LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
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LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
AU LECTEUR
Les pages qui composent ce précieux volume ne
sont pas de moi : elles sont à moi, autant que peut le
dire un religieux. Leur auteur me les a données manuscrites,
avec pleine liberté d'en faire l'usage que je
voudrais. Contre son attente, mais non sans son autorisation,
je me suis décidé à les livrer à l'impression
dès que je les ai eu méditées. Elles m'avaient procuré
d'intimes jouissances, et, j'ose l'espérer, grâce à Dieu,
un vrai profit spirituel. Je me serais reproché de les
garder pour moi et me suis souvenu de la parole du
Sage : « Ce que j'ai appris, j'en fais part aux autres,
sans envie, et je ne cache point les trésors qui y sont
contenus »
Que renfermait donc ce manuscrit ? En substance,
rien de nouveau ; car, partant du Principe ou Fondement
si connu de saint Ignace, admirablement commenté,
il arrive à des conclusions que la plus simple
logique suffit à déduire. Or c'est précisément la simplicité,
c'est la logique irréductihle de cette argumentation,
c'est l'étonnante richesse de textes sacrés dont
elle est corroborée, qui m'ont ravi.
Ils ne sont pas communs, en notre fin de siècle surtout,
les traités de spiritualité saisissant tout d'abord
l'intelligence, la persuadant à l'aide de la raison et de
la foi, et l'obligeant à orienter la volonté du côté du
devoir et de la perfection. Quelle base autrement plus
solide que le sentimentalisme tant exploité de nos
jours au service, ou plutôt au préjudice de la piété !
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
Le sentiment est-il donc exclu de ces pages ? On le
dirait, en les ouvrant, à la vue des efforts de l'auteur
pour le réduire à un rôle secondaire . Cependant, bientôt,
de la lumière d'une doctrine claire et irréfutable
jaillit une chaleur qui gagne le coeur. La grande loi
de l'amour, "Diliges Dominum ", dégageant l'âme des
retours de l'égoïsme, la pénètre d'une flamme bienfaisante,
active, exempte d'alliage, riche des plus onctueuses
consolations.
C'est ainsi que, en apparence à son insu, en réalité
par une voie éminemment logique, ce livre monte des
régions de l'ascétisme à celles du mysticisme le plus
délié et le plus sûr. Par là même, et c'est ce qui, à
mes yeux, lui donne un attrait familial, cette doctrine
se rattache et s'identifie à celle de saint François de
Sales et de ses meilleurs interprètes. On verra ce
suave Docteur souvent cité, et il semble avoir inspiré
le plan et les déductions pratiques de ce travail, dans
ses conseils à la présidente Brulart. "Il ne faut pas
juger lés choses selon notre goût, mais selon celui de
Dieu ; c'est le grand mot. Si nous sommés saints suivant
notre volonté, nous ne le serons jamais bien ; il
faut que nous le soyons selon la volonté de Dieu".
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
Je tenais à expliquer, par ce peu de mots, mon
humble intervention dans la publication de ce volume.
Je supplie le lecteur de n'en pas sauter une ligne, à
commencer par l'Avant-propos. Cela me parait nécessaire
pour bien saisir, goûter et pratiquer ces enseignements.
L'auteur, en me livrant son oeuvre, me disait ingénument
qu'il me confiait un enfant abandonné et
me priait de l'adopter. Je l'adopte avec l'unique regret
de n'avoir pas l'honneur d'en être le père. Je l'ai
baptisé en lui donnant un titre qui me parait lui convenir,
et j'ai eu la bonne fortune de lui trouver un
parrain éminent dans Monseigneur mon Evêque, dont
l'approbation assurera, Dieu aidant, le succès de cet
ouvrage.
Annecy, en la fête de Notre-Dame du Bon Conseil,
26 avril 1894.
Joseph Tissot,
missionnaire de S .-François de Sales.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
gabrielle- Nombre de messages : 19801
Date d'inscription : 25/01/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
Gabrielle a écrit:
Mais de rien, chère Gabrielle.
Merci.
Mais de rien, chère Gabrielle.
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
APPROBATION
DE MONSEIGNEUR L'ÉVÊQUE D'ANNECY
Vivre de la vie intérieure est la légitime et noble ambition
des âmes qui ont l'intelligence de ce que la Religion attend
d'elles et leur promet. Car il y a deux vies pour le Chrétien.
L'une lui est commune avec les hommes qui n'ont pas le
bonheur de posséder la Foi de l'Eglise, l'autre lui est propre,
il a et doit entretenir les relations qu'entraîne le commerce
des hommes ; mais il a encore des relations habituelles,
constantes avec Dieu et avec les Saints, ce que l'Apôtre appelle
« notre conversation dans le Ciel ».
