa sincérité, s’était fait aimer de tout le monastère rassembla les religieux.

Il leur raconta ce que leur frère venait de lui dire. Il leur demanda s’il valait mieux laisser mourir Jean que de lui permettre d’aller revoir sa mère. Les religieux jugèrent qu’il devait permettre à leur frère de quitter le couvent.

« Allez donc, mon fils, sous la conduite de Dieu. Qu’Il vous serve de guide et vous empêche de rien faire qui soit hors de l’ordre et de l' amour de Jésus-Christ. »

Jean se jeta en pleurant dans les bras du Père et des frères et il les quitta fort attristé car il subissait l’entraînement tout en y résistant. Il se promit bien qu’il reviendrait, après avoir embrassé encore une fois sa mère, qu’il avait quittée si brusquement et dont la douleur assiégeait son imagination.


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Message  Monique Mar 04 Avr 2023, 6:39 am

La renommée charitable d’Eutrope et de Théodora était aussi grande que leur fortune. C’était chez eux que les moines voyageurs venaient demander l’hospitalité. Jean leur faisait fête et avait soin que le palais leur fût, en effet, hospitalier. Un jour, l’un d ’entre eux le frappa par sa physionomie recueillie. Il lui demanda qui il était, d’où il venait.

Le moine répondit que son monastère était assez près de Constantinople, et q u ’il appartenait à l’ordre des Sans Sommeil, religieux chez qui l’Office divin était célébré sans interruption du jour ou de la nuit. Jean l’interrogea plus à fond. Ce qu’il apprit des usages de cet ordre et de la dévotion des moines le saisit. Il demanda au religieux où il
allait. Celui-ci lui ayant dit qu’il allait en pèlerinage à Jérusalem, Jean ne le voulut pas laisser partir avant qu’il lui eût promis sous serinent qu’il repasserait par Constantinople, au retour et qu’il l’emmènerait avec lui.

Puis il alla demander à sa mère de lui donner le livre des Evangiles. Théodora, de plus en plus heureuse de voir de et parfaitement relié.

Le religieux revint. Jean lui rappela son serment, et, sans prendre autre chose que son livre, il monta sur le navire qui emmenait le moine et l’accompagna jusqu’à son monastère. Nous n’avons pas à dire les difficultés que fit l’abbé de ce monastère pour recevoir le jeune seigneur, les vaines recherches des parents, les six années que Jean passa dans le couvent, dans une telle perfection de vertus qu’il était le modèle de tous les religieux.


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Message  Monique Mer 05 Avr 2023, 5:56 am

Au bout de ce temps, Jean dépérit. On ne lui trouvait aucune maladie, il ne se plaignait pas. Il assurait qu’il ne souffrait pas. Pourtant il s’affaiblissait tellement qu’il en vint à l’extrémité.

L’abbé, le voyant sur le point de mourir, lui ordonna, au nom de l’obéissance, de révéler ce qu’il pouvait savoir sur la cause de cette étonnante maladie.

Jean répondit alors que, malgré toutes les prières, toutes les pénitences, tous les efforts, il ne pouvait chasser le désir de revoir sa mère. L ’abbé attristé car Jean par sa douceur, sa bonté, sa piété, sa sincérité, s’était fait aimer de tout le monastère rassembla les religieux. Il leur raconta ce que leur frère venait de lui dire. Il leur demanda s’il valait mieux laisser mourir Jean que de lui permettre d’aller revoir sa mère. Les religieux jugèrent qu’il devait
permettre à leur frère de quitter le couvent.

« Allez donc, mon fils, sous la conduite de Dieu. Qu’Il vous serve de guide et vous empêche de rien faire qui soit hors de l’ordre et de l' amour de Jésus-Christ. »

Jean se jeta en pleurant dans les bras du Père et des frères et il les quitta fort attristé car il subissait l’entraînement tout en y résistant. Il se promit bien qu’il reviendrait, après avoir embrassé encore une fois sa mère, qu’il avait quittée si brusquement et dont la douleur assiégeait son imagination.


