DE LA CONSIDÉRATION. (PAR SAINT BERNARD)
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LES CINQ LIVRES DE LA CONSIDÉRATION DE SAINT BERNARD,
PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III.
LIVRE V.
CHAPITRE XIII. Saint Bernard disserte avec autant de profondeur que d'élégance
sur la longueur, la largeur, la profondeur et la sublimité de Dieu.
27. Qu'est-ce que Dieu ? Il est tout à la fois longueur, largeur, hauteur et profondeur. Ah! Me répondrez-vous, je vous y prends vous-même à professer cette quaternité que vous aviez en abomination. Il n'en est rien, je l'ai condamnée et la condamne encore. Il vous semble que je parle de plusieurs choses; je ne parle que d'une; seulement je définis ce Dieu unique tel que nous pouvons le comprendre et non pas tel qu'il est en effet; et les divisions que j'établis en parlant de lui, ce n'est pas en lui, mais pour moi que je les établis; car si je le désigne par plusieurs noms ou si je le cherche par plusieurs chemins, il n'en est pas moins toujours un. Ce ne sont pas des divisions dans la substance divine qu'expriment ces quatre mots, ni des dimensions telles qu'on en voit dans les corps, ni une distinction de personnes, comme celles que nous adorons dans la Trinité, ni enfin un certain nombre de propriétés, telles que celles que nous admettons dans les personnes divines avec lesquelles, d'ailleurs, elles ne font qu'un; mais au contraire chacune de ces choses en Dieu est ce qu'elles sont toutes les quatre réunies, et toutes les quatre ne sont autre chose, que ce qu'est chacune d'elles en particulier.
Pour nous, dont l'intelligence est incapable d'atteindre à la simplicité de Dieu, pendant que nous nous efforçons de nous le représenter un, il se présente à notre esprit comme un être quadruple. La cause de cette illusion, c'est ce miroir et cette énigme à travers laquelle seulement il nous est maintenant permis de le voir; mais quand nous le contemplerons face à face, nous le verrons tel qu'il est effectivement. Alors la vue délicate et faible de notre intelligence sera capable de contempler attentivement, sans craindre de s'émousser ou de voir les objets multiples; au contraire, elle recueillera toutes ses forces, les concentrera sur un point et se conformera à l'unité de Dieu; ou plutôt, devenue semblable à cette unité par excellence, elle la contemplera seule à seule et face à face; car "nous serons semblables à Dieu et le verrons tel qu'il est (I Jean III, 2). Bienheureuse vision que celle-là ! C'est avec raison que le Psalmiste soupirait après elle en s'écriant: "Ma face vous a cherché, Seigneur, Seigneur, je chercherai toujours votre face (Psaume XXVI. 8)." En attendant, puisque nous aussi nous la cherchons encore, n'hésitons point à nous servir du quadrige dont notre faiblesse et notre misère ont besoin. Peut-être arriverons-nous par là à saisir ce qui nous a saisis, c'est-à-dire la signification de ce quadrige lui-même. En effet, le conducteur de ce char, celui qui nous l'a montré le premier, nous engage à nous appliquer "avec tous les saints à saisir quelle est la longueur, la largeur, la hauteur et la profondeur (Éphésiens, III, 18)" de l’être par excellence. Saint Paul a dit saisir et non connaître, afin que nous ne nous contentions point de satisfaire notre curiosité par la science, mais que nous aspirions de toutes nos forces à en recueillir les fruits or ce n'est pas celui qui connait, mais celui qui saisit, qui recueille les fruits de la science. D'ailleurs, "connaître le bien et ne le point mettre en pratique, dit un autre apôtre, c'est se rendre coupable de péché (Jacques IV, 17)." Voilà pourquoi saint Paul dit ailleurs: "Courez de manière à vous saisir du prix (I Corinthiens IX, 24)." Mais que faut-il entendre ici par ce mot saisir ? C'est ce que je dirai plus loin.
ŒUVRES COMPLÈTES DE SAINT BERNARD, LES CINQ LIVRES DE LA CONSIDÉRATION DE SAINT BERNARD,
PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III, Livre V, Tome II, p. 127 à 235
TRADUCTION NOUVELLE PAR M. L'ABBÉ CHARPENTIER, PARIS, LIBRAIRIE LOUIS DE VIVÈS, ÉDITEUR, 9, Rue Delambre, 9, 1865.
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PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III.
LIVRE V.
CHAPITRE XIII. Saint Bernard disserte avec autant de profondeur que d'élégance
sur la longueur, la largeur, la profondeur et la sublimité de Dieu.
