Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XV a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XV.
LA GRÂCE DE DIEU, QUI NOUS FAIT REVENIR DE LA PROFONDEUR DE
NOTRE ANCIENNE MISÈRE, EST UN ACHEMINEMENT AU SIÈCLE FUTUR.
Aussi bien, ce joug pesant qui a été imposé aux fils d’Adam, depuis leur sortie du sein de leur mère jusqu’au jour de leur ensevelissement au sein de la mère commune, est encore pour nous, dans notre misère, un enseignement admirable: il nous exhorte à user sobrement de toutes choses, et nous fait comprendre que cette vie de châtiment n’est qu’une suite du péché effroyable commis dans le Paradis, et que tout ce qui nous est promis par le Nouveau Testament ne regarde que la part que nous aurons à la vie future; il faut donc accepter cette promesse comme un gage et vivre dans l’espérance, en faisant chaque jour de nouveaux progrès et mortifiant par l’esprit les mauvaises inclinations de la chair1 car "Dieu connaît ceux qui sont à lui2"; et "tous ceux qui sont conduits par l’esprit de Dieu sont enfants de Dieu3"; enfants par grâce, et non par nature, n’y ayant qu’un seul Fils de Dieu par nature, qui, par sa bonté, s’est fait fils de l’homme, afin que nous, enfants de l’homme par nature, nous devinssions par grâce enfants de Dieu.
Toujours immuable, il s’est revêtu de notre nature pour nous sauver, et, sans perdre sa divinité, il s’est fait participant de notre faiblesse, afin que, devenant meilleurs, nous perdions ce que nous avons de vicieux et de mortel par la communication de sa justice et de son immortalité, et que nous conservions ce qu’il a mis de bon en nous dans la plénitude de sa bonté. De même que nous sommes tombés, par le péché d’un seul homme, dans une si déplorable misère4, ainsi nous arrivons, par la grâce d’un seul homme, mais d’un homme-Dieu, à la possession d’un si grand bonheur. Et nul ne doit être assuré d’avoir passé du premier état au second, qu’il ne soit arrivé au lieu où il n’y aura plus de tentation, et qu’il ne possède cette paix qu’il poursuit à travers les combats que la chair livre contre l’esprit et l’esprit contre la chair5. Or, une telle guerre n’aurait pas lieu, si l’homme, par l’usage de son libre arbitre, eût conservé sa droiture naturelle; mais par son refus d’entretenir avec Dieu une paix qui faisait son bonheur, il est contraint de combattre misérablement contre lui-même.
Toutefois cet état vaut mieux encore que celui où il se trouvait avant de s’être converti à Dieu: il vaut mieux combattre le vice que de le laisser régner sans combat, et la guerre, accompagnée de l’espérance d’une paix éternelle, est préférable à la captivité dont on n’espère point sortir. Il est vrai que nous souhaiterions bien de n’avoir plus cette guerre à soutenir, et qu’enflammés d’un divin amour, nous désirons ardemment cette paix et cet ordre accomplis, où les choses d’un prix inférieur seront pour jamais subordonnées aux choses supérieures. Mais lors même, ce qu’à Dieu ne plaise, que nous n’aurions pas foi dans un si grand bien, nous devrions toujours mieux aimer ce combat, tout pénible qu’il puisse être, qu’une fausse paix achetée par l’abandon de notre âme à la tyrannie des passions.
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1. Romains VIII, 13. —2. Timothée II, 19. —3. Romains VIII, 14. —4. Romains V, 12. — 5. Galates V, 17.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XVI a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XVI.
DES LOIS DE GRÂCE QUI S’ÉTENDENT SUR TOUTES
LES ÉPOQUES DE LA VIE DES HOMMES RÉGÉNÉRÉS.
Telle est la miséricorde de Dieu à l’égard des vases de miséricorde qu’il a destinés à la gloire, que la première et la seconde enfance de l’homme, l’une livrée sans défense à la domination de la chair, l’autre en qui la raison encore faible, quoique aidée de la parole, ne peut combattre les mauvaises inclinations, toutes deux ne laissent pas cependant de passer de la puissance des ténèbres au royaume de Jésus-Christ, sans même traverser le purgatoire, quand une créature humaine vient à mourir à cet âge où elle n’est pas encore capable d’accomplir les commandements de Dieu, pourvu qu’elle ait reçu les sacrements du Médiateur1 . Car la seule régénération spirituelle suffit pour rendre impuissante à nuire après la mort l’alliance que la génération charnelle avait contractée avec la mort. Mais quand on est arrivé à un âge capable de discipline, il faut commencer la guerre contre les vices, et s’y porter avec courage, de peur de tomber en des péchés qui méritent la damnation. Nos mauvaises inclinations sont plus faciles à surmonter, quand elles ne sont pas encore fortifiées par l’habitude; si nous les laissons prendre empire sur nous et nous maîtriser, la victoire est plus difficile, et on ne les surmonte véritablement que lorsqu’on le fait par amour de la véritable justice, qui ne se trouve qu’en la foi de Jésus-Christ.
Car si la loi commande sans que l’esprit vienne à son secours, la défense qu’elle fait du péché ne sert qu’à en augmenter le désir; si bien qu’on y ajoute encore par la violation de la loi. Quelquefois aussi on surmonte des vices manifestes par d’autres qui sont cachés et que l’on prend pour des vertus, quoique l’orgueil et une vanité périlleuse en soient les véritables principes. Les vices ne sont donc vraiment vaincus que lorsqu’ils le sont par l’amour de Dieu, amour que Dieu seul donne, et qu’il ne donne que par le Médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme, qui a voulu participer à notre mortalité misérable pour nous faire participer à sa divinité.
Or, ils sont en bien petit nombre ceux qui ont atteint l’adolescence sans commettre aucun péché mortel, sans tomber dans aucun excès, dans aucune impiété, assez heureux et assez forts pour avoir comprimé par la grâce abondante de l’esprit tous les mouvements déréglés de la convoitise. La plupart, après avoir reçu le commandement de la loi, l’ont violé, et, s’étant laissé emporter au torrent des vices, ont eu recours ensuite à la pénitence; de la sorte, assistés de la grâce de Dieu, ils reprennent courage, et leur esprit soumis à Dieu parvient à soumettre la chair.
Que celui donc qui veut se soustraire aux peines éternelles, ne soit pas seulement baptisé, mais justifié en Jésus-Christ, afin de passer véritablement de l’empire du diable sous la puissance du Sauveur. Et qu’il ne compte pas sur des peines purifiantes, si ce n’est avant le dernier et redoutable jugement ! On ne saurait nier pourtant que le feu, même éternel, ne fasse plus ou moins souffrir les damnés, selon la diversité de leurs crimes; et qu’il ne doive être moins ardent pour les uns, plus ardent pour les autres, soit que son ardeur varie suivant l’énormité de la peine, soit qu’elle reste égale, mais que tous ne la sentent pas également.
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1. Comp. saint Augustin, Epist. XCVIII ad Bonifacium.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XVII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XVII.
DE CEUX QUI PENSENT QUE NUL HOMME
N’AURA À SUBIR DES PEINES ÉTERNELLES.
Il me semble maintenant à propos de combattre avec douceur l’opinion de ceux d’entre nous qui, par esprit de miséricorde, ne veulent pas croire au supplice éternel des damnés, et soutiennent qu’ils seront délivrés après un espace de temps plus ou moins long, selon la grandeur de leurs péchés. Les uns font cette grâce à tous les damnés, les autres la font seulement à quelques-uns. Origène est encore plus indulgent: il croit que le diable même et ses anges, après avoir longtemps souffert, seront à la fin délivrés de leurs tourments pour être associés aux saints anges. Mais l’Eglise l’a condamné justement pour cette erreur et pour d’autres encore, entre lesquelles je citerai surtout ces vicissitudes éternelles de félicité et de misère où il soumet les âmes. En cela, il se départ de cette compassion qu’il semble avoir pour les malheureux damnés, puisqu’il fait souffrir aux saints de véritables misères, en leur attribuant une béatitude où ils ne sont point assurés de posséder éternellement le bien qui les rend heureux1.
L’erreur de ceux qui restreignent aux damnés cette vicissitude et veulent que leurs supplices fassent place à une éternelle félicité est bien loin de celle d’Origène. Cependant, si leur opinion est tenue pour bonne et pour vraie, parce qu’elle est indulgente, elle sera d’autant meilleure et d’autant plus vraie qu’elle sera plus indulgente. Que cette source de bonté se répande donc jusque sur les anges réprouvés, au moins après plusieurs siècles de tortures. Pourquoi se répand-elle sur toute la nature humaine et vient-elle à tarir pour les anges ? Mais non, cette pitié n’ose aller aussi loin et s’étendre jusqu’au diable. Et pourtant, si un de ces miséricordieux se risquait à aller jusque-là, sa bonté n’en serait-elle pas plus grande ? Mais aussi son erreur serait plus pernicieuse et plus opposée aux paroles de Dieu.
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1. Sur les systèmes d’Origène, voyez Epiphane (Lettre à Jean de Jérusalem), saint Jérôme (Epist. LXI ad Pammachium et LXXV ad Vigilantium) et saint Augustin lui-même, Traité des hérésies, hér. XLIII. Saint Jérôme nous apprend aussi que les sentiments d’Origène furent condamnés par le pape Anastase. Ce ne fut que plus tard, après la mort de saint Augustin, qu’Origène fut condamné sous le pape Virgile et l’empereur Justinien, au cinquième concile œcuménique. Voyez les actes, de ce concile (act. IV, cap. 11) et Nicéphore Calliste, Lib. XVII, cap. 27, 28.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XVIII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XVIII.
