Mgr De Ségur, jeune homme, était artiste peintre.

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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 4:51 pm




Mgr DE SÉGUR - SOUVENIRS ET RÉCITS D'UN FRÈRE - par le Marquis (Anatole Henri Philippe) De Ségur - 1883 :

http://archive.org/stream/mgrdesgursouven01sggoog#page/n31/mode/2up




CHAPITRE II


Goût pour la peinture. —Vie de Jésus-Christ en dessins. — Première atteinte des yeux. — Paul Delaroche. — Conférence Saint-Vincent de Paul. — Conversion d'un mourant à l’hôpital. — Voyage en Russie. — Médaille d'or. — Départ pour Rome comme attaché d'ambassade.




Depuis sa conversion jusqu'à son entrée dans les ordres, Gaston de Ségur partagea sa vie entre sa famille, la peinture et les œuvres de charité. S'il alla dans le monde, ce fut de loin en loin, par pure convenance, par condescendance pour ses parents, et nous ne sachions pas qu'il ait remis les pieds au théâtre, ni qu'il ait dansé dans les salons de Paris, sinon quelques contredanses de charité avec des jeunes filles délaissées qui ne trouvaient pas de danseurs. Son cœur et son temps appartenaient tout entiers à Dieu, aux pauvres et à l'art.

Pendant l'hiver de 1838 à 1839, il passa presques toutes ses soirées chez la comtesse Rostopchine qu'il aimait de plus en plus, malgré le contraste de l’austérité de l'aïeule avec l'enjouement du petit-fils. Tandis qu'on causait autour de lui, il s'occupait à dessiner, et c'est alors qu'il conçut la pensée de reproduire en une suite de dessins la vie tout entière de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Cette œuvre charmante ne put être menée à terme ; il n'en acheva qu'une douzaine de dessins d'une grâce, d'une finesse et d'un sentiment religieux exquis. Le départ de sa grand'-mère et surtout la fatigue de la vue, résultat d'un travail si continu et si délicat, l'obligèrent de le suspendre et il ne le reprit jamais. Cette première atteinte du côté de ses yeux fut de courte durée et céda devant quelques soins et quelques semaines de repos. Mais ce fut comme un avertissement de la Providence, et le premier signe précurseur de l'infirmité qui devait crucifier et sanctifier sa vie. Il est touchant de penser que ce fut en reproduisant par le crayon la vie du Sauveur que le futur ministre de Jésus-Christ contracta ce premier pacte avec la souffrance. La comtesse Rostopchine repartit au printemps pour Moscou, sachant bien que, si elle pouvait revoir ses petits-enfants, elle ne reverrait plus en ce monde sa fille retenue en France par sa santé et ses nombreux devoirs de mère de famille. Pour lui épargner le déchirement d'une pareille séparation, elle partit un matin, lui laissant une lettre d'adieu ; tellement maîtresse d'elle-même jusqu'au bout, que, la veille au soir, en embrassant sa chère fille pour la dernière fois, elle ne trahit par aucun signe apparent la violence de son émotion et de sa douleur. Dieu fut le seul confident de son chagrin et de ses larmes. Femme admirable, la vraie femme forte de l'Écriture Sainte, qui porta sa croix jusqu'au bout de sa vie de quatre-vingt-six ans, sans une plainte ni une défaillance.

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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 5:41 pm


Guéri de son ophthalmie passagère, Gaston de Ségur se remit sérieusement à la peinture, et il fréquenta pendant six mois environ les ateliers de Paul Delaroche ; mais la liberté de mœurs qui règne en ces sortes de réunions, le langage et l'attitude de ses camarades, la nudité complète des modèles, le dégoûtèrent à un tel point, qu'il ne put dominer ses répugnances et qu'il abandonna, non sans regret, ses études à peine commencées. Il fit bien venir chez lui des modèles, enfants ou vieillards, pour continuer à peindre d'après nature ; mais il les faisait poser avec leurs vêtements, et de là vient que, dans ses tableaux, les têtes, les pieds et les mains révèlent seuls une étude approfondie ; sous les vêtements, on ne sent pas les muscles, les structures du corps humain, ce qui faisait dire au bon Pape Pie IX, au sujet de son portrait entre saint Pierre et saint Paul : « Ce bon Mgr de Ségur ! il a oublié de nous faire des épaules. »

Tout en cessant de fréquenter l'atelier de Paul Delaroche, Gaston de Ségur continua à voir le plus souvent qu'il pouvait le grand artiste qui s'intéressait à lui et lui donnait d'utiles conseils. Il allait à ses soirées, dans le petit hôtel de la rue de la Tour-des-Dames, où se réunissait l'élite du monde des arts, et où présidait avec une grâce sans pareille madame Delaroche, la charmante fille d'Horace Vernet. Elle accueillait le jeune homme avec une affabilité particulière, et II conserva d'elle le souvenir d'un ange prêté par le ciel à la terre, et rappelé trop tôt de la terre au ciel. C'est dans une de ses soirées que Paul Delaroche dit à M, de Ségur, qui lui exprimait l'intention d'envoyer son fils à Rome, comme attaché d'ambassade : « Quoi que vous fassiez, quelque carrière que vous choisissiez pour votre fils, sa vocation est d'être peintre et grand peintre.  

