Les Anges créés le premier jour.

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Message  Lucie Mar 28 Sep 2010, 3:08 pm

Dans le Catéchisme de persévérance de Mgr Gaume, l'Evêque est en désaccord avec st Augustin.

St Augustin, Cité de Dieu.
L’Ecriture nous dit bien que Dieu créa d’abord la lumière 2, et la sépara des ténèbres 3, qu’il appela la lumière jour, et les ténèbres nuit 4 mais quelle était cette lumière et par quel mouvement périodique se faisait le soir et le matin, voilà ce qui échappe à nos sens et ce que nous devons pourtant croire sans hésiter, malgré l’impossibilité de le comprendre. En effet, ou bien il s’agit d’une lumière corporelle, soit qu’elle réside loin de nos regards, dans les parties supérieures du monde, soit qu’elle ait servi plus tard à allumer le soleil; ou bien ce mot de lumière signifie la sainte Cité composée des anges et des esprits bienheureux dont l’Apôtre parle ainsi : « La Jérusalem d’en haut, notre mère éternelle dans les cieux 5 ». Il dit, en effet, ailleurs: « Vous êtes tous enfants de lumière et enfants du jour; nous ne sommes point les fils de la nuit ni des ténèbres 6».
[...]
CE QUE L’ON DOIT PENSER DE LA CRÉATION DES ANGES, D’APRÈS LES TÉMOIGNAGES DE L’ÉCRITURE SAINTE.

Puisque j’ai entrepris d’exposer la naissance de la sainte Cité en commençant par les saints anges, qui en sont la partie la plus considérable, élite glorieuse qui n’a jamais connu les épreuves du pèlerinage d’ici-bas, je vais avec l’aide de Dieu expliquer, autant qu’il me paraîtra convenable, les témoignages divins qui se rapportent à cet objet. Lorsque l’Ecriture parle de la création du monde, elle n’énonce pas positivement si les anges ont été créés, ni quand ils l’ont été; mais à moins qu’ils n’aient été passés sous silence, ils sont indiqués, soit par le ciel, quand il est dit « Dans le principe, Dieu créa le ciel et la terre »; soit par la lumière dont je viens de parler. Ce qui me persuade qu’ils n’ont pas été omis dans le divin livre, c’est qu’il est écrit d’une part que Dieu se reposa le septième jour de tous les ouvrages qu’il avait faits, et que, d’autre part, la Genèse commence ainsi : « Dans le principe, Dieu créa le ciel et la terre » , ce qui semble dire que Dieu n’avait rien fait auparavant. Puis donc qu’il a commencé par le ciel et la terre, et que la terre, ajoute l’Ecriture, était d’abord invisible et désordonnée, la lumière n’étant pas encore faite et les ténèbres couvrant la face de l’abîme, c’est-à-dire le mélange confus des éléments, puisque enfin toutes choses ont été successivement ordonnées par une opération qui a duré six jours, comment les anges auraient-ils été omis, eux qui font une partie si considérable de ces ouvrages dont Dieu se reposa le septième jour? Et cependant il faut convenir que, sans avoir été omis, ils ne sont pas marqués d’une manière claire dans ce passage; aussi l’Ecriture s’en explique-t-elle ailleurs en termes de la plus grande clarté. Dans le cantique des trois jeunes hommes dans la fournaise qui commence ainsi : «Ouvrages du Seigneur, bénissez tous le Seigneur 1», les anges sont nommés immédiatement après, dans le dénombrement de ces ouvrages. Et dans les Psaumes : « Louez le Seigneur dans les cieux; louez-le du haut des lieux sublimes. Louez-le, vous tous qui êtes ses anges; louez-le, vous qui êtes ses