28. Qu'est-ce donc que Dieu? Il est longueur, dirai-je. Que faut-il entendre par là ? L’éternité: car elle est si longue qu'elle n'a point de limites ni dans le temps ni dans l'espace. Il est aussi largeur. Qu'est-ce à dire ? Qu’il est charité. Or comment celle-ci pourrait-elle à son tour avoir des limites dans un Dieu qui ne hait rien de ce qu'il a créé (Sagesse XI, 25) ? Ne fait-il pas, en effet, lever son soleil sur les méchants comme sur les bons, et tomber la pluie sur les injustes comme sur les justes ? Ainsi la charité de Dieu bénit dans son sein jusqu'à ses ennemis: ce n'est même pas assez pour elle, elle s'étend à l'infini, et dépasse non seulement tout ce que nous pouvons sentir, mais encore tout ce que nous pouvons connaître, au dire de l'Apôtre lui-même, qui voudrait que nous connussions la charité de Jésus-Christ qui surpasse toute science (Éphésiens III, 19)." Que dirai-je de plus ? Qu’elle est éternelle; ou bien, ce qui est peut-être encore plus fort, elle est l'éternité même.
Vous le voyez donc, en Dieu la longueur est égale à la largeur; je voudrais que vous vissiez non pas qu'elle est aussi grande, mais qu'elle se confond avec elle; que l'une ne diffère point de l'autre, qu'une seule n'est pas moins que les deux ensemble, et que les deux ne sont pas plus qu'une seule. Dieu est éternité, Dieu est charité, longueur sans tension, largeur sans distension. Il excède également les étroites limites du temps et de l'espace, non point par la masse de sa substance, mais par la liberté de son être. Voilà comment celui qui a donné la mesure à toutes choses est lui-même sans mesure, et comment encore, tout immense qu'il soit, il est néanmoins la mesure de l'immensité elle-même.
ŒUVRES COMPLÈTES DE SAINT BERNARD, LES CINQ LIVRES DE LA CONSIDÉRATION DE SAINT BERNARD,
PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III, Livre V, Tome II, p. 127 à 235
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LIVRE V.
CHAPITRE XIII. Saint Bernard disserte avec autant de profondeur que d'élégance
sur la longueur, la largeur, la profondeur et la sublimité de Dieu.
29. Qu'est-ce encore que Dieu ? Il est hauteur et profondeur, et se trouve ainsi d'un côté au-dessus, de l'autre au-dessous de toutes choses; car dans les attributs divins l'équilibre ne pèche en aucun sens, il est constant et demeure toujours le même. Dans la hauteur considérez sa puissance, et dans la profondeur voyez sa sagesse; l'une égale l'autre, et nous savons qu'il est aussi impossible d'atteindre à sa hauteur que de scruter à fond sa profondeur; c'est d'ailleurs ce que nous dit saint Paul lui-même en s'écriant avec transport: "O admirable profondeur des trésors de la sagesse et de la science de Dieu ! Que ses jugements sont incompréhensibles et ses voies impénétrables (Romains XI, 33)!" Écrions-nous aussi avec lui en voyant comment en Dieu et avec Dieu ces deux attributs ne laissent pas que de former la plus simple unité: O sagesse pleine de puissance qui atteint partout avec force, ô puissance pleine de sagesse qui dispose tout avec douceur (Sagesse VIII, 1) ! Il n'y a là qu'une seule et même chose, les effets seuls sont nombreux et les opérations distinctes; et cette chose unique est en même temps longueur par son éternité, largeur par sa charité, hauteur par sa majesté et profondeur par sa sagesse.
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PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III, Livre V, Tome II, p. 127 à 235
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LIVRE V.
CHAPITRE XIV. Continent nous pouvons selon la recommandation
de l'Apôtre arriver à saisir les quatre attributs dont il parle.
30. Nous savons toutes ces choses, pensons-nous pour cela les avoir saisies ? On n'y parvient que par la sainteté et non pas le raisonnement, si toutefois il est possible de comprendre ce qui est incompréhensible. Mais, si c'était impossible, l’Apôtre ne nous aurait par exhortés à "saisir avec tous les saints (Éphésiens III, 18)." Les saints les saisissent: me demandez-vous de quelle manière ? Je vous dirai que si vous êtes saint, vous les avez saisies vous-même et par conséquent vous savez comment on les saisit: si vous ne l'êtes pas, devenez-le, et vous le saurez par votre propre expérience. Ce qui fait les saints, ce sont les affections saintes: or il y en a deux, la sainte crainte du Seigneur et son saint amour: l'âme qui possède ces deux affections s'en sert comme de deux bras pour saisir, embrasser, étreindre et retenir, et s'écrie: "Je le possède, je ne le laisserai pas aller (Cantique III, 4)." La crainte répond à la hauteur et à la profondeur, et l'amour à la largeur et à la longueur.
