LES JUGEMENTS (2e partie)

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Message  Monique Mer 24 Fév 2010, 9:18 pm

Sainte Brigitte voyait au Jugement, l'âme d'un homme qui, sur la terre, avait été comblé de prospérités, et il était damné. Cette âme avait la forme d'un horrible animal ; elle ressemblait au démon qui l'accusait devant le Juge :

Le démon : « Donnez-moi, ô Juge, cette âme, puisque vous êtes juste. Vous l'aviez créée des ferveurs de votre Amour, et elle Vous était semblable ; mais, ayant méprisé votre Douceur et vos Préceptes, elle est devenue semblable à moi. »

Le Juge répondit : « Bien que Je sache toutes choses, néanmoins, dites pour ma fille (sainte Brigitte), quel droit y avez-vous ? »

Le démon : « Cet homme avait des yeux et n'a jamais voulu voir ce qui concernait le salut de son âme ; les choses spirituelles ne lui plurent jamais, il s'amusait aux choses temporelles. Tout ce qu'il faisait, qui avait quelque apparence que c'était pour l'Amour de Vous, c'était pour l'honneur du monde. Il avait des oreilles, mais ne voulait rien entendre de ce qui revenait à votre Gloire. Sa bouche était ouverte à toutes les suavités et cajoleries du monde, et close à la prière et à vos Louanges. Il ne Vous aima jamais ni ne prit goût à vos Avertissements ; il n'approcha jamais de Vous par Amour ni par bonnes oeuvres. Sa volonté fut toujours contraire à vos Commandements et sa cupidité était sans bornes. Donnez-moi cette âme qui m'est semblable. »

Alors, un des anges s'approcha et dit au Juge :
« Seigneur Dieu ! Après que cette âme fut unie au corps, je la suivis toujours et ne m'en séparai point tant que je trouvai en elle quelque bien. Cet homme fut uni au mariage à une femme qu'il aimait tendrement et garda la fidélité du mariage parce qu'il l'aimait et non pour votre Amour, ne considérant en rien l'Honneur de Dieu et l'accomplissement de ses Volontés. Il entendait des messes et assistait aux Offices, non par esprit de dévotion, mais afin qu'il ne fût pas séparé des chrétiens et noté par eux. Son coeur était en tout rebelle à Dieu et obéissant à la chair. Il se rendait néanmoins souvent à l'Eglise afin d'obtenir de Vous la santé corporelle et que Vous lui conservassiez les richesses et les honneurs du monde. O Seigneur ! Vous avez plus donné à cet homme qu'il ne Vous a servi sur terre. Vous lui avez donné la santé, des enfants remarquables ; Vous lui avez conservé les richesses et l'avez protégé des infortunes qu'il redoutait. Vous lui avez donné cent pour un, et tout ce qu'il a fait de bien a été récompensé en prospérités temporelles, comme il le voulait uniquement. Or, maintenant, je le laisse comme un sac vide de tout bien. »


RECUEIL DE SPIRITUALITÉ
A. Ponthaud
Éditions D.F.T.
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Message  Monique Mer 24 Fév 2010, 9:28 pm

« Donc, ô Juge, reprit le démon, adjugez-le moi. Je suis plein de malice et je n'ai pas été racheté, cet homme est comme un autre Vous avez dit que nul ne devait en rien tromper son prochain, et homme l'a fraudé et trompé. Vous avez dit que nul ne doit créature par-dessus son Créateur, or, cet homme a aime toutes hors Vous. Il a vendu l'Amour de Dieu pour son amour-propre.«

Le Juge : « Pourquoi vous réjouissez-vous tant de la perte d'une âme? »

Le démon : « A cause de l'envie enragée qui me déchire. Quand cette âme brûle, je brûle plus ardemment ; mais Vous l'avez rachetée par votre Sang et l'avez tellement aimée que Vous Vous êtes donné à elle. Quand je la puis arracher de Vous, je me réjouis. »

Le Juge, s'adressant à l'âme :
« Que dites-vous de vous-mêmes ? »

L'âme, avec de grandes larmes, répondit :
« Ma conscience profère mon jugement ; il faut que je suive aux peines ceux-là dont je suivis les suggestions sur terre. »

Et soudain sept démons s'approchèrent et le prince des démons ordonna :
« Vous, esprit de superbe, vous avez possédé cette âme dedans et dehors, entrez en elle et serrez-la si fortement que le cerveau, les yeux, les os, tout s'écoule et se fracasse.

