Somme contre les Gentils (suite) : Livre premier.

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Message  Louis Sam 27 Nov 2021, 6:24 am

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Bonjour à tous,

Nous publierons, de ce LIVRE  PREMIER, tout d’abord, les chapitres qui seront référencés au LIVRE II . Par la suite, nous compléterons.

Il est à noter que  les nouveaux chapitres seront intégrés dans la TABLE du Livre II (lien ci-haut); ainsi tous les Chapitres de tous les Livres seront dans le même fil.

Bonne lecture. Bien à vous.


Dernière édition par Louis le Mar 21 Déc 2021, 5:28 am, édité 2 fois (Raison : Insertion d'un deuxième paragraphe et orthographe.)

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Message  Louis Sam 27 Nov 2021, 6:28 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

Après avoir établi que les tentatives faites pour démontrer qu'il existe un Dieu ne sont pas inutiles, nous avons à exposer les raisons sur lesquelles les philosophes et les docteurs catholiques ont appuyé cette vérité. Nous commencerons par les arguments formulés par Aristote pour prouver l'existence de Dieu  (1). Il prétend y parvenir au moyeu du mouvement et de deux manières.

Voici la première. Tout ce qui est mû reçoit le mouvement d'un autre être; or, on peut constater par le secours des sens que quelque chose se meut, par exemple, le soleil; donc il reçoit le mouvement, d'un moteur distinct de lui ; donc ce moteur se meut ou reste en repos. S'il reste en repos, nous atteignons notre but, qui est, de prouver la nécessité d'un moteur immobile que nous appelons Dieu. S'il se meut, donc le mouvement lui est communiqué par un autre moteur; donc il faut remonter à l'infini, ou bien arriver à quelque moteur immobile. Mais il est impossible de remonter à l'infini; donc il faut nécessairement admettre un premier moteur immobile.

Cette preuve renferme doux propositions qui ont besoin d'être, démontrées, savoir : que tout ce  qui est mû l'est par un être distinct de lui, et ensuite que pour les êtres qui donnent le mouvement et ceux qui le reçoivent, on ne peut pas remonter à l'infini.

Le Philosophe prouve la première de ces propositions de trois manières...
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(1) Los arguments d'Aristote dont saint Thomas nous donne la substance dans ce chapitre occupent presque en entier le livre intitulé Auscultations physiques. Il est impossible, à cause de leur étendue, d'en reproduire ici le texte. — Le terme de mouvement sera employé dans ce chapitre et les suivants dans le sens du philosophe, pour exprimer, non-seulement le mouvement local, mais en général toute espèce de changement.

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Message  Louis Dim 28 Nov 2021, 6:57 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

Le Philosophe prouve la première de ces propositions de trois manières.

1° Si un être se meut lui-même, il faut qu'il ait en lui le principe de son mouvement; autrement il est évident qu'il le recevrait d'un autre (2). Il est de plus nécessaire qu'il soit mû ou qu'il se meuve d'abord quant à lui-même et non selon une de ses parties, comme l'animal qui se meut par le mouvement du pied. En effet, s'il en était ainsi, il ne serait pas mû tout entier par lui-même, mais par une de ses parties, et une partie le serait par l'autre. Il faut encore qu'il soit lui-même divisible et qu'il ait des parties, puisque tout ce qui a le mouvement est divisible (3).

Cela posé, il raisonne ainsi: L'être que l'on représente comme entrant par lui-même en mouvement est mû le premier de tous : donc le repos d'une partie n'entraîne pas le repos du tout; car si tandis que l'une des parties est en repos, l'autre restait en mouvement, le tout lui-même ne serait pas mû le premier, mais bien cette partie qui se meut pendant que l'autre est en repos. Or, rien de ce qui entre en repos à raison du repos d'un autre ne se meut de soi-même; car l'être dont le repos résulte du repos d'un autre être ne peut avoir qu'un mouvement qui est aussi la conséquence d'un mouvement étranger, et ainsi il ne se meut pas de lui-même. Donc ce que l'on représentait comme se mouvant de soi-même ne se meut pas ainsi. Donc tout ce qui a le mouvement le reçoit nécessairement d'un autre.

On n'élude point cette raison en disant, comme on le ferait peut-être, qu'une partie de l'être que l'on suppose mû par lui-même ne peut rester en repos; et encore, que la partie ne reste en repos et n'entre en mouvement que par accident, comme le prétend Avicenne (4). La force de cette raison consiste en ce que si un être se meut tout d'abord lui-même et par lui-même, non à raison de ses parties, il faut que son mouvement ne dépende pas d'un autre. Or, le mouvement de ce qui est divisible, de même que son être, dépend de ses parties; et ainsi le divisible ne peut être à soi-même le principe de son mouvement. Il n'est donc pas nécessaire à la vérité de la proposition conditionnelle énoncée qu'elle suppose comme absolument vrai qu'une partie de l'être qui se meut lui-même reste en repos. Il faut cependant que cette conditionnelle soit vraie: Si une partie restait en repos, le tout serait dans le même état. Elle peut être vraie lors même que l'antécédent serait impossible, de même que cette autre conditionnelle est vraie : Si l'homme est un âne, il est privé de raison.

2° Le Philosophe établit encore la même chose par induction. Tout…
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(2), (3) Ces notes sont libellées en latin. Sur demande, nous les publierons. Bien à vous.

(4) Avicenne, ou correctement Ibn-Sina (Abou-Aly-Hocein), philosophe et médecin arabe de Bokhara en Perse, naquit à Afehonah (Afshéna), l'an 980 de J.-C, avec des dispositions si heureuses, qu'à l'âge de dix ans il savait tout le Coran par cœur. Il apprit les belles-lettres, la philosophie, les mathématiques et la médecine avec la même facilité. Il s'adonna ensuite à la théologie, et commença par la Métaphysique d'Aristote.  Il la lut, dit-on, quarante fois sans l'entendre, et il n'est pas encore bien décidé qu'il l'ait entendue plus tard, quoiqu'il en ait paru persuadé. Ses études furent terminées dès l'âge de dix-huit ans. II fut ensuite médecin et visir du sultan Cabous. Il mourut empoisonné par un esclave l'an 1037 de J.-C. Il laissa plusieurs ouvrages de médecine et de philosophie qui ont obtenu jusqu'il vingt-huit éditions (Faller, Dict. hist.).

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Message  Louis Lun 29 Nov 2021, 6:44 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

2° Le Philosophe établit encore la même chose par induction. Tout ce qui est en mouvement par accident ne se meut pas par soi-même ; car son mouvement suit celui d'un autre être. Il en est de même de ce qui est mû par violence. Cela est évident de ce qui est mû par sa nature et comme de soi, par exemple, les animaux, qui sont certainement mis en mouvement par le principe vital ; et encore de ce qui est mû pur sa nature, comme les objets pesants et légers, qui reçoivent le mouvement de l'être, qui les produit ou qui éloigne l'obstacle. Or, tout ce qui est mû l'est essentiellement ou par accident. Si c'est essentiellement, c'est ou par violence ou par nature; et dans ce dernier cas l'être reçoit le mouvement de soi, comme l'animal, ou non de soi, comme ce qui est pesant ou léger. Donc tout mobile est mû par un moteur distinct de lui-même.