Il est permis de croire que si son entrée au séminaire n'avait à tout jamais interrompu ses études artistiques, Gaston de Ségur eût justifié l'opinion de son illustre maître. Le premier tableau qu'il exposa en 1845, le portrait de son père, obtint la médaille d'or ; et pour qu'un jeune homme de vingt et un ans, après quelques mois de travail sérieux, ait pu mériter pareille distinction, il fallait qu'il eut reçu de la Providence un don particulier. Quant à son talent de dessinateur, on peut dire que, dès cette époque, il était de premier ordre. Ses albums sont remplis de dessins où l'on admire à la fois des qualités maîtresses de composition et d'exécution. Son coup de crayon était d'une hardiesse extrême, et, quand il le voulait, d'une délicatesse achevée. Ses nombreux portraits au crayon, à l'estompe ou à l'aquarelle, ses compositions religieuses, ses images de saints, ont un égal mérite, et beaucoup touchent à la perfection. Il avait le don spécial, et il faut l'avouer, le goût dangereux des caricatures. D'un coup d’œil il saisissait les ridicules d'un visage, et d'un coup de crayon il les rendait avec une impitoyable vérité. Son bon cœur et sa charité ne tardèrent pas à retrancher de ses productions de ce genre tout ce qui pouvait blesser, tout ce qui dépassait la mesure d'une innocente plaisanterie, et quand par hasard il se laissait aller, dans l'intimité, à une expression un peu trop vive d'un ridicule physique ou moral, il condamnait à l’instant son œuvre à la destruction ou à la réclusion perpétuelle 1. Pour les caricatures politiques, il avait moins de scrupule, et, en 1848, il en crayonna plusieurs qui eussent fait la fortune d'un journal illustré. C'est ainsi qu'aprées les journées de juin, pendant la dictature nécessaire du général Cavaignac, il représenta le directeur en grand uniforme, assis sur une femme accroupie et coiffée d'un bonnet phrygien, pesant sur elle de tout son poids et tenant dans ses poings fermés les bras de la malheureuse allongés en bras de fauteuil. Au dessus du dessin était écrit cette légende : « La république à l'état de siège. » Il nous semble que Cham lui-même eût difficilement trouvé mieux.


1 - Citons comme exemple de ces caricatures coupables et condamnées, le portrait frappant d'un excellent homme de sa connaissance qui avait le double travers de se croire poète et de ne se laver jamais. Gaston de Ségur l'avait représenté sur un trépied, avec un corps de porc-épic et ces mots au dessous : un porc-épique.


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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 5:47 pm


En même temps qu'il cultivait par devoir et par goût le talent de peinture que Dieu lui avait donné, et qu'il achevait, consciencieusement son droit ; Gaston de Ségur donnait à l'amour de Dieu et des pauvres, ses premiers amis de Dieu, la meilleure part de son temps. Quand il avait nourri son âme par le double aliment de la méditation et de la communion, il allait à ses pauvres avec une allégresse et un dévouement infatigables. La société de Saint-Vincent de Paul commençait à se répandre de paroisse en paroisse, de ville en ville avec une merveilleuse rapidité, et le nombre des chrétiens de tout âge et de tout rang enrôlés dans cette armée volontaire de charité se comptait déjà par milliers à Paris. Parmi les conférences nouvellement fondées, celle des Missions étrangères était une des plus remarquables par l'esprit de sainteté qui animait beaucoup de ses membres. Là, pour ne citer que des noms consacrés par l'apostolat, la mort ou le martyre, le jeune étudiant en droit rencontrait toutes les semaine M. Fernand de Missol, docteur en médecine, depuis prêtre, M. Le Prévost, depuis prêtre, religieux et fondateur de la communauté des frères de Saint-Vincent de Paul, et Pierre Olivaint, depuis prêtre, jésuite et mis à mort pour la foi par les assassins de la Commune. C'était presque un cénacle que cette conférence ; elle ne se bornait pas à l'assistance matérielle et à l'évangélisation des pauvres ; son zèle débordait au delà des limites du quartier, au delà des murs de Paris, et ses membres allaient pendant la bonne saison entendre la messe en pèlerins et communier dans les églises presque désertes des environs de Paris, pour y réveiller la foi des populations et l'espérance presque éteinte des pasteurs. Cette ardeur de dévouement, cette soif des âmes, celte activité d'apostolat, qui excédaient peut-être un peu les habitudes de la société de Saint-Vincent de Paul fondée dans le double but de secourir les pauvres en les édifiant et de maintenir les jeunes gens chrétiens dans la foi pratique par l'exercice de la charité, étaient pour Gaston de Ségur, déjà prêtre en germe et apôtre dans l'âme, un attrait de plus.

