La Cité de Dieu (SAINT AUGUSTIN) Livre I :Les Goths à Rome. Livre II: Rome et les faux dieux. (complet)

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Message  ROBERT. Mer 06 Mai 2015, 11:04 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXV a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXV.

IL NE FAUT POINT ÉVITER UN PÉCHÉ PAR UN AUTRE.  




Mais il est à craindre, dit-on, que soumis à un outrage brutal, le corps n’entraîne l’âme, par le vif aiguillon de la volupté, à donner au péché un coupable contentement; et dès lors, le chrétien doit se tuer, non pour éviter le péché à autrui, mais pour s’en préserver lui-même. Je réponds que celui-là ne laissera point son âme céder à l’excitation d’une sensualité étrangère qui vit soumis à Dieu et à la divine sagesse, et non à la concupiscence de la chair. De plus, s’il est vrai et évident que c’est un crime détestable et digne de la damnation de se donner la mort, y a-t-il un homme assez insensé pour parler de la sorte: Péchons maintenant, de crainte que nous ne venions à pécher plus tard. Soyons homicides, de crainte d’être plus tard adultères.


Quoi donc ! Si l’iniquité est si grande qu’il n’y ait plus à choisir entre le crime et l’innocence, mais à opter entre deux crimes, ne vaut-il pas mieux préférer un adultère incertain et à venir à un homicide actuel et certain; et le péché, qui peut être expié par la pénitence n’est-il point préférable à celui qui ne laisse aucune place au repentir ?  Ceci soit dit pour ces fidèles qui se croient obligés à se donner la mort, non pour épargner un crime à leur prochain, mais de peur que la brutalité qu’ils subissent n’arrache à leur volonté un consentement criminel.


Mais loin de moi, loin de toute âme chrétienne, qui, ayant mis sa confiance en Dieu, y trouve son appui, loin de nous tous cette crainte de céder à l’attrait honteux de la volupté de la chair!  Et si cet esprit de révolte sensuelle, qui reste attaché à nos membres, même aux approches de la mort, agit comme par sa loi propre en dehors de la loi de notre volonté, peut-il y avoir faute, quand la volonté refuse, puisqu’il n’y en a pas, quand elle est suspendue par le sommeil ?




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras  ajoutés.

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Message  ROBERT. Jeu 07 Mai 2015, 12:04 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXVI a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXVI.

IL N’EST POINT PERMIS DE SUIVRE L’EXEMPLE

DES SAINTS EN CERTAINS CAS OU LA FOI NOUS

ASSURE QU’ILS ONT AGI PAR DES MOTIFS PARTICULIERS.




On objecte l’exemple de plusieurs saintes femmes qui, au temps de la persécution, pour soustraire leur pudeur à une brutale violence, se précipitèrent dans un fleuve où elles devaient infailliblement être entraînées et périr. L’Eglise catholique, dit-on, célèbre leur martyre avec une solennelle vénération1. Ici je dois me défendre tout jugement téméraire. L’Eglise a-t-elle obéi à une inspiration divine, manifestée par des signes certains, en honorant ainsi la mémoire de ces saintes femmes ? Je l’ignore; mais cela peut être. Qui dira si ces vertueuses femmes, loin d’agir humainement, n’ont pas été divinement inspirées, et si, loin d’être égarées par le délire, elles n’ont pas exécuté un ordre d’en haut, comme fit Samson, dont il n’est pas permis de croire qu’il ait agi autrement2 ? Lorsque Dieu parle et intime un commandement précis, qui oserait faire un crime de l’obéissance et accuser la piété de se montrer trop docile? Ce n’est point à dire maintenant que le premier venu ait le droit d’immoler son fils à Dieu, sous prétexte d’imiter l’exemple d’Abraham.


En effet, quand un soldat tue un homme pour obéir à l’autorité légitime, il n’est coupable d’homicide devant aucune loi civile; au contraire, s’il n’obéit pas, il est coupable de désertion et de révolte3 . Supposez, au contraire, qu’il eût agi de son autorité privée, il eût été responsable du sang versé; de sorte que, pour une même action, ce soldat est justement puni, soit quand il la fait sans ordre, soit quand ayant ordre de la faire, il ne la fait pas. Or, si l’ordre d’un général a une si grande autorité, que dire d’un commandement du Créateur ? Ainsi donc, permis à celui qui sait qu’il est défendu d’attenter sur soi-même, de se tuer, si c’est pour obéir à celui dont il n’est pas permis de mépriser les ordres; mais qu’il prenne garde que l’ordre ne soit pas douteux.


Nous ne pénétrons, nous, dans les secrets de la conscience d’autrui que par ce qui est confié à notre oreille, et nous ne prétendons pas au jugement des choses cachées: "Nul ne sait ce qui se passe dans l’homme, si ce n’est l’esprit de l’homme qui est en lui1". Ce que nous disons, ce que nous affirmons, ce que nous approuvons en toutes manières, c’est que personne n’a le droit de se donner la mort, ni pour éviter les misères du temps, car il risque de tomber dans celles de l’éternité, ni à cause des péchés d’autrui, car, pour éviter un péché qui ne le souillait pas, il commence par se charger lui-même d’un péché qui lui est propre, ni pour ses péchés passés, car, s’il a péché, il a d’autant plus besoin de vivre pour faire pénitence, ni enfin, par le désir d’une vie meilleure, car il n’y a point de vie meilleure pour ceux qui sont coupables de leur mort.




1. On peut citer, parmi ces saintes femmes, Pélagie, sa mère et ses sœurs, louées par saint Ambroise, De Virgin., lib. III, et Epist. VII.
   Voyez aussi, sur la mort héroïque des deux vierges, Bernice et Prosdoce, le discours de saint Jean Chrysostôme, t. II, p. 756 et suiv., de la nouvelle édition.
2. Voyez plus haut, ch. 21.
3. Comparez saint Augustin, De lib. arb., lib. I, n. 11 et 12.
1. I Corinthiens II, 11.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
italiques et gras 
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Message  ROBERT. Ven 08 Mai 2015, 11:18 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXVII a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXVII.

SI LA MORT VOLONTAIRE EST DÉSIRABLE

COMME UN REFUGE CONTRE LE PÉCHÉ.  




Reste un dernier motif dont j’ai déjà parlé, et qui consiste à fonder le droit de se donner la mort sur la crainte qu’on éprouve d’être entraîné au péché par les caresses de la volupté ou par les tortures de la douleur. Admettez ce motif comme légitime, vous serez conduits par le progrès du raisonnement à conseiller aux hommes de se donner la mort au moment où, purifiés par l’eau régénératrice du baptême, ils ont reçu la rémission de tous leurs péchés. Le vrai moment, en effet, de se mettre à couvert des péchés futurs, c’est quand tous les anciens sont effacés. Or, si la mort volontaire est légitime, pourquoi ne pas choisir ce moment de préférence ? Quel motif peut retenir un nouveau baptisé ? Pourquoi exposerait-il encore son âme purifiée à tous les périls de la vie, quand il lui est si facile d’y échapper, selon ce précepte: "Celui qui aime le péril y tombera2?" Pourquoi aimer tant et de si grands périls, ou, si on ne les aime pas, pourquoi s’y exposer en conservant une vie dont on a le droit de s’affranchir ?


Est-il possible d’avoir le cœur assez pervers et l’esprit assez aveuglé pour se créer ces deux obligations contradictoires: l’une, de se donner la mort, de peur que la domination d’un maître ne nous fasse tomber dans le péché; l’autre, de vivre, afin de supporter une existence pleine à chaque heure de tentations, de ces mêmes tentations que l’on aurait à craindre sous la domination d’un maître, et de mille autres qui sont inséparables de notre condition mortelle ? À ce compte, pourquoi perdrions-nous notre temps à enflammer le zèle des nouveaux baptisés par de vives exhortations, à leur inspirer l’amour de la pureté virginale, de la continence dans le veuvage, de la fidélité au lit conjugal, quand nous avons à leur indiquer un moyen de salut beaucoup plus sûr et à l’abri de tout péril, c’est de se donner la mort aussitôt après la rémission de leurs péchés, afin de paraître ainsi plus sains et plus purs devant Dieu ?


Or, s’il y a quelqu’un qui s’avise de donner un pareil conseil, je ne dirai pas: Il déraisonne je dirai: Il est fou. Comment donc serait-il permis de tenir à un homme le langage que voici: "Tuez-vous, de crainte que, vivant sous la domination d’un maître impudique, vous n’ajoutiez à vos fautes vénielles quelque plus grand péché", si c’est évidemment un crime abominable de lui dire: "Tuez-vous, aussitôt après l’absolution de vos péchés, de crainte que vous ne veniez par la suite à en  commettre d’autres et de plus grands, vivant dans un monde plein de voluptés attrayantes, de cruautés furieuses, d’illusions et de terreurs". Puisqu’un tel langage serait criminel, c’est donc aussi une chose criminelle de se tuer. On ne saurait, en effet, invoquer aucun motif qui fût plus légitime; celui-là ne l’étant pas, nul ne saurait l’être.




2. Ecclésiastique, III, 27.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
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Message  ROBERT. Sam 09 Mai 2015, 11:14 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXVIII a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXVIII

POURQUOI DIEU A PERMIS QUE LES BARBARES AIENT

ATTENTÉ À LA PUDEUR DES FEMMES CHRÉTIENNES.




