LA PRATIQUE DE LA PÉNITENCE.

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Message  Roger Boivin Dim 21 Fév 2010, 4:55 pm

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( LE MESSAGER CANADIEN DU SACRÉ-COEUR, 1902 )



LA PRATIQUE DE LA PÉNITENCE.



JÉSUS-CHRIST a arboré la Croix pour étendard. Ceux qui la fuient ne sont pas ses vrais disciples. Ils sont du monde qu'Il a si sévèrement condamné. Le monde offre aux siens la coupe des plaisirs et des voluptés ; il invite tous les hommes à venir s'y abreuver jusqu'à l'ivresse, et il a pour complice notre propre chair, tandis que la grâce nous presse de nous rallier autour de la Croix malgré les répugnances de la nature, et de mourir généreusement à nos sens.

Dans ce combat de la chair et de l'esprit, combien de chrétiens, aujourd'hui, font honneur à leur divin Chef ? Combien en est-il qui songent à faire pénitence ? N'est-on pas plutôt préoccupé, même aux foyers les plus chrétiens, de jouir de tout le confort de la vie moderne et de s'amuser ? Le Seigneur voit partout des pécheurs ; mais des pénitents, fort peu. Il est vrai qu'un très grand nombre vont confesser leurs péchés au prêtre ; mais la plupart croient avoir suffisamment fait lorsqu'ils ont observé l'abstinence du vendredi et récité les quelques prières que le confesseur leur a prescrites. Est-ce là faire pénitence ? quelques-uns même croient que l'Église est encore trop exigeante sur ce point et appellent de tous leurs voeux de nouveaux adoucissements à la loi du Carême, qui pourtant est déjà considérablement allégée. Est-ce là l'esprit de pénitence ?

Nous avons pour Chef un « homme de douleur ». Les serviteurs ne sont pas plus grands que leur maître. JÉSUS-CHRIST a voulu se faire le roi des pénitents. Il l'est non seulement par les mérites infinis de son expiation, mais encore par l'intensité et la perpétuité de sa pénitence en sa vie mortelle, ainsi que par l'immensité des douleurs qu'il a endurées. Et Il l'a voulu uniquement pour nous animer par son exemple, car Il n'avait point péché. Mais qui de nous peut dire qu'il n'a pas péché ? Tous nous avons des péchés à expier. La pénitence nous est donc nécessaire à tous. Par pénitence, nous entendons ici la mortification du corps ou des sens. C'est ce que l'on appelle aussi la pénitence extérieure, pour la distinguer de la contrition du coeur qui est la pénitence intérieure.

La première - dont nous parlons - est le fruit de celle-ci. Une âme qui pleure sincèrement ses péchés conçoit toujours un grand désir de les expier, avec une sainte haine d'elle-même. En d'autres termes, la douleur intense du coeur pousse le fidèle à exercer sur son corps les rigueurs de la pénitence. Et plus sa contrition est vive, plus il est sévère à lui-même. C'est ce que nous voyons assez dans la vie des saints, par exemple d'un saint Louis de Gonzague qui, tout jeune encore, se flagellait jusqu'au sang pour expier une faute très légère.

Combien grossière est l'illusion de tant de chrétiens qui se contentent de faire suivre l'aveu de leurs fautes, d'un acte de repentir, et de la pénitence facile que le confesseur, par égard pour leur faiblesse, leur a imposée !

Sommes-nous donc à ce point ignorants de la gravité du péché, si léger qu'il soit, pour ne pas savoir les terribles châtiments qu'il mérite à ceux qui le commettent ? ou bien serait-ce que notre contrition manque des qualités requises ? Le pécheur vraiment contrit, le chrétien éclairé ne se contente pas de la pénitence sacramentelle. Il comprend qu'il lui reste beaucoup à faire. Et s'il ne peut pas embrasser les austérités effrayantes des saints, du moins il mesure courageusement à ses faibles épaules quelques moyens d'expiation. Il reçoit en esprit de pénitence les occasions de souffrir ; il s'impose volontairement quelques châtiments, afin de rendre à Dieu le juste tribut de satisfaction qu'il attend de lui.

Dieu attend de nous que nous châtiions nos sens en quelque manière, parce que nos sens ont participé à notre péché. Si le coeur est la source du péché, il n'a pas été le seul à le commettre, et par conséquent il ne doit pas être seul à expier.

