Liturgie de l'Épiphanie.
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Liturgie de l'Épiphanie.
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MANUEL LITURGIQUE À L’USAGE
DU SÉMINAIRE DE SAINT-SULPICE.
HISTOIRE ET SYMBOLISME DE LA LITURGIE,
Par A. LEROSEY, Prêtre de Saint-Sulpice, PARIS, 1890.
ÉPIPHANIE.
Épiphanie, ce nom, qui signifie manifestation, indique qu'elle est destinée à honorer l'apparition d'un Dieu au milieu des hommes. Voilà pourquoi l'Église grecque donne à cette fête le nom mystérieux de Théophanie, si célèbre dans l'antiquité pour signifier une apparition divine. On trouve ce nom de Théophanie dans Eusèbe, dans saint Grégoire de Nazianze, dans saint Isidore de Péluse et dans les livres liturgiques des églises orientales.
Les Orientaux appellent encore cette fête les saintes lumières , luminarium, parce que dans la nuit on administrait le baptême solennel, et qu'il y avait un très grand nombre de cierges allumés. On baptisait solennellement en Orient cette nuit-là, parce que la fête de l'Épiphanie avait principalement pour objet de célébrer le baptême de Notre-Seigneur. Mais le baptême des catéchumènes avait lieu, en Occident, les veilles de Pâques et de la Pentecôte.
On appelle encore cette solennité la fête des rois, en souvenir des mages, que la tradition considère comme des rois venus de l'Orient.
La fête de l'Épiphanie est d'origine orientale, comme celle de Noël est de provenance latine.
Le plus lointain indice qui se rapporte à l'Épiphanie nous est fourni par Clément d'Alexandrie. Il raconte que les Basilidiens célébraient le jour de la naissance du Christ, par une fête précédée d'une vigile (1). Ils variaient cependant sur la date; les uns célébraient la fête le 10 janvier, les autres le 6. Il est impossible de dire quand cet usage fut adopté par les églises orthodoxes d'Orient; mais il est certain que, dans le courant du IVesiècle, la fête du 6 janvier y était universellement observée. Elle était observée également dans les pays de rite gallican, alors que Rome ne l'avait pas encore admise. Au témoignage d'Ammien Marcellin (1), Julien, étant déjà en état d'hostilité contre Constance, assista publiquement au service religieux, à Vienne, le jour de l'Épiphanie, « feriarum die quem celebrantes mense januario christiani Epiphania dictitant. » Le concile de Saragosse (380) la mentionne aussi comme une très grande fête.
L'Épiphanie avait droit de cité partout en Occident au commencement du…
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(1) Strom., I, 145-146. — (1) XXI, 2.
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Par A. LEROSEY, Prêtre de Saint-Sulpice, PARIS, 1890.
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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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Re: Liturgie de l'Épiphanie.
ÉPIPHANIE.[SUITE]
L'Épiphanie avait droit de cité partout en Occident au commencement du Ve siècle. Les Donatistes étaient seuls à la rejeter à cette époque; saint Augustin leur en faisait un reproche (2). A Rome et en Afrique, vers la fin du IIIe siècle, on ne connaissait pas plus la fête du 6 janvier que les Orientaux celle du 25 décembre. Mais les deux usages finirent par se combiner, et les deux fêtes furent observées par tout le monde ou à peu près. Ce fut vers 376 que les décrets du Saint-Siège obligèrent toutes les églises d'Occident à célébrer désormais, avec Rome, le mystère de la Nativité au 25 décembre.
Cet usage passa en Orient de bonne heure, puisque l'évêque d'Émèse, Paul, prêcha le dimanche 25 décembre (432), dans la grande église d'Alexandrie, un sermon d'où il résulte que l'on célébrait en ce jour le souvenir de la naissance de Notre-Seigneur (3). Au commencement du Ve siècle, les deux fêtes étaient certainement acceptées, du moins en Occident. Dès lors l'Épiphanie tint toujours un rang distingué entre toutes les solennités de cette Église.
Elle partage, en effet, avec les fêtes de Noël, de Pâques, de l'Ascension et de la Pentecôte, l'honneur d'être qualifiée de jour très saint dans le Canon de la messe. Elle est mise au nombre des fêtes cardinales, c'est-à-dire des solennités sur lesquelles repose l'économie de l'année liturgique. On sait qu'elle est suivie, en effet, d'une série de dimanches, analogue à celles qui se trouvent après Pâques et la Pentecôte.
L'Église célèbre en ce jour une triple manifestation de la gloire du Christ. Plusieurs auteurs pensent que l'Église aurait opposé cette triple manifestation au triple triomphe de l'empereur Auguste que les païens célébraient le 6 janvier. Ce n'est pas la première fois que les anciennes fêtes païennes auraient eu à subir une transformation chrétienne.