1. Dan. III, 57 et58.

Vertus! Soleil et Lune, louez le Seigneur; étoiles et lumière, louez-le toutes ensemble. Cieux des cieux, louez le Seigneur, et que toutes les eaux qui sont au-dessus des cieux louent son saint nom; car il a dit, et toutes choses ont été faites : il a commandé, et elles ont été créées 1 ». Les anges sont donc évidemment un des ouvrages de Dieu. Le texte divin le déclare, quand après avoir énuméré toutes les choses célestes, il est dit de l’ensemble: Dieu a parlé, et tout a été fait. Osera-t-on prétendre maintenant que la création des anges est postérieure à l’oeuvre des six jours? Cette folle hypothèse est confondue par l’Ecriture, où Dieu dit: « Quand les astres ont été créés, tous mes anges m’ont béni à haute voix 2 ». Les anges étaient donc déjà, quand furent faits les astres. Les astres, il est vrai, n’ont été créés que le quatrième jour:

en conclurons-nous que les anges ont été créés le troisième ? nullement; car l’emploi de jour est connu : les eaux furent séparées la terre; ces deux éléments reçurent les espèces d’animaux qui leur conviennent, et la terre produisit tout ce qui lient à elle par des racines. Remonterons-nous au second jour? pas davantage; car en ce jour le firmament fut créé entre les eaux supérieures et inférieures; il reçut le nom de ciel, et ce fut dans son enceinte que les astres furent créés le quatrième jour. Si donc les anges doivent être comptés parmi les ouvrages des six jours, ils sont certainement cette lumière qui est appelée jour et dont l’Ecriture marque l’unité 3 en ne l’appelant pas le premier jour (dies primus), mais un jour (dies unus). Car le second jour, le troisième et les suivants ne sont pas d’autres jours, mais ce jour unique 4, qui a été ainsi répété pour accomplir le nombre six ou le nombre sept, dont l’un figure la connaissance des oeuvres de Dieu, et l’autre celle de son repos. En effet, quand Dieu a dit: Que la lumière soit et la lumière fut, s’il est

1.Ps. CXLVIII, 1-5. — 2. Job, XXXVIII, 7.

2. Voyez le texte de la Vulgate.

3. La plupart des théologiens grecs, d’accord sur ce point avec les philosophes platoniciens, pensent, dit Vivès, que les êtres spirituels ont été créés avant les êtres corporels et qu’ils ont même servi au créateur, comme ministres, à composer le reste de l’univers. Telle n’est point la doctrine des Pères latins; saint Jérôme est le seul peut-être qui fasse exception; tous le, autres, notamment saint Ambroise, Bède, Cassiodore, enseignent, comme saint Augustin, que tous les êtres ont été produits à la fois par le Créateur, sentiment qui parait autorisé avec une force singulière par ce mot de l’Ecclésiastique : « Celui qui vit dans l’éternité a créé à la fois toutes choses (XVIII, 31) ». Sain Basile s’est rangé, en cette occasion, du côté des Pères latins.

(229)

raisonnable d’entendre par là la création des anges, ils ont été certainement créés participants de la lumière éternelle, qui est la sagesse immuable de Dieu, par qui toutes choses ont été faites, et que nous appelons son Fils unique; et s’ils ont été éclairés de cette lumière qui les avait créés, ç’a été pour devenir eux-mêmes lumière et être appelés jour par la participation de cette lumière et de ce jour immuable qui est le Verbe de Dieu, par qui eux et toutes choses ont été créés. La vraie lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde 1 éclaire pareillement tout ange pur, afin qu’il soit lumière, non en soi, mais en Dieu; aussi tout ange qui s’éloigne de Dieu devient-il impur, comme sont tous ceux qu’on nomine esprits immondes, lorsqu’ils ne sont plus lumière dans le Seigneur, mais ténèbres en eux-mêmes, parce qu’ils sont privés de la participation de la lumière éternelle. En effet, le mal n’est point une substance, mais on a appelé mal la privation du bien 2.
[...]
CE QU’IL FAUT ENTENDRE PAR CES PAROLES DE L’ÉCRITURE : « DIEU SÉPARA LA LUMIÈRE DES TÉNÈBRES ».