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Message  Monique Jeu 06 Avr 2023, 5:44 am

Quand il fut hors du monastère, il changea d'habillements avec un mendiant qu’il rencontra, trouva un navire où on l’accepta pour l’amour de Dieu et arriva aux faubourgs de Constantinople. Là, il eut un grand remords d ’avoir succombé au désir de revoir sa mère : « Seigneur, murmurait-il, vous voulez que nous aimions ceux qui nous ont donné la vie, mais il est bien juste que nous vous aimions plus qu’eux. Vous savez que j ’ai tout quitté avec joie pour votre service, donnez-moi, je vous en supplie, la force de vaincre le grand désir que j ’ai d ’embrasser ma mère encore une fois, après vous avoir promis d’oublier tout pour vous ! »

Il arriva à la porte du palais, au milieu de la nuit et se coucha sur le seuil. Le lendemain matin, les domestiques le trouvant là, l’interrogèrent, il répondit qu’il était un pauvre mendiant. Il était si humble et si doux, les maîtres du logis étaient si charitables, les domestiques, à l’exemple des maîtres, étaient si habitués à bien traiter les pauvres qu’ils lui permirent de bâtir contre la muraille, près de la porte delà maison, une petite logette où il demeurerait.

Alors commença le grand martyre qu’il s’imposa, en punition de la faiblesse à laquelle il avait succombé en quittant son monastère. IL voyait passer chaque jour son père et sa mère. Il n ’avait pas tardé à apprendre que celle-ci ne pouvait se consoler du départ de son dernier enfant. Elle le faisait chercher par toute la terre, car elle ne pouvait pas se persuader qu’il fût mort. Quand il la voyait passer devant lui, toujours grave, toujours préoccupée, et qu’il savait que cette tristesse était due à la pensée continuelle de l’enfant perdu, il avait le cœur déchiré. Il était chaque jour prêt à lui crier : « Le voici, l’enfant que vous pleurez ! » Et il lui fallait un effort héroïque pour ne pas sauter au cou de cette mère qu’il aimait comme jamais fils n’a mieux aimé sa mère. Il lui arriva une redoutable épreuve avec quelques joies pieuses. Eutrope, voyant ce mendiant si humble et si doux, l’avait pris en gré. En apprenant qu’il était un objet de raillerie pour la populace du voisinage, qui, lâche comme toutes les populaces et le voyant patient et sans défense, s’était fait une habitude de l’injurier, Eutrope le prit sous sa protection et il ordonna aux domestiques de prendre sa défense. Il lui fit envoyer chaque jour des provisions.

Jean ne garda que le strict nécessaire. Il eut alors le grand bonheur de faire aumône, car il avait l’âme si généreuse qu’il avait pitié de ceux qui souffraient,moins que lui pourtant. Jadis, il distribuait ce qu’il avait recueilli en mendiant et maintenant il pouvait, avec les dons d’Eutrope, apaiser beaucoup de faims et de misères.


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Message  Monique Ven 07 Avr 2023, 6:51 am

Par contre — et ce fut là la cruelle douleur qui abrégea sa vie sa mère ne pouvait voir ce mendiant sans une sorte de répulsion. Notre-Seigneur voulait augmenter les mérites de son aimant serviteur et tremper son héroïsme à tous les feux de la patience. Il inspira donc à Théodora de l’éloignement pour ce pauvre dont l’aspect la faisait souffrir en lui rappelant vaguement le fils perdu. Elle n’avait pas conscience de la douleur qu’elle éprouvait à sa vue, car, dans son souvenir elle revoyait toujours son enfant comme il était à l’âge où il avait disparu et dans le pauvre homme malpropre, en haillons, il lui eût été impossible de reconnaître le petit Jean.
Cette antipathie maternelle, en augmentant en notre saint la tentation de se nommer et en rendant chaque jour la lutte plus angoisseuse, l’affaiblit tellement qu’il comprit que la fin de sa vie approchait.