Cette vie supérieure, cette conversation intime est nommée
vie intérieure par tous les écrivains mystiques. Elle a deux
facteurs, la grâce de Dieu et l'action de l'âme : action qui est
soumise à de grandes variétés de forme et de mode selon le
caractère, selon les dispositions, les habitudes d'esprit et les
mouvements du coeur en chaque sujet. La direction de l'âme
dans cette union de son activité propre avec les grâces qu'elle
reçoit de Dieu est donc une science, elle est un art. C'est ce
qui explique comment un si grand nombre de livres ont été
écrits sur ce môme sujet : les moyens les plus sûrs et les plus
faciles à employer pour procurer à l'âme le bonheur inexprimable
de vivre au dedans d'elle-même avec Dieu, de commencer
la vie du Ciel par la vie intérieure. La simplicité à
obtenir dans les procédés, telle est la fin que s'est proposée
l'auteur inconnu, mais à coup sûr très compétent, de l'ouvrage
qui nous a été présenté par le R. P. Supérieur des Missionnaires
de Saint -François de Sales d'Annecy, et pour
lequel il sollicite notre approbation : LA VIE INTÉRIEURE SIMPLIFIÉE
ET RAMENÉE A SON FONDEMENT.
Le désir de rendre la vie intérieure plus accessible en diminuant
l'appareil souvent très compliqué dont l'entourent beaucoup
de Maitres de la vie spirituelle est assurément excellent :
que d'àmes sont tenues à l'écart par le nombre des actes qu'on
leur demande d'accomplir pour vivre en union avec Dieu,
par la multitude des distinctions et la minutie des détails !
Cette pensée, bonne en elle-même, a été exposée et traduite
d'une façon heureuse. Nous conseillons et recommandons la
lecture attentive et répétée de ce livre aux prêtres et aux
fidèles. Les prêtres y trouveront grand profit pour leur
propre avancement dans la vie intérieure et de vives lumières
pour la conduite des âmes dont la direction leur est
confiée.
Donné à Annecy, le 23 avril 1894.
+ LOUIS, Evêque d'Annecy.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
APPROBATION DE SON EMINENCE LE CARDINAL BOURRET,
Evèque de Rodez.
Mon Révérend Père,
Le livre que vous venez de publier sous le titre : La vie
intérieure simplifiée et ramenée à son fondement, combat un
mal qui dénature, en beaucoup d'âmes, la piété, savoir la
reliogisité vague, sentimentaliste, encombrée de pratiques
minutieuses.
Il concentre sur un point, un seul point, l'accomplissement
de la volonté de Dieu, tant de lumière qu'il l'éclairé et
l'inonde.
L'avant-propos dessine déjà nettement son plan. Mais
lorsqu'après un commentaire très corsé du Principe de saint
Ignace, l'auteur s'élève par voie de conséquence, à l'analyse
des divers degrés de la piété, mais surtout quand il parle du
bon plaisir divin et de son acceptation, il me semble vraiment
neuf, suggestif.
Rempli d'ailleurs de textes sacrés admirablement commentés,
de passages des Pères et de saint Thomas, ce livre
laisse loin derrière lui tant d'autres petits volumes sans théologie,
sans profondeur et sans onction.
Bien médité, il peut retourner et sanctifier une âme élevée,
docile aux leçons de la logique et de la Foi.
Je crois faire une bonne oeuvre en le recommandant
+ JOSEPH, Gard. BOURRET,
Evêque de Rodez.
Rodez, 25 Juin 1894.
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
AVANT-PROPOS
1° Quel est l'objet de ces courtes réflexions? Elles
n'ont aucune prétention à être un traité de vie spirituelle,
ni même un commencement quelconque de
traité ascétique. Leur but est plus modeste. Ce sont
simplement quelques considérations élémentaires,
suggérées par le soin des âmes que Dieu appelle
dans les voies d'une piété sérieuse. Notre désir est
uniquement de signaler un grand écueil, contre
lequel viennent sombrer hélas ! des âmes en trop
grand nombre; et afin de les préserver contre ses
dangers, tous les efforts sont ici concentrés sur un
seul point, celui de tous qui est le plus important, le
plus fondamental. Ce point on voudrait l'éclairer : il
faudrait pouvoir l'inonder de lumière ! Au milieu
des brouillards qui nous enveloppent, il faudrait
un phare puissant, qui concentrât tous ses feux sur
ce point. Hélas ! ce petit travail a trop bien la
conscience de n'être point un phare. Si tout au
moins il pouvait être une petite lampe ! s'il pouvait
projeter dans les ténèbres son rayon faible et vacillant
! C'est là sa modeste ambition. Que si quelque
âme y trouve un rayon de lumière, elle l'attribuera
à Celui-là seul qui est lumière sans ténèbres.
L'homme en lui-même est toujours ténèbres, il
n'est lumière que dans le Seigneur.
Quel est l'écueil à signaler, je voudrais le dire
tout d'abord, je dirai ensuite quel est le point à
éclairer.
2° La piété aujourd'hui souffre d'une maladie
générale : elle manque de substance et de fond,
l'élément solide lui fait défaut. Tout est si superficiel
dans certaines âmes ! ... et dans certains livres ! ...
Faut-il dire que la piété a suivi la marche descendante
du siècle, ou que le siècle s'est affaissé par
l'affaiblissement même de la piété ? je ne sais. L'un
et l'autre sans doute. Mais ne serait-il point plus vrai
de dire que l'affadissement du sel a laissé la terre
se corrompre? Vous êtes le sel de la terre; cette
parole adressée aux Apôtres, et à tous ceux qui
entrent en participation de leur ministère, trouve
aussi son application dans les âmes supérieures qui,
par cette force amère cachée dans la piété, sont appelées
à purifier" le monde et à le préserver de la corruption.