Autrefois l'Église punissait les fidèles par des peines canoniques et proportionnées à chaque espèce de péché. Et ces peines, on le sait, étaient sévères. Si, dans la suite des temps, les peines ont été modérées ; si la loi du jeûne elle-même, commune à tous, a été très mitigée, n'oublions pas que la raison de cette condescendance de l'Église a été la lâcheté et la faiblesse des fidèles. C'est uniquement pour éviter un plus grand mal qu'elle a jugé à propos de changer sa règle et de nous abandonner à la justice de Dieu. N'oublions pas que l'Église n'a nullement touché par là à l'obligation essentielle de satisfaire à Dieu qui n'est pas de son ressort. Nous aurions donc grandement tort de nous autoriser de cette condescendance de l'Église pour nous ménager. Le droit de Dieu subsiste toujours le même. Plus nous serons tendres à nous-mêmes, moins Dieu nous ménagera. Plus nous nous flatterons, moins Dieu nous pardonnera. Le péché doit être puni en cette vie ou en l'autre « Aut a Deo vindicante, aut ab homine poenitente, ou par la vengeance de Dieu, ou par la pénitence de l'homme » ( Tert. )


***

Le bon soldat de JÉSUS-CHRIST chérit la pénitence, parce qu'il y trouve un excellent moyen de préservation contre le péché. Comment mener sans elle une vie véritablement chrétienne ? « Ceux qui sont à JÉSUS-CHRIST, dit l'Apôtre, ce sont ceux qui ont crucifié leur chair avec leurs vices et leurs passions. » Qui sunt Christi carnem suam crucifixerunt cum vitiis et concupiscentiis. Pour appartenir à JÉSUS-CHRIST, pour lui demeurer fidèles, il faut donc faire la guerre à sa chair. Saint Paul conformait sa vie à cette doctrine : « Je réduis mon corps en servitude, disait-il, de peur qu'après avoir prêché l'Évangile aux autres, je ne devienne moi-même un réprouvé. » ( I Cor, 9. 27 ).


On ne conçoit guère, en effet, une vie molle qui ne soit criminelle. On ne flatte pas ses sens impunément. Éviter en tout la gêne, la contrainte et la fatigue, faire de ses jours un cercle continuel de jeux et de divertissements, de repas et de spectacle, ne se rien refuser enfin des douceurs et des délicatesses que peuvent fournir aujourd'hui le luxe et le confort, voilà une existence bien propre à développer les instincts pervers et à affaiblir la volonté pour le bien. Comment un chrétien qui vit de la sorte aura-t-il la force de résister aux attaques des passions mauvaises ? Que fera-t-il en face de la tentation ?

Pour cette raison, les Apôtres, après JÉSUS-CHRIST, nous exhortent à porter en nos corps la mortification du divin Maître, à veiller, et à prier afin que l'esprit tentateur ne triomphe pas de notre faiblesse. Pour cette raison, tous les saints, tous les vrais serviteurs de Dieu ont habituellement pratiqué la pénitence. Ils comprenaient les dangers d'une vie molle et sensuelle pour l'innocence des moeurs, ils savaient que rien n'est plus capable d'exciter et de nourrir les passions les plus grossières, d'allumer et d'entretenir le feu d'une cupidité déjà trop vive par elle-même. Récemment Monseigneur Brachési, archevêque de Montréal, en signalait bien à propos les dangers pour notre pays et les suites funestes.

« Le mal est déjà commencé, disait sa Grandeur. Ne cherchez pas en dehors de cette répugnance pour tout ce qui gêne et mortifie, ne cherchez pas en dehors de ces habitudes qui se généralisent d'une vie molle, intempérante et dissipée, l'explication des tristes événements qui, à des intervalles si rapprochés, sont venus jeter la consternation dans nos villes et jusqu'au sein de nos paisibles campagnes. Infailliblement, une ambition effrénée, les dépenses inconsidérées du luxe, un amour immodéré de ses aises et de ses plaisirs ont été trouvés à la base de ces retentissants désastres financiers, de ces pénibles déchéances, de ces pertes de réputations, de ces dissensions domestiques, de ces désespoirs, de ces meurtres et de ces suicides, sur lesquels nous avons tous gémi dans l'amère douleur de nos âmes. »( 1 )


( 1 ) Mandement sur l'affaiblissement de l'esprit chrétien et le goût des plaisirs du monde.
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Message  Roger Boivin Dim 21 Fév 2010, 5:57 pm

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Satisfaire à la justice de Dieu pour ses péchés personnels, se préserver soi-même du péché, voilà deux motifs puissants de pratiquer la pénitence aux yeux de tout chrétien sincère. Mais pour une âme zélée pour le salut du prochain, il en est bien un autre, c'est, à l'exemple du divin Sauveur, expier les péchés de ses frères.