« Vous, esprit de cupidité, entrez en elle avec un venin très-ardent, et comme un plomb fondu, brûlez-là misérablement. Qu'elle soit riche des confusions éternelles et des malheurs qui n'auront jamais de fin.

« Vous, esprit de rébellion et de mépris de la Religion, elle vous a plutôt obéi qu'à Dieu, entrez en elle, comme un glaive très-aigu qui perce le coeur sans en sortir jamais.

« Vous, esprit de gourmandise, brisez-la de vos dents, déchirez-la sans cesse et sans la consommer ; elle a consenti à toutes les intempérances.

« Vous, esprit de vaine gloire, entrez en elle et ne sortez jamais de sa bouche. Que toute la joie et l'honneur qu'elle cherchait au monde, soient changés en pleurs, misères et hontes éternelles. »
Les démons emportèrent leur proie et disparurent sauf le prince des démons.
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Message  Monique Jeu 25 Fév 2010, 8:29 pm

Sainte Brigitte entendait une fille criant à sa mère, qui vivait encore :
« Écoutez, ma mère : Malheur à moi ! Vous m'avez montré un visage doux mais vous avez été pour moi un bourreau. Vous m'avez cruellement percé le coeur en me donnant de mauvais conseils et de mauvais exemples.
« Le premier conseil a été de m'attacher à plaire, à aimer et à être aimée selon le monde, à vivre avec joie corporelle. Le deuxième a été de dépenser prodigalement les biens pour avoir le repos, les plaisirs et pour l'honneur du monde.

« Vous m'avez appris une façon et mode de m'habiller avec un décolletage savant, des gants façonnés à mes mains, des souliers mignons aux pieds et mille artifices de la vanité, toutes choses odieuses à Dieu. Ma superbe fut brillante, et l'ostentation, fille de la superbe, donna tant d'éclat à mes yeux que je fus aveuglée sur ma fin dernière que je ne considérais point.

« Vous m'avez appris à faire quelques bonnes oeuvres sans quitter le péché, et que je vivrais longtemps ; que l'heure de la mort n'approcherait point, que je pouvais pécher sans avoir une grande peine.

« Je me confessais, et par l'humilité de la confession, j'avançais d'un pas ; puis soudain, je retombais comme celui qui chemine sur la glace, car je voulais le péché, appuyant, selon votre conseil, mes espérances en mes oeuvres, sans que jamais j'aie considéré la Justice divine et que mes péchés étaient grands et mes bonnes oeuvres fort petites.

« Et la maladie et la mort prompte arrivèrent, et les démons me saisirent, me donnèrent de grandes peines et douleurs, et j'étais moquée avec une confusion insupportable.
« Malheur donc à moi, ô ma mère, car tout ce que j'ai appris de vous avec joie, je le pleure maintenant avec amertume ! »


Et, s'adressant à sainte Brigitte, l'infortunée ajouta :
« Vous qui ne pouvez me voir dans mon véritable état, entendez : Ma tête et ma face sont un tonnerre qui fulmine au-dedans ; mon col est dans une presse garnie de clous ; mes bras et mes pieds sont comme des serpents ; mes veines sont pleines d'un vent violent : elles se serrent dans le coeur et éclatent à cause de sa fureur. Et ce, à raison du vent d'orgueil qui me soulevait sur terre.
« Mes épaules, ma gorge, ma poitrine sont rongées, dévorées sans relâche, ce qui montre la vraie Justice divine, car elles offensèrent la pudeur, et mon coeur était lié aux choses passagères.

« Néanmoins, je suis en la voie de la Miséricorde, car la mort s'approchant, la considération de la Passion de Jésus-Christ me vint à l'esprit, et qu'elle était beaucoup plus douloureuse que la maladie dont je souffrais ; et je dis : O Seigneur ! Je crois que Vous êtes mon Dieu, ayez Miséricorde de moi, ô Fils de la Vierge, pour l'Amour de votre amère Passion. J'amenderai maintenant ma vie si j'en ai le temps.

