SUITE DE SAINT JEAN (JUSQU’AU VERSET 14), par Saint Jean Chrysostôme.
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SUITE DE SAINT JEAN (JUSQU’AU VERSET 14), par Saint Jean Chrysostôme.
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Note et gras ajoutés.
à suivre…
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IL EST VENU CHEZ SOI, ET LES SIENS NE L'ONT POINT REÇU. (JUSQU'AU VERSET 14)
ANALYSE.
1. Les siens ne l'ont pas reçu. — Qui sont les siens ? — Les J-uifs d'abord, qui étaient son peuple choisi, puis ceux des autres hommes qui n'ont pas cru en lui et qui lui appartiennent comme ses créatures.
2. L'incrédulité, cause de l'aveuglement des J-uifs : l'orgueil, cause de leur incrédulité. — la grâce que Dieu a miséricordieusement répandue sur les gentils ne fait aucun tort aux J-uifs — Saint Paul les reprend et rabaisse leur orgueil et leur insolence. — Ils sont jaloux du salut des gentils. — L'orgueil rend toutes les vertus inutiles .
1. Si vous gardez fidèlement dans votre mémoire nos précédentes instructions, ce sera pour nous un encouragement à continuer notre tâche avec un redoublement d'ardeur, dans la certitude que nos efforts ne sont point perdus. Si vous vous souvenez de ce que nous avons dit, vous aurez plus de facilité à comprendre la suite, et nous, nous aurons moins de peine, car nous serons secondés par votre zèle qui vous fera voir plus nettement ce qu'il nous reste à vous exposer.
Celui qui oublie continuellement ce qu'on vient de lui enseigner, aura toujours besoin d'un maître, et ne saura jamais rien; mais celui qui retient ce qu'on lui a enseigné, et qui y ajoute ce qu'on lui enseigne de nouveau, de disciple qu'il était, deviendra bientôt maître lui-même, et se rendra utile et à soi et aux autres. Voilà le fruit que j'attends de mes discours, si je n'augure pas trop de votre zèle à venir m'écouter. Commençons donc, déposons l'argent du Seigneur dans vos âmes, comme dans un trésor très-fidèle et très-sûr, et tâchons de vous expliquer, autant que la grâce du Saint-Esprit nous donnera de force et de lumière, le sujet que nous nous sommes proposés de traiter aujourd'hui.
L'évangéliste, parlant des premiers temps, avait dit : "Le monde ne l'a point connu". Maintenant il descend au temps de la prédication et il dit : "Il est venu chez soi, et les siens ne l'ont point reçu ». Il appelle en cet endroit les siens, les J-uifs, comme étant particulièrement son peuple, ou même tous les hommes, comme ayant été créés par lui. Et comme, s'étonnant de la folie de plusieurs et rougissant pour notre commune nature, il disait là que le monde, qui a été fait par lui, n'avait point connu son Créateur; de même ici sa douleur et son affliction de l'ingratitude des J-uifs et de plusieurs autres, le poussant à prononcer une plus forte et plus grave accusation, il dit : "Les siens ne l'ont point reçu", quoiqu'il soit venu chez eux. Et non seulement lui, mais encore les prophètes ont dit avec étonnement la même chose; saint Paul en a aussi marqué sa surprise.
Ecoutez d'abord la voix des prophètes parlant au nom de Jésus-Christ: "Un peuple que je n'avais point connu m'a été assujetti: il a m'a obéi aussitôt qu'il a entendu ma voix. Des enfants étrangers m'ont manqué de fidélité; des enfants étrangers sont tombés dans la vieillesse ; ils ont boité et n'ont plus marché et dans leurs voies". (Ps. XVII, 48.) Et encore: "Ceux à qui il n'a point été parlé de lui le verront, et ceux qui n'ont point ouï entendront". Et: "J'ai été trouvé par ceux qui ne me cherchaient pas; je me suis fait voir à ceux qui ne demandaient point à me connaître (1)". (Isaïe, LXV, 1.) Saint Paul écrit aux Romains en ces termes: "Après cela, que dirons-nous, sinon qu'Israël, qui recherchait la justice, ne l'a point trouvée; mais que à ceux qui ont été choisis de Dieu l'ont trouvée ?" (Rom. XI, 7.) Et ailleurs: "Que dirons-nous donc, sinon que les nations qui ne cherchaient point la justice ont embrassé la justice; et que les Israélites, au contraire, qui recherchaient la loi de la justice, ne sont point venus à la loi de la justice ?" (Rom. IX, 30.)
1. Ce passage est conçu un peu différemment et dans les Septante et dans la Vulgate : le saint Docteur l'a apparemment cité de mémoire, ou sur quelque manuscrit particulier.
C'est effectivement une chose surprenante de voir que ceux qui sont nourris dans la doctrine des prophètes, à qui on lit tous les jours Moïse, qui parle en mille endroits de l'avènement de Jésus-Christ, et les prophètes de l'époque postérieure; que ceux qui ont vu Jésus-Christ même opérant continuellement des miracles, ne demeurant et ne conversant qu'avec eux, et ne permettant point encore alors à ses disciples d'aller vers les gentils, ni d'entrer dans les villes des Samaritains (Matth. X, 5), ce qu'il ne faisait pas lui-même ; mais qui leur disait souvent qu'il n'avait été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël (Matth. XV, 24) : il y a, dis-je, de quoi s'étonner, qu'après tant de miracles opérés en leur faveur, les J-uifs, à qui on lisait tous les jours les prophètes , et qui ont entendu les continuelles prédications de Jésus-Christ même, se soient rendus si aveugles et si sourds, qu'aucune de ces preuves n'ait pu les amener à croire en Jésus-Christ.
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
Licencié ès-lettres, professeur de rhétorique au collège de l’Immaculée-Conception de Saint-Dizier, Bar-Le-Duc, L. Guérin & Ce, Éditeurs 1865, TOME HUITIÈME Pages 93 à 556.
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IL EST VENU CHEZ SOI, ET LES SIENS NE L'ONT POINT REÇU. (JUSQU'AU VERSET 14)
ANALYSE.
1. Les siens ne l'ont pas reçu. — Qui sont les siens ? — Les J-uifs d'abord, qui étaient son peuple choisi, puis ceux des autres hommes qui n'ont pas cru en lui et qui lui appartiennent comme ses créatures.
2. L'incrédulité, cause de l'aveuglement des J-uifs : l'orgueil, cause de leur incrédulité. — la grâce que Dieu a miséricordieusement répandue sur les gentils ne fait aucun tort aux J-uifs — Saint Paul les reprend et rabaisse leur orgueil et leur insolence. — Ils sont jaloux du salut des gentils. — L'orgueil rend toutes les vertus inutiles .
1º (suite) Les gentils, au contraire, privés de tous ces avantages, n'avaient aucunement ouï parler des divins oracles: il ne s'en était pas même présenté à eux la moindre idée en songe, mais des fables insensées (car c'est ainsi que j'appelle la philosophie des païens), occupaient tout leur temps et faisaient toute leur science; uniquement appliqués et livrés aux rêveries des poètes, ils s'étaient attachés au culte des idoles de bois et de pierre ; et, soit sur le dogme, soit sur la morale, ils n'avaient nulle idée bonne ou saine : leur vie était encore plus impure et plus criminelle que leur doctrine. Et, en effet, pouvait-on attendre autre chose de gens qui voyaient leurs dieux se plaire aux crimes les plus infâmes; des dieux dont le culte ne consistait qu'en des paroles obscènes et des actions encore plus obscènes et plus impudiques, et qui se trouvaient par là fêtés et honorés; des dieux auxquels on rendait hommage par des meurtres abominables et des massacres d'enfants, en quoi leurs adorateurs ne faisaient que suivre leur exemple.
Ces hommes, toutefois, qui étaient ainsi tombés dans l'abîme même de la corruption et de la méchanceté, en ont été tout à coup retirés comme par une espèce de ressort et de machine, et se sont montrés à nous du haut des cieux dans tout l'éclat de la gloire.
Mais comment et par quelle voie ce prodige est-il arrivé ? Saint Paul nous l'apprend, écoutez-le, car ce bienheureux apôtre n'a pas cessé de chercher soigneusement la cause de cet événement extraordinaire jusqu'à ce qu'il l'ait trouvée pour nous la découvrir ensuite. Quelle est-elle, et d'où venait aux J-uifs un si grand aveuglement ? Apprenez-le de celui à qui avait été confié le ministère de la prédication.
Que dit donc saint Paul pour dissiper le doute où plusieurs étaient? Les J-uifs, dit-il, "ne connaissant point la justice qui vient de Dieu, et s'efforçant d'établir leur propre justice, ne se sont point soumis à Dieu pour recevoir cette justice qui vient de lui". (Rom. X, 3.) Voilà l'origine de leur malheur. L'Apôtre l'explique encore ailleurs en d'autres termes : "Que dirons-nous donc, sinon que les nations qui ne cherchaient point la justice ont embrassé la justice, et la justice qui vient de la foi; et que les Israélites, au contraire, qui recherchaient la loi de la justice, ne sont point parvenus à la loi de la justice ?" Dites-nous, grand apôtre, quelle en est la raison ? "C'est parce qu'ils ne l'ont point recherchée par la foi, car ils se sont heurtés contre la pierre d'achoppement" (Rom. IX, 30, 31, 32); c'est-à-dire leur incrédulité a été la cause de leurs maux, et c'est de leur orgueil qu'est née leur incrédulité.
Les J-uifs, qui avaient auparavant de grands avantages sur les gentils, comme d'avoir reçu la loi, de connaître Dieu, et bien d'autres que Saint Paul rapporte (1), voyant qu'après l'avènement de Jésus-Christ les gentils qui avaient été appelés à la foi jouissaient également avec eux des mêmes honneurs et des mêmes prérogatives; qu'après avoir embrassé la foi il n'y avait nulle différence, nulle distinction entre le circoncis et l'incirconcis, passèrent de l'orgueil à la jalousie, et ne purent souffrir cette immense et ineffable miséricorde du Seigneur: ce qui ne venait que de leur orgueilleuse insolence, de leur méchanceté et de leur égoïsme.