On rapporte dans la vie du saint Curé d'Ars qu'il ne pouvait penser au triste sort des pécheurs sans verser des larmes amères. Il exhortait souvent son auditoire à prier pour eux : « Rien n'afflige tant le Coeur de Notre-Seigneur, disait-il, que de voir ses souffrances perdues pour un si grand nombre... Prions donc pour la conversion des pécheurs, c'est la plus belle et la plus utile des prières. » Mais à la prière il voulait qu'on joignît la pénitence, comme il faisait lui-même. Un jour, un curé se plaignait à lui de n'avoir pu changer le coeur de ses paroissiens. Le saint homme lui répondit : « Vous avez prié, vous avez pleuré, vous avez gémi, vous avez soupiré. Mais avez-vous jeûné, avez-vous veillé, avez-vous couché sur la dure, vous êtes-vous donné la discipline ? tant que vous n'en serez pas venu là, ne croyez pas avoir tout fait.. »


***


Si tous sont appelés à la pénitence, tous cependant ne sont pas tenus rigoureusement au même mode de faire pénitence. Ces modes - il n'y a qu'à ouvrir la vie des saints pour s'en convaincre - varient à l'infini. La charité est ingénieuse et n'est jamais à bout d'industries. Elle n'est jamais embarrassée pour pratiquer la pénitence, tandis que l'âme lâche a toujours mille prétextes pour s,en dispenser.

Voici par exemple le temps du carême. Donnons l'exemple d'une obéissance filiale aux prescriptions de l'Église : gardons le jeûne et l'abstinence, au lieu de nous y soustraire sans une raison vraiment sérieuse, par délicatesse ou par lâcheté.

Vous ne pouvez pas jeûner. Mais ne pourriez-vous pas accepter en esprit de pénitence les souffrances physiques ou morales, les épreuves diverses que Dieu vous envoie pour vous faire expier vos fautes personnelles, pour vous détacher du monde et vous rapprocher de lui ? Est-ce que cette maladie, cet insuccès, ce revers de fortune, cette injustice ne vous fournissent pas ample matière d'expier pour vous et pour les autres ? Vos devoirs d'état accomplis avec exactitude, patience et charité constante en dépit des ennuis, des difficultés et des fatigues inhérentes, n'est-ce pas une autre source abondante de satisfaction ? Est-ce que vous ne pouvez pas vous priver de tel ou tel divertissement, retrancher de votre luxe, des délicatesses de votre table, de ce confort peut-être exagéré ? et puis, est-ce qu'il n'y a qu'une seule manière de jeûner ? Citons ici saint Jean Chrysostôme :

« Tout doit jeûner en nous : oui, tous nos sens doivent avoir leur jeûne particulier. Ces yeux qui tant de fois ont porté des regards lascifs, il faut donc qu'ils jeûnent en se fermant à tout ce qui peut les séduire et surprendre les coeurs ; ces oreilles, qui si souvent se sont prêtées à la maligne satire, à la lâche médisance, à la noire calomnie, il faut qu'elles jeûnent ces oreilles en se rendant sourdes à tout ce qui les a fait pécher, en n'écoutant plus ces chansons lascives, ces protestations criminelles d'un éternel amour ; ces pieds, qui vous ont conduit dans les occasions de péché, il faut qu'ils jeûnent en s'abstenant de courir avec fureur aux spectacles, aux assemblées profanes ; ces mains qui jusqu'à présent ont enlevé injustement le bien d'autrui, il faut qu'elles jeûnent en réparant vos injustices anciennes, en distribuant aux pauvres le superflu de vos biens : et pourquoi cela ? Parce que le jeûne doit s'étendre sur tout ce qui est rebelle dans l'homme. Le jeûne est comme un espèce d'holocauste où rien d'impur ou de souillé ne doit être épargné. » ( Hom. III. ad pop. Ant. )

Souvenons-nous que nous sommes pécheurs : et par la vue fréquente de la multitude de nos iniquités et de leur gravité, , animons-nous à une pénitence généreuse. souvenons-nous que nous sommes les disciples d'un Dieu fait homme qui a vécu pauvre et est mort sur la croix. Jetons souvent les yeux sur l'image de son Coeur sacré surmonté d'une croix et enserré d'épines pour nous rappeler les immenses douleurs que son amour a endurées pour nous. Si nous méditons souvent les mystères de l'amour souffrant du divin Sauveur, nous y trouverons comme une manne cachée, la force de souffrir et la douceur de la pénitence.




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