3° La troisième démonstration est celle-ci : Rien ne peut être en même temps en acte et en puissance relativement à la même chose. Or, tout ce qui est mû, considéré comme tel, est en puissance, parce que le mouvement est l'acte de ce qui existe en puissance, en tant qu'il est à cet état. Au contraire, tout ce qui donne le mouvement est en acte, considéré sous ce rapport, parce que rien n'agit qu'en tant qu'il est en acte. Donc rien ne peut être actuellement moteur et sujet du mouvement relativement à la même chose, et par conséquent, rien ne se meut soi-même.

Il est à observer que Platon, en disant que tout moteur est en mouvement, prend le terme de mouvement dans un sens plus étendu que celui d'Aristote ; car ce dernier entend proprement par mouvement l'acte de ce qui existe en puissance, envisagé sous ce rapport et en tant qu'il n'appartient qu'à ce qui est divisible et corporel : c'est ce qu'il établit au sixième livre de sa Physique. Selon Platon, au contraire, ce qui se meut soi-même n'est pas un corps (5). Il prenait le mouvement pour toute espèce d'opération ; en sorte que appliquer son intelligence et agir, c'est en quelque manière se mouvoir (6). Aristote lui-même s'exprime en passant de la même façon dans le livre De l'âme (7). C'est ainsi qu'il disait (Platon) que le premier moteur se meut lui-même parce qu'il se connaît, se veut ou s'aime ; ce qui, entendu dans un certain sens, ne détruit pas les arguments d'Aristote; car il est indifférent d'arriver à un premier être qui se meuve lui-même, comme l'entend Platon, ou bien à un premier être complètement immobile, dans le sens d'Aristote.

Pour prouver cette autre proposition, que s'il s'agit des êtres qui impriment le mouvement et de ceux qui le reçoivent, on ne peut remonter jusqu'à l'infini, il apporte trois raisons…
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(5), (6), (7) Ces notes sont libellées en latin. Sur demande, nous les publierons. Bien à vous.

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Message  Louis Mar 30 Nov 2021, 6:06 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

Pour prouver cette autre proposition, que s'il s'agit des êtres qui impriment le mouvement et de ceux qui le reçoivent, on ne peut remonter jusqu'à l'infini, il apporte trois raisons.

La première est celle-ci: Si pour les êtres qui impriment le mouvement et pour ceux qui le reçoivent on remonte à l'infini, il faut que tous ces infinis soient des corps, parce que tout ce qui se meut est divisible et corporel. Ceci est prouvé au sixième livre de la Physique. Or, tout corps qui donne le mouvement est mû lui-même en même temps que celui auquel il le communique ; donc tous ces infinis entreront en mouvement aussitôt que l'un d'eux sera mû. Mais si l'on prend séparément l'un d'eux qui est fini, il ne pourra se mouvoir que pendant une durée finie ; donc tous ces infinis ne seront mus aussi que pendant une durée finie. Or, cela est impossible; donc il est impossible que pour les moteurs et les êtres qui reçoivent le mouvement on remonte à l'infini.

Il démontre ainsi que tous ces infinis ne peuvent se mouvoir pendant un temps fini. Il faut que le moteur et le sujet du mouvement soient ensemble, comme il le prouve en raisonnant par induction sur les différentes espèces de mouvements. Or, les corps ne peuvent se trouver ensemble qu'autant qu'ils se continuent ou se touchent. Donc, puisque ces moteurs et ces sujets du mouvement sont des corps, ainsi qu'il a été établi, ils formeront nécessairement un même objet mobile, en vertu de la continuité ou de la contiguïté ; et ainsi un seul infini sera en mouvement pendant un temps fini : ce qui est impossible.

Voici une seconde raison à l'appui de cette même proposition : S'il s'agit d'êtres qui donnent le mouvement et sont mus avec ordre, c'est-à-dire dont l'un reçoit le mouvement de l'autre suivant un ordre déterminé, il arrivera nécessairement que si l'on éloigne le premier moteur ou s'il cesse de se mouvoir, il n'en mettra plus aucun autre en mouvement et cessera d'être mû lui-même, parce que le premier est la cause du mouvement de tous les autres. Que si l'on suppose une série infinie de moteurs et de mobiles, il n'y aura pas de premier moteur; mais tous seront pour ainsi dire moteurs moyens. Donc aucun des autres ne pourra se mouvoir, et ainsi il n'y aura rien en mouvement dans le monde.

La troisième preuve revient à celle-ci ; seulement on procède à l'inverse. Ce qui donne le mouvement en qualité d'instrument ne peut mouvoir qu'autant qu'il y aura un moteur principal. Mais si l'on remonte jusqu'à l'infini pour les êtres qui impriment et reçoivent, le mouvement, ils ne seront tous moteurs qu'en qualité d'instruments, parce qu'ils ne seront en réalité que des moteurs mus eux-mêmes, et il n'y aura pas de premier moteur; donc rien ne sera en mouvement. Et c'est ainsi que se prouvent les deux propositions avancées dans le premier genre de démonstration auquel Aristote a recours pour établir qu'il y a un premier moteur immobile.

Le second moyen est celui-ci:…

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Message  Louis Mer 01 Déc 2021, 6:20 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

Le second moyen est celui-ci: Si tout moteur est en mouvement, cette proposition est vraie, ou par elle-même, ou par accident. Si c'est par accident, elle n'est donc pas nécessaire; car ce qui est vrai par accident n'est pas nécessaire. Il est donc absolument possible qu'aucun moteur ne soit mû. Mais si le moteur n'est pas mû lui-même, il ne donne pas le mouvement, comme le prétend notre adversaire. Donc il est absolument possible que rien ne soit en mouvement; car si rien ne le donne, rien ne pourra se mouvoir. Or, Aristote regarde comme impossible qu'il y ait un instant où il n'existe aucun mouvement ( 8 ). Donc le premier moteur n'a pas été contingent, parce que d'une fausseté contingente on ne peut conclure à une fausseté absolue; et ainsi cette proposition: Tout moteur est en mouvement, n'est pas vraie accidentellement.

De plus, si deux choses sont unies ensemble par accident dans une troisième, et que l'une d'elles soit sans l'autre, il est probable aussi que l'autre pourra se trouver sans celle-là. Par exemple, si la blancheur et l'harmonie se rencontrent dans Socrate et dans Platon, et que l'harmonie existe sans la blancheur, il est probable que la blancheur pourra exister sans l'harmonie dans quelque autre. Si donc le moteur et le mobile se trouvent en un sujet réunis par accident, que dans un autre sujet le mobile existe sans moteur, il est probable qu'ailleurs se trouvera un moteur sans mobile.