« Et soudain, je fus illuminée d'une étincelle de Charité en mon coeur, de sorte que la Passion de Jésus me semblait plus amère que ma souffrance... Je mourus aussitôt et mon âme vint aux mains des démons pour être présentée au Jugement de Dieu, car il était indigne que les anges d'un grand éclat et d'une grande beauté portassent mon âme si difforme.

« Or, au Jugement de Dieu, les démons criant que mon âme fût condamnée à l'enfer, puisqu'elle avait vécu pour les biens temporels, ne voulant prendre garde à ce que mon Rédempteur avait fait pour moi, le Juge répondit :
« Je vois une étincelle de Charité en son coeur, et partant, je condamne l'âme à être purifiée dans les tourments jusqu'à ce que l'étant dignement, elle mérite de Me posséder. »

« Par cette grande Miséricorde, et bien que je regorge de douleurs et de maux, je suis au lieu de l'Espérance. »
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Message  Monique Ven 26 Fév 2010, 6:31 pm

Sainte Brigitte vit son ange gardien qui priait pour elle.

Le Seigneur dit à l'ange :
« Vous demandez Miséricorde pour celle que Je vous ai confiée. Dites-moi en sa présence ce que vous désirez pour elle, car il y a trois sortes de miséricordes :

« L'une épargne la peine au corps et à l'âme. C'est l'état de ceux qui croient en Moi et font quelques bonnes actions avec l'intention d'obtenir les biens temporels, considérant peu les Choses célestes, et les abandonnant avec joie afin d'obtenir les choses présentes. Je récompense le bien qu'ils font, et jusqu'à la dernière maille, d'une récompense mondaine et temporelle ; mais dans l'Éternité, ils ne sortiront jamais du supplice.

« Par la deuxième Miséricorde, le corps ou l'âme sont affligés. C'est l'état de ceux qui tombent dans le péché, mais se relèvent. Je permets qu'ils aient des tribulations au corps ou à l'âme afin qu'ils soient sauvés. Néanmoins, ils auront à acquitter dans le Purgatoire.

« La troisième Miséricorde, c'est quand le corps et l'âme sont punis. C'est l'état de ceux qui aimeraient mieux souffrir de grandes peines, avec mon Aide, que de provoquer ma Colère. A ceux-ci sont données les tribulations corporelles et spirituelles, comme à saint Pierre, saint Paul et à mes autres saints, afin qu'ils soient purifiés dans le temps. Quiconque entrera dans le Ciel doit être purifié par l'eau ou par feu... L'eau, c'est-à-dire par une épreuve journalière, par quelque médiocre labeur de pénitence sur terre... Le feu, en l'autre vie, dans le purgatoire... Donc, maintenant ô Ange, mon serviteur, que demandez-vous pour celle que Je vous ai confiée ? »

L'ange répondit : « Je demande pour elle la Miséricorde de la correction ; je demande les tribulations du corps et de l'âme, afin qu'elle purifie en cette vie par cette eau salutaire toutes ses fautes, et qu'aucun de ses péchés ne vienne en jugement. »
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Message  Monique Sam 27 Fév 2010, 6:35 pm

Sainte Brigitte vit un prince à qui les démons préparaient quatre chambres par lesquelles il fallait qu'il passât.

Dans la première, il fut accablé d'un poids écrasant et il s'écria en pleurant : « Malheur à moi, d'avoir plus aimé ce qui est beau que ce qui est utile, d'avoir eu la vertu en haine, les bons exemples et les prédications en aversion, car j'avais résolu en mon coeur de suivre mes volontés, ne me souciant ni de croire ni de connaître la Vérité ! Il est donc raisonnable que je sois abattu sous le talon du diable. »

Dans la deuxième chambre, un torrent de poix et de flammes roula sur lui, et il gémit horriblement :
« Malheur à moi ! Malheur éternellement ! J'ai aimé d'être aimé, loué, exalté, fuyant les opprobres, n'aimant que moi-même, considérant les péchés comme rien. Et maintenant, me voilà abreuvé du torrent des douleurs. »