L’obscurité même de l’Ecriture a cet avantage, que l’on peut d’un passage tirer divers sens, tous conformes à la vérité, tous confirmés par le témoignage de choses manifestes ou par d’autres passages très-clairs, de sorte que, dans le cours d’un long travail, si on ne parvient pas à découvrir le véritable sens du texte, on a du moins l’occasion de proclamer d’autres vérités. C’est pourquoi je crois pouvoir proposer d’entendre par la création de la première lumière la création des anges, et de voir la distinction des bons et des mauvais

1. Comp. Quintilien, Instit. , lib. IX, cap. I, § 81.

2. II Cor. VI, 4, 7, 9 et 10 .-

3. Eccli. XXXIII, I, 15

dans ces paroles : « Dieu sépara la lumière des ténèbres, et nomma la lumière jour et les ténèbres nuit 1 » En effet, celui-là seul a pu les séparer qui a pu prévoir leur chute et connaître qu’ils demeureraient obstinés dans leur présomptueux aveuglement. Quant au jour proprement dit et à la nuit, Dieu les sépara par ces deux grands astres qui frappent nos sens : « Que les astres, dit-il, soient faits dans le firmament du ciel pour luire sur la terre et séparer le jour de la nuit 2 ». Et un peu après : « Dieu fit deux grands astres, l’un plus grand pour présider au jour, et l’autre moindre pour présider à la nuit avec les étoiles; Dieu les mit dans le firmament du ciel pour luire sur la terre, et présider au jour et à la nuit, et séparer la lumière des ténèbres 3 ». Mais cette lumière, qui est la sainte société des anges, toute éclatante des splendeurs de la vérité intelligible, et ces ténèbres qui lui sont contraires, c’est-à-dire ces esprits corrompus, ces mauvais anges éloignés par leur faute de la lumière de la justice, je répète que celui-là seul pouvait opérer leur séparation, à qui le mal à venir (mal de la volonté, non de la nature) n’a pu être, avant de se produire, douteux ou caché.

EXPLICATION DE CE PASSAGE : « ET DIEU VIT QUE LA LUMIÈRE ÉTAIT BONNE ».

Il importe de remarquer aussi qu’après cette parole : « Que la lumière soit faite, et la

lumière fut faite 4 », l’Ecriture ajoute aussitôt : « Et Dieu vit que la lumière était bonne 5 ». Or, elle n’ajoute pas cela après que Dieu eût séparé la lumière des ténèbres et appelé la lumière jour et les ténèbres nuit. Pourquoi? c’est que Dieu aurait paru donner également son approbation à ces ténèbres et à cette lumière. Quant aux ténèbres matérielles, incapables par conséquent de faillir, qui, à l’aide des astres, sont séparées de cette lumière sensible qui éclaire nos yeux, l’Ecriture ne rapporte le témoignage de l’approbation de Dieu qu’après la séparation accomplie : « Et Dieu plaça ces astres dans le firmament du ciel pour luire sur la terre, présider au jour et à la nuit, et séparer la lumière des ténèbres. Et Dieu vit que cela était

1. Gen. I, 4 et 5 .- 2. Ibid. 14.- 3. Ibid. 16, 17 et 18.- 4. Gen. I, 3 .- Ibid. 4.

(235)

bon 1 ». L’un et l’autre lui plut, parce que l’un et l’autre est sans péché. Mais lorsque Dieu eut dit : « Que la lumière soit faite, et la « lumière fut faite : et Dieu vit que la lumière était bonne »; l’Ecriture ajoute aussitôt: « Et Dieu sépara la lumière des ténèbres, et appela la lumière jour et les ténèbres nuit». Elle n’ajoute pas : Et Dieu vit que cela était bon, de peur que l’un et l’autre ne fut nommé bon, tandis que l’un des deux était mauvais, non par nature, mais par son propre vice. C’est pourquoi, en cet endroit, la seule lumière plut au Créateur, et quant aux ténèbres, c’est-à-dire aux mauvais anges, tout en les faisant servir à l’ordre de ses desseins, il ne devait pas les approuver.

Ne fermons donc pas le présent livre sans achever ce que nous avions commencé d’expliquer touchant cette Cité de Dieu, qui n’est point sujette au pèlerinage de la vie mortelle, mais qui est toujours immortelle dans les cieux: parlons des saints anges demeurés pour jamais fidèles à Dieu et que Dieu sépara des anges prévaricateurs, devenus ténèbres pour s’être éloignés de la lumière éternelle.
[...]
DE LA SCIENCE DES ANGES QUI ONT CONNU LA TRINITÉ DANS L’ESSENCE MÊME DE DIEU ET LES CAUSES DES OEUVRES DIVINES DANS L’ART DU DIVIN OUVRIER.

