LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Nous en ferons voir, avec le secours du ciel, un illustre exemple à la fin de ce petit ouvrage, en la personne de sainte Thérèse, renvoyant le lecteur qui en voudra savoir davantage, au livre De l'esclavage de l'admirable Mère de Dieu, où nous en avons rapporté quantité d'exemples. Il suffit de dire ici, que le grand serviteur de Dieu, le P. Balthazar Alvarez, de la Compagnie de Jésus, confesseur de la sainte que nous venons de citer, et dont elle avait appris par révélation qu'il n'y avait personne au monde qui le surpassât en perfection, eut étrangement à souffrir du côté des hommes, et même de quelques-uns de sa compagnie. Il y eut de faux témoignage contre lui, il fut chargé d'une faute notable dans une congrégation générale de sa société : on lui attribuait les fautes de ses disciples, qui ne parlaient pas comme il faut de l'oraison. C'est l'une des injustices des hommes, d'attribuer aux directeurs les manquements de ceux qu'ils dirigent. Sainte Thérèse assure qu'il n'eut pas peu à souffrir, à raison des jugements que l'on faisait d'elle. On se prenait de tout à lui.
Après tous les discours que l'on peut tenir des personnes, l'on en vient à l'état. Voici comme en parle sainte Thérèse, au chap. 2 du Chemin de la perfection : Souvent on nous tient de tels propos (elle parle de l'Oraison) : Cela est plein de dangers ; une telle s'est perdue par-là, l'autre a été déçue, cette autre qui priait beaucoup est tombée ; cela fait tort à la vertu ; cela n'est pas bon pour les femmes, d'autant plus qu'elles pourraient avoir des illusions : il serait plus à propos qu'elles filassent ; le Pater et l'Ave suffisent.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Au milieu de toutes ces persécutions, souvenez-vous bien que toutes les créatures ne sont rien devant Dieu, et qu'ainsi vous ne devez pas vous mettre en peine d'être attaquée par le rien. Mon Dieu, vous voila bien embarrassée, ô pauvre âme ! Pourquoi vous tourmentez-vous de rien ? Apaisez un peu votre esprit, rentrez en vous-même, ce n'est rien.
Oh ! Que vous découvrirez clairement cette vérité dans l'instant de votre mort ! Courage ; le monde passe bientôt, et plus tôt pour vous que vous ne pensez. Après votre mort, que vous nuira la contradiction des langues, le mépris des hommes, les humiliations en votre honneur ? Quoi ! Toutes les créatures ensemble ne sont rien devant Dieu ; leurs paroles sont donc moins que rien. Ce qui vous inquiète est donc moins que rien. En vérité, n'est-ce pas une folie ?
Quelques lumières que vous ayez par des clartés infuses et surnaturelles, ou par la science acquise, fussiez-vous le plus savant de l'univers, si vous ne savez parfaitement cette science de rien, vous êtes bien éloigné du royaume de Dieu. Mais il faut que cette science soit mise en pratique, il est facile d'en avoir des preuves : si vous vous mettez encore en peine du qu'en dira-t-on, marque infaillible que vous ne l'avez pas. Écoutez, spirituel, vous êtes encore bien dans les ténèbres, si vous vous inquiétez de l'estime des hommes. Dieu seul, Dieu seul, Dieu seul suffit. Éprouvez-vous à cette pierre de touche.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
N'attendez donc jamais grand chose de ces gens qui sont si curieux d'honneur, de réputation, qui sont si sensibles à ce que l'on pense ou que l'on dit d'eux. Encore remarquez l'inutilité de leurs peines ; car ces gens au point d'honneur, qui, par politique, tâchent de gagner tous les cœurs et qui n'oublient rien pour contenter tout le monde, avec tous leurs effets, je parle même de ceux qui passent pour les plus obligeants de la terre, dont on dit qu'ils plaisent à un chacun, ne laissent pas de recevoir des coups secrets qui touchent au vif et qui leur donnent à penser bien davantage.