DE CEUX QUI CROIENT QU’AUCUN HOMME NE SERA DAMNÉ
AU DERNIER JUGEMENT, À CAUSE DE L’INTERCESSION DES SAINTS.
D’autres encore, comme j’ai pu m’en assurer dans la conversation, sous prétexte de respecter l’Ecriture, mais en effet dans leur propre intérêt, font Dieu encore plus indulgent envers les hommes. Ils avouent bien que les méchants et les infidèles méritent d’être punis, comme l’Ecriture les en menace; mais ils soutiennent que lorsque le jour du jugement sera venu, la clémence l’emportera, et que Dieu, qui est bon, rendra tous les coupables aux prières et aux intercessions des saints.
Car, si les saints priaient pour eux, quand ils en étaient persécutés, que ne feront-ils point, quand ils les verront abattus, humiliés et suppliants? Et comment croire que les saints perdent leurs entrailles de miséricorde, surtout en cet état de vertu consommée qui les met à l’abri de toutes les passions? ou comment douter que Dieu ne les exauce, alors que leurs prières seront parfaitement pures? L’opinion précédente, qui veut que les méchants soient à la fin délivrés de leurs tourments, allègue en leur faveur ce passage du psaume: "Dieu oubliera-t-il sa clémence ? et sa colère arrêtera-t-elle le cours de ses miséricordes ?"1 .
Mais nos nouveaux adversaires soutiennent que ce même passage favorise bien mieux encore leur opinion. La colère de Dieu, disent-ils, veut que tous ceux qui sont indignes de la béatitude éternelle souffrent un supplice éternel, mais pour permettre qu’ils en souffrent un quelconque, si court qu’il soit, ne faut-il pas que sa colère arrête le cours de ses miséricordes ? Et c’est pourtant ce que nie le Psalmiste. Car il ne dit pas: Sa colère arrêtera-t-elle longtemps le cours de ses miséricordes ? mais il dit qu’elle ne l’arrêtera nullement.
Si l’on répond qu’à ce compte les menaces de Dieu sont fausses, puisqu’il ne condamnera personne, ils répliquent qu’elles ne sont pas plus fausses que celle qu’il fit à Ninive de la détruire2, ce qui pourtant n’arriva pas, bien qu’il l’en eût menacée sans condition. En effet, le Prophète ne dit pas: Ninive sera détruite, si elle ne se corrige et ne fait pénitence, mais il dit: "Encore quarante jours, et Ninive sera détruite". Cette menace était donc vraie, ajoutent-ils, puisque les Ninivites méritaient ce châtiment; mais Dieu ne l’exécuta point, parce que sa colère n’arrêta pas le cours de ses miséricordes, et qu’il se laisse fléchir à leurs cris et à leurs larmes.
Si donc, disent-ils, il pardonna alors, bien que cela dût contrister son prophète, combien sera-t-il plus favorable encore, quand tous ses saints intercéderont pour des suppliants ? Objecte-t-on que l’Ecriture n’a point parlé de ce pardon, c’est, à leur sens, afin d’effrayer un grand nombre de pécheurs par la crainte des supplices et de les obliger à se convertir, et aussi afin qu’il y en ait qui puissent prier pour ceux qui ne se convertiront pas. Ils ne prétendent pas néanmoins que l’Ecriture n’ait rien laissé entrevoir à ce sujet. Car à quoi s’applique, disent-ils, cette parole du psaume: "Seigneur, que la douceur que vous avez cachée à ceux qui vous craignent est grande et abondante !1"
Ne veut-elle pas nous faire entendre que cette douceur de la miséricorde de Dieu est cachée aux hommes pour les retenir dans la crainte ? Ils ajoutent que c’est pour cela que l’Apôtre a dit: "Dieu a permis que tous tombassent dans l’infidélité, afin de faire grâce à tous2"; montrant ainsi qu’il ne damnera personne.
Toutefois ceux qui sont de cette opinion ne l’étendent pas jusqu’à Satan et à ses anges. Car ils ne sont touchés de compassion que pour leurs semblables; et en cela ils plaident principalement leur cause, parce que, comme ils vivent dans le désordre et dans l’impiété, ils se flattent de profiter de cette impunité générale qu’ils couvrent du nom de miséricorde. Mais ceux qui l’étendent même au prince des démons et à ses satellites portent encore plus haut qu’eux la miséricorde de Dieu.
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1. Psaume LXXVI, 10. — 2. Jonas, III, 4.—1. Psaume XXX, 20. — 2. Romains XI, 32.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XIX a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XIX.
DE CEUX QUI PROMETTENT L’IMPUNITÉ DE TOUS LEURS PÉCHÉS,
MÊME AUX HÉRÉTIQUES, À CAUSE DE LEUR PARTICIPATION
AU CORPS DE JÉSUS-CHRIST.
Il y en a d’autres qui ne promettent pas à tous les hommes cette délivrance des supplices éternels, mais seulement à ceux qui, ayant reçu le baptême, participent au corps de Jésus-Christ, de quelque manière d’ailleurs qu’ils aient vécu, et en quelque hérésie, en quelque impiété qu’ils soient tombés. Et ils se fondent sur ce que le Sauveur a dit: "Voici le pain qui est descendu du ciel, afin que celui qui en mangera ne meure point. Je suis le pain descendu du ciel: si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement1". Il faut donc nécessairement, disent-ils, qu’à ce prix les hérétiques soient délivrés de la mort éternelle, et qu’ils passent quelque jour à l’éternelle félicité.
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1. Jean VI, 50-52.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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gras ajoutés.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XX a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XX.
DE CEUX QUI PROMETTENT L’INDULGENCE DE DIEU, NON À TOUS LES PÊCHEURS,
MAIS À CEUX QUI SE SONT FAITS CATHOLIQUES, DANS QUELQUES CRIMES
ET DANS QUELQUES ERREURS QU’ILS SOIENT TOMBÉS PAR LA SUITE.
Quelques-uns ne font pas cette promesse à tous ceux qui ont reçu le baptême de Jésus-Christ et participé au sacrement de son corps, mais aux seuls catholiques, alors même d’ailleurs qu’ils vivent mal. Ceux-là, disent-ils, sont établis corporellement en Jésus-Christ, ayant mangé son corps, non pas seulement en sacrement, mais en réalité. Et comme dit l’Apôtre: "Nous ne sommes tous ensemble qu’un même pain et qu’un même corps2";
Or, bien que les catholiques tombent ensuite dans l’hérésie, ou même dans l’idolâtrie, par cela seul qu’ils ont reçu le baptême de Jésus-Christ étant dans son corps, c’est-à-dire dans l’Eglise catholique, et ayant mangé le corps du Sauveur, ils ne mourront point éternellement, mais ils jouiront quelque jour de l’éternelle félicité. Et la grandeur de leur impiété rendra sans doute leurs peines plus longues, mais elle ne les rendra pas éternelles.
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2. I Corinthiens X, 17.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXI a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXI.
DE CEUX QUI CROIENT AU SALUT DES CATHOLIQUES QUI AURONT PERSÉVÉRÉ DANS
LEUR FOI, BIEN QU’ILS AIENT TRÈS-MAL VÉCU ET MÉRITÉ PAR LÀ LE FEU DE L’ENFER.
Mais d’autres, considérant cette parole de l’Ecriture: "Celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé3", ne promettent le salut qu’à ceux qui seront toujours demeurés dans l’Eglise catholique, quoiqu’ils aient d’ailleurs mal vécu. Ils disent qu’ils seront sauvés par l’épreuve du feu, en vertu de ce que dit l’Apôtre: "Personne ne peut établir d’autre fondement que celui qui est posé, savoir, Jésus-Christ. Or, on verra ce que chacun aura bâti sur ce fondement, si c’est de l’or, de l’argent et des pierres précieuses, ou du bois, du foin et de la paille; car le jour du Seigneur le manifestera, et le feu fera connaître quel est l’ouvrage de chacun: celui dont l’ouvrage demeurera en recevra la récompense; celui dont l’ouvrage sera brûlé en souffrira préjudice; il ne laissera pas pourtant d’être sauvé, mais par l’épreuve du feu1", Ils disent donc qu’un chrétien catholique, quelque vie qu’il mène, a Jésus-Christ pour fondement, lequel manque à tout hérétique retranché de l’unité du corps; et dès lors, dans quelque désordre qu’il ait vécu, comme il aura bâti sur le fondement de Jésus-Christ, bois, foin ou paille, peu importe, il sera sauvé par l’épreuve du feu, c’est-à-dire, après une peine passagère, délivré de ce feu éternel qui tourmentera les méchants au dernier jugement.
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3. Matthieu XXIV, 13. —1. I Corinthiens III, 10-15.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXII.
DE CEUX QUI PENSENT QUE LES FAUTES RACHETÉES PAR DES
AUMÔNES NE SERONT PAS COMPTÉES AU JOUR DU JUGEMENT.
J’en ai rencontré aussi plusieurs convaincus que les flammes éternelles ne seront que pour ceux qui négligent de racheter leurs péchés par des aumônes convenables, suivant cette parole de l’apôtre saint Jacques: "On jugera sans miséricorde celui qui aura été sans miséricorde2". Celui donc, disent-ils, qui aura fait l’aumône, tout en menant une vie déréglée, sera jugé avec miséricorde, si bien qu’il ne sera point puni, ou qu’il sera finalement délivré; c’est pour cela, suivant eux, que le Juge même des vivants et des morts ne fait mention que des aumônes, lorsqu’il s’adresse à ceux qui sont à sa droite et à sa gauche3. Ils prétendent aussi que cette demande que nous faisons tous les jours dans l’Oraison dominicale: "Remettez-nous nos offenses, comme nous les remettons à ceux qui nous ont offensés4", doit être entendue dans le même sens. C’est faire l’aumône que de pardonner une offense. Notre-Seigneur lui-même a donné un si haut prix au pardon des injures, qu’il a dit: "Si vous pardonnez à ceux qui vous offensent, votre Père vous pardonnera vos péchés; mais si vous ne leur pardonnez point, votre Père céleste ne vous pardonnera pas non plus1".