Ces saints anges n’apprennent pas à connaître Dieu par des paroles sensibles, mais par la présence même de la parole immuable de la vérité, c’est-à-dire par le Verbe, Fils unique de Dieu, et ils connaissent le Verbe, et son Père, et leur Esprit, et cette Trinité inséparable où trois personnes distinctes ne font qu’une seule et même substance, de sorte qu’il n’y a pas trois dieux, mais un seul, ils connaissent cela plus clairement que nous ne nous connaissons nous-mêmes. C’est encore ainsi qu’ils connaissent les créatures, non en elles-mêmes, mais dans la sagesse de Dieu comme dans l’art qui les a produites; par conséquent, ils se connaissent mieux en Dieu qu’en eux-mêmes, quoiqu’ils se

1. Luc, XV, 18.

connaissent aussi en eux-mêmes. Mais comme ils ont été créés, ils sont autre chose que celui qui les a créés; ainsi ils se connaissent en lui comme dans la lumière du jour, et en eux-mêmes comme dans celle du soir, ainsi que nous l’avons dit ci-dessus 1. Or, il y a une grande différence entre connaître une chose dans la raison qui est la cause de son être, ou la connaître en elle-même; comme on connaît autrement les figures de mathématiques en les contemplant par l’esprit qu’en les voyant tracées sur le sable, ou comme la justice est autrement représentée dans la vérité immuable que dans l’âme du juste. Il en est ainsi de tous les objets de la connaissance: du firmament, que Dieu a étendu entre les eaux supérieures et les inférieures, et qu’il a nommé ciel, de la mer et de la terre, des herbes et des arbres, du soleil, de la lune et des étoiles, des animaux sortis des eaux, oiseaux, poissons et monstres marins, des animaux terrestres, tant quadrupèdes que reptiles, de l’homme même, qui surpasse en excellence toutes les créatures de la terre et de tout le reste. Toutes ces merveilles de la création sont autrement connues des anges dans le Verbe de Dieu, où elles ont leurs causes et leurs raisons éternellement subsistantes et selon lesquelles elles ont été faites qu’elles ne peuvent être connues en elles-mêmes 2. Ici, connaissance obscure qui n’atteint que les ouvrages de l’art; là, connaissance claire qui atteint l’art lui-même; et cependant ces ouvrages où s’arrête le regard de l’homme, quand on les rapporte à la louange et à la gloire du Créateur, il semble que, dans l’esprit qui les contemple, brille la lumière du matin.

DE CEUX QUI CROIENT QUE LA CRÉATION DES ANGES A PRÉCÉDÉ CELLE DU MONDE.

Quelqu’un prétendra-t-il que ces paroles de la Genèse : « Que la lumière soit faite, et la lumière fut faite », ne doivent point s’entendre de la création des anges, mais d’une lumière corporelle, quelle qu’elle soit; et que les anges ont été créés, non-seulement avant le firmament, mais aussi avant toute autre créature ? alléguera-t-il , à l’appui de cette opinion, que le premier verset de la Genèse ne signifie pas que le ciel et la terre furent les premières choses que Dieu créa, puisqu’il avait déjà créé les anges, mais que toutes choses furent créées dans sa sagesse, c’est-à-dire dans son Verbe, que l’Ecriture nomme ici Principe 1, nom qu’il prend lui-même dans l’Evangile 2, lorsqu’il répond aux Juifs qui lui demandaient qui il était 3. Je ne combattrai point cette interprétation, à cause de la vive satisfaction que j’éprouve à voir la Trinité marquée dès le commencement du saint livre de la Genèse. On y lit, en effet: « Dans le principe, Dieu créa le ciel et la terre », ce qui peut signifier que le Père a créé le monde dans son Fils, suivant ce témoignage du psaume : « Que vos oeuvres, Seigneur, sont magnifiques ! Vous avez fait toutes choses dans votre sagesse 4 ». Aussi bien l’Ecriture ne tarde pas à faire mention du Saint-Esprit. Après avoir décrit la terre, telle que Dieu l’a créée primitivement, c’est-à-dire cette masse ou matière que Dieu avait préparée sous le nom du ciel et de la terre pour la structure de l’univers, après avoir dit : « Or, la terre était invisible et informe, et les ténèbres étaient répandues sur l’abîme » ; elle ajoute aussitôt, comme pour compléter le nombre des personnes de la Trinité : « Et l’Esprit de Dieu