A la suite de ses saints confrères, il se donnait tout entier aux pauvres et aux âmes et ne reculait devant aucun dévouement. Les vieillards qu'on lui donnait de préférence à visiter à cause de sa jeunesse s' éprenaient bien vite pour lui de la plus tendre affection, et le voyaient entrer dans leur mansarde comme un rayon de soleil dans un jour d'hiver. Il ne leur mesurait pas son temps, causait longuement avec eux, paraissait s'intéresser à leur récits, et gagnait leur cœur à Dieu par la douce contagion de sa charité. Plusieurs années après, alors qu'il était auditeur de rote à Rome, pour épanouir leurs visages, il suffisait de prononcer son nom, et un mot écrit de sa main, une lettre de dix lignes de leur ancien visiteur les remplissait de joie pour toute une semaine. Dès cette époque, dès l'âge de vingt ans, il avait le don, apostolique par excellence, de se faire aimer et de faire aimer Dieu. Il faut dire qu'il y allait avec une simplicité parfaite, se faisant pauvre avec et pour ses chers pauvres, leur apportant lui-même sous son bras des cotrets de bois, des vieux vêtements quêtés à leur intention, habillé et chaussé sans aucun vestige d'élégances et se dépouillant volontiers pour les enrichir de ses dépouilles.

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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 8:54 pm


A la visite des pauvres, il avait joint celle des malades dans les hôpitaux. Il se partageait les salles et les jours avec ses pieux confrères, notamment avec Pierre Olivaint, se faisait le consolateur et l'apôtre des mourants, et, semblable à saint Jean-Baptiste, il préparait les âmes à la venue du Sauveur dans la personne de ses ministres. Il a raconté lui-même, dans ses instructions familières, un des épisodes de cet apostolat avec une simplicité que nous ne saurions imiter et que nous préférons reproduire sans y changer un seul mot :

« La salle que je devais visiter ce jour-là (à l'hôpital Necker) était confiée aux soins d'une sœur de charité vieillie dans cet admirable ministère et non moins infatigable pour soulager les souffrances de ses malades que zélée pour le salut de leurs âmes. « Allez donc au no 39, me dit-elle ; c'est un homme de trente-deux ou trente-trois ans, poitrinaire au dernier degré, qui sera mort dans trois jours. J'ai eu beau faire, je n'ai pu rien en tirer, M. l'aumônier non plus : un de vos confrères de Saint-Vincent de Paul (c'était Pierre Olivaint) n'a pas mieux réussi que nous. Il est probable qu'il vous enverra promener aussi ; mais enfin il ne faut rien épargner; il s'agit d'une pauvre âme à sauver. — Eh ! mon Dieu, ma bonne sœur, s'il m'envoie promener, j'irai me promener, voilà tout, cela ne me fera pas grand mal. Dites seulement pour ce pauvre homme un Ave Maria pendant que j'irai lui parler. » De lit en lit, j'arrivai à mon no 39 ; je fut tout saisi en le voyant. La mort était peinte sur son visage ;.. son; affreuse maigreur donnait à ses yeux noirs une apparence étrange. Je m'approchai de son lit. Il me regarda fixement sans rien dire. Je lui demandai de ses nouvelles. Pas de réponse ;.. « Souffrez-vous beaucoup en ce moment ? Pourrais-je vous soulager en quelque manière ? » Pas un mot,.. la position commençait à être embarrassante. L’œil du malade était de plus en plus menaçant, et je voyais le moment où il allait me dire quelque injure.

« La providence de Dieu m'envoya tout à coup une inspiration. Je me rapprochai vivement du malheureux, et je lui dis à demi-voix : « Avez-vous fait une bonne première communion ? » Cette parole fit sur lui l'effet d'une commotion électrique. Il fit un léger mouvement ; sa figure changea d'expression ; et il murmura plutôt qu'il ne dit :« Oui Monsieur » répondit-il d'une voix émue, et au même instant je vis deux grosses larmes couler sur ses joues. Je lui pris la main : « Et pourquoi étiez-vous heureux alors, sinon parce que vous étiez pur, chaste, aimant et craignant Dieu ; en un mot, bon chrétien ? Mais ce bonheur peut revenir encore, et le bon Dieu n'a pas changé. » Il continuait à pleurer ; N'est-ce pas, ajoutai-je, que vous voulez bien vous confesser ? — « Oui, Monsieur, » dit-il alors avec force ; et il s’avança vers moi pour m'embrasser. Je le fis de grand cœur et je lui donnai quelques petits conseils pour faciliter l'exécution de son bon dessein. Je le quittai ensuite et j'annonçai à la sœur le succès inespéré de ma visite... » Ce fut la première âme que Gaston de Ségur conquit manifestement sur le démon et rendit à Dieu, et c'est ainsi que cet étudiant de vingt ans préludait aux saintes et pacifiques victoires de son sacerdoce.