Ainsi donc, fidèles servantes de Jésus-Christ, que la vie ne vous soit point à charge parce que les ennemis se sont fait un jeu de votre chasteté. Vous avez une grande et solide consolation, si votre conscience vous rend ce témoignage que vous n’avez point consenti au péché qui a été permis contre vous. Demanderez-vous pourquoi il a été permis ? Qu’il vous suffise de savoir que la Providence, qui a créé le monde et qui le gouverne, est profonde en ses conseils: "impénétrables sont ses jugements et insondables ses voies1". Toutefois descendez au fond de votre conscience, et demandez-vous sincèrement si ces dons de pureté, de continence, de chasteté n’ont pas enflé votre orgueil, si, trop charmées par les louanges des hommes, vous n’avez point envié à quelques-unes de vos compagnes ces mêmes vertus. Je n’accuse point, ne sachant rien, et je ne puis entendre la réponse de votre conscience; mais si elle est telle que je le crains, ne vous étonnez plus d’avoir perdu ce qui vous faisait espérer les empressements des hommes, et d’avoir conservé ce qui échappe à leurs regards. Si vous n’avez pas consenti au mal, c’est qu’un secours d’en haut est venu fortifier la grâce divine que vous alliez perdre, et l’opprobre subi devant les hommes a remplacé pour vous cette gloire humaine que vous risquiez de trop aimer.


Âmes timides, soyez deux fois consolées; d’un côté, une épreuve, de l’autre, un châtiment; une épreuve qui vous justifie, un châtiment qui vous corrige. Quant à celles d’entre vous dont la conscience ne leur reproche pas de s’être enorgueillies de posséder la pureté des vierges, la continence des veuves, la chasteté des épouses, qui, le cœur plein d’humilité1, se sont réjouies avec crainte de posséder le don de Dieu2, sans porter aucune envie à leurs émules en sainteté, qui dédaignant enfin l’estime des hommes, d’autant plus grande pour l’ordinaire que la vertu qui les obtient est plus rare, ont souhaité l’accroissement du nombre des saintes âmes plutôt que sa diminution qui les eût fait paraître davantage; quant à celles-là, qu’elles ne se plaignent pas d’avoir souffert la brutalité des barbares qu’elles n’accusent point Dieu de l’avoir permise, qu’elles ne doutent point de sa providence, qui laisse faire ce que nul ne commet impunément. Il est en effet certains penchants mauvais qui pèsent secrètement sur l’âme, et auxquels la justice de Dieu lâche les rênes à un certain jour pour en réserver la punition au dernier jugement.


Or, qui sait si ces saintes femmes, dont la conscience est pure de tout orgueil et qui ont eu à subir dans leur corps la violence des barbares, qui sait si elles ne nourrissaient pas quelque secrète faiblesse, qui pouvait dégénérer en faste ou en superbe, au cas où, dans le désordre universel, cette humiliation leur eût été épargnée ? De même que plusieurs ont été. emportés par la mort, afin que l’esprit du mal ne pervertît pas leur volonté1, ces femmes ont perdu l’honneur par la violence, afin que la prospérité ne pervertît pas leur modestie. Ainsi donc, ni celles qui étaient trop fières de leur pureté, ni celles que le malheur seul a préservées de l’orgueil, n’ont perdu la chasteté; seulement elles ont gagné l’humilité; celles-là ont été guéries d’un mal présent, celles-ci préservées d’un mal à venir.  


Ajoutons enfin que, parmi ces victimes de la violence des barbares, plus d’une peut-être s’était imaginée que la continence est un bien corporel que l’on conserve tant que le corps n’est pas souillé, tandis qu’elle est un bien du corps et de l’âme tout ensemble, lequel réside dans la force de la volonté, soutenue par la grâce divine, et ne peut se perdre contre le gré de son possesseur. Les voilà maintenant délivrées de ce faux préjugé; et quand leur conscience les assure du zèle dont elles ont servi Dieu, quand leur solide foi les persuade que ce Dieu ne peut abandonner qui le sert et l’invoque de tout son cœur, sachant du reste, de science certaine, combien la chasteté lui est agréable, elles doivent nécessairement conclure qu’il eût jamais permis l’outrage souffert par des âmes saintes, si cet outrage eût pu leur ravir le don qu’il leur a fait lui-même et qui les lui rend aimables, la sainteté.




1. Romains  XI, 33.
1. Romains XII, 16.
2. Psaume II, 11.
1. Sagesse IV, 11.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
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Dernière édition par ROBERT. le Dim 10 Mai 2015, 3:11 pm, édité 1 fois (Raison : mise en forme)
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Message  ROBERT. Dim 10 Mai 2015, 3:06 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXIX a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXIX

RÉPONSE QUE LES ENFANTS DU CHRIST DOIVENT FAIRE

AUX INFIDÈLES, QUAND CEUX-CI LEUR REPROCHENT

QUE LE CHRIST NE LES A PAS MIS À COUVERT

DE LA FUREUR DES ENNEMIS.




Toute la famille du Dieu véritable et souverain a donc un solide motif de consolation établi sur un meilleur fondement que l’espérance de biens chancelants et périssables; elle doit accepter sans regret la vie temporelle elle-même, puisqu’elle s’y prépare à la vie éternelle, usant des biens de ce monde sans s’y attacher, comme fait un voyageur, et subissant les maux terrestres comme une épreuve ou un châtiment. Si on insulte à sa résignation, si on vient lui dire, aux jours d’infortune: "Où est ton Dieu2?"  Qu’elle demande à son tour à ceux qui l’interrogent, où sont leurs dieux, alors qu’ils endurent ces mêmes souffrances dont la crainte est le seul principe de leur piété1.


Pour nous, enfants du Christ, nous répondrons: Notre Dieu est partout présent et tout entier partout; exempt de limites, il peut être présent en restant invisible et s’absenter sans se mouvoir. Quand ce Dieu m’afflige, c’est pour éprouver ma vertu ou pour châtier mes péchés; et en échange de maux temporels, si je les souffre avec piété, il me réserve une récompense éternelle. Mais vous, dignes à peine qu’on vous parle de vos dieux, qui êtes-vous en face du mien, "plus redoutable que tous les dieux; car tous les dieux des nations sont des démons, et le  Seigneur a fait les cieux2?"




2. Psaume XLI, 4.
1. On sait assez qu’il était d’usage dans l’ancienne république de faire de prières publiques, aux jours de grand péril;
    mais il est bon de rappeler ici qu’au moment où Alaric parut devant Rome, cette vieille coutume fut encore mise en pratique par le sénat romain.
    Voyez Sozomène, lib. IX, cap. 6; Nicéphore, Annal., lib. XIII, cap. 35, et Zozime, lib. V, cap. 41.
2. Psaume XCV, 4-5.




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Message  ROBERT. Lun 11 Mai 2015, 10:32 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXX a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXX.

CEUX QUI S’ÉLÈVENT CONTRE LA RELIGION CHRÉTIENNE

NE SONT AVIDES QUE DE HONTEUSES PROSPÉRITÉS.  




Si cet illustre Scipion Nasica, autrefois votre souverain Pontife, qui dans la terreur de la guerre punique fut choisi d’une voix unanime par le sénat, comme le meilleur citoyen de Rome, pour aller recevoir de Phrygie l’image de la mère des dieux3, si ce grand homme, dont vous n’oseriez affronter l’aspect, pouvait revenir à la vie, c’est lui qui se chargerait de rabattre votre impudence. Car enfin, qu’est-ce qui vous pousse à imputer au christianisme les maux que vous souffrez ?

C’est le désir de trouver la sécurité dans le vice, et de vous livrer sans obstacle à tout le dérèglement de vos mœurs.

Si vous souhaitez la paix et l’abondance, ce n’est pas pour en user honnêtement, c’est-à-dire avec mesure, tempérance et piété, mais pour vous procurer, au prix de folles prodigalités, une variété infinie de voluptés, et répandre ainsi dans les mœurs, au milieu de la prospérité apparente, une corruption mille fois plus désastreuse que toute la cruauté des ennemis.


C’est ce que craignait Scipion, votre grand pontife, et, au jugement de tout le sénat, le meilleur citoyen de Rome, quand il s’opposait à la ruine de Carthage, cette rivale de l’empire romain, et combattait l’avis contraire de Caton1. Il prévoyait les suites d’une sécurité fatale à des âmes énervées et voulait qu’elles fussent protégées par la crainte, comme des pupilles par un tuteur. Il voyait juste, et l’événement prouva qu’il avait raison. Carthage une fois détruite, la république romaine fut délivrée sans doute d’une grande terreur; mais combien de maux naquirent successivement de cette prospérité ! La concorde entre les citoyens affaiblie et détruite, bientôt des séditions sanglantes, puis, par un enchaînement de causes funestes, la guerre civile avec ses massacres, ses flots de sang, ses proscriptions, ses rapines; enfin, un tel déluge de calamités que ces Romains, qui, au temps de leur vertu, n’avaient rien à redouter que de l’ennemi, eurent beaucoup plus à souffrir, après l’avoir perdue, de la main de leurs propres concitoyens. La fureur de dominer, passion plus effrénée chez le peuple romain que tous les autres vices de notre nature, ayant triomphé dans un petit nombre de citoyens puissants, tout le reste, abattu et lassé, se courba sous le joug2.




3. C’est à Pessinonte, en Phrygie, qu’on alla chercher la statue de Cybèle.
    L’oracle de Delphes avait prescrit d’envoyer à sa rencontre le meilleur citoyen de Rome.
     Voyez Cicéron, De arusp. resp., cap. 13; Tite-Live, lib. XXIX, cap. 14.
1. Voyez Plutarque, Vie de Caton l’ancien, et Tite-Live, lib. XLIX, epit.
2. Voyez Salluste, de Bello Jugirth.., cap. 41 et sq., et Velleius Paterculus, lib. II, init.




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Message  ROBERT. Mar 12 Mai 2015, 2:59 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXXI a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXXI.

PAR QUELS DEGRÉS S’EST ACCRUE CHEZ LES

ROMAINS LA PASSION DE LA DOMINATION.      



Comment, en effet, cette passion se serait-elle apaisée dans ces esprits superbes, avant que de s’élever par des honneurs incessamment renouvelés jusqu’à la puissance royale ? Or, pour obtenir le renouvellement de ces honneurs, la brigue (manigance, intrigue) était indispensable; et la brigue elle-même ne pouvait prévaloir que chez un peuple corrompu par l’avarice et la débauche.