1. Voyez les chapitres. II, III, IX, X, XI, de saint Paul aux Romains.
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2. L'incrédulité, cause de l'aveuglement des J-uifs : l'orgueil, cause de leur incrédulité. — la grâce que Dieu a miséricordieusement répandue sur les gentils ne fait aucun tort aux J-uifs — Saint Paul les reprend et rabaisse leur orgueil et leur insolence. — Ils sont jaloux du salut des gentils. — L'orgueil rend toutes les vertus inutiles .
2. Mais, ô les plus insensés de tous les hommes ! quel tort Dieu vous a-t-il fait en étendant sa divine providence sur les autres nations ? La participation des autres à la même grâce et aux mêmes bienfaits a-t-elle diminué vos biens ? Mais la malignité est aveugle, et elle se rend difficilement compte de ce qu'il convient de faire. Les J-uifs donc, aigris, et irrités de voir que d'autres allaient participer à leur liberté, ont eu la rage de se plonger eux-mêmes le poignard dans le sein, et par là ils se sont exclus, comme de juste, de la miséricorde de Dieu. Jésus-Christ leur dit: "Mon ami , je ne vous fais point de tort; pour moi je veux donner à ceux-ci autant qu'à vous". (Matth. XX, 13, 14.)
Mais disons plutôt qu'ils ne méritent pas même qu'on leur tienne ce langage. Celui à qui il s'adresse, s'il souffrait avec peine, s'il se plaignait que son maître donnât une pareille récompense à ses compagnons, pouvait du moins représenter ses peines, ses sueurs; qu'il avait travaillé tout le long du jour, et qu'il avait porté le poids de la chaleur; mais ceux-ci, qu'ont-ils à dire ? Que peuvent-ils alléguer ? Certainement, rien de semblable. Ils n'ont en eux que lâcheté, qu'intempérance et mille autres vices dont les prophètes, les accusaient et leur faisaient des reproches continuels, et, par ces vices, ils n'offensaient pas moins Dieu que les gentils. Saint Paul le déclare quand il dit: "Car il n'y a nulle différence entre le j-uif et le gentil, parce que tous ont péché et ont besoin de la gloire de Dieu, étant justifiés gratuitement par sa grâce ". (Rois. III, 22, 23, 24.)
L'apôtre traite pleinement ce sujet dans cette épître, et le fait d'une manière très utile et très prudente. Au commencement il montre qu'ils ont mérité même d'être plus sévèrement punis que les gentils. "Car", dit-il, "tous ceux qui ont péché étant sous la Loi, seront jugés par la Loi " (Rom. II, 12), c'est-à-dire, avec plus de rigueur, parce qu'outre la nature, ils auront aussi la Loi pour accusatrice : et non seulement pour cela, mais encore pour avoir été cause que les nations ont blasphémé Dieu : "Car ", dit l'Ecriture, "vous êtes cause que le nom de Dieu est blasphémé parmi les nations ". (Is. LII, 5; Rom. II, 24.)
La vocation des gentils était donc ce qui irritait le plus les J-uifs. Car les fidèles circoncis en étaient eux-mêmes frappés d'étonnement c'est pourquoi, lorsque saint Pierre fut de retour de Césarée à Jérusalem, ils lui firent des reproches et des plaintes d'avoir été chez des hommes incirconcis, et d'avoir mangé avec eux. (Act. XI, 3 et suiv.) Et après qu'il leur eût appris qu'il n'avait rien fait que par l'ordre de Dieu, ils s'étonnaient encore de voir que la grâce du Saint-Esprit se répandait aussi sur les gentils (Act. X, 45) : en quoi ils montraient visiblement qu'ils ne s'y étaient jamais attendus. Saint Paul sachant donc bien que c'était là ce qui les piquait et les chagrinait le plus, ne perd aucune occasion de réprimer leur orgueil et de rabaisser leur hauteur et leur insolence.
Voyez, mes frères, comment il s'y prend après avoir disputé contre les gentils, avoir montré qu'ils étaient tout à fait inexcusables, qu'ils n'avaient nulle espérance de salut, et leur avoir vivement reproché leurs erreurs et leurs dissolutions, il adresse la parole aux J-uifs il raconte d'abord ce que le prophète avait dit d'eux, qu'ils étaient méchants, fourbes, trompeurs, qu'ils étaient tous devenus inutiles, que nul d'eux ne cherchait Dieu, mais que tous s'étaient détournés de la droite voie (Ps. XIII, 3, 4, 5, et LII, 3, 4), et bien d'antres choses semblables, à quoi il ajoute : "Or, nous, savons que toutes les paroles de la Loi s'adressent à ceux qui sont sous la Loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde se reconnaisse condamnable devant Dieu....... Parce que tous ont péché, et ont besoin de la gloire de Dieu". (Rom. III,19, 23.) De quoi donc, ô J-uifs ! pouvez-vous vous glorifier? d'où vous vient tant d'orgueil ? On vous a aussi fermé la bouche, votre confiance vous est ôtée, vous êtes condamnables avec tout le monde, et vous avez besoin, comme les autres, d'être justifiés gratuitement.
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2. L'incrédulité, cause de l'aveuglement des J-uifs : l'orgueil, cause de leur incrédulité. — la grâce que Dieu a miséricordieusement répandue sur les gentils ne fait aucun tort aux J-uifs — Saint Paul les reprend et rabaisse leur orgueil et leur insolence. — Ils sont jaloux du salut des gentils. — L'orgueil rend toutes les vertus inutiles .
2. (suite) Et certes, quand même vous auriez toujours bien vécu, quand même vous auriez sujet d'avoir une grande confiance en Dieu, vous n'auriez jamais dû porter envie à ceux à qui le Seigneur, par sa bonté, a bien voulu faire miséricorde et accorder la grâce du salut. Car c'est le fait d'une extrême méchanceté de ne pouvoir souffrir qu'on fasse du bien aux autres, et principalement quand il ne vous en revient aucun mal. Encore, si le salut d'autrui vous faisait tort, vos plaintes seraient excusables, bien que peu dignes d'hommes instruits dans la sagesse; mais si le malheur d'autrui n'augmente pas votre récompense, et si son bonheur ne diminue point le vôtre, pourquoi vous affliger qu'un autre ait reçu le salut gratuitement ?
Il fallait donc, comme je l'ai dit, quand même votre vie aurait été irréprochable, ne vous pas chagriner que Dieu ait étendu la grâce du salut sur les gentils. Mais vous-mêmes étant coupables des mêmes péchés et ayant également offensé le Seigneur, que vous ne puissiez supporter qu'il fasse du bien aux autres, que vous vous vantiez d'avoir seuls droit à la grâce, ce n'est point là seulement une marque d'orgueil et d'envie, c'est encore une si grande et si extrême folie, qu'elle vous rend dignes des supplices les plus rigoureux. Car vous avez planté l'orgueil dans votre cœur, et l'orgueil est la racine de tous les maux.
Voilà pourquoi un Sage disait : "Le principe de tout péché, est l'orgueil" (Eccli. X, 15), c'est-à-dire, l'orgueil est la racine, la source et le père dé tout péché. C'est l'orgueil qui a fait déchoir le premier homme de sa félicité primitive. Le diable par qui il fut trompé, c'est l'orgueil encore qui l'avait fait tomber lui-même de la sublime dignité où il était élevé : il le savait bien, ce malin esprit, que ce péché avait la force de chasser du ciel même ceux qui en sont atteints : aussi prit-il cette voie pour dépouiller Adam de tous ses honneurs. C'est en enflant son cœur de l'orgueilleuse espérance de devenir égal à Dieu, qu'il l'a abattu, et l'a précipité au fond de la terre. Rien n'est en effet plus capable d'éloigner de nous la miséricorde de Dieu, et de nous livrer au feu de l'enfer que la tyrannie de l'orgueil. Quand elle possède notre cœur, toute notre vie devient impure : fussions-nous chastes et vierges : fussions-nous adonnés au jeûne, à la prière, à l'aumône et aux plus saintes pratiques : "Tout homme", dit l'Ecriture, "qui a le cœur superbe, est souillé devant le Seigneur". (Prov. XVI, 5, Septante)
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2. L'incrédulité, cause de l'aveuglement des J-uifs : l'orgueil, cause de leur incrédulité. — la grâce que Dieu a miséricordieusement répandue sur les gentils ne fait aucun tort aux J-uifs — Saint Paul les reprend et rabaisse leur orgueil et leur insolence. — Ils sont jaloux du salut des gentils. — L'orgueil rend toutes les vertus inutiles .
2. (suite) Réprimons donc, mes chers frères, réprimons cette élévation, cette enflure du cœur, si nous voulons être purs et échapper au supplice qui a été préparé pour le diable. Ecoutez ce que dit saint Paul, et vous apprendrez que l'orgueilleux sera condamné au même supplice que le diable : "Que ce ne soit point un néophyte", dit-il, "de peur que, s'élevant d'orgueil, il ne tombe dans le jugement et dans le piège du diable". (I Tim. III, 6, 7.) Que veut dire le saint apôtre parle mot de "jugement?" il veut dire : la même condamnation, le même supplice.
Mais comment éviterez-vous ce malheur? Vous l'éviterez, si vous réfléchissez en vous-même sur votre nature, sur la multitude de vos péchés, sur la grandeur des tourments, si vous considérez combien est fragile et périssable ce qui paraît brillant en ce monde, et que tout cela se flétrit plus vite que l'herbe et les fleurs du printemps. Non, le diable, quelque effort qu'il fasse, ne pourra pas facilement enfler nos cœurs d'orgueil, ni nous prendre en trahison, si nous nous occupons souvent de ces pensées, et si nous nous rappelons continuellement le souvenir des hommes les plus distingués par leurs vertus. Que le Dieu des humbles, le bon Dieu, le Dieu clément, nous donne et à vous et à moi un cœur contrit et humilié ! Par là tout le reste nous deviendra facile pour la gloire de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui, et avec qui gloire au Père et au Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
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1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
1. Dieu, qui est clément, libéral et magnifique dans ses dons, Dieu, mes chers frères, n'oublie et n'omet rien de ce qu'il faut pour que nous brillions par l'éclat de nos vertus, parce qu'il veut que nous nous rendions dignes de son approbation; et ce n'est point par force ou par contrainte qu'il veut que nous allions à lui; mais il invite, il attire par les bienfaits tous ceux qui veulent se laisser persuader. Voilà pourquoi, à sa venue, les uns l'ont reçu, les autres, repoussé: c'est qu'il ne veut point de serviteur qui le serve malgré soi, ou forcément; mais il veut que tous viennent à lui librement et volontairement, et qu'ils lui rendent des actions de grâces de cette sorte de servitude.