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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 9:36 pm


Son droit, fini, il mit à exécution le projet formé depuis longtemps d'aller voir en Russie sa grand'mère, la comtesse Restopchine, à laquelle il savait promis cette visite. Elle habitait Moscou pendant l'hiver, et passait l'été à quelques lieues de Moscou, dans ce domaine dé Voronovo, illustré par l'héroïque sacrifice de son mari. On sait, en'effet, qu'en 1812, en se retirant de la capitale incendiée, le comte Rostopchine avait mis de ses propres mains le feu à cette splendide habitation de campagne, pour qu'elle ne tombât point vivante au pouvoir de Napoléon. Depuis, le château avait été rebâti, et c'est là que la comtesse Rostopchine passait dans la solitude et la prière, la plus grande partie de ses dernières années. Gaston de Ségur quitta Paris au commencement de juillet de l'année 1841, s'embarqua au havre pour Saint-Pétersbourg, en passant par Hambourg et Lubec .., fit en malle-poste le long voyage de Saint-Pétersbourg à Moscou et passa près de deux mois à Voronovo, auprès de sa sainte grand'mère. Pendant cette longue intimité, il apprit à connaître plus à fond la beauté de cette âme forte et chrétienne à la façon des premiers siècles de l'Église, et il fit de nouveaux progrès dans voie de la sainteté. Il rapporta de son voyage, qui s'accomplit sans aucun incident remarquable, un journal intéressant surtout pour sa famille, et deux albums de dessins et d'aquarelles où les types et les mœurs russes sont rendus avec une grande puissance de vérité et de coloris.

De retour en France, il dut bientôt se préparer à un nouveau départ. Cette fois c'était Rome, la ville de Raphaël et de Saint-Pierre, qui devait être le but de son voyage. Son père, voulant lui ouvrir une carrière où il pût cultiver sa vocation artistique, avait pensé à le faire nommer attaché d'ambassade près du comte Septime de Latour-Maubourg, ambassadeur de France près du Saint-Siège, et ami d'enfance de M. de Ségur. L'affaire s'arrangea sans difficulté, et le départ du jeune diplomate fut fixé au commencement de l'année 1842. Avant de partir, il apprit que le portrait de son père, fort remarqué à l'exposition, avait été jugé digne d'une médaille d'or. A cette époque la distribution des récompenses aux artistes couronnés se faisait sans aucune solennité et quelquefois longtemps après la clôture de l'exposition. C'est ce qui eut lieu pour la médaille de Gaston de Ségur. Il ne put la recevoir avant son départ pour l'Italie, et ce fut un de ses frères qui la reçut pour lui des mains de M. de Montalivet, alors directeur des beaux-arts, avec les paroles les plus flatteuses. On a écrit au sujet de cette médaille des détails très édifiants sans doute, mais très inexacts. Gaston de Ségur l'aurait portée à sa mère, et le jour même l'aurait vendue pour ses pauvres. La vérité est qu'elle lui fut remise par sa mère à son retour de Rome en 1843, avant son entrée au séminaire et qu'il la garda quelques mois comme un souvenir précieux de sa courte carrière artistique. Puis la charité l'emporta sur tout autre sentiment, et un beau jour, en face d'une misère urgente à secourir, il la fît vendre par un ami et en donna le prix à Jésus-Christ, son seul amour, toujours vivant et présent dans la personne de ses pauvres. — En apprenant cette récompense accordée à son tableau et cette consécration officielle de son talent, ses parents et ses amis s'applaudirent plus encore du séjour qu'il allait faire en Italie.

Quant à lui, cette perspective éveillait en son cœur des sentiments bien divers. Son âme tendre souffrait de ce lointain exil qui allait le séparer, pour des années peut-être, de sa famille et surtout de sa mère, toujours souffrante et toujours adorée. Mais le lieu de cet exil était Rome, la capitale de l'Église et des arts, et son cœur battait de désir et de joie à la pensée qu'il allait séjourner au centre de la chrétienté, entre les merveilles de la foi catholique et les chefs-d'œuvre de l'art antique et moderne, près du Colysée et des Catacombes, près des ruines du palais des Césars et des reliques des martyrs. Malgré plus d'une larme versée en secret par sa mère et par lui-même, il fit donc avec une joie d'artiste et de chrétien les préparatifs du voyage, et, le 22 février 1842, après avoir serré dans ses bras ses parents, ses frères et sœurs, après avoir couvert sa mère de baisers et de larmes, il partit résolument pour la ville éternelle, emportant dans son cœur le grand et fidèle ami, le grand consolateur, l'unique compagnon de tous les exils, le Seigneur Jésus-Christ qu'il avait reçu le matin dans la sainte communion.