Or, comment le peuple devint-il avare et débauché ? Par un effet de cette prospérité dont s’alarmait si justement Scipion, quand il s’opposait avec une prévoyance admirable à la ruine de la plus redoutable et de la plus opulente ennemie de Rome. Il aurait voulu que la crainte servit de frein à la licence, que la licence comprimée arrêtât l’essor de la débauche et de l’avarice, et qu’ainsi la vertu pût croître et fleurir pour le salut de la république, et avec la vertu, la liberté  !

Ce fut par le même principe et dans un même sentiment de patriotique prévoyance que Scipion, je parle toujours de l’illustre pontife que le sénat proclama par un choix unanime le meilleur citoyen de Rome, détourna ses collègues du dessein qu’ils avaient formé de construire un amphithéâtre. Dans un discours plein d’autorité, il leur persuada de ne pas souffrir que la mollesse des Grecs vînt corrompre la virile austérité des antiques mœurs et souiller la vertu romaine de la contagion d’une corruption étrangère.


Le sénat fut si touché par cette grave éloquence qu’il défendit l’usage des sièges qu’on avait coutume de porter aux représentations scéniques. Avec quelle ardeur ce grand homme eût-il entrepris d’abolir les jeux mêmes, s’il eût osé résister à l’autorité de ce qu’il appelait des dieux ! Car il ne savait pas que ces prétendus dieux ne sont que de mauvais démons, ou s’il le savait, il croyait qu’on devait les apaiser plutôt que de les mépriser. La doctrine céleste n’avait pas encore été annoncée aux Gentils, pour purifier leur cœur par la foi, transformer en eux la nature humaine par une humble piété, les rendre capables des choses divines et les délivrer enfin de la domination des esprits superbes.




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Message  ROBERT. Mer 13 Mai 2015, 3:40 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXXII a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXXII.

DE L’ÉTABLISSEMENT DES JEUX SCÉNIQUES.  




Sachez donc, vous qui l’ignorez, et vous aussi qui feignez l’ignorance, n’oubliez pas, au milieu de vos murmures contre votre libérateur, que ces jeux scéniques, spectacles de turpitude, œuvres de licence et de vanité, ont été établis à Rome, non par la corruption des hommes, mais par le commandement de vos dieux. Mieux eût valu accorder les honneurs divins à Scipion que de rendre un culte à des dieux de cette sorte, qui n’étaient certes pas meilleurs que leur pontife. Écoutez-moi un instant avec attention, si toutefois votre esprit, longtemps enivré d’erreurs, est capable d’entendre la voix de la raison: Les dieux commandaient que l’on célébrât des jeux de théâtre pour guérir la peste des corps1, et Scipion, pour prévenir la peste des âmes, ne voulait pas que le théâtre même fût construit. S’il vous reste encore quelque lueur d’intelligence pour préférer l’âme au corps, dites-moi qui vous devez honorer, de Scipion ou de vos dieux.


Au surplus, si la peste vint à cesser, ce ne fut point parce que la folle passion des jeux plus raffinés de la scène s’empara d’un peuple belliqueux qui n’avait connu jusqu’alors que les jeux du cirque; mais ces démons méchants et astucieux, prévoyant que la peste allait bientôt finir, saisirent cette occasion pour en répandre une autre beaucoup plus dangereuse et qui fait leur joie parce qu’elle s’attaque, non point au corps, mais aux mœurs. Et de fait, elle aveugla et corrompit tellement l’esprit des Romains que dans ces derniers temps (la postérité aura peine à le croire), parmi les malheureux échappés au sac de Rome et qui ont pu trouver un asile à Carthage, on en a vu plusieurs tellement possédés de cette étrange maladie qu’ils couraient chaque jour au théâtre s’enivrer follement du spectacle des histrions (bouffons).




1. Voyez Tite-Live, lib. VII, cap.2;
   Val. Max., lib. II, cap. 4, § 2,
   et Tertullien, De Spectac., cap. 5.



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Message  ROBERT. Jeu 14 Mai 2015, 11:40 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXXIII a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.


CHAPITRE XXXIII.

LA RUINE DE ROME N’A PAS

CORRIGÉ LES VICES DES ROMAINS.    




Quelle est donc votre erreur, insensés, ou plutôt, quelle fureur vous transporte ! Quoi ! Au moment où, si l’on en croit les récits des voyageurs, le désastre de Rome fait jeter un cri de douleur jusque chez les peuples de l’Orient1, au moment où les cités les plus illustres dans les plus lointains pays font de votre malheur un deuil public, c’est alors que vous recherchez les théâtres, que vous y courez, que vous les remplissez, que vous en envenimez encore le poison. C’est cette souillure et cette perte des âmes, ce renversement de toute probité et de tout sentiment honnête que Scipion redoutait pour vous, quand il s’opposait à la construction d’un amphithéâtre, quand il prévoyait que vous pourriez aisément vous laisser corrompre par la bonne fortune, quand il ne voulait pas qu’il ne vous restât plus d’ennemis à redouter.  


Il n’estimait pas qu’une cité fût florissante, quand ses murailles sont debout et ses mœurs ruinées. Mais le séducteur des démons a eu plus de pouvoir sur vous que la prévoyance des sages. De là vient que vous ne voulez pas qu’on vous impute le mal que vous faites et que vous imputez aux chrétiens celui que vous souffrez. Corrompus par la bonne fortune, incapables d’être corrigés par la mauvaise, vous ne cherchez pas dans la paix la tranquillité de l’État, mais l’impunité de vos vices. Scipion vous souhaitait la crainte de l’ennemi pour vous retenir sur la pente de la licence, et vous, écrasés par l’ennemi, vous ne pouvez pas même contenir vos dérèglements; tout l’avantage de votre calamité, vous l’avez perdu; vous êtes devenus misérables, et vous êtes restés vicieux.




1. Les témoignages de cette douleur immense et universelle abondent dans les historiens.
   Voyez les lettres de saint Jérôme, notamment Epist. XVI, ad Principiam, et LXXXII, ad Marcell. Et Anapsychiam.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

.
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Message  ROBERT. Ven 15 Mai 2015, 10:57 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXXIV a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.


CHAPITRE XXXIV.

LA CLÉMENCE DE DIEU A ADOUCI

LE DÉSASTRE DE ROME.  




Et cependant si vous vivez, vous le devez à Dieu, à ce Dieu qui ne vous épargne que pour vous avertir de vous corriger et de faire pénitence, à ce Dieu qui a permis que malgré votre ingratitude vous ayez évité la fureur des ennemis, soit en vous couvrant du nom de ses serviteurs, soit en vous réfugiant dans les églises de ses martyrs.


On dit que Rémus et Romulus, pour peupler leur ville, établirent un asile où les plus grands criminels étaient assurés de l’impunité1. Exemple remarquable et qui s’est renouvelé de nos jours à l’honneur du Christ ! Ce qu’avaient ordonné les fondateurs de Rome, ses destructeurs l’ont également ordonné. Mais quelle merveille que ceux-là aient fait pour augmenter le nombre de leurs citoyens ce que ceux-ci ont fait pour augmenter le nombre de leurs ennemis ?




1. Saint Augustin parait ici suivre Plutarque, Vit. Rom., cap. 9.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…

.
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Message  ROBERT. Sam 16 Mai 2015, 2:04 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXXV a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXXV

L’ÉGLISE A DES ENFANTS CACHÉS PARMI SES

ENNEMIS ET DE FAUX AMIS PARMI SES ENFANTS.  




Tels sont les moyens de défense (et il y en a peut-être de plus puissants encore) que nous pouvons opposer à nos ennemis, nous enfants du Seigneur Jésus, rachetés de son sang et membres de la cité ici-bas étrangère, de la cité royale du Christ. N’oublions pas toutefois qu’au milieu de ces ennemis mêmes se cache plus d’un concitoyen futur, ce qui doit nous faire voir qu’il n’est pas sans avantage de supporter patiemment comme adversaire de notre foi celui qui peut en devenir confesseur. De même, au sein de la cité de Dieu, pendant du moins qu’elle accomplit son voyage à travers ce monde, plus d’un qui est uni à ses frères par la communion des mêmes sacrements, sera banni un jour de la société des saints.


De ces faux amis, les uns se tiennent dans l’ombre, les autres osent mêler ouvertement leur voix à celle de nos adversaires, pour murmurer contre le Dieu dont ils portent la marque sacrée, jouant ainsi deux rôles contraires et fréquentant également les théâtres et les lieux saints. Faut-il cependant désespérer de leur conversion ? Non, certes, puisque parmi nos ennemis les plus déclarés, nous avons des amis prédestinés encore inconnus à eux-mêmes. Les deux cités, en effet, sont mêlées et confondues ensemble pendant cette vie terrestre jusqu’à ce qu’elles se séparent au dernier jugement. Exposer leur naissance, leur progrès et leur fin, c’est ce que je vais essayer de faire, avec l’assistance du ciel et pour la gloire de la cité de Dieu, qui tirera de ce contraste mi plus vif éclat.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

.
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Message  ROBERT. Dim 17 Mai 2015, 4:04 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre 1er, cap. XXXVI a écrit:

LIVRE PREMIER: LES GOTHS À ROME.



CHAPITRE XXXVI.

DES SUJETS QU’IL CONVIENDRA DE

TRAITER DANS LES LIVRES SUIVANTS.  




Mais avant d’aborder cette entreprise, j’ai encore quelque chose à répondre à ceux qui rejettent les malheurs de l’empire romain sur notre religion, sous prétexte qu’elle défend de sacrifier aux dieux1. Il faut pour cela que je rapporte (autant du moins que ma mémoire et le besoin de mon sujet le permettront) tous les maux qui sont arrivés à l’empire ou aux provinces qui en dépendent avant que cette défense n’eût été faite: calamités qu’ils ne manqueraient pas de nous attribuer, si notre religion eût paru dès ce temps-là et interdit leurs sacrifices impies. Je montrerai ensuite pourquoi le vrai Dieu, qui tient en sa main tous les royaumes de la terre, a daigné accroître le leur, et je ferai voir que leurs prétendus dieux, loin d’y avoir contribué, y ont plutôt nui, au contraire, par leurs fourberies et leurs prestiges.


