méditations interregnvm (traduction)

MÉDITATION SUR TROIS SORTES DE CHOSES
DE CHOSES QUE NOUS DEVONS PRÉVOIR

I. La prudence, qui est comme l'œil de notre âme, doit nous faire prévoir trois choses. Les adversités, d'abord, parce qu'elles sont moins abominables quand on les a prévues. Il faut se préparer à recevoir des mains de Dieu ce qu'il peut y avoir de plus désagréable dans l'état où l'on s'est engagé. Si l'adversité que nous attendons nous arrive, nous serons prêts à la recevoir sans trouble, sans émotion et avec mérite ; si le malheur nous épargne, Dieu tiendra compte de notre bonne volonté.

II. Nous tombons souvent dans le péché, parce que nous ne prévoyons pas les occasions où nous serons susceptibles d'offenser Dieu. Au commencement de la journée et de vos principales actions, pensez aux dangers dans lesquels vous risquez de vous perdre, et mettez-vous en garde contre ces dangers, par la pensée de la présence de Dieu, et du compte que vous devez rendre à votre Juge de l'action dont il s'agit.

III. Enfin, prévoyez le bien que vous pouvez faire dans chaque action, comme un marchand prévoit toutes les occasions de s'enrichir. Combien de fois par jour pourriez-vous renoncer à votre volonté, vous priver de quelque plaisir, exercer la charité envers votre prochain, élever votre coeur vers Dieu, lui offrir vos actions ! C'est à cela qu'il faut exercer sa prudence, au lieu de songer à amasser des biens qu'il faudra abandonner à la mort. Nous nous négligeons nous-mêmes et nous mettons tout notre soin dans ce qui ne peut pas nous suivre dans l'autre vie (Saint Jean Chrysostome).

LE SAINT ENFANT DE LA GARDE

Le Santo Niño de la Guardia était un petit garçon innocent de trois ou quatre ans, nommé Cristóbal, fils d'Alonso de Pasamontes ou Alonso Martín de Quintanar et de Juana la Guindera, qui, selon certains, était aveugle.

Entre février et mars 1489, plusieurs juifs l'enlèvent par ruse et le cachent dans la Hoz de La Guardia, une prairie proche de la rive de l'Algodor. Les ravisseurs, à l'approche de la semaine où les chrétiens commémoraient la crucifixion de Jésus, pensent que c'était une bonne occasion de répéter la Passion du Christ dans cette créature sans défense. En effet, les bourreaux se rendent dans l'une des grottes qui s'ouvrent sur le terrain accidenté de la commune de La Guardia, à carreocaña ou carrocaña (c'est-à-dire Carrera ou Camino de Ocaña). Protégés par le secret de la nuit du vendredi saint 1489, à la lumière d'une bougie et en couvrant l'entrée de la grotte d'une couverture ou d'un manteau, ils pratiquent toutes sortes de perfidies sur l'enfant. La sentence inquisitoriale condamnant l'un des complices, le jeune juif Yucé Franco, cordonnier à Tembleque, décrit comment ils ont étendu les bras et les jambes de l'enfant sur deux bâtons placés en croix, l'ont fouetté, lui ont craché dessus et l'ont giflé, lui plaçant sur la tête une couronne d'herbes épineuses, qu'ils ont également mises sur son dos et sur la plante de ses pieds. Enfin, ils ont vidé son corps de tout son sang et, après lui avoir ouvert la poitrine, ils en ont retiré le cœur qu'ils ont conservé dans de la saumure.
Lors du crime rituel, ils ont utilisé une hostie consacrée qui, récupérée dans les bagages de Yuce au moment de son arrestation, est toujours conservée au couvent de Saint-Thomas, en Espagne, dans un récipient ressemblant à un reliquaire.

Tous les participants ont avoué séparément la même histoire, avec les mêmes détails et la même narration des événements. Si l'histoire de Yuce était fausse, cette synchronicité "télépathique" n'aurait pas pu être obtenue, même après la plus longue et la plus pénible journée de torture et de souffrance.

Les récits coïncident également avec les enregistrements de l'état du corps du garçon et du traitement de ses horribles blessures.

Ce crime donna lieu à l'ouverture d'un procès spectaculaire par le Saint-Office, dont le jury était composé des plus hauts représentants de la culture et de l'intelligentia espagnoles, des hommes nobles au caractère irréprochable, tous membres de l'université de Salamanque. Ávila devient l'épicentre des chroniques de l'époque. Les foules suivaient attentivement l'évolution de l'affaire, et lorsque ses détails glaçants furent connus, il y eut plusieurs tentatives de révoltes antijuives qui, heureusement pour eux, réussirent à être stoppées par la dictée royale.

Ce crime, comme le dit le sage juif I. Loeb, n'est pas l'un des nombreux crimes rituels qui, au Moyen Âge, étaient attribués aux Juifs, accusés de tuer des enfants chrétiens. Le cas du Santo Niño est tout à fait différent.

Son culte a commencé très tôt, car dès les visites ecclésiastiques de 1501, on trouve des références aux sanctuaires érigés dans les lieux où le tendre enfant a souffert ou a été enterré, et La Guardia l'a pris comme saint patron, célébrant une fête solennelle le jour des Saints Innocents, le 25 mars ou dans la semaine de Quasimodo (première de Pâques) ; ce n'est qu'à partir de 1580 qu'il a été voté que sa fête serait dorénavant célébrée le 25 septembre de chaque année. Les autorités religieuses ont également donné des preuves répétées de dévotion au martyr ; ainsi le cardinal Siliceo qui, en 1547, revendiqua à l'appui de son statut de purification la crucifixion du martyr, et le chapitre de l'Église primitive qui, en 1613, demanda à plusieurs cardinaux et à la Congrégation des rites l'autorisation de prier le martyr innocent au moins dans l'ensemble de l'archevêché de Tolède. C'est à l'archevêque Alonso de Fonseca que l'on doit la commande de l'ancien retable placé dans la grotte de la Crucifixion, ainsi qu'à Lorenzana d'avoir fait peindre, par la main habile de Bayéu, le martyre de l'enfant dans les cloîtres de l'église capitulaire. Il existe également des preuves de l'admiration que des monarques tels que Ferdinand V, Charles Ier et Philippe II lui portaient.


S.S. Pie VII a canonisé l'enfant assassiné sous le nom de Saint Cristóbal, autorisant son culte dans l'église de Tolède. Un autel est érigé en son honneur et le village de La Guardia conserve encore aujourd'hui sa mémoire. On se souvient de sa tragédie et de son âme comme du "Santo Niño de La Guardia".
De nombreux miracles lui sont attribués, comme la restauration de la vue de sa mère aveugle, les quatre guérisons opérées sur certaines personnes d'Alcázar de Consuegra au début de l'année 1492 ; un homme infirme, une femme dont la bouche était tordue depuis plus de dix-huit ans, un sourd total et une pauvre aveugle, ainsi que mille autres prodiges concernant des enfants estropiés et des malades de toutes sortes dont les guérisons sont détaillées sur les panneaux accrochés dans le sanctuaire de La Guardia.

Aujourd'hui, des vers composés en février 1539 par Don Diego Gracian, secrétaire de Charles Quint, lors d'un voyage de l'empereur à l'ermitage, sont conservés à l'Ermitage ; ces vers écrits en latin, traduits, se lisent comme suit :

"Passée par le couteau la tendre poitrine,
et le sang en jaillit,
l'Enfant dit : si dans un amour si étroit
tu cherches mon cœur, mauvaise fureur,
cherchez-le de l'autre côté, pas du côté droit".