Temps de l'Avent 2015

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Message  gabrielle Mer 09 Déc 2015, 7:26 am

Mercredi

SERMON SUR LES FRUITS DE LA PÉNITENCE.


Faites de dignes fruits de pénitence.
(Luc, III, 8.)

Bourdaloue a écrit:
Premier point. — Pratique de nos devoirs, pratique fidèle qui ne laisse rien échapper. Quand Dieu parle , dans l'Apocalypse, à cet évêque d'Ephèse dont la charité s'était refroidie, et qu'il l'avertit de faire pénitence : Souvenez-vous, lui dit-il, d'où vous êtes déchu, et reprenez vos premières œuvres . Ces première œuvres, c'étaient ses fonctions, c'étaient ses devoirs qu'il avait négligés, et à quoi Dieu lui ordonnait de s'appliquer avec une fidélité toute nouvelle. Sans cela, qu'est-ce que la pénitence? Car une solide pénitence n'est pas seulement de s'abstenir du mal qu'on a commis, mais de pratiquer le bien qu'on n'a pas fait. Voila pourquoi Dieu rappelant les pécheurs par la bouche de ses prophètes, et les exhortant à la pénitence, ne se contentait pas de leur dire : Quittez vos voies corrompues; mais ajoutait : Marchez dans mes voies, marchez dans les voies de la justice.

Or nos devoirs , ce sont pour chacun de nous les voies de la justice, ce sont les voies de Dieu. Devoirs envers Dieu , devoirs envers le prochain, devoirs à l'égard de nous-mêmes. Devoirs envers Dieu, qui sont tous les devoirs de religion et de piété ; devoirs envers le prochain, qui sont tous les devoirs de charité, de miséricorde, de société, de droiture et d'équité, de vigilance sur autrui et par rapport à autrui, selon la différence des états et les divers degrés de subordination ; devoirs à l'égard de nous-mêmes , qui regardent la réformation de nos mœurs et la sanctification de notre vie, le retranchement de nos vices et notre avancement dans les vertus. Devoirs généraux et devoirs particuliers : les uns qui nous regardent en général comme hommes, comme chrétiens, comme enfants de l'Eglise ; les autres qui nous concernent spécialement et en particulier , selon les divers engagements et les obligations propres que nous imposent notre vocation, notre profession, notre condition, la place que nous occupons, le rang que nous tenons, le caractère dont nous sommes revêtus. Quel champ pour la pénitence, et que de fruits elle peut produire?

Fruits abondants : car dans une exacte observation de ces devoirs, surtout après un libertinage de plusieurs années, il n'y a pas peu de violences à se faire, ni peu de victoires à remporter. A combien d'exercices faut-il s'assujettir, dont on n'a presque jamais eu l'usage? à combien de soins faut-il descendre, qu'on avait jusque-là négligés, et même tout à fait abandonnés? Combien de dégoûts et d'ennuis y a-t-il à soutenir, et en combien de rencontres faut-il rompre sa volonté et agir contre son inclination? Fruits solides,  puisque dans la pratique de ses devoirs, tout communs qu'ils sont, il n'y a pas une perfection commune, et que rien au contraire n'est plus selon l'esprit et le gré de Dieu. Tout le reste est bon, et l'on n'en doit rien omettre autant qu'il est possible ; mais les devoirs sont préférables à toute autre chose, et Dieu ne demande rien de nous plus particulièrement ni plus expressément. Fruits durables et permanents : d'autres pénitences qu'on peut s'imposer, et que suggère un saint désir de satisfaire à Dieu, sont passagères, elles ont leurs jours , elles ont leurs temps; mais l'accomplissement de nos devoirs est une pénitence de toute la vie ; elle ne souffre point d'interruption , et c'est un joug que nous portons jusques au tombeau. Suivant ce plan, formons-nous l'idée d'une âme vraiment pénitente: car en voilà la plus juste image. Mais où la trouve-t-on , cette âme, et où voyons-nous de tels fruits? Ne pourrais-je pas dire d'un pénitent de ce caractère ce qui est dit de la femme forte , qu'il est aussi rare que ce qu'on apporte de plus précieux des extrémités du monde  ? Malgré la corruption du siècle, nous entendons encore parler de quelques conversions : mais à quoi se terminent-elles ? à corriger certains excès, à se défaire de certains vices, de certains attachements honteux et scandaleux; mais du reste en devient-on plus fidèle aux devoirs du christianisme, aux devoirs de son état, à tout ce qui est du bon ordre et d'une vie réglée? Là-dessus nulle exactitude, nulle attention.

Second point. — Pratique de nos devoirs, pratique fervente, qu'une sainte ardeur anime et que rien ne ralentit. C'était une excellente règle que donnait l'apôtre saint Paul aux Romains, quand , pour leur apprendre de quelle manière ils devaient se comporter dans la loi nouvelle qu'ils avaient embrassée, il leur disait : Comme vous avez fait servir vos corps à l'impureté et au crime pour tomber dans le péché, faites-les servir maintenant à la vertu et au devoir, pour vous rendre saints . Règle que tout pénitent doit s'appliquer à lui-même, et qui lui fournit un des plus puissants motifs pour exciter son zèle dans la nouvelle route où il est entré, et dans tous les exercices d'une vie chrétienne. Ce n'est point assez pour lui de se remettre à la pratique de ses devoirs : il faut de plus que la ferveur dont cette pratique est accompagnée la relève et la sanctifie. Car, doit-il dire, la même ardeur que j'ai eue dans mes égarements, et avec laquelle je me suis porté à tout ce qui pouvait contenter mes passions au préjudice de mon devoir, ne serait-il pas bien indigne qu'elle vînt à se refroidir dans mon retour et à m'abandonner, lorsqu'il s'agit de satisfaire à mes obligations les plus essentielles ?

Ferveur tellement nécessaire, que sans cela notre pénitence ni ses fruits ne peuvent longtemps se maintenir. Et en effet, sans ce feu , sans cette ferveur et la force qu'elle inspire, le moyen qu'un pénitent surmonte toutes les difficultés qu'il doit immanquablement rencontrer dans un genre de vie auquel il n'est point fait, et qui le gêne, qui le rebute, qui le tient toujours dans un état pénible et violent? De là donc tant de pénitents, semblables à ces lâches combattants d'Ephrem, qui prirent la fuite au jour du combat et cédèrent dès le premier choc, se sont rendus aux moindres assauts et ont démenti toutes leurs résolutions : pourquoi ? parce qu'un fonds de tiédeur où ils sont demeurés, quoique pénitents, leur a affaibli le courage, et qu'ils ont manqué de fermeté pour résister. Et voilà aussi la dernière et la plus commune ressource qui reste à l'ennemi de notre salut, ou plutôt à la nature corrompue, pour reprendre l'empire sur nous, et pour nous enlever tout le fruit de notre pénitence. A ces heureux moments où la grâce nous touche, nous pénètre, nous possède, l'enfer, le monde, la nature, la passion, sont en quelque sorte réduits à se taire. On ferme l'oreille à toutes leurs suggestions, on repousse tous leurs efforts, on franchit toutes les barrières qu'ils nous opposent. Il faut qu'ils cèdent, et qu'ils nous laissent agir selon les saints mouvements qui nous transportent. Mais ce feu n'est pas toujours également vif. On pourrait l'entretenir : mais on n'y emploie pas les moyens convenables. Il diminue, il passe, il s'éteint : et si peut-être on n'en vient pas d'abord jusqu'à retomber dans les mêmes dérèglements, du moins au bout de quelques jours on se relâche, on devient lent, froid, tout languissant. Or, c'est alors que ces mortels ennemis sur qui l'on avait eu l'avantage, et qui semblaient abattus et vaincus, commencent à se relever. C'est là l'heure justement, c'est la dangereuse conjoncture qu'ils attendaient pour renouveler leurs attaques. L'esprit tentateur sollicite plus fortement que jamais : le monde se présente avec ses charmes les plus engageants; la nature, la passion se réveillent, et, dans la disposition où l'on est, dans cette langueur et cet attiédissement, il n'est que trop ordinaire de rendre bientôt les armes et de reprendre ses premières voies.

Si nous voulons être à Dieu, soyons-y comme nous y devons être, et d'une manière digne de Dieu. Honorons-le d'autant plus, que nous l'avons plus déshonoré ; édifions d'autant plus le prochain, que nous l'avons plus scandalisé; tâchons de regagner tout ce que nous avons dissipé de temps, de grâces, de mérites, et enrichissons-nous d'autant plus, que nous sommes plus appauvris. Or, tout cela ne se peut sans une ferveur toujours vive, toujours agissante. Telle a été la ferveur de Madeleine, et d'une multitude innombrable de pénitents dans tous les siècles : telle soit la nôtre !
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Message  gabrielle Jeu 10 Déc 2015, 8:49 am

JEUDI.

Jean-Baptiste prêchant une pénitence austère et sans ménagement.

SERMON SUR LES ŒUVRES SATISFACTOIRES.


Or, son vêtement était de poil de chameau. Il avait autour des reins une ceinture de cuir : et sa nourriture, c'étaient des sauterelles et du miel sauvage. (Matthieu, III, 4.)

Bourdaloue a écrit:Premier point. — L'intérêt de Dieu que nous avons à venger, soit par un esprit de justice, soit par un esprit de reconnaissance et d'amour : double raison qui regarde Dieu directement, et qui, en vue de ses droits que nous avons violés, doit nous animer d'un saint zèle contre nous-mêmes.

Esprit de justice : car il est bien juste que Dieu, après l'offense qu'il a reçue de l'homme par le péché, reçoive aussi de l'homme, par une peine proportionnée, la satisfaction qui lui est due. Ainsi, nous devons là-dessus nous regarder comme juges établis par la justice divine entre Dieu même et nous. Dieu nous dit à chacun ce qu'il disait par son prophète aux infidèles habitants de Jérusalem : Soyez juge entre moi et ma vigne  ; c'est-à-dire entre moi et vous, pécheur que j'ai formé , que j'ai cultivé avec le même soin que le vigneron cultive une vigne dont il veut recueillir de bons fruits. Où sont-ils ces fruits que j'attendais? sont-ce tant d'iniquités où la passion vous a porté ? sont-ce tant d'outrages que vous m'avez faits et à ma grâce? Voilà donc sur quoi nous devons prendre en main  la cause de Dieu et nous juger nous-mêmes, sans égard, ni aux prétextes de l'amour-propre, ni aux répugnances de la nature, ni aux révoltes des passions; car il n'y a que l'équité qui doive ici nous animer et nous conduire.  Selon cette droite équité, nous mesurerons la vengeance par la grièveté de l'offense; et plus nous nous reconnaîtrons criminels, plus nous redoublerons le châtiment et la peine. Or, pour comprendre combien   nous sommes  coupables, comprenons, autant qu'il est possible à la faiblesse de nos connaissances, ce que c'est que Dieu, et ce que c'est que l'homme rebelle à Dieu : ce que c'est, dis-je, que Dieu, et combien les droits de ce souverain Maître sont inviolables et sacrés ; ce que c'est que l'homme devant Dieu, et quelle est sa dépendance, quels sont ses devoirs. De là nous conclurons de quoi nous sommes redevables à Dieu en qualité de pécheurs : et que faudra-t-il davantage pour nous déterminer à tout ce qu'il y a, dans une vie pénitente, de plus rude et de plus sévère ?

2° Esprit de reconnaissance et d'amour. Plus un pécheur pense à la grâce que Dieu lui a faite en le rappelant, en se réconciliant avec lui, en lui remettant son péché et la peine éternelle où l'exposait son péché, plus il sent croître son amour pour un Maître dont il ne peut assez admirer l'infinie miséricorde; et plus il est touché d'amour pour Dieu, plus il se condamne lui-même, plus il se hait lui-même de cette haine évangélique qui nous sauve en nous perdant. Dans cette disposition, on ne cherche guère à s'épargner. Vous m'avez pardonné, mon Dieu, et c'est pour cela que je ne me pardonnerai pas moi-même ; vous pouviez exercer sur moi vos vengeances pendant toute l'éternité : je le méritais ; mais vous ne l'avez pas voulu ; et c'est pour cela que je veux, au moins dans le temps, vous venger de moi-même, selon qu'il vous plaira de me l'inspirer, et que votre gloire le demandera. Ah! Seigneur, j'étais un ingrat lorsque je me suis tourné contre vous, et que j'ai transgressé vos divins commandements. Tant de bienfaits que j'avais déjà reçus, c'étaient des raisons bien fortes pour vous être fidèle jusques à la mort, et pour ne me détacher jamais de vous. Je vous ai toutefois oublié, et j'ai suivi la passion qui m'entraînait; mais dans mon égarement même vous avez pris soin de moi, vous m'avez recherché, et vous daignez me recevoir. Or, après cette nouvelle grâce, ne serait-ce pas dans moi une ingratitude toute nouvelle et même le comble de l'ingratitude, si je refusais de vous satisfaire, si je ne voulais me faire pour cela nulle violence, si je ne voulais rien supporter pour cela, et si de moi-même je ne me condamnais à rien? Ainsi parle une âme contrite; et de là à quoi n'est-elle pas préparée? quelles réparations ne voudrait-elle pas faire à Dieu ? Il n'y a pas d'état si mortifiant dont elle ne se juge digne, et souvent on est plutôt obligé de la retenir que de l'exciter. Mais nous, par des principes bien opposés, de quels ménagements n'usons-nous pas, lors même que nous sommes pénitents, ou que nous croyons l'être? La pénitence consiste dans le repentir du cœur, il est vrai ; mais dès que ce repentir est dans le cœur, il se produit au dehors et passe bientôt aux œuvres; autrement, il est bien à craindre que ce ne soit un faux repentir qui nous trompe, et une illusion que nous n'apercevons pas, ou que nous nous cachons à nous-mêmes, mais que Dieu connaît.

Second point. — Notre propre intérêt que nous avons à procurer, soit pour la vie présente , soit pour l'autre vie : deux motifs qui nous regardent spécialement, et qui, en vue des avantages attachés aux œuvres d'une pénitence satisfactoire, sont encore pour nous de nouveaux engagements à les pratiquer, autant que notre condition le comporte, et selon qu'elle le peut permettre.

1° Par rapport à la vie présente. Le plus grand intérêt que nous ayons sur la terre, c'est de vivre dans la grâce de Dieu, et de mettre par là à couvert notre salut; de tenir en bride nos passions, et de réprimer leurs appétits déréglés; de nous prémunir contre les tentations du démon, contre les dangers du monde, contre les illusions de la cupidité, contre les convoitises de la nature corrompue ; de marcher ainsi dans les voies du ciel, et d'y persévérer jusques à la mort. Or, qui ne sait pas que le moyen le plus assuré pour tout cela, ce sont les exercices de la mortification chrétienne? Mener une vie aisée, passer ses jours dans le repos et dans le plaisir, ne rien refuser à sa sensualité et à ses désirs de tout ce qu'on croit pouvoir leur accorder sans crime, et en même temps vouloir garder son cœur et le préserver de toute corruption, c'est vouloir être au milieu du feu, et ne pas brûler. Ils se sont réjouis, disait le Prophète, ils se sont traités et nourris délicatement, ils se sont engraissés  ; et qu'est-il arrivé de là ? C'est qu'ils ont abandonné le Seigneur, leur Dieu et leur Créateur. Source ordinaire de tant de vices qui règnent parmi les hommes, et dont les saints ne se sont garantis qu'en se renonçant eux-mêmes, et en se déclarant les plus implacables ennemis de leurs corps. Que dis-je? tout saints qu'ils étaient, et avec toutes les pénitences qu'ils pratiquaient, ils n'ont pu même éteindre absolument en eux le feu de cette concupiscence qu'ils avaient apportée en naissant. Quoique morts en apparence, ou réduits par la continuité de leurs abstinences et de leurs jeûnes, par les excès de leurs austérités, à n'être plus, pour ainsi dire, que des cadavres vivants, ils ressentaient néanmoins encore l'aiguillon de la chair. Le grand Apôtre lui-même n'en était pas exempt : il s'en plaignait humblement à Dieu, et il demandait avec instance d'en être délivré. Saint Jérôme, jusque dans le fond de son désert , en éprouvait les importunes atteintes, et en gémissait. Que serait-ce s'ils eussent flatté leurs sens, et qu'ils eussent vécu dans les délices?