Combien faut-il que ces gens fassent de lâchetés, et souvent de péchés, pour ne pas irriter les créatures ! Combien de trahisons contre leur conscience combien de dissimulations sur le vice, le laissant impuni ! Combien de malversations dans leurs charges ! Combien d'épouvantables crimes en la présentation ou collation des bénéfices ! Combien de désordres soufferts dans les particuliers et dans les communautés !
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Tenez pour maxime de ne jamais rien faire pour plaire aux hommes, de n'omettre jamais rien, de peur de leur déplaire. Laissez la créature, n'envisagez que Dieu seul. Il y a de certaines choses indifférentes qu'il faut quitter, à l'exemple du grand Apôtre, quand elles font bruit, et que les faibles s'en scandalisent. Mais il faut tenir ferme à faire le bien, malgré la contradiction des langues, à l'imitation du Fils de Dieu, qui continuait à manger avec les publicains et les pécheurs, pour prendre de là occasion de les retirer de leurs vices, laissant murmurer les scribes et les pharisiens, qui en étaient scandalisés et qui en faisaient de grands murmures. Qui voudrait faire autrement priverait Dieu d'une grande gloire qu'il reçoit de quantité d'excellentes actions qui se font, et le démon empêcherait facilement les plus grands biens, lui étant aisé de susciter des bruits et des scandales pour les ruiner.
Le grand serviteur de Dieu dont nous avons parlé, le P. Balthazar Alvarez, souffrant beaucoup, comme il a été dit, à l'occasion de sainte Thérèse, la direction qu'il en avait faisant bien murmurer, il lui manda qu'il ne lui manquerait jamais, malgré tous ces bruits et murmures. C'était un homme qui ne regardait que Dieu seul. Sa sainte était fort convaincue du mépris que l'on doit faire des discours des hommes au sujet de la pratique des vertus ; c'est pourquoi elle dit ces paroles : Si les hommes disent qu'il n'est pas bon de fréquenter si souvent la communion, lors on s'en approche plus souvent, s'ils disent qu'il y a du péril dans l'oraison, le serviteur de Dieu tâche de faire valoir combien l'oraison est bonne. Elle dit de plus : Ne vous laissez pas séduire par qui que ce soit qui vous montre un autre chemin que celui de l'oraison. Si quelqu'un vous dit qu'en cela il y a du danger, tenez-le lui-même pour dangereux. Fuyez-le, ne laissez jamais écouler ceci de votre mémoire. De dire que le chemin de l'oraison soit périlleux, Dieu ne le permet jamais. C'est une invention du démon que de jeter de telles frayeurs. Considérez, d'autre part, le grand aveuglement du monde qui ne voit pas les millions d'âmes qui se perdent par faute d'oraison ; et, si quelqu'un tombe dans ce chemin, il remplit de crainte les cœurs. Pour moi, je n'ai jamais remarqué de ruse du démon plus pernicieuse.
Finissons ce chapitre par ces paroles de l'Écriture : Ne savez-vous pas que l'amitié de ce monde est ennemie de Dieu ? (Jac. IV, 4)
C'est ce qui fait dire au divin Paul : Si je plaisais aux hommes, je ne serais pas serviteur de Jésus-Christ. (Galat. I, 10) Je vous laisse à méditer ces vérités à loisir, et puis vous verrez s'il faut se mettre en peine de l'amitié des hommes et avoir soin de leur plaire.
A suivre...
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
CHAPITRE VII
De la contradiction des bons
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Ceux qui sont à Jésus-Christ et à sa très sainte Mère souffrent des hommes en des manières différentes. Il y en a qui les persécutent par envie, jalousie, vengeance ; parce que leur bonne vie est contraire à leurs oeuvres ; parce qu'ils ne peuvent supporter la lumière de leurs ardeurs ; parce que l'ardeur de leur zèle travaille à la destruction de leurs moeurs corrompues, à les réformer et à établir une sainte discipline. Il y en a d'autres qui les poursuivent, pensant rendre service à Dieu, agissant avec des intentions droites et bonnes.