On ne peut pas opposer, comme une difficulté nouvelle, deux êtres dont l'un dépend de l'autre, sans réciprocité, ainsi que cela se voit pour la substance et l'accident, qui sont joints par eux-mêmes et non accidentellement (9). Si donc la proposition énoncée plus haut est vraie par elle-même, il en résulte également une impossibilité ou une incompatibilité, parce qu'il est nécessaire que le moteur reçoive un mouvement de même nature que celui qu'il imprime ou un autre différent. Si c'est le même, il faudra donc que celui qui change soit changé, et de plus que celui qui guérit soit guéri, et que celui qui enseigne soit enseigné, et dans la même science. Cela est impossible; car il est indispensable que le maître possède la science et que le disciple en soit dépourvu; et ainsi la même personne possédera et ne possédera pas la même chose : ce qui répugne. Si au contraire il reçoit un mouvement d'une autre espèce, tel qu'en opérant le changement il soit mû quant au lieu, et qu'en donnant le mouvement il augmente aussi quant au lieu, et ainsi de suite, comme les genres et les espèces de mouvements sont finis, il en résultera que l'on n'ira pas jusqu'à l'infini; et ainsi on trouvera quelque premier moteur qui ne sera pas mû par un autre.

Voilà où l'on arrivera, à moins de dire…
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 ( 8 )  Aristote raisonne dans l'hypothèse de l'éternité du monde ; mais cet argument, ainsi que l'observe ailleurs saint Thomas, n'a aucune valeur pour ceux qui croient, comme la foi catholique l'enseigne, que toutes choses ont été produites au commencement par une cause première, qui est Dieu.

(9) Ce que dit saint Thomas, que la substance et l'accident sont unis ensemble par eux-mêmes, c'est-à-dire essentiellement et non accidentellement, doit aussi s'entendre dons un sens général et non de telle substance ou de tel accident. En effet, si l'on considère en particulier une muraille et sa blancheur, leur réunion est accidentelle. Mais si l'on envisage la muraille comme une substance et la blancheur comme un accident, leur réunion est essentielle, parce que la notion de substance est comprise dans celle d'accident, et qu'il répugne d'admettre dans la nature un accident sans sujet [François de Sylv., Comment.].

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Message  Louis Jeu 02 Déc 2021, 5:48 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

Voilà où  l'on arrivera, à moins de dire qu'il se fait une sorte de réflexion, en ce sens que si l'on épuise tous ces genres et ces espèces de mouvements, il faudra en revenir au premier. Par exemple, si le moteur est changé quant au lieu, et que celui qui cause le changement s'augmente, celui qui produit cette augmentation sera mis de nouveau en mouvement quant au lieu. Mais on arriverait au même résultat que précédemment, c'est-à-dire que le moteur qui imprime un mouvement d'une certaine espèce est mû de la môme manière, non immédiatement, mais médiatement. Il faut donc en dernier lieu admettre comme nécessaire un premier être qui ne soit pas mis en mouvement par un autre distinct de lui.

Mais parce qu'en admettant un premier moteur qui ne reçoit pas le mouvement d'un être distinct de lui, il ne s'ensuit pas qu'il soit complètement immobile, Aristote va plus loin en disant que cela peut arriver de deux manières : d'abord en ce sens que ce premier être est complètement immobile; et cela posé, nous avons ce que nous voulons, savoir qu'il existe un premier moteur immobile; la seconde manière, c'est que ce premier être soit mû par lui-même; et cela paraît probable, car ce qui est par soi-même existe toujours avant ce qui n'est que par un autre ; c'est pourquoi la raison dit que de tous les êtres mis en mouvement, le premier doit être mû par lui-même et non par un autre. Mais en accordant ce point, la conséquence restera la même. En effet, on ne peut pas dire de l'être qui se meut lui-même qu'il est mû tout entier par son tout, parce que l'on retomberait dans les inconvénients précédents, par exemple, que le même enseignerait et serait enseigné en même temps, et ainsi du reste ; ensuite, qu'un être serait tout ensemble en acte et en puissance : en acte comme moteur, en puissance comme mobile. Reste donc ceci, qu'une de ses parties seulement agit comme moteur et que l'autre reçoit le mouvement; et ainsi, nous revenons à ce qui a déjà été dit, savoir qu'il existe un moteur immobile.

On ne peut pas prétendre que les deux parties se meuvent l’une l'autre, ni qu'une partie se meut elle-même et donne le mouvement à l'autre, ni que le tout meut la partie, ni que la partie meut le tout, parce que les difficultés déjà indiquées se présenteraient de nouveau : c'est-à-dire qu'un être donnerait et recevrait en même temps la même espèce de mouvement, qu'il serait à la fois en puissance et en acte, et de plus, que le tout ne se donnerait pas d'abord le mouvement à lui-même, mais ne serait mû qu'en l'une de ses parties. Il faut donc en définitive qu'une des parties de l'être qui se meut lui-même reste immobile et mette l'autre en mouvement.

Mais dans les êtres qui se meuvent eux-mêmes et qui sont près de nous, comme les animaux…

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Message  Louis Ven 03 Déc 2021, 6:54 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

Mais dans les êtres qui se meuvent eux-mêmes et qui sont près de nous, comme les animaux, la partie motrice, qui est l'âme, bien que immobile par elle-même, est cependant mue accidentellement. C’est pour cette raison que le Philosophe prouve ultérieurement que, dans le premier être qui se meut lui-même, la partie motrice n'est mue ni par elle-même, ni par accident. En effet, comme les êtres qui sont près de nous et se meuvent eux-mêmes, c'est-à-dire les animaux, sont corruptibles, la partie motrice se meut en eux par accident ; mais il est nécessaire que tous ces êtres corruptibles, qui se donnent à eux-mêmes le mouvement, se rapportent à un premier être qui se meuve lui-même et soit éternel. II est donc nécessaire qu'il y ait pour ce qui se meut soi-même un moteur qui ne soit en mouvement ni par lui même, ni par accident.

Il est aussi évident que, selon le sentiment d'Aristote, il doit nécessairement exister un être éternel qui se donne à lui-même le mouvement; car si le mouvement est éternel, comme il le suppose lui-même, il faut considérer comme perpétuelle la génération des êtres se mouvant eux-mêmes, qui peuvent s'engendrer et sont sujets à la corruption. Mais la cause de cette perpétuité ne peut pas se trouver dans l'un de ces êtres qui se meuvent eux-mêmes, parce qu'il n'existe pas toujours; ni dans tous ensemble : d'abord parce qu'ils seraient infinis; ensuite, parce qu'ils n'existent pas en même temps. Il faut donc admettre en dernier lieu comme nécessaire un être éternel qui se meuve lui-même et qui soit le principe de la génération perpétuelle des êtres inférieurs qui se donnent à eux-mêmes le mouvement ; et ainsi, son propre moteur n'est mû ni par lui-même, ni par accident.

Nous voyons encore que, parmi les êtres qui se meuvent eux-mêmes, il en est qui commencent de nouveau à se mouvoir à cause de quelque mouvement dont ils ne sont pas eux-mêmes le principe, par exemple, l'animal qui s'éveille lorsqu'il a digéré sa nourriture ou que l'air est vicié. Il résulte de ce mouvement que le moteur qui se meut lui-même est mû par accident. D'où l'on peut tirer cette conséquence, qu'aucun être se mouvant lui-même ne se meut toujours, si son moteur est en mouvement par lui-même ou par accident. Le premier être qui se meut lui-même est toujours en mouvement; autrement il ne pourrait pas exister de mouvement éternel, puisque tout autre mouvement est le résultat du mouvement du premier être qui se meut lui-même. Il y a donc lieu de conclure que le premier qui se meut lui-même est mû par un moteur qui n'est en mouvement ni par lui-même, ni par accident.