A cette sorte d’aumône se rapporte aussi ce qui a été cité de saint Jacques, que celui qui n’aura point fait miséricorde sera jugé sans miséricorde. Notre-Seigneur n’a point distingué les grands des petits péchés, mais il a dit généralement: "Votre Père vous remettra vos péchés, si vous remettez vos offenses". Ainsi, dans quelque désordre que vive un pécheur jusqu’à la mort, ils estiment que ses crimes lui sont remis tous les jours en vertu de cette oraison qu’il récite tous les jours, pourvu qu’il se souvienne de pardonner de bon cœur les offenses à qui lui en demande pardon. — Pour moi, je vais, avec l’aide de Dieu, réfuter toutes ces erreurs, et je mettrai fin à ce vingt-unième livre.
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2. Jacques II, 13.— 3. Matthieu XXV, 33 et suiv. — 4. Matthieu VI, 12.— 1. Matthieu VI, 14-15.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXIII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXIII.
CONTRE CEUX QUI PRÉTENDENT QUE NI LES SUPPLICES DU
DIABLE, NI CEUX DES HOMMES PERVERS NE SERONT ÉTERNELS.
Et premièrement, il faut s’enquérir et savoir pourquoi l’Eglise n’a pu souffrir l’opinion de ceux qui promettent au diable le pardon, même après de très-grands et de très-longs supplices. Car tant de saints si versés dans le Nouveau et dans l’Ancien Testament n’ont envié la béatitude à personne; mais c’est qu’ils ont vu qu’ils ne pouvaient anéantir ni infirmer cet arrêt que le Sauveur déclare qu’il prononcera au jour du jugement: "Retirez-vous de moi, maudits, et allez dans le feu éternel préparé pour le diable et pour ses anges2". Ces paroles montrent clairement que le diable et ses anges brûleront dans le feu éternel, et c’est aussi ce qui résulte de ce passage de l’Apocalypse: "Le diable qui les séduisait fut jeté dans un étang de feu et de soufre, avec la bête et le faux prophète, et ils y seront tourmentés jour et nuit, dans les siècles des siècles3". L’Ecriture disait tout à l’heure: "Le feu éternel"; elle dit maintenant: "Pendant les siècles des siècles": expressions synonymes pour désigner une durée sans fin. Il n’y a donc pas à chercher d’autre raison, de raison plus juste et plus évidente que celle-là de cette croyance fixe et immuable de la véritable piété, qu’il n’y aura plus de retour à la justice et à la vie des saints pour le diable et pour ses anges.
Cela sera ainsi, parce que l’Ecriture qui ne trompe personne, dit que Dieu ne les a point épargnés1, mais qu’il les a jetés dans les ténébreuses prisons de l’enfer, pour y être gardés jusqu’au dernier jugement, après lequel ils seront précipités dans le feu éternel et tourmentés durant les siècles des siècles. Et maintenant, comment prétendre que tous les hommes, ou même quelques-uns, seront délivrés de cette éternité de peines, après quelques longues souffrances que ce puisse être, sans porter atteinte à la foi qui nous fait croire que le supplice des démons sera éternel ? En effet, si parmi ceux à qui l’on dira: "Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel préparé pour le diable et pour ses anges2", il en est qui ne doivent pas toujours demeurer dans ce feu, pourquoi voudrait-on que le diable et ses anges y demeurassent éternellement ? Est-ce que la sentence que Dieu prononcera contre les anges et contre les hommes ne sera vraie que pour les anges ? Oui, si les conjectures des hommes l’emportent sur la parole de Dieu. Mais Comme cela est absurde, ceux qui veulent se garantir du supplice éternel ne doivent pas perdre leur temps à disputer contre Dieu, mais accomplir ses commandements, tandis qu’il en est encore temps.
D’ailleurs, quelle apparence y a-t-il d’entendre par ces mots: Supplice éternel, un feu qui doit durer longtemps, et, par vie éternelle, une vie qui doit durer toujours, alors que Jésus-Christ, au même lieu, et sans distinction, ni intervalle, a dit: "Ceux-ci iront au supplice éternel, et les justes dans la vie éternelle3". Si les deux destinées sont éternelles, on doit entendre ou que toutes deux dureront longtemps, mais pour finir un jour, ou que toutes deux dureront toujours, pour ne finir jamais. Car les deux choses sont corrélatives: d’un côté, le supplice éternel, de l’autre, la vie éternelle; de sorte qu’on ne peut prétendre sans absurdité qu’une seule et même expression caractérise une vie éternelle qui n’aurait point de fin, et un supplice éternel qui en aurait une. Puis donc que la vie éternelle des saints ne finira point, il en sera de même du supplice éternel des démons.
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2. Matthieu. XXV, 41. — 3. Apocalypse XX, 9-10. — 1. II Pierre II, 4. — 2. Matthieu XXV, 41. — 3. Matthieu XXV, 46.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXIV a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXIV.
CONTRE CEUX QUI PENSENT QU’AU JOUR DU JUGEMENT DIEU
PARDONNERA À TOUS LES MÉCHANTS SUR L’INTERCESSION DES SAINTS.
Or, ce raisonnement est aussi concluant contre ceux qui, dans leur propre intérêt, tâchent d’infirmer, les paroles de Dieu, sous prétexte d’une plus grande miséricorde, et qui prétendent que les paroles de l’Ecriture sont vraies, non parce que les hommes doivent souffrir les peines dont il les a menacés, mais parce qu’ils méritent de les souffrir. Dieu se laissera fléchir, disent-ils, à l’intercession des saints, qui, priant alors d’autant plus pour leurs ennemis que leur sainteté sera plus grande, en obtiendront plus aisément le pardon.
— Mais pourquoi donc, si leurs prières sont si efficaces, ne les emploieraient-ils pas de même pour les anges à qui le feu éternel est préparé, afin que Dieu révoque son arrêt contre eux et les préserve de ces flammes ? Quelqu’un sera-t-il assez hardi pour aller jusque-là et dire que les saints anges se joindront aux saints hommes, devenus égaux aux anges de Dieu, afin d’intercéder pour les anges et pour les hommes condamnés, et d’obtenir que la miséricorde de Dieu les dérobe aux vengeances de sa justice ?
Voilà ce qu’aucun catholique n’a dit et ne dira jamais. Autrement il n’y a plus de raison pour que l’Eglise ne prie pas même dès maintenant pour le diable et pour ses anges, puisque Dieu, qui est son maître, lui a commandé de prier pour ses ennemis. La même raison donc qui empêche maintenant l’Eglise de prier pour les mauvais anges qu’elle sait être ses ennemis, l’empêchera alors de prier pour les hommes destinés aux flammes éternelles.
Car maintenant elle prie pour les hommes qui sont ses ennemis, parce que c’est encore le temps d’une pénitence utile… (à suivre…)
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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et gras ajoutés.
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXIV a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXIV. (suite I)
CONTRE CEUX QUI PENSENT QU’AU JOUR DU JUGEMENT DIEU
PARDONNERA À TOUS LES MÉCHANTS SUR L’INTERCESSION DES SAINTS.
(suite) Car maintenant elle prie pour les hommes qui sont ses ennemis, parce que c’est encore le temps d’une pénitence utile. En effet, que demande-t-elle à Dieu pour eux, sinon, comme dit l’Apôtre: "Qu’ils fassent pénitence et qu’ils sortent des pièges du diable qui les tient captifs et en dispose à son gré1?" Que si l’Eglise connaissait dès à présent ceux qui sont prédestinés à aller avec le diable dans le feu éternel, elle prierait aussi peu pour eux que pour lui. Mais, comme elle n’en est pas assurée, elle prie pour tous ses ennemis qui sont ici-bas, quoiqu’elle ne soit pas exaucée pour tous. Car elle n’est exaucée que pour ceux qui, bien que ses ennemis, sont prédestinés à devenir ses enfants par le moyen de ses prières. Mais prie-t-elle pour les âmes de ceux qui meurent dans l’obstination et qui n’entrent point dans son sein ? Non, et pourquoi cela, sinon parce qu’elle compte déjà au nombre des complices du diable ceux qui pendant cette vie ne sont pas amis de Jésus-Christ ?
C’est donc, je le répète, la même raison qui empêche maintenant l’Eglise de prier pour les mauvais anges qui l’empêchera alors de prier pour les hommes destinés au feu éternel. Et c’est encore pour la même raison que tout en priant maintenant pour les morts en général, elle ne prie pas pourtant pour les méchants et les infidèles qui sont morts. Car, parmi les hommes qui meurent, il en est pour qui les prières de l’Eglise ou de quelques personnes pieuses sont exaucées; mais ce sont ceux qui, ayant été régénérés en Jésus-Christ, n’ont pas assez mal vécu pour qu’on les juge indignes de cette assistance, ni assez bien pour qu’elle ne leur soit pas nécessaire. Il s’en trouvera aussi, après la résurrection des morts, à qui Dieu fera miséricorde et qu’il n’enverra point dans le feu éternel, à condition qu’ils auront souffert les peines que souffrent les âmes des trépassés.