Il demeura ferme dans la résolution de ne pas se faire connaître. Il y avait trois ans qu’il vivait ainsi à la porte du palais paternel. À la fin de la troisième année, il eut un songe Notre-Seigneur lui apparut resplendissant de beauté et lui apprit qu’il n ’avait plus que trois jours à vivre.

Il acheva de se préparer à la mort. A la fin du troisième jour seulement, quand la dernière heure fut venue il demanda à l’intendant de la maison, qui était venu avec les domestiques lui dire adieu et se recommander à ses prières, il lui demanda de supplier sa maîtresse de venir le voir.


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Message  Monique Sam 08 Avr 2023, 5:02 am

Celle-ci, qui était pieuse, triompha de la répulsion que lui inspirait le mendiant. Elle arriva auprès du grabat où il était étendu. Il fut bien tenté de se faire reconnaître afin de pouvoir, à cette heure dernière, embrasser sa mère au moins une fois. Il résista encore.

Madame, lui dit-il sans oser la regarder, Dieu vous récompensera ainsi que votre mari du bien que vous avez fait à un pauvre étranger, puisque Jésus-Christ Ta promis. Je vous supplie de m ’accorder la première et la seule demande que je me permette de vous faire. C’est que je sois enterré dans cette logette avec les habits déchirés que je porte et sans aucune cérémonie. »

Elle le lui promit. Alors, pour la remercier, il lui remit le livre des Evangiles qu’il avait reçu d’elle quand il était tout enfant et qui était le seul bien qu’il eût emporté de la maison paternelle comme du monastère. Il était tellement usé qu’elle ne le reconnut pas ; toutefois il lui rappela plus vivement la pensée de son enfant perdu, elle se mit à fondre en larmes et elle tomba évanouie.

Ce fut la plus cruelle de toutes les angoisses que Jean eût ressenties. Il résista encore et ne dévoila pas sa personnalité.

Théodora, revenue à elle, porta ce livre à Eutrope. Celui-ci le feuilleta et il s’écria : « C’est bien là le livre que nous avons donné à notre pauvre fils si savant, si pieux, si charmant. Il faut savoir de ce pauvre comment il est venu en sa possession ; peut-être apprendrons-nous quelque chose qui nous permettra de mieux diriger nos recherches. »

Ils accoururent à la logette et forcèrent le mendiant, au nom du respect et de la reconnaissance qu’il leur devait, à jurer qu’il leur dirait toute la vérité sur le livre. Il vit bien alors que Dieu voulait qu’il fût reconnu avant de mourir.
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Message  Monique Dim 09 Avr 2023, 7:50 am

« Ce livre, dit-il, c’est bien à moi que vous l’avez donné et je suis bien votre fils Jean, qui vous a quittés, il y a neuf ans, pour aller vivre au monastère des Sans Sommeil. »
Ils le regardèrent avec grande attention et le reconnurent à plusieurs signes, dit son historien. Sa mère se pencha vers lui et l’embrassa, en le couvrant de ses larmes. Il lui tendit les bras en jetant sur elle un regard tout illuminé de la lumière céleste et il mourut en lui donnant le premier et le dernier baiser.

Malgré la promesse qu’elle avait faite, Théodora fit revêtir le corps de riches linceuls et elle voulut le faire enterrer avec pompe. Mais elle fut brusquement frappée de paralysie. Eutrope lui rappela la promesse faite au mendiant. On rendit au mort ses haillons et Théodora fut guérie aussi subitement qu’elle avait été frappée. Il fut enterré dans sa logette; méritant son nom, Calibyle — qui demeure dans une masure — après sa mort comme dans sa vie. Une grande église fut bâtie ensuite sur l’emplacement de la cabane.

Un des croisés qui s’emparèrent de Constantinople en 1204, Jean de Besançon, y prit le chef du saint et le rapporta à Besançon. Il fut brûlé en 1794.


A suivre... § VI
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