On ne peut opposer à cette raison que les moteurs des globes inférieurs impriment le mouvement à ce qui est perpétuel, et que cependant on les considère comme mus par accident ; car si l'on dit qu'ils le sont par accident, ce n'est pas par rapport à eux-mêmes, mais par rapport à leurs mobiles, qui suivent le mouvement du globe supérieur.

Et parce que Dieu n'est pas une partie d'un être qui se meut lui-même, Aristote, dans sa Métaphysique, raisonnant sur ce moteur qui est une partie de ce qui se meut soi-même, arrive à un autre moteur entièrement distinct, qui est Dieu (10). En effet, puisque tout être qui se meut lui-même est mû par attraction, il faut que le moteur faisant partie de celui qui se meut lui-même produise le mouvement en vertu de l'attraction d'un objet doué de cette vertu et qui est plus fort que lui pour mouvoir; car ce qui cède à l'attraction est pour ainsi dire un moteur en mouvement, tandis que l'objet qui attire donne le mouvement, mais ne le reçoit d'aucune façon. Il est donc nécessaire qu'il y ait un premier moteur distinct et complètement immobile, qui est Dieu.

Deux difficultés paraissent ébranler ces conclusions :…
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(10)  Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous la publierons. Bien à vous.

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Message  Louis Sam 04 Déc 2021, 6:48 am


De l’existence de Dieu.

XIII.

Raisons qui prouvent l’existence de Dieu.

SUITE

Deux difficultés paraissent ébranler ces conclusions :…

La première vient de ce que l'on part de la supposition de l'éternité du mouvement, que les catholiques regardent comme une erreur. La réponse à faire, c'est que le moyen le plus efficace pour prouver qu'il y a un Dieu est de partir de la supposition de la nouveauté du monde, et non de son éternité, parce qu'en admettant celle-ci, l'existence de Dieu paraît moins évidente. En effet, si le monde et le mouvement ont récemment commencé, il est clair qu'il faut trouver une cause qui ait produit récemment et le monde et le mouvement, parce que tout ce qui a une existence nouvelle tire nécessairement son origine d'un être qui peut faire de nouvelles choses, puisque rien ne passe par soi-même de la puissance à l'acte ou du néant à l'être.

La seconde difficulté vient de la supposition renfermée dans les démonstrations précédentes : que le premier être mis en mouvement, qui est un corps céleste, est mû par lui-même, et que par conséquent, il est animé, ce que beaucoup refusent d'accorder. Il faut dire à cela que si l'on ne suppose pas que le premier être qui donne le mouvement se meut de lui-même, il est nécessaire qu'il soit mû immédiatement par un autre complètement immobile. C'est ce qui conduit Aristote à cette conclusion disjonctive, qu'il faut en venir de suite à un premier être distinct qui donne le mouvement et reste immobile, ou bien à un être qui se meut lui-même, et par lequel on arrive aussitôt à un premier moteur immobile et distinct.

Le Philosophe procède d'une autre manière dans sa Métaphysique, pour démontrer qu'on ne peut remonter à l'infini…

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Message  Louis Dim 05 Déc 2021, 5:57 am


De l’existence de Dieu.

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SUITE

Le Philosophe procède d'une autre manière dans sa Métaphysique, pour démontrer qu'on ne peut remonter à l'infini dans les causes efficientes, mais qu'il faut arriver à une première cause unique que nous appelons Dieu.

Cette manière, la voici: Dans toutes les causes efficientes subordonnées, le premier être est la cause du moyen, et celui-ci est la cause de la fin, qu'il y ait plusieurs moyens ou un seul. Si l'on supprime la cause, on supprime par là même ce dont elle est cause; donc, si l'on supprime le premier être, le moyen ne pourra pas être cause. Mais en remontant à l'infini dans les causes efficientes, aucune de ces causes ne sera la première ; donc toutes les autres, qui sont intermédiaires, seront détruites. Or, cela est évidemment faux; donc on est obligé d'admettre une première cause efficiente, qui est Dieu (11).

On peut tirer un autre argument de ce qu'Aristote établit dans le même traité, savoir que ce qui est très vrai possède l'être au plus haut degré (12). Et plus loin il démontre qu'il existe quelque chose de très vrai (13). Car si nous voyons que de deux choses fausses l'une est plus fausse que l'autre, de même, il faut que l'une soit plus vraie que l'autre. Cependant ce n'est que par approximation à ce qui est vrai simplement et au plus haut degré. On peut enfin conclure que quelque chose a l'être au suprême degré, et c'est ce que nous appelons Dieu.

On donne encore, d'après saint Jean-Damascène, une raison prise dans le gouvernement des êtres, et qui est indiquée dans le Commentaire sur la Physique (14). La voici : Il est impossible à plusieurs êtres opposés et discordants de se réunir toujours ou seulement quelquefois dans un même arrangement, à moins d'être dirigés par quelqu'un qui assigne à tous et à chacun d'eux une fin déterminée à atteindre. Or, nous voyons que, dans ce monde, des êtres de nature différente concourent à former le même ordre ; et cela n'arrive pas rarement et par hasard, mais toujours, et dans la plupart des cas. Il faut donc admettre un être dont la providence gouverne le monde ; et cet être, nous l'appelons Dieu (15).
______________________________________________

(11), (12), (13) , (15) Ces notes sont libellées en latin. Sur demande, nous les publierons. Bien à vous.

(14) L'auteur de ce Commentaire est Averrhoès, (Aboul-Velyd-Mohammed, ou régulièrement Ibn-Rochd), philosophe et médecin arabe qui naquit à Cordoue, et mourut à Maroc en 1168. Il appartenait à l'école philosophique arabe de Cordoue, dont il fut le docteur le plus renommé. Il traduisit les œuvres d'Aristote en arabe et les commenta. Cependant, quoiqu'il ne se proposât que d'interpréter sa doctrine, il arrive souvent qu'il lui prête des idées qui lui sont étrangères en voulant la rattacher aux théories néoplatoniciennes d'Alexandrie. La philosophie d'Averrhoès paraît être, à certains égards, un éclectisme dont les principes d'Aristote sont la base. Il ne connaissait d'autre religion que la philosophie, et regardait Moïse, Jésus-Christ et Mahomet comme trois grands imposteurs qui avaient tour-à-tour séduit le monde.


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Message  Louis Lun 06 Déc 2021, 6:03 am


De l’existence de Dieu.

XIV.

Pour arriver à connaître Dieu, il faut procéder par voie de négation.

Après avoir démontré qu'il existe un premier être que nous appelons Dieu, nous avons à rechercher quelles sont ses qualités.