Et si le sel s'est affadi , avec quoi salera-t-on ?
Quoi qu'il en soit, le mal est le même de part et
d'autre. Des régions de l'idée et des principes, on
est descendu au terre-à-terre des émotions et des
sens. Dans la vie publique comme dans la vie privée,
dans la vie intellectuelle comme dans la vie
morale, dans la vie spirituelle même, on cherche
les émotions, on vit par les sens. La vie s'animalise
et tend à n'être plus qu'une suite de sensations. Les
chemins profonds de l'esprit et du coeur sont de
plus en plus ignorés ; le romantisme pénètre tout,
même la piété. Dieu ! combien le sentimentalisme
a faussé la piété ! S'attachant aux dehors doucereux
qu'il embellit des plus brillantes fleurs de
mysticité, se berçant dans les vapeurs troublantes
des sens, il a, par ses dehors trompeurs, caché aux
âmes le vide absolu qu'il recouvre ; en sorte qu'elles
savent à peine bien souvent qu'elles n'ont plus de
la piété que les apparences, et qu'elles en ont rejeté
la vertu. La fascination de la bagatelle a fait
perdre de vue le bien profond, on ne voit plus que
les séductions de la surface.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
3° En vivant par les sens, on vit au dehors, à la
superficie : on ne pénètre plus dans l'intime de
l'âme. L'âme a des profondeurs infinies. « Dieu,
dit-on, parle au fond de toute âme. Ecouter dans ce
fond où la vérité se fait entendre, et où se recueillent
les idées, aller par la piété au Maître intérieur. »
Combien y en a-t-il qui sachent le faire? Combien
qui y pensent ? Combien qui comprennent la voie
intellectuelle par laquelle Dieu vient à nous, et qui,
pour le rencontrer, sachent se promener dans l'intérieur
de leur maison, dans les profondeurs sans
tache de leur coeur !
Hélas, on connaît si peu son intérieur !
on sait si peu y entrer !... Parfois on a si
peu souci d'y pénétrer, n'en a-t-on même pas peur
trop souvent? On se contente de ce regard sommaire
et superficiel qui suffit à établir au dehors une correction
relative, mais la purification profonde de l'âme,
la transformation progressive de la vie humaine en
la vie divine, le dépouillement du vieil homme et
le revêtement du nouveau, tout ce travail des profondeurs,
on l'ignore à peu près. On laisse les profondeurs
envahies par toutes sortes de misères. La recherche
de soi, qui est le résumé de tous les vices de
l'homme et la cause de toutes ses fautes, s'accommode
très bien de ce sentimentalisme superficiel. C'est si
agréable d'être content de soi et de Dieu ! ... Et quand
on est si bien sur ce Thabor, pourquoi n'y pas
faire trois tentes ? Oui, mais là ne logeront ni
Jésus-Christ, ni Moïse, ni Elle ; là en compagnie de
la piété sensible logent la sensualité et l'orgueil.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
Ce n'est point ce lieu que Dieu a désigné pour y
établir les ascensions du coeur ; les ascensions du
coeur partent de plus profond, elles s'élèvent de la
vallée des larmes. Là, dans ces profondeurs c'est
la lutte, c'est le travail. Il faut arracher, déraciner
cette recherche personnelle, cet amour de soi qui est
si vivace au coeur et qui a jeté partout de si profondes
racines. Le labeur est rude et les jouissances
rares, du moins pour les sens. Il y a bien là des
jouissances et plus vraies et plus pleines. Dieu lui-même
prend part au travail et communique au travailleur
la joie de sa présence, c'est pourquoi il est
bienheureux. Mais les sens ignorent ces jouissances,
ils voient les larmes et le travail, les peines de la
montée et la lutte, c'est pourquoi on craint instinctivement
les profondeurs où se fait ce travail. Il est
si facile de s'illusionner quand d'un côté on rencontre
sans grande difficulté des joies que l'on croit
très pures, et que de l'autre on voit des combats que
l'on ne croit pas très nécessaires !... Aussi les prétextes
abondent pour préférer les jouissances immédiates
et faciles de la surface, au labeur et au combat
des profondeurs.
Et ainsi il arrive ce que dit saint Jean de la Croix.
« Plusieurs, dit-il, par défaut de science, se servent
des biens spirituels pour la seule satisfaction des
sens, et leur esprit reste ainsi privé de tout fruit
réel. La partie inférieure attire de son côté l'eau
féconde de la grâce et l'empêche de parvenir jusqu'à
l'esprit qui demeure en proie à une désolante
sécheresse et à l'angoisse du vide. A peine trouverat-
on une personne qui échappe à cette tyrannie des
sens. »
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
4° Vivant à la superficie de l'âme, on vit de même
à la superficie de toutes choses, car l'homme qui ne
sait plus pénétrer son âme ne sait plus pénétrer les
profondeurs d'aucune chose. C'est l'extérieur qui
occupe, c'est le détail qui devient l'important. Ainsi
dans les devoirs et les obligations on voit la lettre
plus que l'esprit, l'écorceplus que la moelle, le corps
plus que l'âme. On sait que tels et tels détails sont
prescrits, tels autres défendus. On ne voit que le
côté extérieur de la loi, la fait matériel de la prescription,
et c'est la seule chose à laquelle on attache
une certaine importance.