2° Par rapport à l'autre vie. Car c'est une loi indispensable que le péché soit expié, et que la justice de Dieu soit satisfaite, ou maintenant, ou après la mort. Maintenant nous sommes, pour parler de la sorte, dans nos mains ; mais après la mort nous serons dans les mains de Dieu. Or l'Apôtre nous avertit que c'est une chose terrible que de tomber dans les main du Dieu vivant ; pourquoi ? parce que ce n'est plus proprement alors sa miséricorde qui agit, mais sa plus pure et plus étroite justice. Car c'est là, selon le langage de l'Evangile, que Dieu redemande tout, et qu'il fait tout payer jusqu'à un denier. Il vaut donc bien mieux nous acquitter dès ce monde à peu de frais : je dis à peu de frais ; et qu'est-ce en effet que toute la pénitence de cette vie, en comparaison de ce feu où les âmes sont purifiées des taches qu'elles emportent avec elles, et qu'elles n'ont pas pris soin d'effacer? Que ne pouvons-nous là-dessus les interroger ! que ne pouvons-nous être témoins de leurs regrets, lorsqu'elles pensent à la perte qu'elles ont faite, en ne ménageant pas des temps de grâce qui leur devaient être précieux, et où il ne tenait qu'à elles de prévenir toutes les peines qu'elles endurent ! Oh ! si elles étaient en état de les rappeler, ces heureux moments ! s'il leur était permis de revenir sur la terre, et de réparer l'extrême dommage que leur a causé une trop grande indulgence pour elles-mêmes et pour leurs sens! que leur proposerait-on de si austère qui les étonnât ; et quel prétexte la délicatesse de la chair pourrait-elle leur opposer qui les arrêtât? Déplorable aveuglement des mondains! leur sensibilité est infinie, le moindre effort les incommode , la moindre douleur leur paraît insoutenable, et ils ne craignent point de s'exposer à des flammes dont l'atteinte la plus légère est au-dessus de tout ce que nous pouvons imaginer de plus douloureux. Apprenons à mieux connaître nos véritables intérêts : moins nous nous épargnerons, plus nous gagnerons.

Note de gabrielle: la soumission à la volonté de Dieu, le respect de la Sainte Église et de ses lois, sont les premières pénitences que l'âme doit faire de façon parfaite.

La privation des sacrements, est le plus grand jeûne qui ait jamais existé...
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Message  gabrielle Ven 11 Déc 2015, 7:37 am

VENDREDI.

Jean-Baptiste prêchant une pénitence efficace et salutaire.

SERMON SUR L'EFFICACE ET LA VERTU DE LA PÉNITENCE.


Tout homme verra le salut qui vient de Dieu. (Luc, III, 6.)


Bourdaloue a écrit:Premier point. — Nul péché si grave et si énorme que la pénitence ne puisse effacer, et par là même, point de pécheur qu'elle ne puisse justifier. Cette proposition suppose une vraie pénitence, une pénitence parfaite, une pénitence accompagnée de toutes les conditions requises : car c'est en ce sens que nous devons l'entendre. Or, tel est alors son pouvoir, qu'il n'y a rien dont elle n'obtienne une rémission assurée, une rémission prompte, une rémission entière; et c'est ainsi qu'en humiliant l'homme devant Dieu, elle triomphe du cœur de Dieu, quelque irrité qu'il soit, et lui fait une espèce de violence pour le fléchir et le gagner.

Rémission assurée : non pas que Dieu, selon les droits de sa justice, ne pût rejeter le pécheur, et lui refuser sa grâce pour jamais. Mais la miséricorde l'emporte sur cette justice rigoureuse ; et c'est assez que le pécheur, renonçant à son péché, lève l'obstacle qui le séparait de Dieu, pour engager Dieu comme un père tendre, ou comme ce bon pasteur de l'Evangile , à recevoir cette brebis égarée, et à reprendre en faveur de cet enfant prodigue les premiers sentiments de son amour. Nous en faut-il d'autre garant que Dieu lui-même et que sa parole? Toutes ses Ecritures sont pleines sur cela des promesses les plus authentiques et les plus expresses. Point d'exception : elles s'étendent à tout péché, de quelque nature qu'il soit, et quelque abominable que nous le puissions concevoir. On ne peut lire, sans en être frappé et comme saisi d'horreur, tous les reproches que le Dieu d'Israël faisait à son peuple. C'est une nation vendue au péché, disait le Seigneur, c'est un peuple chargé de toutes les iniquités, une race pervertie et corrompue; ce sont des enfants ingrats et scélérats : malheur à eux ! Quelle image et quel anathème ! Ne semble-t-il pas qu'il n'y avait plus de ressource pour ce peuple , et qu'ils étaient perdus ? Cependant que s'ensuit-il de tout cela? Après tant de reproches et de si terribles menaces : Revenez, conclut le même Seigneur parlant aux mêmes pécheurs, convertissez-vous, cessez de faire le mal et ne craignez point. Quand vos péchés seraient comme l’écarlate, ils deviendraient comme la neige ; et quand vous auriez été tout noircis de crimes, vous serez blancs à mes yeux comme la laine la plus blanche . Quelle assurance pouvons-nous demander plus formelle et plus marquée?

Rémission prompte : un moment suffit ; comment cela? c'est qu'il ne faut qu'un moment pour former l'acte d'une contrition parfaite. Or, cet acte est toujours et immédiatement suivi de la rémission. David avait péché : le Prophète, de la part de Dieu, vient lui reprocher son crime, un adultère et un meurtre tout ensemble. Mais, à la voix du Prophète, ce roi pécheur ouvre tout à coup les yeux, rentre en lui-même, se reconnaît coupable, se tourne vers Dieu, et, dans un sentiment de repentir, s'écrie : J'ai péché contre le Seigneur . Que lui répond Nathan ? Il ne lui dit pas : Le Seigneur vous pardonnera ; il ne lui dit pas : Allez vous humilier , prier devant l'arche et demander miséricorde, le Seigneur vous l'accordera ; mais il lui dit, dès l'heure même et sans retardement : Le Seigneur a éloigné de vous votre péché, vous ne mourrez point. C'est-à-dire, le Seigneur vous a pardonné, votre péché vous est remis, vous voilà réconcilié et en état de grâce. Du moment qu'un criminel crucifié à côté de Jésus-Christ lui eut témoigné son regret, et que, se reconnaissant digne du supplice qu'il endurait, il lui eut fait, avec un cœur contrit et pénitent, cette humble prière : Seigneur , souvenez-vous de moi quand vous serez dans votre royaume, que lui promit ce divin Maître ? Je vous le dis en vérité, lui répondit Jésus, dès aujourd'hui vous serez avec moi dans le paradis . Différence remarquable entre la rémission du péché et la satisfaction : celle-ci demande des œuvres et du temps ; mais l'autre ne veut qu'un mouvement du cœur et qu'un instant.

Rémission entière. Car Dieu ne pardonne point à demi, et sa grâce n'est point partagée. En remettant un péché, j'entends un péché mortel, il remet tous les autres ; de même aussi que le pécheur vraiment contrit d'un péché l'est de tous les péchés dont il se trouve chargé devant Dieu.

Rémission même si réelle et si complète, que, selon le langage de l'Ecriture, Dieu perd en quelque manière le souvenir de tout le mal que le pécheur a commis. L'impiété de l’impie tombera sur lui ; mais s'il se remet dans le devoir et qu'il fasse pénitence, je ne me ressouviendrai plus de toutes ses injustices , et il vivra . Non pas que Dieu en effet les perde jamais de vue, puisqu'il est incapable du moindre oubli, et que tout le passé comme l'avenir lui est toujours présent. Mais le pécheur alors n'est plus aux yeux du Seigneur un objet de colère; et comme si tous ses péchés avaient été rayés des livres de la sagesse divine, Dieu n'y pense plus pour les lui imputer, et le condamner à une peine éternelle.

Ne disons donc point comme Caïn : Mon iniquité est trop grande ; je n'en aurai jamais le pardon . Ce serait faire injure au Père des miséricordes. Eh ! pourquoi mourrez-vous, maison d'Israël  ? Pourquoi, pécheur, n'irez-vous pas vous jeter dans le sein de votre Dieu, tandis qu'il vous est ouvert, et que la pénitence peut vous y conduire? Il vous appelle, venez : venez, dis-je, qui que vous soyez. Si vous vous rendez sourd à sa voix, et si vous le forcez de vous perdre, vous ne pourrez attribuer votre perte qu'à vous-même. Car c'est vous-même, vous dira-t-il, qui vous êtes obstiné contre ma grâce. Votre innocence avait malheureusement échoué, et fait un triste naufrage; mais je vous présentais une planche pour vous sauver. Vous étiez au fond de l'abîme, mais je vous tendais les bras pour vous en retirer. La grièveté, la multitude de vos offenses vous troublait; mais je ne cessais point de vous faire entendre, et par moi-même,(...)  que rien ne pouvait épuiser les trésors infinis de ma bonté, et que j'étais encore plus miséricordieux que vous n'étiez pécheur. Il fallait profiter de ces dispositions favorables de votre Dieu. Il le voulait : que ne le vouliez-vous comme lui?

Second point. — Nulle sainteté si éminente et si parfaite où la pénitence ne puisse nous élever , et par conséquent point de pécheur qu'elle ne puisse sanctifier : pourquoi cela ? pour deux raisons : l'une prise du côté de Dieu, et l'autre tirée de la nature même de la pénitence. Car, à prendre d'abord la chose du côté de Dieu, il est certain que Dieu de tout temps, mais surtout depuis la loi de grâce, a toujours pris plaisir à faire éclater les richesses de sa miséricorde dans la sanctification des plus grands pécheurs. Pierre avait renoncé Jésus-Christ, et Dieu en a fait le prince des apôtres. Saul était un blasphémateur et un persécuteur du nom chrétien, et Dieu en a fait le maître des nations. Augustin avait été également corrompu et dans sa foi et dans ses mœurs ; mais Dieu en a fait le plus célèbre docteur de l'Eglise. Qu'était-ce, avant leur conversion, que tant de pénitents de l'un et de l'autre sexe? à quels vices n'étaient-ils pas sujets? à quels désordres ne s'étaient-ils pas abandonnés? quels scandales n'avaient-ils. pas donnés au monde? Mais Dieu en a fait des solitaires, des anachorètes, de sublimes contemplatifs, des modèles de mortification, d'abnégation de soi-même, d'oraison, de toutes les vertus chrétiennes et religieuses. Miracles de la droite du Très-Haut, qui, pour sa gloire et pour notre salut, a voulu nous donner de tels exemples, afin de nous piquer d'une sainte émulation, quelque criminels que nous soyons, et de nous faire comprendre qu'il ne tient encore qu'à nous d'aspirer, par la voie de la pénitence, à ce qu'il y a de plus relevé dans la perfection de l'Evangile : car le même Dieu , auteur de tant de merveilles, n'est pas moins puissant pour nous qu'il l'a été pour des millions de pécheurs et de pécheresses qui sont tombés avant nous dans les plus grands égarements, et qu'il a fait monter aux premiers rangs parmi ses élus. Il n'est pas moins jaloux présentement de sa gloire qu'il l'était dans les siècles passés, et l'intérêt de cette gloire divine ne l'engage pas moins à faire de nous, selon les tenues de l'Apôtre, des vases d'honneur pour être placés sur le buffet, après avoir été, par nos dérèglements et nos excès, des vases d'ignominie et de colère. D'ailleurs, à considérer la nature même de la pénitence, rien ne doit être plus sanctifiant. Car elle fait trois choses : elle attire sur le pénitent des grâces de sainteté; elle inspire au pénitent le goût de la sainteté; et elle fournit au pénitent les sujets et les occasions les plus capables de le conduire à la sainteté.

Grâces de sainteté : la pénitence les attire sur le pénitent, en sorte que, selon la parole de saint Paul, où le péché abondait, la grâce devient surabondante ; pourquoi ? pour récompenser la fidélité du pécheur à suivre l'impression des premières grâces qui l'ont touché, et qui l'ont excité à rechercher Dieu. Et en effet, ce n'est jamais en vain ni sans fruit qu'on est fidèle aux grâces de Dieu, et sa main libérale ne cesse point de les répandre sur nous, si nous ne cessons point d'y coopérer et d'y répondre. Parce que vous avez été fidèle dans l'administration des cinq talents que je vous ai confiés, en voici cinq autres que j'y ajoute .

Goût de la sainteté : la pénitence l'inspire au pénitent, et c'est ce que l'expérience nous montre. Par une providence particulière de Dieu, un pécheur dégagé de la servitude du péché trouve dans les pieux exercices qui l'occupent une onction dont il est lui-même surpris: si bien qu'il peut dire comme Job : Ce qui m'était auparavant le plus insipide est maintenant ma plus douce nourriture . En quel repos se trouva tout à coup saint Augustin, dès le moment de sa conversion ? en quel dégagement et quelle liberté d'esprit? Il l'admirait et ne le comprenait pas ; il en était comme hors de lui-même. Quel changement, s'écriait-il, et où en suis-je depuis que mes liens sont rompus ? Je ne croyais pas pouvoir me passer des plaisirs qui m'enchantaient, et maintenant mon plaisir le plus sensible est d'être privé de tout plaisir.

Sujets et occasions les plus capables de conduire un pénitent à la sainteté : c'est enfin ce que la pénitence lui fournit. Car, dans le cours d'une pénitence généreusement entreprise et constamment soutenue, en combien de rencontres faut-il pratiquer les vertus les plus héroïques? combien de fois faut-il se captiver, se gêner, se raidir contre soi-même, sacrifier ses inclinations, surmonter ses répugnances, combattre ses habitudes, essuyer les discours du monde, fouler aux pieds le respect humain, sans parler de toutes ces œuvres secrètes que l'esprit de pénitence ne manque point de suggérer? Or est-il rien de plus sanctifiant que tout cela? Quels trésors de mérites n'amasse-t-on pas? quels progrès ne fait-on pas? Ainsi ces ouvriers de l'Evangile qui vinrent après tous les autres travailler dans la vigne du père de famille, furent égalés aux premiers,et reçurent le même salaire : pourquoi? parce qu'en peu d'heures ils avaient réparé le temps perdu , et autant avancé, par l'ardeur de leur travail, que ceux qui s'y étaient appliqués dès le grand matin. Ce n'est pas même assez ; et combien y a-t-il eu de pénitents élevés à des degrés de sainteté où ne sont jamais parvenus le commun des fidèles? De quels dons ont-ils été favorisés; et, en sortant de ce monde, quels riches fonds ont-ils emportés avec eux?

De là, si nous sommes justes, c'est-à-dire si, par une protection spéciale de Dieu, nous avons eu jusques à présent le bonheur de vivre dans l'ordre et dans la règle, gardons-nous de nous confier en nous-mêmes, ni d'entrer dans les sentiments de ce pharisien qui se préférait avec tant d'orgueil au publicain, et même à tous les autres hommes. Ne méprisons jamais le pécheur, quel qu'il soit, et quelque abandonné qu'il paraisse. Ce pécheur, dans la suite des temps, sera peut-être un saint, et peut-être dans sa personne la parole de Jésus-Christ se vérifiera-t-elle : Je vous dis en vérité que les publicains et les femmes de mauvaise vie vous précéderont dans le royaume de Dieu . De là encore, si nous nous trouvons nous-mêmes engagés dans l'état du péché, réveillons-nous de notre assoupissement, et, pour allumer tout notre zèle, sans égard à ce que nous sommes, ayons sans cesse devant les yeux ce que nous pouvons devenir; car est-il rien de plus touchant et de plus consolant pour l'âme la plus criminelle, que cette pensée : Tout pécheur que j'ai été et que je suis, si je le veux, je puis être un saint! Mais est-il rien en même temps qui doive plus nous confondre au jugement de Dieu, si nous nous rendons insensibles à une telle espérance?
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Message  gabrielle Dim 13 Déc 2015, 6:43 am

Troisième dimanche de l’Avent

Il ne vous est pas permis d'avoir la femme de votre frère. (Marc, VI, 18.)