Car il ne serait pas vrai de dire de quelques-uns, qu’il ne leur sera pardonné ni en cette vie, ni dans l’autre, s’il n’y en avait à qui Dieu ne pardonne point en cette vie, mais à qui il pardonnera dans l’autre. Donc, puisque le Juge des vivants et des morts a dit: "Venez, vous que mon Père a bénis, prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès la naissance du monde" ; et aux autres au contraire: "Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel préparé pour le diable et ses anges" ; et: "Ceux-ci iront au supplice éternel et les justes à la vie éternelle1", il y a trop de présomption à prétendre que le supplice ne sera éternel pour aucun de ceux que Dieu envoie au supplice éternel, et ce serait donner lieu de désespérer ou de douter de la vie éternelle. Que personne n’explique donc ces paroles du psaume… (à suivre…)
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1. II Timothée II, 25-26. —1. Matthieu XXV, 34 ; 41; 46.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXIV a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXIV. (suite II)
CONTRE CEUX QUI PENSENT QU’AU JOUR DU JUGEMENT DIEU
PARDONNERA À TOUS LES MÉCHANTS SUR L’INTERCESSION DES SAINTS.
(suite II) Que personne n’explique donc ces paroles du psaume: "Dieu oubliera-t-il sa clémence ? Et sa colère arrêtera-t-elle le cours de ses miséricordes1 ?" comme si la sentence de Dieu était vraie à l’égard des bons et fausse à l’égard des méchants, ou vraie à l’égard des hommes de bien et des mauvais anges, et fausse à l’égard des hommes méchants. Ce que dit le psaume se rapporte aux vases de miséricorde et aux enfants de la promesse, du nombre desquels était ce prophète même qui, après avoir dit: "Dieu oubliera-t-il sa clémence ? Et sa colère arrêtera-t-elle le cours de ses miséricordes ?" ajoute aussitôt: "Et j’ai dit: Je commence; ce changement est un coup de la droite du Très-Haut2"; par où il explique sans doute ce qu’il venait de dire: "Sa colère arrêtera-t-elle le cours de ses miséricordes?" Car cette vie mortelle où l’homme est devenu semblable à la vanité, et où ses jours passent comme une ombre3, est un effet de la colère de Dieu.
Et cependant, malgré cette colère, il n’oublie pas de montrer sa miséricorde, en faisant lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et pleuvoir sur les justes et sur les injustes4. Ainsi sa colère n’arrête pas le cours de ses miséricordes, surtout en ses changements dont parle la suite du psaume: "Je commence; ce changement est un coup de la droite du Très-haut". Quelque misérable, en effet, que soit cette vie, Dieu ne laisse pas d’y changer en mieux les vases de miséricorde; non que sa colère ne subsiste toujours au milieu de cette malheureuse corruption, mais elle n’arrête pas le cours de sa bonté. Et puisque la vérité du divin cantique se trouve ainsi accomplie, il n’est pas besoin d’en étendre le sens au châtiment de ceux qui n’appartiennent pas à la Cité de Dieu. Si donc l’on persiste à l’interpréter de la sorte, qu’on fasse du moins consister la miséricorde divine, non à préserver les damnés de ces peines ou à les en délivrer, mais à les leur rendre plus légères qu’ils ne le méritent5: sentiment que je ne prétends pas d’ailleurs établir, me bornant à ne le point rejeter.
Quant à ceux qui ne voient qu’une menace au lieu d’un arrêt effectif dans ces paroles: "Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel" ; et dans cet autre passage: "Ceux-ci iront au supplice éternel1"; et encore dans celui-ci: "Ils seront tourmentés dans les siècles des siècles2"; et enfin dans cet endroit: "Leur ver ne mourra point, et le feu qui les brûlera ne s’éteindra point3"; ce n’est pas moi qui les combats et qui les réfute, c’est l’Ecriture sainte. En effet, les Ninivites ont fait pénitence en cette vie4; et cela leur a été utile, parce qu’ils ont semé dans ce champ où Dieu a voulu qu’on semât avec larmes pour y moissonner plus tard avec joie5.Qui peut nier toutefois que la prédiction de Dieu n’ait été accomplie, à moins de ne pas considérer assez comment Dieu détruit les pécheurs non-seulement quand il est en colère contre eux, mais aussi quand il leur fait miséricorde ?
Il les détruit de deux manières: ou comme les habitants de Sodome, en punissant les hommes mêmes pour leurs péchés, ou comme les habitants de Ninive, en détruisant les péchés des hommes par la pénitence. Ce que Dieu avait annoncé est donc arrivé: la mauvaise Ninive a été renversée, et elle est devenue bonne, ce qu’elle n’était pas; et, bien que ses murs et ses maisons soient demeurés debout, elle a été ruinée dans ses mauvaises mœurs6. Ainsi, quoique le Prophète ait été contristé de ce que les Ninivites n’avaient pas ressenti l’effet qu’ils appréhendaient de ses menaces et de ses prédictions7, néanmoins ce que Dieu avait prévu arriva, parce qu’il savait bien que cette prédiction devait être accomplie dans un plus favorable sens. Mais afin que ceux que la miséricorde égare…(à suivre…)
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1. Psaume LXXVI, 10. —2. Psaume LXXVI, 11. —3. Psaume CXLIII, 4. — 4. Matthieu V, 45. — 5. C’est aussi le sentiment plusieurs fois exprimé par saint Jean Chrysostôme, notamment dans son homélie XXXVII sur la Genèse, n. 3. —1. Matthieu XXV, 41; 46.—2. Apocalypse XX, 10. —3. Isaïe LXVI, 24.
4. Jonas, III, 7.—5. Psaume CXXV, 6.—6. Comp. saint Augustin, Enarrat. in Ps. L, n. 11. —7. Jonas, IV, 1-3.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXIV a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXIV. (fin)
CONTRE CEUX QUI PENSENT QU’AU JOUR DU JUGEMENT DIEU
PARDONNERA À TOUS LES MÉCHANTS SUR L’INTERCESSION DES SAINTS.
(fin) Mais afin que ceux que la miséricorde égare comprennent quelle est la portée de ces paroles de l’Ecriture: "Seigneur, que la douceur que vous avez cachée à ceux qui vous craignent est grande et abondante !"qu’ils lisent ce qui suit: "Mais vous l’avez consommée en ceux qui espèrent en vous8". Qu’est-ce à dire sinon que la justice de Dieu n’est pas douce à ceux qui ne le servent que par la crainte du châtiment, comme font ceux qui veulent établir leur propre justice en la fondant sur la loi ? Ne connaissant pas en effet la justice de Dieu, ils ne la peuvent goûter9. Ils mettent leur espérance en eux-mêmes, au lieu de la mettre en lui; aussi l’abondance de la douceur de Dieu leur est cachée; parce que, s’ils craignent Dieu c’est de cette crainte servile qui n’est point accompagnée d’amour, car l’amour parfait bannit la crainte1. Dieu a donc consommé sa douceur en ceux qui espèrent en lui; il l’a consommée en leur inspirant son amour, afin qu’étant remplis d’une crainte chaste que l’amour ne bannit pas, mais qui demeure éternellement2, ils ne s’en glorifient que dans le Seigneur.
En effet, la justice de Dieu, c’est Jésus-Christ "qui nous a été donné de Dieu pour être notre sagesse, notre justice, notre sanctification et notre rédemption, afin que, comme il est écrit, celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur3". Cette justice de Dieu, qui est un don de la grâce et non l’effet de nos mérites, n’est pas connue de ceux qui, voulant établir leur propre justice, ne sont point soumis à la justice de Dieu, qui est Jésus-Christ4. C’est dans cette justice que se trouve l’abondance de la douceur de Dieu. De là vient cette parole du psaume: "Goûtez et voyez combien le Seigneur est doux5 !"En ce pèlerinage, nous le goûtons plutôt que nous ne pouvons nous en rassasier, ce qui excite plus fortement encore la faim et la soit que nous eu avons, jusqu’au jour où nous le verrons tel qu’il est6, et où cette parole du psalmiste sera accomplie: "Je serai rassasié, quand votre gloire paraîtra7".
C’est ainsi que Jésus-Christ consomme l’abondance de sa douceur en ceux qui espèrent en lui. Or, si Dieu cache à ceux qui le craignent, l’abondance de cette douceur dans le sens où l’entendent nos adversaires, c’est-à-dire afin que la peur d’être damnés engage les impies à bien vivre, de sorte qu’il puisse y avoir des fidèles qui prient pour leurs frères qui vivent mal, comment alors Dieu a-t-il consommé sa douceur en ceux qui espèrent en lui, puisque, selon ces rêveries, c’est par cette douceur même qu’il ne doit pas damner ceux qui n’espèrent pas en lui ? Que le chrétien cherche donc cette douceur que Dieu consomme en ceux qui espèrent en lui, et non celle qu’on s’imagine qu’il consommera en ceux qui le méprisent et le blasphèment; car c’est en vain qu’on cherche en l’autre vie ce qu’on a négligé d’acquérir en celle-ci.
Cette parole de l’Apôtre: "Dieu a permis que tous tombassent dans l’infidélité, afin de faire miséricorde à tous", ne veut pas dire que Dieu ne damnera personne, et, après ce qui précède, le sens en est assez clair. Quand saint Paul écrit aux païens convertis, il leur dit, à propos des Juifs qui devaient se convertir dans la suite: "De même qu’autrefois vous n’aviez point foi en Dieu, et que maintenant vous avez obtenu miséricorde, tandis que les Juifs sont demeurés incrédules, ainsi les Juifs n’ont pas cru pendant que vous avez obtenu miséricorde, afin qu’un jour ils l’obtiennent eux-mêmes1". Puis il ajoute ces paroles, dont ceux-ci se servent pour le tromper: "Car Dieu a permis que tous tombassent dans l’infidélité, afin de faire grâce à tous". Qui donc tous, sinon ceux dont il parlait, c’est-à-dire vous et eux ?