Je terminerai en réfutant ceux qui, convaincus sur ce dernier point par des preuves si claires, se retranchent à soutenir qu’il faut servir les dieux, non pour les biens de la vie présente, mais pour ceux de la vie future. Ici la question, si je ne me trompe, devient plus difficile et monte vers les régions sublimes. Nous avons affaire à des philosophes, non pas aux premiers venus d’entre eux, mais aux plus illustres et aux plus excellents, lesquels sont d’accord avec nous sur plusieurs choses, puisqu’ils reconnaissent l’âme immortelle et le vrai Dieu, auteur et providence de l’univers.


Mais comme ils ont aussi beaucoup d’opinions contraires aux nôtres, nous devons les réfuter et nous ne faillirons pas à ce devoir. Nous combattrons donc leurs assertions impies dans toute la force qu’il plaira à Dieu de nous départir, pour l’affermissement de la cité sainte, de la vraie piété et du culte de Dieu, sans lequel on ne saurait parvenir à la félicité promise. Je termine ici ce livre, afin de passer au nouveau sujet que je me propose de traiter.




1. La prohibition du culte païen date de Constantin. Elle fut poursuivie par Valentinien et consommée par Théodose.
  Voyez Eusèbe, Vit. Const., lib. II, cap. 43, 44, et lib. IV, cap. 23; Nicéphore, lib. VII cap. 46;
  Théodoret, Hist. Eccl., lib. V, cap. 21, et saint Augustin, De Cons. Evang., lib. I, n. 42.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

.



 
FIN DU LIVRE 1er
à suivre: LIVRE II.
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Message  ROBERT. Lun 18 Mai 2015, 10:58 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. I a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.*



Argument. — Saint Augustin traite des maux que les Romains ont eu à subir avant Jésus-Christ, pendant que florissait  le culte des faux dieux; il démontre que loin d’avoir été préservée par ses dieux, Rome en a reçu les seuls maux véritables ou du moins les plus grands de tous, à savoir les vices de l’âme et la corruption des mœurs.


→ Voilà la table des matières du Livre Deuxième; je viendrai, de temps à autre, mettre les liens correspondants. Merci.


Chapitre Premier. IL EST NÉCESSAIRE DE NE POINT PROLONGER LES DISCUSSIONS AU-DELÀ  D’UNE CERTAINE MESURE.  (Note: pour la lecture de ce chapitre seulement, voir la fin de ce "post". Pour la lecture des autres chapitres, suivre les liens.)

Chapitre II. RÉCAPITULATION DE CE QUI A ÉTÉ TRAITÉ DANS LE PREMIER LIVRE.

Chapitre III. IL SUFFIT DE CONSULTER L’HISTOIRE POUR VOIR QUELS MAUX SONT ARRIVÉS AUX ROMAINS PENDANT QU’ILS ADORAIENT LES DIEUX ET AVANT L’ÉTABLISSEMENT DE LA RELIGION CHRÉTIENNE.  

Chapitre IV. LES IDOLÂTRES N’ONT JAMAIS REÇU DE LEURS DIEUX AUCUN PRÉCEPTE DE VERTU, ET LEUR CULTE A ÉTÉ SOUILLÉ DE TOUTES SORTES D’INFÂMIES.

Chapitre V. DES CÉRÉMONIES OBSCÈNES QU’ON CÉLÉBRAIT EN L’HONNEUR DE LA MÈRE DES DIEUX.

Chapitre VI. LES DIEUX DES PAÏENS NE LEUR ONT JAMAIS ENSEIGNÉ LES PRÉCEPTES D’UNE VIE HONNÊTE.  

Chapitre VII. LES MAXIMES INVENTÉES PAR LES PHILOSOPHES NE POUVAIENT SERVIR  À RIEN, ÉTANT DÉPOURVUES D’AUTORITÉ DIVINE ET S’ADRESSANT À UN PEUPLE PLUS PORTÉ À SUIVRE LES EXEMPLES DES DIEUX QUE LES MAXIMES DES RAISONNEURS.  

Chapitre VIII. LES JEUX SCÉNIQUES, OÙ SONT ÉTALÉES TOUTES LES TURPITUDES  DES DIEUX, LOIN DE LEUR DÉPLAIRE, SERVENT À LES APAISER.

Chapitre IX. LES ANCIENS ROMAINS JUGEAIENT NÉCESSAIRE DE RÉPRIMER LA LICENCE  DES POÈTES, À LA DIFFÉRENCE DES GRECS QUL NE LEUR IMPOSAIENT AUCUNE LIMITE, SE CONFORMANT EN CE POINT À LA VOLONTÉ DES DIEUX.

Chapitre  X. C’EST UN TRAIT DE LA PROFONDE MALICE DES DÉMONS, DE VOULOIR QU’ON LEUR ATTRIBUE DES CRIMES, SOIT VÉRITABLES, SOIT SUPPOSÉS.

Chapitre XI. LES GRECS ADMETTAIENT LES COMÉDIENS À L’EXERCICE DES FONCTIONS PUBLIQUES, CONVAINCUS QU’IL Y AVAIT DE L’INJUSTICE À  MÉPRISER DES HOMMES DONT L’ART APAISAIT LA COLÈRE DES DIEUX.  

Chapitre XII. LES ROMAINS, EN INTERDISANT AUX POÈTES D’USER CONTRE LES HOMMES D’UNE LIBERTÉ QU’ILS LEUR DONNAIENT CONTRE LES DIEUX, ONT EU MOINS BONNE OPINION DES DIEUX QUE D’EUX-MÊMES.    

Chapitre XIII. LES ROMAINS AURAIENT DU COMPRENDRE QUE DES DIEUX CAPABLES DE SE COMPLAIRE À DES JEUX INFÂMES N’ÉTAIENT PAS DIGNES DES HONNEURS DIVINS.  

Chapitre XIV. PLATON, EN EXCLUANT LES POÈTES D’UNE CITÉ BIEN GOUVERNÉE, S’EST MONTRÉ SUPÉRIEUR À CES DIEUX QUI VEULENT ÊTRE HONORÉS PAR DES JEUX SCÉNIQUES.    

Chapitre XV. LES ROMAINS SE SONT DONNÉ CERTAINS DIEUX, NON PAR RAISON, MAIS PAR VANITÉ.  

Chapitre XVI. SI LES DIEUX AVAIENT EU LE MOINDRE SOUCI DE FAIRE RÉGNER LA JUSTICE, ILS AURAIENT DONNÉ AUX ROMAINS DES PRÉCEPTES ET DES LOIS, AU LIEU DE LES LEUR LAISSER EMPRUNTER AUX NATIONS ÉTRANGÈRES.

Chapitre XVII. DE L’ENLÈVEMENT DES SABINES, ET DES AUTRES INIQUITÉS COMMISES
PAR LES ROMAINS AUX TEMPS LES PLUS VANTÉS DE LA RÉPUBLIQUE.

Chapitre XVIII. TÉMOIGNAGE DE SALLUSTE SUR LES MŒURS DU PEUPLE ROMAIN, TOUR À TOUR CONTENUES PAR LA CRAINTE ET RELÂCHÉES PAR LA SÉCURITÉ.

Chapitre XIX. DE LA CORRUPTION OÙ ÉTAIT TOMBÉE LA RÉPUBLIQUE ROMAINE AVANT QUE LE CHRIST VÎNT ABOLIR LE CULTE DES DIEUX.

Chapitre XX. DE L’ESPÈCE DE FÉLICITÉ ET DU GENRE DE VIE QUI PLAIRAIENTLE PLUS AUX ENNEMIS DE LA RELIGION CHRÉTIENNE.

CHAPITRE XXI. SENTIMENT DE CICÉRON SUR LA RÉPUBLIQUE ROMAINE.  

CHAPITRE XXII. LES DIEUX DES ROMAINS N’ONT JAMAIS PRIS SOIN D’EMPÊCHER QUE LES MŒURS NE FISSENT PÉRIR LA RÉPUBLIQUE.

Chapitre XXIII. LES VICISSITUDES DES CHOSES TEMPORELLES NE DÉPENDENT POINT DE LA
FAVEUR OU DE L’INIMITIÉ DES DÉMONS, MAIS DU CONSEIL DU VRAI DIEU.

Chapitre XXIV. DES PROSCRIPTIONS DE SCYLLA AUXQUELLES LES DÉMONS SE VANTENT D’AVOIR PRÊTÉ LEUR ASSISTANCE.  

Chapitre XXV. LES DÉMONS ONT TOUJOURS EXCITÉ  LES HOMMES AU MAL EN DONNANT AUX CRIMES L’AUTORITÉ DE LEUR EXEMPLE.  

Chapitre XXVI. LES FAUX DIEUX DONNAIENT EN SECRET DES PRÉCEPTES POUR LES BONNES MŒURS, ET EN PUBLIC DES EXEMPLES D’IMPUDICITÉ.

Chapitre XXVII. QUELLE FUNESTE INFLUENCE ONT EXERCÉE SUR LES MŒURS PUBLIQUES LES JEUX OBSCÈNES QUE LES ROMAINS CONSACRAIENT A LEURS DIEUX POUR LES APAISER.    

Chapitre XXVIII. DE LA SAINTETÉ DE LA RELIGION CHRÉTIENNE.    

Chapitre XXIX. EXHORTATION AUX ROMAINS POUR QU’ILS REJETTENT LE CULTE DES DIEUX.




CHAPITRE PREMIER.

IL EST NÉCESSAIRE DE NE POINT PROLONGER LES

DISCUSSIONS AU-DELÀ  D’UNE CERTAINE MESURE.