Bourdaloue a écrit:Toute la raison de l'homme renversée par l'impureté. On n'en doit pas être surpris : car il n'est rien de plus opposé à la raison que les sens; or l'impureté est un péché des sens, et c'est même de toutes les convoitises des sens la plus animale et la plus grossière. De là donc, ou bien elle éteint en nous toutes les lumières de la raison, ou, sans les éteindre, elle nous fait agir contre toutes les vues de notre raison.

1° Elle éteint en nous toutes les lumières de la raison. En effet, à consulter la seule raison, combien y a-t-il de motifs les plus forts et les plus puissants pour nous détourner d'un vice aussi honteux et aussi dangereux que l'est l'impureté? La pudeur naturelle, les bienséances de l'état, du rang, de l'emploi, de la profession ; les suites malheureuses où s'expose surtout une personne du sexe, aux dépens de sa réputation et de tout le bonheur de sa vie; les périls où elle s'engage là-dessus, et les risques qu'elle a à courir ; le dérangement où vit un homme par rapport à ses devoirs, par rapport à son avancement dans le monde, par rapport à la conduite de ses affaires, et souvent par rapport à sa santé qu'il ruine; l'esclavage et la dépendance où il passe ses jours auprès d'une idole dont il est adorateur; les infidélités qu'il éprouve, les désagréments qu'il essuie, les inquiétudes qui l'agitent, les dépenses qu'il fait et qui l'incommodent; les exemples d'une infinité de gens qui, par là, se sont perdus ; les discours du public, les remontrances et les reproches de ses amis; mille autres considérations plus particulières encore et plus secrètes : tout cela bien examiné et bien pesé, si l'on était raisonnable, devrait servir de préservatif contre les amorces de la plus flatteuse passion. Mais dès qu'elle s'est emparée du cœur, plus d'attention à tout cela : on dépose toute pudeur, on ferme les yeux à toute bienséance, on méprise tout danger, on oublie tout intérêt, on supporte toute contrainte, toute gêne; on dévore tout chagrin, on ne craint nulle dépense, on ne profite de nul exemple, on n'écoute nul avis, nul conseil. L'esprit et le cœur ne sont occupés que d'un objet : tout le reste disparaît; et où est alors la raison ?

2° Si l'impureté n'éteint pas dans nous les lumières de la raison, du moins nous fait-elle agir contre toutes les vues de notre raison. Point de preuve plus sensible que le témoignage de saint Augustin, qui le connaissait par son expérience propre, et qui s'en est si bien expliqué. Je soupirais, dit-il, je voyais ma faiblesse, j'en rougissais ; et cependant j'étais toujours attaché, non point par une chaîne de fer, mais par ma volonté dépravée, plus dure que le fer. Voilà comment la passion tyrannise un homme qui s'y est une fois livré. Il gémit de sa servitude, et il en sent tout le poids. Il voit tout ce qu'une saine raison demanderait, et il est le premier à reconnaître ses égarements ; mais de briser ses liens et de se dégager, c'est à quoi il ne peut se résoudre. Il suit le charme qui l'enchante, et quoiqu'il condamne dans lui le vice, il n'en est pas moins vicieux.

Samson n'ignorait pas que Dalila le trahissait. Que lui disait sur cela sa raison ? Mais sa raison avait beau parler, il ne laissait pas de rechercher avec la même assiduité cette perfide, et de se tenir auprès d'elle. Peut-être à la fin de nos jours vient-il un temps où la raison prend le dessus : mais peut-elle désormais réparer les dommages infinis qu'on s'est causés à soi-même? Plus sage mille fois celui qui les prévient de bonne heure, et qui n'attend pas si tard à y apporter le remède !

Toute la religion du chrétien profanée par l'impureté. Deux sortes de profanations : l'une générale, par rapport à tous les états du christianisme; l'autre particulière et plus criminelle encore, par rapport à certains engagements et à certains caractères.

1° On peut dire en général que toute impureté dans un chrétien est une profanation : pourquoi ? parce qu'il souille une chair sanctifiée par le baptême de Jésus-Christ, honorée d'une alliance toute pure avec Jésus-Christ, devenue le temple du Saint-Esprit que l'Apôtre appelle l'Esprit de Jésus-Christ. Morale que nous ne devons point traiter d'idée subtile et superficielle, mais dont nous comprendrions toute la solidité et toute la force, si nous étions plus remplis des principes de la religion et plus touchés de ses sentiments. Morale dont les Pères ont fait plus d'une fois le sujet de leurs instructions, et sur laquelle Tertullien insistait si vivement. Car, disait-il, avant que le Fils de Dieu se fût revêtu d'un corps semblable au nôtre, c'était toujours un crime de s'abandonner aux désirs de la chair ; mais depuis le mystère de l'Homme-Dieu, maintenant et plus que jamais, ce n'est plus seulement un crime, c'est un sacrilège. Morale qu'ils avaient puisée dans l'excellente et sublime théologie de saint Paul, et dans ces fréquentes exhortations qu'il faisait aux fidèles, en leur représentant qu'ils étaient les frères de Jésus-Christ, qu'ils étaient ses membres, qu'ils étaient son corps, et par conséquent qu'ils avaient une obligation plus étroite de se conserver purs et sans tache. Quoi donc! s'écriait dans l'ardeur de son zèle ce maître des Gentils, quoi! les membres de Jésus-Christ, je les abandonnerai à une prostituée ! Quel scandale dans la foi que nous professons ! quel abus énorme !


2° Profanation particulière, et plus criminelle encore par rapport à certains engagements, à certaines vocations, à certains caractères. N'entrons point là-dessus trop avant dans un détail qui pourrait blesser les âmes innocentes et chastes. Il serait à souhaiter que ces abominations fussent ensevelies dans un éternel oubli : mais le moyen de dérober à la connaissance du public des désordres si publics? Que veux-je donc dire ? Vous le savez, vous qui, liés par le sacré nœud du mariage, après vous être juré, au pied de l'autel, une fidélité mutuelle et inviolable, démentez toutes vos promesses, et profanez un sacrement si saint par des attachements si illégitimes;(…); vous le savez, vous qui, voués spécialement au Seigneur, élevés aux plus hauts ministères, employés à la célébration des mystères les plus redoutables, consacrés pour cela, et comme marqués du sceau de Dieu, vous dégradez vous-mêmes, et n'avez point horreur de profaner dans votre caractère ce que la religion a de plus auguste et de plus divin. Après cela nous étonnerons-nous de tant de calamités qui se répandent sur la terre ; et n'est-ce pas le juste châtiment de la licence effrénée de notre siècle et du débordement de nos mœurs? Rappelons toute notre raison, ranimons toute notre religion : l'une et l'autre, avec la grâce du ciel, purifieront nos voies, et rétabliront le peuple de Dieu dans sa première sainteté.
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Message  ROBERT. Dim 13 Déc 2015, 12:14 pm

Troisième dimanche de l’Avent

Il ne vous est pas permis d'avoir la femme de votre frère. (Marc, VI, 18.)

Bourdaloue a écrit:
. il n'est rien de plus opposé à la raison que les sens

1° Elle éteint en nous toutes les lumières de la raison.


(…)  L'esprit et le cœur ne sont occupés que d'un objet : tout le reste disparaît; et où est alors la raison ?


2° Si l'impureté n'éteint pas dans nous les lumières de la raison, du moins nous fait-elle agir contre toutes les vues de notre raison.


(…) saint Augustin: (…) Je soupirais, dit-il, je voyais ma faiblesse, j'en rougissais; et cependant j'étais toujours attaché, non point par une chaîne de fer, mais par ma volonté dépravée, plus dure que le fer.


Samson n'ignorait pas que Dalila le trahissait.


Toute la religion du chrétien profanée par l'impureté. Deux sortes de profanations: l'une générale, par rapport à tous les états du christianisme; l'autre particulière et plus criminelle encore, par rapport à certains engagements et à certains caractères.


1° On peut dire en général que toute impureté dans un chrétien est une profanation: pourquoi ? Parce qu'il souille une chair sanctifiée par le baptême de Jésus-Christ, honorée d'une alliance toute pure avec Jésus-Christ, devenue le temple du Saint-Esprit que l'Apôtre appelle l'Esprit de Jésus-Christ.


Tertullien : (…)  avant que le Fils de Dieu se fût revêtu d'un corps semblable au nôtre, c'était toujours un crime de s'abandonner aux désirs de la chair ; mais depuis le mystère de l'Homme-Dieu, maintenant et plus que jamais, ce n'est plus seulement un crime, c'est un sacrilège.  



2° Profanation particulière, et plus criminelle encore par rapport à certains engagements, à certaines vocations, à certains caractères.


(…) vous qui, liés par le sacré nœud du mariage (…) démentez toutes vos promesses, et profanez un sacrement si saint par des attachements si illégitimes;(…); vous le savez, vous qui, voués spécialement au Seigneur, élevés aux plus hauts ministères, employés à la célébration des mystères les plus redoutables (…) vous dégradez vous-mêmes (...)


(…) Après cela nous étonnerons-nous de tant de calamités qui se répandent sur la terre; et n'est-ce pas le juste châtiment de la licence effrénée de notre siècle et du débordement de nos mœurs ?

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https://messe.forumactif.org/t6800p15-temps-de-l-avent-2015#123791
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Message  gabrielle Lun 14 Déc 2015, 9:17 am

Troisième semaine de l’Avent

Lundi

Jean-Baptiste condamnant l'ambition.


Toutes les montagnes et toutes les collines seront abaissées.  (Luc, 111,5.)

Bourdaloue a écrit:
Premier point. — Ambition criminelle devant Dieu dans les projets qu'elle inspire à l'ambitieux. On veut s'agrandir précisément pour s'agrandir ; on le veut pour jouir des avantages temporels de la grandeur. On le veut à l'infini, sans se prescrire aucun terme où l'ambition s'arrête; on le veut indépendamment de Dieu ; on le veut sans égard au mérite, et sans être en peine si l'on a les dispositions requises; enfin, on le veut par les voies les plus illicites, et aux dépens de la conscience. Tout cela autant de désordres par où l'ambition devient criminelle devant Dieu. Reprenons toutes ces propositions.

1° On veut s'agrandir précisément pour s'agrandir : on ne cherche dans la grandeur que la grandeur même. Or la grandeur, comme grandeur ne convient qu'à Dieu, qui est seul grand, et qui le doit seul être. Vouloir donc s'élever et se faire grand, c'est une espèce d'attentat sur les droits du Seigneur, et de cet Etre suprême devant qui tout être créé n'est que néant.

2° On veut s'agrandir pour jouir des avantages temporels de la grandeur, c'est-à-dire pour se glorifier, pour recevoir des hommages et des respects, pour tenir partout le premier rang, pour vivre dans la pompe et dans l'éclat. Or, ce n'est point à cela que les grandeurs du siècle sont destinées, et n'y envisager que cela, c'est un abus hautement condamné dans la loi de Jésus-Christ : elles sont établies pour la gloire de Dieu, et non point pour la nôtre.

3° On veut s'agrandir à l'infini, et sans se prescrire jamais un terme où l'ambition s'arrête : plus on monte, plus on veut monter ; et à peine a-t-on fait un pas, que la pensée naît d'en faire un autre. Désir insatiable, désir déréglé, contraire à la modestie et à la modération chrétienne. Mais désir surtout condamnable dans des gens de rien, quand à force de se pousser, devenus plus audacieux, ils ne rougissent point d'aspirer enfin aux degrés les plus éminents, et prétendent, comme l'ange superbe, se placer au-dessus des nues et des astres de la première grandeur.

4° On veut l'agrandir indépendamment de Dieu et sans faire nul fonds sur Dieu. L'ambitieux compte sur lui-même, compte sur son industrie, compte sur des amis, sur de puissants protecteurs; mais pense-t-il à mettre Dieu dans ses intérêts? Contre l'oracle et l'expresse défense du Saint-Esprit, il s'appuie sur un bras de chair. Voilà toute sa ressource.

5° On veut s'agrandir sans égard au mérite, et sans examiner si l'on a les dispositions requises : témérité insoutenable ; on s'ingère dans des postes, dans des ministères, dans des prélatures qu'on n'est pas en état de remplir, et où l'on ne doit néanmoins entrer que pour en accomplir tous les devoirs.

6° On veut s'agrandir par les voies les plus illicites et aux dépens de la conscience : y a-t-il iniquité que l'ambition n'emploie pour venir à bout de ses desseins? Mais la conscience y répugne : hé ! qu'est-ce que la conscience d'un ambitieux? ou a-t-il une autre conscience que son ambition? Concluons par les paroles de Jésus-Christ, et disons que, de la manière dont on se comporte dans la poursuite des honneurs du monde, ce qui est grand aux yeux des hommes n'est qu'abomination aux yeux de Dieu.

Second point. — L'ambition malheureuse de la part de Dieu : comment? par les jugements et les coups du ciel qu'elle attire sur l'ambitieux. Nous ne lisons point dans l'Ecriture de menaces plus ordinaires que celle-ci, savoir : que Dieu confondra les orgueilleux de la terre ; que tandis qu'ils s'épuiseront de travaux et de soins pour l'établissement de leur fortune et pour leur agrandissement, il déconcertera leurs mesures, il dissipera leurs desseins, il fera échouer leurs entreprises : que s'il les laisse parvenir au point de prospérité où ils visaient, ce sera pour tourner contre eux leur prospérité même, et qu'ils y trouveront une source de chagrins et de déplaisirs les plus mortels; que s'il les laisse atteindre jusques au faîte de la grandeur, ce sera pour rendre leur chute d'autant plus désastreuse et plus éclatante qu'ils tomberont de plus haut, et que, dans leur ruine, il les abandonnera à eux-mêmes et à leur désespoir. Menaces qui ne regardent que la vie présente : car ne parlons point de ce que Dieu prépare à l'ambitieux dans l'éternité. Menaces confirmées par tant d'exemples dont les saints livres nous font le récit. Menaces qui se vérifient encore de siècle en siècle par mille événements que nous devons attribuer à la justice de Dieu, et qui sont de visibles, mais terribles châtiments de l'ambition.

1° Combien y en a-t-il que Dieu arrête au milieu de leur course? Ils s'agitaient, ils se tourmentaient, ils disposaient les choses avec toute l'adresse et toute l'assiduité imaginable ; une espérance presque certaine leur répondait du succès ; mais un fâcheux contre-temps, mais la mort d'un patron, mais le refroidissement d'un ami, mais la faveur d'un concurrent, mais quelque sujet que ce soit, a tout à coup rendu inutiles tant de démarches et tant de mouvements. Comme cette tour de Babylone, l'ouvrage est demeuré imparfait; et de cette fortune qu'on voulait bâtir, il n'est resté que la douleur d'y avoir perdu ses peines et vainement consumé ses jours. Ils édifieront, dit le Seigneur, et de mon souffle je disperserai tout ce qu'ils auront amassé de matériaux et fait de préparatifs.