1. Dans le principe, dit la Genèse, Dieu créa le ciel et la terre.

2. Jean, VIII, 25.

3. Voici le passage de saint Jean : « Ils lui dirent : Qui êtes-vous donc? Jésus leur répondit : Je suis le principe ».

4. Ps. CIII, 25.

était porté sur les eaux». Chacun, au reste, est libre d’entendre comme il le voudra ces paroles si obscures et si profondes qu’on en peut faire sortir beaucoup d’opinions différentes toutes conformes à la foi, pourvu cependant qu’il soit bien entendu que les saints anges, sans être coéternels à Dieu, sont certains de leur véritable et éternelle félicité. C’est à la société bienheureuse de ces anges qu’appartiennent les petits enfants dont parle le Seigneur, quand il dit « Ils seront les égaux des anges du ciel 1 ». Il nous apprend encore de quelle félicité les anges jouissent au ciel, par ces paroles : « Prenez garde de ne mépriser aucun de ces petits ; car je vous déclare que leurs anges voient sans cesse la face de mon Père, qui est dans les cieux 2 ».

CHAPITRE XXXIII.
ON PEUT ENTENDRE PAR LA LUMIÈRE ET LES TÉNÈBRES LES DEUX SOCIÉTÉS CONTRAIRES DES BONS ET DES MAUVAIS ANGES.

Que certains anges aient péché et qu’ils aient été précipités dans la plus basse partie du monde, où ils sont comme en prison jusqu’à la condamnation suprême, c’est ce que l’apôtre saint Pierre montre clairement lorsqu’il dit que Dieu n’a point épargné les anges prévaricateurs, mais qu’il les a précipités dans les prisons obscures de l’enfer, en attendant qu’il les punisse au jour du jugement 3. Qui doutera dès lors que Dieu, soit dans sa prescience, soit dans le fait, n’ait séparé les mauvais anges d’avec les bons? et qui niera que ces derniers ne soient fort bien appelés lumière, alors que l’Apôtre nous donne ce nom, à nous qui ne vivons encore que par la foi et qui espérons, il est vrai, devenir les égaux des anges, mais ne le sommes pas encore? « Autrefois, dit-il, vous étiez ténèbres, mais maintenant vous êtes lumière en Notre-Seigneur 4 ». A l’égard des mauvais anges, quiconque sait qu’ils sont au-dessous des hommes infidèles, reconnaîtra que l’Ecriture les a pu nommer très-justement ténèbres. Ainsi, quand on devrait prendre lumière et ténèbres au sens littéral dans ces passages de la Genèse : « Dieu dit : Que la lumière soit faite, et la lumière fut faite ». — « Dieu sépara la lumière des ténèbres, on ne saurait toutefois