Si le faible esprit de l’homme, au lieu de résister à l’évidence de la vérité, voulait se soumettre aux enseignements de la saine doctrine, comme un malade aux soins du médecin, jusqu’à ce qu’il obtînt de Dieu par sa foi et sa piété la grâce nécessaire pour se guérir, ceux qui ont des idées justes et qui savent les exprimer convenablement n’auraient pas besoin d’un long discours pour réfuter l’erreur. Mais comme l’infirmité dont nous parlons est aujourd’hui plus grande que jamais, à ce point que l’on voit des insensés s’attacher aux mouvements déréglés de leur esprit comme à la raison et à la vérité même, tantôt par l’effet d’un aveuglement qui leur dérobe la lumière, tantôt par suite d’une opiniâtreté qui la leur fait repousser, on est souvent obligé, après leur avoir déduit ses raisons autant qu’un homme le doit attendre de son semblable, de s’étendre beaucoup sur des choses très-claires, non pour les montrer à ceux qui les regardent, mais pour les faire toucher à ceux qui ferment les yeux de peur de les voir. Et cependant, si on se croyait tenu de répondre toujours aux réponses qu’on reçoit, quand finiraient les discussions ?


Ceux qui ne peuvent comprendre ce qu’on dit, ou qui, le comprenant, ont l’esprit trop dur et trop rebelle pour y souscrire, répondent toujours; mais, comme dit l’Ecriture: "Ils ne parlent que le langage de l’iniquité1"; et leur opiniâtreté infatigable est vaine. Si donc nous consentions à les réfuter autant de fois qu’ils prennent avec un front d’airain la résolution de ne pas se mettre en peine de ce qu’ils disent, pourvu qu’ils nous contredisent n’importe comment, vous voyez combien notre labeur serait pénible, infini et stérile, c’est pourquoi je ne souhaiterais pas avoir pour juges de cet ouvrage, ni vous-même, Marcellinus, mon cher fils, ni aucun de ceux à qui je l’adresse dans un esprit de discussion utile et loyale et de charité chrétienne, s’il vous fallait toujours des réponses, dès que vous verriez paraître un argument nouveau; j‘aurais trop peur alors que vous ne devinssiez semblables à ces malheureuses femmes dont parle l’Apôtre, "qui incessamment apprennent sans jamais savoir la vérité1"




1. Psaume XCIII, 4.
1. II Timothée III, 7.



Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
italiques et
gras ajoutés.

.


*  Avez-vous remarqué que le Titre du Livre II de Saint Augustin, va à ravir aux Intrus à Rome ?
,


Dernière édition par ROBERT. le Ven 29 Mai 2015, 11:33 am, édité 12 fois (Raison : liens + mise en forme.)
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Message  ROBERT. Mar 19 Mai 2015, 12:44 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. II a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE II.

RÉCAPITULATION DE CE QUI A ÉTÉ

TRAITÉ DANS LE PREMIER LIVRE.




Ayant commencé, dans le livre précédent, de traiter de la Cité de Dieu, à laquelle j’ai résolu, avec l’assistance d’en haut, de consacrer tout cet ouvrage, mon premier soin a été de répondre à ceux qui imputent les guerres dont l’univers est en ce moment désolé, et surtout le dernier malheur de Rome, à la religion chrétienne, sous prétexte qu’elle interdit les sacrifices abominables qu’ils voudraient faire aux démons. J’ai donc fait voir qu’ils devraient bien plutôt attribuer à l’influence du Christ le respect que les barbares ont montré pour son nom, en leur laissant, contre l’usage de la guerre, de vastes églises pour lieu de refuge, et en honorant à tel point leur religion (celle du moins qu’ils feignaient de professer), qu’ils ne se sont pas cru permis contre eux ce que leur permet contre tous le droit de la victoire. De là s’est élevée une question nouvelle: pourquoi cette faveur divine s’est-elle étendue à des impies et à des ingrats, et pourquoi, d’un autre côté, les désastres de la guerre ont-ils également frappé les impies et les hommes pieux ?


Je me suis quelque peu arrêté sur ce point, d’abord parce que cette répartition ordinaire des bienfaits de la Providence et des misères de l’humanité tombant indifféremment sur les bons et sur les méchants, porte le trouble dans plus d’une conscience; puis j’ai voulu, et ç’a été mon principal objet, consoler de saintes femmes, chastes et pieuses victimes d’une violence qui a pu attrister leur pudeur, mais non souiller leur pureté, de peur qu’elles ne se repentent de vivre, elles qui n’ont rien dans leur vie dont elles aient à se repentir.


J’ai ajouté ensuite quelques réflexions contre ceux qui osent insulter aux infortunes subies par les chrétiens et en particulier par ces malheureuses femmes restées chastes et saintes dans l’humiliation de leur pudeur; adversaires sans bonne foi et sans conscience, indignes enfants de ces Romains renommés par tant de belles actions dont l’histoire conservera le souvenir, mais qui ont trouvé dans leurs descendants dégénérés les plus grands ennemis de leur gloire.


Rome, en effet, fondée par leurs aïeux et portée à un si haut point de grandeur, ils l’avaient plus abaissée par leurs vices qu’elle ne l’a été par sa chute; car cette chute n’a fait tomber que des pierres et du bois, au lieu que leurs vices avaient ruiné leurs mœurs, fondement et ornement des empires, et allumé dans les âmes des passions mille fois plus dévorantes que les feux qui ont consumé les palais de Rome. C’est par là que j’ai terminé le premier livre.


Mon dessein maintenant est d’exposer les maux que Rome a soufferts depuis sa naissance, soit dans l’intérieur de l’empire, soit dans les provinces, soumises; longue suite de calamités que nos adversaires ne manqueraient pas d’attribuer à la religion chrétienne, si, dès ce temps-là, la doctrine de l’Evangile eût fait librement retentir sa voix contre leurs fausses et trompeuses divinités.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

.
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Message  ROBERT. Mer 20 Mai 2015, 11:56 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. III a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE III.

IL SUFFIT DE CONSULTER L’HISTOIRE POUR VOIR QUELS MAUX

SONT ARRIVÉS AUX ROMAINS PENDANT QU’ILS ADORAIENT LES DIEUX ET

AVANT L’ÉTABLISSEMENT DE LA RELIGION CHRÉTIENNE..  




En lisant le récit que je vais tracer, il faut se souvenir que parmi les adversaires à qui je m’adresse il y a des ignorants qui ont fait naître ce proverbe: "La pluie manque, c’est la faute des chrétiens1" . Il en est d’autres2, je le sais, qui, munis d’études libérales, aiment l’histoire et connaissent les faits que j’ai dessein de rappeler; mais afin de nous rendre odieux à la foule ignorante, ils feignent de ne pas les savoir et s’efforcent de faire croire au vulgaire que les désastres qui, selon l’ordre de la nature, affligent les hommes à certaines époques et dans certains lieux, n’arrivent présentement qu’à cause des progrès du christianisme qui se répand partout avec un éclat et une réputation incroyables, au détriment du culte des dieux.


Qu’ils se souviennent donc avec nous de combien de calamités Rome a été accablée avant que Jésus-Christ ne se fût incarné, avant que son nom n’eût brillé parmi les peuples de cette gloire dont ils sont vainement jaloux. Comment justifieront-ils leurs dieux sur ce point, puisque, de leur propre aveu, ils ne les servent que pour se mettre à couvert de ces calamités qu’il leur plaît maintenant de nous imputer ? Je les prie de me dire pourquoi ces dieux ont permis que de si grands désastres arrivassent à leurs adorateurs avant que le nom de Jésus-Christ, partout proclamé, ne vînt offenser leur orgueil et mettre un terme à leurs sacrifices.




1. Ce dicton païen est également rapporté par Tertullien., cap. 40.
    Voyez aussi ce que répond Arnobe sur ce point aux adversaires, du christianisme, Contra. Gent., lib. I, p. 3 et sq. de l’édition Stewech.
2. Saint Augustin semble ici faire allusion à Symmaque, qui, dans son fameux mémoire adressé, en 384, à l’empereur Valentinien,
    accusait les chrétiens des malheurs de l’empire. Voyez Paul Orose et la préface de son livre adressée à saint Augustin.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
italiques et
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Jeu 21 Mai 2015, 10:22 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. IV a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE IV.

LES IDOLÂTRES N’ONT JAMAIS REÇU DE LEURS DIEUX AUCUN PRÉCEPTE

DE VERTU, ET LEUR CULTE A ÉTÉ SOUILLÉ DE TOUTES SORTES D’INFÂMIES.




Et d’abord pourquoi ces dieux ne se sont-ils point mis en peine d’empêcher le dérèglement des mœurs ? Que le Dieu véritable se soit détourné des peuples qui ne le servaient pas, ç’a été justice; mais d’où vient que les dieux, dont on regrette que le culte soit aujourd’hui interdit, n’ont établi aucune loi pour porter leurs adorateurs à la vertu ? La justice aurait voulu qu’ils eussent des soins pour les actions des hommes, en échange de ceux que les hommes rendaient à leurs autels. On dira que nul n’est méchant que par le fait de sa volonté propre. Qui le nie ? Mais ce n’en était pas moins l’office des dieux de ne pas laisser ignorer à leurs adorateurs les préceptes d’une vie honnête, de les promulguer au contraire avec le plus grand éclat, de dénoncer les pécheurs par la bouche des devins et des oracles, d’accuser, de menacer hautement les méchants et de promettre des récompenses aux bons.


Or, a-t-on jamais entendu rien prêcher de semblable dans leurs temples ? Quand j’étais jeune, je me souviens d’y être allé plus d’une fois; j’assistais à ces spectacles et à ces jeux sacrilèges; je contemplais les prêtres en proie à leur délire démoniaque, j’écoutais les musiciens, je prenais plaisir à ces jeux honteux qu’on célébrait en l’honneur des dieux, des déesses, de la vierge Célestis1, de Cybèle, mère de tous les dieux. Le jour où on lavait solennellement dans un fleuve cette dernière divinité2, de misérables bouffons chantaient devant son char des vers tellement infâmes qu’il n’eût pas été convenable, je ne dis pas à la mère des dieux, mais à la mère d’un sénateur, d’un honnête homme, d’un de ces bouffons même, de prêter l’oreille à ces turpitudes. Car enfin tout homme a un sentiment de respect pour ses parents que la vie la plus dégradante ne saurait étouffer.