2° Combien y en a-t-il qui, plus heureux en apparence, ont obtenu ce qu'ils souhaitaient? Tous les chemins leur ont été ouverts, tout les a soutenus; mais, dans leur élévation, à quoi se sont-ils vus exposés? à la censure et aux mépris, aux plaintes et aux murmures, aux traverses et aux contradictions, aux alarmes continuelles, aux affaires les plus désagréables, aux embarras les plus accablants, aux dégoûts et aux déboires les plus affreux; de sorte qu'ils ont été forcés de reconnaître que dans la médiocrité de leur premier état ils étaient mille fois, et plus honorés du public, et plus contents en eux-mêmes. Ils se promettaient de marcher dans des voies tout aplanies, mais Dieu les a semées d'épines.

3° Combien d'autres, après avoir vécu un certain nombre d'années dans la splendeur, et y avoir eu tout l'agrément qu'ils pouvaient attendre, ont été renversés par une disgrâce? de quelles chutes avons-nous entendu parler, et avons-nous même été témoins? Tout s'est éclipsé : des familles entières sont tombées avec leur chef, et l'éclat des pères n'a pu passer jusques aux enfants : car ce sont là les coups du bras tout-puissant de Dieu, et c'est ainsi qu'il abat de leur trône les potentats qui se confiaient en leur pouvoir.

4° Encore s'il daignait les consoler dans leur infortune! mais parce que jamais ils ne se sont occupés de Dieu et que jamais ils n'ont su recourir à Dieu, il les livre à leurs noires mélancolies. Il les voit se ronger, se désoler, dépérir, sans verser sur eux une goutte de son onction divine pour leur adoucir l'amertume du calice. Apprenons de Jésus-Christ à être humbles; c'est ce qu'il vient nous enseigner,  et c'est dans notre humilité que nous trouverons tout à la fois et l'innocence et le repos de nos âmes.
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Message  gabrielle Mar 15 Déc 2015, 8:35 am

MARDI.

Saint Jean Baptiste condamne l’attachement aux richesses

Ne demandez point au delà de ce qui vous est marqué... contentez-vous de votre solde. (Luc, III, 14.)

Bourdaloue a écrit:Premier point. — Passion la plus vaine dans son objet. Il ne s'agit point ici de la vue sage et modérée qu'on peut avoir de ne pas manquer dans son état, et de s'y soutenir honnêtement. C'est une prudence, et Salomon lui-même demandait à Dieu de ne pas tomber dans l'extrême pauvreté ; mais il ne souhaitait pas avec moins d'ardeur que Dieu le préservât de la passion des richesses, la regardant comme une des passions les plus frivoles et les plus vaines.

En effet, à quoi aspire-t-elle, et pourquoi y aspire-t-elle? A quoi aspire-t-elle ? aux biens de la vie ; à les amasser, à les multiplier, à les accumuler; car c'est une de ces deux sangsues qui nous sont représentées au livre des Proverbes, et qui, ne se trouvant jamais remplies, ne cessent point de crier : Apporte, apporte. Or, qu'est-ce que ces biens qui allument une soif si ardente? des biens temporels, passagers, périssables; des biens qu'on acquiert aujourd'hui et qu'on perd demain, des biens qui du moins un jour nous seront certainement enlevés et dont on n'emportera rien avec soi, des biens qui du moins nous causeront d'autant plus de douleur quand, malgré nous, il les faudra quitter, que nous y aurons été plus attachés. En vérité, pour peu qu'on raisonne, peut-on ne pas voir que des biens de cette nature ne doivent point faire naître des désirs si vifs, et que de s'en infatuer, c'est une vanité et une faiblesse pitoyables? .

2° De plus, cette passion si aveugle, pourquoi aspire-t elle à ces biens visibles et terrestres? Est-ce pour en jouir? est-ce pour en goûter les douceurs? C'est seulement et précisément pour les posséder : car pour en jouir il faudrait en user, et l'usage les diminuerait. Or c'est ce qu'une âme intéressée ne veut point. On veut toujours mettre en réserve, et jamais ne rien ôter. De là, jusqu'au milieu de l'abondance, les plus sordides épargnes. Au lieu que l'Apôtre, plein de l'esprit de l'Evangile, disait : Nous n'avons rien et nous possédons tout ; l'avare, idolâtre de son trésor, doit dire : J'ai tout, et je vis comme ne possédant rien. Qui donc jouira de tant de biens? Des héritiers, et non point le maître qui les a actuellement dans les mains. Voilà ce que le Saint-Esprit, dans la Sagesse, appelle une grande misère, et ce que nous pouvons appeler une insigne folie.

Second point. — Passion la plus inquiète dans ses mouvements. C'est pour cela que l'Evangile compare les richesses à des épines, qui de leurs pointes piquent le cœur et déchirent l'âme. Inquiétude dans l'acquisition des biens après lesquels on soupire, et inquiétude dans leur possession.

1° Inquiétude dans l'acquisition : car ces biens ne viennent pas se présenter d'eux-mêmes ; il faut les rechercher, et Ce n'est pas sans peine qu'on les trouve. Mille obstacles s'opposent aux desseins qu'on forme, mille accidents les dérangent et les arrêtent. Cependant la passion d'avoir sollicite, presse, ne peut souffrir de retardements, tant elle est précipitée ; ne peut se contenter de rien, tant elle est avide. De là donc les troubles et les agitations. On se surcharge de travail, d'affaires, d'entreprises. L'une terminée, on s'engage dans une autre, et souvent même on les embrasse toutes à la fois. On y pense la nuit, on s'en occupe le jour ; on y sacrifie son repos, on y altère sa santé, on y expose sa vie. A force de vouloir se procurer un prétendu bonheur que l'imagination fait consister dans l'opulence, on se rend malheureux, et l’on consume ses années dans un tourment que la mort seule finit.

2° Inquiétude dans la possession. Il n'en coûte pas moins pour conserver que pour acquérir. Ce qu'on aime, on craint de le perdre ; et plus on l'aime, plus les alarmes sont fréquentes : car on les prend aisément. Une perte qui arrive chagrine, et est capable de désoler un homme à qui néanmoins il reste d'ailleurs beaucoup plus qu'il ne lui faut pour être en état de porter le dommage qu'il a souffert. Parce qu'on est âpre sur l'intérêt, on ne veut rien laisser inutile, mais on prétend que tout ce qu'on a profite, et ce sont toujours pratiques nouvelles, toujours nouvelles fatigues. On ne veut rien céder, rien relâcher de ses droits ; on les exige à la rigueur, et de là les contestations, les démêlés, les procès. Il n'y a là-dessus qu'à interroger tant de riches du siècle, et qu'à les faire parler. Leur convoitise les dévore; mais s'ils savaient la contenir et la régler, avec une fortune un peu moins ample, ils vivraient beaucoup plus tranquilles, et cette paix vaudrait mieux que toutes leurs richesses.

Troisième point. — Passion la plus dangereuse dans ses effets à l'égard de la conscience et du salut. Outre que l'attachement aux biens de la vie est en soi un péché, et qu'il a sa malice propre, c'est encore la source de mille péchés. Vérité d'autant plus triste et plus déplorable, qu'elle a moins besoin de preuves, et que les exemples en sont plus communs. Y a-t-il injustice que cette passion ne fasse commettre, et y a-t-il injustice qu'elle n'empêche de réparer?

1° Quelles sortes d'injustices cette criminelle passion ne fait-elle pas commettre? Qu'a-t-on vu dans tous les siècles, et que voyons-nous autre chose tous les jours, que des usures, que des fraudes, que des violences, que des concussions ( escroquerie)? Quelles voies n'a-t-on pas imaginées pour gagner et pour s'enrichir aux dépens des particuliers, aux dépens du juste, aux dépens du pauvre, aux dépens de la veuve, de l'orphelin ; et cela, non point seulement dans le monde libertin et corrompu, mais dans le monde même chrétien, parmi un certain monde assez réglé d'ailleurs, et réputé vertueux et dévot? Iniquités plus grossières dans les uns, iniquités plus subtiles et plus couvertes dans les autres, mais toujours iniquités qu'on ne justifiera jamais au tribunal d'une conscience droite et saine, quoiqu'on ne manque pas d'artifices et de détours pour les accorder avec une conscience fausse et erronée.

2° Le comble de l'iniquité, c'est que la même passion qui fait commettre tant d'injustices empêche de les réparer. La nécessité de la restitution est un principe universellement reçu; nul ne l'ignore : mais la pratique de la restitution est une chose presque absolument inconnue. Chacun sait s'en dispenser : pourquoi? parce que chacun ne consulte que son attache au bien, et qu'il n'est rien de plus ingénieux que cette damnable avarice à inventer des prétextes et à éluder les plus étroites obligations. Mais si elle se déguise à nos yeux, elle ne peut se déguiser aux yeux de Dieu, qui la dévoilera dans son jugement, et qui la réprouvera. Gardons-nous d'une si terrible condamnation, et suivons l'avis que nous donne le Sauveur des hommes : Ne cherchez point à amasser des trésors sur la terre, où la rouille et les vers consument tout; mais travaillez à amasser des trésors dans le ciel, où il n'y a ni rouille ni vers qui consument. Car où est votre trésor, là est votre cœur.

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Message  gabrielle Mer 16 Déc 2015, 8:09 am

MERCREDI.

Jean-Baptiste condamnant les violences et les emportements.

Ne faites point de violence. (Luc, III, 14.)


Bourdaloue a écrit:Premier point. — Le mérite de la douceur chrétienne. Il consiste en ce que cette vertu demande une victoire de nous-mêmes la plus héroïque, et une victoire de nous-mêmes la plus constante.

1° Victoire de nous-mêmes la plus héroïque. Car il n'est pas ici question d'une douceur de naturel qui ne s'émeut de rien, et qui, sans effort, s'accommode à tout ce qui se présente et à tout ce qu'on souhaite. C'est un don de Dieu, mais ce n'est pas précisément une vertu. II s'agit d'une douceur chrétienne dont les devoirs sont de réprimer dans le fond de l'âme toutes les vivacités et toutes les saillies que la colère peut exciter ; de ne donner au dehors nuls signes ni d'impatience, ni d'aigreur, en des rencontres néanmoins où le cœur souffre intérieurement et se sent piqué ; de mesurer toutes ses paroles, et de n'en laisser pas échapper une ou de mépris ou de plainte même à l'égard de ceux dont on a plus lieu d'être malcontent; de se comporter dans toutes ses manières avec un air toujours honnête, modeste, humble et affable ; d'user de condescendance dans les occasions contre son inclination propre, et de se gêner, de se contraindre en faveur de certains esprits difficiles, en faveur de certaines personnes, plus capables que les autres, par leurs imperfections et leurs faiblesses, d'inspirer de l’éloignement et du dégoût. Or, pour cela quelles violences n'est-on pas obligé de se faire, et que ne doit-on pas prendre sur soi ? Car la douceur ne rend ni aveugle ni insensible : on s'aperçoit des choses, on en est touché, et si l'on suivait les impressions de la nature, on éclaterait; mais en vue de Dieu, et par un esprit du christianisme, on étouffe sa peine et on l'ensevelit. Est-il un plus beau sacrifice ? est-il une abnégation de soi-même une mortification plus parfaite?

2° Victoire de nous-mêmes la plus constante. Il y a des vertus dont la pratique est plus rare, parce que les sujets en sont moins ordinaires et moins fréquents. Mais la douceur dont nous parlons est une vertu de tous les états, de tous les lieux, de toutes les conjonctures, de tous les temps; une vertu de toute la vie et de tous les moments de la vie : car toute la vie se passe à penser, à converser, à traiter avec le prochain, à agir; et par conséquent, les sujets sont continuels de se vaincre, en ne se départant jamais d'une douceur toujours égale, soit dans les sentiments, soit dans les paroles, soit dans les actions. Continuité qui donne le prix à toutes les vertus, et qui en est comme le couronnement et la perfection. Hélas! les moyens de se sanctifier ne nous manquent point, mais nous leur manquons. Où est cette douceur évangélique, et où la trouve-t-on? Je ne demande pas où l'on trouve une douceur affectée et de politique, une douceur apparente et de pure bienséance, une douceur de tempérament et d'indifférence : or voilà quelle est la douceur que font paraître en certaines rencontres un nombre infini de mondains. L'intérêt les retient, et ils craignent de se faire tort en éclatant, et de nuire à leur fortune. Une vaine gloire les arrête, et ils croiraient se déshonorer s'ils venaient à perdre la gravité et la modération qui convient à leur âge, à leur état, à leur caractère.

Une lente et molle indolence les rend insensibles à mille choses qui, selon les vues ordinaires et humaines , devraient les piquer et les soulever. Mais tout cela ne peut être devant Dieu de nulle valeur, puisque tout cela n'a Dieu ni pour principe ni pour fin. Je demande donc où l’on trouve cette douceur que Jésus-Christ a canonisée, et dont il a été le modèle; cette douceur qui, par le motif d'une charité fraternelle et toute divine, apprend au fidèle à se renoncer, à se captiver, à se modérer, à se taire, à supporter, à pardonner, à ne s'expliquer qu'en des termes obligeants, et à ne témoigner jamais ni amertume ni dédain. Où, dis-je, est-elle ? L'usage du monde et de toutes les conditions du monde ne fait que trop voir combien elle y est peu connue et peu mise en œuvre.

Second point. — Le fruit de la douceur chrétienne : c'est la paix au dedans de soi-même, et la paix au dehors.

1° La paix au dedans de soi-même. Un des plus grands biens que nous avons à désirer pour le bonheur de notre vie et en même temps pour la sanctification de notre âme, c'est de nous rendre maîtres de nous-mêmes et de nos passions ; surtout maîtres de certaines passions plus vives, plus impétueuses, plus turbulentes. Sans cet empire, point de paix intérieure. Et de quelle paix en effet peut être assuré et peut jouir dans son cœur un homme sujet aux colères, aux promptitudes, aux dépits, aux aversions, aux antipathies, aux envies, aux vengeances ?

D'une heure à une autre peut-il compter sur lui-même, et n'est-il pas comme une mer orageuse, où les flots s'élèvent au premier vent et forment de rudes tempêtes ? Or, que fait la douceur chrétienne? elle bannit toutes ces passions, ou elle les combat ; et, à force de les combattre, elle les soumet et les calme. On prend tout en bonne part : ce qu'on ne peut justifier, on le tolère; on ne s'offense point, on ne s'aigrit point; et par la que de mouvements du cœur et de pénibles sentiments on s'épargne ! que de réflexions chagrinantes ! que d'agitations de l'esprit et de dissipations ! Mais, ce qui est encore plus important, de combien de fautes, de combien de péchés se préserve-t-on ! Quelles grâces du ciel, quelles communications divines est-on en disposition de recevoir! Car, comme Dieu ne se plaît point dans le trouble, il aime à demeurer dans la paix, et une âme pacifique est d'autant mieux préparée à le posséder, qu'elle sait mieux se posséder elle-même.

2° La paix au dehors. On l'entretient par la douceur ; c'est-à-dire qu'on vit bien avec tout le monde. Et le moyen qu'on eût avec qui que ce soit quelque démêlé, puisqu'on est toujours attentif à ne rien dire et à ne rien faire qui puisse blesser personne ; puisqu'on est toujours prêt à prévenir les autres et à leur céder ; puisqu'on a un soin extrême d'éviter toute contestation qui pourrait naître entre eux et nous ; puisque partout on leur donne toutes les démonstrations d'une affection sincère, et d'une pleine déférence à leurs volontés? C'est ainsi qu'on se les attache, et que la parole du Fils de Dieu s'accomplit, savoir, que les débonnaires gagneront toute la terre .

Heureuses donc, soit dans l'état séculier, soit dans l'état religieux, toutes les sociétés qu'une charité douce et officieuse assortit, et où elle maintient la bonne intelligence et l'union des cœurs ! Mais, par une règle toute contraire, on ne saurait assez pleurer le sort de tant de familles, de tant de maisons et de compagnies, où des esprits ardents, des esprits impatients et brusques, des esprits durs et intraitables, des esprits fiers et hautains, défiants et délicats, des esprits critiques et sévères à l'excès, des faux zélés, d'impitoyables et de faux réformateurs, allument le feu de la discorde, et sèment les querelles et les divisions. Quels scandales, quels maux s'ensuivent de là ! On n'en est que trop instruit ; mais pour couper court à de tels désordres, et pour y remédier, on ne peut trop s'étudier soi-même, ni trop prendre de précautions.
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Message  gabrielle Jeu 17 Déc 2015, 7:34 am

JEUDI.

