Simon le Noir, Lucius de Cyrène, Manahen : Qui sont-ils ?
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Simon le Noir, Lucius de Cyrène, Manahen : Qui sont-ils ?
I
Le XIIIe chapitre des Actes des Apôtres, commence ainsi : « Il y avait dans l'Église d'Antioche des Prophètes et des docteurs, entre lesquels Barnabé, Simon qu'on appelait le Noir, Lucien de Cyrène, Manahen, frère de lait d'Hérode le Tétrarque, et Paul.
« Or, pendant qu'ils sacrifiaient au Seigneur et qu'ils jeûnaient, le Saint-Esprit leur dit : « Séparez-moi Saul et Barnabé, pour l'œuvre à laquelle je les ai appelés. » Alors jeûnant et priant ils leur imposèrent les mains et les laissèrent partir. »II
Nous ne parlerons pas de saint Barnabé dont la vie, liée longtemps à celle de saint Paul, nous est suffisamment connue par la Biographie précédente.
On ne trouve dans l'histoire ni l'origine, ni la condition, ni la profession, ni la vie, ni la mort, de SIMON LE NOIR. Suivant la tradition conservée par saint Dorothée, martyr, il fut évêque de Bosra, dans l'Idumée.
Cette contrée, limitrophe de la Palestine, était habitée par les Iduméens ou Édomites, descendants d'Ésaü. Elle s'étendait au nord de la mer Rouge et au sud de la mer Morte. Sa capitale était Bosra, qui veut dire ville fortifiée, attendu qu'elle était bâtie sur une montagne rocheuse.III
Les Iduméens possédaient sur la mer Rouge deux ports célèbres, qui devinrent la possession de David, lorsqu'il eut fait la conquête du pays : c'étaient Élath et Asiongaber. De ce dernier port, partaient les flottes d'Hiram et de Salomon, pour aller chercher l'or d'Ophir, que plusieurs croient avoir été le Pérou. La durée de chaque voyage, qui était de trois ans, est une des raisons sur lesquelles ils appuient leur sentiment (1).
Le nom de Bosra figure avec éclat dans le magnifique passage, où…
Note de Mgr. Gaume: Aujourd'hui 3 mars 1876, je reprends mon travail biographique, interrompu le 25 janvier 1876, par la mort de ma bien-aimée sœur Éléonore, décédée à Fuans (Doubs), Je demande pour elle un Ave Maria, aux personnes qui liront cette Biographie.
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(1) Voir une longue et savante dissertation de Bivar, dans les Chroniques de L. Dexter, an. 66, n, 22.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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IV
Le nom de Bosra figure avec éclat dans le magnifique passage, où le plus éloquent des Prophètes, Isaïe, dépeint les triomphes du Messie :
« Quel est, dit-il, celui qui vient d'Édom, les vêtements teints, de Bosra? Splendide dans son vêtement, et marchant dans la multitude de sa force ? — C'est moi le prédicateur de la justice et le guerrier sauveur du monde.
« — Pourquoi donc votre robe est-elle rouge et vos vêtements comme ceux des hommes qui foulent le pressoir? — C'est que moi seul j'ai foulé le pressoir, et nul parmi les nations ne m'a aidé. Je les ai foulées dans ma colère, je les ai broyées dans ma fureur et leur sang a rejailli sur mes vêtements. Tous en sont souillés (1). »
Dans ce poétique dialogue, Édom et Bosra sont pris pour le monde païen, avec Rome sa capitale, que Notre-Seigneur est venu, au prix de son sang et du sang de ses martyrs, délivrer de la tyrannie du démon.V
Simon est surnommé le Noir à cause de la couleur de sa peau. Était-il de race africaine? Il n'y a rien d'impossible. D'une part, l'eunuque de la reine d'Éthiopie était de cette race et de cette couleur; d'autre part, Notre-Seigneur était venu appeler au bienfait de l'Évangile tous les hommes, sans distinction de couleur et de race.
Quoi qu'il en soit, pour que, dans son rapide récit, saint Luc ait fait mention de Simon le Noir, il faut qu'il ait été un des hommes les plus considérables de la primitive Église. Comme ses collègues d'Antioche, doué du don de prophétie, non seulement il expliquait authentiquement les divines Écritures; mais, en outre, annonçait comme Agabus, les choses à venir, qui concernaient îe monde et principalement l'Église.
Quelles furent ces prophéties ? nous l'ignorons; contentons nous de savoir qu'elles eurent pour but la gloire de Dieu, et tirons-en cette conclusion que toutes nos œuvres doivent tendre au même but.
LUCIUS DE CYRÈNE…
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(1) Quis est hic qui venit de Edom, tinctis vestibus de Bosra ? Iste formosus in stola sua, gradiens in multitudine fortitudinis suæ, etc. Is., LXIII, 1.