Chose étrangle, ni son père, ni sa mère, ni aucun de ses proches ne se demandèrent si ce départ de Gaston pour Rome ne serait pas la cause et le prélude de son départ du monde pour le sacerdoce et pour le cloître. Aucun d'entre eux n'eut la pensée que ce voyage, entrepris pour développer sa vocation de peintre, développerait ou ferait naître en cette âme déjà si sacerdotale, la vocation ecclésiastique. Tant il est vrai que nul n'est prophète en son pays, et que, dans les choses divines plus encore que dans les choses humaines, ce sont souvent nos proches qui nous connaissent le moins !



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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 10:12 pm


CHAPITRE III


Voyage et séjour à Rome. — Journal de ce voyage. — L'ambassade de France. — Le comte et la comtesse de Latour-Maubourg. — La comtesse Adolphe de Caraman. — Le comte de Rayneval. — "MM. de Cambise, d'Astorg, de Reiset, de Malaret, M. et Madame Odier. — Le pape Grégoire XVI. — Le père de Vllefort. — Saint-Pierce. — Les musées. — Tableaux : le portrait de M. de "Maubourg, un pâtre dans la campagne romaine, la vierge Immaculée. — Dessins. — Deux albums, carieatures. — Dyssenterie. L'abbé Véron. — Voyage à Lorette avec M. de Cazalès. — Vœu de chasteté et consécration à Dieu dans la chapelle du Gésu, le 25 décembre. 1842. — Sa lettre à ses parents. — Désespoir de sa mère.



Artiste et chrétien, Gaston de Ségur était fait pour goûter les délices de Rome. L'enchantement commença pour lui du jour de son arrivée et dura jusqu'à celui de son départ. Le journal où il nota avec une exactitude exemplaire, l'emploi de ses journées, ses impressions, ses sentiments depuis son arrivée dans la ville éternelle jusqu'à son retour de Lorette, c'est-à-dire au mois d'octobre 1842, retrace avec une vérité et une simplicité parfaites cette phase de sa vie et a été publié. Nous passerons donc assez rapidement sur cette heureuse année qu'il a racontée lui-même, et qui le mena insensiblement, du monde où il était si fêté et qui cherchait à le retenir par les liens les plus légitimes et les plus doux, à la vie ecclésiastique qui devait être pour lui si pleine de fécondité, d'épreuves et de mérites.

Le comte Septime de Latour-Maubourg, le meilleur des hommes malgré la froideur de son abord, le reçut comme le fils d'un ami, c'est-à-dire comme un enfant de la maison . Il lui avait fait préparer un logement à Pambassade, et le jeune attaché retrouva ainsi du premier coup à Rome ce qu'il regrettait le plus de Paris, ce qu'il aimait le plus au monde, la vie de famille. Madame de Maubourg, beaucoup plus jeune que son mari, était aussi bonne que lui, et les souffrances d'une santé déjà bien atteinte n'altéraient en rien sa bonne grâce et sa sérénité. A côté d'elle, sa sœur, la comtesse Adolphe de Caraman, unissait aux charmes d'un visage ravissant l'attrait d'une piété aussi vive qu'indulgente ; c'était une âme angélique dans un corps de déesse, et sa jeunesse à la foi sérieuse et souriante répandait autour d'elle un rayonnement dont ni les infirmités, ni les glaces de l'âge n'obscurcirent l'éclat jusqu'à la fin de sa vie. Auprès de ces deux aimables sœurs se réunissait presque tous les soirs l'élite de la société romaine et de la colonie française. Parmi ces hôtes du palais Colonna, M. et Madame Odier attirèrent particulièrement l'esprit et le cœur du jeune attaché d'ambassade, l'un par sa bonté, son talent de peintre et son enthousiasme artistique, l'autre par la vivacité charmante de son esprit digne de son visage, et par l'affabilité de son accueil. Il leur garda toujours un tendre attachement, et dans les derniers temps de sa vie, il se plaisait à leur rendre visite à Passy et à reparler avec eux des bonnes soirées, déjà si lointaines, de l'ambassade de France à Rome. M. et madame Odier, revoyaient avec un égal plaisir dans ce prélat aveugle, courbé avant l'âge sous le poids de ses œuvres, le jeune diplomate, le jeune artiste de 1842, et peut-être, si le prêtre eût survécu à son vieil ami, celui-ci, bien que protestant de religion, l'eût-il appelé à son lit de mort pour recevoir de sa main la plénitude de la vie chrétienne et se préparer à passer de ce monde à l'éternité. C'est du moins ce qu'il est permis de conclure de la lettre suivante écrite par M . Odier à la nouvelle de la mort de Mgr de Ségur. Elle est si touchante et si honorable pour tous les deux qu'on nous pardonnera de la reproduire ici.

« Passy, vendredi 10 juin 1881. — J'ai absolument besoin de vous dire quel profond chagrin j'éprouve de la fin si prématurée de mon excellent et saint ami, Mgr de Ségur. Jamais je n'oublierai ses visites affectueuses et gaies où nous reparlions du passé. La sainteté de cet excellent prélat était pour moi un vrai bonheur de conscience, et son amitié me flattait plus que je ne puis vous le dire. Sa simplicité, sa naïveté souvent très spirituelle, et son indulgence envers moi, huguenot, en faisaient un véritable saint à mes yeux. Ah ! pourquoi faut-il que je voie mourir tant d'êtres d'élite autour de moi, et tous plus jeunes ? Je reste dans la forêt le plus vieux et le plus cassé ! C'est bien triste. Adieu et mille assurances de mon véritable attachement.