1. Matt. XIX, 14 .- 2. Ibid. XVIII, 10 .- 3. II Pierre, II, 4 .- 4. Ephés. V, 8.

nous blâmer de reconnaître ici les deux sociétés des anges : l’une qui jouit de Dieu, et l’autre qui est enflée d’orgueil ; l’une à qui l’on dit : « Vous tous qui êtes ses anges, adorez-le 1 » ; et l’autre qui ose dire par la bouche de son prince: « Je vous donnerai « tout cela, si vous voulez vous prosterner « devant moi et m’adorer 2 »; l’une embrasée du saint amour de Dieu, et l’autre consumée de l’amour impur de sa propre grandeur; l’une habitant dans les cieux des cieux, et l’autre précipitée de ce bienheureux séjour et reléguée dans les plus basses régions de l’air, suivant ce qui est écrit que « Dieu résiste aux superbes et donne sa grâce aux humbles 3 »; l’une tranquille et doucement animée d’une piété lumineuse, l’autre turbulente et agitée d’aveugles convoitises; l’une qui secourt avec bonté et punit avec justice, selon le bon plaisir de Dieu, et l’autre à qui son orgueil inspire une passion furieuse de nuire et de dominer; l’une ministre de la bonté de Dieu pour faire du bien autant qu’il lui plaît, et l’autre liée par la puissance de Dieu pour ne pas nuire autant qu’elle voudrait ; la première enfin se riant de la seconde. et de ses vains efforts pour entraver son glorieux progrès à travers les persécutions , et celle-ci consumée d’envie quand elle voit sa rivale recueillir partout des pèlerins. Et maintenant que, d’après d’autres passages de l’Ecriture qui nous représentent plus clairement ces deux sociétés contraires, l’une bonne par sa nature et par sa volonté, et l’autre mauvaise par sa volonté, quelque bonne par sa nature, nous avons cru les voir marquées dans ce premier chapitre de la Genèse sous les noms de lumière et de ténèbres, si nous supposons que telle n’ait pas été la pensée de l’écrivain sacré, il n’en résulte pas que nous ayons perdu le temps en paroles inutiles ; car enfin, bien que le texte reste obscur, la règle de la foi n’a pas été atteinte et elle est assez claire aux fidèles par d’autres endroits. Si en effet le livre de la Genèse ne fait mention que des ouvrages corporels de Dieu, ces ouvrages-mêmes ne laissent pas d’avoir quelque rapport avec les spirituels, suivant cette parole de saint Paul: « Vous êtes tous enfants de lumière et enfants du jour; nous ne sommes pas enfants de la nuit ni des ténèbres 4 ». Et si, au contraire,

1. Ps. XCVI, 8. – 2. Matt. IV, 9. – 3. – Jacob, IV, 6. – 4. I Thess. V, 5.

(245)

l’écrivain sacré a eu les pensées que nous lui supposons, alors le commentaire auquel nous nous sommes livré en tire une nouvelle force, et il faut conclure que cet homme de Dieu, tout pénétré d’une sagesse divine, ou plutôt que l’esprit de Dieu qui parlait en lui n’a pas oublié les anges dans l’énumération des ouvrages de Dieu, soit que par ces mots : « Dans le principe, Dieu créa le ciel et la terre », on entende que Dieu créa les anges dès le principe, c’est-à-dire dès le commencement, soit, ce qui me paraît plus raisonnable, qu’on entende qu’il les créa dans le Verbe de Dieu, son Fils unique, en qui il a créé toutes choses. De même, par le ciel et la terre, on peut entendre toutes les créatures, tant spirituelles que corporelles, explication la plus vraisemblable, ou ces deux grandes parties du monde corporel qui contiennent tout le reste des êtres, et que Moïse mentionne d’abord en général, pour en faire ensuite une description détaillée selon le nombre mystique des six jours.
Mgr Gaume, Catéchisme de persévérance, tome 1 :