Jean-Baptiste condamnant la médisance.

Ne parlez mal de personne. (Luc, III, 14.)

Bourdaloue a écrit:Premier point. — Facilité de la médisance. Un péché où nous porte le penchant de la nature ; un péché dont l'occasion nous est fréquente et presque continuelle ; un péché que nous nous justifions à nous-mêmes par de spécieux prétextes et des sujets apparents ; un péché qui ne coûte que quelques paroles, et dont les moyens sont toujours les plus présents et les plus prompts ; enfin un péché qui fait l'agrément des conversations, et qui se trouve applaudi et bien reçu de tout le monde, c'est sans doute un péché aisé à commettre. Or telle est la médisance.

1° Péché où nous porte le penchant de la nature, je dis de la nature corrompue ; car voici quelle est la perversité de notre esprit ; nous nous rendons mille fois plus attentifs à découvrir dans le prochain le mal que le bien, et nous sommes incomparablement plus enclin à nous entretenir de ses mauvaises que de ses bonnes qualités. C'est ce que nous éprouvons tous : mais outre cette inclination commune, il y en a encore de plus particulières dans une multitude infinie de gens, les uns légers à parler, et ne pouvant rien retenir de ce qu'ils savent ou qu'ils croient savoir ; les autres critiques et censeurs, trouvant partout à reprendre, et s'épanchant volontiers sur tout ce qu'ils remarquent dans autrui, ou qu'ils pensent y remarquer, d'imperfections et de défauts : or  dès que c'est la pente naturelle qui nous conduit, a-t-on de la peine à suivre le mouvement dont on se sent emporté?

2° Péché dont l'occasion nous est fréquente et presque continuelle. Eh ! que fait-on autre chose dans la société humaine, que de se voir, que d'avoir ensemble d'oisifs et de longs entretiens ; et parce qu'il ne semble pas qu'on puisse les soutenir sans le secours de la médisance, de quelle autre chose s'occupe-t-on? On se donne l'exemple les uns aux autres, on s'excite les uns les autres ; les plus sages ne peuvent résister au torrent, et sont en quelque manière forcés d'entrer dans le discours, et de se joindre à ceux qui l'ont entamé. Bien loin qu'il leur fût difficile de médire, il ne leur serait presque pas possible de s'en abstenir et de se taire.

3° Péché que nous nous justifions à nous-mêmes par de spécieux prétextes et des sujets apparents. On dit : Que faire? il faut bien que quelqu'un soit mis en jeu ; autrement on tarirait bientôt, et on demeurerait dans le silence. On dit : Il faut bien être instruit de tout ce qui se passe ; il faut bien connaître le monde, afin de ne s'y pas tromper. On dit : Je n'ai rien contre ces personnes, et je ne prétends point leur nuire ; si j'en parle, c'est fort indifféremment. On dit : La chose n'est pas secrète, ou dans peu elle cessera de l'être. On dit : C'est un homme dont je n'ai pas lieu d'être content, il en use mal : pourquoi l'épargnerai-je? il se fait trop valoir ; il est bon de l'humilier. On dit : Je n'en impose point, je n'avance rien de faux, tout est comme je le rapporte. Enfin, que ne dit-on pas? et, rassuré de la sorte, avec quelle liberté ne s'explique-t-on pas et ne lance-t-on pas les traits les plus piquants?

4° Péché qui ne coûte que quelques paroles, et dont les moyens sont toujours les plus présents et les plus prompts : il ne s'agit que de s'énoncer, ou même, au défaut de la voix, un geste, un signe, un coup d'oeil suffit, et dans un moment fait concevoir tout ce que la bouche pourrait exprimer : car on médit en plus d'une façon, et il y a pour cela plus d'un langage.

5° Péché qui fait l'agrément des conversations, et qui se trouve applaudi et bien reçu de tout le monde. Ce n'est pas que dans le fond de l'âme, on n'ait souvent en horreur le médisant; mais la médisance plaît, surtout quand elle est assaisonnée de bons mots, c'est-à-dire de mots qui percent, qui déchirent, qui exposent le prochain à la risée, et qui insultent en quelque sorte à sa honte et à son malheur. Tous les esprits alors se réveillent pour écouter, et on redouble l'attention : il n'est donc point surprenant, après cela, qu'avec un accès si facile la médisance fasse de si grands progrès, et que sans obstacle elle répande de tous côtés son venin. Aussi est-ce le péché le plus commun, et de là les parfaits chrétiens tirent deux conséquences : la première, d'éviter, autant qu'il leur est possible, le commerce du monde; et la seconde, d'y être toujours en garde toutes les fois qu'ils y sont appelés : car ils n'ignorent pas combien la médisance est un mal contagieux, et avec quelle subtilité et quelle vitesse il se communique.

Second point. — Grièveté de la médisance. C'est un principe général, et que nous devons reconnaître avant toutes choses, savoir : que la médisance est, de sa nature, un péché grave : pourquoi? par le tort qu'elle fait au prochain, à qui elle ravit le plus cher de tous les biens de la vie humaine et civile, qui est la réputation. Car la réputation, disent les théologiens, est un bien propre où chacun a droit, et un bien d'une valeur inestimable dans l'opinion des hommes : par conséquent, si je l'enlève à mon frère sans un titre légitime et sans une solide raison, c'est une injustice dont je me rends coupable envers lui, et dont je lui dois une réparation aussi entière qu'elle le peut être. Mais, pour ne pas insister davantage sur un point si universellement établi et tant de fois traité(…),   attachons-nous à quelques circonstances particulières sur quoi il est moins ordinaire de s'expliquer, et mesurons ici la grièveté de la médisance par le caractère des personnes qu'elle attaque, par les tours malins qu'on lui donne, par le dessein prémédité qu'on s'y propose, par l'éclat avec lequel on la répand, par les scandales qui en naissent : cinq degrés d'injustice, et cinq articles qui contiennent tout le fond de cette seconde partie.

1° Grièveté de la médisance par le caractère des personnes qu'elle attaque. A qui fait-elle grâce, et où ne porte-t-elle pas ses coups? Y a-t-il une dignité si auguste qu'elle respecte? y a-t-il une profession si sainte qu'elle épargne ? Or, il est vrai néanmoins qu'il y a des places, des rangs, des professions où la réputation est beaucoup plus précieuse, plus délicate, plus aisée à blesser que dans les autres, et où les brèches qu'on y fait ont des conséquences beaucoup plus funestes. (…) Mais la médisance ne connaît point cette distinction, et ne la veut point connaître (…)

2° Grièveté de la médisance par les tours malins qu'on lui donne. Un fait rapporté simplement, et mis dans son jour naturel, peut faire moins d'impression. Mais ce n'est point assez pour la médisance ; il faut qu'elle en raisonne, il faut qu'elle l'enfle, qu'elle l'exagère, qu'elle l'interprète à son gré, qu'elle en pénètre les plus secrètes intentions, qu'elle en développe tous les plis et tous les replis : comme si elle n'était pas contente du récit injurieux qui la rend déjà criminelle, et qu'elle voulût encore y ajouter le jugement téméraire de la calomnie.

3° Grièveté de la médisance par le dessein prémédité qu'on s'y propose. Médire par entretien et par une espèce d'amusement, médire par inconsidération et par envie de parler, c'est toujours être condamnable : mais qu'est-ce donc de médire pour médire? Expliquons-nous. Qu'est-ce de médire pour déshonorer, de médire pour diffamer, de médire pour couvrir des gens d'opprobre, sans autre vue que l'opprobre même qui doit rejaillir sur eux? Car voilà jusqu'où va la médisance. Est-ce méchanceté pure? est-ce quelque intérêt, quelque passion qui anime? Quoi que ce soit, on ne s'en tient pas à ce qui semble de soi-même se présenter, ni à ce qu'on sait par les voies communes; mais on s'informe, mais on tâche de s'instruire, mais on recueille de toutes parts des mémoires, et l'on en grossit des volumes. Tout cela à quelle fin, et quelle en est l'utilité? quel en est le fruit? point d'autre que de décrier des particuliers, que de flétrir des familles, que d'humilier des maisons, que de scandaliser le public , et de le susciter contre des compagnies entières.

4° Grièveté de la médisance par l'éclat avec lequel on la répand. Plus le déshonneur est public, plus l'injure est sanglante : et souvent n'est-ce pas là ce qu'on demande et à quoi l'on vise? On sonne, pour ainsi dire, de la trompette, afin de faire entendre la médisance plus au loin. On veut qu'elle retentisse dans toute une ville, dans toute une province, dans tout un royaume. De là ces bruits qui courent comme des torrents impétueux, et dont toutes les oreilles sont rebattues. De là ces écrits, ces libelles dont toute la terre est inondée.

5° Grièveté de la médisance par les scandales qui en naissent. Un médisant dans une assemblée, c'est un homme contagieux, c'est un tentateur qui expose tous les assistants à deux sortes de tentations. En effet, un abîme attire un autre abîme, et une médisance une autre médisance. Si vous n'aviez point produit sur la scène celui-ci ou celle-là, il n'en eût point été question : on n'y pensait pas. Mais vous avez commencé, et on vous a suivi. Ce que vous avez dit pouvait être moins essentiel, mais on a bien enchéri sur vous. Vous ne l'avez pas prévu, mais il le fallait prévoir. De plus, si quelques-uns plus réservés et plus circonspects se sont abstenus de la médisance, ne l’ont-ils pas écoutée, et, en l'écoutant, ne l’ont-ils pas favorisée? n'y ont-ils pas pris goût? Or en cela ils sont coupables, et vous êtes l'auteur de leur péché. Scandale sur quoi on n'entre point en scrupule, dont on ne se fait point de peine, dont on ne s'accuse point, mais dont on ne sera pas sans reproche au tribunal de Dieu. Arrêtons-nous-là, laissons bien d'autres circonstances que nous pourrions marquer, et que nous sommes obligés d'omettre; c'est une matière inépuisable que toutes les injustices de la médisance et tous les désordres qu'elle cause. Prions Dieu qu'il dirige notre langue, et qu'il la conduise : car le Sage nous apprend que c'est au Seigneur de la gouverner). Apportons-y nous-mêmes toute l'attention et toute la circonspection nécessaire; et n'oublions jamais cette autre parole du Saint-Esprit, que la langue, selon que nous la réglons ou que nous lui permettons de s'échapper, porte la mort ou la vie.

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Message  gabrielle Ven 18 Déc 2015, 8:21 am

VENDREDI.

Jean-Baptiste condamnant la dureté envers les pauvres.

Que celui qui a deux habits, en donne un à celui qui n'en a point; et que celui qui a de quoi manger en use de même. (Luc, II, 11.)


Bourdaloue a écrit:Premier point. — Devoir d'obéissance : car l'aumône est un commandement de Dieu. Commandement que Dieu a pu faire, commandement que Dieu a dû faire, commandement que Dieu a fait.

1° Commandement que Dieu a pu faire. Il est maître de nos biens, ou plutôt ce ne sont pas proprement nos biens, mais les biens de Dieu, qui nous les a donnés, et dont nous sommes seulement à son égard comme les dépositaires et les économes. C'est par grâce que nous les avons reçus : or, le maître qui dispense ses grâces à qui il lui plaît, peut y apposer aussi telle condition qu'il lui plaît. D'où il s'ensuit qu'il était libre à Dieu, en confiant au riche ses trésors, de le choisir seulement comme ce sage et fidèle administrateur dont il est dit dans l'Evangile, que le père de famille l'a établi sur toute sa maison, afin qu'il fournisse à chacun, quand il le faut, de quoi se nourrir.

2° Ce n'est pas assez : commandement que Dieu a dû faire. Où serait sa providence, cette providence universelle, s'il n'avait pas pourvu à la subsistance des pauvres? Or les deux voies d'y pourvoir étaient, ou de mettre entre les hommes une égalité parfaite de condition et de facultés, tellement qu'il n'y eût point de pauvres sur la terre ; ou, supposé cette inégalité que Dieu, dans le conseil de sa sagesse, a jugée plus convenable au gouvernement du monde, de porter une loi qui obligeât les uns d'assister les autres, et de suppléer à ce qui leur manque. Sans cela que feraient tant de misérables et de nécessiteux? à quoi auraient-ils recours? Dieu n'est-il pas leur père? Ne sont-ils pas ses créatures, son ouvrage, et leur a-t-il donné l'être et la vie pour les laisser périr de calamités et de besoins?

De là donc enfin commandement que Dieu non-seulement a pu faire, non-seulement a dû faire, mais qu'il a fait; et en voici la preuve incontestable. C'est que l'Ecriture, surtout l'Evangile, nous apprend que parmi les titres de damnation qui doivent être produits contre les réprouvés, un des plus formels, ce sera l'oubli des pauvres et le défaut de l'aumône. Par conséquent, disent les théologiens, il y a un commandement de l'aumône,  puisque Dieu ne nous damnera que pour une offense mortelle, et que, sans l'infraction d'un précepte, il n'y a point d'offense mortelle et digne de la réprobation. De détruire toutes les explications qu'on veut faire de ce précepte, tous les prétextes qu'on oppose à ce précepte, tous les détours qu'on prend pour éluder ce précepte, c'est ce que nous n'entreprendrons pas ; mais souvenez-vous, riches, que Dieu ne se laisse point tromper, et que, malgré toutes vos explications, malgré tous vos prétextes et tous vos détours, vous n'en serez pas moins frappés de ses anathèmes, et rejetés éternellement de sa présence.

Second point. — Reconnaissance envers Dieu, et reconnaissance envers Jésus-Christ, Sauveur des hommes et Fils de Dieu.

Reconnaissance envers Dieu. Sans parler de toutes les autres grâces dont les riches lui sont redevables, n'est-ce pas de sa libéralité qu'ils tiennent les biens  qu'ils possèdent? n'est-ce pas lui qui, dans le partage de ses dons temporels, les a distingués? et s'ils vivent dans l'abondance, tandis qu'une multitude presque innombrable d'indigents ressentent toutes les rigueurs de la pauvreté et de la disette, n’est-ce pas été de sa part une pure faveur? Or il est juste de lui en témoigner la reconnaissance qui lui est due; et celle qu'il nous demande, c'est que nous fassions retourner vers lui ses bienfaits, et que nous en usions pour l'entretien des pauvres, qui sont ses enfants. Tout méprisables qu'ils paraissent selon le monde, il les aime, et il veut que nous l'aimions dans eux ; il veut que nous acquittions envers eux sa providence, qui en est chargée.

Excellent motif de l'aumône : Je rends à Dieu ce qu'il m'a donné! Dans l'ancienne loi, on lui offrait solennellement les prémices des fruits de la terre, et il les recevait dans son temple et à son autel, par le ministère de ses   prêtres; mais sans cet appareil ni cette solennité, je lui offre encore les mêmes prémices et les mêmes fruits. Le temple où je les porte, c'est cet hôpital, c'est cette prison, c'est cette pauvre famille(…),  ce sont ces malades, ce sont ces captifs, ce sont ces orphelins; c'est cette veuve, ce père, cette mère, qui tous me tiennent la place de Dieu, et dont je deviens la ressource et le soutien. Est-il pour une âme charitable une pensée plus touchante et plus consolante?