Dans la troisième chambre, il sentit une puanteur insupportable ; des serpents envenimés l'enveloppèrent et ses hurlements redoublèrent :
« Malheur ! Malheur ! Malheur ! J'ai aimé les douceurs, les parfums, les vêtements somptueux, les festins délicats. Je repoussais l'abstinence que je comprends maintenant être très utile. Je vivais selon les désirs de mon corps, ne voulant accepter ni privation ni peine. Il est juste que j'endure ce supplice. »


Dans la quatrième chambre, il entendit un son terrible et une voix : « La récompense de votre orgueil est que vous tombiez d'un démon dans un autre jusqu'à ce que vous soyez plongé au plus profond abîme de l'enfer. Pour toutes vos pensées, vos paroles inutiles et nuisibles, pour vos mauvaises oeuvres, vous subirez éternellement la violence es supplices. »

Et l'âme cria lamentablement : « Oh ! Que digne est mon châtiment ! Que je suis misérablement déçue ! Je savais par ma conscience que l'homme doit rendre compte, mais je pensais que Dieu était grand en Miséricorde et que je ferais pénitence en ma vieillesse. Et les douleurs, avant la mort, m'ont tellement accablée que je perdis mémoire et volonté. Et maintenant, je vois que Celui qui promettait de se donner à moi sous les espèces du Pain eucharistique est le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs. Je refusais de croire que sous une espèce si petite, une Chose si grande, si sublime, put être cachée. Je vois que ce qu'il a promis aux justes est indicible et admirable. Malheur à moi ! Malheur ! Malheur que je sois né ! Malheur ! Malheur ! »

Et Notre-Seigneur dit à sainte Brigitte :
« Voilà, ô ma fille, comment sont frappés ceux qui Me méprisent et violent mes Commandements ; voilà quelles peines et quelles douleurs ils achètent par des bagatelles et des petits et passagers plaisirs. Mes paroles leur sont insupportables, et s'ils font quelque bien, ils n'ont d'autre affection ni intention, sinon que les biens temporels leur soient accrus ; ils ne demandent et ne désirent rien si chèrement. Je leur donne ce qu'ils demandent et les récompense en cette vie présente... Sachez, ma fille, que Je ne parle pas pour vous seule, mais pour tous les chrétiens : l'homme rendra raison de la moindre maille ; il rendra compte de tous les moments, de chaque denier, des pensées en détail et des paroles, s'il ne les amende point par contrition et pénitence. Véritablement, ma fille, J'en ferai exact jugement. »
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Message  Monique Lun 01 Mar 2010, 9:10 pm

Un jour qu'elle priait pour les morts, sainte Gertrude vit l'âme d'un gentilhomme décédé depuis quatorze ans.

Cette âme avait la forme d'une bête sauvage, qui avait autant de cornes que les autres bêtes ont ordinairement de crins. Cette bête était étendue sur une ouverture qui aboutissait à l'enfer, et qui en était comme le soupirail, en sorte qu'elle serait tombée dedans, sans un pieu mis en travers, sur lequel elle était couchée. En cet état, elle recevait les brûlantes vapeurs de l'enfer et participait ainsi aux peines de ce lieu d'horreur et de supplice ; elle souffrait des douleurs inexprimables, ne recevant nul soulagement des suffrages de l'Église.

La sainte apprit de Dieu que ce gentilhomme étant sur la terre, avait beaucoup péché par sa fierté et son orgueil, qui étaient excessifs.

Le pieu qui lui servait d'appui et l'empêchait seul de tomber dans le gouffre de l'enfer, représentait quelques mouvements de pénitence et de bonne volonté qu'il avait eus étant au monde, et qui, fortifiés de la Miséricorde divine, l'avaient garanti du malheur éternel.

Dieu ayant imprimé, par cette vue, dans le coeur de Gertrude, une forte compassion pour l'infortuné, elle s'adressa au Coeur divin par une ardente prière pour le soulagement de cette âme.