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VI
LUCIUS DE CYRÈNE, qui se trouvait à Antioche avec Simon le Noir, ne nous est guère mieux connu. Le 6 du mois de mai, le Martyrologe romain parle de lui en ces termes : « A Cyrène, saint Lucius, évêque, dont saint Luc fait mention dans les Actes des Apôtres. » Plusieurs hagiographies, entre autres le savant évêque d'Equilium, Pierre de Natalibus, disent qu'il fut ordonné par les Apôtres, premier évêque de Cyrène, une des villes de la Pentapole de Lybie.VII
L'ancienne Lybie, aujourd'hui royaume de Barca, était une vaste contrée d'Afrique, qui comptait cinq villes principales, d'où son nom de Pentapole. Ce pays des lions et des panthères s'étend le long de la Méditerranée et dans la régence de Tripoli. La partie occidentale est assez fertile; mais l'intérieur est un vaste désert qui se confond, vers le Midi, avec le grand désert de Sahara (1).VIII
On voit que, dès l'origine, l'Évangile pénétra dans toutes les parties du monde. Les Apôtres de la bonne nouvelle sont toujours les mêmes. Ni les distances, ni les glaces du Nord, ni les brûlantes chaleurs du Midi, ni les lions, ni les bêtes féroces, ni les mers de sable, ni les peuplades sauvages, plus féroces quelquefois que les tigres, rien ne les arrête. Sur les traces de saint Lucius, aujourd’hui même, nos missionnaires vont allumer dans cette terrible Afrique le flambeau de la foi. Disons de saint Lucius ce que nous avons dit de Simon le Noir, qu'il fut, parmi tant d'autres, un des personnages illustres de la primitive Église.
MANAHEN …
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(1) C'est de la Lybie que les Romains tiraient en grande partie ces multitudes vraiment incroyables d'animaux féroces pour les jeux de l'amphithéâtre. Dans ceux que Pompée donna au peuple, il fit paraître cinq cents lions! Aujourd'hui on parle d'inonder le désert de Lybie, en y faisant arriver les eaux de la Méditerranée.
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IX
MANAHEN, frère de lait d'Hérode le Tétrarque, est peut-être plus illustre encore. Ce n'est pas en vain que saint Luc nous apprend qu'il était frère de lait d'Hérode le Tétrarque. Il a voulu faire savoir à la postérité que Manahen était d'une grande famille et que l'Évangile recrutait ses disciples non seulement parmi les pauvres, mais encore parmi les riches, bien que les uns fussent moins nombreux que les autres, suivant le mot de saint Paul : Pas beaucoup de puissants, pas beaucoup de nobles : non multi potentes, non multi nobiles.X
L'historien Josèphe rapporte que le père de Manahen était essénien. Au temps de Nôtre-Seigneur, florissait en Palestine, à côté des pharisiens, des sadducéens et des hérodiens, la secte des esséniens. Elle se composait d'hommes d'une conduite généralement irréprochable. Ils demeuraient dans les villages et évitaient les villes, à cause de l'immoralité qui y règne ordinairement parmi les habitants.XI
Ils cultivaient la terre, élevaient du bétail et menaient une vie éminemment pratique. Ils croyaient à l'existence de Dieu, à l'immortalité de l'âme, aux peines et aux récompenses futures. Ils ne tenaient pour révélés que les écrits de Moïse, qu'ils interprétaient à leur manière, en comptant sur l'assistance du Saint-Esprit.XII
Ils n'offraient point de sacrifices dans le temple de Jérusalem, parce qu'ils avaient, disaient-ils, un culte plus saint. Ils évitaient les plaisirs des sens comme un mal et s'abstenaient même du mariage. Pour se perpétuer, ils adoptaient des enfants étrangers, quand ceux-ci étaient encore susceptibles d'instruction et en faisaient leurs disciples.
Il y avait cependant une seconde classe d'esséniens, qui, tout à fait d'accord dans leur vie, leurs usages et leurs lois avec les premiers, s'en séparaient quant au mariage. A cette seconde classe appartenait le père de Manahen.
Voici, d'après Josèphe, quelle fut l'origine de sa fortune…
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Re: Simon le Noir, Lucius de Cyrène, Manahen : Qui sont-ils ?