S'il est besoin de recourir à la méthode de négation, c'est surtout en étudiant la substance divine, qui dépasse, par son immensité, toutes les formes à la portée de notre intelligence. Si, pour cette raison, nous ne pouvons la saisir en découvrant ce qu'elle est, nous en avons quelque notion lorsque nous voyons ce qu'elle n'est pas, et plus notre intelligence peut lui refuser, plus nous sommes près de la connaître ; car la connaissance que nous avons de chaque être est d'autant plus parfaite que nous apercevons mieux ses différences relativement aux autres, puisque chacun d'eux a en lui-même un mode d'existence qui lui est propre et ne permet pas de le confondre avec tous les autres. C'est pour cela qu'en traitant des choses dont nous avons les définitions, nous les rangeons d'abord chacune dans son genre. Nous voyons ainsi en général ce qui est; ensuite nous ajoutons les différences qui le distinguent du reste des êtres, et nous arrivons à la notion complète de la substance de la chose.

Mais parce que, dans l'étude de la substance divine, nous n'avons rien qui puisse nous servir de genre, et qu'il nous est impossible de trouver ce qui la distingue des autres êtres, au moyen de différences affirmatives, il faut pour atteindre ce but recourir aux différences négatives. De même aussi que pour les différences affirmatives, l'une restreint l'autre, et conduit à une désignation plus complète de la chose à mesure qu'elle la montre comme différant d'un plus grand nombre d'autres ; ainsi, une différence négative se trouve restreinte par une autre qui établit une disparité avec un plus grand nombre d'êtres. En disant, par exemple, que Dieu n'est pas un accident, nous le distinguons de tous les accidents. Si nous ajoutons qu'il n'est pas un corps, nous le séparons aussi de quelques substances. Et en continuant ainsi, il sera isolé par de semblables négations de tout ce qui existe en dehors de lui. Alors on pourra le considérer en particulier lorsqu'il sera connu comme distinct de tous les êtres ; cependant, la connaissance qu'on en aura acquise ne sera pas parfaite, parce qu'on ne saura pas ce qu'il est en lui-même.

Si pour connaître Dieu, nous voulons procéder par voie de négation, prenons pour principe celui qui se trouve établi par tout ce qui précède [ch. 13], c'est-à-dire, que Dieu est complètement immobile [ou immuable], vérité confirmée par la sainte Écriture ; car il est dit : Je suis le Seigneur, et je ne change pas |Malachie., III, 6]. Il n'y a pas de changement en lui [Jacob, I, 17]. Dieu n'est pas, comme l'homme, sujet au changement (1) [Num. XXIII 19].
_________________________________________________________________

(1) On lit dans la Vulgate : Non est Deus quasi homo, ut mentiatur, nec nt filius hominis mutetur.

XXVIII. Dieu possède toute perfection.


Dernière édition par Louis le Mer 08 Déc 2021, 10:26 am, édité 2 fois (Raison : Insertion d'un lien : ch. 13.)

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Message  Louis Mar 07 Déc 2021, 7:03 am



De la perfection divine.

XXVIII.

Dieu possède toute perfection.

Quoique ce qui a en même temps l'existence et la vie soit plus parfait que ce qui a seulement l'existence, Dieu, qui n'est autre chose que son être, est l'être parfait sous tous rapports, et nous regardons comme jouissant de cette perfection l'être auquel il ne manque rien de ce qui est excellent en quelque genre que ce soit. En effet :

1º Tout ce qui est bon en chaque chose se trouve dans cette chose à raison de son être. L'homme, par exemple (et il en est de même de tous les êtres), ne retirerait aucune bonté de sa sagesse si elle ne le rendait sage. Le genre de bonté d'une chose dépend donc du genre de son être. En effet, on dit d'un objet qu'il est meilleur ou moins bon, selon que son être entre dans une sorte de bonté spéciale plus ou moins grande. Si donc il existe quelqu'un qui possède l'être dans toute son étendue, il ne peut lui manquer aucun degré de la bonté qui convient à telle ou telle chose. Or, une chose qui est à elle-même son être possède l'être clans toute l'étendue possible. Par exemple, s'il existe une blancheur séparée de tout objet, il ne peut lui rien manquer de ce qui constitue la blancheur, bien qu'un certain objet blanc puisse être privé de quelque chose qui appartient à cette qualité; ce qui provient du sujet, qui la reçoit selon sa manière d'être à lui, et non selon toute la puissance de la blancheur. Dieu donc, qui est tout son être [ch. 21, 22, 24], possède l'être dans toute sa puissance. Il ne peut, par conséquent, être privé de quelque bonté ou perfection concevable en un être quelconque.

De même que la bonté et la perfection existent dans une chose en tant qu'elle est, ainsi tout défaut se rencontre en elle en tant qu'elle n'est pas de telle manière. Pour Dieu, comme il a l'être dans sa totalité, il manque aussi totalement du non-être, parce qu'un objet s'éloigne du non-être de la manière qu'il a l'être. Donc il n'y a aucun défaut en Dieu: donc il est parfait sous tous rapports; tandis que ce qui a l'existence est imparfait, non à cause de l'imperfection de l'être absolu lui-même, puisque l'être ne s'y trouve pas dans toute sa puissance, mais en ce sens que cet objet participe à l'être suivant un mode particulier très imparfait.

2º Tout ce qui est imparfait doit nécessairement provenir d'un être parfait, comme…


Dernière édition par Louis le Sam 26 Fév 2022, 8:51 am, édité 2 fois (Raison : Insertion des liens des chap. 21, 22 et 24.)

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Message  Louis Mer 08 Déc 2021, 6:40 am



De la perfection divine.

XXVIII.

Dieu possède toute perfection.

SUITE

2º Tout ce qui est imparfait doit nécessairement provenir d'un être parfait, comme le sperme qui sort de l'animal ou d'une plante. Donc le premier être doit posséder toute perfection. Or, il a été démontré [Ch. 13] que Dieu est le premier être. Donc il est absolument parfait.

3° Chaque chose est parfaite en ce qu'elle existe actuellement ; imparfaite, au contraire, en tant qu'elle est en puissance et privée de l'acte. Donc ce qui n'est d'aucune manière eu puissance, mais est un acte pur, doit nécessairement être parfait au plus haut degré. Or, il en est ainsi de Dieu. Donc il est parfait au plus haut degré.

4º Nul être n'agit qu'autant qu'il est actuel. Donc l'action dépend de la manière dont l'agent est en acte. Il est, par conséquent, impossible que l'effet résultant d'une action soit plus noble que l'acte de l'agent. II est cependant possible que l'effet soit plus imparfait que l'acte de la cause qui agit, parce que l'action peut s'affaiblir relativement à l'objet qui en est le terme. Or, en fait de causes efficientes, on arrive en remontant, comme le fait voir ce qui vient d'être dit, à une cause unique que nous appelons Dieu, et de laquelle procède toute chose, ainsi qu'on le prouvera dans la suite. Tout ce qui est en acte, dans quelque objet distinct que ce soit, doit donc se trouver en Dieu dans un degré beaucoup plus éminent que dans cet objet, sans cependant qu'il y ait réciprocité. Donc Dieu est absolument parfait.

5º Il y a dans chaque genre et dans sa limite quelque chose de très parfait et qu'on applique comme mesure à tous…
________________________________________________________________________________

(1) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous la publierons. Bien à vous.