Aussitôt, l'horrible peau de bête se fendit, et l'âme en sortit, couverte encore de taches, mais faisant paraître beaucoup de joie, parce qu'elle était enfin en état d'avoir part aux Suffrages de l'Église.
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Message  Monique Mar 02 Mar 2010, 8:21 pm

Une âme était devant le Juge, tremblante, et ne sachant que devenir.

Son ange gardien parla en ces termes : « Il n'est point de droit qu'on reproche à l'âme les péchés qu'elle a confessés. »

Le démon : « Elle n'avait pas la contrition, elle n'a point fait pénitence. »
L'âme fondit en larmes avec une telle abondance qu'elle semblait s'y abîmer.


Le Juge : « Qu'elle déclare elle-même les péchés dont elle n'a pas fait pénitence. »

L'âme répondit, toute frémissante : « Malheur à moi ! Je n'ai point vécu selon les Commandements de Dieu. Assaillie par des tentations fâcheuses et importunes, je pensais : Bien que je sache que j'offense Dieu, j'accomplirai pourtant ma volonté pour cette fois, car je ne puis m'en retirer. »

Le Juge : « C'est pourquoi maintenant vous devez craindre les démons. »

L'âme : « Il n'y a rien en moi depuis le sommet de la tête jusqu'à la plante des pieds que je n'aie revêtu de vanité. Je soignais mes mains et ma face afin qu'on les louât comme belles. J'inventais des habits vains et indécents, et je persévérais en ces inventions, bien que la conscience me dictât que c'était contre Dieu. Je m'enorgueillissais comme un paon s'enorgueillit de ses plumes. Je me réjouissais de ce que d'autres imitaient mes immodestes innovations. Je me confessais, mais je n'avais pas la contrition que tels péchés exigeaient. Ma bouche était souvent ouverte aux cajoleries et bouffonneries, car je voulais constamment plaire aux autres. »

Le Juge : « C'est le droit du démon de vous rendre selon que vous le méritez, car vous vous êtes ornée et habillée selon qu'il vous le suggérait. Quiconque aura suivi vos vaines inventions sera puni de même et vos peines s'en augmenteront. »

Ces choses ayant été dites, le démon attacha un lacet au chef de l'âme, lui arracha la langue et les dents, puis serra si durement le lacet que le devant et le derrière de la tête se joignaient ensemble. Ses yeux tombèrent le long des joues suspendus par leurs racines ; le cerveau coulait par le nez et par les oreilles. La poitrine et les entrailles étaient si fortement serrées que les côtes étaient cassées, le coeur et toutes les parties intérieures écrasés.


Et le démon dit : « Ô Juge ! Les péchés de l'âme sont maintenant condamnés selon la Justice, unissez-nous ensemble moi et l'âme pour l'Eternité, car elle a plus aimé son corps que Dieu. »

L'ange intervint aussitôt : « Ô Juge ! Vous qui savez toutes choses, vous avez entendu la dernière et sincère pensée de cette âme : Je regrette amèrement d'avoir tant offensé Dieu. Ah ! S'il voulait me donner quelque temps pour vivre, je regretterais mes péchés, je ferais pénitence ; je ne voudrais jamais plus L'offenser et je Le servirais fidèlement tout le cours ma vie. »

Le Juge : « L'enfer n'est pas dû à de telles pensées à la fin de la vie. Par ma Passion, cette âme sera purifiée dans les tourments pour autant de temps qu'elle est obligée, mais plus tard, le Ciel lui sera ouvert. Les hommes pourront la secourir par les indulgences, les prières, les bonnes oeuvres. »
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Message  Monique Mer 03 Mar 2010, 9:48 pm

Un démon tenait et présentait au Jugement divin l'âme d'un soldat qui, sur la terre, avait été riche, noble et d'un grade élevé.

