La charité et les transformations qu'elle opère

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Message  Monique Ven 30 Avr 2010, 6:32 pm

LA CHARITÉ FRATERNELLE ET L'UNION À DIEU

CHAPITRE VI

On comprend l'importance urgente et souveraine de cette charité pour des chrétiens qui ont à vivre l'Évangile en plein monde et que leur vie en famille, leur profession, leur logement, leurs responsabilités apostoliques mettent du matin au soir et du soir au matin en contact avec les hommes — ne seraient-ce que les voisins qui troublent leur sommeil — les enfants ou les malades qu'il faut soigner et le monde humain qu'il faut construire.

Tout doit être charité et tout sera union à Dieu. Seulement, il ne faut pas l'oublier, n'importe quelle solidarité, n'importe quel amour humain ne sont pas charité, mais ceux-là seulement qui rejoignent dans l'homme cet absolu qui le relie à Dieu. Toute affection, tout dévouement peuvent être bons et légitimes ; ils n'entrent dans l'absolu que dans la mesure où nous voulons à notre frère ce bien total que Dieu lui veut. Cela ne détruit aucune des valeurs humaines et ne volatilise aucun de ces liens que tresse la nature ou la liberté, mais au contraire cette lumière nouvelle les place dans toute leur vérité et leur donne toutes leurs dimensions.

Bien plus, la présence du Christ fait que l'amour fraternel ne se présente plus comme une question de loi, mais comme un discernement du cœur ; saint Ambroise a eu raison de le dire : « Ce n'est pas la science qui reconnaît le prochain, mais la miséricorde. »

C'est l'homme qui est aimé, qui est servi, mais c'est Dieu qui est atteint, quelquefois à l'insu de celui qui agit ainsi, comme nous le verrons, mais souvent le Christ est reconnu et cherché : on veut à l'homme tout le bien que lui-même se veut et dont il a conscience ; on lui veut aussi, à cause de Dieu qui l'aime plus qu'il ne s'aime lui-même, ce bien que Dieu lui veut. « Nous devons vouloir à notre frère qu'il soit en Dieu », explique saint Thomas pour démontrer comment le charité qui aime l'homme n'en est pas moins théologale et comment la vertu de charité est unique par cette relation à Dieu.

Comment n'entendrait-on pas dans cette formule comme un écho lointain mais fidèle de la charité qui inspirait au Christ la grande demande : « Père, je veux que là où je suis, ils soient avec moi (2)... »
Une telle conception serait monstrueusement déformée si elle aboutissait à faire du prochain une occasion de vertu, spécialement de patience, ou le réduisait au rôle d'escabeau pour monter à Dieu. Le prochain est celui à qui nous devons un amour infini : Dieu en l'aimant l'a rendu digne d'un tel amour que jamais nous n'en serons quittes. Ce que nous donnons ne nous fait pas passer à la dignité de bienfaiteurs, mais à celle de serviteurs (1) et le don de la grâce nous rend endettés envers tous.

Avouons que c'est là chose difficile. « Il n'y a guère chose plus difficile que de s'aimer », avouait Rilke se plaçant à un tout autre plan, mais sa réflexion reste vraie au plan supérieur de la charité ; elle est même chose impossible et c'est Dieu seul qui, en aimant en nous, peut aimer ses enfants de sa manière à lui.

Nous pouvons conclure en rappelant la vieille légende russe : le paysan qui, parce qu'il a aidé un frère dont le char s'était embourbé, arrive en retard au rendez-vous où Dieu l'attendait ; il faudrait la commenter en rappelant que ce prochain dans le besoin était aussi un rendez-vous de Dieu et que, l'avoir aidé, était une rencontre avec Dieu, une rencontre inattendue et anticipée, mais infaillible : « C'est à moi que vous l'avez fait (2). »

2. Jn. 17, 24.
1. Cf. Lc. 22, 25 et 26.
2. Mt. 25, 40.


FIN
Monique
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