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Message  Louis Jeu 09 Déc 2021, 5:50 am



De la perfection divine.

XXVIII.

Dieu possède toute perfection.

SUITE

5º Il y a dans chaque genre et dans sa limite quelque chose de très parfait et qu'on applique comme mesure à tous les êtres qu'il comprend, parce que c'est ce qui fait voir que chacun d'eux est plus ou moins parfait, selon qu'il approche plus ou moins de la mesure du genre auquel il appartient. On dit, par exemple, que le blanc est la mesure de toutes les couleurs, et l'homme vertueux celle de tous les hommes. Or, on ne peut prendre pour mesure de tous les êtres que Dieu, qui est à lui-même son être. Il ne lui manque donc aucune des perfections qui conviennent à certaines choses ; autrement, il ne serait pas la mesure commune de tout ce qui existe.

C'est pour cela que Moïse demandant à voir le visage ou la gloire de Dieu, le Seigneur lui répondit: Je vous montrerai tout ce qui est bien [Exod. XXXIII, 19], lui faisant entendre par ces paroles qu'en lui réside la plénitude de toute bonté. Saint Denys dit aussi au livre des Noms divins: « Dieu n'existe pas d'une certaine manière, mais simplement; et il reçoit en lui-même l'être complet, sans limites et antérieurement à tout autre » (1).

Il est bon, cependant, d'observer que la perfection ne peut convenablement s'attribuer à Dieu si l'on prend ce mot dans sa signification originelle; car on ne peut dire, ce semble, que ce qui n'a pas été fait est parfait. Mais comme tout ce qui existe a passé de la puissance à l'acte et du non-être à l'être, et que tout cela a été fait, on s'exprime avec exactitude en disant que c'est parfait, dans le sens de fait complètement, quand la puissance est amenée d'une manière complète à l'acte, en sorte qu'il n'y reste plus rien du non-être, mais qu'elle a l'être complet.Cependant, par extension, on dit qu'une chose est parfaite, non-seulement quand elle arrive à l'acte complet tandis qu'elle est faite, mais encore lorsqu'elle est en acte complet sans avoir été faite en aucune manière; et c'est dans ce sens que nous disons, de Dieu qu'il est parfait, d'après cette parole de l'Évangile: Soyez parfaits comme voire Père céleste est parfait [Matth. V, 48].
____________________________________________________

(1) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous la publierons. Bien à vous.

A suivre : XV. Dieu est éternel.

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Message  Louis Ven 10 Déc 2021, 6:49 am


De l’éternité de Dieu.

XV.

Dieu est éternel.

Ce qui précède fait voir encore que Dieu est éternel. En effet :

1º Tout ce qui commence à être ou cesse d'exister ne se trouve en ces différents états que par le mouvement ou le changement. Or, il a été démontré que Dieu est complètement immuable [ch. 13] : donc il est éternel, sans commencement ni fin.

2º On ne peut mesurer par le temps que ce qui est mû, puisque le temps est la mesure du mouvement, ainsi qu'on le voit dans Aristote (1). Or, Dieu est absolument immobile [ch. 13]: donc il ne peut être mesuré par le temps, et par conséquent, on ne peut trouver en lui ni avant ni après ; donc en lui l'être n'a pas succédé au non-être. Il ne peut passer de l'être au non-être, et il est impossible de découvrir une succession dans son être, parce que tout cela ne se comprend pas sans le temps. Il est donc sans commencement ni fin; il a tout son être en même temps, et c'est en cela que consiste l'éternité.

3º S'il fut une époque où Dieu n'existait pas, et qu'il ait ensuite été produit par quelqu'un, il a passé du néant à l'être ; mais ce n'est pas par lui-même, car ce qui n'est pas ne peut rien faire. Si c'est par un autre, celui-là est avant lui. Or, il a été prouvé que Dieu est la première cause ; donc il n'a pas commencé à exister, et par conséquent il ne cessera pas d'être, parce que ce qui a toujours été a la vertu d'être toujours; donc il est éternel.

4º Nous voyons dans l'univers certaines choses qui peuvent être et n'être pas, comme ce qui se produit par voie…
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(1) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous la publierons. Bien à vous.

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Message  Louis Sam 11 Déc 2021, 6:36 am



De l’éternité de Dieu.

XV.

Dieu est éternel.

SUITE

4º Nous voyons dans l'univers certaines choses qui peuvent être et n'être pas, comme ce qui se produit par voie de génération et se trouve sujet à la corruption. Or, tout ce qui peut arriver à l'être a une cause ; car, comme de soi, cela est indifférent à ces deux états, l'être et le néant, il est nécessaire que si l'être lui est attribué, ce soit par l'action d'une cause. Mais, lorsqu'il s'agit des causes, on ne peut remonter jusqu'à l'infini, comme on l'a prouvé déjà par une raison tirée d'Aristote [ ch. 13] ; donc il faut admettre un être dont l'existence soit nécessaire. D'ailleurs, tout ce qui est nécessaire a la cause de sa nécessité en dehors de soi, ou bien est nécessaire par soi-même. Or, on ne peut trouver à l'infini des êtres nécessaires qui aient la cause de leur nécessité en dehors d'eux-mêmes: donc il faut admettre un premier être nécessaire qui soit nécessaire par lui-même; et cet être, c'est Dieu, comme il a déjà été dit |ch. 13]. Dieu est donc éternel, puisque tout être nécessaire par lui-même est éternel.

5º Aristote prouve encore l'éternité du mouvement par la perpétuité du temps [Phys. VIII], et il part de là pour démontrer l'éternité de la substance motrice. Or, la première substance motrice n'est autre que Dieu ; donc il est éternel. En effet, si l'on rejette l'éternité du temps et du mouvement, il reste une raison suffisante pour établir l'éternité de la substance; car, si le mouvement a commencé, son commencement vient nécessairement de l'action de quelque moteur; si celui-ci a commencé, c'est aussi par l'action d'un autre, et ainsi, l'on ira jusqu'à l'infini, ou l'on arrivera à quelque chose qui n'a pas eu de commencement.

L'autorité divine rend témoignage à cette vérité. Il est dit dans les Psaumes : Pour vous, Seigneur, vous demeurez éternellement [CI, 13]; et encore : Pour vous, vous êtes identiquement le même, et vos années ne passeront point [CI, 28].

XVI…

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Message  Louis Dim 12 Déc 2021, 5:49 am



De la simplicité de Dieu.

XVI.

En Dieu il n’y a pas de puissance passive.

Si Dieu est éternel, il est nécessaire qu'il ne soit pas en puissance (1). Car  :

1º Tout ce qui a dans sa substance quelque chose en puissance peut, quant à ce qui est en puissance, ne pas exister, puisque ce qui peut être peut aussi n'être pas. Or, Dieu, considéré en lui-même, ne peut pas ne pas être, puisqu'il est éternel; donc on ne peut trouver en Dieu de puissance pour l'être.