Les hommes ont besoin de l'aide des serviteurs, voilà pourquoi ils les soumettent malgré eux à la loi de l'obéissance; mais Dieu n'ayant besoin de personne (Act. XVII, 25), n'étant nullement sujet aux nécessités qui pèsent sur nous, et ne faisant rien que pour notre salut, laisse tout à notre libre arbitre et à notre volonté; c'est pourquoi il ne force et ne contraint personne, et dans tout ce qu'il fait il n'a en vue que notre utilité. En effet, servir Dieu forcément et malgré soi, ce serait la même chose que de ne le point servir du tout.
Pourquoi donc, direz-vous, punit-il ceux qui ne veulent point lui obéir ? Et pourquoi a-t-il menacé de l'enfer ceux qui ne gardent pas ses commandements? C’est parce qu'étant bon, il prend un grand soin de nous, quoique nous ne lui soyons pas obéissants, et qu'il ne s'éloigne et ne se retire pas de nous, lors même que nous nous dérobons et que nous fuyons. Or, comme nous n'avons pas voulu entrer par cette première voie des dons et des grâces, ni nous rendre à la persuasion et aux bienfaits, il en a pris une autre, et c'est celle des supplices et des tourments, qui véritablement est très rigoureuse, mais toutefois nécessaire. Car la première ayant été méprisée, la seconde est devenue absolument indispensable.
En effet, les législateurs établissent contre les coupables des peines nombreuses et sévères, et cependant nous ne les haïssons pas; nous ne faisons que les en honorer davantage, car sans rien exiger de nous, et souvent même sans connaître ceux que protégeraient leurs lois, ils ont veillé et pourvu à notre sûreté et au bon ordre de la république, soit en comblant d'honneurs les gens de bien et les élevant aux dignités, soit en réprimant et punissant les malfaiteurs qui troublent le repos public. Que si, dis-je, nous les admirons et nous les aimons, ne devons-nous pas beaucoup plus admirer et aimer Dieu, qui a un si grand soin des hommes? Car il y a une différence extrême et infinie entre leurs soins et la providence que Dieu a pour nous : certes, les richesses de sa bonté sont ineffables, et surpassent tout ce qu'on en pourrait dire.
Ici, mes frères, renouvelez votre attention "Il est venu chez soi", non par nécessité. Dieu, comme je l'ai dit, n'a besoin de rien ; mais il est venu pour répandre ses grâces et ses bienfaits sur les siens. Et quoiqu'il soit venu pour leur utilité, pour leur faire du bien, ceux qui étaient les siens ne l'ont point reçu, ils l'ont au contraire rejeté. Et encore ne s'en sont-ils pas contentés; mais après l'avoir jeté hors de la vigne, ils l'ont tué. (Matth. XXI, 39.) Néanmoins, il ne les a point exclus de la pénitence; mais il leur a promis que si, après une action si noire et si détestable, ils voulaient laver leurs crimes en croyant en lui, Il les rendrait égaux à ceux qui n'ont rien fait de semblable, et même à ses amis les plus dévoués.
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IL EST VENU CHEZ SOI, ET LES SIENS NE L'ONT POINT REÇU. (JUSQU'AU VERSET 14)
1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
1. (suite) Au reste, je ne parle point en l'air ni pour vous faire illusion : tout ce qui est arrivé à saint Paul en rend un assez éclatant témoignage. Paul avait persécuté Jésus-Christ après sa mort; il avait lapidé par les mains de plusieurs (1) Etienne son martyr; mais quand il eut fait pénitence, qu'il eut condamné ses premières erreurs et se fut rallié à celui qu'il avait persécuté, le divin Sauveur le mit aussitôt parmi ses amis, et au premier rang, en chargeant de l'annoncer et de répandre sa doctrine dans tout le monde , ce blasphémateur, ce persécuteur, cet impie (I Tim. I, 13) ainsi que dans la joie dont son âme est pénétrée en songeant à la miséricorde divine; il ne rougit pas de le déclarer lui-même; que dis-je ? il ne craint pas même de rendre publics à la face de tout l'univers, dans ses épîtres, et de graver, pour ainsi dire, sur une colonne, les crimes qui avaient précédé sa conversion; persuadé qu'il était mieux d'exposer à la censure publique sa vie passée, afin que la grandeur du bienfait qu'il avait reçu de Dieu parût et éclatât manifestement, que de laisser dans l'ombre cette infinie et ineffable bonté dans la crainte de dévoiler aux yeux de tous ses propres égarements.
Voilà pourquoi il parle très souvent des persécutions qu'il a dirigées contre l'Eglise, des pièges qu'il lui a tendus et des guerres qu'il lui a faites. Tantôt il dit : "Je ne suis pas digne d'être appelé apôtre, parce que j'ai persécuté l'Eglise de Dieu". (I Cor. XV, 9.) Tantôt, Jésus-Christ "est venu dans le monde sauver les pécheurs, entre lesquels je suis le premier". (I Tim. 1, 15.) Et encore: "Vous savez de quelle manière j'ai vécu autrefois dans le judaïsme, avec quel excès de fureur je persécutais l'Eglise de Dieu, et la ravageais". (Gal. I, 13.)
1. Saint Paul a lapidé saint Etienne par les mains de plusieurs, en gardant leurs vêtements.
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
Licencié ès-lettres, professeur de rhétorique au collège de l’Immaculée-Conception de Saint-Dizier, Bar-Le-Duc, L. Guérin & Ce, Éditeurs 1865, TOME HUITIÈME Pages 93 à 556.
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Re: SUITE DE SAINT JEAN (JUSQU’AU VERSET 14), par Saint Jean Chrysostôme.
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IL EST VENU CHEZ SOI, ET LES SIENS NE L'ONT POINT REÇU. (JUSQU'AU VERSET 14)
1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
2. C'est en effet comme pour reconnaître publiquement la patience dont Jésus-Christ avait usé à son égard , en montrant quel homme, quel ennemi lui avait dû son salut, que le saint apôtre raconte ainsi librement la guerre qu'il lui faisait au commencement avec tant de fureur, donnant aussi par là une bonne espérance à ceux qui auraient pu se désespérer: car il dit que Jésus-Christ l'a reçu à pénitence, et lui a fait miséricorde, afin qu'il fût le premier en qui le divin Sauveur fit éclater son extrême patience et les immenses richesses de sa bonté, et qu'il devînt comme un modèle et un exemple à ceux qui croiront au Seigneur pour acquérir la vie éternelle. (I Tim. I, 16.) Les hommes avaient commis des crimes trop énormes et trop grands pour en pouvoir jamais attendre le pardon, et c'était pour le faire connaître que l'évangéliste disait: "Il est venu chez soi, et les siens ne l'ont point reçu".
D'où est-il venu celui qui remplit tout, qui est présent partout ? Quel lieu a-t-il quitté celui qui tient et renferme tout dans sa main ? Véritablement il n'a quitté aucun lieu, et comment le pourrait-il ? Mais il semble en quitter un en descendant chez nous. Comme étant dans le monde, il ne paraissait pas y être, parce qu'il n'y était pas encore connu; il s'est ensuite fait connaître lui-même, lorsqu'il a bien voulu se revêtir de notre chair. Et c'est cette descente et cette manifestation que l'Écriture appelle sa venue.
Il y a de quoi s'étonner ici, mes chers frères, que le disciple ne rougisse pas de l'outrage qui a été fait à son maître (1), qu'il ne craigne pas de le consigner par écrit : mais cela même montre parfaitement son ardent amour pour la vérité. A bien considérer les choses, c'est pour les offenseurs qu'il faudrait rougir, et non pour l'offensé, qui n'a fait que croître en gloire, pour s'être montré si charitable envers ceux qui l'avaient outragé : mais eux au contraire ont été regardés de tout le monde comme des ingrats et des scélérats, pour avoir chassé comme un adversaire et un ennemi, celui qui était venu leur apporter tant de biens. Et ce n'est point encore là tout le tort qu'ils se sont fait, ils ont en outre été exclus des dons et des grâces qu'ont obtenus ceux qui l'ont reçu. "Mais," dit saint Jean, "il a donné à tous ceux qui l'ont reçu le pouvoir d'être faits enfants de Dieu (verset 12)".
1. " L'outrage qui a été fait à son maître". Saint Jean n'en rougit pas puisqu'il dit clairement que le maître "est venu chez soi, et que les siens ne l'ont point reçu", et que non seulement ils ne l'ont point reçu, mais encore qu'ils l'ont rejeté, chassé de la vigne, et tué.
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IL EST VENU CHEZ SOI, ET LES SIENS NE L'ONT POINT REÇU. (JUSQU'AU VERSET 14)
1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
2. (suite) Pourquoi, ô bienheureux évangéliste, ne nous racontez-vous pas le supplice auquel ont été livrés ceux qui ne l'ont point reçu ? vous vous contentez de nous apprendre qu'ils étaient les siens, et que le maître étant venu chez soi, les siens ne l'avaient point reçu mais vous n'avez point ajouté, ni à quelle peine ils sont destinés, ni quel sera leur supplice.
Cependant, si vous le leur aviez découvert, vous les auriez rendus plus timides et plus retenus, et par la menace que vous leur auriez faite, vous auriez pu amollir la dureté de leur cœur orgueilleux et superbe. Pourquoi donc êtes-vous demeuré dans le silence ? Mais est-il un plus grand supplice, répondra-t-il, que de n'avoir pas voulu soi-même être fait enfant de Dieu, en ayant reçu le pouvoir; et de s'être volontairement privé d'une si éminente dignité et d'un si grand honneur ? Et toutefois, de n'avoir pas reçu ce don et cette grâce, ce n'est point en cela seul que consiste le supplice qu'ils subiront, ils seront aussi jetés dans un feu qui ne s'éteindra point. L'évangéliste l'a dans la suite plus ouvertement déclaré.