Dieu a donc laissé tomber dans l’infidélité tous les Gentils et tous les Juifs qu’il a connus et prédestinés pour être conformes à l’image de son fils, afin que, se repentant de leur infidélité et ayant recours à la miséricorde de Dieu, ils pussent s’écrier comme le Psalmiste: "Seigneur, que la douceur que vous avez cachée à ceux qui vous craignent est grande et abondante! Mais vous l’avez consommée en ceux qui espèrent", non en eux-mêmes, mais "en vous". Il fait donc miséricorde à tous les vases de miséricorde. Qu’est-ce à dire à tous ? Evidemment, à ceux qu’il a prédestinés, appelés, justifiés et glorifiés d’entre les Gentils et d’entre les Juifs; c’est de tous ces hommes, et non de tous les hommes, que nul ne sera damné.
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8. Psaume XXX, 20. — 9. Romains X, 3. — 1. Jean IV, 18. — 2. Psaume XVIII, 10. — 3. I Corinthiens I, 30-31. — 4. Romains X, 3.
5. Psaume XXXII, 9. — 6. I Jean III, 2. — 7. Psaume XVI, 15. — 1. Romains XI, 31-32.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques, soulignés
et gras ajoutés.
à suivre…
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Dernière édition par ROBERT. le Lun 20 Juil 2015, 10:58 am, édité 1 fois (Raison : mise en forme)
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXV a écrit:
LIVRE VINGTIÈME ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXV.
SI CEUX D’ENTRE LES HÉRÉTIQUES QUI ONT ÉTÉ BAPTISÉS, ET QUI SONT DEVENUS MAUVAIS
PAR LA SUITE EN VIVANT DANS LE DÉSORDRE, ET CEUX QUI, RÉGÉNÉRÉS PAR LA FOI CATHOLIQUE,
ONT PASSÉ ENSUITE À L’HÉRÉSIE ET AU SCHISME, ET ENFIN CEUX QUI, SANS RENIER LA FOI CATHOLIQUE,
ONT PERSISTÉ DANS LE DÉSORDRE, SI TOUS CEUX-LÀ POURRONT ÉCHAPPER AU SUPPLICE ÉTERNEL
PAR L’EFFET DES SACREMENTS.
Répondons maintenant à ceux qui promettent la remise du feu éternel, non au diable et à ses anges, non à tous les hommes, mais seulement à ceux qui, ayant reçu le baptême de Jésus-Christ, ont participé à son corps et à son sang, de quelque manière qu’ils aient vécu, et en quelque hérésie, en quelque impiété qu’ils soient tombés1. L’Apôtre les réfute, lorsqu’il dit: "Les œuvres de la chair sont aisées à connaître, comme la fornication, l’impureté, l’impudicité, l’idolâtrie, les empoisonnements, les inimitiés, les contentions, les jalousies, les animosités, les divisions, les hérésies, l’envie, l’ivrognerie, la débauche, et autres crimes, dont je vous ai déjà dit et dont je vous dis encore, que ceux qui les commettent ne posséderont point le royaume de Dieu2". Cette menace de saint Paul est vaine, si des hommes qui ont commis ces crimes possèdent le royaume de Dieu, quelques souffrances qu’ils aient pu endurer auparavant. Mais comme cette menace a pour fondement la vérité, il s’ensuit qu’ils ne le posséderont point. Or, s’ils ne possèdent jamais le royaume de Dieu, ils seront condamnés au supplice éternel; car il n’y a point de milieu entre le royaume de Dieu et l’enfer.
Il faut donc voir comment on doit entendre ce que dit Notre-Seigneur: "Voici le pain qui est descendu du ciel, afin que quiconque en mange ne meure point. Je suis le pain vivant descendu du ciel: si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement3". Les adversaires à qui nous aurons tout à l’heure à répondre, et qui ne promettent pas le pardon à tous ceux qui auront reçu le baptême et le corps de Jésus-Christ, mais seulement aux catholiques, quoiqu’ayant mal vécu, réfutent eux-mêmes ceux à qui nous répondons maintenant. Il ne suffit pas, disent-ils, pour être sauvé, d’avoir mangé le corps de Jésus-Christ sous la forme du sacrement, il faut l’avoir mangé en effet, il faut avoir été véritablement partie de son corps, dont l’Apôtre dit: "Nous ne sommes tous ensemble qu’un même pain et qu’un même corps4". Il n’y a donc que celui qui est dans l’unité du corps de Jésus-Christ, de ce corps dont les fidèles ont coutume de recevoir le sacrement à l’autel, c’est-à-dire membre de l’Eglise, dont on puisse dire qu’il mange véritablement le corps de Jésus-Christ et qu’il boit son sang. Ainsi les hérétiques et les schismatiques qui sont séparés de l’unité de ce corps peuvent bien recevoir le même sacrement, mais sans fruit, et même avec dommage, pour être condamnés plus sévèrement, et non pour être un jour délivrés; car ils ne sont pas dans le lien de paix représenté par ce sacrement.
Mais, d’autre part, ces derniers interprètes, qui ont raison de soutenir que celui-là qui ne mange pas le corps de Jésus-Christ n’est pas dans le corps de Jésus-Christ, ont tort de promettre la délivrance des peines éternelles à ceux qui sortent de l’unité de ce corps pour se jeter dans l’hérésie ou dans l’idolâtrie. D’abord, il n’est pas supportable que ceux qui, sortant de l’Eglise catholique, ont formé des hérésies détestables, soient dans une condition meilleure que ceux qui, n’ayant jamais été catholiques, sont tombés dans les pièges des hérésiarques. Un déserteur est un ennemi de la foi pire que celui qui ne l’a jamais abandonnée, ne l’ayant jamais reçue. En second lieu, l’Apôtre réfute cette opinion, lorsqu’après avoir énuméré les œuvres de la chair, il ajoute: "Ceux qui commettent ces crimes ne posséderont pas le royaume de Dieu1".
C’est pourquoi ceux qui vivent dans le désordre, et qui, d’ailleurs, persévèrent dans la communion de l’Eglise, ne doivent pas se croire en sûreté, sous prétexte qu’il est dit: "Celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé2". Par leur mauvaise vie, en effet, ils abandonnent la justice qui donne la vie, et qui n’est autre que Jésus-Christ, soit en pratiquant la fornication, soit en déshonorant leur corps par d’autres impuretés que l’Apôtre n’a pas voulu nommer, soit enfin en commettant quelqu’une de ces œuvres dont il est dit: "Ceux qui les commettront ne posséderont pas le royaume de Dieu". Or, ne devant pas être dans le royaume de Dieu, ils seront inévitablement dans le feu éternel. On ne peut pas dire, du moment qu’ils ont persévéré dans le désordre jusqu’à la fin de leur vie, qu’ils aient persévéré en Jésus-Christ jusqu’à la fin, puisque persévérer en Jésus-Christ, c’est persévérer dans la foi.
Or, cette foi, selon la définition du même apôtre, opère par amour3, et l’amour, comme il le dit encore ailleurs, ne fait point le mal4. Il ne faut donc pas dire que ceux-ci même mangent le corps de Jésus-Christ, puisqu’ils ne doivent pas être comptés comme membres du corps de Jésus-Christ. A part les autres raisons, ils ne sauraient être tout ensemble les membres de Jésus-Christ et les membres d’une prostituée1. Enfin, lorsque Jésus-Christ lui-même dit: "Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui2", il fait bien voir ce que c’est que manger son corps et boire son sang en vérité, et non pas seulement sous la forme du sacrement c’est demeurer en Jésus-Christ, afin que Jésus-Christ demeure aussi en nous. Comme s’il disait: Que celui qui ne demeure point en moi, et en qui je ne demeure point, ne prétende pas manger mon corps, ni boire mon sang. Ceux-là donc ne demeurent point en Jésus-Christ qui ne sont pas ses membres: or, ceux-là ne sont pas ses membres qui se font les membres d’une prostituée, à moins qu’ils ne renoncent au mal par la pénitence, et qu’ils reviennent au bien par cette réconciliation.
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1. Comp. ce chapitre avec le traité de saint Augustin De la foi et des œuvres —2. Galates V, 19-21. — 3. Jean VI, 50-52, — 4. I Corinthiens X, 17.
1. Galates V, 21. —2. Matthieu X, 22. – 3. Galates V, 6. – 4. I Corinthiens XIII, 4; Romains XIII, 10. —1. Corinthiens VI, 15. – 2. Jean VI, 57.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVI a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVI.
CE QU’IL FAUT ENTENDRE PAR CES PAROLES: ÊTRE SAUVÉ COMME
PAR LE FEU ET AVOIR JÉSUS-CHRIST POUR FONDEMENT.
Mais les chrétiens catholiques, disent-ils, ont pour fondement Jésus-Christ, de l’unité duquel ils ne se sont pas séparés, quelque mauvaise vie qu’ils aient menée, c’est-à-dire quoiqu’ils aient bâti sur ce fondement une très-mauvaise vie, comparée par l’Apôtre au bois, au foin, à la paille3. La vraie foi, qui fait qu’ils ont eu Jésus-Christ pour fondement, pourra les délivrer finalement de l’enfer, non toutefois sans qu’il y ait pour eux quelque punition, puisqu’il est écrit que ce qu’ils auront bâti sera brûlé. — Que l’apôtre saint Jacques leur réponde en peu de mots: "Si quelqu’un dit qu’il a la foi, et qu’il n’ait point les œuvres, la foi pourra-t-elle le sauver ?4" Ils insistent et demandent quel est donc celui dont l’apôtre saint Paul dit: "Il ne laissera pas pourtant d’être sauvé, mais comme par le feu5". Voyons ensemble quel est celui-là; mais toujours est-il très certain que ce n’est pas celui dont parle saint Jacques. Autrement ce serait mettre en opposition deux apôtres, puisque l’un dirait qu’encore qu’un homme ait de mauvaises œuvres, la foi ne le sauvera pas du feu, et l’autre, que la foi ne pourra sauver celui qui n’aura pas de bonnes œuvres.