On ne voit pas le côté intérieur, le pourquoi,
le but de la prescription, l'esprit de la loi,
et ainsi on apporte une fidélité
extérieure et mécanique à observer matériellement
la lettre qu'on voit et qui tue, sans s'inspirer de
l'esprit qui vivifierait et qu'on ne voit pas. Par
exemple, dans les exercices de piété, méditation,
office, chapelet etc., ce qui préoccupe principalement
et quelquefois exclusivement c'est le côté extérieur;
on s'inquiète surtout d'accomplir l'obligation
matérielle et, si on est fidèle à accomplir ces
obligations tant bien que mal dans leur intégrité
extérieure, on est tranquille ; la loi est accomplie,
parce que l'extérieur est sauf. Si on y est infidèle,
c'est surtout la brèche extérieure dont on s'inquiète,
c'est l'inexactitude matérielle que l'on se reproche,,
beaucoup plus que la négligence des besoins intérieurs
auxquels répondent ces pratiques.
On se demande
si peu à quels besoins profonds répondent
les pratiques imposées par la loi ou introduites par
l'habitude ! Les besoins profonds, on ne les connaît
plus. On a besoin surtout d'agitation au dehors, de
sensation à la surface, et cela ne se trouvant pas
dans la loi, on va le demander à des pratiques factices,
propres à émouvoir. Pendant ce temps-là, on
se contente, pour ce qui est d'obligation, de surveiller
l'extérieur, ce qui, à la vérité, coûte moins. « L'esprit
demeure dans l'élémentaire, dans ce mot seul,
et n'entre pas vraiment dans la région de la pensée.
Faute de piété, l'esprit ne va ni du mot à l'idée, ni
de l'idée à l'âme, encore moins de l'âme à Dieu. '
Et de la sorte, une âme dont la fidélité aux pratiques
extérieures laisse peu à désirer, n'avance pas, parce
qu'elle ne va pas à l'intérieur où elle puiserait la
vie ; c'est comme un automate dont tous les mouvements
sont réglés, mais demeurent éternellement
les mêmes.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
5° Attachée aux pratiques extérieures, l'âme n'a
pas d'essor. Elle est emprisonnée, enchaînée, engluée.
Voyant les choses par le petit côté, elle se
rapetisse, elle se rétrécit. Les petites pratiques font
les petites âmes, car l'âme arrive toujours à prendre
les proportions des choses auxquelles elle s'attache.
Je deviens petit, si je m'attache aux petites choses,
ou plutôt au petit côté des choses, car les petites
choses ont leurs grands côtés comme les grandes
ont leur petit côté. Il y a des âmes qui ne savent
s'attacher qu'aux petits côtés dans les grandes
comme dans les petites choses et elles en deviennent
tout à fait mesquines et étroites. D'autres au contraire,
dans les petites aussi bien que dans les grandes
choses, voient sans cesse les grands côtés, auxquels
elles s'attachent et qui les dilatent sans cesse.
Dans la piété comme en toutes choses d'ailleurs,
l'extérieur est le petit côté. Dès lors que j'en fais
l'important, tout s'étiole en moi, tout devient mesquin;
mon horizon spirituel se rétrécit, je deviens
esclave de petites bagatelles qui ne me laissent plus
d'expansion. J'estime que quelques infidélités extérieures
tuent toute la piété; c'est vrai, hélas ! de la
mienne qui est toute extérieure. Ainsi si je suis
fidèle à mes petites pratiques, je m'y emprisonne ;
si je les néglige, il ne me reste plus rien. Ceci est
d'expérience journalière, et voilà pourquoi on voit
de pauvres âmes sans cesse occupées à faire la navette,
reprenant leurs pratiques, les abandonnant
peu à peu, y revenant pour les quitter encore.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
6° De là naît le morcellement et la division. On
se traîne dans la piété à travers une foule de détails
sans cohésion et sans portée. Il n'y a pas d'unité
dans l'âme, ses forces s'éparpillent sur une multitude
de pratiques qui n'ont aucun centre commun,
aucun but supérieur. Rien n'est déplorable comme
de voir le manque de coordination dans les idées,
de suite dans la volonté, d'enchaînement dans les
actes. La piété n'est plus un corps vivant : c'est une
série d'essais, de tâtonnements, d'hésitations. On
dirait que la boussole manque, tant les manoeuvres
du navire sont peu cohérentes. Elle manque en effet
: il manque une âme à ce corps. On a le détail
de la lettre qui tue, on n'a pas l'esprit qui vivifie.
C'est le morcellement, la division, l'individualisme,
le mal révolutionnaire dans la piété.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
7º Aussi quelle faiblesse ! On ne vit pas, on se
traîne. Et cela, malgré un développement assez
grand de bonne volonté. « Je n'y comprends rien, me
disait un vénérable vétéran des luttes sacerdotales, plus
j'avance, plus je recule. Il me semble que je fais
des efforts, que j'en ai fait beaucoup déjà, et malgré
cela je me sens toujours moins avancé. » J'admets
qu'il y ait en ces paroles quelque chose de l'hu-
milité qui s'ignore ; il y avait aussi beaucoup de la
triste vérité constatée dans bien des âmes. "Marthe,
Marthe, vous êtes inquiète, vous êtes troublée,
parce que vous vous occupez de beaucoup de choses."