Et le Seigneur dit; Que la lumière soit, et la lumière fut : et Dieu vit que la lumière était bonne, c'est-à-dire conforme en tout aux règles et aux desseins de sa divine sagesse. Il sépara la lumière d'avec les ténèbres et donna à la lumière le nom de jour et aux ténèbres le nom de nuit9.
1
La lumière est le premier ouvrage et le premier bienfait du Créateur, elle doit donc être le premier sujet de notre reconnaissance. Sans la lumière, toute la nature serait comme si elle n'était pas, et les beautés et les merveilles que la sagesse divine y a répandues seraient inutiles à l'homme, qui doit en être l'admirateur. Mais qu'est-ce que la lumière? Ici commence cette longue suite de mystères
qui confondent notre raison. Inexplicables quoique évidents, ces mystères de la nature nous apprennent à croire les mystères encore plus élevés de la Religion, bien que nous ne les comprenions pas. Tout ce que les plus savants philosophes ont dit de la lumière n'est que conjectural.
Les uns prétendent que la lumière est une substance fluide dont nous sommes environnés, et qui devient visible lorsqu'elle est ébranlée et mise en mouvement par le soleil ou par quelque autre corps enflammé. D'autres disent que la lumière n'est que le feu lui-même, qui, par l'émanation de ses parties infiniment subtiles, frappe doucement nos yeux à une certaine distance.
Si la lumière est incompréhensible dans sa nature, elle l'est encore dans ses effets et dans ses propriétés.
Le développement de la lumière n'est pas moins inconcevable. L'espace où elle se répand n'a point d'autres limites que celles de l'univers même, et l'immensité de l'univers est si prodigieuse, qu'elle excède la capacité de l'entendement humain. La preuve de ce développement inconcevable de la lumière est que les objets les plus éloignés, les corps célestes, par exemple, peuvent être discernés
à la simple vue ou à l'aide des télescopes; et, si nous avions des instruments d'optique qui étendissent notre vue aussi loin que la lumière se répand, nous verrions par cela même les corps placés à l'extrémité de l'univers. Mais pourquoi la lumière se propage-t-elle de tous côtés avec une vitesse si prodigieuse? C'est afin qu'un nombre infini d'objets puissent être aperçus en même temps par une infinité de personnes, et qu'à chaque instant l'homme puisse jouir de l'univers aussi loin que sa vue peut s'étendre. Pourquoi les particules de lumière sont-elles d'une subtilité presque infinie? C'est afin de pouvoir peindre les objets dans les yeux mêmes le plus petits, de ne pas éblouir par leur éclat et de ne pas nous nuire par leur chaleur. Pourquoi, enfin, les rayons sont-ils réfractés en
tant de manières? C'est afin que nous puissions mieux distinguer les objets qui s'offrent à nos yeux.

Il est donc vrai, dans la création de la lumière comme dans tous ses autres ouvrages, Dieu s'est propose l'utilité et les plaisirs de l'homme. Quelle reconnaissance ne vous devons-nous pas, ô Père de la lumière ! pour des arrangements si sages et si bienfaisants!
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Message  gabrielle Mer 29 Sep 2010, 10:41 am

Je vais lire ce texte...
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Message  Lucie Mer 29 Sep 2010, 11:35 am

P. 245 sur le PDF.
A mon avis, Mgr Gaume ne connaissait tout simplement pas les explications de St Augustin, mais c'est très bien ce qu'il dit sinon, juste que les connaissances scientifiques ne sont plus à jour. Sauf que la lumière, c'était les Anges plutôt. C'est une opinion libre, je crois. Mais c'est sur les Anges, alors pour le 29 septembre, c'est très approprié. Very Happy

St Augustin : Quelqu’un prétendra-t-il que ces paroles de la Genèse : « Que la lumière soit faite, et la lumière fut faite », ne doivent point s’entendre de la création des anges, mais d’une lumière corporelle, quelle qu’elle soit; et que les anges ont été créés, non-seulement avant le firmament, mais aussi avant toute autre créature ? alléguera-t-il , à l’appui de cette opinion, que le premier verset de la Genèse ne signifie pas que le ciel et la terre furent les premières choses que Dieu créa, puisqu’il avait déjà créé les anges, mais que toutes choses furent créées dans sa sagesse, c’est-à-dire dans son Verbe, que l’Ecriture nomme ici Principe 1, nom qu’il prend lui-même dans l’Evangile 2, lorsqu’il répond aux Juifs qui lui demandaient qui il était 3. Je ne combattrai point cette interprétation, à cause de la vive satisfaction que j’éprouve à voir la Trinité marquée dès le commencement du saint livre de la Genèse.


Mgr Gaume :
Il est une autre propriété de la lumière non moins admirable que les précédentes. Elle est en grande partie le principe fécondateur de la nature. La science la plus avancée se croit en état de prouver ce fait entrevu par un Père de l'Église, savoir : que toutes les créatures matérielles ne sont pas des transformations de la lumière unie à une base terrestre. S'il en est ainsi, voyez quelle analogie entre cette lumière créée qui féconde, qui éclaire et embellit le monde visible,et la lumière incréée qui embellit le monde invisible.