En attendant, il raconte les biens ineffables que recevront ceux qui l'ont reçu, et il les explique dans ce peu de paroles : "Il a donné à tous ceux qui l'ont reçu le pouvoir d'être faits enfants de Dieu" : soit serviteurs, soit libres, soit Grecs, soit Barbares, soit Scythes, soit ignorants, soit savants, soit hommes, soit femmes, soit enfants, soit vieillards, soit ceux qui sont honorés, soit ceux qui sont méprisés, soit riches, soit pauvres, soit princes, soit particuliers : tous, dit-il, tous reçoivent le même honneur. La foi et la grâce du Saint-Esprit ôtant l'inégalité des conditions humaines, les réduit toutes en un même état, n'en fait qu'une seule, marquée du même sceau royal. Est-il rien d'égal à cette bonté ?
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1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
2. (suite) Un roi, formé de la même boue que nous, ne daigne pas enrôler dans son armée royale, s'ils ont été dans la servitude, ses pareils, ses semblables, dont beaucoup peuvent valoir mieux que lui : mais le fils unique de Dieu ne dédaigne pas d'écrire au livre de ses enfants les publicains, les magiciens, les esclaves et les plus vils de tous les hommes, avec une foule d'estropiés et d'infirmes. TANT EST EFFICACE LA FOI EN JÉSUS-CHRIST ! tant sa grâce est grande et puissante l et de même que le feu n'a qu'à toucher un minerai pour en faire aussitôt de l'or: ainsi, et encore mieux, le baptême change la boue en or chez ceux qu'il purifie; l'Esprit-Saint, comme un feu, tombant alors dans nos âmes et consumant l'image de boue, la refond, pour ainsi dire, et en forme une image nouvelle, céleste et brillante.
Et pourquoi l'évangéliste n'a-t-il pas dit : il les a faits enfants de Dieu, mais : "Il leur a donné le pouvoir d'être faits enfants de Dieu?" C'est pour montrer que nous avons besoin de beaucoup d'attention et de soin pour conserver pure et sans tache l'image de l'adoption, qui a été imprimée en nous dans le baptême , et pour faire connaître en même temps que personne ne peut nous ôter ce pouvoir, si nous ne nous en dépouillons pas nous-mêmes les premiers.
Si ceux qui ont reçu mandat des hommes pour traiter quelque affaire, ont presque autant de pouvoir que ceux qui leur ont donné commission, à combien plus forte raison nous, qui avons reçu de Dieu cette dignité, si nous ne faisons rien qui nous en rende indignes, serons-nous puissants et les plus puissants de tous les hommes, puisque celui qui nous y a élevés est lui-même tout ce qu'il y a de plus grand et de plus excellent. Saint Jean veut encore nous apprendre que la grâce même ne se répand pas indifféremment sur toutes sortes de personnes, mais seulement sur les hommes de bonne volonté : c'est à eux qu'est donné le pouvoir d'être faits enfants de Dieu : car s'ils ne le veulent point, ce don n'arrive pas, et l'effet est nul.
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
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IL EST VENU CHEZ SOI, ET LES SIENS NE L'ONT POINT REÇU. (JUSQU'AU VERSET 14)
1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
3. Partout le saint évangéliste rejette la nécessité pour y substituer le libre arbitre et la volonté c'est ce qu'il fait ici même. Car, dans ces mystérieuses opérations, une chose est de Dieu, c'est-à-dire, de donner la grâce; l'autre est de l'homme, à savoir, de donner sa foi; mais on a besoin ensuite d'une grande attention et de beaucoup de soin. Pour conserver la pureté de l'âme, il ne suffit pas seulement d'être baptisé et de croire, mais il faut, si nous voulons jouir toujours de cet aimable don, il faut mener une vie qui en soit digne et Dieu a voulu que cela fût en notre pouvoir. Le baptême nous fait renaître par une génération mystique et spirituelle, et lave les péchés que nous avons commis auparavant: mais il est en notre pouvoir, et il dépend de notre attention et de nos soins, de demeurer purs dans la suite et de ne plus contracter de souillures.
Voilà pourquoi saint Jean raconte la manière dont se fait la génération spirituelle; et par la comparaison qu'il en fait avec la naissance charnelle, il en démontre l'excellence en ces termes :" Qui ne sont point nés a du sang, ni de la volonté de la chair, ni de a la volonté de l'homme , mais de Dieu a même (verset 13)". Et il l'a ainsi racontée, afin que, connaissant la bassesse de la première qui vient du sang et de la volonté de la chair, et qu'ayant compris la dignité et la sublimité de la seconde que la grâce produit, nous concevions de celle-ci une grande et une juste idée, répondant à la majesté de celui qui l'opère, et que nous apportions ensuite beaucoup de soin à la conserver dans toute sa pureté.
Nous avons, en effet, extrêmement à craindre que, ayant souillé cette belle robe par notre paresse et par nos crimes, nous ne soyons chassés de la chambre nuptiale, comme les cinq vierges folles (Matt. XXV, 2), et aussi comme celui qui n'avait point de robe nuptiale (Matt. XXII, 11). Cet homme était du nombre des conviés, il avait été invité aux noces, mais étant appelé, ayant reçu un si grand honneur, il fit un affront, une injure à celui qui l'avait invité. Ecoutez la suite, vous apprendrez combien fut déplorable et digne de larmes la peine qu'il subit. Venu pour s'asseoir à cette magnifique et somptueuse table, non seulement il en fut chassé et exclu du festin, mais encore, pieds et poings liés, il fut jeté dans les ténèbres extérieures, où il y a des pleurs et des grincements de dents sans fin (Matt. XXII, 13).
Ne croyons donc pas, mes chers frères, que la foi nous suffise seule pour le salut; si nous ne rendons notre vie pure et sainte, et si nous approchons du roi vêtus d'une robe indigne de notre heureuse vocation, rien n'empêchera que nous ne soyons traités comme ce misérable. Il est absurde que celui qui est Dieu et Roi tout ensemble, ne rougissant pas d'appeler des hommes vils et méprisables, et de les faire chercher dans les carrefours pour les inviter à sa table, nous soyons encore si lâches et si insensés, qu'après un si grand honneur même, nous ne devenions pas meilleurs, et que, quoiqu'ainsi appelés, nous persévérions dans notre méchanceté, nous méprisions, nous foulions aux pieds l'ineffable bonté de celui qui a bien voulu nous inviter.
Le Seigneur ne nous a point appelés et invités à la participation spirituelle et terrible des saints mystères, pour que nous nous y présentions chargés de nos anciens vices; il veut que, changeant de vie, et nous purifiant de nos iniquités, nous nous revêtions de la robe que doivent porter les convives d'un roi.
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
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1. Dieu ne force et ne contraint point notre libre arbitre.
2. Ce que signifie cette parole : Il est venu. — Que ceux qui n'ont pas voulu recevoir Jésus-Christ sont assez punis par le fait et par les suites de ce refus. — Effets du baptême.
3. Qu'il dépend de nous de conserver la pureté de notre baptême. — Peines et châtiments de ceux qui souillent la robe qu'ils ont reçue dans le baptême. — La foi et la pureté de la vie nécessaires au salut. — De quelle robe doivent se revêtir ceux qui sont appelés aux noces royales.
3. (suite) Que si nous ne voulons pas nous rendre dignes d'une si grande vocation, c'est à nous que nous devons nous en imputer toute la faute, et non pas à celui qui nous a fait l'honneur de nous inviter. Ce n'est pas lui qui nous chasse, mais c'est nous qui nous excluons nous-mêmes de cette admirable compagnie de conviés. Le roi a fait de son côté tout ce qu'il pouvait : il a fait les noces, il a préparé le festin, il a envoyé ses serviteurs appeler et invités, il a reçu ceux qui sont venus, et les a comblés de toutes sortes d'honneurs : mais nous, nous étant présentés avec des robes sales, c'est-à-dire souillés par nos mauvaises œuvres, nous avons fait un outrage à sa personne et aux conviés, et nous avons déshonoré les noces. Voilà pourquoi nous en sommes enfin justement exclus. Le roi, chassant de la sorte les téméraires et les insolents, a honoré et les noces et les conviés : il eût paru lui-même leur faire outrage, s'il avait laissé parmi eux ceux qui étaient revêtus de robes sales.
Fasse le ciel que personne ni de nous, ni des autres ne soit du nombre de ces indignes conviés, et n'éprouve leur triste sort ! En effet, ces choses ont été écrites avant qu'elles arrivent, afin que les menaces que nous en font les saintes Ecritures, nous portant et nous engageant à changer de vie, et à devenir gens de bien, nous ne tombions pas dans une si grande honte, ni dans un si terrible supplice, mais que nous ne les connaissions que par ouï dire, et que nous nous présentions revêtus d'une belle robe au lieu où nous sommes appelés. C'est ce que je vous souhaite, mes frères, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui et avec qui la gloire, l'honneur et l'empire soient au Père et au Saint-Esprit, aujourd'hui et toujours, et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
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ET LE VERBE S’EST FAIT CHAIR, ET A DEMEURÉ PARMI NOUS. (VERSET 14.)
ANALYSE.
1. Avant d'aller au sermon, lire les passages de l'Écriture qu'on y doit expliquer. — La forme de serviteur ne diminue point la dignité du Fils de Dieu.
2. Hérétiques qui disaient que le Verbe ne s'était incarné qu'en apparence. — Etat de la nature humaine avant l'avènement de Jésus-Christ : c'était une maison ruinée que le Tout-Puissant seul pouvait relever. — L'Incarnation est un mystère ineffable. Le Verbe a pris notre chair pour ne la quitter jamais ; c'est pourquoi elle est assise sur le trône royal et adorée de toute l'armée céleste.