Qu'y a-t-il, en effet, de plus à craindre qu'une puissance à laquelle on ne saurait résister, qu'une sagesse à laquelle on ne peut se soustraire ? Dieu serait moins à craindre s'il manquait de l'un ou de l'autre attribut, mais il n'y a pas moyen de ne pas craindre celui dont l'œil voit tout et dont le bras peut tout. D'un autre côté, qu'y a-t-il de plus aimable que l'amour même qui fait que vous aimez et que vous êtes aimé ? C'est l'amour auquel l'éternité s'ajoute; car, ne pouvant jamais faiblir, il ne permet aucun soupçon, aucune crainte. Aimez donc avec constance et persévérance, et vous avez la longueur; que votre amour s'étende jusqu'à vos ennemis, et vous avez la largeur; enfin ayez en toutes choses l'âme timorée, et vous aurez saisi la hauteur et la profondeur.
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PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III, Livre V, Tome II, p. 127 à 235
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LIVRE V.
CHAPITRE XIII. Saint Bernard disserte avec autant de profondeur que d'élégance
sur la longueur, la largeur, la profondeur et la sublimité de Dieu.
31. Mais si vous préférez correspondre par quatre sentiments de l'âme aux quatre attributs de Dieu, vous y réussissez par l'admiration, la crainte, la ferveur et la constance. La première nous est en effet commandée par la majesté de Dieu, la seconde par l'abîme de ses jugements; la troisième par sa charité, et la quatrième par son éternité. Qui est-ce qui n'est dans l'admiration en contemplant la gloire de Dieu ? Qui n'est saisi de crainte en sentant les abîmes de sa sagesse ? Qui n'est embrasé d'amour en méditant sur l'amour de Dieu ? Et qui est-ce qui ne dure et ne persévère dans l'amour en voulant imiter l'éternité de la charité de Dieu ? La persévérance, en effet, a quelque rapport avec l'éternité, et d'ailleurs elle est la seule vertu qui mérite l'éternité, ou plutôt qui nous conduise jusque dans l'éternité, si nous en croyons le Seigneur qui a dit: "Quiconque persévérera jusqu'à la fin sera sauvé (Matthieu X, 22)."
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CHAPITRE XIII. Saint Bernard disserte avec autant de profondeur que d'élégance
sur la longueur, la largeur, la profondeur et la sublimité de Dieu.
32. Remarquez maintenant que ces quatre attributs divins sont l'objet d'autant de contemplations différentes. La première et la plus haute est la contemplation et l'admiration de la majesté de Dieu; elle requiert un cœur pur, afin que dégagé de tout vice et déchargé de tout péché, il puisse s'élever facilement vers les choses célestes ou même demeure suspendu, ne fût-ce que pendant quelques instants, par une sorte de sainte stupeur et d'extase. La seconde est nécessaire à la première; car elle considère les jugements de Dieu, et par cette vue terrible elle porte à l'âme un coup qui met le vice en fuite, fonde la vertu, initie à la sagesse et conserve l'humilité. Or l'humilité est le fondement solide et durable de la vertu; si elle bouge, toutes les vertus ne sont plus qu'une ruine. La troisième sorte de contemplation s'occupe ou plutôt se repose dans le souvenir des bienfaits, et en nous rappelant les bienfaits que nous avons reçus, nous presse d'en témoigner notre reconnaissance par l'amour du bienfaiteur. Voilà de qui le Prophète voulait parler quand il disait: "Ils publieront hautement le souvenir de votre douceur et de vos bienfaits (Psaume CXLIV, 7)." La quatrième, fermant les yeux sur le passé, ne les ouvre que sur les promesses dont elle attend l'accomplissement; et comme elle n'est autre chose qu'une méditation de l'éternité, puisque l'objet des promesses est éternel, elle[qui] nourrit la longanimité et donne de nouvelles forces à la persévérance.
Il est, je crois, facile maintenant de rapporter ces quatre sortes d'oraison aux quatre expressions employées par l'Apôtre, car nous saisissons la longueur par la méditation des promesses, la largeur par le souvenir des bienfaits, la hauteur par la contemplation de la majesté divine, la profondeur par la vue des jugements de Dieu. Il nous resterait encore à chercher celui que nous n'avons encore trouvé que d'une manière imparfaite et qu'on ne saurait trop chercher. Mais peut-être la prière est-elle préférable à la discussion pour le rechercher et un moyen plus facile de le découvrir. Finissons donc ici notre livre, mais ne bornons pas là nos recherches.
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PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III, Livre V, Tome II, p. 127 à 235
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Dernière édition par ROBERT. le Sam 13 Oct 2012, 3:24 pm, édité 1 fois (Raison : mise en forme)
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PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III.
LIVRE I
CHAPITRE II. Comment l'habitude introduit des usages
répréhensibles et conduit à l'endurcissement du cœur.