Or, entre ceux-ci il s'en rencontre qui poursuivent les gens de bien sans commettre aucun péché, Dieu permettant qu'ils aient des fondements justes pour le faire. Le P. Louis Dupont, de la compagnie de Jésus, en la Vie du P. Balthazar Alvarez, rapporte sur ce sujet l'exemple du glorieux saint Joseph, qui soupçonna la très sainte Vierge d'un crime, sans aucune faute de sa part, parce qu'il la voyait enceinte et ne pouvait pas savoir la conception du Verbe en ses entrailles par l'opération du Saint-Esprit.
A suivre...
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Il est vrai que le nombre de ces personnes est très rare, la corruption de la nature, l'amour-propre, les recherches secrètes du propre intérêt se rencontrant presque partout. Souvent donc la nature corrompue se mêle avec les intentions les plus droites, soit parce qu'on prend les choses avec trop de chaleur, qu'on les pousse trop avant, que l'on veut en venir à bout avec trop d'empressement, que l'on a peur de paraître y avoir été trompé ; soit parce qu'on se laisse trop prévenir, se rendant trop facile à écouter les accusations, se préoccupant l'esprit, se remplissant la mémoire des fautes que l'on objecte, sans penser avec assez de loisir aux raisons contraires, soit parce qu'on donne trop de lieu à l'opération du démon, qui, voulant, dans ces occasions, s'emparer de l'imagination, grossit les espèces, remue et agite les passions, en sorte que l'on est peu susceptible des véritables raisons que l'on n'entend presque pas.
Nous en avons un illustre exemple en la personne de l'un des supérieurs du vénérable P. Jean de la Croix, qui ne cessa d'exercer le serviteur de Dieu d'une façon très fâcheuse, jusque-là qu'il avait peine qu'on allât le voir ; et l'histoire nous apprend que son imagination était occupée par un démon, ce qui rendait inutile tout ce qu'on pouvait lui dire à l'avantage du saint homme, et le tenait toujours en colère et dans l'aigreur, Or, ces personnes, avec toutes leurs bonnes intentions, ne lassent pas d'être coupables : après avoir servi à Dieu pour purifier et sanctifier ses meilleurs serviteurs, elles sont châtiées en ce monde ou en l'autre vie dans le purgatoire par de grandes peines, comme l'histoire des saints nous l'apprend. Il est vrai que ces personnes ne voudraient pas agir de mauvaise foi ; mais il y a de leur faute à se laisser tromper, soit pour les raisons qui ont été dites, soit pour d'autres. Enfin c'est une chose fâcheuse de faire souffrir les serviteurs de Dieu, avec toutes les bonnes intentions que l'on a, et le démon s'en sert pour ses desseins.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Dieu tout bon a sa gloire pour fin dans l'exercice de ses serviteurs et la sanctification de leurs âmes, et il établit son règne d'une manière admirable par les travaux et les persécutions qu'ils souffrent, de telle sorte qu'il accomplit ses plus grands desseins par la voie des croix, voie cachée à la prudence des hommes qui ne peuvent se persuader que les humiliations et anéantissements soient des moyens avantageux pour faire le bien ; car quelle apparence qu'un homme dans les fonctions apostoliques y réussisse mieux par les rebuts, les délaissements, les calomnies et autres souffrances ?
Ne semble-t-il pas qu'un homme de la sorte a besoin d'une haute réputation, de l'estime et de l'amitié des créatures ? Cependant, qu'on regarde l'adorable Jésus, les saints apôtres qui ont converti l'univers, les plus grands saints dont la divine Providence s'est le plus servie, et vous les verrez accomplir tous les grands desseins de Dieu, étant accablés sous ces sortes de croix.