Le Verbe de Dieu, lumière éternelle, essentiellement féconde, a tout fait; et la lumière créée donne à toutes les parties du monde matériel leur être propre et les modifications qui les distinguent, en sorte qu'on peut dire de la lumière ce qu'on dit du Verbe divin : Lui, lui partout, toujours lui.
L'analogie entre la lumière créée et la lumière incréée n'est pas seulement dans leurs effets, elle est encore dans les lois qui les régissent.
C'est par le Verbe de Dieu que nous connaissons toute vérité dans l'ordre surnaturel ; c'est lui qui éclaire tout homme venant en ce monde. C'est par la lumière créée que nous connaissons toute chose dans l'ordre de la nature, c'est elle aussi qui éclaire les yeux de tout homme venant en ce monde. L'homme, qui devine et connaît tout dans la nature par la lumière, ne comprend pas la lumière. Il en est de même dans l'ordre surnaturel.
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Message  ROBERT. Mer 29 Sep 2010, 1:04 pm

.
Les anges, créés le premier jour ?

Voici ce que Saint Thomas dit : (Ia, qu.67, art. 1, fin de sa conclusion), où il est question de l’œuvre du premier jour:

.
— Ainsi donc, pris dans son acception première, le mot lumière est attribué métaphoriquement aux êtres spirituels, comme le soutient S. Ambroise. Mais, dans la langue usuelle, où il est étendu à toute manifestation, il est attribué en propre aux êtres spirituels [35]

Note explicative :

[35]Qu. 67, art. 1 concl. — S. Thomas explique très clairement, en prenant la comparaison du terme "vision" — lequel en son sens propre désigne l’acte du sens, d’où, par extension, il se trouve appliqué à tout genre de connaissance — pourquoi il se range ici à l’avis des "autres" docteurs; si l’on s’en rapporte originale du terme, "lumière" s’entend d’abord de la lumière corporelle, et pas métaphore seulement de la lumière spirituelle.

Toutefois on pourra concéder à l’opinion inverse que, "selon l’usage commun", qui élargit la signification de ce mot, "lumière" est dit aussi proprement des réalités spirituelles. Témoignage assez touchant de souci que prend notre Docteur de ne point se trouver en contradiction absolue avec l’autorité de S. Augustin.

.


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Message  Lucie Mer 29 Sep 2010, 2:55 pm

C'était donc cela. Very Happy C'est une opinion libre, en Somme.
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Message  gabrielle Mer 29 Sep 2010, 3:03 pm

Robert a écrit:Toutefois on pourra concéder à l’opinion inverse que, "selon l’usage commun", qui élargit la signification de ce mot, "lumière" est dit aussi proprement des réalités spirituelles. Témoignage assez touchant de souci que prend notre Docteur de ne point se trouver en contradiction absolue avec l’autorité de S. Augustin.

Ce passage montre la grandeur du Docteur Angélique, Saint Augustin étant le plus illustre des Pères de l'Église, Saint Thomas laisse la porte ouverte à l'explication de Saint Augustin, car comme le dit Lucie, cette question n'est pas tranchée et à mon sens ne le sera jamais. Mystère de Dieu

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Message  ROBERT. Mer 29 Sep 2010, 4:32 pm

gabrielle a écrit:
Toutefois on pourra concéder à l’opinion inverse que, "selon l’usage commun", qui élargit la signification de ce mot, "lumière" est dit aussi proprement des réalités spirituelles. Témoignage assez touchant de souci que prend notre Docteur de ne point se trouver en contradiction absolue avec l’autorité de S. Augustin.

Ce passage montre la grandeur du Docteur Angélique, Saint Augustin étant le plus illustre des Pères de l'Église, Saint Thomas laisse la porte ouverte à l'explication de Saint Augustin, car comme le dit Lucie, cette question n'est pas tranchée et à mon sens ne le sera jamais. Mystère de Dieu


...Tout comme Saint Jean qui arrive le premier au Tombeau de Notre-Seigneur,

attend l'arrivée de Saint Pierre et le laisse entrer le premier...
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Les Anges créés le premier jour. Empty Re: Les Anges créés le premier jour.

Message  ROBERT. Mer 29 Sep 2010, 6:06 pm

Lucie a écrit:C'était donc cela. Very Happy C'est une opinion libre, en Somme.

Very Happy et je rajouterais, comme un des deux Dupond(t): somme toute...
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