Edouard Odier. »

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Message  Roger Boivin Ven 08 Mar 2013, 10:19 pm


Le personnel de l'ambassade n'était pas moins agréable que celui de ses habitués. Le premier secrétaire était le comte de Rayneval, qui plus tard devait occuper au palais Colonna le premier poste et défendre courageusement à Rome l'union si nécessaire du Saint-Siège et du gouvernement français. La simplicité de ses manières, son entrain, son esprit, sa prodigieuse mémoire musicale qui, jointe à un beau talent de pianiste, lui permettait de reproduire et de rendre avec un charme extrême les beautés des partitions de Mozart et de Rossini, lui gagnèrent du premier coup la sympathie de Gaston de Ségur ; avant la fin de son séjour à Rome, cette sympathie s'était changée en une véritable et durable amitié. Au-dessous de Rayneval, de nombreux attachés apportaient aux réunions de l'ambassade leur large contingent d'esprit et de gaité. C'étaient MM. Just de Latour-Maubourg, neveu de ambassadeur, la loyauté même et le plus joyeux compagnon de toute la bande ; le baron de Malaret, ami d'enfance et futur beau-frère de Gaston de Ségur ; le comte de Cambise, esprit brillant, mais paradoxal jusqu'à l'excès ; le comte Charles d'Astorg et le comte Gustave de Reiset, dans lesquels le nouvel attaché trouva d'aimables collègues, et dont il garda toujours le plus affectueux souvenir.

Au milieu de pareils compagnons, sous la direction paternelle de M. de Maubourg, les fonctions diplomatiques de Gaston de Ségur ne faisaient qu'ajouter aux charmes de la société d'élite qui l'entourait l'attrait d'un travail facile, intéressant et relevé. Il donnait quelques heures chaque jour à ce travail de rédaction et d'expédition de dépêches, et il lui en restait beaucoup plus à consacrer aux devoirs de société, à l'étude des merveilles de Rome, à l'étude et aux satisfactions de sa piété. Avant de parler de sa vie à Rome au point de vue des choses spirituelles qui y tenaient la plus grande place, disons quelques mots de ce qu'il y faisait au point de vue du monde, c'est-à-dire de l'art, en qui se résumait pour lui tout ce qui n'est pas le service direct de Dieu.

Comme l'étude, il ne fréquentait aucun atelier, mais il fréquentait assidument les musées, la galeries publiques ou privées, et il vivait en quelque sorte dans l'intimité des hommes de génie dont les œuvres accumulées à Rome, plus qu'en aucun autre lieu du monde, en ont fait la capitale des arts comme elle est la capitale de l'Église. Il contemplait longuement les statues antiques du Vatican, les tableaux des maîtres italiens du moyen-âge et de la Renaissance, et il revenait sans cesse à ceux qui parlaient d'avantage à ses yeux et à son âme. Parmi les statues antiques, le Démosthènes du Vatican lui semblait le plus parfait ; il le mettait au-dessus du Lacoon, de l'Apollon, du Belvédère et de cette statue de femme voilé et représentant ou la pudeur ou la modestie, vers laquelle le ramenait sans cesse un attrait particulier. Le fameux Torse de Michel-Ange le remplissait aussi d'admiration, mais il ne comprit jamais le Moïse dont la puissante allure, la barbe magistrale, les jambes superbes et les admirables main ne remplaçaient point, à ses yeux, l'absence d'expression religieuse et de caractère surnaturel.

Comme tableaux, il mettait au-dessus de tout ceux de Raphaël et du Pérugin. Certaines vierges de ce dernier lui semblaient plus divines encore que celles de son incomparable élève. Le Couronnement de la Vierge par ces deux artistes, lui causait d'indicibles ravissements. Il préférait à la Transfiguration de Raphaël, la Madone de Foligno qu'il regardait comme le premier tableau du monde. S'il eût vu la Madone de Saint-Sixte, conçue et exécutée dans le même style, il l'eût probablement encore mise au-dessus. Un petit tableau de Raphaël lui inspirait une égale admiration, c'était le Jeune homme jouant du violon de la galerie Sciarra, Il ne pouvait se lasser d'en admirer le naturel, la simplicité, le merveilleux fini, et, au point de vue de l'exécution, il le considérait comme le chef-d'œuvre de la peinture.