1. Je vous demanderai une seule grâce, avant d'expliquer les paroles de mon texte; mais je vous prie de ne me la point refuser. La chose que je veux vous demander n'a rien de difficile, rien de pénible : elle ne me sera pas seulement utile à moi, mais aussi et surtout peut-être à vous-mêmes. En quoi donc consiste la grâce que je vous prie de me faire ? c'est qu'un jour de la semaine (1) ou le dimanche (2), chacun de vous prenne en ses mains cette partie de l'Évangile, dont on vous doit faire la lecture au sermon, pour la lire et relire à l'avance; quand vous serez tranquillement assis dans vos maisons, pour la digérer, en examiner attentivement le sens : et remarquer aussi ce que vous y trouvez de clair ou d'obscur, et ce qui semble se contredire dans les paroles, quoiqu'il n'y ait nulle contradiction : et qu'après avoir ainsi longtemps tout bien considéré et bien médité, vous veniez ensuite au sermon.
1. Un jour de la semaine, ou bien le premier jour de la semaine.
2. Le jour même du dimanche. — Litt. Le jour même du sabbat.
Vous et moi, nous ne retirerons pas peu de fruit de cette étude : moi, je n'aurai pas autant de peine à vous donner l'intelligence des paroles, quand votre esprit sera préalablement familiarisé avec le texte; et vous, vous rendrez votre esprit plus subtil et plus, pénétrant, et vous acquerrez plus de facilité, non seulement pour mieux écouter et mieux apprendre, mais encore pour enseigner aux autres ce que vous aurez appris.
De la manière dont vous vous comportez aujourd'hui, plusieurs de ceux qui sont ici présents étant obligés de retenir tout à la fois les paroles de l'Écriture, et l'explication que nous leur donnons, ne feront pas un grand profit, quand même nous serions une année entière à les leur expliquer. Et comment le pourraient-ils, puisqu'ils ne font attention aux paroles qu'en passant et seulement ici ?
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ET LE VERBE S’EST FAIT CHAIR, ET A DEMEURÉ PARMI NOUS. (VERSET 14.)
ANALYSE.
1. Avant d'aller au sermon, lire les passages de l'Écriture qu'on y doit expliquer. — La forme de serviteur ne diminue point la dignité du Fils de Dieu.
2. Hérétiques qui disaient que le Verbe ne s'était incarné qu'en apparence. — Etat de la nature humaine avant l'avènement de Jésus-Christ : c'était une maison ruinée que le Tout-Puissant seul pouvait relever. — L'Incarnation est un mystère ineffable. Le Verbe a pris notre chair pour ne la quitter jamais ; c'est pourquoi elle est assise sur le trône royal et adorée de toute l'armée céleste.
1. (suite) Que si quelques-uns allèguent pour excuse les soins, les inquiétudes de la vie, et qu'ils sont obligés d'occuper beaucoup de temps aux affaires publiques et domestiques : premièrement, nous leur répondrons que ce n'est pas une petite faute de se laisser accabler d'une si grande multiplicité d'affaires, et de s'attacher toujours si fort aux choses séculières, qu'ils ne puissent pas donner un peu de temps, ni la moindre application à celles qui sont le plus nécessaires; en second lieu, que ce sont là de vains prétextes, de fausses et de frivoles excuses, ce que prouvent visiblement leurs longs entretiens avec leurs amis, le temps qu'ils perdent dans les théâtres et aux spectacles des courses de chevaux, à quoi souvent ils passent des jours entiers, sans toutefois prétexter alors en aucune façon la foule et l'embarras des affaires.
Quand donc il s'agit de ces misérables amusements, vous n'avez garde de vous excuser et vous ne manquez pas de temps à perdre mais faut-il vous appliquer aux choses divines, elles vous paraissent si superflues et si méprisables, que vous estimez qu'elles ne valent pas un de vos instants; mais des gens qui ont de pareils sentiments sont-ils dignes de respirer encore ou de voir le soleil ?
Ces lâches, ces paresseux produisent encore un très vain et très frivole prétexte : ils disent qu'ils n'ont pas les livres. En ce qui concerne les riches, il serait ridicule à nous de nous arrêter à faire justice de cette excuse. Quant aux pauvres, comme je m'imagine qu'ils y ont souvent recours, je voudrais leur demander si chacun d'eux n'a pas au complet tous les outils propres et convenables à sa profession, fût-il même dans une extrême indigence ? N'est-il donc pas bien absurde de ne point prétexter ici sa pauvreté, de ne rien omettre pour surmonter toutes les difficultés et repousser tous les obstacles, et de s'excuser, de se lamenter sur ses occupations et son indigence, quand il y a tant à gagner?
Mais quand même quelques-uns seraient assez pauvres pour ne pouvoir pas se donner ces livres, ils pourraient encore, par la lecture assidue qu'on fait ici des saintes Ecritures, ils pourraient, dis-je, ne rien ignorer de ce que contiennent ces livres divins. Que si cela vous paraît impossible, je le conçois. Car plusieurs n'apportent pas ici un grand zèle pour écouter : après avoir écouté par manière d'acquit, ils s'en vont aussitôt chez eux. Que si quelques-uns restent plus de temps, ils n'en sont pas plus avancés que ceux qui se sont promptement retirés, puisqu'ils n'ont été présents que de corps.
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ET LE VERBE S’EST FAIT CHAIR, ET A DEMEURÉ PARMI NOUS. (VERSET 14.)
ANALYSE.
1. Avant d'aller au sermon, lire les passages de l'Écriture qu'on y doit expliquer. — La forme de serviteur ne diminue point la dignité du Fils de Dieu.
2. Hérétiques qui disaient que le Verbe ne s'était incarné qu'en apparence. — Etat de la nature humaine avant l'avènement de Jésus-Christ : c'était une maison ruinée que le Tout-Puissant seul pouvait relever. — L'Incarnation est un mystère ineffable. Le Verbe a pris notre chair pour ne la quitter jamais ; c'est pourquoi elle est assise sur le trône royal et adorée de toute l'armée céleste.
1. (suite) Mais pour ne pas vous fatiguer davantage par des reproches, ni consumer tout le temps en réprimandes, reprenons les paroles de notre Evangile : il est temps d'arriver au sujet que nous nous sommes proposé ; soyez attentifs, afin qu'aucune parole ne vous échappe.
"Et le Verbe s'est fait chair, et a demeuré parmi nous". Le saint évangéliste, après avoir dit que ceux qui l'ont reçu sont nés de Dieu et sont ses enfants, rapporte la cause ineffable d'un si grand honneur, à savoir celle-ci : le Verbe s'est fait chair, et le Seigneur a pris la forme de serviteur. Étant vrai Fils de Dieu, il s'est fait fils de l'homme, pour faire les hommes enfants de Dieu. Le sublime, en se rapprochant de ce qui est humble et bas, le relève, sans nuire en rien à sa propre gloire Et voilà ce qui s'est fait en la personne de Jésus-Christ.
En effet, il n'a point diminué sa nature par un si profond abaissement, et il nous a élevés à une gloire ineffable, nous qui étions toujours demeurés dans l'infamie et dans les ténèbres : ainsi, qu'un roi qui parle avec amour et avec bonté à un pauvre et à un mendiant, ne se déshonore point, ne fait rien de honteux, et rend ce pauvre illustre, le couvre de gloire devant tout le monde. Que si, lorsqu'il s'agit de ces dignités humaines qui sont purement empruntées, celui qui en est revêtu peut, sans se faire tort, fréquenter son inférieur : à plus forte raison, la même chose est-elle vraie de cette immortelle et bienheureuse substance qui n'a rien d'emprunté, d'accidentel ou de passager, mais dont tous les attributs sont immuables et éternels.
C'est pourquoi, quand vous entendrez ces paroles : "Le Verbe s'est fait chair", ne vous troublez point, ne vous scandalisez point. La substance "divine" n'a point été changée en chair; il serait impie d'avoir une pareille idée: mais Dieu demeurant ce qu'il était a pris la forme de serviteur.
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ET LE VERBE S’EST FAIT CHAIR, ET A DEMEURÉ PARMI NOUS. (VERSET 14.)
2. Hérétiques qui disaient que le Verbe ne s'était incarné qu'en apparence. — Etat de la nature humaine avant l'avènement de Jésus-Christ: c'était une maison ruinée que le Tout-Puissant seul pouvait relever. — L'Incarnation est un mystère ineffable. Le Verbe a pris notre chair pour ne la quitter jamais ; c'est pourquoi elle est assise sur le trône royal et adorée de toute l'armée céleste.
2. Mais pourquoi saint Jean s'est-il servi de cette parole: "Il s'est fait ?" C'est pour fermer la bouche aux hérétiques (1); car il y en a qui prétendent que le Verbe ne s'est point fait réellement homme, et que tout ce qui regarde le mystère de l'Incarnation n'est qu'apparence, allégorie, illusion. Le saint évangéliste a donc usé de ce mot: "Il s'est fait", pour prévenir ce blasphème : il ne veut point par là marquer un changement de substance (Dieu nous garde de cette pensée), mais montrer qu'il a réellement et véritablement pris une chair. Lors donc que saint Paul dit: « Jésus-Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, s'étant "rendu lui-même malédiction pour nous "(Gal. III, 13): il ne veut pas dire que sa substance ait été séparée et privée de la gloire, et qu'elle soit tombée dans la malédiction. Car ni les démons mêmes, ni les plus fous et les plus extravagants de tous les hommes, ne sont point capables d'un sentiment si extravagant en même temps que si impie ! Ce n'est donc point là ce qu'entend le saint apôtre; mais que Jésus-Christ ayant pris sur lui-même la malédiction que nous avions encourue, ne permet pas que nous y soyons soumis davantage et nous en libère. De même en cet endroit saint Jean dit que "le Verbe s'est fait chair", non en changeant sa substance en chair, mais en demeurant ce qu'il était auparavant, après avoir pris la chair.
1. Le saint Docteur combat ici les hérétiques nommés Docetes ou Apparens, parce qu’ils prétendaient que Jésus-Christ n'était né, mort et ressuscité qu'en apparence. Ils avaient pour père Simon le Magicien, comme les Gnostiques, c'est-à-dire, les savants et éclairés. — Voyez S. Ign. M. Epist. ad Trall. et ad Smyrn. — Dans saint Irénée le mot dokesei est traduit en latin par celui de putative, en opinion, en apparence, liv. I et suiv. Voyez Tillemont. Histoire. Ecclésiastique. T. II, p. 43 et 54, et la note de D. Bernard. De Montfaucon., hic.