Reconnaissance envers Jésus-Christ, Fils de Dieu et Sauveur des hommes. Dans un mot cette qualité de Sauveur nous fait comprendre tout ce que nous lui devons; et si nous le comprenons, est-il possible que nous ne nous sentions pas brûlés d'un désir ardent de lui marquer nous-mêmes notre amour? Or, ce qu'il dit à saint Pierre, il nous le dit, quoique dans un autre sens : Si vous m'aimez, paissez mes brebis .  C'est trop peu : non-seulement les pauvres sont ses brebis, mais il les appelle ses frères, mais il ne dédaigne pas de les compter pour ses membres. De sorte que tout ce qui est fait à un pauvre, et au plus petit des pauvres, il l'accepte comme étant fait à lui-même. Sommes-nous chrétiens, si des rapports aussi étroits que ceux-là entre Jésus-Christ et les pauvres n'excitent pas notre charité? Que pouvons-nous refuser à un Dieu Sauveur? Or, tout ce que nous refusons à ses frères et à ses membres, c'est à lui que nous le refusons. Après cela ne craignons-nous point qu'il ne retire de nous sa main libérale, et qu'il ne nous ferme le sein de sa miséricorde? Rien n'est plus capable de tarir la source des grâces divines, que notre ingratitude.

Troisième point. — Devoir de pénitence. Ou nous sommes dans l'état actuel du péché, et il en faut sortir par la pénitence; ou nous sommes rentrés dans l'état de la grâce, mais il faut expier nos péchés passés par la pénitence : or, un des moyens les plus efficaces pour l'un et pour l'autre, c'est l'aumône.

Moyen efficace pour sortir de l'état du péché : car il faut pour cela une grâce de pénitence, et cette grâce, nous ne pouvons plus sûrement l'obtenir que par les œuvres de la charité chrétienne envers les pauvres. C'est ainsi que les Pères entendent ce beau témoignage du saint homme Tobie en faveur de l'aumône, où il dit en termes si exprès et si précis, que l'aumône délivre de la mort de l'âme, qu'elle efface les péchés, qu'elle fait trouver grâce auprès de Dieu, quelle conduit à la vie éternelle . Comment cela? non pas, répond saint Augustin, que le pécheur soit réconcilié avec Dieu, ni que ses péchés lui soient remis du moment qu'il a fait l'aumône, mais parce que ses aumônes lui attirent du ciel de puissants secours pour se relever de ses chutes par une solide conversion, et pour se remettre dans le chemin du salut.

La grâce est le fruit de la prière; et, selon l'oracle du Saint-Esprit, l'aumône prie pour nous, et sa voix monte jusqu'au trône de Dieu pour le fléchir. Aussi est-ce une maxime constante parmi les maîtres de la morale et les docteurs les plus notoires dans la conduite des âmes, qu'à quelques excès qu'un homme soit abandonné, on peut toujours espérer de lui dans l'avenir un retour salutaire, tant qu'au milieu de ses désordres on le voit porté à faire du bien aux pauvres. Tôt ou tard Dieu récompense la miséricorde par la miséricorde.

Moyen efficace pour expier les péchés passés. Car, après être revenu à Dieu, il faut satisfaire à la justice de Dieu, il faut dès cette vie acquitter les dettes dont nous sommes chargés devant Dieu, et par là prévenir les rigoureux châtiments qui nous sont réservés après la mort, puisqu'en ce monde ou en l'autre le péché doit être puni. Or, entre les œuvres pénales et satisfactoires, il n'en est point de plus agréable à Dieu ni de plus recevable à son tribunal que l'aumône, et cela à raison de son utilité. En effet, les autres œuvres de pénitence ne sont profitables et utiles qu'au pénitent même qui les pratique; au lieu que l'aumône profite tout à la fois et au pénitent qui la fait, et au pauvre qui la reçoit. Sur quoi l'aveuglement des riches est bien déplorable quand ils négligent un moyen si présent que Dieu leur met dans les mains, et qu'ils perdent le plus grand avantage de leurs richesses; car voilà à quoi elles sont bonnes, et ce ne sont plus alors des richesses d'iniquité, mais une rançon pour racheter toutes les iniquités de la vie, et pour échapper au souverain Juge, qui n'en remet la peine qu'autant que nous nous l'imposons nous-mêmes. Tout autre usage des biens temporels est, ou criminel, ou vain, ou du moins passager; mais de s'en servir pour rendre à Dieu le devoir d'une humble obéissance, pour marquer à Dieu les sentiments d'une vive reconnaissance, pour se rapprocher de Dieu par la grâce et par une solide pénitence, c'est là l'usage chrétien qui les sanctifie, et qui, de richesses périssables, en fait les gages d'une bienheureuse immortalité.
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Message  gabrielle Dim 20 Déc 2015, 7:02 am

Quatrième dimanche de l’Avent

Jean-Baptiste perfectionnant les peuples par la foi en Jésus-Christ.


Celui qui croit au Fils possède la vie éternelle ; mais celui qui refuse de croire au Fils n'aura point la vie, et la colère de Dieu s'appesantira sur lui. (Joan., III, 36.)

Bourdaloue a écrit:
Premier point. — Foi assez éclairée, dans la force des motifs qui nous la rendent croyable, pour former la persuasion la plus solide et la plus ferme. Car, si nous croyons en Jésus-Christ, et si nous y devons croire, ce n'est point sans preuve. Cet Homme-Dieu s'est montré sur la terre, il s'est dit envoyé de Dieu et Fils de Dieu, il a annoncé aux hommes son Évangile, il leur a prêché une loi nouvelle; mais il n'a point exigé qu'on se soumît à sa doctrine, ni qu'on s'attachât à sa personne, sans produire en sa faveur des témoignages irréprochables et capables de convaincre les esprits. Or, ces témoignages qu'il produisait aux Juifs ont toujours la même forcé pour nous; et, soutenus encore des autres témoignages que la suite des temps, depuis Jésus-Christ, y a joints, permettent-ils à tout homme doué de raison la moindre incertitude; et peut-on, à moins que de s'aveugler soi-même, ne pas apercevoir la lumière qu'ils répandent sur la créance chrétienne?

Témoignage les plus authentiques et les plus sensibles.

Ce sont : 1° l'accomplissement des plus fameuses prophéties, les unes faites de Jésus-Christ et vérifiées dans sa personne, les autres faites par Jésus-Christ même, et confirmées par les événements les plus incontestables et les plus connus;

2° l'éclat de tant de miracles du premier ordre, opérés par la parole toute-puissante de Jésus-Christ, pour établir l'autorité toute divine de sa mission et la vérité de sa doctrine ;

3° l'excellence de la loi que Jésus-Christ est venu prêcher au monde, la sublimité de ses mystères, la sagesse de ses maximes, la sainteté de sa morale ;

4° le sang d'une multitude innombrable de martyrs, c'est-à-dire de témoins qui, malgré les plus cruels tourments, ont rendu gloire à la loi de Jésus-Christ, et l'ont défendue aux dépens de leur vie ;

5° l'établissement si prompt et si général de la loi de Jésus-Christ dans toutes les parties de la terre, au milieu des obstacles en apparence les plus insurmontables, et avec les moyens les plus faibles en eux-mêmes et les plus impuissants ;

6° le consentement universel depuis plus de dix-sept siècles, et le concours unanime des plus saints et des plus savants personnages, des docteurs les plus consommés, des plus grands génies, à recevoir la loi de Jésus-Christ, à la publier, à la combler d'éloges, à en faire le sujet de leurs méditations et la règle de toute leur conduite.

De là il est aisé de voir avec quelle témérité et quelle injustice Julien l'Apostat reprochait aux chrétiens que leur foi ne consistait que dans une simple ignorance, et qu'on se contentait de leur dire : Croyez. On nous le dit en effet, mais en même temps on y ajoute tout ce qui peut déterminer un esprit droit et l'affermir. Il a été de la providence de Dieu d'en user ainsi à notre égard ; et nous ayant donné une raison pour nous diriger dans toutes les autres choses et nous servir de guide, il n'a pas voulu, dans les matières mêmes de la religion, l'exclure absolument et la détruire. Il a prétendu la soumettre, la captiver, l'humilier; mais non pas lui interdire tout exercice et la rejeter. Autrement nous n'aurions, ou qu'une foi chancelante et sans assurance, ou qu'une foi forcée et sans mérite. On dira peut-être que ces motifs, qui nous semblent si forts et si convaincants, ne font pas la même impression sur les libertins, et qu'ils n'en sont point touchés. Hé ! comment le seraient-ils ? y pensent-ils assez pour cela ? se donnent-ils le loisir de les examiner, de les étudier, et s'appliquent-ils à les bien comprendre? sont-ils d'assez bonne foi et ont-ils le cœur assez libre pour en juger sans prévention, sans passion ? et est-ce enfin au milieu de la débauche où ils demeurent plongés, est-ce parmi une troupe d'impies comme eux et dans la dissipation du monde, qu'on est en état de s'instruire ? Des yeux couverts d'un voile épais n'aperçoivent point la lumière du soleil, mais elle n'en est pas moins vive. Laissons le libertinage raisonner à son gré, et se perdre dans ses raisonnements : pour nous, raisonnons en chrétiens. Notre raison appuiera notre foi, et nous aidera à dissiper tous les nuages de l'incrédulité.

Second point. — Foi assez obscure dans le fond de ces vérités pour exercer la soumission la plus humble et la plus aveugle. C'est un autre avantage de la foi chrétienne, et c'est proprement ce qui en fait le mérite. Voilà pourquoi le Fils de Dieu disait à saint Thomas: Bienheureux ceux qui n'ont point vu et qui ont cru. Heureux de croire et de ne pas voir, parce que s'ils voyaient ils ne croiraient plus, puisque croire c'est adhérer à ce qu'on ne voit pas ; heureux de croire et de ne pas voir, parce que s'ils voyaient ils n'auraient plus de foi, puisque leur foi se changerait en évidence, et que l'obscurité est essentielle à la foi. Heureux de croire et de ne pas voir, parce que s'ils voyaient, leur adhésion à ce qu'ils verraient ne serait plus pour eux une vertu ni un sujet de récompense, puisqu'elle ne dépendrait plus de leur volonté et de leur consentement : car l'esprit est-il maître de ne pas acquiescer à ce qu'il voit, et faut-il le moindre effort et le moindre acte de la volonté, pour commander à la raison de le reconnaître et pour l'y obliger ?

C'est donc ici que nous devons admirer l'infinie miséricorde de la suprême sagesse de notre Dieu, lorsqu'il a formé le dessein de nous conduire au salut par la voie de la foi. Il a eu tout à la fois en vue et sa gloire et notre sanctification ; il a, dis-je, voulu que la soumission de notre foi honorât son adorable et souveraine vérité, et que comme nous lui faisons par l'amour le sacrifice de notre cœur, nous lui fissions par la foi le sacrifice de notre esprit. Il ne s'est pas contenté de cela, mais en cela même il a encore eu égard à notre intérêt : il a voulu que la soumission de notre foi, par l'effort qu'elle nous coûterait, et par la victoire qu'elle nous ferait remporter sur nous-mêmes, nous tînt lieu de mérite auprès de lui, et nous devînt profitable pour l'éternité. Or, il est vrai que dans le fond de ses vérités et des mystères qu'elle nous révèle, la foi, par son obscurité, est en effet pour nous la plus grande épreuve, et conséquemment la plus méritoire.

Car quelles vérités nous propose-t-elle à croire, et quels mystères?

1° Des mystères au-dessus de tous les sens, et plusieurs mêmes tout opposés à ce que les sens nous représentent ;

2° des mystères au-dessus de l'intelligence humaine, et où la raison, toute pénétrante qu'elle est, ne peut par elle-même se faire jour, ni suppléer au défaut des sens ;

3° des mystères dont la connaissance s'est perdue dans les plus vastes contrées de la terre, et que des nations entières d'infidèles ignorent, ( dans le temps de Bourdaloue) et ne sont nullement en peine de savoir ;

4° des mystères exposés, jusque dans le sein du christianisme, aux mépris et aux contradictions, attaqués par l'impiété, combattus par l'hérésie;

5° et quelle créance néanmoins dois-je donner à ces mystères? une créance si absolue, que pour cela je dois démentir tous mes sens, imposer silence à ma raison, lui faire violence, et la tenir assujettie sous le joug; une créance si pure, si simple, que je ne puis écouter la moindre difficulté, ni former le moindre doute; une créance si pleine et si parfaite, qu'elle doit généralement s'étendre à tous les articles de la foi que je professe : de sorte qu'il ne m'est pas permis d'en retrancher un seul, puisque de pécher dans un seul point, c'est pécher dans tous les autres; une créance si résolue et si constante, que rien ne puisse m'en détacher, ni crainte, ni espérance, ni menaces, ni promesses, ni autorité, ni grandeur, ni persécutions, ni tourments, ni la vie, ni la mort.

Ah ! Seigneur, un tel hommage vous est bien dû, mais il n'appartient qu'à vous et à votre divine parole. Ce n'est point là ce que nous révèle la chair et le sang; mais cette docilité, cette soumission sans réserve ne peut venir que de la grâce de votre Père céleste. Tout l'esprit de l'homme y répugne; son indépendance naturelle, sa curiosité, sa présomption ne peuvent s'accommoder de ce saint esclavage où la foi le réduit ; mais, malgré toutes les révoltes intérieures et toutes les répugnances, je crois, mon Dieu, parce que je veux croire ; et je veux croire, parce que je sais que je dois croire. Vous cependant, Seigneur, augmentez ma foi, animez-la, vivifiez-la, afin que ce ne soit pas une foi stérile, mais agissante, mais féconde en bonnes œuvres, et salutaire.
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Message  ROBERT. Dim 20 Déc 2015, 11:25 am

gabrielle a écrit:
Quatrième dimanche de l’Avent

Jean-Baptiste perfectionnant les peuples par la foi en Jésus-Christ.


Celui qui croit au Fils possède la vie éternelle ; mais celui qui refuse de croire au Fils n'aura point la vie, et la colère de Dieu s'appesantira sur lui. (Joan., III, 36.)

Bourdaloue a écrit:

Premier point. — Foi assez éclairée, dans la force des motifs qui nous la rendent croyable, pour former la persuasion la plus solide et la plus ferme.


(…) Témoignage[s] les plus authentiques et les plus sensibles.


(…) De là [voir les 6° du premier point]  il est aisé de voir avec quelle témérité et quelle injustice Julien l'Apostat reprochait aux chrétiens que leur foi ne consistait que dans une simple ignorance, et qu'on se contentait de leur dire : Croyez.(…)  


Des yeux couverts d'un voile épais n'aperçoivent point la lumière du soleil, mais elle n'en est pas moins vive. Laissons le libertinage raisonner à son gré, et se perdre dans ses raisonnements : pour nous, raisonnons en chrétiens. Notre raison appuiera notre foi, et nous aidera à dissiper tous les nuages de l'incrédulité.



Second point. — Foi assez obscure dans le fond de ces vérités pour exercer la soumission la plus humble et la plus aveugle. C'est un autre avantage de la foi chrétienne, et c'est proprement ce qui en fait le mérite.


(…) comme nous lui faisons par l'amour le sacrifice de notre cœur, nous lui fissions par la foi le sacrifice de notre esprit.(…) la foi, par son obscurité, est en effet pour nous la plus grande épreuve, et conséquemment la plus méritoire.


Car quelles vérités nous propose-t-elle à croire, et quels mystères ?  (…)


(…) quelle créance néanmoins dois-je donner à ces mystères ? [voir les 5° du second point]


une créance si absolue, que pour cela je dois démentir tous mes sens, imposer silence à ma raison, lui faire violence, et la tenir assujettie sous le joug;


une créance si pure, si simple, que je ne puis écouter la moindre difficulté, ni former le moindre doute; une créance si pleine et si parfaite, qu'elle doit généralement s'étendre à tous les articles de la foi que je professe : de sorte qu'il ne m'est pas permis d'en retrancher un seul, puisque de pécher dans un seul point, c'est pécher dans tous les autres;


une créance si résolue et si constante, que rien ne puisse m'en détacher, ni crainte, ni espérance, ni menaces, ni promesses, ni autorité, ni grandeur, ni persécutions, ni tourments, ni la vie, ni la mort. (…)


je crois, mon Dieu, parce que je veux croire; et je veux croire, parce que je sais que je dois croire (…).
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https://messe.forumactif.org/t6800p15-temps-de-l-avent-2015#124117
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Message  gabrielle Lun 21 Déc 2015, 8:00 am

Lundi quatrième semaine de l'Avent

Jean-Baptiste perfectionnant les peuples par l'espérance en Jésus-Christ.