Voyez-vous comment la multiplicité faisait
le malheur de Marthe? Elle avait trop de choses en
tête ! La multiplicité la divisait, et en la divisant
l'inquiétait, et en l'inquiétant la troublait, et en la
troublant l'affaiblissait, dé telle façon qu'elle ne pouvait
plus y suffire et qu'elle était obligée de venir
réclamer le secours de sa soeur. Ainsi en est-il pour
nous. Les multiples occupations de la vie, les mille
préoccupations de l'intérêt personnel divisent l'âme,
et la multiplicité incohérente des exercices de piété,
au lieu d'apporter à l'âme l'unité, la force et la paix,
ajoute à son mal en la divisant, la troublant et l'af-
faiblissant davantage. Comment s'étonner de la
langueur des âmes quand ce qui devrait être leur
guérison et leur vie, augmente le mal dont elles
souffrent ?
Si on savait quel est l'unique nécessaire !...
Si on s'en occupait uniquement!... si on songeait
uniquement à bâtir l'unique édifice sur l'unique
fondement ! . . . Mais que voulez-vous ? On bâtit sur
le sable. Quoi d'étonnant si la maison ne tient pas ?
Tant de vents soufflent ! tant de torrents se précipitent !
Et quand le ruineux édifice est à peu près
à terre, on va dans une retraite chercher à le remonter.
Et semblable à l'enfant qui a vu crouler son
château de cartes et qui le veut rétablir, on songe
à prendre de nouvelles résolutions, de nouvelles
pratiques aussi extérieures, aussi peu profondes,
aussi incohérentes que les premières, par conséquent
aussi fragiles, et la construction sera condamnée
à s'écrouler encore au choc du vent et des eaux.
Et on ne songe pas à chercher le roc, on ne cherche
pas à établir un fondement solide et profond. Sait-on
même qu'il faut un fondement à cet édifice ?...
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
8° Ces observations, est-il besoin de le dire? n'ont
pas une portée universelle et ne visent pas tout le
monde. Elles signalent des défauts et ne parlent pas
des vertus. Ce serait une prétention absolument sotte
de vouloir établir le bilan des unes et des autres. Il
y a beaucoup d'âmes très vertueuses qui marchent
dans les vraies voies de Dieu et qui n'ont nul besoin
de mes pauvres réflexions pour aller à Lui. Leurs
lumières surpassent de beaucoup tout ce qu'elles
pourraient trouver ici. Mais aussi, le ministère me
le fait constater journellement, il y a des âmes qui
s'abusent et qui ignorent. Ces âmes, pleines de
bonne volonté d'ailleurs, sont exposées aux dangers
signalés ici , et elles respirent, comme une atmosphère
morbide, une foule d'idées fausses qui leur font une
piété maladive.
Si quelque faible rayon de lumière
échappé de ce petit travail, pouvait contribuer à en
éclairer une!... S'il pouvait porter à une seule un
léger remède qui aide à sa guérison !... Mon Dieu !
ce travail ne serait-il pas trop récompensé?... Mais
vous seul, ô mon Dieu ! éclairez, vous seul guérissez.
S'il y a ici quelque chose de vous, c'est ce quelque
chose qui éclairera et guérira. Vous seul savez
s'il y a de ce quelque chose dans ces réflexions !...
Oh ! quelle consolation si véritablement elles portaient
un rayon de votre lumière et de votre amour !
C'est tout ce qu'elles voudraient porter, ô mon
Dieu ! Qu'elles le portent aux âmes de bonne volonté,
à celles qui errent parce qu'elles ignorent.
C'est à elles surtout que s'adressent ces considérations,
car d'une manière générale les conseils donnés
ici visent ceux qui ne savent pas plutôt que
ceux qui ne veulent pas, ils tendent à éclairer la
bonne volonté plus qu'à secouer la mauvaise volonté.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
9º Tous ces maux : sentimentalisme, affaissement,
incohérence, division, faiblesse, ont une source
commune, tiennent à une même cause, le manque
de fondement. Rien ne sera guéri, tant que l'attention
ne se portera pas sur ce point essentiel, et c'est
celui que je désirerais éclairer. Pour élever un solide édifice
spirituel il faut avant tout s'occuper des fondements;
car l'élévation et la solidité de la contruction dépendent des fondations.
Sans fondement, rien de solide, rien de fort, rien de
durable. L'important, par conséquent, c'est de connaître
les fondements de la vie spirituelle, de les
établir fortement, et d'asseoir solidement l'édifice de
la perfection sur la base unique, en dehors de laquelle
rien de vivant ne peut être construit, car personne
ne peut établir de fondement autre que celui
qui a été établi.