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Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
C'est ce qui fait que Dieu ne permet pas seulement qu'ils soient exercés par les méchants, mais encore par les bons. Ce serait peu de souffrir par des personnes dont les témoignages ne font pas toute l'impression possible sur les esprits : il est à propos de souffrir par des gens de probité, dont on ne puisse pas rejeter facilement les sentiments.
Tels étaient ceux qui persécutaient sainte Thérèse ; leur autorité était si grande, et leur vertu si considérable, que c'était beaucoup les offenser que de ne les pas croire, comme dit le prélat qui a écrit la Vie de cette sainte. Aussi le saint P. Pierre d'Alcantara, remarque bien que c'était l'un des plus grands travaux qu'elle eût soufferts, que la persécution des bons.
Les piqûres des mouches à miel, disait Notre-Seigneur, sur ce sujet, à une sainte mère, sont bien plus douloureuses que celles des autres mouches. On ne manque pas de dire que les accusations sont prouvées, puisque des gens de probité condamnent ceux contre lesquels elles sont faites. On croit que ces gens qui ne sont pas des novices en fait de vertu, et qui ont beaucoup de lumières, ne se trompent pas ; et quand même la passion y serait mêlée, l'on ne pourrait se la persuader.
Ainsi l'on conclut, sans hésiter, à la condamnation des personnes, sans en avoir le moindre remords de conscience ; et voilà l'anéantissement de ces âmes exercées que Dieu prétend sanctifier par ses voies, ce qui n'arriverait pas si les méchants étaient les seuls qui leur fussent opposés.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Le démon, au contraire, a bien d'autres fins dans ses contradictions, s'en servant pour empêcher mille biens qui arriveraient par le moyen des serviteurs de Dieu persécutés, les décriant, ou au moins rendant leur conduite suspecte, afin que l'on ne prenne aucune confiance en eux, voyant bien que Dieu leur accorde des grâces extraordinaires dans leurs emplois.
Quelquefois même il se transforme en ange de lumière, paraissant à de certaines personnes à qui il donne des avis conformes à ses desseins, pour détourner les âmes de se servir des serviteurs de Dieu, colorant les choses de beaux prétextes de la gloire de Dieu et du bien des consciences ; et s'il arrive que ces illusions soient prises pour des révélations divines, il mène les choses à des extrémités incroyables : ceux qui s'y arrêtent se persuadent agir par les ordres de Dieu.
Que les personnes de probité prennent garde de ne pas seconder les desseins de cet esprit infernal, et qu'elles apprennent une bonne fois que, quoique l'on y pense pas, souvent l'on donne lieu à ses entreprises, même avec de très bonnes intentions, dont il ne laisse pas de profiter, comme nous l'avons dit plusieurs fois.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
CHAPITRE VIII
De l'abandonnement des créatures,
et particulièrement des amis
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Nous nous plaignons souvent de ce qui doit faire le sujet de nos joies ; et lorsque nous pensons être les plus misérables, c'est alors que nous sommes les plus heureux. Cette vérité est tout éclatante à ceux qui se servent des lumières de la foi au sujet des délaissements des créatures et spécialement des amis. Il est vrai que l'abandonnement, surtout des personnes amies, des proches, ou de ceux que l'on a beaucoup obligés, est une des choses du monde les plus sensibles.
Le bienheureux Henri de Suso ayant été accusé par une malheureuse femme qui lui porta même, et lui laissa entre les mains, un enfant qu'elle prétendait être de lui, voulant se consoler avec quelques-uns de ses amis spirituels, en fut grandement rebuté : ils ne voulurent pas même lui parler. C'est ce qui est assez ordinaire, on ne voit pas volontiers les personnes humiliées. Or le saint homme avoua que ce lui fut un coup très sensible. Mais le Prophète parlant en la personne de notre débonnaire Sauveur, ne marque-t-il pas que le délaissement de ses amis lui a été une affliction bien rude et une douleur extraordinaire ?