Le démon dit au Juge : « Votre ange et moi avons suivi cette âme depuis sa naissance jusqu'au jour de sa mort, lui pour la conserver, moi pour la ruiner. Tous deux la guettions comme des chasseurs ; elle est à la fin tombée entre mes mains. Je ne la possède pas encore, et je la désire avec autant d'ardeur qu'un animal si enragé de faim qu'il mange ses membres. Vous allez me l'abandonner, car vous êtes juste Juge ; j'ai un livre tout plein de ses péchés. »

Le Juge : « Quel est le nom de ce livre ? »

Le démon : « Son nom est : Désobéissance ; et en ce livre sont sept autres livres, et chacun a trois colonnes, et chaque colonne a plus de mille paroles. »

Le Juge : « Dites les noms de ces livres bien que Je sache toutes choses. »

Le démon : « Le nom du premier livre est la Superbe. Il se croyait meilleur et plus sage que les autres ; il s'enorgueillissait de son esprit, de ses oeuvres, de la beauté de ses membres et de sa noble race.

« Le deuxième livre est la Cupidité. Il désirait l'honneur du monde et d'exceller par-dessus tous les autres. Sa volonté ne tendait qu'à rendre recommandables son nom et sa race, non pour l'honneur de Dieu, mais pour l'honneur du monde.

« Le troisième livre est l'Envie. Il a nui au prochain ; il jalousait ceux qui excellaient sur lui, les conseillait mal, et s'appropriait, quand il pouvait, les biens des autres.


« Le quatrième livre est l'Avarice. Il s'affligeait quand il fallait donner un denier à Dieu, et il en eût donné cent pour l'honneur du monde. Il ne voulait jamais enseigner ce qu'il savait et il pensait ainsi : Quel profit m'en reviendra-t-il si je donne tel avis, quelle récompense en aurais-je ? Et ainsi celui qui venait vers lui, sollicitant un conseil, s'en retournait affligé, pouvant être consolé, instruit, et ne l'étant pas.

« Le cinquième livre est la Paresse aux bonnes oeuvres, pour accomplir vos Préceptes et pour votre Honneur ; car pour son plaisir et son repos, il perdait son temps. Quand vous lui inspiriez quelques pensées : la contrition ou la connaissance spirituelle, il en retirait promptement son esprit et le portait aux joies du monde qui lui plaisaient seules. Il était lâche à prier, lâche à parler pour l'utilité du prochain ou pour votre Honneur.

« Le sixième livre est la Colère par lequel il troublait son prochain, il s'emportait contre lui pour des causes futiles.

« Le septième livre est la Volupté. Il se nourrissait trop délicatement, demeurant très longtemps à table et il était impudique dans ses paroles et dans ses actes.
O Juge ! mon livre est remplis ; adjugez-moi donc cette âme ! »


Alors, la Mère de Miséricorde s'approcha.: « Mon Fils, dit-elle, cet homme, à la dernière heure de sa vie, s'est converti à moi et m'a dit : "Je suis indigne de prier votre Fils, mon Créateur, mais vous êtes ma Mère de Miséricorde et je vous supplie d'avoir compassion de moi. Et si je vis, je vous promets de m'amender, de n'aimer plus que votre Fils. Je suis attristé de n'avoir rien fait pour son Amour. Ô très-clémente Dame, ayez miséricorde de moi !..." Par telles pensées et paroles, cette âme vint à moi, et ne la devrais-je pas exaucer?»

Le démon : « Je n'ai rien su d'une telle volonté. »
« Tu es indigne que je te parle, dit l'auguste Marie. Regarde ton livre. » ,
Et dans le livre, les sept choses étaient effacées. Et le démon, furieux, s'écria : « Malheur ! Malheur ! Vous m'avez déçu. Je suis perdu, je suis vaincu. Mais au moins, ô Juge ! Combien de temps tiendrai-je cette âme, car elle ne peut arriver à vous sans être purifiée. »