Nous saurons quel est celui qui peut être sauvé par le feu, si nous connaissons auparavant ce que c’est que d’avoir Jésus-Christ pour fondement. Or, cette image même nous l’enseigne; car il suffit de considérer que dans un édifice rien ne précède le fondement. Quiconque donc a de telle sorte Jésus-Christ dans le cœur, qu’il ne lui préfère point les choses terrestres et temporelles, pas même celles dont l’usage est permis, celui-là a Jésus-Christ pour fondement. Mais s’il lui préfère ces choses, bien qu’il semble avoir la foi de Jésus-Christ, il n’a pas Jésus-Christ pour fondement. Combien moins l’a-t-il donc, alors que, méprisant ses commandements salutaires, il ne songe qu’à satisfaire, ses passions ? Ainsi, quand un chrétien aime une femme de mauvaise vie, et, s’attachant à elle, devient un même corps avec elle1 , il n’a point Jésus-Christ pour fondement. Mais quand il aime sa femme légitime selon Jésus-Christ2, qui doute qu’il ne puisse avoir Jésus-Christ pour fondement ? S’il l’aime selon le monde et charnellement, comme les Gentils qui ne connaissent pas Dieu3, l’Apôtre lui permet encore cela par condescendance, ou plutôt c’est Jésus-Christ qui le lui permet.
Dès lors il peut encore avoir Jésus-Christ pour fondement, puisque, s’il ne lui préfère point son amour et son plaisir, s’il bâtit sur ce fondement du bois, du foin et de la paille, il ne laissera pas d’être sauvé par le feu. Les afflictions, comme un feu, brûleront ses délices et ses amours, qui ne sont pas criminelles, à cause du mariage. Ce feu figure donc les veuvages, les pertes d’enfants, et toutes les autres calamités qui emportent ou traversent les plaisirs terrestres. Ainsi cet édifice fera tort à celui qui l’aura construit, parce qu’il n’aura pas ce qu’il a édifié, et qu’il sera affligé de la perte des choses dont la jouissance le charmait. Mais il sera sauvé par le feu à cause du fondement, parce que, si un tyran lui proposait le choix, il ne préférerait pas ces choses à Jésus-Christ. Voyez dans les écrits de l’Apôtre un homme qui édifie sûr ce fondement de l’or, de l’argent et des pierres précieuses: "Celui," dit-il, "qui n’a point de femme pense aux choses de Dieu et à plaire à Dieu". Voyez-en un autre maintenant qui édifie du bois… (à suivre…)
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3. I Corinthiens III, 11-12. – 4. Jacques II, 14. – 5. I Corinthiens III, 15. — 1. I Corinthiens VI, 16. — 2. Éphésiens V, 25. — 3. I Thessaloniciens IV, 5.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
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à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVI a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVI. (suite )
CE QU’IL FAUT ENTENDRE PAR CES PAROLES: ÊTRE SAUVÉ
COMME PAR LE FEU ET AVOIR JÉSUS-CHRIST POUR FONDEMENT.
(suite) Voyez-en un autre maintenant qui édifie du bois, du foin et de la paille: Mais celui, dit-il, qui a une femme pense aux choses du monde et à plaire à sa femme1. — On verra quel est l’ouvrage de chacun "car le jour du Seigneur le fera connaître" entendez le jour d’affliction; "car", ajoute l’Apôtre, "il sera manifesté par le feu2". Il donne ici à l’affliction le nom de feu, au même sens où il est dit ailleurs dans l’Ecriture: "La fournaise ardente éprouve les vases du potier, et l’affliction les hommes justes3». Et encore: "Le feu découvrira quel est l’ouvrage de chacun. Celui dont l’ouvrage demeurera (car les pensées de Dieu et le soin de lui plaire demeurent) recevra récompense pour ce qu’il aura édifié"; ce qui veut dire qu’il recueillera le fruit de ses pensées et de ses afflictions. "Mais celui dont l’ouvrage sera brûlé en souffrira la perte", parce qu’il avait aimé. "Il ne laissera pas pourtant d’être sauvé", parce qu’aucune affliction ne l’a séparé de ce fondement; "mais comme par le feu4"; car il ne perdra pas sans douleur ce qu’il possédait avec affection. Nous avons trouvé, ce me semble, un feu qui ne damne aucun des deux hommes dont nous parlons, mais qui enrichit l’un, nuit à l’autre, et les éprouve tous deux.
Mais si nous voulons entendre dans le même sens le feu dont Notre-Seigneur dit à ceux qui sont à sa gauche: "Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel5"; en sorte que nous embrassions dans cet arrêt ceux qui bâtissent sur le fondement du bois, du foin, de la paille, et que nous prétendions qu’ils sortiront du feu par la vertu de ce fondement, après avoir été tourmentés pendant quelque temps pour leurs péchés, que devons-nous penser de ceux qui sont à la droite de Jésus-Christ et à qui il dit: "Venez, vous que mon Père a bénis, prenez possession du royaume qui vous est préparé6", sinon que ce sont ceux qui ont bâti sur le fondement de l’or, de l’argent et des pierres précieuses ? Si donc par le feu dont parle l’Apôtre, quand il dit: "Comme par le feu", nous entendons le feu d’enfer, il faudra dire que les uns et les autres, c’est-à-dire ceux qui sont à la droite et ceux qui sont à la gauche, y seront également envoyés.
Le feu dont il est dit: "Le jour du Seigneur manifestera quel est l’ouvrage de chacun et le fera connaître1" ce feu éprouvera les uns et les autres; et par conséquent ce n’est pas le feu éternel, puisque celui dont l’ouvrage demeurera, c’est-à-dire ne sera pas consumé par ce feu, recevra récompense pour ce qu’il aura édifié, et que celui dont l’ouvrage sera brûlé trouvera son châtiment dans son regret. Ceux-là seuls qui seront à la gauche seront envoyés au feu éternel par une suprême et éternelle condamnation, au lieu que le feu dont parle saint Paul au passage cité éprouve ceux qui sont à la droite. Mais il les éprouve de telle sorte qu’il ne brûle point l’édifice des uns et brûle celui des autres, sans que cela empêche ces derniers même d’être sauvés, parce qu’ils ont établi Jésus-Christ pour leur fondement, et l’ont plus aimé que tout le reste. Or, s’ils sont sauvés, ils seront certainement assis à la droite et entendront avec les autres ces paroles: "Venez, vous que mon Père a bénis, prenez possession du royaume qui vous est préparé", au lieu d’être à la gauche avec les réprouvés, à qui il sera dit: "Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel". Car nul de ces maudits ne sera délivré du feu; ils iront tous au supplice éternel2, ou leur ver ne mourra point3, et où le feu qui les brûlera ne s’éteindra point, et où ils seront tourmentés jour et nuit, dans les siècles des siècles4 . Maintenant si l’on dit que dans l’intervalle de temps… (à suivre…)
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1. I Corinthiens VII, 32-33. – 2. I Corinthiens III, 13. – 3. Ecclésiastique XXVII, 6. – 4. I Corinthiens III, 13-15. – 5. Matthieu XXV, 41. – 6. Matthieu XXV, 34. 1. I Corinthiens III, 13. – 2. Matthieu XXV, 46. – 3. Isaïe LXVI, 24. – 4. Apocalypse XX, 10.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVI a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVI. (fin)
CE QU’IL FAUT ENTENDRE PAR CES PAROLES: ÊTRE SAUVÉ
COMME PAR LE FEU ET AVOIR JÉSUS-CHRIST POUR FONDEMENT.
(fin) Maintenant si l’on dit que dans l’intervalle de temps qui se passera entre la mort de chacun et ce jour qui sera, après la résurrection des corps, le dernier jour de rémunération et de damnation, si l’on dit que les âmes seront exposées à l’ardeur d’un feu que ne sentiront point ceux "qui n’auront pas eu dans cette vie des mœurs et des affections charnelles, de telle sorte qu’ils n’aient point bâti un édifice de bois, de foin et de paille que le feu puisse consumer"; mais que sentiront ceux qui auront bâti un semblable édifice, c’est-à-dire qui auront commis des péchés véniels, et qui devront pour cela être soumis à un supplice transitoire, je ne m’y oppose point, car cela peut être vrai .La mort même du corps, qui est une peine du premier péché et que chacun souffre en son temps, peut être une partie de ce feu.
Les persécutions de l’Eglise, qui ont couronné tant de martyrs et qu’endurent tous ceux qui sont chrétiens, sont aussi comme un feu qui éprouve ces différents édifices, qui consume les uns avec leurs auteurs, lorsqu’il n’y trouve pas Jésus-Christ pour fondement, qui brûle les autres sans toucher à leurs auteurs, qui seront sauvés, quoiqu’après punition, et qui épargne absolument les autres, parce qu’ils sont bâtis pour durer éternellement. Il y aura aussi vers la fin du monde, au temps de l’Antéchrist, une persécution si horrible qu’il n’y en a jamais eu de semblable. Combien y aura-t-il alors d’édifices, soit d’or ou de foin, élevés sur le bon fondement, qui est Jésus-Christ, que ce feu éprouvera avec dommage pour les uns, avec joie pour les autres, mais sans perdre ni les uns ni les autres à cause de ce bon fondement ?
Mais quiconque préfère à Jésus-Christ, je ne dis pas sa femme, dont il se sert pour la volupté charnelle, mais même d’autres personnes qu’on n’aime pas de cette sorte, comme sont les parents, celui-là n’a point pour fondement Jésus-Christ; et ainsi il ne sera pas sauvé par le feu. Il ne sera point du tout sauvé, parce qu’il ne pourra demeurer avec le Sauveur, qui, parlant de cela très clairement, dit "Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi; et celui qui aime son fils et sa fille plus que moi, n’est pas non plus digne de moi1". Pour celui qui aime humainement ses parents, de sorte néanmoins qu’il ne les préfère pas à Jésus-Christ, et qui aimerait mieux les perdre que lui, si on le mettait à cette épreuve, celui-là sera sauvé par le feu, parce qu’il faut que la perte de ces choses humaines cause autant de douleur qu’on y trouvait de plaisir.