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Cependant le chrétien, qui est un homme de grâce, dont la vie est surnaturelle, trouve des biens inestimables dans les privations les plus rigoureuses de la nature. Enfin c'est tout dire, que l'on trouve Dieu. Où il y a plus de créatures, on y rencontre Dieu seul. Ô douces et aimables vérités, qui faites le paradis des âmes !
Hélas ! Si les hommes vous entendaient ! L'esprit d'amour, dit l'histoire de sainte Catherine de Gênes, lui ôta tous ses amis, et les personnes spirituelles dont elle recevait quelque soulagement, et elle demeura seule, abandonnée, tant de dedans que de dehors ; il la priva même de son confesseur. C'est que Dieu en voulait faire une créature toute divine : aussi cette sainte a été incomparable dans le pur amour de Dieu seul. Saint Paul vivait pas, il n'y avait que Jésus seul en l'homme apostolique ; mais il fut élevé à une possession glorieuse par les privations extrêmes.
Ô mon Dieu, que les conduites de la Providence sont admirables ! Le grand Apôtre se trouva délaissé des Galates, il devint même leur ennemi pour leur avoir dit trop franchement leurs vérités : il se trouva rebuté de ces peuples dont lui-même dit des merveilles en parlant de l'amitié qu'ils lui avaient témoignée, jusque-là qu'ils l'avaient reçu comme un ange du ciel, comme Jésus-Christ lui-même ; et pour ainsi parler (ce sont les termes de l'Apôtre), ils se fussent arraché les yeux pour les lui donner, s'il en eût eu besoin. (Galat. IV, 15) Ne déclare-t-il pas dans la seconde Épitre à Timothée, qu'il s'est trouvé abandonné de tout le monde ? Mais en même temps il ajoute que le Seigneur l'a assisté ; tant il est vrai que Dieu est où les créatures manquent.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
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Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Mais y a-t-il jamais rien eu de semblable à l'humanité sainte de l'adorable Jésus, qui a été unie hypostatiquement au Verbe divin ? En sorte qu'il est vrai de dire que Jésus est Dieu ; et ensuite, chose admirable, il est certain que les abandonnements qu'il a portés, sont incomparables. Il est trahi par un de ses disciples ; le premier de ses apôtres le renie ; tous le quittent ; les anges le laissent à la cruauté de ses ennemis ; il se sépare de sa sainte Mère, la laissant au pied de la croix ; le Saint-Esprit le conduit au sacrifice, comme l'enseigne l'Apôtre ; le Père éternel l'abandonne ; il se délaisse lui-même, en sorte que ses sujets, ses créatures, le ciel, la terre, et, comme remarque un excellent auteur, son Père, sa Mère, le Saint-Esprit, et Jésus même ne font qu'un corps pour affliger Jésus. Toutes les puissances divines, célestes, humaines et infernales s'unissent pour le tourmenter.
Ces vues, si l'âme en est un peu pénétrée, donnent plus d'envie de l'abandonnement des créatures que de crainte. Non, non, que la nature frémisse tant qu'elle voudra, que l'esprit humain raisonne tant qu'il lui plaira ; ce spectacle d'un Dieu-Homme ainsi délaissé, inspire un amour incroyable pour tous les délaissements possibles. Quel moyen, après cela, de n'en être pas saintement passionné, de ne pas soupirer d'amour après ces aimables abandonnements ? Quel bonheur d'y avoir quelque part, et combien s'en doit-on tenir heureux ! Quelle fortune comparable à celle qui nous fait entrer dans les états du Roi du ciel et de la terre ! Le dessein que j'ai pris de ne faire qu'un petit abrégé de cette matière en cet ouvrage, m'arrête : il y aurait de quoi écrire ici pour le reste de la vie.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Ô les douces, heureuses et agréables nouvelles, lorsqu'on nous vient dire que tout le monde nous quitte, et les personnes mêmes dont on ne l'aurait jamais pensé ! Allez, dit l'âme, allez, créatures ; retirez-vous, à la bonne heure. Vos éloignements nous sont de douces approches du Créateur. Ah ! Que l'échange en est heureux ! Dieu pour la créature, répétons-le, Dieu pour la créature !