SERMON SUR LA RÉDEMPTION DES HOMMES PAR JÉSUS-CHRIST.

Voilà l'Agneau de Dieu, voilà celui qui efface le péché du monde. (Joan., I, 29.)


Bourdaloue a écrit: Premier point. — Rédemption  dans son principe la plus gratuite. Quand saint Paul veut relever et nous donner à connaître l'amour extrême que Dieu nous a témoigné dans la rédemption du monde, il nous marque deux circonstances, savoir, que nous n'avions mérité cette grâce en aucune sorte, ni par aucune de nos œuvres ; et de plus, que le péché même nous en rendait formellement indignes, puisque nous étions dans la disgrâce de Dieu et ennemis de Dieu. D'où l'Apôtre conclut que si nous avons été rachetés par un Dieu Sauveur, c'a été de sa part une pure miséricorde et une pure grâce.

1° Qu'avions-nous fait et que pouvions-nous faire qui dût nous attirer du ciel un don aussi excellent et aussi grand que celui du Fils unique de Dieu, pour être le médiateur de notre salut et le prix de notre rançon ? Voilà, dit Jésus-Christ lui-même dans saint Jean, voilà comment Dieu a aimé le monde. Il a donné son Fils pour le monde, afin que ceux qui croiront en lui ne périssent point, mais qu'ils parviennent à la vie éternelle. Paroles remarquables. Ce divin Maître ne dit pas : Voilà comment Dieu a récompensé le monde, voilà comment il a eu égard aux vœux et aux bonnes œuvres du monde; mais : Voilà comment il l'a aimé ; c'est-à-dire qu'il ne s'est intéressé pour nous que par amour, qu'il n'a compati à nos maux que par amour, qu'il ne nous a sauvés que parce qu'il est bon, et que par amour.

2° Ce n'est point encore assez, poursuit le docteur des nations. Car, une autre circonstance où notre Dieu a fait éclater, ne disons plus simplement sa charité, mais les richesses infinies, mais l'excessive condescendance, mais le comble de sa charité, c'est de l'avoir exercée envers nous, lors même que nous étions pécheurs, et que, participant à la désobéissance de notre premier père et à la malédiction tombée sur lui, nous n'étions à ses yeux que des enfants de colère et des sujets de haine. Du moins si nous n'avions eu que ce péché d'origine : mais combien d'autres péchés prévoyait-il, dont nous sommes devenus dans la suite des temps, et nous devenons sans cesse coupables? Péchés actuels et personnels, péchés énormes et de toutes les espèces, péchés sans nombre, et péchés toutefois qui n'ont pu, ni par leur malice et leur grièveté, ni par leur innombrable multitude, rétrécir ces entrailles de miséricorde avec lesquelles il a plu au Seigneur de venir d'en-haut nous visiter, pour éclairer ceux qui demeuraient ensevelis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort, et pour nous mettre dans le chemin de la paix .

Après cela, que n'avons-nous pas droit d'attendre d'un Dieu qui nous a ainsi prévenus? Craindrons-nous d'aller à lui? Tout offensé qu'il était et tout égarés que nous étions, il n'a pas dédaigné de nous chercher lui-même, et de faire toutes les avances pour nous ramener et nous retirer de la voie de perdition : nous rejettera-t-il quand nous nous présenterons à son trône, que nous nous jetterons à ses pieds, que nous lui adresserons nos demandes dans un esprit d'humilité et avec un cœur droit et contrit? Cessera-t-il de nous aimer dans le temps où, par notre confiance et par des dispositions chrétiennes, nous travaillerons à nous rendre moins indignes de son amour?

Second point. Rédemption dans son mérite la plus abondante. Elle a eu deux effets : l'un d'effacer pleinement le péché, l'autre de nous enrichir d'un trésor de grâces inépuisable.

1° Rédemption abondante, parce qu'elle a effacé pleinement le péché : comment cela? C'est que la vertu des mérites de Jésus-Christ est au-dessus de toute la malice du péché, et que ces mérites ont été plus que suffisants pour laver les péchés, non-seulement du monde entier, mais de mille mondes. Car la malice du péché, quelle qu'elle puisse être, et à quelque excès qu'elle soit montée, n'est, après tout, infinie que dans son objet, c'est-à-dire qu'elle, n'est infinie que parce qu'elle s'attaque à Dieu, qui est le premier être, un être infiniment grand : au lieu que les mérites de Jésus-Christ sont infinis en eux-mêmes et par eux-mêmes : pourquoi ? parce que ce sont les mérites d'un homme-Dieu, les mérites du Fils de Dieu, les mérites d'un Dieu.

2° Rédemption abondante par le trésor de grâces dont elle nous a enrichis. Trésor dont l'Église est dépositaire, et qui lui est resté des mérites de son Époux. De là cette belle et consolante parole de l'Apôtre, que là où le péché était abondant, la grâce a été surabondante . De là même ce raisonnement si juste et si solide que faisait aux Romains le Maître des Gentils pour affermir leur espérance : Dieu n’a pas épargné son propre Fils, mais il l'a livré pour nous. Or, en nous le donnant, ne nous a-t-il pas tout donné avec lui et en lui  ?

En effet, c'est de ce don essentiel, de ce premier don, comme d'une source intarissable, que sont venus et que viennent sans interruption tous les autres dons qui se répandent sur la terre, et qui servent à la sanctification des âmes ; c'est de la que partent toutes les grâces (…) de l'Église, et de là qu'ils tirent toute leur vertu ; c'est de là que nous sont communiqués tous les secours intérieurs et spirituels qui nous fortifient, toutes les lumières qui nous éclairent, toutes les vues qui nous conduisent, tous les sentiments qui nous touchent, tout ce qui nous approche de Dieu, qui nous convertit à Dieu, qui nous élève et nous unit à Dieu.

Ah ! Seigneur, il est bien vrai que vous êtes le Sauveur du monde . Nul autre que vous ne pouvait l'être, puisque nul autre ne pouvait satisfaire pour les péchés du monde, ni ne pouvait sanctifier le monde. Vous avez fait l'un et l'autre, et comment l'avez-vous fait? avec quelle effusion de vos miséricordes ! avec quelle plénitude et quelle perfection ! Mais hélas! s'il ne manque rien à notre rédemption de la part de ce Dieu Sauveur, n'y manque-t-il rien de notre part ? Car ne nous flattons point, dit saint Augustin : le même Dieu qui nous a créés sans nous ne veut point nous sauver sans nous.

En effaçant le péché, il n'a point prétendu nous dégager de l'obligation d'effacer nous-mêmes nos péchés et de les expier, autant que nous le pouvons et que nous le devons. Et en nous comblant de ses grâces, il nous a ordonné de ne pas les recevoir en vain, mais d'y être fidèles et de les faire valoir. Selon ces deux devoirs si indispensables, jugeons-nous nous-mêmes, et voyons si notre espérance en Jésus-Christ est bien fondée, et si ce n'est point une espérance présomptueuse.

Troisième point. — Rédemption la plus universelle dans son étendue. Tous les hommes y sont compris : tous en général, chacun en particulier.

1° Tous en général : ce n'est point seulement pour une nation que Jésus-Christ est venu et qu'il a été envoyé, mais pour tous les peuples et toutes les contrées de la terre. Car auprès du Seigneur, dit l'apôtre saint Paul, il n'y a ni Juif, ni Gentil, ni circoncis, ni incirconcis, ni Scythe, ni Barbare ; mais Jésus-Christ est tout , et tout est en Jésus-Christ. Ce n'est point seulement pour certaines conditions. Le Dieu que nous adorons n'a acception de personne  : ni de celui qui est dans la grandeur, ni de celui qui est dans l'abaissement, ni du riche , ni du pauvre, ni du monarque, ni du sujet, ni de l'affranchi, ni de l'esclave. Ce n'est point seulement pour les fidèles et pour un petit nombre de prédestinés, mais pour les infidèles et les idolâtres, mais pour les pécheurs, mais même pour les réprouvés. Le Père des miséricordes a fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants ; et sans exception, il a fait couler sur les uns et sur les autres la rosée du ciel, et les saintes influences de sa grâce.

2° Chacun en particulier. C'est ce que nous enseigne expressément le Prince des apôtres dans sa seconde Épître, où nous lisons ces paroles si claires et si décisives : Le Seigneur use de patience à cause de vous, ne voulant point que pas un périsse, mais que tous aient recours à la pénitence . D'où vient que saint Jérôme n'a pas craint d'avancer cette proposition : que Jean-Baptiste, en disant de Jésus-Christ : Voilà celui qui efface les péchés du monde, eût été dans l'erreur et nous eût trompés avec lui, s'il y avait un seul homme dont les péchés n'eussent pas été effacés par la médiation de ce divin Sauveur. Sur quoi saint Bernard ajoute (et ceci est bien remarquable) que comme tous les êtres créés peuvent dire chacun à Dieu : Vous êtes mon Créateur ; ainsi tous les hommes peuvent chacun lui dire : Vous êtes mon Rédempteur. Vérités constantes dans l'Église chrétienne; vérités fondées sur les sacrés oracles du Saint-Esprit, sur les écrits des apôtres, sur la tradition des Pères, sur la créance commune et orthodoxe, sur la raison même éclairée de la foi et dirigée par la foi. Car, sans cela, quel fonds pourrions-nous faire sur la Providence divine, et qui pourrait s'assurer qu'elle ne lui a pas manqué?

Non, elle n'a manqué à personne ; mais voici le renversement. Dieu a voulu et veut encore sauver tous les hommes ; mais de tous les hommes combien y en a-t-il qui veuillent leur propre salut : qui le veuillent, dis-je, sincèrement, efficacement? Tous sont appelés à ce salut éternel, tous pour cela ont eu le même Rédempteur, et néanmoins il n'y a que très-peu d'élus: pourquoi? parce qu'il n'y en a que très-peu qui veuillent l'être, que très-peu qui travaillent à l'être, que très-peu qui prennent les moyens de l'être. Confions-nous en Jésus-Christ et en ses mérites; mais souvenons-nous qu'on n'y participe qu'en participant à ses souffrances et à ses travaux, qu'en observant ses préceptes, qu'en se conformant à ses exemples, qu'en imitant ses vertus.
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Message  gabrielle Mar 22 Déc 2015, 8:11 am

MARDI.

Jean-Baptiste perfectionnant les peuples par l'amour de Jésus-Christ.

SERMON SUR LA DÉVOTION ENVERS JÉSUS-CHRIST.


L'ami de l'époux, qui est présent et qui l'écoute, met toute sa joie à entendre la voix de l'époux : et voilà ce qui rend ma joie parfaite. (Joan., III, 29.)

Bourdaloue a écrit:Premier point. — Dévotion envers Jésus-Christ, dévotion la plus sainte en elle-même. Doublement sainte, soit par l'objet qu'elle se propose, soit par l'esprit qui l'anime.

1° Dévotion sainte par l'objet qu'elle se propose. C'est le Verbe éternel de Dieu, le Fils unique de Dieu, le Saint des saints. Les autres dévotions sont saintes. C'est une sainte dévotion que d'honorer les saints, qui sont les amis de Dieu et les héritiers de son royaume. C'est une sainte dévotion que d'honorer les anges bienheureux qui assistent autour du trône de Dieu, et qui sont ses ministres et ses ambassadeurs. C'est une dévotion encore plus sainte d'honorer la mère de Dieu, que les mérites de ses vertus et l'éclat de sa dignité ont portée au plus haut point de l'élévation, et qui dans le ciel, au-dessus de tout ce qui n'est pas Dieu, tient le premier rang.

Tout cela est vrai : mais en tout cela notre culte, après tout, n'a pour objet prochain et immédiat que de pures créatures. Ce sont des élus de Dieu, des favoris de Dieu, ce sont des saints; mais toute leur sainteté ne peut entrer en comparaison avec la sainteté de l'Homme-Dieu. Si donc, à raison de leur sainteté et à proportion de leur sainteté, le culte qu'on leur rend est saint, combien plus le doit être le culte que nous rendons, dans l'adorable personne de Jésus-Christ, à la sainteté même incarnée? Culte si agréable à Dieu, qu'il en a fait un commandement exprès. non-seulement aux hommes qui vivent sur la terre, mais aux principautés et aux puissances célestes. Car, selon le témoignage de saint Paul, c'est de ce Dieu-Homme, de ce Fils premier-né entrant dans le monde, que le Père tout-puissant a dit : Que tous les anges de Dieu l'adorent.

2° Par l'Esprit qui l'anime. Esprit de religion, esprit d'amour, esprit de reconnaissance : voilà les grands et puissants motifs de notre dévotion envers Jésus-Christ, et est-il rien de plus saint que ces sentiments? Esprit de religion qui nous remplit de la plus haute idée de Jésus-Christ et de ses grandeurs ; qui, par la foi, nous le fait reconnaître et envisager comme la sagesse incréée, la parole de Dieu, la force et la vertu de Dieu ; comme la splendeur de la gloire, l'image de la substance du Père, en qui il a mis ses complaisances et en qui réside la plénitude de la divinité ; comme le principe et la fin, le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs, par qui toutes choses subsistent, et ayant sur toutes choses l'empire et la prééminence. Expressions de l'Écriture, et divines qualités d'où nous concluons avec l'Apôtre qu'il est digne de tous nos respects, et qu'au nom de Jésus tout ce qu'il y a dans le ciel, sur la terre et dans les enfers, doit fléchir le genou et lui rendre hommage.

Esprit d'amour, qui nous le fait plus particulièrement envisager selon les rapports qu'il a avec nous et que nous avons avec lui; qui nous le fait considérer comme l'auteur de notre salut, comme le pacificateur entre Dieu et nous, et le médiateur de notre réconciliation : comme le pontife de la loi nouvelle, le grand prêtre assis à la droite de Dieu, et toujours vivant pour prendre toujours nos intérêts et intercéder en notre faveur, comme le chef du corps de l'Église, dont nous sommes les membres ; comme notre frère, en qualité d'homme semblable à nous, tout Dieu qu'il est. Vues également solides et touchantes. La juste conséquence qui en suit, c'est le beau sentiment du maître des Gentils: Qui nous séparera de la charité de Jésus-Christ ? ou cet autre: Quiconque n’aime pas Notre-Seigneur Jésus-Christ, qu'il soit anathème.

Esprit de reconnaissance, qui nous fait descendre dans le détail de tous les biens qui nous sont venus par ce Rédempteur du monde; qui nous retrace dans le souvenir comment il a quitté le sein de son Père et il s'est abaissé jusqu'à nous ; comment il s'est revêtu de notre chair et chargé de toutes nos misères, pour demeurer parmi nous; comment, dans le cours de sa vie mortelle, il a conversé avec nous; comment il a souffert pour nous, il est mort pour nous; comment, dans son retour même au ciel, il n'a point voulu nous priver de sa présence, mais il est toujours resté au milieu de nous. Toutes ces considérations pénètrent une âme, la ravissent, l'enflamment, l'attachent pour jamais à son bienfaiteur et à son Sauveur, et, dans l'ardeur de son zèle, lui font dire sans cesse avec le Prophète : Que donnerai-je à celui qui m'a tout donné , et que ferai-je pour celui qui a tout fait pour moi?