XIII
Voici, d'après Josèphe, quelle fut l'origine de sa fortune. Ayant rencontré le vieil Hérode, lorsqu'il était encore enfant et qu'il allait à l'école, il lui prédit qu'un jour il serait roi. Cette flatteuse annonce lui mérita les faveurs du prince. Nommé président du Sanhédrin avant Hillel, il partagea plus tard, pendant quelque temps, avec celui-ci, le souverain pontificat, mais il ne tarda pas à se retirer du grand conseil; il abandonna même la secte des esséniens pour passer dans le parti du roi.XIV
Comme il jouissait d'un crédit considérable, Hérode, reconnaissant de ses services, fit élever son fils avec ses propres enfants. En effet, c'était la coutume dans l'antiquité, comme on le voit par l'histoire de Sésostris et de Cyrus, que les fils des familles nobles fussent élevés avec ceux des rois. Ainsi le jeune Manahen avait suivi la cour d'Hérode en Galilée et s'était attaché intimement à lui, comme à son compagnon d'enfance. Mais, à l'époque de la mort de saint Jean-Baptiste, il quitta la cour pour devenir disciple du Sauveur.XV
A raison de sa naissance et de son intimité avec Hérode, le jeune Manahen pouvait espérer une grande fortune et une brillante position sur la terre. Il préféra la pauvreté et la croix de Jésus, et s'attacha généreusement à son service. Le doctorat chrétien auquel il fut élevé répondait à ce que les juifs appelaient la dignité de rabbin ou de maître dans la synagogue.XVI
En cette qualité il présidait aux assemblées chrétiennes. Dès lors, les nombreux disciples de l'Évangile avaient des lieux d'assemblée dans les grandes villes, surtout à Antioche. Manahen continua de gouverner la florissante Église de cette ville, sous la dépendance néanmoins de saint Pierre, de saint Évode, de saint Ignace, qui en furent les premiers évêques, ce qui ne l'empêchait pas d'aller, avec les autres disciples, annoncer dans les contrées voisines le royaume de Dieu.XVII
Ses courses évangéliques terminées, il revenait à Antioche, où il mourut en paix après avoir rempli fidèlement les fonctions de son apostolat. La date de sa bienheureuse mort est incertaine; mais le Martyrologe romainen fait mention, au 24 mai: « A Antioche, saint Manahen, frère de lait d'Hérode le Tétrarque, docteur et prophète de la loi de grâce, mot dans cette même ville. »
Si cet illustre témoin du Sauveur n'a pas versé son sang pour confirmer son témoignage, c'est que l'occasion du martyre lui aura manqué. Le sacrifice qu'il a fait de sa magnifique fortune et de sa position considérable dans le siècle, vaut ici le témoignage de sang.
Dans le texte des Actes que nous avons cité, il est dit que…
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Re: Simon le Noir, Lucius de Cyrène, Manahen : Qui sont-ils ?
XVIII
Dans le texte des Actes que nous avons cité, il est dit que Simon appelé le Noir, Lucius de Cyrène et Manahen prièrent, jeûnèrent et imposèrent les mains à Paul et à Barnabé qu'ils laissèrent partir. Toutes ces circonstances, minutieusement rappelées, font croire qu'il s'agit d'une ordination ou plutôt d'une consécration épiscopale. Tel est le sentiment des plus savants commentateurs de l'Écriture.XIX
On ne voit nulle part, excepté dans cette circonstance que saint Paul et saint Barnabé, aient reçu la consécration épiscopale (1). Aussi, après le fait d'Antioche, on les voit immédiatement exercer l'autorité des évêques, en établissant des prêtres dans les villes où ils passaient.
Suivant Baronius, cette ordination eut lieu l'an 45 de Notre-Seigneur, où saint Paul avait été ravi au troisième ciel: en effet, il convenait que Paul, au moment de devenir le docteur des nations, fut élevé au ciel et qu'il en descendit comme Moïse du haut du Sinaï ; et, comme dernière main mise à sa mission, reçut la consécration épiscopale.XX
Il résulte que les trois personnages dont nous venons d'esquisser la biographie étaient évêques; car pour faire un évêque il faut des évêques. Remarquons en passant combien sont vénérables les cérémonies de nos ordinations. Le Saint Sacrifice, les jeûnes, les prières, l'imposition des mains, pratiqués aujourd'hui, étaient déjà en usage aux premiers jours de l'Église naissante.
Ces précieux détails nous révèlent encore l'éminente sainteté de ceux qui furent choisis par le Saint-Esprit lui-même pour être les consécrateurs de saint Paul et de saint Barnabé, et leur donner la mission évangélique.XXI
Enfants des saints et des martyrs, que notre unique étude soit de marcher sur les traces de nos pères. Malgré les moqueries sacrilèges de l'ignorance et de l'incrédulité, respectons tout ce que fait la sainte Église notre mère, nous rappelant le mot de sainte Thérèse : Je me ferais couper le cou pour la plus petite cérémonie de l'Église.
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(1) Nusquam legimus Paulum et Barnabam ordinatos fuisse episcopos nisi hic. — Cor. a Lap., in Act. XIII. 3.
Voir : Sepp., Vie de J.-C, t. I, p. 482 ; M. Maistre, les Témoins du Christ, p. 148, 296, 305; Petrus, a Natalib. Catalog. SS., lib. V, c. 34; Josèphe, Antiq. Jud., lib. XV.; D. Calmet, Dict. de la Bible; Encyclop. théolog., art. ESSÉNIENS; Cor. a Lap. in Act. App., C. XIII, 1 à 3 ; Baron., App., IV, II. 14;; id. p, 14, n. 58; id. an. 64; n. 516, 8, 10, etc., etc.
FIN.
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