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Message  Roger Boivin Sam 09 Mar 2013, 8:55 pm


Ces visites répétées à ces toiles immortelles, l'analyse de leurs beautés, les efforts qu'il faisait pour les comprendre dans tous leurs détails, pour s'en pénétrer et se les assimiler, telles furent ses seules mais fécondes études de peinture pendant son séjour à Rome. Il ne se contenta point cependant de ce travail de l'intelligence et des yeux. Il ne négligea ni ses pinceaux, ni ses crayons, et il produisit, pendant cette année 1842, un certain nombre d'œuvres qui peuvent compter parmi ses meilleures.

Nous ne parlerons que pour mémoire des innombrables caricatures, auxquelles ils consacrait, de gré ou de force, la plupart de ses soirées à l'ambassade de France. L'ambassadrice, sa sœur, ses amies, les secrétaires et les attachés, tout le monde en demandait, en exigeait, voulait en avoir sa part, et le jeune artiste, partagé entre sa verve caustique et sa charité, eut beaucoup à faire pour donner libre cours à l'une sans manquer à l'autre. Les deux albums qu'il remplit d'études, de dessins, d'aquarelles, sont des œuvres plus sérieuses et dont plusieurs à notre avis, atteignent la perfection. Certaines figures de mendiants, certains groupes de femmes, de paysannes de Frascati ou d' Albano, sont rendus avec un sentiment de l'art et de la nature, avec une «puissance de coloris incroyables. La perle de cette collection nous parait une aquarelle représentant une procession d'orfanelli (petits orphelins) vêtus de robes blanches tenant des cierges à la main, dont les visages, l'attitude, l'expression sont vraiment angéliques.

Quant à ses tableaux proprement dits, datant de cette époque, ils se composent d'un grand portrait du comte de Latour-Maubourg, d'une Vierge Immaculée, portée sur des nuées, grandeur demi-nature, dont l'expression est charmante de recueillement et de virginité, et d'un jeune pâtre, de grandeur naturelle, debout, la main posée sur un fût de colonne brisée, au milieu de la campagne romaine. La figure de cet enfant de douze ans, couronnée de lierre et de fleurs sauvages, faite d'après nature, est d'une grande beauté. La chemise ouverte, les bras et les jambes nus, il est de face, dans l'attitude d'un maître du monde, et rappelle les nobles figures de Léopold Robert dans ses Moissonneurs et ses Pêcheurs. C'est, à notre sens, l'œuvre la plus remarquable de Mgr de Ségur comme peinture à l'huile. Elle fut exposée au salon de 1843 et donna lieu à une proposition assez singulière.

C'était au lendemain de la fermeture de l'exposition. Le tableau, avait repris sa place dans le salon de madame de Ségur. Un Anglais très sourd, et parlant très mal le français, demanda à parler à l'artiste qui était absent, et, à son défaut, fut reçu par un de ses frères qui se trouvait à la maison. En entrant dans le salon, l'anglais aperçut le jeune pâtre, poussa une exclamation et resta, pendant quelques minutes en contemplation muette devant cette toile, objet de sa démarche et de sa convoitise. Puis il parla et demanda quel était le prix du tableau. On lui répondit qu'il n'était pas à vendre. Il écouta, dit qu'il était très riche, qu'il voulait avoir ce petit pâtre coûte que coûte, qu'il en donnerait tout l'argent qu'on voudrait. Bref, il ne se retira qu'après avoir discuté et insisté outre mesure, et non sans laisser son adresse pour le cas où l'on se raviserait. Heureusement que l'auteur, déjà déterminé à entrer au séminaire, était absent ; présent, il eût été capable de prendre l'anglais au mot et de lui vendre son tableau au poids de l'or, pour en partager le prix entre ses pauvres et ses bonnes œuvres.

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Message  Roger Boivin Sam 09 Mar 2013, 10:41 pm


Ainsi que nous l'avons dit, à Rome comme à Paris, la meilleure part de la vie de Gaston de Ségur appartenait à Dieu et à l’Église. Malgré son admiration à la fois artistique et pieuse pour les madones de Raphaël et du Pérugin, il leur préférait encore un Ave Maria dit à Sainte-Marie Majeure, devant la crèche de Bethléem ou devant la Vierge Miraculeuse attribuée à saint Luc, et il eût sacrifié sans hésiter ses stations dans les fresques du Vatican et dans les merveilleuses galeries de Rome, aux visites plus fréquentes et plus longues encore qu'il faisait à Saint-Pierre, à Saint-Jean de Latran, à Sainte-Croix de Jérusalem, à l'Église du Gésu et même à de plus humbles sanctuaires où l'attirait quelque dévotion spéciale.

Sa première visite à Saint-Pierre le laissa cependant froid, plus étonné que saisi, et il lui fallut du temps, sinon pour en comprendre, du moins pour en goûter le sens mystique et l'incomparable beauté. Mais quand ce sentiment se fut ...... à lui, il en fut dominé, et il était ramené par un attrait tout-puissant à ce tombeau des deux apôtres, de ces pauvres pécheurs d'hommes, dont la coupole gigantesque de Saint-Pierre recouvre et glorifie la poussière.