Que si ces hérétiques disent, que comme Dieu peut tout, il a pu se changer en chair, nous leur répondrons qu'il peut tout, tant qu'il demeure Dieu ; mais s'il pouvait recevoir un changement, et un changement en mal, comment serait-il Dieu? Toute mutabilité, tout changement est infiniment éloigné de cette nature incorruptible. C'est pourquoi le prophète disait: "Ils vieilliront tous comme un vêtement. Vous les changerez comme un habit dont on se couvre, et ils seront en effet changés : mais pour vous, vous êtes toujours le même, et vos années ne passeront point". (Ps. CI, 27, 28.) Car cette substance est au-dessus de tout changement: il n'y a rien de meilleur ni de plus excellent que Dieu ; rien à quoi il puisse successivement atteindre et parvenir. Que dis-je, de meilleur? Rien ne lui est égal, rien n'en approche tant soit peu. Il s'ensuit donc que s'il a souffert quelque changement, il s'est changé en quelque chose de moindre : or, cela ne peut point être Dieu; mais que l'exécration de ce blasphème tombe sur la tête de ceux qui n'ont pas horreur de le proférer.
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
Licencié ès-lettres, professeur de rhétorique au collège de l’Immaculée-Conception de Saint-Dizier, Bar-Le-Duc, L. Guérin & Ce, Éditeurs 1865, TOME HUITIÈME Pages 93 à 556.
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ET LE VERBE S’EST FAIT CHAIR, ET A DEMEURÉ PARMI NOUS. (VERSET 14.)
2. Hérétiques qui disaient que le Verbe ne s'était incarné qu'en apparence. — Etat de la nature humaine avant l'avènement de Jésus-Christ : c'était une maison ruinée que le Tout-Puissant seul pouvait relever. — L'Incarnation est un mystère ineffable. Le Verbe a pris notre chair pour ne la quitter jamais ; c'est pourquoi elle est assise sur le trône royal et adorée de toute l'armée céleste.
2. (suite) Ce mot : "Il s'est fait", n'est dit ici que pour vous empêcher de soupçonner que l'Incarnation du Verbe n'a été qu'une illusion; les seules paroles qui suivent le prouvent visiblement, et étouffent tout mauvais soupçon. Car l'évangéliste ajoute: "Et a demeuré parmi nous". C'est comme s'il disait que cette parole : "Il s'est fait", ne nous jette pas dans des pensées et des soupçons absurdes. Je n'ai point dit qu'il y ait eu du changement dans la nature immuable, mais j'ai dit qu'elle a demeuré parmi nous. Or ce qui habite n'est pas l'endroit habité : une chose habite et l'autre est habitée : sans cela il n'y aurait pas habitation . Mais en indiquant cette différence, je parle d'une différence selon l'essence : car, par la jonction et la réunion, le Verbe de Dieu et la chair sont une même personne; non qu'il y ait confusion ni anéantissement de substance; mais en vertu d'une ineffable et inexplicable union.
Comment cela s'est fait, ne le demandez point: comment cela s'est fait, Dieu le sait. Quelle est donc, dites-vous, la maison qu'il a habitée ? Le Prophète nous l'apprend: "Je relèverai", vous dit-il, "la maison de David, qui est ruinée" (Amos, IX, 11) : véritablement elle est ruinée. Notre nature, ruinée par une chute irrémédiable, avait besoin de la main du Tout-Puissant; qui seul pouvait la relever. Elle ne pouvait aucunement se relever si Celui qui l'avait formée ne lui avait tendu la main du haut du ciel, et ne l'avait renouvelée et reformée par la régénération de l'eau et du Saint-Esprit.
Considérez ce mystère, mes chers frères, ce mystère terrible et impénétrable. Le Verbe demeure toujours dans cette maison : il s'est, en effet, revêtu de notre chair, non pour la quitter dans la suite, mais pour habiter toujours en elle. S'il n'avait pas voulu la garder toujours, il ne lui aurait pas fait l'honneur de la placer sur le trône royal, et, la portant avec lui, il ne l'aurait pas fait adorer par toute l'armée céleste : par les anges, par les archanges, par les trônes, par les dominations, par les principautés, par les puissances. Quel esprit, quelle langue pourrait représenter l'honneur immense que Dieu a fait à notre nature, cet honneur qui est tout surnaturel et terrible en même temps ? Quel ange ? Quel archange ? Non certes, personne, ou dans le ciel, ou sur la terre, ne le pourra jamais. Les œuvres de Dieu sont de telle nature, et ses bienfaits sont si grands et si sublimes que, non seulement aucune langue, mais encore nulle vertu céleste et angélique ne peut les raconter exactement.
Voilà pourquoi nous finissons ici notre sermon, pour nous tenir dans le silence, après vous avoir seulement exhortés à rendre grâces à un Dieu si bienfaisant : de quoi encore vous aurez tout le profit dans la suite. Or, rendre grâces au Seigneur, c'est prendre un grand soin de son âme. Car, par un nouvel effet de sa bonté; Lui, qui n'a nullement besoin d'aucun de nous, il dit que nous lui rendons le retour, que nous le récompensons en quelque sorte, lorsque nous ne négligeons pas le soin de notre âme. Nous ferions donc preuve d'une extrême folie et nous mériterions une infinité de supplices si, ayant reçu un si grand honneur, nous ne faisions pas tout ce qui dépend de nous pour lui rendre de justes actions de grâces, et principalement puisque tout l'avantage doit nous en revenir, puisque des biens sans nombre nous sont promis à cette condition.
Glorifions donc, pour tant de bienfaits, la bonté divine, non seulement par nos paroles, mais beaucoup plus encore par nos œuvres, afin que nous acquérions les biens futurs, que je vous souhaite, et à vous et à moi, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ; par qui et avec qui la gloire soit au Père et au Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
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ET NOUS AVONS VU SA GLOIRE; SA GLOIRE, DIS-JE, COMME DU FILS UNIQUE DU PÈRE, ÉTANT PLEIN DE GRÂCE ET DE VÉRITÉ. (VERSET 14.)
1. Gloire comme du Fils unique du Père, ce que cela signifie.
2 et 3. Prodiges et miracles à l'avènement de Jésus-Christ. — Hérauts et prédicateurs. — Libre arbitre de l'homme. — La vertu est libre — Les miracles annonçaient Jésus-Christ, et manifestaient qu'il est le Fils unique de Dieu. — Miracles opérés invisiblement et visiblement à sa mort.
1. Peut-être dans notre dernier discours, mes chers frères, vous aurons-nous attristés et offensés; peut-être vous aura-t-il paru que nous avons usé de paroles trop rudes, et que nous nous sommes trop étendus sur la paresse et la lâcheté de plusieurs. Si, en nous étendant ainsi et parlant en ces termes, nous avions seulement voulu vous faire de la peine, vous auriez tous raison de vous fâcher et de vous plaindre: mais c'est uniquement pour votre bien que nous nous sommes exposés à vous déplaire. Vous devez nous savoir gré de notre sollicitude, ou, tout au moins, nous pardonner en faveur de notre profonde affection.
Car nous craignons fort que si vous ne répondez à notre zèle que par l'indifférence, vous n'ayez à rendre un plus rigoureux compte au Seigneur. Voilà précisément, mes frères, ce qui nous engage et nous oblige souvent à vous réveille, à ranimer votre attention; de peur que vous ne perdiez un seul mot de ce que nous vous enseignons: car c'est pour vous le moyen de vivre en assurance en ce monde, et de vous présenter en l'autre avec confiance au tribunal de Jésus-Christ. Mais nous vous avons fait d'assez longues et d'assez fortes réprimandes la dernière fois : commençons donc aujourd'hui par vous expliquer tout de suite les paroles de notre Évangile: "Et nous avons vu sa gloire; sa gloire", dis-je, "comme du Fils unique du Père". Saint Jean, après avoir dit que nous avons été faits enfants de Dieu, et montré que cela n'est arrivé que parce que le Verbe s'est fait chair, déclare qu'il nous en est encore revenu un autre avantage. Quel est-il ? C'est que "nous avons vu sa gloire; sa gloire," dis-je, "comme du Fils unique du Père".
Et certes, nous ne l'aurions point vue cette gloire, si le Fils unique ne se fût montré à nous, revêtu du corps qu'il s'est uni. Si "les enfants d'Israël" ne purent regarder le visage de Moïse, qui n'était pas d'autre nature que nous, parce qu'il était resplendissant de lumière (Exode XXXIV, 29; II Cor. III, 7); si un voile fut nécessaire pour couvrir et cacher la grande gloire qui environnait ce Juste, pour adoucir et tempérer l'éclat du visage du prophète, comment nous, qui ne sommes que boue et que terre, aurions-nous pu approcher de la Divinité toute pure, de cette lumière qui est inaccessible même aux vertus célestes ? Le Fils unique du Père a donc habité parmi nous, afin que nous pussions librement approcher de lui, lui parler et demeurer avec lui.
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ET NOUS AVONS VU SA GLOIRE; SA GLOIRE, DIS-JE, COMME DU FILS UNIQUE DU PÈRE, ÉTANT PLEIN DE GRÂCE ET DE VÉRITÉ. (VERSET 14.)
1. Gloire comme du Fils unique du Père, ce que cela signifie.
2 et 3. Prodiges et miracles à l'avènement de Jésus-Christ. — Hérauts et prédicateurs. — Libre arbitre de l'homme. — La vertu est libre — Les miracles annonçaient Jésus-Christ, et manifestaient qu'il est le Fils unique de Dieu. — Miracles opérés invisiblement et visiblement à sa mort.