Ainsi ces baladins auraient rougi de répéter chez eux et devant leurs mères, ne fût-ce que pour s’exercer, ces paroles et ces gestes obscènes dont ils honoraient la mère des dieux, en présence d’une multitude immense où les deux sexes étaient confondus. Et je ne doute pas que ces spectateurs qui s’empressaient à la fête, attirés par la curiosité, ne rentrassent à la maison, révoltés par l’infamie. Si ce sont là des choses sacrées, qu’appellerons-nous choses sacrilèges ? et qu’est-ce qu’une souillure, si c’est là une purification ? Ne donnait-on pas à ces fêtes le nom de Services (Fercula), comme si on eût célébré un festin où les démons pussent venir se repaître de leurs mets favoris ? Chacun sait, en effet, combien ces esprits immondes sont avides de telles obscénités; il faudrait, pour en douter, ignorer l’existence de ces démons qui trompent les hommes en se faisant passer pour des dieux, ou bien vivre de telle sorte que leur protection parût plus à désirer que celle du vrai Dieu, et leur colère plus à craindre.




1. Cette déesse-vierge Célestis était principalement adorée en Afrique, au témoignage de Tertullien (Apolog. Cap. 24).
     Saint Augustin en parle encore au chap. 23 de ce même livre II, et ailleurs (Enarr.. in Pssl. LXLI, n. 7, et in Psal. XCVIII, n. 14, et Serm. CV, n. 12).
   — Nous ne savons pas sur quel fondement le docte Vivès a confondu la vierge Célestis avec Cybèle, mère des dieux.
2. Chaque année, la veille des ides d’avril, 14 statue de Cybèle était conduite en grande pompe par les prêtres de la déesse au fleuve Almon, qui se jette dans le          Tibre, près de Noms, et là, au confluent des deux eaux, se faisait l’ablution sacrée, souvenir de celle qui eut lieu le jour où la statue arriva d’Asie pour la première foi,. Voyez Onde, Fastes, lib. IV, v. 337 et sq., et Lucain, lib. s,  V. 600.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Ven 22 Mai 2015, 9:57 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. V a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE V.

DES CÉRÉMONIES OBSCÈNES QU’ON CÉLÉBRAIT

EN L’HONNEUR DE LA MÈRE DES DIEUX. .




Je voudrais avoir ici pour juges, non ces hommes corrompus qui aiment mieux prendre du plaisir à des coutumes infâmes, que se donner de la peine pour les combattre, mais cet illustre Scipion Nasica, autrefois choisi par le sénat, comme le meilleur citoyen de Rome, pour aller recevoir Cybèle, et promener solennellement dans la ville la statue de ce démon. Je lui demanderais s’il ne souhaiterait pas que sa mère eût assez bien mérité de la république pour qu’on lui décernât les honneurs divins, comme à ces mortels privilégiés, devenus immortels et rangés au nombre des dieux par l’admiration et la reconnaissance des Grecs, des Romains et d’autres peuples1.  


Sans aucun doute, il souhaiterait un pareil bonheur à sa mère, si la chose était possible; mais supposons qu’on lui demande après cela s’il voudrait que parmi ces honneurs divins on mêlât les chants obscènes de Cybèle. Ne s’écriera-t-il pas qu’il aimerait mieux pour sa mère qu’elle fût morte et privée de tout sentiment que d’être déesse pour se complaire à ces infamies ? Quelle apparence, en effet, qu’un sénateur romain, assez sévère de mœurs pour avoir empêché qu’on ne bâtît un théâtre dans une ville qu’il voulait peuplée d’hommes forts, souhaitât pour sa mère un culte qui fait accueillir avec faveur par une déesse des paroles dont une matrone se regarderait comme offensée ?


Assurément il ne croirait point qu’une femme d’honneur, en devenant déesse, eût perdu à ce point la modestie, ni qu’elle pût écouter avec plaisir, de la bouche de ses adorateurs, des mots tellement impurs que si elle en eût entendu de pareils de son vivant, sans se boucher les oreilles et se retirer, ses proches, son mari et ses enfants eussent été obligés d’en rougir pour elle. Ainsi , cette mère des dieux, que le dernier des hommes refuserait d’avouer pour sa mère, voulant capter l’esprit des Romains, désigna pour venir au-devant d’elle le premier des citoyens, non pour le confirmer dans sa vertu par ses conseils et son assistance, mais pour le tromper par ses artifices, semblable à cette femme dont  il est écrit: "Elle s’efforce de dérober aux hommes leur bien le plus précieux, qui est leur âme1".


Que désirait-elle autre chose, en effet, en désignant Scipion, si ce n’est que ce grand homme, exalté par le témoignage d’une déesse, et se croyant arrivé au comble de la perfection, vînt à négliger désormais la vraie piété et la vraie religion, sans lesquelles pourtant le plus noble caractère tombe dans l’orgueil et se perd ? Et comment ne pas attribuer le choix fait par cette déesse à un dessein insidieux, quand on la voit se complaire dans ses fêtes à des obscénités que les honnêtes gens auraient horreur de supporter dans leurs festins ?




1. Saint Augustin s’appuie peut-être ici mentalement sur l’explication que donne
    Cicéron des apothéoses: De Nat. deor, lib. II, cap. 2, et lib. III, cap. 14.

1. Proverbes  VI, 26.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Ven 22 Mai 2015, 10:05 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. VI a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE VI.

LES DIEUX DES PAÏENS NE LEUR ONT JAMAIS

ENSEIGNÉ LES PRÉCEPTES D’UNE VIE HONNÊTE.  




C’est pour cela que ces divinités n’ont pris aucun soin pour régler les mœurs des cités et des peuples qui les adoraient, ni pour les préserver par de terribles et salutaires défenses de ces maux effroyables qui ont leur siège, non dans les champs et les vignes, non dans les maisons et les trésors, non dans le corps, qui est soumis à l’esprit; mais dans l’esprit même qui gouverne le corps. Dira-t-on que les dieux défendaient de mal vivre ? Qu’on le montre, qu’on le prouve. Et il ne s’agit pas ici de nous vanter je ne sais quelles traditions secrètes murmurées à l’oreille d’un petit nombre d’initiés par une religion mystérieuse, amie prétendue de la chasteté et de la vertu; qu’on nous cite, qu’on désigne les lieux, les assemblées, ou, à la place de ces fêtes impudiques, de ces chants et de ces postures d’histrions obscènes, à la place de ces Fugalies2 honteuses (vraiment faites pour mettre en fuite la pudeur et l’honnêteté), en un mot, à la place de toutes ces turpitudes, on ait enseigné au peuple, au nom des dieux, à réprimer l’avarice, à contenir l’ambition, à brider l’impudicité, à suivre enfin tous les préceptes que rappelle Perse en ces vers énergiques:


"Instruisez-vous, misérables mortels, et apprenez les raisons des choses, ce que nous sommes, le but de la vie et sa loi, la pente glissante qui nous entraîne au mal, la modération dans l’amour des richesses, les désirs légitimes, l’usage utile de l’argent, la générosité qui sied à l’honnête homme envers la patrie et ses proches, enfin ce que chacun doit être dans le poste où Dieu l’a placé1".


Qu’on nous dise en quels lieux on faisait entendre ces préceptes comme émanés de la bouche des dieux, en quels lieux on habituait le peuple à les écouter, comme cela se fait dans nos églises partout où la religion chrétienne a pénétré.




2. Que faut-il penser de ces Fugalies ? Sont-ce les fêtes instituées en souvenir de l’expulsion des rois, comme le conjecture un commentateur, ou bien faut-il croire à quelque méprise de Saint Augustin ?
1. Satires, III, V. 66-72.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Ven 22 Mai 2015, 10:14 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. VII a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE VII.

LES MAXIMES INVENTÉES PAR LES PHILOSOPHES NE POUVAIENT SERVIR  À RIEN,

ÉTANT DÉPOURVUES D’AUTORITÉ DIVINE ET S’ADRESSANT À UN PEUPLE PLUS PORTÉ

À SUIVRE LES EXEMPLES DES DIEUX QUE LES MAXIMES DES RAISONNEURS.  




On nous alléguera peut-être les systèmes et les controverses des philosophes. Je répondrai d’abord que ce n’est point Rome, mais la Grèce qui leur a donné naissance; et si l’on persiste à vouloir en faire honneur à Rome, sous prétexte que la Grèce a été réduite en province romaine; je dirai alors que les systèmes philosophiques ne sont point l’ouvrage des dieux, mais de quelques hommes doués d’un esprit rare et pénétrant, qui ont entrepris de découvrir par la raison la nature des choses, la règle des mœurs, enfin les conditions de l’usage régulier de la raison elle-même, tantôt fidèle et tantôt infidèle à ses propres lois.


Aussi bien, parmi ces philosophes, quelques-uns ont découvert de grandes choses, soutenus qu’ils étaient par l’appui divin; mais, arrêtés dans leur essor par la faiblesse humaine, ils sont tombés dans l’erreur;  juste répression de la divine Providence, qui a voulu surtout punir leur orgueil, et montrer, par l’exemple de ces esprits puissants, que la véritable voie pour monter aux régions supérieures, c’est l’humilité.