Le Juge répondit : « Tu n'entreras point en elle et tu ne l'absorberas pas en toi ; mais tu dois la purifier de telle sorte qu'il n'y reste aucune tache. Elle doit voir ses péchés et ses abominations, elle doit te voir en malice, elle doit voir les peines terribles, les cris épouvantables et les moqueries des démons, d'autant qu'elle a voulu entendre les louanges les délectations du monde. Elle doit endurer les opprobres et les misères effroyables ; elle sera brûlée d'un feu très ardent, tant au-dehors qu'au-dedans, et cela jusqu'à la fin du monde, car cet homme désirait vivre jusqu'au jour du dernier Jugement à cause de l'amour qu'il avait en cette vie. Or, telle est ma Justice. Celui qui M'aime et Me désire, souhaitant d'être séparé du monde afin de venir à Moi, celui-là mérite d'avoir le Ciel sans peine, d'autant que l'exercice de sa vie sur la terre est sa purification. Mais celui-là qui par son attachement à la terre, voudrait vivre jusqu'à la fin du monde, celui-là doit souffrir la peine du Purgatoire jusqu'à la fin du monde. »
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Message  Monique Jeu 04 Mar 2010, 8:15 pm

Une dame, célèbre par sa beauté et ses élégances, suivait en tout ses fantaisies et abhorrait la confession... Atteinte d'une tumeur à la gorge, elle mourut sans se confesser. Au Jugement de Dieu, tous les démons l'accusaient, criant au Juge : « Voici cette femme qui a voulu se cacher de Vous, et être connue de nous! »

Le Juge : « La confession est une bonne lavandière. Puisqu'elle n'a pas voulu s'humilier devant un seul, qu'elle soit confondue devant tous et noircie de vos immondices. Elle méprisait l'étendard de ma Croix en disant : A quoi cela me sert-il ? Qu 'Il satisfasse ici mes appétits et mes désirs et garde son Royaume et son Ciel. J'aime mieux les perdre que de quitter mes volontés.

« Pour le petit bien qu'elle a fait, elle en a reçu au monde sa récompense, car elle ne méritait pas d'être affligée sur terre, mais ses tourments seront éternels ; d'autant qu'elle aurait désiré vivre éternellement pour pécher éternellement, ce que, Moi qui vois le coeur, Je répute comme mis à effet. Certes, il n'aurait pas tenu à elle, si Je l'eusse permis. Dites à ma fille assistante (sainte Brigitte) quel supplice a mérité cette âme qui a plus aimé la créature que le Créateur, recherchant les plaisirs et se souciant plus du monde que de Dieu.

« Pour la superbe qu'elle a eue en tous ses membres, sa tête, ses bras, ses mains, ses pieds sont allumés d'un feu horrible. Les serpents l'environnent, la rongent, la déchirent sans cesse avec désolation continuelle. Ses entrailles sont misérablement tourmentées, avec une grande force, on s'efforçait d'y planter un pal. Ses pieds avec lesquels elle se portait aux délices, sont comme des rasoirs aigus qui la taillent incessamment. »
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Message  Monique Ven 05 Mar 2010, 7:03 pm

A la droite d'un roi, jeune encore et puissant, était un ange ; à sa gauche, un démon.

L'ange : « O mon ami ! Dieu vous a donné la vie, l'intelligence, la santé, l'honneur pour Le servir sur terre afin de Le voir et de L'aimer dans une Joie éternelle. Approchez-vous de Lui qui est le Feu divin, et vous deviendrez plus ardent aux bonnes oeuvres. »

Le démon : « Mon frère, je vous conseille bien : Dieu est miséricordieux, patient et n'a besoin de personne. Faites tout ce qu'il vous plaira de faire, et ce qui ne vous plaît pas, ne le faites pas. Donnez de vos biens ce dont commodément vous pouvez vous passer, mais gardez pour vous ce qui vous est agréable. »

Le roi : « C'est un bon conseil. Je pourrai, au fait, donner quelque chose du mien, duquel je n'ai pas besoin et que Dieu néanmoins, répute grande chose. Je suis assez suffisant et sage et je puis aller où mon plaisir m'attire. »

L'ange : « O mon ami ! Pensez que vous êtes mortel et que vous mourrez bientôt. Dieu est patient, mais Il est juste ; Il examine toutes vos pensées, vos oeuvres depuis le commencement jusqu'à la fin. Servez-vous raisonnablement du temps et de vos forces ; le libre-arbitre vous est donné pour désirer les choses célestes et mépriser celles de la terre. »

Le démon : « O mon frère ! Si vous deviez rendre raison à Dieu de tous vos moments, quand est-ce que vous pourriez vous réjouir ? Écoutez mon conseil : Dieu est facilement apaisé, car Il ne vous eût pas racheté s'il eût voulu vous perdre. Les péchés sont remis par la contrition ; disposez donc de dix-neuf heures de votre temps à vos plaisirs, il vous suffira d'employer une heure à la contrition de vos péchés. Faites sans crainte, avant et après la confession, tout ce qu'il vous plaît. »

Le roi : « Le conseil semble raisonnable, car faisant de la sorte, je puis disposer de tout mon temps selon mon contentement et ma joie.»