Or, encore une fois, une dévotion établie sur de tels fondements, n'est-ce pas de toutes les dévotions la plus sainte? Aussi était-ce la dévotion de saint Paul. Il n'y a qu'à voir ses Epîtres : elles sont toutes remplies de Jésus-Christ, et il n'y est presque fait mention que de Jésus-Christ, tant il avait Jésus-Christ vivement imprimé et dans l'esprit et dans le cœur. Aussi était-ce la dévotion de l'Église. De quoi est-elle occupée, que de chanter les louanges de Jésus-Christ, que de célébrer les mystères de Jésus-Christ, que d'offrir le sacrifice de Jésus-Christ: et adresse-t-elle une prière à Dieu où elle ne fasse entrer Jésus-Christ? Aussi est-ce été la dévotion des saints, surtout de saint Bernard : Quoi que je lise, disait-il, je ne m'affectionne à rien, si je ne lis le nom de Jésus-Christ ; quoi que j'entende, je ne coûte rien, si je n'y entends le nom de Jésus-Christ. Toute nourriture est insipide à mon âme sans cet assaisonnement et ce sel divin.

Quelle est donc l'illusion de notre siècle? illusion assez commune dans le monde chrétien. Chacun se fait des dévotions à sa mode, des dévotions selon son sens. A Dieu ne plaise que nous les blâmions! mais ce qu'il y a de blâmable, c'est la préférence qu'on donne à ces dévotions nouvelles et arbitraires, au-dessus des dévotions essentielles dans le christianisme, telle que la dévotion envers Jésus-Christ.

Second point. — Dévotion envers Jésus-Christ, dévotion la plus sanctifiante par rapport à nous. Elle l'est, et dans les pratiques où elle s'exerce, et dans les effets qu'elle produit.

Dévotion sanctifiante dans les pratiques où elle s'exerce. Ces pratiques se réduisent à trois : adoration, invocation, imitation.

Adoration : sous ce terme est compris tout ce que suggère à l'âme fidèle un saint désir d'honorer Jésus-Christ. Car que fait-elle, cette âme zélée pour l'honneur de l'adorable et aimable époux à qui elle s'est vouée, et dont elle voudrait répandre la gloire dans toute l'étendue de l'univers? (…)

La nuit et le jour, elle n'a, pour ainsi dire, et dans le cœur et dans la bouche, que Jésus-Christ, qu'elle réclame sans cesse et qu'elle invoque ; et de cette sorte toutes ses délibérations, toutes ses résolutions, toutes ses actions sont sanctifiées, parce qu'elle n'entreprend rien ni ne fait rien qu'au nom de Jésus-Christ, que sous sa conduite et par son secours. Imitation : voilà le point capital, voilà, en quelque dévotion que ce soit, ce qu'il y a d'essentiel : s'efforcer d'acquérir une sainte ressemblance avec le Fils de Dieu, notre grand et unique modèle. Or, n'est-ce pas à quoi l'âme s'applique avec d'autant plus de soin, qu'elle s'est plus solidement et plus étroitement liée à Jésus-Christ? Toute son étude, c'est Jésus-Christ, pour apprendre à penser comme lui, à parler comme lui, à agir comme lui. Ce n'est point seulement sur le Thabor qu'elle veut le suivre, mais au Calvaire; ce n'est point seulement à sa gloire qu'elle veut avoir part, mais à sa pauvreté, mais à ses humiliations, mais à ses souffrances. Tout état où elle se croit conforme à Jésus-Christ est pour elle l'état le plus heureux.

2° Dévotion sanctifiante dans les effets qu'elle produit. Car de là l'union la plus intime et le commerce le plus sacré entre Jésus-Christ et l'âme dévote. C'est alors qu'elle peut bien dire avec l'Apôtre : Je vis, non plus moi-même; mais Jésus-Christ vit en moi. De là cette abondance de grâces dont Jésus-Christ la comble : il lui ouvre tous ses trésors ; et qu'épargne-t-il à son égard ? de quelles lumières ne l'éclaire-t-il pas? quelles vues, quels sentiments ne lui donne-t-il pas? de quelle onction ne la remplit-il pas? De là même aussi ces progrès qu'elle fait d'un jour à l'autre, allant toujours, comme le juste, de vertus en vertus, et accumulant mérites sur mérites.

Quoi qu'il en soit, nous sommes chrétiens, et, en qualité de chrétiens, quelle dévotion peut mieux nous convenir que la dévotion envers Jésus-Christ? Souvenons-nous que c'est la pierre fondamentale sur qui doit porter tout l'édifice de notre perfection; souvenons-nous qu'il n'y a point d'autre nom que le sien par qui nous puissions obtenir le salut. Nous vivons sous sa loi, il nous a marqués de son sceau, il nous a revêtus de ses livrées : soyons par amour à notre Maître, puisque nous lui appartenons déjà par un droit inviolable; et que jamais rien ne nous sépare de la charité de Jésus-Christ, ni dans le temps, ni dans l'éternité.
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Message  gabrielle Mer 23 Déc 2015, 8:28 am

MERCREDI.

Jean-Baptiste perfectionnant les peuples par une vertu solide et droite.

SERMON SUR LA DROITURE ET L'ÉQUITÉ CHRÉTIENNE.

C'est à lui de croître,  et à moi de déchoir. (Joan., III, 30.)

Bourdaloue a écrit:Premier point. — Se faire justice à soi-même : c'est s'estimer précisément soi-même tel qu'on est, et ne vouloir point être estimé des autres au delà de ce qu'on est.

1° S'estimer précisément soi-même tel qu'on est, et rien davantage, c'est la règle la plus raisonnable et la plus juste; mais notre amour-propre ne peut s'en accommoder, et il lui faut quelque chose de plus. De là vient que nous aimons à nous tromper par de flatteuses images que nous nous faisons de nous-mêmes, et qui nous représentent à notre imagination tout autres que nous ne sommes ; fausses peintures qui nous plaisent et dont nous nous occupons, dont nous nous infatuons, où nous portons tous nos regards et où nous les arrêtons. Car, de nous considérer nous-mêmes dans la vérité, et pour cela de rentrer en nous-mêmes, de nous examiner à fond, de bien démêler, s'il est permis de parler ainsi, dans le champ de notre âme, le bon et le mauvais grain, c'est ce qui nous humilierait, parce ce que c'est ce qui nous mettrait devant les yeux des taches qui nous blesseraient la vue, et ce qui rabattrait les idées favorables que nous avons conçues de nos avantages et de nos perfections.

Comme donc nous avons de la peine à nous humilier, nous avons la même peine à nous détromper de l'opinion, quoique erronée, que nous nous sommes formée de nous-mêmes. Or, une vertu solidement et vraiment chrétienne nous guérit de cette illusion: comment? parce que dès que c'est une vertu solidement chrétienne, c'est une vertu humble, et que l'humilité nous empêche de nous élever au-dessus de nous-mêmes, et nous dégage de toutes ces pensées vaines qui emportent les âmes faibles, et où elles s'évanouissent.

D'où il arrive que nous sommes alors plus disposés à juger sainement de notre état, à reconnaître de bonne foi nos imperfections et nos défauts, à voir ce qui nous convient et ce qui ne nous convient pas, de quoi nous sommes capables et de quoi nous ne le sommes pas ; à dire enfin, avec le Prophète-royal : Seigneur, mon cœur ne s'est point enflé ; je m'en suis tenu à ce que j'étais, et je ne me suis point égaré en de spécieuses chimères, ni dans une présomptueuse estime de moi-même . Qu'une telle disposition marque de fermeté et de sagesse! mais qu'elle est rare! et l'expérience ne nous convainc-t-elle pas tous les jours qu'il y n'a presque personne dans la vie, et dans toutes les conditions de la vie, qui veuille de la sorte, ni qui sache se rendre à soi-même la justice qui lui est due?

2° Ne vouloir point être estimé des autres au delà de ce qu'on est. Malgré les déguisements et les artifices de la nature, qui nous cache nos faiblesses et notre peu de suffisance, nous ne laissons pas souvent de les apercevoir: mais quelle est notre ressource? c'est de les dérober, autant qu'il nous est possible, à la connaissance du public. Nous voulons qu'on nous estime, qu'on nous traite avec honneur, qu'on nous fasse monter à certains rangs, qu'on nous donne certaines places, comme si rien ne nous manquait pour cela, et que nous eussions droit d'y prétendre.

Si l'on nous témoigne le moindre mépris, nous en sommes outrés de douleur ; si quelqu'un obtient la moindre préférence sur nous, nous éclatons en plaintes et en murmures ; si l'on entreprend de nous faire sur quelque article la moindre remontrance, nous la prenons pour une injure, et nous nous en offensons. Quel serait le remède? cet esprit droit et chrétien, dont il est ici question. Avec ce fond d'équité et de droiture, on ne cherche point à paraître ce qu'on n'est pas, ni à se faire valoir plus qu'on ne vaut. Tel qu'on se connaît, tel on consent d'être connu, sans ambitionner des titres, des honneurs, des distinctions, qu'on sait être au-dessus de soi.

Des prêtres et des lévites furent envoyés de Jérusalem à Jean-Baptiste pour lui demander s'il était le Messie, ou du moins s'il était Elie; mais en deux mots il se contenta de leur répondre nettement et simplement : Je ne suis ni l'un ni l’autre. Ils insistèrent; et, le pressant de s'expliquer : Qui êtes-vous donc, lui dirent-ils, et quel témoignage rendez-vous de vous-même ? Mais lui, comme il était le précurseur de Jésus-Christ, il se contenta encore, avec la même sincérité et la même simplicité, de se faire connaître par l'office dont il était chargé, et dont il s'acquittait : Je suis la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin au Seigneur. Excellent modèle! mais qui est-ce qui le suit, et où trouve-t-on cette candeur d'âme, cette modestie à l'épreuve des plus fortes tentations? C'est une des plus belles vertus, c'est une vertu héroïque, mais bien peu commune. Une justice si rigoureuse n'est guère de notre goût, dès que c'est nous-mêmes qu'elle regarde.

Second point. — Faire justice au prochain, c'est faire intérieurement du prochain l'estime qu'il mérite, et du reste le voir sans peine dans le degré d'élévation où, par son mérite, il est monté.

1° Faire intérieurement du prochain l'estime qu'il mérite. Puisqu'il la mérite, cette estime, pourquoi la refusons-nous ? C'est que la passion nous domine et nous séduit; c'est que l'envie nous met un voile sur les yeux, ou qu'elle répand sur le mérite d'autrui un nuage qui l'obscurcit et qui nous empêche de le découvrir ; c'est que la malignité de notre cœur nous peint la plupart des objets avec de fausses couleurs, et qu'elle les diminue ou les grossit, selon qu'ils sont conformes à nos inclinations ou qu'ils y sont opposés. Or, étant naturellement jaloux de notre propre excellence, il s'ensuit de là que nous sommes beaucoup plus enclins à rabaisser le prochain dans notre estime, qu'à le relever. Car, de nous en faire un portrait aussi avantageux qu'il devrait l'être, de reconnaître toutes ses bonnes qualités et toutes ses vertus, ce serait ou l'égaler à nous, ou même lui donner dans notre esprit l'ascendant sur nous, et voilà ce que nous n'aimons pas. Que faisons-nous donc? Nous avons, suivant le langage de l'Écriture, un poids et un poids, une mesure et une mesure. Selon l'une, nous nous jugeons nous-mêmes avec toute l'indulgence possible, et selon l'autre, nous jugeons le prochain avec une sévérité extrême. Tout ce qu'il y a de bien en lui, nous nous le représentons sous des images qui l'altèrent, qui l'affaiblissent, qui le défigurent; et tout ce qu'il peut y avoir de mal ou de moins parfait, nous l'augmentons, nous l'exagérons, nous l'outrons.

Injustice que Jésus-Christ reprochait avec tant de raison aux pharisiens : Comment voyez-vous une paille dans l'œil de votre frère, tandis que vous ne voyez pas une poutre dans votre œil ? Ce n'est point là ce caractère de droiture dont Jean-Baptiste nous a donné, dans sa personne et dans toute sa conduite, un exemple merveilleux. Dès que le Fils de Dieu paraît dans le monde, de quels sentiments d'admiration, de vénération, de religion est-il rempli et témoigne-t-il l'être pour ce Sauveur envoyé du ciel! Quand nous saurons ainsi nous dégager de toute préoccupation, de tout intérêt propre, ou que nous n'aurons point d'autre intérêt que celui de la vérité et de la charité, c'est alors que nous estimerons le mérite partout où il est, parce que nous n'aurons plus sur les yeux le bandeau qui nous le cache ; nous le verrons dans toute son étendue et dans toute sa perfection, et nous lui rendrons au dedans de nous-mêmes le légitime hommage qui lui appartient. Mais cela suppose une piété bien épurée, et bien détachée d'elle-même :

et comme il en est très-peu de cette sorte, il n'est que trop ordinaire, à un nombre infini de gens, dévots de profession ou plutôt de nom, d'être les plus rigides censeurs du prochain, et de se rendre, dans l'usage de la vie, les plus dédaigneux et les plus méprisants.

2° Voir sans peine le prochain dans le degré d'élévation où par son mérite il est monté. Il y a des mérites si évidents et si connus, qu'on ne peut se les déguiser à soi-même, et qu'on est forcé d'en convenir. Mais voici le comble de l'injustice : au lieu de dire, comme saint Jean : C'est à lui de croître ; on voudrait disputer à un homme la place qu'il occupe, et la lui enlever, quoiqu'on ne puisse néanmoins se dissimuler qu'il y est monté par la bonne voie, et qu'il a toutes les dispositions et toutes les conditions requises pour la remplir dignement. On l'avoue, on en est persuadé; mais malgré cette persuasion et cet aveu, on ne le voit qu'à regret dans un rang, dans une dignité, dans un ministère où l'on aspirait, et qu'on prétendait obtenir, sinon par le mérite, du moins par l'intrigue et par la faveur. Car telle est, présentement plus que jamais, l'iniquité du monde.

Le plus faible moyen pour s'y avancer, c'est le mérite : ce qui fait que, sans égard au mérite d'un compétiteur, ni à ses talents, beaucoup supérieurs aux nôtres, on ne craint point toutefois d'entrer en concurrence avec lui, parce qu'on est appuyé d'ailleurs de puissants secours et de patrons sur qui l'on compte et dont on se prévaut. Si donc il arrive qu'on ne réussisse pas, et que l'autre ait le dessus, quoique ce soit une justice qui lui est faite, on en est vivement touché, et l'on ne peut digérer sur cela son chagrin. Où est la raison? où est la probité naturelle? où est le christianisme? Rendons, dit le grand Apôtre, rendons à chacun ce que nous lui devons : le tribut à qui est dû le tribut, et l’honneur à qui est dû l'honneur .

Saint Paul faisait cette leçon aux premiers fidèles, et leur prescrivait cette règle à l'égard même des païens et des idolâtres : combien plus des chrétiens doivent-ils entre eux l'observer! S'il a plu à la Providence d'exalter celui-ci et de le placer sur le chandelier, quel droit avons-nous de nous opposer à ses desseins? Si celui-là se trouve plus digne que nous du crédit où il est et des emplois qu'on lui confie, soit dans l'Église, soit dans le siècle, que ne lui cédons-nous de bonne grâce un avantage qui lui est justement acquis? C'est notre frère; qu'il croisse. Pour penser de la sorte, il suffit d'être homme : mais, à plus forte raison, c'est ainsi que pense une âme bien fondée dans les principes de l'Évangile, qui est la droiture même et la souveraine justice.
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Message  gabrielle Jeu 24 Déc 2015, 7:59 am

Temps de l'Avent 2015 - Page 2 Mangeo10

AUJOURD'HUI VOUS SAUREZ QUE LE SEIGNEUR VIENT NOUS SAUVER,
ET DEMAIN MATIN VOUS VERREZ SA GLOIRE.
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Temps de l'Avent 2015 - Page 2 Empty Re: Temps de l'Avent 2015

Message  ROBERT. Jeu 24 Déc 2015, 10:27 am

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Je peux me tromper; j'ai une idée quant à ce que c'est. Demain, je verrai Sa gloire...
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