Mais le moment viendra plus tard, s’il plaît au vrai Dieu notre Seigneur, de traiter cette matière et de la discuter à fond2. Quoi qu’il en soit, s’il est vrai que, les philosophes aient découvert des vérités capables de donner à l’homme la vertu et le bonheur, n’est-ce point à eux qu’il eût fallu, pour être plus juste, décerner les honneurs divins ? Combien serait-il plus convenable et plus honnête de lire les livrés de Platon, dans un temple consacré à ce philosophe, que de voir des prêtres de Cybèle1 se mutiler dans le temple des démons, des efféminés s’y faire consacrer, des insensés s’y inciser le corps, cérémonies cruelles, honteuses, cruellement honteuses, honteusement cruelles, qui sont chaque jour célébrées en l’honneur des dieux ?


Combien aussi serait-il plus utile, pour former la jeunesse à la vertu, de lire publiquement de bonnes lois, au nom des dieux, que de louer vainement celles des ancêtres ! En effet, tous les adorateurs de dieux pareils, lorsque le poison brûlant de la passion, comme dit Perse2, s’est insinué dans leur âme, peu leur importe ce qu’enseignait Platon ou ce que Platon censurait, ils regardent ce que faisait Jupiter. De là ce jeune débauché de Térence qui, jetant les yeux sur le mur de la salle, et y voyant une peinture où Jupiter fait couler une pluie d’or dans le sein de Danaé, se sert d’un si grand exemple pour autoriser ses désordres, et se vanter d’imiter Dieu: "Et quel Dieu ? Celui qui ébranle de son tonnerre les temples du ciel. Certes, je n’en ferais pas autant, moi, chétif mortel, mais, pour le reste, je l’ai fait, et de grand cœur"3




2. Voyez plus bas les livres VIII, IX et X, particulièrement destinés à combattre les philosophes.
1. Sur ces prêtres nommés Galles, voyez plus loin, liv. VI, ch. 7, et liv. VII, ch. 25 et 26.
2. Perse, Satires, III, v. 37.
3.Térence, Eunuque, act. III, sc. 5, V. 36 et 37, 42 et 43.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
italiques et
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Sam 23 Mai 2015, 3:46 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. VIII a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE VIII.

LES JEUX SCÉNIQUES, OÙ SONT ÉTALÉES TOUTES LES TURPITUDES

DES DIEUX, LOIN DE LEUR DÉPLAIRE, SERVENT À LES APAISER.  




Mais, dira-t-on, ce sont là des inventions de foules, et non les enseignements de la religion. Je ne veux pas répondre que ces enseignements sont encore plus scandaleux; je me contente de prouver, l’histoire à la main, que ces jeux solennels, où l’on représente les fictions des poètes, n’ont pas été introduits dans les fêtes des dieux par l’ignorance et la superstition des Romains, mais que ce sont les dieux eux-mêmes, comme je l’ai indiqué au livre précédent, qui ont prescrit de les célébrer, et les ont pour ainsi dire violemment imposés par la menace.


C’est, en effet, au milieu des ravages croissants d’une peste que les jeux scéniques furent institués à Rome pour la première fois par l’autorité des pontifes. Or, quel est celui qui, pour la conduite de sa vie, ne se conformera pas de préférence aux exemples donnés par les dieux dans les cérémonies  consacrées par la religion, qu’aux préceptes inscrits dans les lois par une sagesse toute profane ? Si les foules ont menti, quand ils ont représenté Jupiter adultère, des dieux vraiment chastes auraient dû se courroucer et se venger d’un pareil scandale, au lieu de l’encourager et de le prescrire. Et cependant, ce qu’il y a de plus supportable dans ces jeux scéniques, ce sont les comédies et les tragédies, c’est-à-dire ces pièces imaginées par les poètes, où l’immoralité des actions n’est pas du moins aggravée par l’obscénité des paroles1, ce qui fait comprendre qu’on leur donne place dans l’étude des belles-lettres, et que des personnes d’âge en imposent la lecture aux enfants.



1. Comme par exemple dans les Atellanes, pièces populaires et bouffonnes dont les anciens eux-mêmes ont blâmé l’obscénité.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Sam 23 Mai 2015, 3:50 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. IX a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE IX.


LES ANCIENS ROMAINS JUGEAIENT NÉCESSAIRE DE RÉPRIMER LA LICENCE

DES POÈTES, À LA DIFFÉRENCE DES GRECS QUL NE LEUR IMPOSAIENT

AUCUNE LIMITE, SE CONFORMANT EN CE POINT À LA VOLONTÉ DES DIEUX.



Si l’on veut savoir ce que pensaient à cet égard les anciens Romains, il faut consulter Cicéron qui, dans son traité De la République2,  fait parler Scipion3 en ces termes: "Jamais la comédie, si l’habitude des mœurs publiques ne l’avait autorisée, n’aurait pu faire goûter les infamies qu’elle étalait sur le théâtre4" . Les Grecs du moins étaient conséquents dans leur extrême licence, puisque leurs lois permettaient à la comédie de tout dire sur tout citoyen et en l’appelant par son nom. Aussi, comme dit encore Scipion dans le même ouvrage: "Qui n’a-t-elle pas atteint ? Ou plutôt, qui n’a-t-elle pas déchiré ? A qui fit-elle grâce ? Qu’elle ait blessé des flatteurs populaires, des citoyens malfaisants, séditieux, Cléon, Cléophon, Hyperbolus 5, à la bonne heure; bien que, pour de tels hommes, la censure du magistrat vaille mieux que celle du poète. Mais que Périclès, gouvernant la république depuis tant d’années avec le plus absolu crédit, dans la paix ou dans la guerre, soit outragé par des vers, et qu’on les récite sur la scène, cela n’est pas moins étrange que si, parmi nous, Plaute et Névius se fussent avisés de médire de Publius et de Cnéus Scipion, ou Cécilius de Caton".


Et il ajoute un peu après: "Nos lois des douze Tables, au contraire, si attentives à ne porter la peine de mort que pour un bien petit nombre de faits, ont compris dans cette classe le délit d’avoir récité publiquement ou d’avoir composé des vers qui attireraient sur autrui le déshonneur et l’infamie; et elles ont sagement décidé, car notre vie doit être soumise à la sentence des tribunaux, à l’examen légitime des magistrats, et non pas aux fantaisies des poètes; et nous ne devons être exposés à entendre une injure qu’avec le droit d’y répondre et de nous défendre devant la justice".


Il est aisé de voir combien tout ce passage du quatrième livre de la République de Cicéron, que je viens de citer textuellement (sauf quelques mots omis ou modifiés), se rattache étroitement à la question que je veux éclaircir. Cicéron ajoute beaucoup d’autres réflexions, et conclut en montrant fort bien que les anciens Romains ne pouvaient souffrir qu’on louât ou qu’on blâmât sur la scène un citoyen vivant. Quant aux Grecs, qui autorisèrent cette licence, je répète, tout en la flétrissant, qu’on y trouve une sorte d’excuse, quand on considère qu’ils voyaient leurs dieux prendre plaisir au spectacle de l’infamie des hommes et de leur propre infamie, soit que les actions qu’on leur attribuait fussent de l’invention des poètes, soit qu’elles fussent véritables; et plût à Dieu que les spectateurs n’eussent fait qu’en rire, au lieu de les imiter! Au fait, c’eût été un peu trop superbe d’épargner la réputation des principaux de la ville et des simples citoyens, pendant que les dieux sacrifiaient la leur de si bonne grâce.




2. On sait que ce grand ouvrage est perdu aux trois quarts, même après les découvertes d’Angelo Maio.
   Le quatrième livre, cité ici par saint Augustin, est un de ceux dont il nous reste le moins de débris.
3. Le Scipion de la République est Scipion Emilien, le destructeur de Numance et de Carthage.
4. Cicéron, De la République, livre IV, trad. de M. Villemain.
5. Voyez les comédies d’Aristophane.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Sam 23 Mai 2015, 3:52 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. X a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE X.

C’EST UN TRAIT DE LA PROFONDE MALICE DES DÉMONS, DE VOULOIR

QU’ON LEUR ATTRIBUE DES CRIMES, SOIT VÉRITABLES, SOIT SUPPOSÉS.




On allègue pour excuse que ces actions attribuées aux dieux ne sont pas véritables, mais supposées. Le crime alors n’en serait que plus énorme, si l’on consulte les notions de la vraie piété et de la vraie religion; et si l’on considère la malice des démons, quel art profond pour tromper les hommes ! Quand on diffame un des premiers de l’État qui sert honorablement son pays, cette attaque n’est-elle pas d’autant plus inexcusable qu’elle est plus éloignée de la vérité ? Quel supplice ne méritent donc pas ceux qui font à Dieu une injure si atroce et si éclatante !


Au reste, ces esprits du mal, que les païens prennent pour des dieux, n’ont d’autre but, en se laissant attribuer de faux crimes, que de prendre les âmes dans ces fictions comme dans des filets, et de les entraîner avec eux dans le supplice où ils sont prédestinés; soit que des hommes qu’ils se plaisent à faire passer pour des dieux, afin de recevoir à leur place par mille artifices les adorations des mortels, aient en effet commis ces crimes, soit qu’aucun homme n’en étant coupable, ils prennent plaisir à les voir imputer aux dieux, pour donner ainsi aux actions les plus méchantes celles plus honteuses, l’autorité du ciel. C’est ainsi que les Grecs, esclaves de ces fausses divinités, n’ont pas cru que les poètes dussent les épargner eux-mêmes sur la scène, ou par le désir de se rendre en cela semblables à leurs dieux, ou par la crainte de les offenser, s’ils se montraient jaloux d’avoir une renommée meilleure que la leur.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras et soulignés ajoutés.

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Message  ROBERT. Dim 24 Mai 2015, 12:32 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. XI a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE XI.

LES GRECS ADMETTAIENT LES COMÉDIENS À L’EXERCICE DES FONCTIONS

PUBLIQUES, CONVAINCUS QU’IL Y AVAIT DE L’INJUSTICE À  MÉPRISER

DES HOMMES DONT L’ART APAISAIT LA COLÈRE DES DIEUX.  