C'est ce fondement unique que je voudrais montrer,
que je voudrais mettre en pleine lumière, si je le
pouvais. Je voudrais pouvoir dire aux âmes : Regardez,
voilà l'unique fondement; et je serais trop heureux
si je pouvais ajouter avec St Paul : J'ai comme un
sage architecte posé le fondement, suivant la grâce
que Dieu m'a donnée. A chacun maintenant de bâtir
dessus ; et à chacun aussi de voir comment il bâtit.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
10° Mais encore ne songé-je point à éclairer dans
son entier ce fondement dont parle S' Paul et qui
est le Christ Jésus ; ce serait alors un immense traité.
La personne même de J.-C- chef et modèle des prédestinés,
ne sera pas directement abordée dans ces
considérations. Elles sont plus élémentaires, et elles
se concentreront sur un seul des angles du grand
édifice, celui que St Ignace dans ses exercices appelle
le principe et le fondement. Tout se bornera à cette
idée unique, mais véritablement fondamentale, tout
convergera vers elle, et rien ne sera dit qui n'ait un
rapport direct et immédiat avec elle. C'est pour cela
que ce petit travail mentionne dans son titre le mot :
Fondement.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
11° Il est bon de dire la manière de procéder. Sur
la racine de David s'élèvera une tige, et sur cette tige
une fleur, et sur cette fleur reposera l'Esprit de
Dieu. C'est sous cette image qu'Isaïe annonce
J.-C. Or J.-C. est le chef et le modèle de tous les
chrétiens, il est l'archétype de toute la vie spirituelle,
et ce qui Lui convient, convient dans certaines proportions
à tout ce qui naît de Lui. Aussi la piété est-elle
bien représentée par cette même image. Il y a
une racine qui est la raison, une tige qui est la foi
et une fleur qui est la spiritualité. Sans racine pas de
tige, sans tige pas de fleur. La fleur s'élève sur la
tige et la tige sur la racine. La sève mystérieuse fécondant
la racine, s'élève dans la tige et vient s'épanouir
dans la fleur. Ainsi sous l'action mystérieuse
de la sève divine qui s'appelle la grâce, la raison,
qui est la racine, est fécondée, sur elle s'élève la
lige de la foi, et sur cette tige de la foi s'épanouit
l'admirable fleur de la spiritualité. Ainsi la spiritualité
est la fleur de la foi et de la raison, elle
s'élève tout ensemble et sur la raison et sur la foi, et
toute spiritualité qui n'a pas cette tige et cette racine
disons le mot, toute spiritualité qui dans ses fondements
n'est pas théologique et philosophique, n'est
pas la fleur sur laquelle repose l'Esprit de Dieu.
C'est pourquoi ici on s'adresse d'abord à la raison
et il s'y trouve fort peu de chose pour le sentiment.
Tant de livres exagèrent aujourd'hui sur ce point
du sentiment, qu'il est bien permis de lui faire ici la
part très petite. Du reste, voulant aller au fondement
et à la racine, il faut aller à la raison. Aussi un
simple syllogisme, basé sur une idée rationnelle,
suffira pour nous conduire jusqu'aux plus extrêmes
conclusions de la plus parfaite sainteté. La raison
sans doute s'éclairera de la foi, la racine ne sera pas
séparée de sa tige pour donner sa fleur, mais il
n'en est pas moins vrai que cette fleur de la piété
apparaît comme le complet et parfait épanouissement
de la raison par la foi. On s'en convaincra
dans les développements, on verra que pour être un
saint dans toute la rigueur de la chose, il suffirait,
la grâce aidant, je ne dis pas d'avoir la raison, mais
de se conduire selon la raison, en sorte que si on a
défini l'homme un animal raisonnable, il faut dire
que cet animal raisonnable passe sa vie à déraisonner.
La piété est la fine fleur de la foi et de la raison;
la raison ni la foi n'ont leur complet épanouissement
que dans la piété.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
12° Personne, je pense, ne se méprendra sur la
portée des revendications énoncées ici en faveur de
la raison, on se convaincra facilement qu'elles ne
sont point au détriment de la foi et de la grâce,
mais uniquement au détriment du sentimentalisme,
(j'allais dire de l'animalité, ces deux choses sont
si proches parentes !). Il a pris dans la direction de
la vie une importance qui ne lui est attribuée ni par
la nature ni par la grâce, et il amoindrit par ce fait
la nature et la grâce.
L'intelligence est la faculté maîtresse de l'homme,
c'est elle qui doit diriger. C'est l'intelligence qui
prépare les voies à la foi, et c'est dans cette faculté
que réside cette grande vertu. Quand l'intelligence
a été supplantée dans ses fonctions directrices,
non seulement la nature, mais la foi en souffre et la
spiritualité est viciée. C'est ce qui arrive de nos
jours. La sensibilité, qui occupe le dernier rang
dans les facultés de l'homme, prend la première
place, elle aspire à diriger même la piété. C'est
ainsi, je l'ai dit déjà, que la vie devient une affaire
de sentiment, la foi une impression, la piété une
sensation. Tout s'animalise et se matérialise, tout
jusqu'aux plus hauts sommets descend et s'affaisse :
tout s'extériorise et se vide ; tout branle et tombe ;
tout végète et s'étiole. Pourquoi ? parce que l'arbre
n'est plus sur sa racine, l'édifice n'est plus sur sa
base, la montagne n'est plus sur ses fondements, le
corps n'a plus d'âme.