Enfin, celui qui aime ses parents en Jésus-Christ, et qui les aide à s’unir à lui et à acquérir son royaume, ou qui ne les aime que parce qu’ils sont les membres de Jésus-Christ, à Dieu ne plaise qu’un amour de cette sorte soit un édifice de bois, de foin et de paille que le feu consumera ! C’est un édifice d’or, d’argent et de pierres précieuses. Eh ! comment pourrait-il aimer plus que Jésus-Christ ceux qu’il n’aime que pour Jésus-Christ ?
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1. Matt. X, 37.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVII.
CONTRE CEUX QUI CROIENT QU’ILS NE SERONT
PAS DAMNÉS, QUOIQU’AYANT PERSÉVÉRÉ DANS LE
PÉCHÉ, PARCE QU’ILS ONT PRATIQUÉ L’AUMÔNE.
1º Nous n’avons plus à réfuter qu’un dernier système, savoir que le feu éternel ne sera que pour ceux qui négligent de racheter leurs péchés par de convenables aumônes, suivant cette parole de l’apôtre saint Jacques: "On jugera sans miséricorde celui qui sera sans miséricorde1". Celui donc, disent-ils, qui a pratiqué la miséricorde, bien qu’il n’ait pas renoncé à sa mauvaise vie, sera jugé avec miséricorde, de sorte qu’il ne sera pas damné, mais délivré finalement de son supplice. Ils assurent que le discernement que Jésus-Christ fera entre ceux de sa droite et ceux de sa gauche, pour envoyer les uns au royaume de Dieu et les autres au supplice éternel, ne sera fondé que sur le soin qu’on aura mis ou non à faire des aumônes.
Ils tâchent encore de prouver par l’Oraison dominicale, que les péchés qu’ils commettent tous les jours, quelque grands qu’ils soient, peuvent leur être remis en retour des œuvres de charité. De même, disent-ils, qu’il n’y a point de jour où les chrétiens ne récitent cette oraison, il n’y a point de crime commis tous les jours qu’elle n’efface, à condition qu’en disant: "Pardonnez-nous nos offenses", nous ayons soin de faire ce qui suit: "Comme nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensés2". Notre-Seigneur, ajoutent-ils, ne dit pas: Si vous pardonnez aux hommes les fautes qu’ils ont faites contre vous, votre Père vous pardonnera les péchés légers que vous commettrez tous les jours; mais il dit: "Il vous pardonnera vos péchés3". Ils estiment donc qu’en quelque nombre et de quelque espèce qu’ils soient, quand même on les commettrait tous les jours et quand on mourrait sans y avoir renoncé auparavant, les aumônes en obtiendront le pardon.
Certes, ils ont raison de vouloir que ce soient de dignes aumônes; car s’ils disaient que tous les crimes, en quelque nombre qu’ils soient, seront remis par toute sorte d’aumônes, ils seraient choqués eux-mêmes d’une proposition si absurde. En effet, ce serait dire qu’un homme très-riche, en donnant tous les jours quelques pièces de monnaie aux pauvres, pourrait racheter des homicides, des adultères, et les autres crimes les plus énormes. Si l’on ne peut avancer cela sans folie, reste à savoir quelles sont ces dignes aumônes capables d’effacer les péchés, et dont le précurseur même de Jésus-Christ entendait parler, quand il disait: "Faites de dignes fruits de pénitence1". On ne trouvera pas sans doute que ces dignes aumônes soient celles des gens qui commettent tous les jours des crimes. En effet, leurs rapines vont bien plus haut que le peu qu’ils donnent à Jésus-Christ en la personne des pauvres, afin d’acheter tous les jours de lui l’impunité de leurs actions damnables. D’ailleurs, quand ils donneraient tout leur bien aux membres de Jésus-Christ pour un seul crime, s’ils ne renonçaient à leurs désordres, touchés par cette charité dont il est dit que jamais elle ne fait le mal2, cette libéralité leur serait inutile. Que celui donc qui fait de dignes aumônes pour ses péchés… (à suivre…)
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1. Jacques, II, 13. — 2. Matthieu VI, 12. — 3. Matthieu VI, 14. — 1. Matthieu III, 8. — 2. I Corinthiens XIII, 4.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVII. (suite I)
CONTRE CEUX QUI CROIENT QU’ILS NE SERONT
PAS DAMNÉS, QUOIQU’AYANT PERSÉVÉRÉ DANS LE PÉCHÉ,
PARCE QU’ILS ONT PRATIQUÉ L’AUMÔNE.
(suite I) Que celui donc qui fait de dignes aumônes pour ses péchés commence à les faire envers lui-même. Il n’est pas raisonnable d’exercer envers le prochain une charité qu’on n’exerce pas envers soi, puisqu’il est écrit: "Vous aimerez votre prochain comme vous-même3"; et encore: "Ayez pitié de votre âme, en vous rendant agréable à Dieu4". Celui donc qui ne fait pas à son âme cette aumône afin de plaire à Dieu, comment peut-on dire qu’il fait de dignes aumônes pour ses péchés ? C’est pour cela qu’il est écrit: "A qui peut être bon celui qui est méchant envers lui-même ?5" Car les aumônes aident les prières; et c’est encore pourquoi il faut se rendre attentif à ces paroles: "Mon fils, vous avez péché, ne péchez plus, et priez Dieu qu’il vous pardonne vos péchés passés6". Nous devons donc faire des aumônes pour être exaucés, lorsque nous prions pour nos péchés passés, et non pour obtenir la licence de mal faire.
Or, Notre-Seigneur a prédit qu’il imputera à ceux qui seront à la droite les aumônes qu’ils auront faites, et à ceux qui seront à la gauche celles qu’ils auront manqué de faire, voulant montrer ce que peuvent les aumônes pour effacer les péchés commis, et non pour les commettre sans cesse impunément. Mais il ne faut pas croire que ceux qui ne veulent pas changer de vie fassent de véritables aumônes; car ce que Jésus-Christ même leur dit: "Quand vous avez manqué de rendre ces devoirs au moindre des miens, c’est à moi que vous avez manqué de les rendre1", fait assez voir qu’ils ne les rendent pas, lors même qu’ils croient les rendre. En effet, quand ils donnent du pain à un chrétien qui a faim, s’ils le lui donnaient en tant qu’il est chrétien, certes, ils ne se refuseraient pas à eux-mêmes le pain de la justice, qui est Jésus-Christ; car Dieu ne regarde pas à qui l’on donne, mais dans quel esprit on donne. Ainsi, celui qui aime Jésus-Christ dans un chrétien lui fait l’aumône dans le même esprit où il s’approche de ce Sauveur, au lieu que les autres ne cherchent qu’à s’en éloigner, puisqu’ils n’aspirent qu’à jouir de l’impunité: or, on s’éloigne d’autant plus de Jésus-Christ qu’on aime davantage ce qu’il condamne.
En effet, que sert-il d’être baptisé, si l’on n’est justifié ? Celui qui a dit: "Si l’on ne renaît de l’eau et du Saint-Esprit, on ne saurait entrer dans le royaume de Dieu2", n’a-t-il pas dit aussi: "Si votre justice n’est pas plus grande que celle des Scribes et des Pharisiens, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux3 ?" Pourquoi plusieurs courent-ils au baptême pour éviter le premier arrêt , et pourquoi si peu se mettent-ils en peine d’être justifiés pour éviter le second ? De même que celui-là ne dit pas à son frère: Fou! Qui, lorsqu’il lui dit cette injure, n’est pas en colère contre son frère, mais contre ses défauts, car, autrement, il mériterait l’enfer4; ainsi, celui qui donne l’aumône à un chrétien, et qui n’aime pas en lui Jésus-Christ, ne la donne pas à un chrétien. Or, celui-là n’aime pas Jésus-Christ qui refuse d’être justifié en Jésus-Christ; et comme il servirait de peu à celui qui appellerait son frère fou par colère, et sans songer à le corriger, de faire des aumônes pour obtenir le pardon de cette faute, à moins de se réconcilier avec lui, suivant ce commandement qui nous est fait au même lieu: "Lorsque vous faites votre offrande à l’autel, si vous vous souvenez d’avoir offensé votre frère, laissez là votre offrande, et allez auparavant vous réconcilier avec lui, et puis vous reviendrez offrir votre présent5"; de même, il sert de peu de faire de grandes aumônes pour ses péchés, lorsqu’on demeure dans l’habitude du péché.
… 2º Quant à l’oraison de chaque jour que Notre-Seigneur lui-même nous a enseignée, d’où vient qu’on l’appelle dominicale, elle efface, il est vrai, les péchés de chaque jour, quand chaque jour on dit… (à suivre…)
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3. Matthieu XXII, 39. — 4. Ecclésiastique XXX, 24. —5. Ecclésiastique XIV, 5. — 6. Ecclésiastique XXI, 1. — 1. Matthieu XXV, 45.
2. Jean III, 5. — 3. Matthieu V, 20. — 4. Matthieu V, 22. — 5. Matthieu V, 23-24.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques, gras, caractères
police et soulignés ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVII. (suite II)
CONTRE CEUX QUI CROIENT QU’ILS NE SERONT
PAS DAMNÉS, QUOIQU’AYANT PERSÉVÉRÉ DANS LE PÉCHÉ,
PARCE QU’ILS ONT PRATIQUÉ L’AUMÔNE.