Il y a trois mystères glorieux pour le Christ que l'Église solennise en ce jour :
1° Jésus-Christ fut manifesté aux mages par l'étoile qui leur apparut en Orient et qui les conduisit à Bethléem pour y adorer le Sauveur, le désiré des nations;
2° Jésus fut encore manifesté dans son baptême par Jean-Baptiste; lorsque le précurseur lui versait l'eau sur la tête, on entendit la voix du Père qui disait : « Celui-là est mon fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances, écoutez-le; » et, au même moment, le Saint-Esprit vint se reposer sur lui sous la forme d'une colombe;
3° Jésus manifeste sa puissance en changeant l'eau en vin aux noces de Cana. Nous célébrons donc en ce jour les trois manifestations du Christ aux mages, dans son baptême et aux noces de Cana.
Aussi l'Église nous fait-elle chanter à l'antienne des deuxièmes vêpres que ce jour a été marqué par trois prodiges : « Tribus miraculis ornatum diem sanctum colimus » : « aujourd'hui l'étoile a conduit les mages à la crèche; aujourd'hui l'eau a été changée en vin au festin nuptial; aujourd'hui le Christ a voulu être baptisé par Jean dans le Jourdain pour notre salut. »
Nous n'avons pas à examiner ici si l'histoire établit que ces trois prodiges ont eu lieu le même jour. D'après Baronius, Suarez, Honoré de Sainte-Marie, le cardinal Gotti et une foule d'autres critiques célèbres, l'adoration des mages a eu lieu le 6 janvier; Tillemont et la plupart des écrivains placent aussi le baptême de Notre-Seigneur au 6 janvier; mais il est plus difficile de savoir à quelle date il convient de mettre le miracle des noces de Cana. Cependant il n'y a aucune preuve contre le sentiment que la liturgie romaine reconnaît et proclame.
Dans la fête de l'Épiphanie ces trois manifestations sont rappelées, mais cette fête a principalement pour objet, parmi nous, l'adoration des Mages et la vocation des Gentils, c'est-à-dire la première de ces trois manifestations. L'Église latine a renvoyé au jour de l'octave de l’Épiphanie la mémoire spéciale du baptême de Notre-Seigneur, et au second dimanche après l'Épiphanie la mention de son premier miracle opéré aux noces de Cana, tandis que l'Église grecque célèbre plutôt la seconde manifestation ou le baptême de Jésus-Christ au jour de la Théophanie.
La vigile de l'Épiphanie a un caractère festival qui la distingue des autres vigiles de l'année. En ce jour, qui est le 5 janvier, l'Église n'a pas de motif pour interrompre ses chants d'allégresse. Elle continue donc à se parer de la couleur blanche comme le jour de Noël. La messe de la vigile est celle du dimanche dans l'octave de Noël. Il n'y a ni jeûne ni abstinence. Dans l'Église grecque, il n'en est pas ainsi. On jeûne la vigile de l'Épiphanie, parce que dans cette nuit, comme dans celles de Pâques et de la Pentecôte, on administrait le baptême solennel, et l'on bénissait les eaux avec une grande solennité.
Si l'on veut se faire une idée de l'office de ce jour, on la trouve exprimée dans…
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(2) Serm. 202. — (3) Hardouin, Concil., t. I, p. 1693.
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Re: Liturgie de l'Épiphanie.
ÉPIPHANIE.[SUITE]
Si l'on veut se faire une idée de l'office de ce jour, on la trouve exprimée dans les antiennes qui chantent la Théophanie ou apparition du Verbe éternel, engendré avant l'aurore, descendu sur la terre pour être la lumière des nations; et elles nous montrent les Mages guidés par l'étoile, ouvrant leurs trésors pour les offrir au Seigneur, ainsi que les mers, les fontaines et les fleuves sanctifiés par le baptême de l'Homme-Dieu. Le poète chrétien Sédulius, célèbre dans son hymne Crudelis Herodes, la triple manifestation de la gloire du Christ. L'idée dominante de l'Église, dans la messe de ce jour, est de proclamer l'arrivée du Roi des rois, et de nous montrer les rois de la terre prosternés devant Lui et lui offrant leurs présents.
A la messe de l'Épiphanie on annonce solennellement aux fidèles quel jour tombe la fête de Pâques et quels jours arriveront les principales fêles mobiles, qui dépendent de cette grande fête.
La formule de cette annonce est ainsi conçue :« Sachez, mes frères bien-aimés, que par la miséricorde de Dieu, de même que nous avons goûté l'allégresse de la Nativité de Noire-Seigneur Jésus-Christ, ainsi nous vous annonçons aujourd'hui les joies prochaines de la résurrection de ce même Dieu et Sauveur. Le..... sera le dimanche de la Septuagésime. Le..... sera le jour des Cendres et l'ouverture du jour de la très sainte Quarantaine. Le.....nous célébrerons avec joie la sainte Pâque de Notre-Seigneur Jésus-Christ, etc., etc. »
— Cette annonce tient à un usage très ancien. Dans les premiers siècles, c'était à Alexandrie, où se trouvaient les plus habiles astronomes, que la Pâque de chaque année était fixée. Le patriarche de cette ville envoyait au Pape la date de cette fête et de toutes les fêtes mobiles, et le Pape en informait les métropolitains d'Occident. L'Épiphanie était la dernière grande fête avant Pâques; c'était dans cette solennité, au milieu de tout le peuple assemblé, que l'on faisait connaître le jour où l'on célébrerait Pâques et les autres fêtes mobiles. Aujourd'hui l'Église fait cette annonce pour conserver un vestige de cet ancien usage.