Ô mon âme, quelle tromperie plus funeste que de chercher la consolation dans l'être créé ! Consolations trompeuses, vous êtes de grandes et véritables désolations. Voici ce qui arrive. Nous faisons à peu près comme ces gens qui tombent dans quelque abîme ; ils se prennent partout où ils peuvent, de peur d'y tomber. S'ils rencontrent quelque chose où ils puissent se prendre infailliblement, ils s'y arrêteront. Hélas ! voilà ce que font les pauvres créatures qui sont attirées et appelées à la glorieuse perte d'elles-mêmes, en l'abîme de l'être de Dieu par l'union de sa grâce ; elles s'attachent à ce qu'elles rencontrent, il faut qu'elles ne trouvent plus rien pour se laisser abîmer.
Ô abîme divin, ô mon cher abîme, qu'à jamais ma chétive âme soit perdue en toi pour ne se trouver jamais !
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13764
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: LES SAINTES VOIES DE LA CROIX - LIVRE II - par M. HENRI-MARIE BOUDON
Ô merveilleux et terrible exemple de nécessité, de tout quitter pour tout trouver. Les apôtres, après la résurrection, n'aimaient pas seulement Jésus leur bon maitre comme homme, mais comme Fils de Dieu ; mais parce qu'ils l'aimaient pour leur consolation, pour leur satisfaction, il est obligé de leur dire, qu'il est expédient qu'il se retire d'eux. Apprenez de là, ô âmes qui souffrez des abandonnements intérieurs, qu'il est utile de les porter. Sainte Madeleine tourne le dos aux anges qui lui parlent, quoi qu'elle en pût recevoir des consolations indicibles : car il est vrai que les anges et les saints ne sont que des moyens pour aller au Créateur, et qu'il faut s'en séparer quand ils en divertissent ; comme il arrive quelquefois aux âmes élevées, lorsqu'elles sont actuellement dans l'oraison d'union. Mais il y a bien plus : il faut même mourir à Jésus dans le sens qu'il a été dit, pour ne vivre qu'à Jésus, pour Jésus et de Jésus. C'était la pratique du divin Paul, qui protestait ne connaître plus Jésus selon la chair, en tant qu'il peut satisfaire à l'amour-propre. (II Cor. v. 16) Il y faut tellement voir Dieu, que le divin Sauveur ne peut souffrir qu'on l'appelle bon, quand on ne le considère que comme un saint ou un prophète. Notre bon Maitre, lui dit-on ; quelles paroles mieux dites ? et cependant il ne peut les souffrir. Aussitôt il répond : Il n'y a personne de bon que Dieu. (Matth. XIX, 17) Disons donc toujours : Dieu seul, Dieu seul, Dieu seul.
**********ORAISON À NOTRE-DAME DES MARTYRS
Ô sainte Dame, c'est à bon droit que votre auguste et précieux nom de Marie, entre plusieurs significations admirables qu'il porte, veut dire une mer ou un assemblage de toutes les eaux ; car il est vrai que votre douleur est grande comme une mer ; et comme la mer, dans son étendue prodigieuse, reçoit en son sein tous les fleuves et ruisseaux, selon le témoignage de l'Écriture ; de même la grandeur de votre coeur immense renferme éminemment toutes les croix des martyrs. C'est donc avec justice que l'Église vous honore comme leur digne reine, et c'est dans l'union de ces sentiments que celui qui est le dernier et le plus indigne de ses enfants se prosterne devant le trône de vos grandeurs, pour vous présenter ses hommages en qualité de votre esclave, vous appelant à son aide comme la dame et la reine des martyrs. Ô ma bonne maîtresse, rendez-moi digne de mêler mes larmes avec les vôtres, et de vous tenir compagnie, me tenant debout et ferme au pied de la croix avec vous. Ainsi soit-il.
Fin
Monique- Nombre de messages : 13764
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