2º Bien que ce qui est tantôt en puissance et tantôt en acte soit, quant au temps, en puissance avant d'être en acte, cependant, on peut dire simplement que l'acte est antérieur à la puissance, parce que la puissance n'arrive pas d'elle-même à l'acte, mais il est nécessaire qu'elle y soit déterminée par un être qui soit lui-même en acte. Tout ce qui est de quelque manière en puissance a donc quelque chose d'antérieur à soi-même. Or, Dieu est le premier être et la première cause, ainsi que le prouvent les raisons qui précèdent (ch. 13 et 15) : il n'y a donc en lui rien qui soit en puissance.

3º Ce qui est nécessairement par soi-même ne peut aucunement être à l'état de possible; car ce qui se trouve dans la nécessité d'être par soi-même n'a pas de cause. Or, tout ce qui est dans la possibilité d'exister reconnaît une cause: c'est ce qui a été démontré plus haut [ch. 15]. Ensuite, il est nécessaire que Dieu soit par lui-même: donc il n'a pas la possibilité d'être; donc il n'y a dans sa substance rien qui soit en puissance.

4º Tout ce qui agit ne le peut qu'en tant qu'il est en acte ; donc ce qui n'est pas tout acte ne se met pas en action…
_______________________________________________________________________________

(1) C'est-à-dire que Dieu ne peut rien acquérir, parce qu'il est nécessairement tout ce qu'il peut être; tandis que les êtres en qui il y a puissance passive sont sujets au changement, soit que ce changement les perfectionne, soit qu'il les rende moins parfaits.

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Message  Louis Lun 13 Déc 2021, 6:18 am



De la simplicité de Dieu.

XVI.

En Dieu il n’y a pas de puissance passive.

SUITE

4º Tout ce qui agit ne le peut qu'en tant qu'il est en acte ; donc ce qui n'est pas tout acte ne se met pas en action dans son tout, mais seulement quant à une partie de soi-même. Or, ce qui ne se met pas en action dans son tout n'est pas le premier agent; car il n'agit que par participation avec un autre, et non en vertu de son essence; donc le premier agent, qui est Dieu, n'admet pas un mélange de puissance, mais il est un acte pur.

5º De même que tout être est apte à agir en tant qu'il est actuellement, de même aussi il est apte à souffrir une action eu tant qu'il est en puissance; car le mouvement est l'acte de ce qui existe en puissance. Or, Dieu est complètement impassible et immuable; donc il n'a rien en puissance, c'est-à-dire en puissance passive.

6º Nous voyons dans le monde quelque chose qui passe de la puissance à l'acte, mais non qui arrive par soi-même de la puissance à l'acte, parce que ce qui est en puissance n'existe pas encore et, par conséquent, ne peut agir; donc il faut qu'il existe auparavant un autre être qui le fasse passer de la puissance à l'acte. Et encore, si cet être cesse d'exister en puissance pour avoir une existence actuelle, on doit nécessairement supposer avant lui un autre être qui le détermine à l'acte. Mais cela ne peut se répéter jusqu'à l'infini; il faut donc arriver à un être qui est seulement en acte, et aucunement en puissance ; et cet être, nous l'appelons Dieu.

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Message  Louis Mar 14 Déc 2021, 5:52 am



De la simplicité de Dieu.

XVII.

En Dieu n’est pas matière.

On peut conclure du même principe que Dieu n'est pas matière. En effet :

1° La matière, c'est ce qui est en puissance (1).

2° La matière n'est pas un principe d'action. C'est pourquoi, selon la doctrine du Philosophe, il n'appartient pas au même sujet d'être efficient et matière (2). Or, il convient à Dieu d'être la première cause efficiente des êtres, comme il a été dit ci-dessus [ch. 13]; donc il n'est pas matière.

3° Ceux qui ramènent tout à la matière comme à la cause première, et contre lesquels Aristote dirige les arguments du deuxième livre de sa Physique (3), doivent admettre comme conséquence que tout ce qui est naturellement existe par hasard. Si donc Dieu, qui est la première cause, est la cause matérielle des êtres, il s'ensuit que tout existe fortuitement.

4° La matière n'est cause de quelque chose actuellement qu'autant qu'elle est altérée ou changée. Si donc Dieu est immuable, comme nous l'avons démontré [chap. 13], il ne peut être cause de quelque chose à la manière de la matière.

Cette vérité est professée par la foi catholique, qui enseigne que Dieu a tout créé, non de sa propre substance, mais du néant…
___________________________________________________________________________

(1) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous la publierons. Bien à vous.
(2)  Voyez la note précédente.
(3)  Dans le livre indiqué, Aristote examine d'abord ce que sont le hasard et la nature, et il prouve ensuite que la nature agit toujours pour une fin.

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Message  Louis Mer 15 Déc 2021, 6:33 am


De la simplicité de Dieu.

XVII.

Dieu n’est pas matière.

SUITE

Cette vérité est professée par la foi catholique, qui enseigne que Dieu a tout créé, non de sa propre substance, mais du néant. C'est ce qui prouve combien est insensée la doctrine de David de Dinant, qui osa prétendre que Dieu est la matière première (4). Il s'appuyait sur ce principe, que s'il n'était pas identique avec elle, il y aurait nécessairement quelque différence entre ces deux êtres, et par conséquent ils ne seraient pas simples; car lorsqu'un être diffère véritablement d'un autre, la composition résulte de cette différence.

Cet auteur, égaré par son ignorance, a confondu ces deux termes : différence et diversité. On dit d'une chose qu'elle est différente par rapport à une autre. C'est le sens déterminé par Aristote (5). En effet, ce qui est différent diffère en quelque chose, tandis que l'on dit absolument d'un être qu'il est divers parce qu'il n'est pas le même. On ne peut donc chercher la différence que dans les êtres qui se ressemblent en quelque point et il faut assigner autre chose sur quoi repose la différence.

Ainsi, deux espèces sont réunies dans le genre : c'est pourquoi elles doivent être distinguées par leurs différences. Pour celles qui n'ont rien de commun, il est inutile de chercher en quoi elles diffèrent; mais elles sont diverses entre elles. C'est ainsi que les contraires se distinguent les uns des autres; et comme ils n'ont pas de genre commun qui fasse pour ainsi dire partie de leur essence, il n'y a point lieu de rechercher en quoi il diffèrent, car ils sont essentiellement divers, on distingue aussi de la même manière Dieu et la matière première, parce que le premier de ces êtres est un acte pur, et le second une puissance pure, et ils n'ont rien de commun.
_________________________________________________________________________________

(4) David de Dînant fut disciple d'Amaury de Chartres, qui vivait vers la fin du XIIe siècle. Gerson résume ainsi les idées d'Amaury:  « Tout est Dieu, et Dieu est tout. Le Créateur et la créature sont un même être. Les idées sont à la fois créatrices et créées. Dieu est la fin des choses, en ce sens que toutes choses doivent rentrer en lui pour constituer avec lui une immuable individualité. Tous les êtres ne sont que des formes individuelles d'une seule essence. » C'est, comme on le voit, la doctrine du panthéisme idéaliste. David de Dinant se rapprocha du panthéisme matérialiste en combinant ce système avec les idées aristotéliciennes sur la matière première. Cette matière, dépourvue de toute qualité et conçue néanmoins comme quelque chose de positif, lui parut devoir être le fonds commun de ce qu'on désigne, soit sous le nom d'esprits, soit sous celui de corps, et comme elle devait être identique partout, par cela même qu'elle manquait de propriétés spéciales, il en conclut l'identité absolue de toutes choses ou la substance universelle. David de Dînant, ainsi que d'autres disciples d'Amaury, fut condamné dans un concile de Paris, on 1209.