L'ange : « O mon ami ! Pensez avec quelle Patience Dieu souffre que vous viviez, L'oubliant et Le négligeant ! Corrigez vos actions avant de sortir du monde, rejetez les légèretés. Considérez avec quelle amertume Jésus-Christ vous a racheté de la mort éternelle ; obtenez Miséricorde avant que sa Justice prononce et fasse exécuter ses Arrêts »

Le démon : « Si Dieu permet que vous viviez longuement, vous avez aussi diverses tribulations. S'il vous a racheté, qui L'a contraint à cela ? »

Le roi : « Je suis plus attristé de ce qu'il me faille mourir un jour que de souffrir quelque tribulation. J'aimerais mieux avoir la félicité mondaine que d'avoir été racheté par le Sang de Jésus-Christ. Je ne me soucierais point du Ciel, si je pouvais jouir toujours du monde selon mes souhaits. »

Et ce roi résolut de croupir en ses péchés tout le temps de sa vie, comptant sur une heure de repentir à la mort. Comme il avait fait quelque bien, il en reçut la récompense qu'il désirait sur terre. Il vécut longtemps, prospéra, il eut des honneurs et la femme qu'il désirait pour épouse. Selon le jugement du monde, il fit une belle et désirable fin.

A sa mort, le démon s'empara de son âme, criant à l'ange : « Il a eu vos conseils en abomination, il n'obéissait qu'à moi qui lui suggérais de s'aimer soi-même au-dessus de tout, ne se souciant point de la perte des autres, pourvu qu'il eût l'honneur du monde. Je possède cette âme !... »

« Et je vis, dit sainte Brigitte continuant le récit de cette vision, je vis le roi devenu horrible comme un animal écorché ; ses yeux étaient arrachés, sa chair toute hachée ; et sa voix s'élevait lugubrement :
« Malheur à moi, qui me suis aveuglé ! Malheur à moi, qui perds a jamais Dieu ! J'étais obligé de Le doublement servir. Ma couronne mettait en mon pouvoir tant d'occasions de bien faire ; mais j'étais orgueilleux de la puissance terrestre et ne considérais en rien Puissance céleste. A raison de ma superbe, je dois être lié aux pieds de Satan. Malheur ! Malheur ! De toutes mes richesses, de tous mes honneurs, mes plaisirs, il ne me reste que la damnation. »


Le démon dit alors avec une atroce ironie : Viens avec moi, frère, ce n'est plus temps de parler mais d'exécuter. Viens avec moi, non avec Charité, mais avec haine. J'étais le plus beau des anges, et je suis tombé. Toi, tu as été créé après ma chute, et, par un privilège spécial, toi et tous les hommes avez été rachetés par le Sang du Fils de Dieu... Non pas par moi... Tu as méprisé ce Sang et n'as pas voulu honorer ton Créateur. Tu t'es aimé plus que Lui ; et moi aussi, je me suis plus aimé que Dieu... Nous serons conjoints ensemble et je te percerai de la fureur de ma malice. Je serrerai ton cerveau avec tant de violence que toute la moelle s'écoulera. Mes bras te déchireront comme des serpents ; tu seras lié avec moi si étroitement que quand je soufflerai, je verserai mon venin en toi, et j'attirerai en moi toutes tes entrailles. Tu brûleras toujours, tu ne seras jamais consumé, mais renouvelé dans les feux. »
Et tout soudain, ils furent ainsi conjoints, et descendirent horriblement unis ensemble dans l'infernal abîme.


FIN
Monique
Monique

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