Son impression en voyant le pape fut vive et profonde, et la grande figure de Grégoire XVI lui laissa un impérissable souvenir. Mais s'il le vit souvent dans la majesté du suprême pontificat, officiant dans les solennités de l'Église, porté sur la sédia, couronné de là tiare, donnant du haut du balcon de Saint-Pierre la bénédiction urbi et orbi, il le vit à peine en audience particulière, et ne put ressentir pour lui cette affection personnelle, cette tendresse filiale qu'il puisa quelques années plus tard aux pieds et sur le cœur même de Pie IX.

L'homme qu'il aima le plus à Rome d'une affection spirituelle, ce fut le P. de Villefort, de la Compagnie de Jésus. Ce saint religieux était l'ami, le guide, le directeur de tous les Français qui venaient visiter le tombeau de saint Pierre, des pèlerins ou des voyageurs que la foi ou un sentiment plus humain attirait ou fixait à Rome. Quelles que fussent leurs préventions, alors si générales, contre les Jésuites, tous faisaient une exception en faveur de ce Jésuite-là, le seul qu'ils connussent, et la sympathie respectueuse qu'il inspirait était universelle. Il reconnut du premier coup d’œil en Gaston de Ségur une âme d'apôtre, un cœur sacerdotal, et ce fut lui, sans aucun doute, non point qui fit naître sa vocation, mais qui la lui révéla. Il est probable d'ailleurs que les confidences du jeune homme abrégèrent et simplifièrent singulièrement la besogne, et que le ministre de Jésus-Christ n'eut qu'à confirmer dans des résolutions déjà prises. Quoiqu'il soit, Gaston de Ségur donna, dès sa première visite, au P. de Villefort toute sa cofinance, toute son affection, et ce fut son meilleur et son plus cher directeur jusqu'à son entrée dans les ordres. Il ne paraît pas cependant que ni le directeur ni le pénitent aient voulu précipiter les choses, et durant les premiers mois du séjour de Gaston de de Ségur à Rome, rien ne manifesta au dehors la moindre modification dans ses idées et ses projets. Mais deux circonstances hâtèrent ou déterminèrent sa vocation définitive, une maladie assez sérieuse et un pèlerinage à Notre-Dame de Lorette.




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Message  Roger Boivin Dim 10 Mar 2013, 11:32 pm


Au mois de juillet, alors que la saison avait éloigné de Rome presque toutes ses connaissances et que le palais même de l'ambassade était à peu près abandonné, il fut atteint subitement d'une dyssenterie violente, mal particulièrement grave à Rome et à cette époque de l'année. Un prêtre français qui y achevait alors ses hautes études, M. l'abbé Véron, depuis curé de Saint-Vincent de Paul à Paris, averti de son état et de son abandon, lui offrit de le prendre et de le soigner chez lui, ce que Gaston de Ségur accepta avec reconnaissance, et il lui prodiguât les soins de tout genre avec un entier dévouement. Il le garda sous son toit jusqu'à son complet rétablissement, et l'intimité qui résulta de ce séjour, les exemples et les entretiens de cet excellent prêtre, devenu son ami, l'influence secrète de la maladie et de la souffrance, contribuèrent fortement à tourner du côté du sanctuaire les pensées déjà si profondément chrétiennes du jeune convalescent.

Peu de temps après, au commencement du mois de septembre, M. de Gazalès, un de ces Français d'élite attirés et retenus à Rome par l'amour de Jésus-Christ et de son Église, ayant encore un pied dans le monde comme Gaston de Ségur, mais comme lui sur le point d'en sortir, lui proposa de faire ensemble le voyage de Pérouse, d'Assise et de Lorette. Gaston fût ravi de cette occasion de satisfaire sa dévotion pour la Vierge Marie, en visitant, par une admirable saison, une des plus belles provinces d'Italie. Il traversa les Apennins à petites journées, priant, dessinant, admirant partout ; il s'arrêta à Pérouse devant les chefs-d'œuvre de l'école d'Ombrie, il se prosterna à Assise devant le tombeau du Patriarche Séraphique, s'y fit recevoir tertiaire de saint François et il en emporta pour le saint, pour ses trois ordres un amour qui le suivit jusqu'à sa mort. Enfin, à Lorette, il épancha toute la tendresse de son âme dans la sainte maison de Nazareth, et on peut dire qu'il en sortit ne s'appartenant plus à lui-même et s'étant promis sans réserve à Jésus-Christ..

(..)
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Message  Roger Boivin Lun 11 Mar 2013, 1:03 pm



Quelques œuvres, glanées sur internet, De Mgr de Ségur du temps qu'il était peintre :


Mgr De Ségur, jeune homme, était artiste peintre. Mgr_lo10

Olga De Simard De Pitray - 1841



Mgr De Ségur, jeune homme, était artiste peintre. Gaston10
Mgr De Ségur, jeune homme, était artiste peintre. Crbst_10

La Contesse de Ségur.



Mgr De Ségur, jeune homme, était artiste peintre. Sophie10

Sophie de Ségur.







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