(5) Cette note est libellée en latin. Sur demande, nous la publierons. Bien à vous.

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Message  Louis Jeu 16 Déc 2021, 6:31 am



De l’existence de Dieu.

X.

Opinion de ceux qui prétendent que l'existence de Dieu,
étant connue par elle-même, ne peut pas être démontrée.

Toute dissertation ayant pour but de prouver qu'il y a un Dieu paraîtra peut-être superflue à ceux qui prétendent que l'existence de Dieu est connue par elle-même, en sorte qu'on ne peut imaginer le contraire et que cette démonstration est impossible .

Voici les raisons qui favorisent cette opinion.

1º On dit qu'une chose est connue par elle-même quand on la conçoit aussitôt qu'on entend le terme qui l'exprime. Ainsi, lorsqu'on connaît ce que sont le tout et la partie, on sait de suite que le tout est toujours plus grand que sa partie. Or, nous affirmons quelque chose de semblable en disant qu'il existe un Dieu; car sous le nom de Dieu, nous concevons l'être le plus grand qui se puisse imaginer. Celui qui entend et comprend le nom de Dieu forme pour ainsi dire cet être dans son esprit; en sorte que Dieu existe nécessairement, au moins dans l'intelligence. Mais il ne peut pas exister seulement dans l'intelligence; car ce qui est intellectuel et réel est plus grand que ce qui est seulement intellectuel. Or, il n'est rien de plus grand que Dieu, ainsi que le prouve le sens même du mot [c'est-à-dire la définition]. D'où il suit que l'existence de Dieu est connue par elle-même et pour ainsi dire rendue évidente par la signification même de son nom.

2° On peut très bien concevoir comme existant un être qu'il est impossible de concevoir n'existant pas, et cet être...


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Somme contre  les Gentils (suite) : Livre premier.  Empty Re: Somme contre les Gentils (suite) : Livre premier.

Message  Louis Ven 17 Déc 2021, 6:49 am



De l’existence de Dieu.

X.

Opinion de ceux qui prétendent que l'existence de Dieu,
étant connue par elle-même, ne peut pas être démontrée.

SUITE

2° On peut très bien concevoir comme existant un être qu'il est impossible de concevoir n'existant pas, et cet être est évidemment plus grand que celui qui peut être conçu comme non existant. On pourrait donc concevoir quelque chose de plus grand que Dieu, s'il était possible de le concevoir n'existant pas, ce qui détruirait la signification de son nom. Reste donc à dire que l'existence de Dieu est connue par elle-même.

3º Il faut nécessairement que ces propositions soient parfaitement connues par elles-mêmes…


Dernière édition par Louis le Mer 22 Déc 2021, 6:49 am, édité 1 fois (Raison : Ajouter le mot SUITE.)

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Message  Louis Sam 18 Déc 2021, 6:19 am



De l’existence de Dieu.

X.

Opinion de ceux qui prétendent que l'existence de Dieu,
étant connue par elle-même, ne peut pas être démontrée.

SUITE

Il faut nécessairement que ces propositions soient parfaitement connues par elles-mêmes, qui attribuent une chose à elle-même, comme celle-ci: L'homme est un homme; ou dont les attributs sont renfermés dans la définition du sujet, par exemple: L'homme est un animal. Or, c'est principalement de Dieu que nous pouvons dire, ainsi qu'il sera démontré plus loin [ch. 22], que son être est son essence (2). C'est comme si l'on faisait la même réponse à ceux qui demandent ce qu'il est, ou bien s'il existe. Si donc lorsqu'on dit: Dieu existe, l'attribut est le même que le sujet, ou du moins se trouve renfermé dans la définition du sujet, l'existence de Dieu sera connue par elle-même.

4º On connaît par elles-mêmes les choses que l'on connaît naturellement; car il n'est pas besoin des recherches de…
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(2) L'être de Dieu est son essence . Ces deux expressions: être et essence, quoiqu'elles aient chacune leur sens propre, signifient absolument la même chose, lorsqu'il s'agit de Dieu. Par être on entend l'existence, et par essence,ce qui constitue une chose. Or, Dieu étant l'Être nécessaire, l'idée de son essence suppose nécessairement son existence. Il n'en est pas de même pour les créatures : comme elles sont contingentes, il peut très bien arriver que leur essence étant connue, elles restent privées de l'existence. C'est ce qui a lieu précisément pour les futurs contingents, qui ne sont pas encore réalisés, et pour les êtres purement possibles, qui ne le seront jamais. —L'essence est un mot qui représente l'universel, tandis que l'être ou l'existence implique l'idée du particulier, ou la réalisation de l'essence dans l'individu. — Il sera nécessaire de se rappeler cette distinction dans la suite, car saint Thomas emploie souvent ces termes et toujours dans le même sens.


Dernière édition par Louis le Mar 15 Fév 2022, 4:30 pm, édité 1 fois (Raison : Insertion du lien du chap. 22.)

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Message  Louis Dim 19 Déc 2021, 6:31 am



De l’existence de Dieu.

X.

Opinion de ceux qui prétendent que l'existence de Dieu,
étant connue par elle-même, ne peut pas être démontrée.

SUITE

4º On connaît par elles-mêmes les choses que l'on connaît naturellement; car il n'est pas besoin des recherches de l'étude pour arriver à cette notion. Or, on sait naturellement, que Dieu existe, puisque l'homme tend naturellement par ses désirs vers lui, comme vers sa fin dernière. Cette vérité sera mise plus loin dans tout son jour [liv. III, ch. 25]. Donc, l'existence de Dieu est connue par elle-même.

5º Une, chose est connue par elle-même, si l'on connaît tout le reste par elle.…


Dernière édition par Louis le Mer 22 Déc 2021, 6:35 am, édité 1 fois (Raison : Ajouter le mot SUITE.)

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Message  Louis Lun 20 Déc 2021, 6:10 am



De l’existence de Dieu.

X.

Opinion de ceux qui prétendent que l'existence de Dieu,
étant connue par elle-même, ne peut pas être démontrée.

SUITE

5º Une, chose est connue par elle-même, si l'on connaît tout le reste par elle. Or, il en est ainsi de Dieu ; car de même que la clarté du soleil est le principe de toute perception pour l'œil, ainsi la lumière divine est la source de toute connaissance intellectuelle, puisque c'est en elle que l'on trouve d'abord et principalement la lumière de l'intelligence. Il faut donc conclure que l'existence de Dieu est connue par elle-même.

Ces raisons et d'autres semblables font que certains esprits regardent comme tellement évidente par elle-même l'existence du Dieu, qu'il est impossible de penser le contraire.


XI…


Dernière édition par Louis le Mer 22 Déc 2021, 6:36 am, édité 1 fois (Raison : Ajouter le mot SUITE.)

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