Il faut remédier à ce désordre, renverser cette
usurpation de la sensibilité, et rendre à la raison
son rôle de première servante de la foi. Donc tout
ce qui est ici énergiquement réclamé au profit de
la raison, l'est bien plus au profit de la foi et de la
piété. On vise à leur rendre à toutes deux leur base
et leur racine, afin qu'elles puissent se développer
dans toute leur force et leur vérité.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
.
MAGNIFICO !
VIVA CRISTO REY ! QUE VIVA !.
MAGNIFICO !
VIVA CRISTO REY ! QUE VIVA !
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
Date d'inscription : 15/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
13º
Trois grandes idées résument ce petit écrit :
la fin, la voie, les moyens. Quelle est la fin de toute
vie surnaturelle ? quelle en est la voie ? quels en
sont les moyens ? La fin où il faut tendre, la voie
qu'il faut suivre, les moyens qu'il faut employer.
Montrer la fin unique et suprême, la voie qui mène
à cette fin, et les moyens de marcher dans cette
voie, tel est le triple objet de ce travail, qui se trouve
ainsi divisé en trois parties.
Ces questions ne seront traitées que dans leurs
plus grandes lignes ; on ne s'occupera que des principes
les plus fondamentaux, sans descendre aux détails
et à l'application, ce qui serait infini, et ne
répondrait pas au but que l'on se propose. On ne
trouvera ici que ce que je pourrais appeler le grand
canevas ou mieux encore le squelette, la charpente
de la piété. Que serait une broderie sans canevas,
un corps sans squelette, un édifice sans charpente ?
La piété est un peu trop cela de nos jours ; il faut
donc revenir au canevas, au squelette, à la charpente.
C'est pourquoi on ne fera qu'indiquer les
maîtresses pièces et leur enchaînement. A qui réfléchira
bien, rien ne paraîtra fini, partout il semblera
qu'il y a des pierres d'attente ; une grande
idée est à peine ébauchée que l'on passe à une autre.
Tout cela est à dessein, afin de forcer chacun à construire
lui-même, à achever dans toutes ses parties :
le grand travail dont le premier plan lui est ici
donné.
Encore une fois, c'est un squelette qui demande
à être revêtu de chair, de veines, de nerfs,
de muscles et de peau pour atteindre à la perfection
d'un corps complet. C'est J.-C. qui est la forme parfaite et la vie
de ce corps ; c'est lui qui en est le revêtement
et l'achèvement. C'est lui le vrai sang qui court dans
ces veines, et qui porte partout jusqu'aux extrémités
les formes parfaites de la vie. La forme pleine de la
vie n'est donnée que par lui. Or sa personne sacrée
et son rôle vivificateur, je l'ai dit, no sont pas
abordés ici. En un mot, il y a un canevas, mais pas
de broderie ; un squelette, mais pas de corps parfait,
une charpente mais pas d'édifice fini. Rien n'est
achevé, mais tout est préparé. Puisse du moins ce
qui est préparé l'être assez solidement, assez forte-
ment pour servir à la construction d'un édifice de
première valeur, et à la croissance d'un corps de
toute beauté !
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
14º
Les principes et les idées sont ici enchaînés de
telle façon, que le lecteur ne peut avoir pleine satisfaction
qu'après avoir parcouru le livre très sérieusement
dans son entier. Au début peut-être des
difficultés se soulèveront dans l'esprit ; j'ose croire
que toutes s'éclaireront au cours de la lecture. Il
faut seulement savoir être patient et laisser la multitude
de questions soulevées venir se ranger à leur
moment et dans leur ordre. Ceci n'est point un livre
où l'on puisse à volonté prendre une pièce et la
détacher ; tout se tient, tout s'enchaîne, tout s'appelle.
Si vous brisez l'enchaînement, vous perdez le
meilleur du travail et vous ne le comprenez plus.
15°
Une dernière remarque qui a son importance.
L'idée fondamentale pourra au premier abord paraître
assez connue, pour qu'on se permette de
passer rapidement. Je prie toutefois de bien la peser,
d'en prendre la connaissance la plus approfondie,
parce que c'est de là précisément que la raison tirera
des conclusions logiques d'une exactitude rigoureuse
et d'une portée pratique que l'on sera probablement
fort loin d'avoir soupçonnée dès le début. C'est
comme un coffret sans apparence extérieure, mais
qui dans son intérieur contient des trésors. Tant
qu'on ne l'a pas ouvert, on ne sait rien et on est
comme ne possédant rien. Or, pour ouvrir, il faut
beaucoup chercher le secret. Cherchez le secret, cher
lecteur, et réfléchissez bien. Que si dans l'intérieur
de mon petit coffret vous trouvez quelque bonne
perle, veuillez bien prier l'Auteur de tout don parfait,
le Père des lumières, de ne pas laisser dans
un trop grand dénûment la pauvre âme de celui qui
vous dit ces choses.
