Une statue grossière suffisait pour entretenir les sentiments de piété d'un heureux solitaire.

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Message  Roger Boivin Ven 16 Oct 2015, 10:01 pm



En nous exprimant l’invisible, les formes sensibles jouent un rôle plus important encore, un rôle indispensable : en effet, sans elles, cet invisible nous resterait inconnu, et nous ne jouirions pas de la beauté.

Sans doute, de même que, dans la nature, une belle âme peut nous apparaître à travers un voile plus épais, des traits désagréables, de même quelquefois, dans les arts, une belle pensée, un beau sentiment nous sera exprimé par des formes incorrectes. Quelquefois un peintre ou un sculpteur, ignorant les procédés de son art, produira des œuvres dans lesquelles, malgré l’imperfection des formes, nous reconnaîtrons l’expression des sentiments les plus élevés et les plus dignes de notre admiration. C’est ce que l’on remarque dans les œuvres exécutées quand les lois de l’art étaient encore ignorées, dans les peintures des catacombes, dans les œuvres d’Angelico de Fiesole.

Quelquefois aussi une œuvre presque informe, une statue ou une peinture, suffit pour satisfaire tel individu, à cause de ses dispositions spéciales ou de son ignorance de l’art. Peut-être elle excite en son âme les sentiments de la plus tendre piété ou de l’enthousiasme patriotique le plus exalté. Qu‘il nous soit permis de citer ce fait, raconté par M. Rio dans son Histoire de la peinture :

« Nous voguions, dit-il, vers les ruines de Torcello, par une belle matinée de printemps, quand, en débouchant du canal qui traverse Murano dans toute sa longueur, nous aperçûmes une petite île couverte d’arbres en fleur, derrière laquelle était cachée une très-modeste chaumière, que nous découvrîmes bientôt. Près de l’endroit où aborda notre gondole, nous aperçûmes une madone sculptée dans le mur, avec une lampe qui brûlait devant elle, des fleurs fraîchement cueillies et une bourse attachée à une longue perche, pour recueillir l’aumône des pêcheurs et des gondoliers. En débarquant pour visiter le jardin, nous trouvâmes un vieillard assis sur le seuil de la porte, et la douceur de son accent, jointe à la sérénité de son noble visage, nous ayant encouragés à l’interroger sur le genre de vie qu’il menait dans cette solitude, nous apprîmes de lui les détails les plus intéressants sur sa propre histoire, sur celle de son île, jadis occupée par des moines franciscains, que l‘invasion étrangère en avait chassés ; sur celle de la madone, que les mains profanes des soldats français avaient vainement essayé d’arracher de son tabernacle de pierre ; or, cette dernière partie de son récit était plus fortement accentuée que les autres. Il y avait plus de vingt-cinq ans qu’il vivait presque constamment seul sur cet espace si resserré ; et quand nous lui demandâmes si cet isolement perpétuel ne l’attristait pas quelquefois, il nous répondit avec un sourire de confiance, accompagné d’un geste très expressif, en nous montrant la madone, qu’ayant toujours eu la mère de Dieu près de lui, il n’avait jamais senti sa solitude ; que le voisinage d’une telle prétectrice suffisait pour le rendre heureux, et que l’entretien de la lampe et le renouvellement des fleurs faisaient sa plus douce occupation (1). »

Cette statue grossière suffisait donc pour entretenir les sentiments de piété de cet heureux solitaire.


(1) Histoire de la peinture, par M. Rio, 1" édit, p. 16A.




LE BEAU DANS LA NATURE ET DANS L'ART - Chanoine Gaborit - page 3-4-5 du tome 2 ( ce livre contient les deux tomes) :

https://books.google.ca/books?pg=PA258&id=mBRZAAAAcAAJ&hl=fr#v=onepage&q&f=false

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Message  gabrielle Sam 17 Oct 2015, 8:19 am

Il avait dépassé la statue.
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Message  ROBERT. Sam 17 Oct 2015, 12:49 pm

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Si je me souviens bien, Saint Joseph de Cupertino n'a-t-il pas vécu une aventure semblable ?
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