Les Grecs furent encore très conséquents avec eux-mêmes quand ils jugèrent les comédiens dignes des plus hautes charges de l’État. Nous apprenons, en effet, par Cicéron, dans ce même traité De la République, que l’athénien Eschine, homme très-éloquent, après avoir joué la tragédie dans sa jeunesse, brigua la suprême magistrature, et que les Athéniens envoyèrent souvent le comédien Aristodème en ambassade vers Philippe, pour traiter les affaires les plus importantes de la paix et de la guerre. Voyant leurs dieux accueillir avec complaisance les pièces de théâtre, il ne leur paraissait pas raisonnable de mettre au rang des personnes infâmes ceux qui servaient à les représenter. Nul doute que tous ces usages des Grecs ne fussent très scandaleux, mais nul doute aussi qu’ils ne fussent en harmonie avec le caractère de leurs dieux; car comment auraient-ils empêché les poètes et les acteurs de déchirer les citoyens, quand ils les entendaient diffamer leurs dieux avec l’approbation de ces dieux mêmes ? Et comment auraient-ils méprisé, ou plutôt comment n’auraient-ils pas élevé aux premiers emplois ceux qui représentaient sur le théâtre des pièces qu’ils savaient agréables aux dieux ?


Eût-il été raisonnable, tandis qu’on avait les prêtres en honneur, parce qu’ils attirent sur les hommes la protection des dieux en leur immolant des victimes, de noter d’infamie les comédiens qui, en jouant des pièces de théâtre, ne faisaient autre chose que satisfaire au désir des dieux et prévenir l’effet de leurs menaces, d’après la déclaration expresse des prêtres eux-mêmes ? Car nous savons que Labéon1, dont l’érudition fait autorité en cette matière, distingue les bonnes divinités d’avec les mauvaises, et veut qu’on leur rende un culte différent, conseillant d’apaiser les mauvaises par des sacrifices sanglants et par des prières funèbres, et de se concilier les bonnes par des offrandes joyeuses et agréables, comme les jeux, les festins et les lectisternes2.


Nous discuterons plus tard, s’il plaît à Dieu, cette distinction de Labéon; mais, pour n’en dire en ce moment que ce qui touche à notre sujet, soit que l’on offre indifféremment toutes choses à tous les dieux comme étant tous bons (car des dieux ne sauraient être mauvais, et ceux des païens ne sont tels que parce qu’ils sont tous des esprits immondes), soit que l’on mette quelque différence, comme le veut Labéon, dans les offrandes qu’on présente aux différents dieux, c’est toujours avec raison que les Grecs honorent les comédiens qui célèbrent les jeux, à l’égal des prêtres qui offrent des victimes, de peur de faire injure à tous les dieux, si tous aiment les jeux du théâtre, ou, ce qui serait plus grave encore, aux dieux réputés bons, s’il n’y a que ceux-là qui les voient avec plaisir.




1. On connaît trois Labéons, tous célèbres par leur science en droit civil.
  Celui que cite ici saint Augustin est le plus célèbre de tous, Antiettus Labéon, qui vivait du temps d’Auguste.
  Voyez Suétone, ch. 54; et Aulu-Gelle, liv. I, ch. 12, et liv. XIII, ch. 10 et 12.
2. Lectisternia. Cette cérémonie consistait à dresser dans les temples de petits lits,
    sur lesquels on plaçait toutes sortes de viandes, avec les images des dieux.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras ajoutés.

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Message  ROBERT. Dim 24 Mai 2015, 12:40 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. XII a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE XII.

LES ROMAINS, EN INTERDISANT AUX POÈTES D’USER CONTRE

LES HOMMES D’UNE LIBERTÉ QU’ILS LEUR DONNAIENT CONTRE

LES DIEUX, ONT EU MOINS BONNE OPINION DES DIEUX QUE D’EUX-MÊMES.    




Les Romains ont tenu à cet égard une conduite toute différente, comme s’en glorifie Scipion dans le dialogue déjà cité De la République. Loin de consentir à ce que leur vie et leur réputation fussent exposées aux injures et aux médisances des poètes, ils prononcèrent la peine capitale contre ceux qui oseraient composer des vers diffamatoires. C’était pourvoir à merveille au soin de leur honneur, mais c’était aussi se conduire envers les dieux d’une façon bien superbe et bien impie; car enfin ils voyaient ces dieux supporter avec patience et même écouter volontiers les injures et les sarcasmes que leur adressaient les poètes, et, malgré cet exemple, ils ne crurent pas de leur dignité de supporter des insultes toutes pareilles; de sorte qu’ils établirent des lois pour s’en garantir au moment même où ils permettaient que l’outrage fît partie des solennités religieuses.


O Scipion ! Comment pouvez-vous louer les Romains d’avoir défendu aux poètes d’offenser aucun citoyen, quand vous voyez que ces mêmes poètes n’ont épargné aucun de vos dieux ! Avez-vous estimé si haut la gloire du sénat comparée à celle du dieu du Capitole, que dis-je ? la gloire de Rome seule mise en balance avec celle de tout le ciel, que vous ayez lié par une loi expresse la langue médisante des poètes, si elle était dirigé contre un de vos concitoyens, tandis que vous la laissiez libre de lancer l’insulte à son gré contre tous vos dieux, sans que personne, ni sénateur, ni censeur, ni prince du sénat, ni pontife, eût le droit de s’y opposer ? Quoi !  Il vous a paru scandaleux que Plaute ou Névius pussent attaquer les Scipions, ou que Caton fût insulté par Cécilius, et vous avez trouvé bon que votre Térence1 excitât les jeunes gens au libertinage par l’exemple du grand Jupiter !




1. Bien que Térence fût Africain par sa naissance, saint Augustin le considère
   ici comme tout Romain par son éducation et ses amitiés, comme par ses ouvrages.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras et soulignés ajoutés.

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Vers diffamatoires ?  Plus l'esprit du monde change, plus il est pareil !  Shocked
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Message  ROBERT. Dim 24 Mai 2015, 12:50 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre II, cap. XIII a écrit:

LIVRE II: ROME ET LES FAUX DIEUX.



CHAPITRE XIII.

LES ROMAINS AURAIENT DU COMPRENDRE QUE DES DIEUX CAPABLES DE SE COMPLAIRE

À DES JEUX INFÂMES N’ÉTAIENT PAS DIGNES DES HONNEURS DIVINS.  




Scipion, s’il vivait, me répondrait peut-être: Comment ne laisserions-nous pas impunies des injures que les dieux eux-mêmes ont consacrées, puisque ces jeux scéniques, où on les fait agir et parler d’une manière si honteuse, ont été institués en leur honneur et sont entrés dans les mœurs de Rome par leur commandement formel ? — A quoi je réplique en demandant à mon tour comment cette conduite des dieux n’a pas fait comprendre aux Romains qu’ils n’avaient point affaire à des dieux véritables, mais à des démons indignes de recevoir d’une telle république les honneurs divins ? Assurément, il n’eût point été convenable, ni le moins du monde obligatoire de leur rendre un culte, s’ils eussent exigé des cérémonies injurieuses à la gloire des Romains; comment dès lors, je vous prie, a-t-on pu juger dignes d’adoration ces esprits de mensonge dont la méprisable impudence allait jusqu’à demander que le tableau de leurs crimes fit partie de leurs honneurs ?


Aussi, quoique assez aveuglés par la superstition pour adorer ces divinités étranges qui prétendaient donner un caractère sacré aux infamies du théâtre, les Romains, par un sentiment de pudeur et de dignité, refusèrent aux comédiens les honneurs que leur accordaient les Grecs. C’est ce que déclare Cicéron par la bouche de Scipion: "Regardant, dit-il, l’art des comédiens et le théâtre en général comme infâmes, les Romains ont interdit aux gens de cette espèce l’honneur des emplois publics; bien plus, ils les ont fait exclure de leur tribu par une note du censeur1".Voilà, certes, un règlement [d’une] de la sagesse des Romains; mais j’aurais voulu que tout le reste y eût répondu et qu’ils eussent été conséquents avec eux-mêmes. Qu’un citoyen romain, quel qu’il fût, du moment qu’il se faisait comédien, fût exclu de tout honneur public, que le censeur ne souffrît même pas qu’il demeurât dans sa tribu, cela est admirable, cela est digne d’un peuple dont la grande âme adorait la gloire, cela est vraiment romain !  


Mais qu’on me dise s’il y avait quelque raison et quelque conséquence à exclure les comédiens de tout honneur, tandis que les comédies faisaient partie des honneurs des dieux. Longtemps la vertu romaine n’avait pas connu ces jeux du théâtre2, et s’ils eussent été recherchés par goût du plaisir, on aurait pu en expliquer l’usage par le relâchement des moeurs ; mais non, ce sont les dieux qui ont ordonné de les célébrer. Comment donc flétrir le comédien par qui l’on honore le dieu ? Et de quel droit noter d’infamie l’acteur d’une scène honteuse si l’on en adore le promoteur? Voilà donc la dispute engagée entre les Grecs et les Romains. Les Grecs croient qu’ils ont raison d’honorer les comédiens, puisqu’ils adorent des dieux avides de comédies; les Romains, au contraire, pensent que la présence d’un comédien serait une injure pour une tribu de plébéiens, et à plus forte raison pour le sénat.



La question ainsi posée, voici un syllogisme qui termine tout. Les Grecs en fournissent la majeure: si l’on doit adorer de tels dieux, il faut honorer de tels hommes. La mineure est posée par les Romains: or, il ne faut point honorer de tels hommes. Les chrétiens tirent la conclusion: donc, il ne faut point adorer de tels dieux.



1. Comparez Tite-Live, lib. XIV, cap. 15, et Tertullien De Spectac. , cap. 22.
2. Ils ne furent, en effet, institués que l’an de Rome 392. Voyez Tite-Live, lib. VII cap. 2.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
à suivre…
gras, police, soulignés
et caractères ajoutés.

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ROBERT.
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