En Orient, l'Épiphanie, la grande fête de la naissance du Christ et de son baptême, parut être indiquée pour célébrer la seconde naissance ou la régénération des chrétiens. Les Pères grecs de la fin du IVe siècle constatent l'usage où l'on était, dans leur pays, de bénir ce jour-là les eaux baptismales et de baptiser les néophytes. L'exemple de l'Orient fut suivi par beaucoup d'églises occidentales (1).
Théodose, Charlemagne, Alfred le Grand, Étienne de Hongrie, Édouard le confesseur, l'empereur Henri II, Ferdinand de Castille, Louis IX de France tinrent ce jour en grande vénération; ils avaient la dévotion de se présenter à la suite des rois Mages aux pieds du divin enfant, et de lui ouvrir comme eux leurs trésors. A la cour de France, cet usage se conserva jusqu'en 1378 et au delà, comme en fait foi le continuateur de Guillaume de Nangis. Le roi très chrétien allait à l'offrande avec de l'or, de l'encens et de la myrrhe, qu'il présentait comme un tribut à l'Emmanuel. Les fidèles présentaient aussi, à la messe, au célébrant qui les bénissait, de l'or, de l'encens et de la myrrhe, que l'on conservait dans les maisons en l'honneur des trois rois, et qui étaient comme un gage de bénédiction pour les familles. Il y avait dans le Rituel romain une formule spéciale pour cette bénédiction. Elle n'a disparu du Rituel que dans l'édition de Paul V, qui crut devoir la supprimer avec toutes les autres bénédictions qui n'étaient demandées que très rarement. Il paraît que cette bénédiction existe encore clans quelques diocèses d'Allemagne (2).
Pendant toute l'octave de l'Épiphanie, l'Église s'est occupée de la manifestation de Jésus-Christ aux Mages, mais le jour même de l'octave, elle fixe notre attention sur sa manifestation dans son baptême.
— Des trois manifestations de la divinité de Jésus-Christ que rappelle la solennité de l'Épiphanie, l'Église a consacré le jour de la fête et les six jours suivants, spécialement à la première de ces manifestations qui se fit aux Mages.
Le jour de l'octave, elle revient à la seconde, qui eut lieu dans le baptême de Notre-Seigneur…
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(1) Duchesne, Origines du culte chrétien, p. 282. — (2) D. Guéranger, Ann. liturg. Temps de Noël, t. II, p. 160.
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Re: Liturgie de l'Épiphanie.
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Le jour de l'octave, elle revient à la seconde, qui eut lieu dans le baptême de Notre-Seigneur. L'eau ayant été choisie pour être l'élément régénérateur de nos âmes, l'efficacité du baptême a été figurée par le déluge et le passage de la mer Rouge. Mais Jésus a voulu donner lui-même à l'eau la vertu régénératrice, et c'est pour cela qu'il s'est présenté au Précurseur pour être baptisé dans le Jourdain. La Trinité est intervenue dans cette création nouvelle. La colombe a représenté l'esprit de paix et d'amour qui devait transformer les cœurs ; la voix du Père s'est fait entendre en disant : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis toutes mes complaisances, » et par son contact avec l'homme-Dieu, l'eau a reçu cette puissance régénératrice qu'elle doit conserver jusqu'à la fin des temps. A la messe, l'Introït, l'Épître, le Graduel, l'Offertoire et la Communion sont les mêmes qu'au jour de la fête, mais l'Évangile est de saint Jean.
Il est extrait du passage où l'aigle des évangélistes rapporte le témoignage rendu à Jésus-Christ par saint Jean lui-même, au sujet de son baptême. Ce récit de l'Apôtre bien-aimé suppose ceux de saint Matthieu, III, 13 et suivants; de saint Marc, I, 9-11 et de saint Luc, III, 21, 22 ; et il les confirme.
L'Église consacre à la troisième manifestation de Jésus-Christ aux noces de Cana, le deuxième dimanche après l'Épiphanie.
Le premier dimanche après l'Épiphanie pouvant arriver pendant l'octave elle-même, c'est le deuxième dimanche, c'est-à-dire, celui qui vient immédiatement après l'octave, que l'Église consacre à la troisième manifestation de la divinité de Notre-Seigneur, qui eut lieu, comme nous l'avons dit, aux noces de Cana.
Plusieurs Églises avaient ajouté à ces trois manifestations une quatrième qui se fit dans la multiplication des pains. Guillaume Durand donne à cette manifestation le. nom de Pagiphanie, et le cardinal Lambertini, qui devint Benoît XIV, mentionne un manuscrit de Bruxelles dans lequel on parle de cette manifestation. Mais l'Église romaine ne l'a pas admise. Elle l'a tolérée dans les rites Ambrosien et Mozarabe, à cause de l'analogie qu'il y a entre ce miracle et celui du changement de l'eau en vin; mais comme saint Jean nous apprend que le miracle de la multiplication des pains eut lieu peu de temps avant Pâques, elle l'a renvoyé au quatrième dimanche de Carême.
FIN.
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