1. (suite) Mais que signifient ces paroles : "La gloire, comme du Fils unique du Père" ? Plusieurs prophètes ont paru tout éclatants de gloire, comme Moïse lui-même, Elie, Elisée: l'un est monté au ciel dans un char de feu (IV lib. Rois, II, 11); l'autre y a été enlevé. Après eux Daniel, les trois enfants, beaucoup d'autres, et tous ceux qui ont opéré des miracles, ont été glorifiés; de même, les anges qui se sont fait voir aux hommes dans la lumière et la splendeur de leur nature, et non seulement les anges, mais aussi les Chérubins et les Séraphins qui ont apparu au prophète, couverts d'une grande gloire: mais l'évangéliste écartant de nous toutes ces choses, élevant nos esprits au-dessus de la splendeur et de la gloire des créatures, et des autres serviteurs nos compagnons, nous installe au comble même des biens et au centre de la gloire. Ce n'est pas la gloire d'un prophète, ni d'un ange, ni d'un archange, ni des vertus célestes, ni d'aucune autre créature, s'il en est, que nous avons vue mais nous avons vu la gloire du Seigneur même, du roi même, du vrai Fils unique même, de celui qui est le Seigneur de tous les hommes.
Ce mot: "comme", n'est point ici pour marquer une comparaison, un exemple, une similitude; mais pour établir et pour fixer indubitablement la chose : de même que si l'évangéliste disait: Nous avons vu la gloire qui convient, qui est propre au vrai et à l'unique Fils de Dieu, roi de tout l'univers. C'est là une façon de parler usuelle, et je ne ferai pas difficulté d'invoquer cet usage à l'appui de mes paroles. Car il ne s'agit pas ici de beau langage ni de périodes harmonieuses, mais seulement de votre intérêt: c'est pourquoi rien ne nous empêche de tirer nos preuves de l'usage vulgaire.
Quel est donc cet usage ? Vous allez l'apprendre: des personnes ont vu un monarque dans toute sa pompe et sa magnificence, il brille de toutes parts, il est tout couvert de pierres précieuses. S'il leur arrive de vouloir décrire à d'autres cette magnificence, cette pompe, ces ornements, cette gloire, ils peignent à leur manière, et comme ils peuvent, l'éclat de la pourpre, la grosseur des diamants, la blancheur des mules, l'or des harnais, le lustre des housses. Enfin , après avoir fait le récit de ces choses et de plusieurs autres, voyant qu'ils n'en peuvent pas bien représenter toute la richesse et la somptuosité, ils ajoutent aussitôt, mais pourquoi tant de paroles ? En un mot, il était comme un empereur, et par ce mot: "comme", ils ne veulent pas dire un homme semblable à l'empereur, mais l'empereur lui-même. C'est donc en ce même sens que l'évangéliste s'est servi de ce mot: "comme", pour montrer l'excellence d'une gloire incomparable. Tous les autres, les anges, les archanges, les prophètes exécutaient en tout les ordres qu'ils avaient reçus: mais le Fils unique agissait en tout avec l'autorité et la puissance qui n'appartient qu'au roi et au souverain Seigneur. Et voilà ce qui faisait l'admiration du peuple (Matth. VII, 28); c'est qu'il les instruisait comme ayant autorité.
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ET NOUS AVONS VU SA GLOIRE, SA GLOIRE, DIS-JE, COMME DU FILS UNIQUE DU PÈRE, ÉTANT PLEIN DE GRÂCE ET DE VÉRITÉ. (VERSET 14.)
1. Gloire comme du Fils unique du Père, ce que cela signifie.
2 et 3. Prodiges et miracles à l'avènement de Jésus-Christ. — Hérauts et prédicateurs. — Libre arbitre de l'homme. — La vertu est libre — Les miracles annonçaient Jésus-Christ, et manifestaient qu'il est le Fils unique de Dieu. — Miracles opérés invisiblement et visiblement à sa mort.
2. Les anges, comme je l'ai dit, ont donc apparu sur la terre, avec beaucoup de gloire, à Daniel, à David, à Moïse; mais ils faisaient tout comme des serviteurs qui obéissent leurs maîtres: le Fils unique, au contraire, agissait en tout comme Seigneur et Roi de tout l'univers. Quoiqu'il soit venu et se soi montré sous une forme vile et basse, toutefois, dans cet abaissement même et sous cette formé de serviteur, la créature a connu son Seigneur. Comment ? L'étoile, du haut du ciel, a appelé les mages pour venir l'adorer; une grande troupe d'anges, répandue de tous côtés, le servait comme son Maître et chantait des hymnes à sa louange; d'autres hérauts ont paru tout à coup, et s'étant tous rencontrés et joints ensemble, ils ont annoncé le grand et le profond mystère "de l'Incarnation"; les anges l'ont annoncé aux pasteurs; les pasteurs aux habitants dé la ville; Gabriel à Marie et à Elisabeth; Anne et Siméon à ceux qui étaient dans le temple. Et non seulement les hommes et les femmes en ont eu une grande joie, mais encore l'enfant qui n'était pas encore sorti du ventre de sa mère; je parle de cet habitant du désert qui, portant le même nom que notre évangéliste, tressaillit dans le sein maternel (Luc, I ,41): tous soupiraient dans l'espérance de l'enfantement qui devait arriver. Voilà ce qui s'est passé dans le temps de l'avènement.
Mais lorsque le Fils unique se fut davantage manifesté, d'autres miracles plus grands que les premiers éclatèrent. Ce n'est plus une étoile, ni le ciel, ni les anges et les archanges, ni Gabriel et Michel, c'est Dieu le Père lui-même qui l'annonce du haut des cieux, et, avec le Père, le Saint-Esprit qui descend et demeure sur lui (Matth. III, 15; Marc, I, 10; II Pierre, II, 27), etc.; c'est donc avec vérité que Jean a dit: "Nous avons vu sa a gloire; sa gloire", dis-je, "comme du Fils unique du Père".
Et en s'exprimant ainsi, il ne pense pas seulement à ces choses, mais encore à celles qui les ont suivies. Car les pasteurs, les veuves et les vieillards ne sont plus les seuls à nous l'annoncer: la voix des événements, comme une trompette sonore, retentit à son tour, et si haut, que le son en parvient aussitôt jusqu'ici. "Sa réputation", dit l'Écriture, "s'est répandue par toute la Syrie" (Matth. IV, 24); elle l'a fait connaître à tout le monde.
Tout publiait à haute voix que le Roi du ciel était arrivé. En effet, on voyait les démons fuir de toutes parts et céder la place; le diable se retirer couvert de honte; la mort même, la mort d'abord repoussée, ensuite vaincue et entièrement détruite: toutes sortes d'infirmités étaient guéries, les sépulcres renvoyaient les morts (Matth. XXVII, 52), les démons laissaient tranquilles les possédés, les maladies quittaient les malades.
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ET NOUS AVONS VU SA GLOIRE; SA GLOIRE, DIS-JE, COMME DU FILS UNIQUE DU PÈRE, ÉTANT PLEIN DE GRÂCE ET DE VÉRITÉ. (VERSET 14.)
1. Gloire comme du Fils unique du Père, ce que cela signifie.
2 et 3. Prodiges et miracles à l'avènement de Jésus-Christ. — Hérauts et prédicateurs. — Libre arbitre de l'homme. — La vertu est libre — Les miracles annonçaient Jésus-Christ, et manifestaient qu'il est le Fils unique de Dieu. — Miracles opérés invisiblement et visiblement à sa mort.
2. (suite) C'est alors qu'on vit tous ces prodiges et ces miracles que les prophètes avaient désiré de voir, comme de juste, et qu'ils n'avaient point vus: c'est alors qu'on a vu des yeux se former et recevoir la lumière; et Jésus-Christ faisant voir à tous, en un moment et dans la plus excellente partie du corps, ce qui est si curieux, ce que tous les hommes ont dû souhaiter de voir, comment Dieu a formé Adam de la terre (1). De plus, on a vu des membres que la paralysie avait desséchés et comme détachés du corps, tout à coup rétablis et réunis aux autres; des mains mortes reprendre le mouvement, des pieds perclus sauter à l'instant, des oreilles bouchées s'ouvrir, et une langue, auparavant muette, parler soudain avec grand bruit. Car tel qu'un habile architecte qui rétablit une vieille maison délabrée, Jésus-Christ a réparé la nature humaine: les pièces qui étaient brisées, il les a remplacées; celles qui étaient désunies, il les a rejointes: il a relevé celles qui étaient absolument tombées.
1. Comme dans la guérison de l'aveugle-né, où Jésus-Christ ayant craché à terre et fait de la boue avec sa salive, il oignit de cette boue les yeux de l'aveugle et lui rendit la vue. (Jean, IX, 6.) Dans la résurrection de Lazare, et dans tous les autres miracles qu'il a opérés, etc. (Jean, XI.)
Et que dirons-nous du rétablissement de l'âme, opération encore bien plus admirable que la guérison des corps ? Certes, la santé du corps est quelque chose de grand et de considérable; mais celle de l'âme lui est supérieure et de toute la distance qui sépare l'âme du corps; comme aussi, pour cette autre raison, qu'il est de la nature du corps de se mouvoir, selon qu'il plaît au Créateur, et d'aller sans résistance partout où il veut qu'il aille, tandis que l'âme qui est libre, et qui a le pouvoir et la liberté d'agir, n'obéit pas en tout à Dieu, si elle ne le veut pas. Car Dieu ne veut pas la rendre belle et vertueuse malgré elle, par force et par contrainte, parce que ce ne serait point là une vertu; mais il veut la persuader librement et volontairement de devenir vertueuse et belle, ce qui est beaucoup plus difficile que l'autre guérison. Voilà pourtant ce qu'a fait Jésus-Christ.
Toutes sortes de méchancetés et de maux ont été détruits. De même que, par les soins qu'il a donnés aux corps, il les a non seulement guéris, mais encore rétablis dans une parfaite santé: ainsi, non seulement il a tiré les âmes de l'abîme de la méchanceté et de la corruption, mais il les a élevées au comble même de la vertu. D'un publicain il a fait un apôtre: d'un persécuteur, d'un blasphémateur impie, l'instituteur de l'univers; les mages ont été les docteurs des J.uifs; le larron est devenu citoyen du ciel; une prostituée a brillé par sa grande foi;de deux femmes, la Chananéenne et la samaritaine, celle-ci femme débauchée comme la précédente; l'une entreprend de convertir ses concitoyens et amène à Jésus-Christ tous les habitants de sa ville, comme pris dans un filet; l'autre, par sa foi et sa persévérance, chasse le malin esprit de l'âme de sa fille; d'autres, encore pires que ceux-là, passent tout à coup au nombre des disciples.