2. Ne comptez pas trop sur vos dispositions présentes, car il n'en est pas de si fermes dont le temps et le laisser-aller ne finissent par triompher. Vous savez que les blessures anciennes et négligées finissent par se couvrir d'un talus qui les rend incurables en même temps qu'insensibles; d'ailleurs une douleur vive et continue ne peut durer longtemps; si on ne la soulage, elle se calme d'elle-même; elle trouve un remède dans les consolations qu'on lui prodigue ou dans son propre excès. Qu'est-ce que l'habitude ne change point ? Que n'endurcit point la continuité ? De quoi l'usage ne vient-il pas à bout ? Que d'hommes remarquables n'a-t-on pas vus à la longue trouver agréable et doux ce qui d'abord leur avait semblé plein d'amertume ?
Entendez un saint en gémir en s'écriant: "Dans l'extrémité où je me trouve réduit, je me nourris de choses dont j'avais horreur auparavant et auxquelles je n'osais même pas toucher (Job VI, 7)." D'abord le fardeau parait insupportable, mais avec le temps, si on continue à le porter, on finit par le trouver moins lourd, puis tolérable et presque léger; enfin on y prend même plaisir. Voilà comment par degrés on tombe dans l'endurcissement du cœur et bientôt après dans une complète indifférence; de même, pour en revenir à mon sujet, une douleur vive et continue finit bientôt par céder aux remèdes ou par s'émousser elle-même.
ŒUVRES COMPLÈTES DE SAINT BERNARD, LES CINQ LIVRES DE LA CONSIDÉRATION DE SAINT BERNARD,
PREMIER ABBÉ DE CLAIRVAUX AU PAPE EUGÈNE III, Livre I.
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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LIVRE I
CHAPITRE II. Comment l'habitude introduit des usages
répréhensibles et conduit à l'endurcissement du cœur.
3. Voilà précisément pourquoi j'ai toujours redouté pour vous et je redoute encore, qu'après avoir trop tardé à chercher un remède à votre douleur, ne pouvant plus l'endurer davantage (a), vous ne vous jetiez de désespoir dans un malheur irréparable: oui, j'ai peur qu'au milieu de vos occupations sans nombre, perdant tout espoir d'en voir jamais la fin, vous ne finissiez par vous y faire et vous y endurcir au point de rien plus même ressentir une juste et utile douleur. Soyez prudent, sachez vous soustraire pour un temps à ces occupations si vous ne voulez point qu'elles vous absorbent tout entier, et vous mènent peu à peu là où vous ne voulez point aller. — Où cela ? Me direz-vous peut-être. — A l'endurcissement du cœur, vous répondrai-je. Après cela, n'allez pas me demander ce que j'entends par là; c'est un abîme où l'on est déjà englouti dès qu'on n'en a plus peur. Il n'y a que le cœur endurci pour ne se point faire horreur à lui-même, parce qu'il ne se sent plus. Ne m'en demandez pas davantage sur ce point, adressez-vous plutôt à Pharaon: jamais un homme au cœur endurci ne s'est sauvé, à moins que Dieu, dans sa miséricorde, ne lui ait ôté son cœur de pierre, comme dit le Prophète, pour lui en donner un de chair.
a La plupart des manuscrits et les plus anciennes éditions donnent cette version; celle de Horstius en diffère un peu.
Qu'est-ce donc qu'un cœur endurci ? C'est celui qui ne peut plus être déchiré par les remords, attendri par la piété ou touché par les prières; les menaces et les coups le trouvent également insensible; c'est un cœur qui paie les bienfaits par l'ingratitude; qu'il est peu sûr de conseiller et redoutable de juger; étranger à tout sentiment de pudeur en présence des choses honteuses, et de crainte en face du danger, on peut dire qu'il n'a rien de l'homme et qu'il est plein d'une téméraire audace dans les choses de Dieu: le passé, il l’oublie; le présent, il n'en tient aucun compte; l'avenir est le moindre de ses soucis; il ne se rappelle du passé que les torts qu'on a eus à son égard; le présent pour lui n'est rien, et l'avenir ne l'intéresse qu'au point de vue des vengeances qu'il médite et prépare. Enfin, pour le peindre en un mot, c'est un cœur fermé à la crainte de Dieu et des hommes.
Voilà où toutes ces maudites occupations qui vous absorbent ne peuvent manquer de vous conduire, si vous continuez, comme vous l'avez fait jusqu'ici, à vous y livrer tout entier, sans rien réserver de vous-même. Vous perdez votre temps, et, si vous me permettez d'emprunter en m'adressant à vous, le langage de Jéthro (Exode XVIII, 18), vous vous consumez dans un travail insensé qui n'est propre qu'à tourmenter l'esprit, épuiser le cœur et vous faire perdre la grâce. Je ne puis en effet, en comparer les fruits qu'à de fragiles toiles d'araignées.
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