(suite II)… 2º Quant à l’oraison de chaque jour que Notre-Seigneur lui-même nous a enseignée, d’où vient qu’on l’appelle dominicale, elle efface, il est vrai, les péchés de chaque jour, quand chaque jour on dit: "Pardonnez-nous nos offenses", et qu’on ne dit pas seulement, mais qu’on fait ce qui suit: "Comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés1"; mais on récite cette prière parce qu’on commet des péchés, et non pas pour en commettre.
Notre Sauveur nous a voulu montrer par là que, quelque bonne vie que nous menions, dans les ténèbres et la langueur où nous sommes, nous commettons tous les jours des fautes pour lesquelles nous avons besoin de prier et de pardonner à ceux qui nous offensent, si nous voulons que Dieu nous pardonne. Lors donc que Notre-Seigneur dit: "Si vous pardonnez aux hommes les fautes qu’ils font contre vous, votre Père vous pardonnera aussi vos péchés2", il n’a pas entendu nous donner une fausse confiance dans cette oraison pour commettre tous les jours des crimes, soit en vertu de l’autorité qu’on exerce en se mettant au-dessus des lois, soit par adresse en trompant les hommes; mais il a voulu par là nous apprendre à ne pas nous croire exempts de péchés, quoique nous soyons exempts de crimes: avertissement que Dieu donna aussi autrefois aux prêtres de l’ancienne loi, en leur commandant d’offrir en premier lieu des sacrifices pour leurs péchés, et ensuite pour ceux du peuple3.
Aussi bien, si nous considérons attentivement les paroles de notre grand et divin Maître, nous trouverons qu’il ne dit pas: Si vous pardonnez aux hommes les fautes qu’ils font contre vous, votre Père vous pardonnera aussi tous vos péchés, quels qu’ils soient; mais: "Votre Père vous pardonnera aussi vos péchés". Il enseignait une prière de tous les jours, et parlait à ses disciples, qui étaient justes. Qu’est-ce donc à dire vos péchés, sinon ceux dont vous-mêmes, qui êtes justifiés et sanctifiés, ne serez pas exempts ? Nos adversaires, qui cherchent dans cette prière un prétexte pour commettre tous les jours des crimes, prétendent que Notre-Seigneur a voulu aussi parler des grands péchés, parce qu’il n’a pas dit: Il vous pardonnera les petits péchés, mais: Il vous pardonnera vos péchés.
Nous, au contraire, considérant ceux à qui il parlait, et lui entendant dire vos péchés, nous ne devons entendre par là que les petits, parce que ses disciples n’en commettaient point d’autres ; mais les grands mêmes, dont il se faut entièrement défaire par une véritable conversion, ne sont pas remis par la prière, si l’on ne fait ce qui est dit au même endroit: "Comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés". Que si les fautes, même légères, dont les plus saints ne sont pas exempts en cette vie, ne se pardonnent qu’à cette condition, combien plus les crimes énormes, bien qu’on cesse de les commettre, puisque Notre-Seigneur a dit: "Mais si vous ne pardonnez pas les fautes qu’on commet contre vous, votre Père ne vous pardonnera pas non plus1".
C’est ce que veut dire l’apôtre saint Jacques, lorsqu’il parle ainsi: "On jugera sans miséricorde celui qui aura été sans miséricorde2". On doit aussi se souvenir de ce serviteur, à qui son maître avait remis dix mille talents, qu’il l’obligea à payer ensuite, parce qu’il avait été inexorable envers un autre serviteur comme lui, qui lui devait cent deniers3. Ces paroles de l’Apôtre: "La miséricorde l’emporte sur la justice4", s’appliquent à ceux qui sont enfants de la promesse et vases de miséricorde. Les justes mêmes, qui ont vécu dans une telle sainteté qu’ils reçoivent dans les tabernacles éternels ceux qui ont acquis leur amitié par les richesses d’iniquité5, ne sont devenus tels que par la miséricorde de celui qui justifie l’impie et qui lui donne la récompense selon la grâce, et non selon les mérites. Du nombre de ces impies justifiés est l’Apôtre, qui dit: "J’ai obtenu miséricorde pour être fidèle6"
Ceux qui sont ainsi reçus dans les tabernacles éternels, il faut avouer que, comme ils n’ont pas assez bien vécu pour être sauvés sans le suffrage des saints, la miséricorde à leur égard l’emporte encore bien plus sur la justice. Et néanmoins, on ne doit pas s’imaginer qu’un scélérat impénitent soit reçu dans les tabernacles éternels pour avoir assisté les saints avec des richesses d’iniquité, c’est-à-dire avec des biens mal acquis, ou tout au moins avec de fausses richesses, mais que l’iniquité croit vraies, parce qu’elle ne connaît pas les vraies richesses qui rendent opulents ceux lui reçoivent les autres dans les tabernacles éternels. Il y a donc un certain genre de vie qui n’est pas tellement criminel que les aumônes y soient inutiles pour gagner le ciel, ni tellement bon qu’il suffise pour atteindre un si grand bonheur, à moins d’obtenir miséricorde par les mérites de ceux dont on s’est fait des amis par les aumônes. A ce propos, je m’étonne toujours qu’on trouve…(à suivre)
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1. Matthieu VI, 12. — 2. Matthieu VI, 14. — 3. Lévitique XVI, 6. — 1. Matthieu VI, 15. — 2. Jacques II, 13. — 3. Matthieu XVIII, 23 et seq. — 4. Jacques II, 13. – 5. Voyez la parabole rapportée par saint Luc XVI, 9. — 6. I Corinthiens VII, 25.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques, gras, caractères,
police et soulignés ajoutés.
à suivre…
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XXI — La Réprobation des méchants. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XXI, cap. XXVII a écrit:
LIVRE VINGT ET UNIÈME: LA RÉPROBATION DES MÉCHANTS.
CHAPITRE XXVII.(fin)
CONTRE CEUX QUI CROIENT QU’ILS NE SERONT
PAS DAMNÉS, QUOIQU’AYANT PERSÉVÉRÉ DANS LE PÉCHÉ,
PARCE QU’ILS ONT PRATIQUÉ L’AUMÔNE.
(fin) A ce propos, je m’étonne toujours qu’on trouve, même dans Virgile, cette parole du Seigneur: "Faites-vous des amis avec les richesses d’iniquité, afin qu’ils vous reçoivent dans les tabernacles éternels1", ou bien en d’autres termes: "Celui qui reçoit un prophète, en qualité de prophète, recevra la récompense du prophète, et celui qui reçoit un juste, en qualité de juste, recevra la récompense du juste2" En effet, dans le passage où Virgile décrit les Champs-Elysées, que les païens croient être le séjour des bienheureux, non-seulement il y place ceux qui y sont arrivés par leurs propres mérites, mais encore: "Ceux qui ont gravé leur nom dans la mémoire des autres par des services rendus3".
N’est-ce pas là ce mot que les chrétiens ont si souvent à la bouche, quand par humilité ils se recommandent à un juste: Souvenez-vous de moi, lui disent-ils, et ils cherchent par de bons offices à graver leur nom dans son souvenir ? Maintenant si nous revenons à la question de savoir quel est ce genre de vie et quels sont ces crimes qui ferment l’entrée du royaume de Dieu, et dont néanmoins on obtient le pardon, il est très-difficile de s’en assurer et très-dangereux de vouloir le déterminer. Pour moi, quelque soin que j’y ai mis jusqu’à présent, je ne l’ai pu découvrir. Peut-être cela est-il caché, de peur que nous n’en devenions moins courageux à éviter les péchés qu’on peut commettre sans péril de damnation. En effet, si nous les connaissions, il se pourrait que nous ne nous fissions pas scrupule de les commettre, sous prétexte que les aumônes suffisent pour nous en obtenir le pardon; au lieu que, ne les connaissant pas, nous sommes plus obligés de nous tenir sur nos gardes, et de faire effort pour avancer dans la vertu, sans toutefois négliger de nous faire des amis parmi les saints au moyen des aumônes.
Mais cette délivrance qu’on obtient ou par ses prières, ou par l’intercession des saints, ne sert qu’à empêcher d’être envoyé au feu éternel; elle ne servira pas à en faire sortir, quand on y sera déjà. Ceux mêmes qui pensent que ce qui est dit dans l’Evangile de ces bonnes terres qui rapportent des fruits en abondance, l’une trente, l’autre soixante, et l’autre cent pour un, doit s’entendre des saints, qui, selon la diversité de leurs mérites, délivreront les uns trente hommes, les autres soixante, les autres cent1, ceux-là même croient qu’il en sera ainsi au jour du jugement, mais nullement après. On rapporte à ce sujet le mot d’une personne d’esprit qui, voyant les hommes se flatter d’une fausse impunité et croire que par l’intercession des saints tous les pécheurs peuvent être sauvés, répondit fort à propos qu’il était plus sûr de tâcher, par une bonne vie, d’être du nombre des intercesseurs, de peur que ce nombre soit si restreint qu’après qu’ils auront délivré l’un trente pécheurs, l’autre soixante, l’autre cent, il n’en reste encore un grand nombre pour lesquels ils n’auront plus le droit d’intercéder, et parmi eux celui qui aura mis vainement son espérance dans un autre. Mais j’ai suffisamment répondu à ceux qui, ne méprisant pas l’autorité de nos saintes Écritures, mais les comprenant mal, y trouvent, non pas le sens qu’elles ont, mais celui qu’ils veulent leur donner. Notre réponse faite, terminons cet avant-dernier livre, comme nous l’avons annoncé.
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1. Luc XVI, 9. – 2. Matthieu X, 41. – 3. Enéide , livre VI, vers 664. —1. Matthieu XIII, 8.FIN DU LIVRE VINGT ET UNIÈME.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
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