En un instant tout se réformait, les infirmités des corps, les maladies des âmes: tous recouvraient la santé et arrivaient à la plus haute vertu. Ce n'était pas seulement deux, ou trois, ou cinq, ou dix, ou vingt , ou cent personnes qui changeaient de vie et se convertissaient facilement, mais des villes et des provinces entières. Et qui pourrait parler dignement de la sagesse des préceptes, de la force et de la vertu des lois célestes, de l'excellence d'une morale tout angélique ? Car, tel est le genre de vie que Jésus-Christ a introduit ici-bas, telles sont les lois qu'il a établies, et la morale qu'il a fondée, que ceux qui les suivent et s'y conforment deviennent aussitôt des anges, et semblables à Dieu, autant que cela est possible à l'homme, quand bien même ils auraient été les plus méchants de tous les hommes.
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ET NOUS AVONS VU SA GLOIRE; SA GLOIRE, DIS-JE, COMME DU FILS UNIQUE DU PÈRE, ÉTANT PLEIN DE GRÂCE ET DE VÉRITÉ. (VERSET 14.)
1. Gloire comme du Fils unique du Père, ce que cela signifie.
2 et 3. Prodiges et miracles à l'avènement de Jésus-Christ. — Hérauts et prédicateurs. — Libre arbitre de l'homme. — La vertu est libre — Les miracles annonçaient Jésus-Christ, et manifestaient qu'il est le Fils unique de Dieu. — Miracles opérés invisiblement et visiblement à sa mort.
3. Voilà pourquoi l'évangéliste, rassemblant et se représentant tout à la fois tous les miracles que Jésus-Christ a opérés, soit dans les corps, soit dans les âmes, soit sur les éléments; et aussi les préceptes, ces dons mystérieux lui sont plus grands et plus sublimes que les cieux mêmes, les lois, la morale, la foi, l'espérance, les promesses des biens futurs, la Passion; voilà, dis-je, pourquoi l'évangéliste a fait tonner sa voix, et prononcé ces admirables paroles qui renferment une sublime doctrine : "Nous avons vu sa gloire; sa gloire", dis-je, "comme du Fils unique du Père, étant plein de grâce et de vérité".
Ce n'est pas seulement pour les miracles que nous l'admirons, mais nous l'admirons aussi dans sa Passion et dans ses souffrances: nous l'admirons attaché à une croix, flagellé, souffleté, couvert de crachats, et dans les coups que lui ont donné sur les joues ceux qu'il avait comblés de bienfaits. Il est juste en effet d'appliquer aussi les paroles de saint Jean à ces choses qui paraissent ignominieuses, puisque Jésus-Christ lui-même a appelé tout cela gloire. En effet, ces choses ne sont pas seulement des marques et des témoignages de sa providence et de son amour, mais encore de sa toute-puissance puisque c'est alors que la mort fut détruite, que la malédiction fut effacée (Gal. III, 13), que les démons furent confondus, qu'on triompha d'eux, et que la cédule de nos péchés fut attachée à la croix (Coll. II, 14).
De plus, comme ces miracles se faisaient invisiblement, il s'en fit quelques-uns visiblement, qui prouvaient que Jésus-Christ était le Fils unique de Dieu, et le Seigneur de toute la nature; son bienheureux corps étant encore attaché à la croix, le soleil retira sa lumière et s'obscurcit, la terre trembla et fut couverte de ténèbres, les sépulcres s'ouvrirent, les fondements de la terre furent ébranlés, une multitude innombrable de morts sortit du tombeau, ressuscita et vint dans la ville (Matth. XXVII, 51, Luc. XXIII, 44).
Ensuite cet autre mort, qui avait été cloué et crucifié, ressuscita, sans déranger les pierres de son sépulcre, sans en briser les sceaux; et ayant rempli les onze disciples d'un grand courage et d'une force invincible, il les envoya dans tout le monde pour être les médecins universels de la nature, pour réformer la vie des hommes, pour répandre partout la semence de la céleste doctrine, détruire la tyrannie des démons, et faire connaître aux hommes les vrais, les ineffables biens; pour nous prêcher l'immortalité de l'âme, la vie éternelle du corps, des récompenses qui surpassent notre intelligence, et qui n'auront point de fin.
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
Licencié ès-lettres, professeur de rhétorique au collège de l’Immaculée-Conception de Saint-Dizier, Bar-Le-Duc, L. Guérin & Ce, Éditeurs 1865, TOME HUITIÈME Pages 93 à 556.
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ET NOUS AVONS VU SA GLOIRE; SA GLOIRE, DIS-JE, COMME DU FILS UNIQUE DU PÈRE, ÉTANT PLEIN DE GRÂCE ET DE VÉRITÉ. (VERSET 14.)
1. Gloire comme du Fils unique du Père, ce que cela signifie.
2 et 3. Prodiges et miracles à l'avènement de Jésus-Christ. — Hérauts et prédicateurs. — Libre arbitre de l'homme. — La vertu est libre — Les miracles annonçaient Jésus-Christ, et manifestaient qu'il est le Fils unique de Dieu. — Miracles opérés invisiblement et visiblement à sa mort.
3. (suite) Le bienheureux évangéliste repassant donc dans son esprit toutes ces choses et plusieurs autres, que sûrement il connaissait bien, mais qu'il n'a pas voulu écrire parce que le monde n'aurait pu les contenir; car "si", dit-il, "on rapportait tout en détail, je ne crois pas que le monde entier pût contenir les livres qu'on en écrirait" (Jean, XXI, 25); considérant, dis-je, toutes ces choses, il s'est écrié: "Nous avons vu sa gloire; sa gloire", dis-je, "comme du Fils unique du Père, étant plein de grâce et de vérité". II faut donc que ceux qui ont le bonheur de voir tant de merveilles, d'entendre une si belle doctrine, de recevoir de si grands dons, mènent une vie qui soit digne des dogmes, pour mériter de jouir des biens futurs. En effet, Notre-Seigneur Jésus-Christ est venu pour nous faire voir non seulement sa gloire terrestre, mais encore sa gloire céleste. Voilà pourquoi il a dit: "Je désire que là où je suis, ceux que a vous m'avez donnés y soient aussi avec moi, afin qu'ils contemplent ma gloire". (Jean, XVII, 24.)
Que si la gloire qu'il a eue sur la terre a été si brillante et si lumineuse, que penserons-nous, que dirons-nous de celle qu'il a dans le ciel ? Car on ne la verra pas dans une terre sujette à la corruption; elle ne se montrera point à nous tandis que nous sommes dans des corps fragiles et périssables; mais lorsque nous serons devenus des créatures immortelles et impérissables; et elle se fera voir dans une si grande splendeur, qu'aucune parole ne peut l'exprimer. Heureux donc, et mille fois heureux ceux qui auront le bonheur d'être spectateurs de cette gloire, c'est d'elle que parle le prophète, quand il dit: "Que l'impie soit enlevé, pour ne pas voir la gloire du Seigneur". (Isaïe, XXVI, 10, Septante.)
Mais à Dieu ne plaise qu'aucun de vous soit enlevé de ce monde et privé de ce spectacle ! Si, en effet, nous ne devions jamais en jouir, nous pourrions bien dire, nous aussi : il vaudrait mieux pour nous que nous ne fussions jamais venus au monde (Matth. XXVI, 24). Car pourquoi vivons-nous, pourquoi respirons-nous ? Que sommes-nous, si nous sommes privés de la présence du Seigneur, si nous ne devons pas le voir ? Si ceux qui ne volent pas la lumière du soleil mènent une vie plus malheureuse que la mort, que croyez-vous que souffrent ceux qui sont privés d'une si grande lumière ? Ici tout le malheur ne consiste que dans cette unique privation, mais là il n'en est pas de même: et pourtant, quand il n'y aurait que ce mal seul, le second supplice ne serait pas égal à l'autre; il le surpasserait d'autant que le soleil de l'autre monde surpasse le nôtre. Mais il y a aussi un autre supplice à attendre; c'est que celui qui ne voit pas ce soleil ne sera pas seulement jeté dans les ténèbres, mais encore il sera brûlé éternellement, éternellement il gémira, grincera des dents, et souffrira une infinité d'autres tortures.
Ne méprisons donc point tellement notre salut, ne nous exposons point par la négligence et le relâchement d'un instant à être jetés dans le supplice éternel : veillons au contraire, soyons sobres, travaillons, faisons tous nos efforts pour acquérir ces biens et échapper à ce fleuve de feu, qui coule à grand bruit devant le terrible et redoutable tribunal. Celui qui y sera une fois tombé, y demeurera éternellement : personne ne pourra le retirer du supplice, ni son père, ni sa mère, ni son frère. Les prophètes nous le crient hautement; l'un dit: "Le frère ne rachète point son frère, l'homme étranger le rachètera-t-il (1)?" (Ps. XLVIII, 7.) Ezéchiel ajoute quelque chose de plus fort: "si Noé", dit-il, "et Job et Daniel sont en ce pays-là, ils n'en délivreront ni leurs fils, ni leurs filles". (Ezéch. XIV, 16.)
Là une seule chose peut nous aider et nous protéger, ce sont nos bonnes œuvres; celui qui en sera dénué ne pourra se délivrer par aucune autre voie. C'est pourquoi pensons continuellement à ces vérités, méditons-les, purifions notre vie et rendons-la brillante, afin que nous nous présentions au Seigneur avec confiance, et que nous obtenions les biens qui nous sont annoncés, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui et avec qui la gloire soit au Père et au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
1.Sur quoi saint Augustin dit: "Si Jésus-Christ, qui est votre figure, ne vous rachète point, l'homme pourra-t-il vous racheter ?"
Saint Jean Chrysostome — OEUVRES COMPLÈTES — TRADUITES POUR LA PREMIÈRE FOIS EN FRANÇAIS SOUS LA DIRECTION DE M. JEANNIN
Licencié ès-lettres, professeur de rhétorique au collège de l’Immaculée-Conception de Saint-Dizier, Bar-Le-Duc, L. Guérin & Ce, Éditeurs 1865, TOME HUITIÈME Pages 93 à 556.
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Gras ajoutés.
à suivre…
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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