J'ajoute un dernier mot. Quelques-uns pourront
à la première lecture croire trouver ici une nouvelle
méthode de piété. Rien n'est si loin de la pensée
de l'auteur. Son but unique est de rappeler des
principes, et il conjure le lecteur de n'y voir que les
principes et de se dégager de tout ce qui pourrait lui
paraître méthode. Les principes seuls sont le fondement,
la méthode est toujours accessoire. Celui qui
conserverait de ce livre la moindre idée de méthode
n'aurait pas vu le fond de l'idée inspiratrice et directrice
de tout ce travail.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
PREMIERE PARTIE
LA FIN
CHAPITRE PREMIER
La Fin des Créatures
1° Dieu a créé toutes choses. Tout a été fait par
lui et rien n'a été l'ait sans lui. Il a dit et tout a
été fait, il a commandé et tout a été créé. C'est
lui qui donne à tout la vie, la respiration et toutes
choses, car c'est en lui que nous avons la vie, le
mouvement et l'être.
C'est là une vérité que la raison me démontre et
que la foi m'apprend à adorer. Oui, mon Dieu, vous
avez tout fait par votre parole et il ne s'est fait
que ce que vous avez voulu. Le jour et la nuit
sont votre ouvrage, vous avez façonné l'aurore et
le soleil, vous avez fait le monde jusqu'à ses extrê-
mes limites, Vous avez fait le ciel et la terre et
toutes les créatures qui se meuvent dans l'immense
orbite des cieux.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
2º Dieu qui a créé le ciel, qui a formé la terre,
qui l'a faite, qui l'a façonnée, ne l'a point créée en
vain. Car c'est par la sagesse que le Seigneur a
fondé la terre et par la prudence qu'il a établi les
cieux. Oui, Seigneur, vous avez tout créé dans
la sagesse, et vous avez tout disposé avec mesure,
nombre et poids. Or la sagesse a en propre la
force d'atteindre à toutes ses fins, et d'y adapter
harmonieusement toutes choses. Sagesse infinie,
Dieu s'est donc proposé une fin en créant, et c'est
à cette fin qu'il a adapté toutes ses créatures. Les
créatures ont un but, elles existent pour une fin.
Cette fin quelle est-elle ? Elle ne peut être autre que
Dieu même. Car si Dieu eût créé pour une autre fin
que lui-même, il aurait rapporté et subordonné son
action à cette fin, il s'y serait subordonné lui-même,
puisque son action c'est lui-même. Ainsi cette fin
serait au-dessus de Dieu, c'est-à-dire que Dieu ne serait
pas Dieu. Dieu n'a donc pu créer que pour lui-même,
les créatures ne peuvent exister que pour lui
et pour sa gloire.
C'est moi le Seigneur, dit-il, c'est moi qui ai créé
les cieux et qui les ai étendus, qui ai alîermi la terre
et tout ce qui y croit, qui donne la respiration à ceux
qui l'habitent, et la vie à ceux qui s'y meuvent. C'est
moi le Seigneur, c'est là mon nom, je ne donnerai
pas ma gloire à un autre. C'est pour moi, pour moi
seul que j'agirai, je ne donnerai pas ma gloire à un
autre. Ecoute-moi, Jacob, écoute-moi, Israël, c'est
moi, moi le premier, moi le dernier. Je suis le
commencement et la fin, l'alpha et l'oméga, le premier
et le dernier.
C'est donc pour lui-même que Dieu a tout créé.
Tout est fait par lui, tout est fait pour lui. Rien
n'existe sans lui, rien n'existe que pour lui. Tout
vient de lui, tout va à lui. Il est le commencement
unique, il est la fin totale. Il est seul le principe, il
est seul la fin. Il est le premier, il est le dernier. Il
est impossible que rien existe sans sa puissance, il
est impossible que rien n'existe autrement que pour
sa gloire. Sa puissance est l'unique raison d'être des
choses comme principe, sa gloire est leur unique
raison d'être comme fin.
À SUIVRE...
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
Re: LA VIE INTÉRIEURE (R.P. Joseph Tissot)
À SUIVRE...3° Si la gloire de Dieu est l'unique raison d'être,
l'unique fin des choses, elle est aussi leur unique
bien : car il ne peut y avoir pour un être d'autre
bien essentiel que son unique fin. Le bien c'est ce que
tout être désire et recherche, or ce que tout être
désire ainsi et recherche est pour lui sa fin. La fin
est donc pour tout être son vrai bien. Et
comme la gloire de Dieu est l'unique fin essentielle
des êtres, elle est aussi leur unique vrai bien.
L'unique et souverain Bien s'appelle la fin, dit
saint Augustin, précisément parce que c'est pour
lui que nous voulons toutes les autres choses, et lui
nous ne le voulons que pour lui-même. Les
moyens pour arriver à la fin ne sont bien que dans
la mesure où ils servent à cette fin.
Il n'y a dans les moyens de bien vrai que ce qui
conduit à la fin.
N. B. Le mot « essentiel » est toujours employé
dans sa signification philosophique la plus absolue.
Il ne servira jamais qu'à désigner ce qui est de l'essence
même des choses, c'est-à-dire ce qui dans les
êtres et leurs rapports est d'une nécessité telle que
sans cela les êtres et leurs rapports n'existeraient
pas.
Javier- Nombre de messages : 4271
Localisation : Ilici Augusta (Hispania)
Date d'inscription : 26/02/2009
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